Nations Unies

CERD/C/BEN/CO/1-9

Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

16 septembre 2022

Original : français

Comité pour l ’ élimination de la discrimination raciale

Observations finales concernant le rapport du Bénin valant rapport initial et deuxième à neuvième rapports périodiques *

1.Le Comité a examiné le rapport du Bénin valant rapport initial et deuxième à neuvième rapports périodiques à ses 2895e et 2896e séances, les 9 et 10 août 2022. À sa 2918e séance, le 25 août 2022, il a adopté les présentes observations finales.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’État partie valant rapport initial et deuxième à neuvième rapports périodiques, bien qu’il ait été soumis avec retard. Il se félicite du dialogue constructif engagé avec la délégation de haut niveau de l’État partie, et la remercie pour les informations détaillées qu’elle lui a fournies lors de l’examen du rapport.

B.Aspects positifs

3.Le Comité note avec satisfaction les mesures législatives et institutionnelles suivantes prises par l’État partie :

a)La loi no 2006-04 du 10 avril 2006 portant conditions de déplacement des mineurs et répression de la traite d’enfants en République du Bénin ;

b)La loi no 2015-07 du 20 mars 2015 portant Code de l’information et de la communication en République du Bénin, qui pénalise les discours de haine, y compris ceux qui incitent à la haine et à la violence ;

c)La loi no 2012-36 du 15 février 2013 portant création de la Commission béninoise des droits de l’homme.

4.Le Comité note aussi avec satisfaction que l’État partie a ratifié tous les principaux instruments relatifs aux droits humains et leurs protocoles, ainsi que les principaux instruments régionaux, ou y a adhéré.

C.Préoccupations et recommandations

Collecte de données

5.Le Comité prend note des informations démographiques fournies par l’État partie concernant la répartition des différents groupes ethniques ainsi que les populations étrangères. Il regrette cependant l’absence d’informations spécifiques sur les demandeurs d’asile, les réfugiés et les apatrides. Il regrette aussi que les données fournies ne soient pas actualisées et ventilées, et ne permettent pas d’analyser la situation socioéconomique des différents groupes ; en outre, ces données ne permettent pas une évaluation d’ensemble, ventilée par groupe ethnique, de l’exercice des droits reconnus dans la Convention, tels que les droits au logement, à l’éducation, à l’emploi et aux soins de santé (art. 1er et 2).

6. Le Comité recommande à l ’ État partie de produire des données statistiques ventilées par sexe et par âge sur la situation socioéconomique des groupes ethniques ainsi que des étrangers, notamment des demandeurs d ’ asile, des réfugiés et des apatrides , et sur leur représentation dans l ’ accès à l ’ éducation, à l ’ emploi, aux soins de santé et au logement ainsi que dans la vie publique et politique, le cas échéant, en vue de créer une base empirique permettant d ’ évaluer la jouissance, dans des conditions d ’ égalité, des droits consacrés par la Convention.

Définition de la discrimination raciale

7.Le Comité prend note des diverses lois interdisant la discrimination raciale, ainsi que de l’article 26 de la Constitution (modifié par la loi no 2019-40 du 7 novembre 2019), qui garantit l’égalité devant la loi sans distinction de « race ». Toutefois, il reste préoccupé par l’absence, dans ces dispositifs, d’une définition harmonisée et complète de la discrimination raciale intégrant tous les motifs prévus à l’article premier de la Convention (art. 1er et 2).

8. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter une loi générale contre la discrimination, comportant une définition de la discrimination raciale conforme à l ’ article premier de la Convention, et interdisant explicitement la discrimination directe et indirecte dans les sphères publique et privée.

Application de la Convention dans l’ordre juridique interne

9.Le Comité prend note de l’article 147 de la Constitution, qui dispose que « [l]es traités ou accords régulièrement ratifiés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie ». Toutefois, il est préoccupé par l’absence de cas dans lesquels les dispositions de la Convention ont été portées devant les tribunaux nationaux (art. 2).

10. Le Comité invite l ’ État partie à prendre des mesures appropriées, notamment en s ’ appuyant sur la formation, pour faire en sorte que les juges, les procureurs , les avocats et les membres des forces de l ’ ordre connaissent suffisamment les dispositions de la Convention, afin de pouvoir les invoquer ou les appliquer, selon qu ’ il convient. Il demande à l ’ État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des exemples précis d ’ application de la Convention par les tribunaux nationaux.

Institution nationale des droits de l’homme

11.Le Comité note, malgré un retard considérable, la mise en place en 2019 de la nouvelle Commission béninoise des droits de l’homme, conformément à la loi no 2012-36 du 15 février 2013. Il se félicite que l’Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l’homme lui ait accordé le statut « A » en mars 2022. Il regrette, toutefois, que la Commission ne soit pas encore dotée de ressources humaines et financières suffisantes pour s’acquitter efficacement de son mandat, et que les recommandations émises par l’Alliance concernant le besoin de renforcer ses procédures internes afin de garantir son indépendance n’aient pas encore été mises en œuvre. Le Comité regrette également l’absence d’informations concernant les activités de la Commission en matière de discrimination raciale (art. 2).

12. Le C omité recommande à l ’ État partie de s ’ approprier l es recommandations émises en mars 2022 par l ’ Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l ’ homme visant des mesures supplémentaires pour garantir le fonctionnement indépendant de la Commission béninoise des droits de l ’ homme et un financement approprié lui permettant de s ’ acquitter de son mandat de manière efficace, en conformité avec les Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme (Principes de Paris). Il invite également l ’ État partie à fournir dans son prochain rapport périodique des informations sur les activités de la Commission en matière de discrimination raciale.

Plaintes pour discrimination raciale et voies de recours

13.Le Comité relève avec préoccupation, à la lumière des informations fournies par l’État partie, qu’aucune plainte pour des actes de discrimination raciale, pour des discours et crimes de haine raciste ou pour incitation à la haine raciale n’aurait été portée devant les tribunaux nationaux, la Commission béninoise des droits de l’homme ou le Médiateur de la République durant la période couverte par le rapport (art. 2 et 6).

14.Le Comité rappelle que, conformément à sa recommandation générale n o  31 (2005) sur la discrimination raciale dans l ’ administration et le fonctionnement du système de justice pénale, l ’ absence de plaintes, de poursuites et de jugements concernant des actes de discrimination raciale ne signifie pas l ’ absence de discrimination raciale dans un État partie. L ’ absence de plaintes peut au contraire être le signe d ’ une mauvaise connaissance des voies de recours judiciaires disponibles, d ’ un manque de confiance dans le système de justice ou de la peur de représailles de la part des victimes. Le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour fournir au grand public des informations sur la discrimination raciale et sur les voies de recours juridictionnelles et non juridictionnelles qui leur sont ouvertes. Il demande à l ’ État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les mesures qu ’ il aura prises à ce sujet, notamment des données statistiques sur les plaintes soumises à toutes les autorités compétentes et sur leur issue. Ces informations devraient couvrir le nombre et les types de plaintes déposées, les enquêtes menées, les poursuites engagées, les condamnations et sanctions prononcées ainsi que les réparations accordées aux victimes, le tout ventilé par voie de recours engagée.

Crimes et discours de haine raciste

15.Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie dans son rapport sur l’adoption d’un éventail de lois interdisant les crimes et discours de haine. Il est néanmoins préoccupé par les allégations rapportées dans la presse de propos xénophobes, sectaires et ethnocentriques tenus par certains acteurs politiques lors de la campagne de l’élection présidentielle de 2016, et qui n’ont pas été abordées dans le rapport périodique de l’État partie. Le Comité est également préoccupé par l’absence d’informations sur les enquêtes et les poursuites qui auraient été menées et les condamnations prononcées par les tribunaux sur ces faits (art. 2, 4 et 6).

16. Rappelant ses recommandations générales n o  15 (1993) concernant l ’ article 4 de la Convention et n o  35 (2013) sur la lutte contre les discours de haine raciale, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De c ondamner publiquement tout propos de haine raciste ou discours haineux tenus par des hommes politiques ou des figures publiques , en particulier lors de campagne s électorale s  ;

b) De p rendre des mesures efficaces pour encourager le signalement des discours de haine raciste et des crimes haineux, faciliter le dépôt de plaintes à ce sujet, mener des enquêtes, poursuivre les auteurs et les condamner , s ’ il y a lieu, à des peines adéquates , et de recueillir des données sur ces différents éléments afin de les inclure dans son prochain rapport périodique ;

c) D ’ é laborer et de mettre en œuvre des programmes de formation sur les crimes et les discours de haine à l ’ intention des policiers, des procureurs, des juges et des autres responsables de l ’ application des lois, notamment sur les méthodes permettant d ’ identifier et d ’ enregistrer les crimes et les cas de discours de haine raciste , d ’ enquêter sur ces crimes et d ’ e n poursuivre les responsables.

Plan national d’action contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée

17.Le Comité regrette que le plan national d’action contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance, adopté en octobre 2014, n’ait été que partiellement mis en œuvre, faute de financements adéquats. Il relève toutefois avec intérêt les informations fournies pendant le dialogue concernant certaines initiatives entreprises dans le cadre du plan, notamment en ce qui concerne la diffusion d’informations aux populations dans les langues nationales, mais regrette qu’aucune évaluation n’ait été menée, empêchant le Comité d’en analyser l’impact (art. 2).

18. Le Comité encourage l ’ État partie à é valuer la mise en œuvre du plan national d ’ action de 2014 et d ’ en envisager la suite . Il recommande à l ’ État partie de veiller à associer toutes les parties prenantes au processus d ’ élaboration d ’ un nouveau p lan national d ’ action contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l ’ intolérance , notamment les acteurs de la société civile , d ’ allouer un budget adéquat à sa mise en œuvre et de mettre en place un système rigoureux d ’ évaluation.

Accès à la justice

19.Le Comité relève qu’un projet de loi sur l’aide juridictionnelle est en cours d’adoption, lequel renforcera l’accès effectif pour tous à la justice. Il salue l’indication fournie par la délégation de l’État partie lors du dialogue, selon laquelle ce projet de loi ne contiendra aucun dispositif discriminatoire et, à ce titre, sera accessible aux non-nationaux dans les mêmes conditions applicables aux ressortissants béninois. Le Comité est cependant préoccupé par le fait que cette réforme n’a pas encore été adoptée (art. 5 et 6).

20. Le Comité encourage l ’ État partie à accélérer l ’ adoption du projet de loi sur l ’ aide juridictionnelle , afin de garantir aux victimes de discrimination raciale, aux minorités ethniques et aux non-nationaux un accès à la justice dans des conditions d ’ égalité, et notamment :

a) De doter les services d ’ aide juridictionnelle de ressources financières et humaines suffisantes ;

b) De sensibiliser la population afin que l ’ aide juridictionnelle soit effectivement disponible à tous  ;

c) De rapprocher les tribunaux nationaux des régions où vivent des groupes minoritaires, y compris en renforçant les capacités du système judiciaire dans les zones rurales.

Situation des peuples autochtones

21.Le Comité est préoccupé par l’approche de l’État partie consistant à définir les peuples autochtones uniquement sur la base de leur présence antérieure par rapport aux autres populations, sans considération du critère d’autodétermination prescrit dans les dispositions de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Le Comité est également préoccupé par le fait que cette approche risque de pérenniser la marginalisation des groupes qui s’identifient en tant que communautés autochtones au Bénin, et d’accentuer les discriminations directes et indirectes à leur égard (art. 1er et 5).

22. Rappelant sa recommandation générale n o  23 (1997) sur les droits des populations autochtones, le Comité exhorte l ’ État partie à revoir son approche et à reconnaître légalement l ’ existence des populations autochtones sur son territoire en se basant sur le principe de l ’ autodétermination , pour ainsi procéder à leur recensement, et à fournir des données à cet égard dans son prochain rapport périodique. Il recommande à l ’ État partie d ’ élaborer , dans un délai précis , une stratégie nationale sur les peuples autochtones , et de mettre en place un cadre juridique complet à leur égard , avec la participation effective et significative des peuples autochtones ainsi que des organisations de la société civile et de la Commission béninoise des droits de l ’ homme, en vue de prévoir des mesures spéciales et concrètes pour la protection de s droits de ces populations .

Transmission de la nationalité

23.Tout en prenant note des informations fournies par l’État partie sur l’adoption prochaine d’un nouveau code de la nationalité, le Comité reste préoccupé par le fait qu’une femme béninoise ne peut pas transmettre sa nationalité béninoise à un conjoint étranger ou à des enfants nés d’un père étranger dans les mêmes conditions que les hommes béninois (art. 2 et 5).

24. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accélérer l ’ adoption du nouveau c ode de la nationalité, afin de mettre un terme à la discrimination envers l a femme béninoise en matière de transmission de la nationalité.

Apatrides

25.Le Comité note les efforts menés par l’État partie pour régler le problème de l’apatridie, en particulier le programme d’identification lancé en 2017, ayant permis de fournir des pièces d’identité à un grand nombre de personnes, et l’intention d’intégrer le principe du jus soli aux enfants de nationalité ou de filiation inconnues dans le nouveau code de la nationalité en cours de rédaction. Toutefois, il reste préoccupé par la situation d’un grand nombre de personnes apatrides habitant l’île aux Oiseaux, sur laquelle le Bénin exerce sa juridiction depuis le prononcé d’un arrêt de la Cour internationale de Justice en 2005 relatif à un différend frontalier entre le Bénin et le Niger, et par le fait qu’une solution n’a toujours pas été trouvée (art. 2 et 5). Tout en saluant l’adoption d’un plan d’action national contre l’apatridie en 2014, le Comité regrette le manque d’informations fournies par l’État partie sur sa mise en œuvre et les éventuelles évaluations menées.

26.Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accélérer et d ’ améliorer l ’ accès à l ’ inscription des naissances dans le cadre du programme d ’ identification lancé en 2017, de respecter son engagement de permettre à tous les habitants de l ’ île aux Oiseaux souhaitant demander la nationalité béninoise de le faire, et d ’ accélérer l ’ adoption du nouveau c ode de la nationalité, établissant l ’ application du principe du jus soli aux enfants de nationalité ou de filiation inconnues. Il recommande également à l ’ État partie de fournir dans son prochain rapport périodique des informations plus détaillées sur la mise en œuvre et l ’ évaluation du p lan d ’ action national contre l ’ apatridie.

Demandeurs d’asile et réfugiés

27.Le Comité note les informations fournies par la délégation de l’État partie sur les efforts menés pour intégrer les réfugiés et demandeurs d’asile. Il regrette néanmoins l’absence de renseignements sur les conditions d’accès à l’assurance maladie universelle, les conditions d’accès à la naturalisation pour les personnes bénéficiant du statut de réfugié, et l’adoption du projet de loi portant statut des réfugiés et apatrides au Bénin transmis au Parlement en février 2021 (art. 2 et 5).

28. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accélérer l ’ adoption du projet de loi portant statut des réfugiés et apatrides au Bénin , et de poursuivre sa politique d ’ asile basée sur l ’ intégration et la non-discrimination . Il invite l ’ État partie à fournir des informations complètes et actualisées sur les conditions d ’ accueil des demandeurs d ’ asile et des réfugiés dans son prochain rapport périodique .

Situation des personnes atteintes d’albinisme

29.Tout en notant les informations fournies par la délégation de l’État partie lors du dialogue, le Comité est préoccupé par des rapports faisant état d’actes de discrimination et de stigmatisation des personnes atteintes d’albinisme dans divers aspects de la vie quotidienne, ainsi que d’agressions physiques extrêmes, souvent basées sur des croyances relevant de la sorcellerie et du fait de leur couleur de peau. Le Comité constate aussi avec préoccupation que ces personnes sont victimes de discriminations passives liées au manque de prise en compte de leur déficience visuelle (art. 2, 5, 6 et 7).

30. Le Comité recommande à l ’ État partie de garantir en priorité le droit à la vie des personnes atteintes d ’ albinisme. Il l ’ exhorte à prendre des mesures plus efficaces pour protéger ces personnes contre la violence, les enlèvements et la discrimination, et à veiller à ce qu ’ elles aient accès à l ’ éducation, à la santé et à l ’ emploi dans des conditions d ’ égalité. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter une stratégie d ’ ensemble, s ’ appuyant sur les recommandations présentées dans le r apport de l ’ Experte indépendante sur l ’ exercice des droits de l ’ homme par les personnes atteintes d ’ albinisme sur le Plan d ’ action régional concernant l ’ albinisme en Afrique (2017 ‑ 2021 ) . Dans ce cadre, l e Comité recommande à l ’ État partie  de mener des enquêtes complètes et approfondies sur tous les cas signalés d ’ agression de personnes atteintes d ’ albinisme, y compris les cas identifiés par les organisations de la société civile , de mettre fin à l ’ impunité pour les auteurs de ces actes et de mener des campagnes d ’ éducation de la population sur l ’ albinisme, afin de lutter contre les préjugés et les croyances qui y sont faussement associés .

Traite des personnes

31.Le Comité note les diverses mesures prises par l’État partie dans le cadre de la lutte contre la traite des personnes, dont la signature d’accords bilatéraux avec des pays de la sous‑région et des actions interministérielles pour lutter contre le problème spécifique de l’exploitation des travailleurs migrants béninois dans les États du Golfe. Il reste préoccupé, néanmoins, par la persistance de la traite à l’étranger d’enfants et de travailleurs migrants béninois, parfois dans des conditions assimilables à de l’esclavage (art. 2, 5, 6 et 7).

32. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accélérer ses efforts pour combattre la traite des personnes , en particulier en veillant à une application effective de sa législation contre la traite des personnes et d ’ autres mesures administratives, d’ enquêter sur les faits de traite des personnes et d’ en poursuivre les auteurs, de faciliter le signalement des faits de traite, et de condamner les auteurs à des peines adéquates. Il recommande également à l ’ État partie de poursuivre ses efforts pour lutter contre les mauvais traitements infligés aux travailleurs migrants béninois engagés à l ’ étranger , en coopération avec les États où ils résident. Il invite l ’ État partie à fournir dans son prochain rapport périodique des données sur la traite des êtres humains, y compris des informations sur les affaires jugées par les tribunaux et les recours offerts aux victimes.

Politique linguistique

33.Le Comité prend note de la politique linguistique de l’État partie dans l’éducation, basée sur l’article 8 de la loi no 2003-17 du 11 novembre 2003 portant orientation de l’éducation nationale en République du Bénin, qui prône une approche pragmatique de la diversité ethnolinguistique du pays en disposant que l’enseignement « est dispensé principalement en français, en anglais et en langues nationales ». Toutefois, il est préoccupé au sujet des critères appliqués pour la sélection des langues nationales utilisées dans le système scolaire béninois, et par l’incapacité qui en résulte d’évaluer le risque de discrimination envers les groupes ethniques dont la langue n’est pas reconnue comme langue nationale, et envers les Béninois ne parlant pas le français (art. 2 et 5).

34. Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre son ambition en ouvrant l ’ accès à l ’ éducation dans toutes les langues nationales le plus rapidement possible, tout en tenant compte des contraintes relatives aux ressources humaines et financières. Il encourage l ’ État partie à mener cette réforme dans la plus grande transparence, en associant toutes les parties prenantes, notamment celles issues de la société civile. Le Comité encourage également l ’ État partie à tenir compte de la partie significative de la population ne parlant pas le français lors de la conception et de la mise en œuvre de s politique s et service s publics, comme c ’ est déjà le cas dans un certain nombre de domaines, afin de garantir l ’ accès à tous sans discrimination.

Éducation aux droits humains et à la mémoire de la traite transatlantique des esclaves

35.Tout en notant les diverses mesures décrites par la délégation de l’État partie lors du dialogue en matière d’éducation à la mémoire de la traite transatlantique des esclaves, notamment le projet de construction du Musée international de la mémoire et de l’esclavage à Ouidah et la valorisation à cette fin des biens culturels restitués par l’ancien pays colonisateur et d’autres pays, le Comité regrette que des informations plus détaillées n’aient pas été fournies dans le rapport de l’État partie à ce sujet. Il regrette également que des informations plus détaillées n’aient pas été fournies au sujet des mesures prises pour promouvoir l’éducation en matière de droits humains auprès de la population en général et dans les milieux scolaires, et pour promouvoir la bonne entente et la tolérance entre les différents groupes vivant sur le territoire, afin de combattre les préjugés et la stigmatisation (art. 7).

36. Le Comité recommande à l ’ État partie de fournir dans son prochain rapport périodique des informations détaillées sur le contenu et la mise en œuvre de l ’ ensemble de s mesures envisagées en matière d ’ éducation à la mémoire de la traite transatlantique des esclaves , et leur impact en matière de sensibilisation, de réconciliation et de cohésion nationale. Il recommande également à l ’ État partie de poursuivre et de renforcer l ’ éducation aux droits humains de manière générale, aussi bien dans les milieux scolaires que dans la population dans son ensemble, et de fournir des informations sur ces mesures et leur impact dans son prochain rapport périodique.

D.Autres recommandations

Ratification d’autres instruments

37. Compte tenu du caractère indivisible de tous les droits humains, le Comité encourage l ’ État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits humains auxquels il n ’ est pas encore partie, en particulier ceux dont les dispositions intéressent directement les communautés qui peuvent faire l ’ objet de discrimination raciale, comme la Convention de 2011 sur les travailleuses et travailleurs domestiques (n o  189) de l ’ Organisation internationale du Travail. Le Comité encourage l ’ État partie à accepter la procédure de plaintes individuelles énoncée dans le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels , ainsi que celles prévues par la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcée s, et la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille . Enfin, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ envisager de ratifier la C onvention de 1989 relative aux peuples indigènes et tribaux (n o  169) de l ’ Organisation internationale du Travail .

Amendement à l’article 8 de la Convention

38. Le Comité recommande à l ’ État partie de ratifier l ’ amendement à l ’ article 8 (par. 6) de la Convention, adopté le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvé par l ’ Assemblée générale dans sa résolution 47/111.

Déclaration visée à l’article 14 de la Convention

39. Le Comité encourage l ’ État partie à faire la déclaration facultative visée à l ’ article 14 de la Convention, par laquelle les États parties reconnaissent la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications individuelles.

Suite donnée à la Déclaration et au Programme d’action de Durban

40. À la lumière de sa recommandation générale n o  33 (2009) concernant le suivi de la Conférence d ’ examen de Durban, le Comité recommande à l ’ État partie de donner effet à la Déclaration et au Programme d ’ action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l ’ intolérance qui y est associée, en tenant compte du document final de la Conférence d ’ examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009, quand il applique la Convention. Le Comité demande à l ’ État partie d ’ inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements précis sur les plans d ’ action qu ’ il aura adoptés et les autres mesures qu ’ il aura prises pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d ’ action de Durban au niveau national.

Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine

41. À la lumière de la résolution 68/237 de l ’ Assemblée générale proclamant la Décennie internationale des personnes d ’ ascendance africaine pour 2015-2024 et de la résolution 69/16 sur le programme d ’ activités de la Décennie, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ élaborer et de mettre en œuvre un programme adapté de mesures et de politiques. Le Comité demande à l ’ État partie d ’ inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements précis sur les mesures concrètes qu ’ il aura adoptées dans ce cadre, compte tenu de sa recommandation générale n o  34 (2011) sur la discrimination raciale à l ’ égard des personnes d ’ ascendance africaine.

Consultations avec la société civile

42. Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre et d ’ élargir le dialogue avec les organisations de la société civile qui travaillent dans le domaine de la protection des droits humains , en particulier celles qui luttent contre la discrimination raciale, dans le cadre de l ’ élaboration du prochain rapport périodique et du suivi des présentes observations finales.

Diffusion d’information

43. Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre ses rapports à la disposition du public dès leur soumission et de diffuser également les observations finales du Comité qui s ’ y rapportent auprès de tous les organes de l ’ État chargés de la mise en œuvre de la Convention, y compris les autorités locales. Le Comité recommande également la mise à disposition de ces documents sur le site Web du Ministère des affaires étrangères dans la langue officielle et les autres langues couramment utilisées, selon qu ’ il conviendra.

Document de base commun

44. Le Comité encourage l ’ État partie à mettre à jour son document de base commun , qui date de 1997, conformément aux directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, en particulier celles concernant le document de base commun, adoptées à la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d ’ instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme tenue en juin 2006 . À la lumière de la résolution 68/268 de l ’ Assemblée générale, le Comité demande instamment à l ’ État partie de respecter la limite de 42 400 mots fixée pour ce document .

Suite donnée aux présentes observations finales

45. Conformément à l ’ article 9 (par. 1) de la Convention et à l ’ article 65 de son règlement intérieur, le Comité demande à l ’ État partie de fournir, dans un délai d ’ un an à compter de l ’ adoption des présentes observations finales, des renseignements sur la suite qu ’ il aura donnée aux recommandations figurant dans les paragraphes 16 c) (crimes et discours de haine raciste), 18 (plan national d ’ action contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l ’ intolérance qui y est associée ) et 24 (transmission de la nationalité) ci-dessus .

Paragraphes d’importance particulière

46. Le Comité souhaite appeler l ’ attention de l ’ État partie sur l ’ importance particulière des recommandations figurant dans les paragraphes 12 (institution nationale des droits de l ’ homme), 26 (apatrides), 30 (situation des personnes atteintes d ’ albinisme) et 36 (éducation aux droits humains et à la mémoire de la traite transatlantique des esclaves) ci-dessus, et lui demande de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu ’ il aura prises pour y donner suite.

Élaboration du prochain rapport périodique

47. Le Comité recommande à l ’ État partie de soumettre son rapport valant dixième à treizième rapports périodiques d ’ ici au 30 novembre 2026 , en tenant compte des directives pour l ’ établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session et en traitant de tous les points soulevés dans les présentes observations finales. À la lumière de la résolution 68/268 de l ’ Assemblée générale, le Comité demande instamment à l ’ État partie de respecter la limite de 21 200 mots fixée pour les rapports périodiques et la limite de 42 400 mots fixée pour le document de base commun.