Nations Unies

CERD/C/BEL/20-22

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

15 août 2019

Original : français

Anglais, espagnol et français seulement

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Rapport valant vingtième à vingt-deuxième rapports périodiques soumis par la Belgique en application de l’article 9 de la Convention, attendu en 2018*,**

[Date de réception : 3 mai 2019]

Table des matières

Page

Introduction3

Article 1 : Définition de la discrimination3

A.Le cadre légal3

B.Définitions4

Article 2 : Politique visant à combattre le racisme4

A.Engagements internationaux4

B.Modifications et évolutions constitutionnelles et législatives4

C.Autres mesures5

Article 4 : Condamnation de toute propagande et organisations racistes13

Article 5 : Interdiction de la discrimination sous toutes ses formes14

A.Les personnes d’origine étrangère dans le système de justice pénale14

B.Les personnes d’origine étrangère sur le marché du travail14

C.L’accès des personnes d’origine étrangère à un logement décent22

D.L’accès des personnes qui séjournent illégalement en Belgique aux services de santé24

E.L’accès des migrants originaires de pays de l’Union européenne aux services sociaux24

F.L’acquisition de la nationalité belge25

G.Le regroupement familial26

H.Ratification de la Convention 1961 sur la réduction des cas d’apatride26

I.Roms et gens du voyage26

J.Demandeurs d’asile et les mesures non privatives de liberté31

K.Règlement Dublin III32

L.La traite des êtres humains33

Article 6 : Voies de recours et suites judiciaires réservées aux plaintes34

Article 7 : Non-discrimination dans les domaines de l’enseignement, de l’éducation, de la culture et de l’information35

A.Le port de symboles religieux35

B.Les cultures et les langues des groupes de migrants établis sur le territoire35

Autres recommandations36

A.Déclaration et programme d’action de Durban36

B.Amendement à l’article 8 de la Convention36

Introduction

1.En application du paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (ci-après la présente Convention), la Belgique a élaboré un nouveau rapport sur les mesures d’ordre législatif, administratif ou autres qui, sur le plan interne, donnent effets aux engagements internationaux souscrits par la ratification de la Convention.

2.On rappellera que les seizième, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième rapports périodiques de la Belgique présentés dans un seul document ont été examinés lors d’une audition orale qui s’est déroulée les 6 et 7 février 2014. Les observations finales du Comité au sujet de ce rapport ont été communiquées officiellement le 14 mars 2014.

3.Le document qui est actuellement soumis au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale s’inscrit dans la ligne du paragraphe 29 des observations finales du Comité CERD/C/BEL/CO/16-19 qui recommande à la Belgique de soumettre ses vingtième à vingt-deuxième rapports périodiques dans un document unique consistant en une mise à jour du dernier rapport et portant sur les points soulevés dans les observations finales du Comité adoptées le 14 mars 2014.

4.Le présent rapport de la Belgique s’efforce de répondre de manière détaillée aux observations susmentionnées qui figurent au point C du document CERD/C/BEL/CO/16-19 sous l’intitulé « Préoccupations et recommandations ».

5.Le présent rapport couvre une période de référence allant du 21 février 2014 au 31 décembre 2018 en ce qui concerne les données chiffrées et du 21 février 2014 au 31 mars 2019 pour les politiques et le cadre légal.

6.Il importe de rappeler que suite aux six réformes de l’État, la Belgique a évolué vers une structure fédérale unique (cf. document de base commun). Il n’existe pas de distinction hiérarchique entre le niveau fédéral et les entités fédérées (Communautés et Régions). La mise en œuvre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale est assurée par les différents niveaux de pouvoir, en fonction de leurs compétences.

7.Dans le cadre de la préparation de ce rapport, une réunion s’est tenue, le 28 mars 2019, entre des représentants des autorités belges, de la société civile et de plusieurs organismes indépendants. Une liste des institutions et organisations présentes est disponible à l’annexe 3.

Article 1: Définition de la discrimination

A.Le cadre légal

8.La législation portant un cadre fédéral en matière d’égalité de traitement et de lutte contre les discriminations est constituée de trois lois :

•La loi du 30 juillet 1981 visant à réprimer certains actes inspirés par le racisme et la xénophobie, telle que modifiée par la loi du 10 mai 2007 (M.B. du 30 mai 2007), ci-après : loi anti-racisme ;

•La loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination (MB. du 30 mai 2007), ci-après : loi anti-discrimination ;

•Et la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes (M.B. du 30 mai 2007), ci-après : loi genre.

9.Les instruments législatifs adoptés par les Régions et les Communautés (décrets et ordonnances) se retrouvent dans l’annexe 4.

B.Définitions

10.Au niveau fédéral, les définitions de la discrimination n’ont plus été modifiées depuis 2013 et sont donc identiques au dernier rapport de la Belgique. Elles se retrouvent dans l’annexe 5.

11.Les définitions retenues par les instruments législatifs adoptés par les Régions et les Communautés (décrets et ordonnances) en vue de transposer les dispositions des directives européennes précitées pour les domaines relevant de leurs compétences, sont similaires à la législation fédérale et ne devraient, dès lors, pas créer de disparités dans l’appréhension des phénomènes de discrimination en général et de discrimination raciale en particulier.

Article 2 : Politique visant à combattre le racisme

A.Engagements internationaux

12.La Belgique a ratifié (depuis 2014) :

•La Convention de l’OIT (no 187) sur le cadre promotionnel pour la sécurité et la santé au travail, 2006 (31 mai 2018) ;

•La Convention de l’OIT (no 130) concernant les soins médicaux et les indemnités de maladie, 1969 (22 novembre 2017) ;

•La Convention de l’OIT (no 172) sur les conditions de travail dans les hôtels et restaurants, 1991 (14 juin 2017) ;

•La Convention de l’OIT (no 170) sur les produits chimiques, 1990 (14 juin 2017) ;

•La Convention de l’OIT (no 128) concernant les prestations d’invalidité, de vieillesse et de survivants, 1967 (14 juin 2017) ;

•La Convention de l’OIT (no 175) sur le travail à temps partiel, 1994 (8 juin 2016) ;

•La Convention de l’OIT (no 167) sur la sécurité et la santé dans la construction, 1988 (8 juin 2016) ;

•La Convention de l’OIT (no 184) sur la sécurité et la santé dans l’agriculture, 2001 (10 novembre 2015) ;

•La Convention de l’OIT (no 189) sur les travailleuses et travailleurs domestiques, 2011 (10 juin 2015) ;

•La Convention de l’OIT (no 159) sur la réadaptation professionnelle et l’emploi des personnes handicapées, 1983 (10 juin 2015) ;

•La Convention de l’OIT (no 156) sur les travailleurs ayant des responsabilités familiales, 1981 (10 avril 2015) ;

•La Convention des Nations-Unies sur la réduction des cas d’apatridie, New York, 1961 (10 juin 2014).

13.La Belgique a ratifié la Charte sociale européenne le 16 octobre 1990 et la Charte sociale européenne révisée le 2 mars 2004, en acceptant 87 des 98 paragraphes de la Charte révisée. En juin 2015, la Belgique a accepté d’être liée par 4 dispositions additionnelles (articles 26, § 2, 27, § 1, 27, § 2, et 28 de la Charte Révisée), faisant passer le total des dispositions acceptées à 91 des 98 paragraphes.

B.Modifications et évolutions constitutionnelles et législatives

14.Les lois anti-racisme et anti-discrimination n’ont connu que quelques modifications mineures depuis 2014. D’une part, le législateur a adopté un nouveau renvoi au Centre interfédéral pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme, Unia. D’autre part, par la loi du 21 décembre 2018, le législateur prévoit une harmonisation entre le Code judiciaire et les lois spéciales telles que la loi anti-discrimination, en ce qui concerne les conditions dans lesquelles une organisation peut agir en justice.

15.Néanmoins, l’article 52 de la loi anti-discrimination prévoit que tous les cinq ans, il sera procédé à une évaluation de l’application et de l’effectivité de cette loi ainsi que de la loi genre et de la loi anti-racisme. La première évaluation de la loi aurait donc dû se faire en 2012. En 2016, une Commission de douze experts a été finalement été chargée de la mission d’évaluer les trois lois anti-discrimination. Son mandat comprend la période 2016-2021. La Commission d’experts a finalisé en février 2017 un premier rapport intermédiaire. Ce rapport comporte 33 recommandations pour augmenter l’efficacité et l’application de la législation. Des textes de lois visant à intégrer certaines de ces recommandations sont en cours d’élaboration.

C.Autres mesures

C.1Plan national de lutte contre le racisme

16.En 2001, la Belgique s’est engagée, à Durban, à élaborer un Plan d’action national contre le racisme. Le Parlement fédéral a reconfirmé cet engagement dans la Résolution fédérale du 2 juillet 2015 quant à l’introduction de contrôles ciblés en matière de discrimination au travail. La Belgique l’a également reconfirmé à son deuxième Examen Périodique Universel. Pour préparer le Plan national contre le racisme, une étude financée par le Gouvernement fédéral a été élaborée par l’Université de Gand. Celle-ci contient des recommandations politiques très concrètes pour servir de base aux négociations politiques du Plan national. En 2017, une cinquantaine d’organisations de la société civile se sont rassemblées en une Coalition, laquelle a présenté 11 propositions concrètes au gouvernement. Le nouveau ministre compétent en matière d’égalité des chances a rencontré début 2019 les acteurs de la société civile dans le cadre de l’élaboration de ce plan d’action. Des travaux de préparation sont en cours au niveau de l’administration fédérale.

17.A la suite des propositions formulées par la société civile en mai 2017, la Région de Bruxelles-Capitale a lancé l’élaboration d’un Plan d’action contre le racisme et les discriminations spécifique à la Région de Bruxelles-Capitale. Celui-ci a été adopté par le gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale en février 2019. Concrètement, le plan d’action régional se décline en 23 actions à mener sur les années 2019 et 2020. Dans le contexte fédéral belge, la région bruxelloise agit dans les domaines de compétence qui sont les siens, en particulier l’emploi et le logement.

18. Un plan d’action anti-discrimination centré sur trois objectifs, l’égalité et la diversité chez les jeunes, la diversité dans les médias, la culture et les nouveaux médias, et la cohérence de l’action publique a été adopté et mis en œuvre par la Communauté française au cours de la période 2014-2019.

C.2Les organes de promotion de l’égalité

C.2.1Création d’une institution nationale des droits de l’Homme

19.L’État belge s’est engagé dans le cadre des examens périodiques universels de 2011 et de 2016 à mettre en place une Institution nationale des droits de l’Homme répondant aux Principes de Paris. Cet engagement a également été repris dans l’Accord de gouvernement fédéral d’octobre 2014.

20.Depuis 2014, un travail a été mené afin de mettre progressivement en place cette institution. L’approche développée a consisté dans la mise en place d’un Institut national des droits de l’Homme en plusieurs étapes. La première consistait dans la création d’un Institut fédéral des droits de l’Homme disposant d’une compétence générale et résiduaire permettant que soit couvert l’ensemble des questions relevant de la compétence fédérale sans toucher aux compétences déjà attribuées à d’autres organismes, mais également une compétence de concertation et de promotion générale permettant une vision globale des droits humains, tout en respectant les compétences respectives de chaque niveau de pouvoir.

21.La piste envisagée permet que l’Institut puisse par la suite rapidement faire l’objet d’une inter fédéralisation. Par la conclusion d’un accord de coopération entre l’État fédéral et les entités fédérées, une couverture totale des droits de l’Homme est assurée également au niveau des entités fédérées et peut ainsi achever le paysage belge de protection et de promotion des droits fondamentaux. Une telle approche permettrait également de répondre aux exigences des Principes de Paris.

22.Les travaux relatifs au projet de loi en vue de la création d’un Institut national des droits de l’Homme ont été retardés suite à la crise gouvernementale qui a provoqué la démission du Gouvernement en décembre 2018. Le texte a été déposé au Parlement fédéral sous la proposition de loi 54/3670 portant création d’un Institut fédéral pour la protection et la promotion des droits Humains. Cette proposition est, à la date de rédaction de ce rapport, en cours d’examen au sein de la Commission des affaires étrangères du Parlement fédéral. 

23.Par ailleurs, la Plateforme droits de l’Homme est une initiative commune de 15 institutions publiques indépendantes qui ont un mandat de protéger et de promouvoir certains droits fondamentaux de toutes les personnes vivant en Belgique. Ces institutions se rencontrent une fois par mois. Elles se concertent sur les matières d’intérêt général et elles reçoivent également des invités extérieurs (Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, service droits de l’Homme du SPF justice ou du SPF affaires étrangères, société civile, etc.).

C.2.2Le budget de Myria

24.En 2018, le budget total de Myria s’élevait à 1 995 984 €. Les financements structurels suivants ont été attribués à Myria : gouvernement fédéral (ligne budgétaire Service public fédéral Emploi), 718 000 € ; Loterie Nationale, 872 319 €.

25.En 2018, Myria a par ailleurs reçu du financement pour certains projets. Premièrement, en coopération avec l’UNHCR dans le cadre d’un projet concernant le regroupement familial pour les personnes bénéficiant de la protection internationale, Myria a reçu 64 000 €. Deuxièmement, pour son implication en tant que partenaire du point de contact belge du Réseau européen des migrations, Myria a reçu 81 665 €. Pour sa participation au projet de recherche « Immigbel », une recherche sur la position des migrants sur le marché du travail du Service public de programmation de la Politique scientifique fédérale, Myria a reçu 20 000 € (1ère tranche des 80 000 € prévus). Myria a également reçu un financement unique (2018) de 200 000 € (qui couvre plusieurs années) pour le suivi de l’implémentation (partielle) de la directive 2014/54/UE concernant la libre circulation des employés.

C.2.3La collaboration entre Myria et Unia

26.Myria coopère avec Unia sur les questions relatives à la discrimination à l’égard des migrants .

27.Au niveau formel, un protocole d’accord entre Myria et Unia a été signé le 20 octobre 2017 dans lequel les deux institutions conviennent de collaborer, de se coordonner et d’être en mesure d’assurer une représentation auprès de l’European Network of National Human Rights. Unia et Myria conviennent également de collaborer, de se coordonner et de remettre des contributions conjointes au nom des deux institutions dans le cadre du rapportage auprès des Nations Unies et auprès du Conseil de l’Europe.

28.Dans la pratique, cette collaboration se reflète par un partage de services transversaux et une relation étroite. En outre, les membres du Conseil d’administration de Myria siègent également au Conseil d’administration d’Unia. Sur les dossiers de fond, les collaborations avec Unia sont nombreuses et reflètent un socle de valeurs communes partagées par les deux institutions. Myria et Unia tiennent régulièrement des réunions de direction et de bureau communes. L’un des collaborateurs de Myria agit en tant qu’officier de liaison pour les thématiques communes, en ce compris les dossiers individuels. Myria contribue également à la réalisation du « Monitoring socioéconomique » d’Unia et du SPF Emploi.

C.3Mesures spéciales

29.L’arrêté royal du 11 février 2019 concernant les actions positives (mesures spéciales) qu’un employeur peut mener à l’égard des groupes à risque (jeunes, personnes faiblement scolarisées, travailleurs âgés de 55 ans et plus, personnes issues de minorités ethniques ou migrants) a été publié au Moniteur Belge le 1er mars 2019. Cet arrêté royal vise à assurer une sécurité juridique aux employeurs qui souhaiteraient lancer ce type de mesures et vise le secteur privé.

30.L’arrêté prévoit plusieurs principes directeurs. Tout d’abord, les partenaires sociaux pourront conclure des conventions collectives de travail (CCT) au niveau de l’entreprise ou du secteur. Ces CCT définiront les actions positives qui seraient engagées en vue d’optimiser l’accès au marché du travail pour ce public cible. En outre, les entreprises pourront développer un plan positif au moyen d’un acte d’adhésion. Les CCT, ainsi que les actes d’adhésion, seront soumis à l’accord du ministre de l’Emploi ce qui permet de renforcer leur sécurité juridique.

31.Enfin, les entreprises auront la possibilité d’introduire un plan d’action au niveau de l’entreprise. Cette introduction se fera à titre purement informatif, et ne fait pas l’objet d’une procédure d’approbation. Les actions positives peuvent, par exemple, porter sur des bourses, programmes de formation, stages attribués à un groupe défavorisé ou à des groupes défavorisés.

C.4L’antisémitisme et l’islamophobie

C.4.1Vigilance et mesures de lutte contre l’antisémitisme

32.Au niveau fédéral, la cellule de veille concernant l’antisémitisme a été réactivée début 2019 (cf. document de base commun, § 190). La réactivation de la cellule de veille permet d’intensifier la coopération entre les représentants de la communauté juive, le gouvernement et les autres acteurs concernés par la lutte contre l’antisémitisme. La cellule de veille renforce l’attention portée par les pouvoirs publics belges à la lutte contre l’antisémitisme. Elle constitue un mécanisme de sensibilisation et réunit les principaux acteurs dans la lutte contre l’antisémitisme. La cellule de veille organise, de manière structurelle, la coopération et l’échange de vues, d’idées et de préoccupations entre les pouvoirs publics et la communauté juive et elle garantit des chaînes de communication très courtes entre eux. La cellule de veille peut donc s’attaquer aux préoccupations concrètes, par exemple en prenant certains engagements ou par la validation de certaines questions adressées à la police et au parquet. Depuis 2019, la présidence et le secrétariat ont été confiés à l’administration fédérale de l’Egalité des chances.

C.4.2Campagnes de sensibilisation

33.En matière de sensibilisation, une campagne fédérale contre le racisme a été lancée le 21 mars 2019 pour dénoncer les stéréotypes au moyen de vidéos qui ont été diffusées via les médias sociaux et dans les gares. La campagne est axée sur la lutte contre les préjugés raciaux.

34.En Région et Communauté flamandes, une vaste campagne de sensibilisation sur la non-discrimination, baptisée « Het is gauw gebeurd », a été menée entre septembre 2017 et mars 2018. Cette campagne visait à lutter contre la discrimination au travail. La campagne a été développée en collaboration avec les partenaires sociaux du Conseil économique et social de Flandre (Sociaal-Economische Raad voor Vlaanderen) et les organisations autonomes de groupes fragilisés (GRIP asbl et le Minderhedenforum). Au travers de cette campagne, le but était d’amener les gens à réfléchir à la discrimination et aux messages discriminatoires possibles. La campagne s’est appuyée sur un site Internet www.hetisgauwgebeurd.be, qui regroupe le matériel de campagne ainsi que toutes les informations relatives à la discrimination. Cette campagne a également permis d’avoir un meilleur aperçu des points de contact discrimination. Pour plus d’informations, il est renvoyé aux paragraphes 87 et 88.

35.En ce qui concerne la Commission Communautaire française, ci-après : COCOF, en 2016, un appel à projets extraordinaire visant le renforcement des reliances, contre le repli sur soi et la désocialisation dans les quartiers a été lancé visant notamment à lutter contre les discours de haine et la théorie du complot. Dans le cadre du quinquennat 2016-2020, la priorité « Vivre ensemble », les projets soutenus doivent veiller à déconstruire les préjugés et les stéréotypes. En collaboration avec Unia et l’Institut pour Égalité des Femmes et des Hommes, ci-après : l’IEFH, la COCOF a créé deux outils de sensibilisation à la discrimination visant à la fois les agents de l’administration (tous niveaux confondus) et les travailleurs des associations. Ces outils ont pris la forme d’un film « Le Signalement » réalisé par le Centre Vidéo de Bruxelles (2017) et d’un cahier pédagogique réalisé par BEPAX (2018). Les deux outils sont complémentaires et peuvent être utilisés à la fois par les formateurs, mais aussi par les responsables d’associations, les chefs de service, les personnes de confiance ou toute personne voulant connaître le processus de discriminations. Sur base de ces outils, des formations sont données aux agents et aux travailleurs des associations.

36.Depuis 2015, la Communauté française subventionne par des appels à projets entre 150 et 200 projets locaux et associatifs de la promotion de la citoyenneté et de l’interculturalité, en ce compris la lutte contre le racisme et la promotion des droits des migrants. En concertation avec les acteurs qui les développent, une campagne de communication grand public intitulée « Vous valez mieux que ça » (www.vousvalezmieuxqueca.be/) a été initiée en 2017 et relancée en mars 2019. Un décret du 8 mars 2018 renforce ce dispositif de subventionnement et organise une campagne de lutte contre le racisme au moins tous les deux ans. Un budget de 2 200 000 € est alloué à cette politique.

37.En Communauté germanophone, le centre de référence pour l’intégration et la migration a entre autres la mission de sensibiliser la population. Le centre a lancé une vaste campagne contre le racisme pour dénoncer les stéréotypes et afin de lutter contre les préjugés raciaux. Une partie de la campagne était un dépliant expliquant les préjugés sur les réfugiés et les contre-arguments. De plus, le ministère organise plusieurs Workshops pour des organisations sociales en collaboration avec Unia afin de lutter contre les discours de haine.

C.4.3L’enquête, la poursuite et la punition des auteurs et la protection des victimes

38.La circulaire relative à la politique de recherche et de poursuite en matière de discriminations et de délits de haine (en ce compris les discriminations fondées sur le sexe), la Circulaire no COL 13/2013, a été adoptée par le ministre de la Justice, le ministre de l’Intérieur et le Collège des procureurs généraux. Celle-ci prévoit la désignation de magistrats de référence aux différents niveaux judiciaires ainsi qu’un fonctionnaire de police de référence au sein de chaque zone de police locale, dans toutes les composantes de la police fédérale qui exécutent des missions de première ligne et dans les autres composantes en fonction des nécessités.

39.Les compétences de ces magistrats et policiers de référence s’étendent à toute la matière des discriminations et délits de haine visés notamment par la loi anti-racisme, la loi anti-discrimination, la loi genre et par la loi du 23 mars 1995 dite « loi négationnisme ». Leurs missions particulières sont décrites de façon détaillée dans la circulaire.

40.Les objectifs poursuivis par cette circulaire sont notamment de sensibiliser les acteurs à la problématique et au dispositif législatif existant, de favoriser une identification et un encodage plus efficaces des faits de discrimination et des délits de haine, de renforcer la collaboration entre les acteurs et de donner des directives de politique criminelle en vue d’améliorer la qualité des enquêtes et, de façon générale, l’orientation et le traitement de ces dossiers.

41.La circulaire impose au ministère public de rappeler l’auteur des faits aussi vite que possible au respect des normes de comportement en vigueur selon la forme la plus adaptée aux faits, à la personnalité de l’auteur et à celle de la victime, sans tomber dans les automatismes. Le classement sans suite pour des motifs d’opportunité est proscrit. Dans les cas les plus graves (atteinte grave à l’intégrité de la victime, incendie, organisation criminelle, récurrence des faits, atteinte grave à l’ordre public), la saisine d’un juge d’instruction en vue d’obtenir un mandat d’arrêt ou la citation directe de l’auteur devant le tribunal correctionnel est recommandée. Les autres possibilités de réaction, parmi lesquelles la médiation pénale, sont rappelées aux magistrats.

42.La formation et la sensibilisation des acteurs sont un enjeu crucial en cette matière. Un certain nombre d’initiatives sont prises en ce sens, telles que :

•Une formation spécialisée en matière de discriminations et de délits de haine, organisée par l’Institut de Formation Judiciaire, élaborée en collaboration avec Unia et l’IEFH et obligatoire pour les stagiaires judiciaires de deuxième année, s’est tenue pendant deux journées en avril 2018 et en février 2019 ;

•Une réflexion sera menée quant à l’opportunité d’organiser également une formation spécialisée à destination des magistrats de référence ;

•Unia a dispensé une formation à destination des policiers de référence en présence du magistrat de référence dans presque chaque arrondissement du pays (les dernières formations sont programmées) ;

•Le groupe de travail « COL 13/2013 » réunissant les différents acteurs a repris ses travaux le 12 décembre 2018 ;

•Une assemblée générale des magistrats de référence a été organisée le 1er mars 2019.

43.Par ailleurs, une recherche est actuellement menée, en collaboration avec l’Institut National de Criminalistique et de Criminologie, la Fondation Roi Baudouin, Unia, l’IEFH et le Collège des procureurs généraux pour analyser deux phénomènes constatés, soit le « sous-rapportage » (très peu de plaintes déposées) et le taux élevé de classement sans suite pour des motifs techniques.

44.En Belgique, l’accueil et l’aide aux victimes des infractions est une compétence des Communautés.

45.Il existe 28 maisons de justice qui possèdent chacune un service d’accueil des victimes (14 sont de la compétence de la Communauté flamande, 13 de la Communauté française et 1 de la Communauté germanophone). Les services d’accueil des victimes fournissent aux victimes et à leur proches des informations sur la procédure judiciaire en cours et des informations spécifiques sur leur dossier (p.e. une explication de la signification des actes d’enquête).Ils soutiennent et accompagnent les victimes et leur proches durant toute la procédure judiciaire (par exemple lors de la restitution des pièces à conviction ou la reconstitution) et, si nécessaire, ils orientent les victimes vers des services spécialisés.

46.L’aide aux victimes consiste en de l’aide sociale, psychosociale, juridique ou pratique en vue d’offrir une approche globale des différentes conséquences de l’infraction et ceci à court, moyen ou long terme, et indépendamment de la plainte de la victime. L’aide aux victimes est organisée par des services reconnus et subsidiés par les Communautés : en Communauté flamande, l’aide aux victimes est offerte par les « Centra Algemeen Welzijnswerk (CAW’s) » (11), en Communauté française par les Services d’aide aux victimes (20) et en Communauté germanophone par le Sozial-Psychologisches Zentrum.

47.L’offre des services d’accueil des victimes et des services reconnus pour l’aide aux victimes est gratuite.

C.4.4L’étude des causes sous-jacentes de l’antisémitisme et de l’islamophobie

Antisémitisme

48.Unia a constaté en 2015 une baisse sensible des signalements d’antisémitisme : 20 dossiers ont été ouverts sur la base de 57 signalements. La parole négationniste via les réseaux sociaux reste quant à elle très présente. En 2016, Unia a connu un pic de signalements d’antisémitisme et de négationnisme, avec 109 faits portés à sa connaissance. C’était le 3e pic observé en dix ans. Les pics observés en 2009 (108 signalements) et 2014 (130 signalements) étaient en grande partie liés aux deux opérations menées par l’armée israélienne dans la bande de Gaza. Ces deux opérations ont en effet suscité de nombreuses réactions. Parmi les critiques de la politique israélienne, on trouvait tant des commentaires antisémites que des commentaires négationnistes, mêlant souvent les deux. Ce n’est pas le cas en 2016, même si le conflit israélo-palestinien continue à alimenter l’hostilité de certains à l’égard des Juifs.

49.Dès lors, Unia considère que l’influence des attentats commis le 22 mars 2016 à Bruxelles et Zaventem ne peut être écartée. De manière générale, un bon tiers des signalements a trait à des déclarations figurant sur Internet, essentiellement sur les réseaux sociaux. Et s’il y a eu une stabilisation, voire une baisse des signalements relatifs à des agressions verbales et des menaces, à des actes de vandalisme et de détérioration de bâtiments (de synagogues, notamment) depuis 2015, les signalements qui relèvent du négationnisme (approbation et justification du régime nazi) ne cessent de croître. Les actes de violence physique restent minoritaires, la tuerie du Musée Juif de Bruxelles en mai 2014 restant une tragique exception.

50.Après un pic de signalements observé en 2016, le nombre de faits d’antisémitisme et de négationnisme présumés enregistrés par Unia en 2017 s’élève à 56. Cette diminution est à interpréter avec prudence, puisqu’elle se concentre essentiellement sur un seul secteur : Internet. Il s’agit d’un secteur pour lequel Unia observe une diminution globale des signalements, tous critères confondus. Celle-ci s’explique en partie par le fait que les internautes utilisent d’autres canaux de signalement, notamment ceux mis en place par les principaux réseaux sociaux, pour agir contre la haine en ligne. En 2018, le nombre d’incidents antisémites a pratiquement doublé, passant de 56 en 2017 à 101 en 2018.

51.Dans l’étude de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) concernant l’antisémitisme, la situation en Belgique a été examinée en détail. Ce rapport présente les conclusions principales de la deuxième enquête de la FRA sur les expériences et les perceptions des juifs en matière de crimes de haine, de discrimination et d’antisémitisme. L’étude montre entre autres que 81 % des personnes interrogées en Belgique citent l’espace public comme source la plus courante d’hostilité au cours des cinq dernières années. La moyenne européenne est d’environ 70 %.

Islamophobie

52.En 2015, Unia a traité 330 dossiers liés aux convictions religieuses ou philosophiques, soit 11 % de plus qu’en 2014. Parmi ces dossiers, 91 % concernent l’islam (301 dossiers).

53.En 2016, Unia a ouvert 390 dossiers liés aux convictions religieuses ou philosophiques. Cela représente une augmentation de 18 % par rapport à 2015. L’islam représente environ 90 % des dossiers ouverts pour le critère des « convictions religieuses ou philosophiques ». Environ 40 % de ces dossiers ont trait à des faits potentiels d’incitation à la haine dans les médias (mails en chaîne, réseaux sociaux, sites web…). 23 % des dossiers concernent le secteur de l’emploi. Avec notamment, depuis les attentats, plusieurs dossiers de retraits d’habilitations dans des sociétés de gardiennage. S’ils restent minoritaires, ils constituent toutefois des dossiers d’un type nouveau pour Unia. Par ailleurs, Unia reçoit également des dossiers ayant trait au port du foulard sur le lieu de travail (dans l’accès à l’emploi notamment) ou encore des dossiers de harcèlement au travail.

54.Unia a ouvert 319 dossiers liés aux convictions religieuses ou philosophiques en 2017 (14,2 % des dossiers). Cela représente une diminution de 18,2 % par rapport à 2016. Enfin, comme les années précédentes, l’islam est la première religion concernée (85 % des dossiers liés aux convictions religieuses ou philosophiques).

55.L’enquête EU-Midis II réalisée par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne indique qu’en Belgique, au cours des cinq dernières années, 30 % des musulmans se sont sentis discriminés en raison de leur origine ethnique ou de leurs origines migrantes, dans le domaine de la recherche d’un emploi, du travail, de l’éducation ou du logement. 19 % se sont sentis discriminés en raison de leurs convictions religieuses et 8 % en raison de la couleur de leur peau.

C.4.5Jurisprudence

56.La banque de données du Collège des procureurs généraux ne permet pas de distinguer des faits ayant un contexte spécifique lié à l’islamophobie ou l’antisémitisme, d’autres délits haineux et des faits de discrimination. Le site internet d’Unia dispose cependant d’une base de données reprenant de nombreux cas qui peuvent être filtrés par critère (racisme ou conviction religieuse par exemple).

C.5Le port de symboles religieux

57.Pour le port de symboles religieux au travail, l’arrêt Achbita se veut un arrêt charnière. Dans cet arrêt, la Cour de Justice de l’Union européenne soutient que les règles internes d’une entreprise interdisant aux employés de porter des signes visibles, politiques, philosophiques ou religieux, ne constituent pas une discrimination directe au sens de la directive relative à l’égalité en matière d’emploi. Ces règles peuvent toutefois constituer une discrimination indirecte si elles désavantagent des personnes appartenant à une religion spécifique.

58.Au niveau de la fonction publique, à la demande du Ministre de la Fonction Publique, le groupe de pilotage diversité lui a adressé un avis sur une communication officielle concernant le principe de neutralité pour les emplois vacants à la suite de l’arrêt Achbita. Cet avis n’a toutefois pas mené à une décision ministérielle.

59.En ce qui concerne le port de symboles religieux dans les Cours et tribunaux, dans l’arrêt Lachiri contre Belgique, rendu le 18 septembre 2018, la Cour européenne des droits de l’homme a jugé que l’exclusion de Mme Lachiri de la salle d’audience où se jugeait une affaire dans laquelle elle s’était portée partie civile, au seul motif qu’elle portait, par conviction religieuse, un foulard masquant ses cheveux, a constitué une violation de son droit à la liberté religieuse garanti par l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme. Pour garantir l’exécution de cet arrêt, un courrier a été envoyé par le ministre de la Justice à tous les magistrats afin de les informer de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.

60.En Belgique, il n’existe pas de législation interdisant le port de symboles religieux dans les écoles, en ce compris dans l’enseignement supérieur et dans l’enseignement de promotion sociale. Il appartient donc à chaque établissement scolaire de décider de leur autorisation ou de leur interdiction, via leur règlement d’ordre intérieur.

61.Les principes de libertés de religion et d’opinion sont en vigueur dans les écoles belges. Cependant, en Communauté flamande, la majorité d’entre elles ont adopté des mesures restrictives ces 15 dernières années. En 2013, le Gemeenschapsonderwijs/GO! (organisateur de l’enseignement officiel et un des trois réseaux d’enseignement de la Communauté flamande à côté du réseau subsidié officiel et du réseau subsidié libre) a diffusé une directive générale dans les écoles du GO! afin que celles-ci intègrent dans leur règlement d’ordre intérieur une interdiction de porter des signes philosophiques. Enfin, le Conseil d’État n’exclut pas la possibilité d’une mesure générale/niveau plus élevé que les écoles, mais que si elle vise à résoudre un problème audit niveau et que son besoin est justifié in concreto.

C.6Respect de la législation anti-discrimination par la Police

62.Toute intervention des services de police s’inscrit dans le cadre de leurs missions légales et doit répondre aux conditions strictes imposées par la loi. La police est soumise au cadre normatif en vigueur, y compris aux dispositions protectrices des droits de l’homme et des libertés fondamentales, à la législation anti-discrimination, qui interdit toute discrimination fondée sur l’origine ethnique et prévoit des sanctions pénales pour tout policier qui se rendrait coupable d’un tel acte, ou encore à la législation « protection de la vie privée », qui interdit également le traitement de données à caractère personnel révélant l’origine raciale ou ethnique d’une personne.

63.Les dispositions statutaires applicables aux services de police ainsi que leur Code de déontologie proscrivent, quant à eux, tout arbitraire dans les interventions et érigent l’impartialité en norme élémentaire. Ces principes fondamentaux sont applicables notamment à la rédaction de pièces officielles (comme les procès-verbaux) par la police, à la gestion des banques de données policières ou encore aux contrôles d’identité qu’elle effectue. Ceux-ci ne peuvent avoir lieu que dans certaines hypothèses bien définies et sur une base objective, par exemple la description physique d’une personne recherchée, pour laquelle l’origine ethnique apparente ne pourra être prise en compte que si elle constitue un élément pertinent justifiant le contrôle en l’espèce. Le profilage ethnique est donc interdit en Belgique.

64.Tout au long de leur carrière, la formation des policiers porte, de manière générale ou spécifique, sur le cadre normatif précité, les droits de l’homme et la déontologie, et permet de prévenir tout abus. Dans ce domaine, la police poursuit ses efforts afin de renforcer, tant d’un point de vue qualitatif que quantitatif, les formations du personnel en matière de droits fondamentaux, y compris sur les thèmes de la non-discrimination et du respect de la diversité. Une explication plus détaillée de ces formations est disponible à l’annexe 6.

65.Toute violation du cadre légal et des principes auxquels sont soumis les services de police est susceptible de faire l’objet de poursuites sur le plan pénal ou disciplinaire, selon les procédures existantes et sous la responsabilité des autorités compétentes. En outre, les manquements et comportements inadéquats éventuels, qu’ils aient ou non été sanctionnés sur le plan disciplinaire, sont également susceptibles d’être sanctionnés sur le plan administratif, à travers les procédures statutaires d’évaluation des membres du personnel dont le résultat influence directement, par exemple, les possibilités de promotion ou de mobilité interne durant la carrière.

66.Des mécanismes et organes de contrôle et d’évaluation des services de police dans le cadre de l’exercice de leurs missions sont établis sur le plan interne, à travers leurs propres services de contrôle internes, mais également sur le plan externe, à travers des organes indépendants qui effectuent un contrôle légal et transparent sur base ponctuelle, régulière ou systématique selon les cas, préventivement ou a posteriori, et situés au niveau des trois pouvoirs constitués de l’État :

•Au pouvoir législatif : le Comité permanent de contrôle des services de police (« Comité P ») relevant directement et exclusivement du parlement est dès lors indépendant des services de police. Sa composition, ainsi que celle de son service d’enquête, est fixée légalement ;

•Au pouvoir exécutif : l’Inspection générale de la police fédérale et de la police locale (« AIG ») L’indépendance de l’AIG par rapport aux services de police est assurée légalement et découle de sa subordination directe aux ministres de l’Intérieur et de la Justice. En outre, les activités et interventions de l’AIG font elles-mêmes l’objet d’un contrôle par le Comité P ;

•Au pouvoir judiciaire : autorités indépendantes compétentes pour la poursuite des infractions pénales commises par les membres des services de police.

67.Ces contrôles permettent, le cas échéant, d’aboutir à l’adoption des mesures correctrices qui s’imposent.

68.En ce qui concerne l’indépendance du Comité P et de son Service d’enquêtes, il convient de renvoyer aux explications détaillées fournies par l’État belge au Comité contre la torture des Nations-Unies (CAT) à propos du suivi donné à ses observations finales concernant le 3ème rapport périodique de la Belgique ainsi qu’à sa réponse à une recommandation similaire formulée par le groupe de travail sur l’Examen périodique universel (EPU), selon lesquelles « La Belgique dispose d’un mécanisme de contrôle effectif avec le Comité P, comité indépendant sous l’autorité du parlement, ce qui fournit toutes les garanties nécessaires d’indépendance et d’efficacité et d’externalité du contrôle. L’indépendance, la neutralité ou l’impartialité des enquêtes ou des membres du service d’enquêtes du Comité P n’a jusqu’à présent jamais été remise en cause ».

69.Les données chiffrées à la disposition du Comité P en matière de racisme et de discrimination, pour la période 2014 à 2017 sont reprises dans l’annexe 7. Force est de constater que parmi les jugements, arrêts et ordonnances communiqués au Comité P au cours de la période 2014 à 2017, aucune condamnation n’a été prononcée pour des faits de racisme à charge d’un policier. À noter que bien qu’il s’agisse d’une obligation légale, le Comité P a pu constater à plusieurs reprises que tous les jugements et arrêts à charge de policiers ne lui sont pas communiqués. Il s’agit dès lors ici d’un aperçu très relatif de la situation.

C.7Les procédures d’éloignement de ressortissants étrangers

C.7.1Le contrôle des procédures d’éloignement

70.Le contrôle des procédures d’éloignement relève de la compétence spécifique de l’Inspection générale de la police fédérale et de la police locale (AIG), qui a été désignée en tant qu’instance chargée d’assurer le contrôle des retours forcés. Cette mission spécifique de l’Inspection générale comprend tant les missions d’inspection proprement dites que le traitement des plaintes qui pourraient être enregistrées dans le cadre d’opérations de retour forcé.

71.Hormis les accords dans le cadre des subventions que l’AIG reçoit par l’intermédiaire du fonds européen AMIF, il n’existe pas de lignes directrices et/ou de normes sur le nombre de procédures à vérifier. L’arrêté royal du 19 juin 2012 prévoit que l’AIG effectue les contrôles des procédures d’éloignement compte tenu des ressources humaines et budgétaires disponibles. Aucun fonds spécifique structurellement intégré n’a été alloué à l’AIG pour l’exécution de cette mission.

72.Le champ d’action du Comité P en la matière est limité à sa mission générale d’enquête sur les activités et méthodes de l’Inspection générale.

73.Au niveau de la société civile, la législation fédérale prévoit que les ONG accréditées peuvent avoir accès aux centres fermés pour y déployer des activités. Cela leur permet également d’exercer un contrôle sur le processus d’éloignement.

C.7.2Le dépôt de plaintes

74.Sur base de l’article 130 de l’arrêté royal du 2 août 2002 fixant le régime et les règles de fonctionnement applicables aux lieux situés sur le territoire belge, gérés par l’Office des étrangers, où un étranger est détenu, mis à la disposition du gouvernement ou maintenu en application des dispositions citées à l’article 74/8, § 1er, de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers, le ministre de l’Intérieur a créé une commission dotée d’un secrétariat permanent chargé exclusivement de traiter les plaintes individuelles, y compris les éventuelles plaintes pour racisme, des résidents qui se trouvent dans des centres fermés pour illégaux.

75.Pour la période 2014-2018, la Commission a traité 114 dossiers de plaintes individuelles déposées par des migrants sans papiers. Pour plus de détails, voir l’annexe 8.

Article 4 : Condamnation de toute propagande et organisations racistes

76.La loi du 27 juin 1921 sur les associations sans but lucratif, les fondations, les partis politiques européens et les fondations politiques européennes contient d’ores et déjà des dispositions légales aptes à satisfaire la recommandation du Comité. Par cette loi, un tribunal peut décider la dissolution des associations sans but lucratif, ci-après : asbl, fondations et associations internationales sans but lucratif, ci-après : aisbl, dont les activités contreviennent à la loi ou à l’ordre public. Par ailleurs, la création des Fondations d’Utilité Publique et des aisbl fait l’objet d’un contrôle du ministre de la Justice et elle sera refusée si leur but contrevient à la loi ou à l’ordre public. Pour les organisations de fait, la situation s’avère plus difficile. Le droit belge ne contient pas de disposition permettant d’interdire un parti liberticide. Les partis politiques ne disposent pas de la personnalité juridique et ne peuvent dès lors être dissous. Il y a eu des propositions de révision de la Constitution pour interdire les partis liberticides, mais celles-ci n’ont jamais abouti à ce jour. Depuis 2005, il est toutefois possible de réduire le financement public d’un parti liberticide.

Article 5 : Interdiction de la discrimination sous toutes ses formes

A.Les personnes d’origine étrangère dans le système de justice pénale

77.L’État belge ne collecte pas de données ethniques sur les personnes qui passent par le système de justice pénale.

B.Les personnes d’origine étrangère sur le marché du travail

78.Au niveau fédéral, le chapitre 9 de la loi du 15 janvier 2018, qui contient diverses dispositions sur l’emploi, a introduit dans le Code pénal social la possibilité pour les inspecteurs sociaux d’effectuer des « mystery shopping » dans le contexte de la discrimination sur le lieu de travail.

79.Par leurs conventions collectives de travail (CCT), les partenaires sociaux visent également à lutter contre la discrimination et à favoriser l’intégration des personnes étrangères sur le marché du travail. En effet, une CCT conclue au sein du Conseil National du travail, la CCT no 95 du 10 octobre 2008 concernant l’égalité de traitement durant toutes les phases de la relation de travail, vise à supprimer, dans les relations de travail, toute discrimination fondée sur différents critères dont la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique. Plusieurs commissions paritaires ont également conclu des CCT en vue de lutter contre la discrimination et promouvoir la diversité. Parallèlement, un code de conduite concernant l’égalité de traitement en matière de recrutement et de sélection des travailleurs a été adopté et la Convention collective de travail no 38 relative au recrutement et la sélection des travailleurs a été modifiée pour la mettre en concordance avec ces évolutions.

80.Certains secteurs ont instauré de véritables codes de conduite à respecter par les employeurs, notamment lors du recrutement. Tel est, par exemple, le cas de la commission paritaire pour le travail intérimaire et les entreprises agréées fournissant des travaux ou services de proximité. D’autres secteurs ont introduit, dans leurs CCT, une clause générale recommandant aux employeurs de ne pas commettre de discrimination et de promouvoir la diversité au sein des entreprises. Tel est, par exemple, le cas de la Commission paritaire pour les employés de la sidérurgie et de la Commission paritaire pour le nettoyage.

81.Au niveau fédéral, le Bureau de Sélection de l’administration fédérale, Selor, met tout en œuvre pour que les tests de sélection ne présentent aucun élément discriminatoire dans le domaine de l’origine et de la culture. Plus spécifiquement, Selor collabore avec des spécialistes pour vérifier, entre autres, que l’origine des candidats n’a pas d’influence sur la mesure des compétences. Selor a également organisé des séances de « test des tests ». Lors de ces séances, des personnes d’origine étrangère et les personnes d’origine belge vérifient que les tests sont neutres dans le domaine de l’origine et de la culture. Par ailleurs, lors de l’acquisition ou du développement de nouveaux tests, Selor exige que ceux-ci soient neutres et offrent les mêmes chances à tous. Enfin, le traitement des résultats des tests se fait en toute objectivité et en toute neutralité. La plupart des tests sont corrigés automatiquement par ordinateur. Lors de la correction des épreuves écrites, les nom, origine et genre ne sont pas visibles pour les personnes qui corrigent le test.

82.Depuis février 2013, les candidats qui le souhaitent ont également la possibilité, lors du remplissage de leur CV, de cocher la case « origine ». L’objectif de cette option et du questionnaire associé est d’effectuer une analyse globale des aspects de genre, âge, culture… Une analyse de ce type permet d’assurer en permanence la neutralité des tests et de pouvoir suivre l’efficience des actions de diversité. La mesure de ces données objectives permet alors de mieux cibler les actions afin que la diversité soit mieux représentée au niveau de l’administration fédérale.

83.Selor a organisé des sessions d’information destinées à des organisations travaillant avec des demandeurs d’emploi d’origine étrangère afin de les informer sur les possibilités de travail au sein de l’administration et de les encourager à postuler aux offres d’emploi. L’objectif de ces sessions est de diminuer le seuil d’accès aux procédures de sélection, en déconstruisant certains préjugés liés par exemple aux conditions de participation (ex : nationalité, bilinguisme, diplômes…).

84.En 2016, Selor a lancé lors de la journée internationale des migrants, une campagne d’information et de sensibilisation reprenant sous forme de capsules vidéo les témoignages inspirants de personnes d’origine étrangère travaillant pour l’administration fédérale. Cette campagne a été diffusée via le site internet Selor et via Facebook, et a également été relayée par différentes associations de terrain (Unia, asbl UNION, Actiris).

85.Avec le projet « Integratiepact – cadre de référence et soutien », la Communauté et la Région flamandes s’emploient à encourager le respect mutuel et la lutte contre la discrimination et le racisme par des acteurs de la société civile au sens large. Dans le cadre de l’« Integratiepact – initiatives », les initiatives d’acteurs sociaux dans ce domaine bénéficient d’un soutien financier ou technique. Certains projets concernent spécifiquement l’emploi :

•Le projet SHE DID IT vise à mettre en exergue des modèles féminins issus de l’immigration ;

•Le projet « Blauwdruk voor een productieve, multiculturele werkvloer » (Plan d’action pour un lieu de travail productif et multiculturel) vise à développer et mettre en œuvre une méthodologie et une campagne afin de s’atteler à la lutte contre le racisme et la discrimination sur le lieu de travail, en misant sur le respect et la confiance entre collègues.

86.Le 28 octobre 2015, le parlement flamand a adopté une résolution relative à la sensibilisation, la prévention et la répression de la discrimination sur le marché du travail à l’encontre des personnes d’origine étrangère. Cette résolution a conduit à une actualisation du Plan d’action pour la lutte contre les discriminations liées au travail (Actieplan ter bestrijding van de Arbeidsgerelateerde Discriminatie). Le nouveau plan d’action se concentre sur la sensibilisation au travers de la campagne « Het is gauw gebeurd », l’autorégulation et le renforcement des contrôles réalisés par l’inspection.

87.La campagne « Het is gauw gebeurd » a permis de donner une meilleure visibilité au point de contact de l’Inspection sociale flamande. Lors de tournées d’inspections préventives, des « quick scans » sont organisés pour interroger les entreprises sur leurs connaissances, leurs expériences et leur approche de la discrimination au sein de leur organisation. Les enquêtes sont également utilisées pour fournir de plus amples informations au sujet de la réglementation. En outre, l’Inspection sociale flamande collabore également avec, entre autres, le Contrôle des lois sociales et Unia pour l’échange de plaintes qui ne relèvent pas de ses compétences propres.

88.L’autorégulation a été mise en œuvre par le biais de l’instrument des conventions sectorielles et au sein des entreprises de titres-services. Les conventions sectorielles sont des protocoles de collaboration entre les partenaires sociaux sectoriels et les autorités flamandes sur des sujets d’actualité, tels que la diversité croissante sur le marché du travail. Les pactes sectoriels sont un instrument puissant pour la mise en œuvre d’une politique sectorielle renforçant la politique de l’emploi. À l’heure actuelle, des conventions ont été conclues avec 32 secteurs. Toutes les 32 conventions sectorielles ont repris des engagements et actions en non-discrimination et diversité. Dans le cadre de la sixième réforme de l’État, la Région flamande est également devenue compétente pour les titres-services. En mars 2017, un plan d’action spécifique a été conclu avec le secteur des titres-services. Le plan d’action vise à lutter contre toutes les formes de discrimination et couvre un éventail d’actions, allant de la sensibilisation et de la prévention à la surveillance comme point final. Dans le cadre de ce plan d’action, des « appels mystères » ont été organisés. Au cours de l’année 2018, les organisations patronales du secteur des titres-services ont fait réaliser une enquête à grande échelle par des experts indépendants auprès de toutes les entreprises de titres-services actives en Région flamande.

89.Le projet « Focus op talent-beleid » (Focus sur la politique en matière de talents) est un programme politique de la Région flamande qui vise à concentrer l’attention de tous les acteurs du marché de l’emploi sur les compétences et les talents et à prendre ceux-ci comme point de départ pour le recrutement et l’engagement de personnes. L’intention est également de casser les préjugés. Cette politique contribue donc aussi indirectement à la lutte contre la discrimination.

90.Le projet « Focus op talent-beleid » a été lancé au milieu de l’année 2016 et se compose de 3 volets :

•L’activation des talents par le biais de l’approche de la médiation inclusive, sur mesure et axée sur les compétences de l’Office de l’emploi de la Région flamande (Vlaamse Dienst voor Arbeidsbemiddeling en Beroepsopleiding, ci-après : VDAB) ;

•L’investissement dans des talents par le biais du « KMO-portefeuille », qui permet aux petites et moyennes entreprises d’acquérir des services de conseil en vue de professionnaliser leur politique de carrière et de diversité. Les organisations à profit social et les autorités locales peuvent solliciter leur fonds sectoriel à cet effet ;

•Casser les préjugés par une stratégie mobilisatrice à laquelle divers acteurs (entre autres, les organisations patronales, les syndicats, les organisations autonomes de groupes défavorisés) contribuent au travers de projets.

91.En avril 2016, le VDAB a lancé le programme « Integratie Door Werk » (intégration par le travail) dont l’objectif est de soutenir des demandeurs d’emploi allophones d’origine étrangère en vue d’une intégration rapide et durable dans le marché du travail en Région flamande. Le plan d’action élaboré à cet effet a non seulement servi de feuille de route à l’ambition visant à mieux soutenir les demandeurs d’emploi allophones, il a également fait office d’invitation et d’appel à la coopération pour l’ensemble des acteurs concernés du terrain. Ce programme a été couronné de succès et, dans l’intervalle, est intégré plus avant dans le fonctionnement du VDAB.

92.Le VDAB promeut le parcours d’accès à l’emploi le plus fluide en alignant au maximum celui-ci avec les capacités des personnes allophones d’origine étrangère. À cette fin, quatre catégories principales sont utilisées :

•Intervention rapide : la langue néerlandaise n’est certainement pas une condition pour le travail à exécuter, une langue de contact est suffisante ; des compétences techniques sont présentes, ce qui permet une intervention immédiate ;

•Parcours intégrés : la langue néerlandaise peut, mais ne doit pas nécessairement être une condition ; l’éloignement du marché du travail est faible ; les capacités d’apprentissage sont suffisantes pour accomplir un parcours accéléré et intégré ;

•Parcours combinés : la langue néerlandaise est souvent une condition, l’éloignement du marché du travail est plus important, mais les capacités d’apprentissage sont suffisantes pour combiner au moins deux modules de formation simultanément ;

•Parcours linéaires : la langue néerlandaise est une condition, l’éloignement du marché du travail est important, les capacités d’apprentissage sont plus faibles, ce qui exclut des parcours accélérés ; il s’agit d’un parcours dans sa forme la plus longue.

93.Lors de divers événements et de journées de projet, le VDAB informe les employeurs, par le biais de leur compte en ligne, d’intermédiaires, etc., des possibilités de mise à l’emploi d’allophones d’origine étrangère. À cet égard, le VDAB suggère toujours toutes les formes d’apprentissage en milieu professionnel avec aide linguistique comme piste de recrutement possible. Les compétences existantes au sein du groupe cible sont mises en évidence. À l’aide de ses screening techniques accélérés (de faible niveau linguistique), le VDAB peut identifier ces compétences. Les bonnes pratiques sont portées à la connaissance d’autres employeurs de manière ciblée (par le biais de la presse, d’événements, de la communication lors d’événements, etc.).

94.Enfin, dans les villes de Gand et d’Anvers, un appel intitulé « Vluchtelingen en werk » (réfugiés et travail) a été lancé à l’initiative de l’ESF-Agentschap (Agence flamande FSE) et est spécifiquement axé sur l’intégration accélérée des réfugiés (demandeurs d’asile / personnes demandant la protection internationale après une période d’attente de 4 mois, réfugiés reconnus et personnes bénéficiant de la protection subsidiaire) sur le marché du travail. Les projets ont une durée de 40 mois, du 1er septembre 2016 au 31 décembre 2019. Depuis le 1er septembre 2018, le groupe cible a été étendu aux primo-arrivants allophones, en raison notamment de la baisse de l’afflux de réfugiés.

95.La Région wallonne a mis en place depuis le décret du 27 mars 2014 un Parcours d’intégration à destination des personnes étrangères et d’origine étrangère. L’un des axes du parcours d’intégration consiste en une orientation socioprofessionnelle vers des dispositifs adaptés, en soutenant certains projets visant à faciliter l’accès aux dispositifs d’aide à l’emploi existants pour des personnes étrangères.

96.L’angle socioprofessionnel est donc pris en compte dans le parcours d’intégration. En effet, un bilan socioprofessionnel est proposé dans la convention si le besoin en a été constaté en début de parcours.

97.Ce bilan socioprofessionnel de minimum 4 heures a pour objectif d’orienter le primo-arrivant vers un dispositif d’insertion socioprofessionnelle adapté. Il se base sur la qualification, l’identification des compétences, le parcours professionnel et le besoin du primo-arrivant en tenant compte de l’articulation avec les besoins des filières des métiers en pénurie. À cet égard, une convention cadre a été conclue en 2017 entre le Forem (Service public wallon de l’emploi et de la formation), les Centres Régionaux d’Intégration (ci-après : CRI) et le Gouvernement wallon dans l’objectif d’assurer l’articulation entre le parcours d’intégration porté par les CRI et le dispositif d’insertion socioprofessionnelle porté par le Forem.

98.Des conventions de partenariat sont également déclinées localement entre les CRI et les divisions territoriales du Forem de manière à répondre aux besoins et réalités propres au territoire concerné.

99.Par ailleurs, la politique de gestion de la diversité du Gouvernement wallon est mise en œuvre en Wallonie par le Centre Régional pour l’Intégration des Personnes Etrangères ou d’origine étrangères de Liège (CRIPEL). Hormis la rédaction et l’actualisation du guide de la « Gestion de la diversité des ressources humaines » et la création du site internet www.diversitewallonie.be, le CRIPEL en collaboration avec l’Université de Liège et le Forem, sensibilise les entreprises et les organisations à la diversité via plusieurs colloques et séminaires.

100.Pour la période 2014-2017, un budget de 250 000 EUR/an a été dégagé pour le financement des projets portés par le « Consortium diversité » composé du CRIPEL, du Forem et de HEC-Ecole de Gestion de l’Université de Liège et par les organisations syndicales. Ces projets permettent entres autres:

•La création d’outils, la poursuite de missions de sensibilisation ;

•La mise en œuvre de formations ;

•L’accompagnement d’entreprises dans le cadre de leur plan diversité.

101.La « gestion de la diversité » est définie comme la mise en œuvre d’une politique de gestion des ressources humaines qui, s’inscrit à toutes les étapes de la relation de travail et dans le cadre d’une concertation sociale.

102.Depuis 2018, le CRIPEL n’est plus subventionné pour ces missions. Seules les ASBL CEPAG et FEC perçoivent encore une subvention. Le budget du Consortium est donc de 200 000 EUR/an depuis 2018.

103.Pour la période 2014-2017, dans le cadre du plan Marshall, plus de 2 millions d’EUR/an ont été octroyés en points d’Aides à la promotion de l’emploi (APE) pour le soutien de projets dans les axes suivants :

•Intégration des personnes étrangères qui visent à renforcer et à stabiliser les associations œuvrant dans le cadre de l’intégration des personnes étrangères ou d’origine étrangère.Dans ce cadre, les initiatives de plus de 50 asbl sont soutenues ;

•Parcours d’intégration des primo-arrivants, projets développés dans des organismes comme les Centres régionaux d’intégration, de l’asblL CINL, CRIPEL et Miroir Vagabond ;

•Les Centres régionaux d’Intégration qui participent à la mission d’intégration sociale des primo-arrivants et en particulier les projets d’interprétariat social. Ceci vient en complément de l’appel à projet Parcours d’intégration des primo-arrivants.

104.La plupart des projets ont été renouvelés pour l’année 2018.

105.Le Plan de cohésion sociale (PCS) est un dispositif régional et transversal qui vise à soutenir les communes wallonnes qui s’engagent à promouvoir la cohésion sociale sur leur territoire en mettant en œuvre un plan d’actions local.

106.Par cohésion sociale, on entend l’ensemble des processus qui contribuent à assurer à tous les individus ou groupes d’individus, l’égalité des chances et des conditions, l’équité et l’accès effectif aux droits fondamentaux et au bien-être économique, social et culturel et qui visent à construire ensemble une société solidaire et coresponsable pour le bien-être de tous.

107.Pour le PCS 2014-2019, on dénombre 181 communes pour 170 plans en Wallonie, certaines d’entre elles ayant conçu un plan en association avec d’autres.

108.Le PCS mobilise au total un budget de près de 39 millions d’euro. Des grandes villes aux plus petites communes, une subvention équitable a été octroyée en fonction du nombre d’habitants que compte la commune et de son indicateur synthétique d’accès aux droits fondamentaux, ci-après : ISADF.

109.Les thématiques les plus développées sont l’aide à la recherche d’un emploi, l’information et communication vers les usagers en matière de logement, la précarité dans le domaine de la santé et enfin la lutte contre l’isolement des personnes.

110.Mis en œuvre depuis avril 2009, ce dispositif ambitieux vient de faire l’objet d’une réforme en novembre 2018 : à dater du 1er janvier 2020, le plan développé par un pouvoir local devra répondre cumulativement aux objectifs suivants : 1° d’un point de vue individuel : réduire la précarité et les inégalités en favorisant l’accès effectif de tous aux droits fondamentaux ; 2° d’un point de vue collectif : contribuer à la construction d’une société solidaire et coresponsable pour le bien-être de tous.

111.En fonction de l’ISADF et de l’état des lieux local, chaque PCS devra se décliner en actions coordonnées qui viseront à favoriser l’accès à un ou plusieurs axes qui rencontrent 14 droits fondamentaux (1° travail, formation, apprentissage, insertion sociale ; 2° logement, énergie, eau, environnement sain et un cadre de vie adapté ; 3° santé ; 4° alimentation ; 5° épanouissement culturel, social et familial ; 6° participation citoyenne et démocratique, technologies de l’information et de la communication ; 7° mobilité).

112.Un appel à projets a été adressé en janvier 2019 aux communes candidates au dépôt d’un PCS pour 2020-2025. Le délai de dépôt des projets est le 3 juin 2019.

113.En mars 2016, le Gouvernement wallon a décidé de renforcer la politique d’insertion socioprofessionnelle afin d’offrir aux personnes l’opportunité de s’insérer rapidement sur le marché de l’emploi, en complémentarité avec le parcours d’intégration. Les actions suivantes ont été décidées :

•Renforcer l’accueil par la mise en place d’un guichet unique permettant de favoriser la fluidité et la cohérence des parcours ;

•Favoriser la validation des compétences des publics migrants ;

•Renforcer les services de traduction et d’interprétariat ;

•Renforcer la prise en charge des primo-arrivants par les organismes actifs dans l’insertion socioprofessionnelle (Centre Public d’Action Sociale, ci-après : CPAS, Mission Régionale pour l’Emploi, Centre d’Insertion Socio Professionnelle, Structure d’Accompagnement à l’Auto Création d’Emploi, Structure d’Accompagnement à l’Auto Création d’Emploi).

114.En 2016, le Gouvernement wallon a décidé d’engager 9 agents spécialisés au sein des instances bassins Enseignement-Emploi-Formation. Ce sont des instances locales de concertation entre les acteurs de l’enseignement, de la formation et de l’emploi, le Forem et les représentants des partenaires sociaux, pour développer des actions concrètes et opérationnelles en vue de promouvoir l’emploi des personnes étrangères et d’origine étrangère sur le territoire.

115.Dans les agences de placement agréés par la Région wallonne, la lutte contre la discrimination constitue une préoccupation forte du secteur, qui fait part des initiatives suivantes : formation des consultants et des entreprises affiliés à la législation anti-discrimination et à la promotion de la diversité, organisation d’une « cascade » qui oblige un consultant de 1ère ligne à se « décharger » auprès de son supérieur direct lorsqu’un prospect fait une demande à caractère discriminatoire, contrôle de performance des agences de placement par le secteur dans le cadre de l’attribution du label sectoriel.

116.Du côté des services publics, le Forem s’est engagé dans la lutte contre toute discrimination à l’encontre d’une personne ou d’un groupe de personnes et à assurer une équité de traitement à l’ensemble des clients et usagers du Forem. Pour atteindre ces objectifs, le Forem a mis en œuvre les actions suivantes :

•La formation initiale du personnel : le module « Égalité des chances & Diversité » a été mis en place depuis 2014. Il a été suivi par plus de 1 100 membres du personnel, de métiers différents : conseillers référent, conseillers entreprises, conseillers en démarches administratives, conseillers cellule de reconversion, évaluateurs, personnel d’accueil ;

•La formation continue du personnel : une newsletter « Égalité et Diversité » est accessible tant pour le personnel du Forem que pour les personnes qui demandent à y être inscrits ;

•La sensibilisation du personnel quant aux réclamations et plaintes (signalement de situation discriminante) : le personnel en contact avec le citoyen est informé des canaux à suivre pour orienter au mieux le citoyen qui a subi une discrimination vers les instances qui gèrent les réclamations et plaintes de ce type (Unia, l’IEFH) ;

•Le dispositif « MODA » (MOdalités des Demandes d’Adaptation/Accessibilité) : ce dispositif vise à permettre aux personnes ne maitrisant pas la langue française de bénéficier d’un interprète pour permettre au demandeur d’emploi d’avoir toutes les infos nécessaires relatives à son parcours vers l’insertion.

117.Enfin, l’année de la diversité dans la fonction publique en Région wallonne a été lancée le 4 octobre 2018. Une Charte a été signée qui encourage et invite l’ensemble du personnel de l’administration wallonne à s’engager pour lutter contre toute forme de discrimination. Un plan d’action pour 2018-2020 a été mis en place afin de mettre en œuvre des mesures concrètes au sein de l’administration.

118.En décembre 2016, le gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale a lancé un plan d’action en 10 mesures afin de lutter contre les discriminations à l’emploi. Ce plan a pour résultat de passer d’une logique incitative à une logique plus contraignante. Parmi les 10 mesures prévues, certaines méritent d’être soulignées.

119.Il s’agit en premier lieu de la mise en œuvre de dispositifs permettant de contrôler les entreprises dans leur pratique d’embauche et de sanctionner les entreprises discriminantes. Les inspecteurs régionaux de l’emploi ont pu ainsi utiliser des CV anonymes et des tests de situation afin de voir si les personnes d’origine étrangère ne sont pas, à diplôme et compétence égaux, désavantagées par rapport à leurs homologues d’origine belge.

120.Le guichet anti-discrimination d’Actiris (agence bruxelloise pour l’emploi) est également renforcé. Il s’agit du premier interlocuteur pour les chercheurs d’emploi victimes de discriminations. Son existence et son action ont fait l’objet d’une campagne d’information auprès des demandeurs d’emploi.

121.Dans une démarche plus positive, la Région de Bruxelles-Capitale encourage les entreprises à mettre en place un plan de diversité pour leur politique de ressources humaines. Cela ce fait concrètement par un système d’incitants soutenant les entreprises qui s’engagent dans cette démarche.

122.Enfin, il convient de mentionner une rationalisation des organes institutionnels traitant de la diversité sur le territoire bruxellois, ainsi que la mise en place d’un monitoring spécifique permettant de mesurer l’évolution de la diversité dans l’emploi à Bruxelles.

123.En outre, plusieurs mesures et actions ont été mises en œuvre, qui permettent d’encourager de manière générale ou plus spécifique l’embauche de personnes d’origine étrangère dans la fonction publique régionale bruxelloise.

124.Les organismes publics de la Région de Bruxelles-Capitale sont tenus de mettre en œuvre des plans de diversité biannuels. Ces plans d’action en matière de diversité doivent intégrer les objectifs prioritaires fixés par le Gouvernement, en plus des objectifs prioritaires pour l’organisme. Lors de la période 2012-2015, le Gouvernement bruxellois a fixé comme objectif prioritaire en matière de diversité l’engagement et la promotion des personnes d’origine étrangère dans la fonction publique régionale. Cela engageait les organismes publics de la Région de Bruxelles-Capitale à intégrer des actions concourant à l’atteinte de cet objectif dans leurs plans de diversité. Les plans de diversité continuent à intégrer des actions visant cette catégorie même si cet objectif ne fait plus partie, tel quel, des cinq objectifs prioritaires fixés par le Gouvernement pour la période 2016-2020. Un autre objectif prioritaire est appelé à y contribuer : « l’augmentation de la représentativité des Bruxellois dans la fonction publique ».

125.Un important budget de subventions diversité est dégagé depuis 2015 afin de financer le dispositif consistant à subsidier les institutions publiques régionales qui engagent, dans des emplois contractuels, un minimum de 10 % de demandeurs d’emploi issus des quartiers bruxellois où le taux de chômage est égal ou supérieur à la moyenne régionale. Cette mesure a permis de soutenir l’engagement de 416 personnes en 2015, de 447 en 2016 et de 445 en 2017.

126.La carte d’accès au niveau C’est un dispositif régional permettant aux chercheurs d’emploi ne disposant pas du diplôme secondaire supérieur (obtenu ou reconnu en Belgique), mais disposant des compétences équivalentes, de pouvoir postuler à certains emplois de niveau C dans les administrations régionales.

127.Ce dispositif, qui est en place depuis 2015, a été élargi en 2017 et un nouvel accord a été conclu avec le Selor pour la préparation de 400 candidats. Plusieurs organismes supplémentaires ont été contactés pour faire la promotion de la carte d’accès au niveau C : les communes et CPAS, la Vlaamse Gemeenschapscommissie (VGC), la COCOF.

128.La participation à des forums de l’emploi est stimulée, notamment des forums dédiés à des publics ciblés par la politique de diversité ; il s’agit de salons dédiés aux personnes d’origine étrangère et l’animation destinée à des demandeurs d’emploi au sein de la Cité des métiers de Bruxelles.

129.En ce qui concerne la COCOF, les primo-arrivants, ont la possibilité de suivre gratuitement des formations linguistiques (français) auprès d’opérateurs conventionnés dans le cadre du parcours d’accueil non obligatoire. Les formations sont organisées sous forme de modules afin d’atteindre le niveau A2 du Cadre européen commun de référence pour les langues (CERC). Ces formations se déroulent durant la journée à raison de 20 h/semaine ou en horaire décalé à raison de 7 h/sem. 75 % de présence est exigé pour ces formations destinées uniquement à l’attention des adultes de plus de 18 ans.

130.Bruxelles Formation est l’organisme public chargé de la formation professionnelle des chercheurs d’emploi et des travailleurs, travailleuses bruxellois(es) francophones de la Région de Bruxelles-Capitale. Bruxelles Formation et ses Organismes d’insertion socioprofessionnelle (OISP) partenaires proposent des actions de formation dans de nombreux domaines dont ceux de l’alphabétisation et des langues (français, FLE..). La plupart des formations s’adressent aux chercheurs d’emploi de 18 ans minimum, domiciliés en Région de Bruxelles-Capitale.

131.Les formations des OISP s’adressent principalement aux chercheurs d’emploi n’ayant pas obtenu le certificat de l’enseignement secondaire supérieur ou équivalent, pour l’alphabétisation, n’ayant pas obtenu le certificat d’études de base, et pour la formation de base n’ayant pas obtenu le certificat de l’enseignement secondaire inférieur. L’offre des OISP est sous la régie de Bruxelles Formation.

132.Pour Bruxelles Formation, le Plan Formation 2020 (PF2020) approuvé en décembre 2016 précise que les personnes de nationalité ou d’origine étrangère, dont les primo-arrivants bénéficieront d’une attention particulière.

133.Bruxelles Formation n’intègre que la variable « nationalité » et pas celle relative à l’origine dans sa base de données de stagiaires. Par ailleurs, au vu des spécificités sociologiques bruxelloises, tout dispositif de Bruxelles Formation visant l’accès ou le maintien en formation n’est pas spécifique à la nationalité ou à l’origine. Ceci n’empêche pas Bruxelles Formation de se préoccuper de la question de la discrimination et l’intégrer dans sa stratégie en matière de formation du personnel et de soutien aux stagiaires (Plan Diversité) ainsi que dans sa politique de communication qui reflète la diversité de ses stagiaires.

134.Par ailleurs, chez Bruxelles Formation, on retrouve une proportion plus élevée de personnes de nationalité non européenne dans les formations en « Français langue étrangère » (54,3 %), en français (54,2 %), en alphabétisation (63,3 %), chez les partenaires d’insertion socio-professionnelle (toutes formations confondues) (43,3 %), en préformation (37 %) et formation de base (42 %). Bf.tremplin, pôle de formation en contact avec les publics fragilisés a certes une proportion moins importante de personnes de nationalité non-UE (26,3 % du total), mais a connu une augmentation importante du nombre de stagiaires hors UE (+19,2 % par rapport à 2016).

135.En Communauté germanophone, le décret du 11 décembre 2017 a mis en place un Parcours d’intégration à destination des personnes étrangères et d’origine étrangère. Ces personnes ont la possibilité de suivre gratuitement des formations linguistiques niveau A2 du CERC. Plusieurs possibilités s’offrent aux primo-arrivants : soit une filière « alphabétisation », soit des cours intensifs ou des cours à seuil bas ou encore des cours spécifiques aux femmes. 80 % de présence est exigé pour ces formations destinées uniquement aux adultes de plus de 18 ans. L’un des axes du parcours d’intégration consiste en une orientation socioprofessionnelle vers des dispositifs adaptés. Après le parcours d’intégration le gouvernement a décidé de subventionner plus de cours de langue afin d’achever le niveau B1 ainsi de dédier tout un projet dans son concept du développement régional à la reconnaissance et la validation des compétences non-formelles.

136.En Communauté germanophone, il existe également un guichet anti-discrimination d’Unia.

B.1Mesures spéciales

137.Pour plus d’informations à ce sujet, il est renvoyé à l’article 2, C. 3.

B.2Enquêtes sur la discrimination raciale en matière d’emploi et les recours des victimes

138.En 2010, la Direction Générale du Contrôle des lois sociales, ci-après : CLS du SPF Emploi, Travail et Concertation sociale, et Unia ont signé un protocole de collaboration en vue d’organiser des échanges en matière de traitement des plaintes, de se prêter assistance mutuelle et d’instaurer un suivi et un échange de données sur le phénomène de la discrimination.

139.Par la suite, une méthodologie anti-discrimination a été élaborée en concertation avec l’IEFH, Unia et la CLS. Cette méthodologie rappelle les dispositions légales en vigueur, fait la distinction entre les infractions pénales et les procédures civiles et met en place les procédures pratiques à suivre lors du traitement de plaintes ; elle inclut aussi des checklists et des modèles à utiliser face à un plaignant, un employeur, un témoin…

140.Depuis lors, le CLS a désigné par direction régionale un/une spécialiste « anti-discrimination » et plusieurs formations ont été organisées, dont la dernière date de novembre 2017. Des réunions d’échange ont été organisées entre les responsables du CLS et ceux d’Unia et de l’IEFH.

141.Les inspecteurs du CLS ont reçu les formations aux techniques d’enquêtes spéciales telles que prévues par la loi du 15 janvier 2018 qui ajoute au Code pénal social « des pouvoirs particuliers en matière de discrimination », notamment ce que l’on appelle les « mystery calls » : les inspecteurs sociaux du CLS peuvent dorénavant se présenter comme des clients ou des candidats à des emplois en vue de rechercher et d’établir des infractions à la loi anti-discrimination.

142.Dans le cadre de cette nouvelle législation, une circulaire du Collège des procureurs généraux a été adoptée afin d’encadrer les inspecteurs et de leur offrir la sécurité juridique requise lorsqu’ils seront amenés à utiliser ces techniques particulières (faux CV, fausses identités…).

143.Au niveau de la Région de Bruxelles-Capitale, une ordonnance du 16 novembre 2017 habilite les inspecteurs régionaux de l’emploi à pratiquer les tests de discrimination que sont les tests de situation et le mystery shopping. Ces nouveaux outils à disposition des inspecteurs régionaux ont pour objectifs d’établir la preuve de discrimination à l’embauche sur base de signalements faits auprès d’Unia et de l’IEFH, complétés par des indices suffisamment établis. Cette disposition est entrée en vigueur au 1er janvier 2018. La mise en œuvre de cette disposition a été préparée en étroite collaboration avec Unia et l’IEFH, notamment via la formation des inspecteurs par ces institutions compétentes en matières de lutte contre les discriminations.

C.L’accès des personnes d’origine étrangère à un logement décent

144.Le 20 juillet 2018, un Plan d’action relatif à la politique antidiscrimination sur le marché privé de la location (« Actieplan Vlaams antidiscriminatiebeleid op de private huurmarkt ») a été communiqué au gouvernement flamand. L’objectif de ce plan est, d’une part, d’encourager l’autorégulation par une approche axée sur la sensibilisation et le soutien et, d’autre part, de renforcer les instruments de contrôle existants. Ce plan d’action est en cours d’exécution.

145.Depuis 2016, une série de nouvelles mesures ont été prises en matière de logement pour les personnes en situation de vulnérabilité. Ces mesures sont exposées ci-dessous.

146.Le Code flamand du logement a été modifié en 2017. Il n’y a plus de conditions linguistiques pour l’accès aux logements sociaux. Le locataire social doit cependant prouver, un an après être devenu locataire, qu’il dispose des compétences linguistiques de base en néerlandais. Si le locataire n’atteint pas le niveau linguistique requis et n’est couvert ni par une exception, ni par le report du délai d’un an, une amende administrative peut être imposée. Toutefois, une résiliation du bail n’est pas possible.

147.Le régime de location sociale s’adresse exclusivement aux ménages ayant des revenus limités. Par le biais de ce régime, un logement est proposé pour un prix basé sur le profil de revenus du locataire. Des moyens supplémentaires sont libérés chaque année.

148.Les administrations locales peuvent toujours établir un règlement spécifique tenant compte des besoins en logement de groupes cibles spécifiques. De cette manière, la commune peut donner la priorité à un ou plusieurs groupes cibles pour un logement social. Le règlement voit le jour en collaboration avec les acteurs du logement et du bien-être et doit être approuvé par l’autorité flamande.

149.L’offre de logements locatifs des sociétés de logement social augmente chaque année et a atteint 154 584 unités fin 2017.

150.Par le biais de l’agrément et de la subvention des agences immobilières sociales, une capacité supplémentaire en infrastructure de logements spécifiques a été créée pour les groupes cibles les plus vulnérables. Entre-temps, il est question de quelque 10 000 locations supplémentaires. Le nombre de logements loués par des agences immobilières sociales augmente aussi chaque année. Outre les logements à louer, il existe une offre de logements en propriété à des conditions sociales.

151.Il existe par ailleurs une offre de prêts à taux sociaux, les primes à la rénovation, mais aussi des subventions à la location et des primes à la location, qui sont octroyées par la Région flamande.

152.Une plateforme mixte constituée de divers acteurs issus du domaine du logement et du bien-être en Région flamande a développé une approche globale en vue de prévenir et de combattre le sans-abrisme. Ce plan d’action relatif au sans-abrisme a été approuvé par le gouvernement flamand le 9 décembre 2016 et formule un certain nombre d’objectifs et d’actions à réaliser d’ici la fin de l’année 2019. Des actions et des mesures politiques sont prises tant en matière de logement que de bien-être. Les actions du plan s’articulent autour de quatre objectifs stratégiques : la prévention de l’expulsion, la prévention du sans-abrisme chez les jeunes adultes, l’approche du sans-abrisme chronique et l’élaboration d’une politique intégrée en matière de sans-abrisme. La coordination est assurée par le ministre flamand chargé du bien-être.

153.Le dispositif d’intégration des personnes étrangères en Région wallonne prévoit des permanences sociales et juridiques pour aider et orienter les personnes étrangères dans leurs démarches telles que la recherche d’un logement. Le parcours d’intégration prévoit également une aide aux démarches administratives, une information sur les droits et devoirs et une formation à la citoyenneté qui abordent les questions de logement.

154.Sans préjudice de la compétence de la Région wallonne dans le domaine du logement, il existe plusieurs services de logements sociaux en Communauté germanophone.

155.A la demande du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale, l’étude DISCRIMIBRUX a été menée par l’université de Gand et la Vrije Universiteit Brussel (VUB) en 2017. Il s’agissait de déceler et mesurer les attitudes de discrimination dans l’accès à la location de logement résidentiels privés en Région de Bruxelles-Capitale. Pour cela, cette étude a utilisé toute une palette d’outils : tests de correspondance, tests de situation et mystery shopping. Cette dernière technique consiste à se faire passer pour un propriétaire auprès d’agences immobilières en leur demandant de recourir à une sélection discriminatoire (ex. : pas de femme seule ou de personnes d’origines étrangères). Il est apparu que jusqu’à un tiers des agences contactées accédait à cette demande, par ailleurs tout à fait illégale.

156.Cette étude ne concernait pas spécifiquement la discrimination envers les personnes d’origine étrangère mais prenait en compte également d’autres critères : genre, handicap, appartenance à une minorité sexuelle ou affective, origine et situation sociale. Cette approche globale a révélé toute sa pertinence car il est apparu que les groupes les plus discriminés étaient ceux qui cumulaient plusieurs de ces critères (ex : femmes d’origine nord-africaine ou d’Europe de l’est).

157.Disposant de cet état des lieux, le gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale a pris un certain nombre de mesures en conséquence : sensibilisation des autorités publiques et des agents immobiliers, formation des agents immobiliers à lutte contre la discrimination, nouvelle brochure anti-discrimination en 2019.

158.Enfin, l’ordonnance visant à renforcer la lutte contre la discrimination dans l’accès au logement a été adoptée le 25 octobre 2018. Celle-ci complète les ordonnances du 17 juillet 2003 en permettant aux service de l’inspection de Bruxelles Logement de recourir à des tests destinés à constater les pratiques discriminatoires et à prendre ensuite les sanctions adéquates.

159.Dans le cadre de sa politique du logement, la Région Bruxelles-Capitale a réalisé en 2016-2017, une vague de testings de grande ampleur sur les pratiques discriminatoires à la location sur son territoire, centrée sur les agences immobilières. Concrètement, 10 978 tests de correspondance via Immoweb, 1 542 tests de situation téléphoniques et 648 mystery calls ont été réalisés. Les deux critères les plus touchés par la discrimination sont l’origine ethnique et la source de revenu.

160.Pour évaluer l’impact du plan d’action contre la discrimination, un deuxième volet de tests a été réalisé fin de l’année 2018. 520 test mystery calls ont été réalisés dont 283 concernant la discrimination relative à l’origine ethnique et 237 concernant la discrimination fondée sur la source de revenu. Cette deuxième vague de tests a montré que la discrimination relative à l’origine ethnique a considérablement diminué, passant de 43 % à 25 % par rapport à 2016-2017, et que la discrimination relative à la source de revenu a légèrement diminué, passant de 37 % à 34 %.

D.L’accès des personnes qui séjournent illégalement en Belgique aux services de santé

161.L’article 57, §2, de la loi organique du 8 juillet 1976 des Centres Publics d’Action Sociale, ci-après : CPAS prévoit que les personnes qui séjournent illégalement en Belgique peuvent prétendre au droit à l’aide médicale urgente. Il s’agit d’une aide exclusivement médicale qui couvre des soins tant préventifs que curatifs. Cette aide est accordée par les CPAS sur la base d’une enquête sociale. Le CPAS doit vérifier l’état d’indigence comme pour tout demandeur.

162.Les mineurs étrangers non-accompagnés (MENA) peuvent bénéficier des prestations de santé à charge de l’assurance obligatoire soins de santé sous certaines conditions. Le titulaire MENA bénéficie par ailleurs de l’intervention majorée de l’assurance soins de santé.

163.En outre, la régularité du séjour n’est pas exigée dans les cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle.

164.En Région wallonne et en Communauté germanophone les permanences sociales et le parcours d’intégration abordent également la thématique santé mais cela ne vise pas spécifiquement les personnes qui séjournent illégalement en Belgique.

165.D’une manière générale, le mode de subventionnement des services COCOF leur permet d’accueillir tous les publics, en ce compris les personnes qui séjournent illégalement en Belgique. Certains services sont davantage spécialisés. C’est le cas du service de santé mentale Ulysse, qui mène notamment un projet intitulé « La boite à tartines » visant à maintenir et favoriser les relations parents-enfants du public qui séjourne illégalement en Belgique. On peut également mentionner l’asbl Interprétariat et Traduction, qui forme des interprètes visant à accompagner les démarches en santé dans les différents services.

166.La Commission Communautaire Commune, ci-après : COCOM, subsidie différentes initiatives dont l’objectif est de faciliter l’accès aux soins des personnes, indépendamment de leur statut administratif. Elles accueillent notamment les personnes qui séjournent illégalement en Belgique et les aident à accéder aux soins soit directement soit via les mécanismes décrit ci-dessus de l’article 57 6 2 de la loi organique du 8 juillet 1976 des Centres Publics d’Action Sociale. Il s’agit du centre Athena, centre de premier accueil de médecine générale, des services médico-sociaux attachés au plan hiver et d’autres initiatives également.

E.L’accès des migrants originaires de pays de l’Union européenne aux services sociaux

167.La directive 2004/38/CE du Conseil européen et du Parlement, du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres prévoit cependant que l’État membre d’accueil devrait être libre de déterminer s’il entend accorder aux personnes autres que celles qui exercent une activité salariée ou non salariée, celles qui conservent ce statut et les membres de leur famille, des prestations d’assistance sociale au cours des trois premiers mois de séjour, ou de périodes plus longues en faveur des demandeurs d’emploi, ou des bourses d’entretien pour les études, y compris la formation professionnelle, avant l’acquisition d’un droit de séjour permanent.

168.La possibilité d’exclure dans certaines hypothèses le citoyen de l’Union du droit à l’aide sociale a été explicitement prévue par l’article 24.2 de la directive précitée.

169.Le législateur belge a utilisé cette faculté en insérant un article 57quinquies dans la loi du 8 juillet 1976 organique des CPAS. En vertu de cet article, le citoyen de l’Union et les membres de sa famille qui l’accompagnent ou le rejoignent ne peuvent pas prétendre au droit à l’aide sociale pendant les trois premiers mois de séjour sur le territoire belge.

170.La Cour constitutionnelle a rendu l’arrêt no 95/2014 du 30 juin 2014. Cet arrêt a annulé partiellement l’interprétation de l’article 57quinquies de la loi du 8 juillet 1976 organique des CPAS. La Cour constitutionnelle a considéré que l’article 57quinquies doit être interprété de la manière suivante :

•Les personnes qui entrent dans le champ d’application de cet article ne sont pas exclues du droit à l’aide médicale urgente ;

•Les citoyens de l’Union qui séjournent sur le territoire belge en qualité de travailleur salarié ou non salarié ne sont pas temporairement exclus du droit à l’aide sociale.

171.Pour les Communautés, il est renvoyé aux paragraphes 45 et 47.

172.La COCOM est légalement tenue de construire un Plan de lutte contre la pauvreté, qui est lui-même une des 5 parties du « Rapport sur l’état de la pauvreté », dont le contenu est fixé dans l’ordonnance « relative à l’élaboration du rapport sur l’état de la pauvreté dans la Région de Bruxelles-Capitale ». Au cours de la législature 2014-2019, ce plan a pris la forme d’un « Programme d’actions bruxellois de lutte contre la pauvreté 2014-2019 ». Ce dernier, en son point 2.3., prévoit d’« améliorer l’entrée en soins primaires des publics les plus défavorisés ». Grâce à ce plan dans le cadre d’un projet du Fonds européen de développement régional, a eu lieu le développement de deux centres de type « Centre Social de Santé Global », en milieux de vie des publics cibles « bas-seuil », avec pour opérateur « Médecins du Monde ». La transversalité du projet est assurée par la représentation, dans ces centres, de 6 associations proposant une offre socio sanitaire complète (un planning familial, une maison médicale, etc.) financées par différents ministères : le premier centre rassemble des services existants (secteurs du social, de la santé mentale et de la santé physique) reconnus par les autorités publiques au sein d’une même infrastructure ; le deuxième centre est un centre « de novo » permettant de rassembler les intervenants des différents secteurs (secteurs du social, de la santé mentale et de la santé physique) et, avec eux, de mettre en œuvre un nouveau type de centre global intégrant les problèmes de santé, mais aussi tous les accompagnements nécessaires pour surmonter progressivement les difficultés sociales de chaque patient.

173.Une autre action consiste en le développement d’un dispensaire de médecine générale prestant des consultations de médecine générale couplées à un accompagnement social et une pharmacie de dépannage. Le projet est développé conjointement par le cercle de médecins généralistes FAMGB et Médecins du Monde. Le projet dispensaire de médecine générale a notamment pour objectifde servir de porte d’entrée à la médecine générale pour les patients ne connaissant pas bien la structure des services de santé en Belgique, ou encore pour les patients n’ayant pas encore identifié de médecin traitant (ou étant en attente d’une intégration dans une structure). Il vise également à récolter et analyser les données des patients qui fréquentent le dispensaire pour mieux comprendre les causes du non-recours à la médecine générale dans un cadre classique et pouvoir y apporter une réponse adaptée.

174.Pour le quinquennat 2016-2020, dans le cadre de la priorité « citoyenneté interculturelle », le service de la Cohésion sociale de la COCOF finance des permanences sociojuridiques et des modules d’initiation à la vie citoyenne. Les permanences sociojuridiques sont destinées à informer les migrants notamment sur des questions liées à l’accès à la nationalité, aux titres de séjour, à l’équivalence de diplômes et aux questions relevant de l’accueil et l’insertion des migrants au sens large. Lors des modules d’initiation à la vie citoyenne, les formateurs abordent notamment les questions relatives au logement, aux soins de santé, à la sécurité sociale, à l’organisation du marché de l’emploi et à l’enseignement.

175.La Communauté germanophone est également en train de développer un plan de lutte contre la pauvreté. Les personnes originaires de pays de l’Union européenne peuvent aussi participer au parcours d’intégration. Il existe aussi une heure de consultation juridique au centre de référence de migration et de l’intégration pour les migrants ayant des questions sur l’accès liée à la nationalité, à leur titre de séjour, etc.

F.L’acquisition de la nationalité belge

176.Le Code de la nationalité belge a été, à plusieurs reprises, modifié durant ces 25 dernières années. La loi du 4 décembre 2012 modifiant le Code de la nationalité belge afin de rendre l’acquisition de la nationalité belge neutre du point de vue de l’immigration, entrée en vigueur le 1er janvier 2013, est à l’origine d’une des réformes les plus importantes en matière d’accès à la nationalité belge. Cette loi a été récemment modifiée par la loi du 18 juin 2018 portant dispositions diverses en matière de droit civil et des dispositions en vue de promouvoir des formes alternatives de résolution des litiges, en vigueur depuis le 12 juillet 2018.

177.La loi du 4 décembre 2012, précitée, a retenu, en ce qui concerne les étrangers âgés de plus de dix-huit ans, deux procédures d’acquisition de la nationalité belge, qu’elle a profondément remaniées :

•L’acquisition par déclaration constitue le droit commun de l’acquisition de la nationalité belge. L’article 12 bis, §1er, du Code de la nationalité belge (ci-après : CNB) envisage cinq cas de figure qui reflètent la volonté du législateur qui était clairement de faire en sorte que l’acquisition de la nationalité soit l’aboutissement d’une intégration réussie. L’étranger doit ainsi répondre à des conditions de séjour légal en Belgique depuis plusieurs années, à des critères d’intégration linguistique (connaissance d’une des trois langues nationales), sociale et économique. Certaines catégories d’étrangers sont cependant dispensées.

•L’acquisition de la nationalité belge par naturalisation est prévue aux articles 18 à 21 du CNB. La naturalisation est un acte législatif octroyé souverainement par la Chambre en faveur d’un étranger ayant fait état de « mérites exceptionnels » ou qui bénéficie depuis au moins deux ans du statut judiciaire d’apatride. La naturalisation redevient ainsi une faveur accordée par le Parlement.

178.Le législateur de 2018 a apporté quelques corrections à la précédente loi de réforme du CNB - à savoir la loi du 4 décembre 2012 modifiant le Code de la nationalité belge afin de rendre la nationalité neutre du point de vue migratoire -, mais sans toutefois remettre en question les grandes orientations de celle-ci. Il n’y a dès lors pas eu de changements fondamentaux dans les conditions d’accès à la nationalité belge.

G.Le regroupement familial

179.Pour demander un regroupement familial, l’étranger doit invoquer les articles 10 ou 10bis de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers, ci-après : loi sur les étrangers, (s’il est ressortissant d’un pays tiers) ou les articles 40bis ou 47/1 de la loi sur les étrangers (s’il est citoyen de l’Union).

180.Lorsque l’étranger est naturalisé et a la nationalité belge, il devra invoquer les articles 40bis ou 47/1 de la loi du 15/12/1980 (s’il a exercé son droit à la libre circulation) ou l’article 40ter de la loi sur les étrangers (s’il n’a pas exercé son droit à la libre circulation) pour demander un regroupement familial.

181.Il n’y a pas de discrimination par rapport à l’origine ou l’appartenance ethnique.

H.Ratification de la Convention 1961 sur la réduction des cas d’apatride

182.La Belgique a adhéré à la Convention de 1961 le 1er juillet 2014 (cf. Loi du 10 juin 2014 portant assentiment à la Convention des Nations Unies sur la réduction des cas d’apatridie, faite à New York le 30 août 1961).

183.Les tribunaux de première instance sont compétents en ce qui concerne l’apatridie.

I.Roms et gens du voyage

I.1La mise en œuvre de la Stratégie nationale pour l’intégration des Roms

184.En février 2012, la Belgique a déposé sa stratégie nationale d’intégration des Roms auprès de la Commission européenne. Cette stratégie nationale est le résultat d’un partenariat entre les entités fédérées, l’État fédéral et les représentants de la société civile. Chaque autorité a développé elle-même des mesures, selon ses propres compétences.

185.En mai 2016, le Point de contact national belge pour les Roms a créé une Plateforme nationale belge pour les Roms avec le soutien de la Commission européenne. Cette plateforme a pour objectif d’initier un processus de dialogue participatif avec toutes les parties prenantes et les communautés roms en Belgique. Ces dialogues sont organisés dans le cadre des domaines politiques cruciaux qui doivent favoriser l’intégration socio-économique des Roms. Plus précisément, l’accent est mis sur la lutte contre la discrimination en matière d’emploi, d’éducation, de logement et de soins de santé. La lutte contre la discrimination constitue le fil rouge tout au long du processus de consultation.

186.Les administrations de l’État belge, des communautés et des régions, les associations d’administrations locales et Unia constituent le groupe de pilotage de la Plateforme nationale pour les Roms. La Plateforme nationale pour les Roms a organisé quatre réunions thématiques consacrées aux piliers de l’intégration des Roms (santé, emploi, éducation et logement) et a terminé son année-pilote (2016-2017) par une journée de clôture de la plateforme nationale des Roms. Le but était d’obtenir des recommandations destinées aux décideurs politiques, pouvant servir d’apport à une évaluation planifiée de la stratégie nationale pour l’intégration des Roms (accord de gouvernement du 9 octobre 2014).

I.2L’intégration des Roms

187.À Bruxelles, Anvers, Gand et Saint-Nicolas, des stewards de quartier ont été engagés par la Communauté flamande pour les quartiers où vivent de nombreux Roms. Les stewards de quartier constituent le lien entre la population rom, les services de la ville et les services sociaux.

188.Les stewards de quartier bénéficient de la confiance du groupe cible, fournissent des informations, jouent un rôle de médiateur, clarifient le message et aiguillent vers les services. Ils donnent aux services des informations sur le contexte dans lequel évoluent les Roms et aident ces services à rendre leur fonctionnement plus accessible et adapté aux Roms. Les médiateurs n’assument toutefois aucune mission-clé d’autres services.

189.Depuis 2012, le gouvernement flamand affecte un montant annuel de 800 000 euros à cet effet. L’objectif est que les projets ancrent l’expertise acquise concernant la méthodologie développée d’ici 2020. Les villes d’Anvers, de Gand, de Saint-Nicolas ainsi que la Commission communautaire flamande (VGC) ont été invitées à développer un plan échelonné à cette fin.

190.En Région wallonne et en Communauté germanophone, en tant que personnes étrangères ou d’origine étrangère, les Roms bénéficient des mesures prises dans le cadre de la politique wallonne d’intégration des personnes étrangères et d’origine étrangère (en ce compris le parcours d’intégration). Ils peuvent en bénéficier de la même manière que les autres migrants (pareil pour les autres domaines : emploi, éducation..) .

191.La Région wallonne a également octroyé au Centre de médiation des Gens du voyage et des Roms en Région wallonne une subvention de 89 580 euros en 2018 pour le projet Integroms qui consiste en l’aide et l’accompagnement des familles roms sans-abri.

192.Depuis 2004, le Centre est interpellé par des associations et services tels que les centres régionaux d’intégration, services du FOREM, des CPAS, des écoles, des centres pour demandeurs d’asile, des administrations communales pour les conseiller au sujet des questions suscitées par les publics Roms. Ces personnes rencontrent des obstacles croissants dans leur parcours d’insertion sociale, professionnelle, culturelle, éducative ou encore citoyenne, qui sont la cause et le résultat d’une discrimination et stigmatisation généralisée qui désorientent les associations et services chargés de les accompagner socialement, administrativement et professionnellement.

193.Le projet est évalué annuellement par le biais d’un comité d’accompagnement organisé par l’administration et où un représentant du cabinet et de l’association sont présents. Un rapport d’activité annuel est également transmis par le centre.

194.La Région de Bruxelles-Capitale subventionne depuis 2016 les communes et CPAS de la Région pour leurs actions en faveur de l’intégration des Roms. Les actions subventionnées sont très diverses : aide au logement, scolarisation des enfants, aide à la régularisation, actions de compréhension interculturelle, suivi des familles, etc. Le budget global consacré à ces subventions est de l’ordre de 600 000 euros par an.

I.2.1L’emploi

195.Avec l’appui d’ESF Vlaanderen (cofinancement européen et flamand), quatre projets sont en cours durant la période 2018-2019 à Anvers, Gand et Bruxelles. Ces projets se concentrent spécifiquement sur le soutien apporté aux Roms dans leur recherche d’emploi ou de formation, avec en parallèle également, une attention substantielle accordée aux éventuels prérequis.

196.Par ailleurs, des appels sont également subventionnés par ESF Vlaanderen. Ces appels ne sont pas spécifiquement axés sur ce groupe cible, mais s’adressent toutefois à de très nombreux Roms comme l’appel concernant l’accompagnement de groupes socialement vulnérables, avec des projets à Mortsel et Genk.

197.Depuis 2015, la Région de Bruxelles-Capitale attribue à ses dix-neuf CPAS 920 000 € annuels pour l’aide sociale aux publics fragilisés (personnes migrantes, personnes sans-abri, personnes dites Roms, et gens du voyage).

198.En outre, depuis 2016, 500 000 € annuels supplémentaires sont spécifiquement dédiés à l’aide aux personnes roms via un appel à projets aux CPAS qui peuvent concerner les 4 grands thèmes suivants : le logement, l’éducation, l’insertion professionnelle et l’accès aux soins de santé.

199.Ces politiques sont encadrées par des asbl spécialisées : le Foyer et le CIRÉ.

I.2.2L’éducation: l’accompagnement spécialisé et/ou des mesures positives proposés aux enfants roms dans l’enseignement

200.En Communauté flamande, plusieurs mesures et actions ont été réalisées, destinées à tous les élèves, mais une attention particulière est généralement accordée aux groupes vulnérables : notamment concernant la politique d’égalité des chances pour l’enseignement, la politique relative à la participation des jeunes enfants, la mobilisation pour la lutte contre l’interruption prématurée de scolarité, le Plan d’action sur l’absentéisme scolaire, la politique en matière d’encadrement des élèves.

201.La circulaire « Controle van de leerlingen in het gewoon basisonderwijs » (« Contrôler les élèves dans l’enseignement primaire ordinaire ») explique aux écoles comment elles peuvent prouver que les élèves de certains groupes cibles (tels que les Roms et gens du voyage sont inscrits à leur école et sont donc éligibles pour un financement supplémentaire).

202.Avec sa politique pour l’égalité des chances en matière d’enseignement, la Communauté flamande entend offrir à tous les enfants les mêmes possibilités optimales d’apprentissage et de développement. Cette politique se compose de trois piliers : droit d’inscription, protection juridique et soutien des écoles. Tous les élèves ont le droit de s’inscrire dans l’école de leur choix. Il en va de même pour les primo-arrivants allophones et les élèves ayant un rapport sur l’accès à l’enseignement spécial. L’autorité entend garantir la protection des droits en créant des plateformes de concertation locales ainsi que la Commissie inzake Leerlingenrechten (Commission des droits de l’élève). Les plateformes de concertation locales permettent de concrétiser l’égalité des chances en matière d’enseignement et la Commissie inzake Leerlingenrechten veille aux droits des élèves. Une école obtient un encadrement et des moyens de fonctionnement supplémentaires sur la base du nombre d’élèves qui correspondent à des indicateurs socio-économiques.

203.En Communauté française, les enseignants et les directions d’écoles peuvent faire appel à des services d’aide afin d’être accompagnés pour gérer les problèmes individuels et familiaux qui empêchent une inclusion favorable des enfants roms à l’école. Ces services d’aide sont soit dépendants de la Communauté française (le service de médiation scolaire, le service des équipes mobiles, les services d’accrochage scolaire), soit lui sont externes (asbl spécialisées).

204.En Région de Bruxelles-Capitale, l’accompagnement spécialisé se fait via les CPAS ou l’asbl «le Foyer».

205.Pour la COCOF, le suivi et l’aide sont effectués avec une assistante sociale et des associations spécialisées.

I.2.3La santé

206.La Belgique ne dispose pas de données (de soins) de santé d’ordre ethnique, de sorte qu’il est impossible de se prononcer, sur la base de chiffres, sur l’accès des Roms aux soins de santé. Un nombre considérable d’hôpitaux belges offrent en revanche des services de médiation interculturelle dans le but de réduire le plus possible les effets de la barrière linguistique et culturelle sur l’accessibilité et la qualité des soins pour les migrants et les minorités ethniques, dont les Roms. Cette médiation à l’hôpital est organisée sur place et à distance par vidéoconférence. Une vingtaine de médiateurs interculturels (sur un total de 100 environ) sont régulièrement sollicités pour des patients roms provenant de Roumanie, de Bulgarie et des autres pays des Balkans. Ces médiateurs interviennent également dans les centres de santé de quartier et les services médicaux des centres d’accueil des demandeurs d’asile (à distance uniquement). Les médiateurs interculturels qui travaillent avec des Roms ont participé au programme ROMED ainsi qu’au programme Equi-Health de l’Organisation internationale pour les migrations.

207.Outre les médiateurs interculturels financés par le SPF Santé publique, il existe dans certaines régions (Bruxelles et Namur p. ex.) des services de médiation qui se concentrent spécifiquement sur les Roms et dont certains sont actifs en matière de soins de santé également.

208.La Plateforme nationale belge pour les Roms aborde différents thèmes, tels la lutte contre la discrimination en matière de soins de santé, l’image préoccupante de la santé de la communauté rom, les obstacles pour accéder aux soins et les pratiques fructueuses. L’accès aux soins de santé primaires pour la population rom a également fait l’objet d’une attention particulière dans le cadre d’une table ronde.

209.En 2018, la Plateforme nationale belge pour les Roms a organisé un groupe de travail sur la dimension du genre, au sein duquel les différents sujets cités ont été abordés (p. ex. médiateurs dans les hôpitaux, soins de santé mentale, sexualité, obstacles dans les soins de santé…). La dimension du genre de l’intégration des Roms requiert plus d’attention. Il apparaît, en outre, qu’à ce jour ce thème est encore inconnu au sein de nombreuses organisations de terrain et institutions. C’est la raison pour laquelle la plateforme entend engager un processus de prise de conscience via un dialogue participatif. Des discussions critiques sur le thème de la « dimension du genre dans l’intégration des Roms » ont été organisées dans ce cadre. La mise en avant de bonnes pratiques existantes dans le domaine de l’intégration des Roms est un point récurrent à l’ordre du jour.

210.Depuis le 1er avril 2015, l’équipe de vaccination mobile parcourt toute la Communauté flamande afin de sensibiliser les groupes cibles qui ne le sont pas suffisamment à l’importance de la vaccination et de les vacciner gratuitement. L’accent est mis sur la vaccination des enfants, mais d’autres groupes peuvent également faire appel à l’équipe de vaccination mobile.

211.Des organisations officielles comme Kind en Gezin et les Centra voor Leerlingenbegeleiding (centres d’encadrement des élèves) touchent de très nombreux enfants, mais certains groupes passent quand même à travers les mailles du filet. Les Roms constituent également des groupes cibles potentiels. Tout groupe ne bénéficiant pas d’un accès aux soins de santé fait partie du groupe cible.

212.En tant que service de médecine préventive, le Service Hygiène des Services du Collège réuni de la COCOM agit comme coordinateur pour assurer que les acteurs concernés soient impliqués lorsque c’est nécessaire. Ainsi, un groupe de travail s’est réuni le 12 décembre 2017 à l’instigation du service Hygiène pour dégager des pistes de solutions à des problèmes d’insalubrité et de santé liées au sans-abrisme de certaines familles roms pendant l’hiver (Anderlecht). Des actions de coordination et un partage d’information entre les divers acteurs ont été entrepris (ONE, K&G, Samusocial, MDM, asbl Foyer, etc.).

I.3Logement des Roms - Sites de stationnement pour gens du voyage

213.Le Plan d’action flamand pour les migrants (Roms) 2012-2015 visait e.a. un contrôle accru dans les territoires et régions à forte concentration de migrants (Roms) par l’inspection flamande du logement dans le cadre de la lutte contre les marchands de sommeil.

214.Ce point est resté un objectif de la politique jusqu’en 2018. Durant la période 2011-2018, le fait qu’un logement était habité par des Roms a, dans douze cas, conduit à ce qu’une enquête soit menée sur place. Cela représentait 0,21 % du nombre total d’enquêtes menées sur place (5 733). Cela ne signifie toutefois pas que seuls douze des logements examinés étaient habités par des Roms. Des enquêtes peuvent également être menées dans des logements habités par des Roms sur la base des autres priorités, mais ces données ne sont pas conservées vu que les Roms peuvent avoir différentes nationalités.

215.Etant donné que ces chiffres sont peu élevés et que ce n’est jamais l’identité des habitants qui est l’élément déterminant pour que l’inspecteur du logement se rende sur place, mais bien la gravité des défauts d’un logement, les Roms ne sont désormais plus considérés comme une priorité distincte à partir de 2019. S’il est toutefois question de piètre qualité de logement, des immeubles abritant des Roms feront bien entendu toujours l’objet d’enquêtes.

216.Au cours de la période 2016-2018, la Région flamande a attribué les subventions suivantes pour des terrains de transit :

•Subvention de 195 000 euros pour un terrain de transit à Lille.

•Subvention de 1 804 140,17 euros pour l’aménagement du même terrain.

•Subvention de 1 243 933,70 euros pour l’aménagement d’un terrain de transit à Beersel (Huizingen).

En outre, il convient également de mentionner que le terrain de transit comptant 18 emplacements à Anvers (Herbouvillekaai à Hoboken) a été fermé en 2016. Des moyens ont également été prévus pour des terrains de campement résidentiel pour roulottes. Au total, les moyens destinés à l’acquisition, l’aménagement, l’extension et la rénovation de terrains de transit ont été augmentés de manière significative à partir de 2017 (2016 : 2 251 000 euros, 2017 : 5 551 000 euros, 2018 : 4 309 000 euros, 2019 : 4 309 000 euros).

217.En Région wallonne, en 2018, 11 pouvoirs locaux se sont engagés à organiser le séjour temporaire des Gens du voyage sur leur territoire. La plupart de ces pouvoirs locaux organisent l’accueil des Gens du voyage sur un terrain qui leur est dédié. L’offre de places disponibles sur les terrains d’accueil est néanmoins insuffisante au regard de la demande. Le Gouvernement wallon travaille dès lors à l’élaboration d’un projet de décret pour amplifier l’accueil des Gens du voyage. Actuellement, le pouvoir local qui souhaite aménager un terrain d’accueil pour les Gens du voyage peut toutefois déjà se mettre en contact avec la Région wallonne qui octroie des subventions en la matière.

218.En Région de Bruxelles-Capitale, depuis la mi-2018, il n’existe aucun site d’accueil pour les gens du voyages gérés par les pouvoirs publics sur le territoire de la Région Bruxelles-Capitale.

I.4Reconnaissance de caravanes comme domicile

219.En Région flamande, la caravane est un type de logement reconnu, repris dans le Code Logement. L’article 2 §1 33° définit une caravane comme une unité de logement, caractérisée par la flexibilité et la mobilité, destinée à l’habitation permanente et non-récréative. L’article 4 §1 4° c) dispose que la politique du logement de la Région flamande crée les conditions nécessaires à la réalisation du droit à un logement décent en développant des initiatives visant à améliorer les conditions de logement des habitants qui sont logés dans une roulotte.

220.Une étude préliminaire sur les possibilités, les conséquences juridiques et les besoins d’un système d’enregistrement pour les gens de voyage est disponible depuis mars 2019. Le but d’un système d’enregistrement est multiple. Pour les gestionnaires des terrains locaux et provinciaux, le système permet une gestion plus coordonnée des terrains de transit (réservations des places, éviter le surbooking, règlement des paiements, …). Le système permet également à la Région flamande de disposer d’informations politiques à jour et anonymes sur les gens du voyages dans tous les domaines politiques concernés, p. ex. l’enseignement (combien d’enfants voyagent-ils ?) et l’Agence Logement-Flandre : quel est le taux d’occupation des terrains ? Y a-t-il un grand besoin de créer des terrains supplémentaires ?

221.En Région wallonne, un projet de Décret insérant une définition de ce qu’est une « habitation légère » est en cours d’examen. À ce stade, il s’agit d’une reconnaissance d’une nature plutôt symbolique, qui n’entraîne pas de conséquences pratiques et n’empiète en aucune manière sur d’autres réglementations telles celles relatives à l’urbanisme et/ou à l’inscription dans les registres de la population. L’intention du Gouvernement est à présent de définir des critères minimaux de salubrité spécifiques à l’habitation légère. 

J.Demandeurs d’asile et les mesures non privatives de liberté

222.La détention des demandeurs de protection internationale et des étrangers en séjour illégal est régie par la loi, dans le respect de toutes les normes internationales relatives aux droits de l’homme nécessaires. Il est important de mentionner que les délais de détention prévus par la loi sont limités dans le temps.

223.En ce qui concerne le maintien de demandeurs de protection internationale pendant le traitement de leur demande, la loi sur les étrangers prévoit explicitement qu’aucun étranger ne peut être maintenu au seul motif qu’il a présenté une demande de protection internationale. Le maintien pendant le traitement de la demande de protection internationale n’est possible que dans les cas suivants :

•Possibilité de maintien pendant l’examen Dublin visant à déterminer l’État membre responsable et en vue du transfert vers l’État membre responsable ; s’il existe un risque non négligeable de fuite de la personne ;

•Possibilité de maintien à la frontière en attendant une autorisation d’entrer ou un refoulement du territoire ; si l’étranger ne remplit pas les conditions d’entrée et présente une demande de protection internationale aux autorités chargées du contrôle aux frontières ;

•Possibilité de maintien sur le territoire ; si l’un des quatre motifs de maintien est applicable (1° maintien pour établir/vérifier l’identité/la nationalité ; 2° lorsqu’il y a risque de fuite ; 3° si une demande pendant le maintien en vue de l’éloignement forcé a été introduite à seule fin de retarder ou d’empêcher l’exécution de la décision de retour ; 4° pour protéger l’ordre public ou la sécurité nationale).

224.Une mesure de maintien ne peut être imposée à un demandeur de protection internationale que lorsque cela s’avère nécessaire sur la base d’un examen individuel, et lorsqu’aucune autre mesure moins coercitive ne peut être efficacement appliquée. À ce jour, la loi prévoit une seule mesure moins coercitive, à savoir la désignation d’une résidence obligatoire ou l’assignation à résidence.

225.En ce qui concerne le maintien des étrangers à la frontière : si un étranger ne remplit pas les conditions d’entrée, le Code frontières Schengen (article 14 juncto article 6) impose de lui refuser l’accès au territoire de l’Union et de le maintenir en vue de son refoulement. Toutefois, à partir du moment où un étranger qui ne remplit pas les conditions d’entrée présente une demande de protection internationale à la frontière, il relève du champ d’application de la directive 2013/32/UE (directive Procédure) et de la directive 2013/33/UE (directive Accueil).

226.La Directive Accueil prévoit la possibilité de maintenir temporairement un demandeur de protection internationale à la frontière dans l’attente d’une décision d’autorisation ou de refus d’entrée dans le Royaume. La directive Procédure prévoit une procédure spécifique à la frontière pour les demandeurs de protection internationale maintenus temporairement à la frontière. Si l’autorité responsable de la détermination n’a pas pris de décision sur la demande de protection internationale dans les quatre semaines, l’accès doit être accordé au demandeur.

227.Dans le cadre du maintien d’un demandeur de protection internationale à la frontière, l’examen individuel est réalisé à la lumière de la surveillance effective des frontières. En principe, la surveillance des frontières devient seulement effective dès le moment où une mesure temporaire privative de liberté est imposée dans l’attente d’une autorisation d’entrée ou d’un refoulement du territoire. La levée automatique de la mesure de maintien à la suite de la simple introduction d’une demande de protection internationale à la frontière priverait la surveillance des frontières de tout effet.

228.En principe, d’autres mesures moins coercitives ne peuvent être efficacement appliquées aux demandeurs de protection internationale retenus à la frontière dès lors que ces mesures impliquent de facto une entrée dans le Royaume. Si, sur la base d’un examen individuel, il apparait toutefois que le demandeur a des besoins procéduraux spéciaux qui sont incompatibles avec l’examen de la demande de protection internationale conformément à la procédure à la frontière, le Commissariat-général aux réfugiés et aux apatrides, ci-après : CGRA, prendra une décision en vue d’un examen ultérieur et l’étranger sera autorisé à entrer dans le Royaume. Si le CGRA n’a pas encore statué sur la demande au bout de quatre semaines, le demandeur sera également autorisé à entrer dans le Royaume et le traitement de sa demande de protection internationale y sera poursuivi. Si des familles avec des enfants mineurs présentent une demande de protection internationale à la frontière, un lieu d’hébergement dans le Royaume leur est imposé à titre de mesure moins coercitive. Ces lieux d’hébergement sont assimilés à un lieu déterminé, situé aux frontières ; de ce fait, d’un point de vue juridique, ces familles ne sont pas considérées comme étant entrées dans le Royaume.

229.Depuis octobre 2008, des lieux d’hébergement existent pour accueillir les familles en séjour illégal. Les familles sont relativement libres d’aller et venir. À l’heure actuelle, 28 lieux d’hébergement sont utilisés, répartis sur cinq sites. Il s’agit de logements « communautaires », les maisons ou les appartements sont situés au centre de ces municipalités et ne peuvent pas être distingués des autres logements de la rue. Ces lieux d’hébergement sont destinées aux familles avec des mineurs, dans l’attente, selon le cas de leur accès au territoire, de leur autorisation de séjour, de leur reprise, de leur refoulement, de leur retour volontaire ou de leur éloignement. Chaque lieu d’hébergement est en principe occupé par une seule famille, afin de garantir la plus grande confidentialité possible.

K.Règlement Dublin III

230.Le Règlement Dublin III a été partiellement transposé dans la législation belge par la loi du 21 novembre 2017 modifiant la loi sur les étrangers et modifiant la loi du 12 janvier 2007 sur l’accueil des demandeurs d’asile et de certaines autres catégories d’étrangers :

•L’article 1er, § 2, de la loi sur les étrangers reprend 11 critères objectifs permettant d’évaluer/de déterminer le risque de fuite ;

•L’article 51/5 de la loi sur les étrangers a mis les possibilités de maintien en conformité avec le Règlement Dublin III. Lorsque, sur la base d’un examen individuel, il existe un risque non négligeable de fuite, et uniquement pour autant que le maintien soit proportionné et qu’aucune autre mesure moins coercitive ne puisse effectivement être appliquée, l’étranger peut être maintenu :

•Pour la durée nécessaire à la détermination de l’État qui est responsable de l’examen de la demande de protection internationale, le délai maximal de maintien est 6 semaines. Si la demande de prise en charge ou de reprise en charge n’est pas adressée à l’État membre responsable dans les délais fixés par le Règlement Dublin III, l’étranger ne peut plus être maintenu sur cette base.

•Pour la durée nécessaire à la mise en œuvre du transfert vers l’État responsable, le délai maximal de maintien est 6 semaines. Ce délai est toutefois interrompu d’office tant que le recours introduit contre la décision de transfert a un effet suspensif. Lorsque le transfert n’est pas exécuté dans ce délai de maintien, l’étranger ne peut être maintenu plus longtemps sur cette base.

L.La traite des êtres humains

L.1Plan national de lutte contre la traite et le trafic des êtres humains

231.La Belgique met actuellement en œuvre son troisième Plan d’action de lutte contre la traite des êtres humains. Il s’agit du plan d’action 2015-2019 qui court jusqu’à la fin de la législature. Il a été discuté et adopté par la Cellule Interdépartementale de coordination de la lutte contre la traite des êtres humains qui comprend tous les acteurs compétents en la matière (représentants des ministres, administrations, centres d’accueil pour victimes, etc.).

232.Par ailleurs, un addendum au plan d’action a été adopté en 2018 spécifiquement sur l’exploitation des mineurs L’addendum a été discuté avec les gouvernements fédérés. Il contient spécifiquement les actions qui seront entamées sur le plan fédéral.

233.Les entités fédérées développent également des initiatives propres et complémentaires, le tout étant discuté dans des groupes de travail spécifiques (voir ci-dessous).

234.Enfin au niveau fédéral, le Bureau de la Cellule Interdépartementale a entamé une réflexion plus générale sur l’application de la procédure de protection des victimes de traite aux mineurs. L’objectif est de voir dans quelle mesure il serait opportun ou non de modifier certains aspects du système pour davantage tenir compte de la situation du mineur.

235.Le Plan d’action flamand pour une meilleure protection des victimes de proxénètes d’adolescents a été présenté le 25 janvier 2016. Ce plan d’action est axé sur l’une des formes de traite des êtres humains, à savoir l’exploitation sexuelle de jeunes filles mineures, selon la méthode du proxénète d’adolescents. Par cette dénomination de « proxénètes d’adolescents » on entend ceux qui rendent intentionnellement des adolescents affectivement dépendants d’eux, afin de les exploiter ensuite dans la prostitution.

236.Dans le courant de l’année 2018, les actions lancées en 2016 et développées dans l’intervalle ont fait l’objet d’une évaluation critique. Conjointement avec l’ensemble des partenaires concernés, les actions ont été actualisées dans les quatre domaines suivants : prévention, protection, poursuites et partenariat. Un programme d’aide est développé dans le cadre duquel une offre plus large de structures d’aide collaborant entre elles doit permettre de répondre aux différents aspects et besoins d’un trajet sur mesure pour les victimes de proxénètes d’adolescents.

237.Sur base d’un contrat conclu avec le centre de référence « traite des êtres humains » Payoke, une consultation de deuxième ligne et une évaluation pour les acteurs de l’assistance intégrale à la jeunesse ont été prévues. Ce contrat garantit une approche qui réunit la perspective « traite des êtres humains » et l’assistance à la jeunesse. Cette initiative veut centraliser la détection de victimes, garantir la qualité de l’évaluation et prévoir le soutien juridique nécessaire aux victimes.

238.Sur le plan des initiatives avec la Communauté Française et la Communauté germanophone, un groupe de travail a été composé avec le SPF Justice. Il réunit les représentants du secteur judiciaire, les centres d’accueil spécialisés, Esperanto (centre hébergeant des MENA victimes de traite), l’administration de l’aide à la jeunesse, le service des tutelles.

239.Le groupe se penche plus particulièrement sur les démarches et contacts initiaux lorsqu’une situation de mineurs potentiellement victimes de traite des êtres humains est découverte. Un schéma d’orientation a été élaboré pour clarifier les points de questionnement qui existaient entre les normes du décret de l’aide à la jeunesse et les normes fédérales. La question de l’accueil est moins centrale dans ces discussions dans la mesure où Esperanto assure cette mission spécifique sur le territoire de la Communauté française.

240.Un schéma d’orientation a été élaboré qui complète les instructions existantes quant à l’orientation des mineurs victimes de traite. Il est prévu de tirer un premier bilan de son application. Par la suite, il y aura lieu de voir si d’autres formalisations sont nécessaires.

241.Par ailleurs, il a été décidé d’organiser deux formations pour les intervenants de première ligne des Services d’aide à la jeunesse et de protection de la jeunesse. Ces formations sont planifiées pour mai 2019 et l’objectif est de désigner dans chacune de ces institutions des personnes de référence en matière de traite des êtres humains. Du matériel didactique (indicateurs, …) sera mis à disposition des participants. Les formations se baseront sur le projet REACT (Reinforcing Assistance to Child Victims of Trafficking) développé par ECPAT qui se base sur des situations tirées d’exemples concrets.

L.2Les enquêtes, poursuites et peines

242.Sur le plan de la politique criminelle, la circulaire relative aux recherches et poursuites des faits de traite des êtres humains a été actualisée en 2015.

243.Par ailleurs, une brochure d’information a été distribuée dans le secteur bancaire afin de donner des informations sur les transactions frauduleuses potentiellement liées à la traite. L’objectif est de faciliter le signalement de ce type de transactions à la Financial Investigating Unit.

L.3Les victimes

244.Au niveau de l’aide aux victimes, la circulaire COL 8/2008 relative à la mise en œuvre d’une coopération multidisciplinaire concernant la traite des êtres humains et/ou de certaines formes aggravées de trafic des êtres humains a été revue le 23 décembre 2016. Elle met davantage l’accent sur les victimes mineures et insiste aussi sur l’identification des victimes nationales.

245.Par ailleurs, une campagne de sensibilisation a été lancée en 2018 dans les hôpitaux afin de les informer sur les indicateurs de traite chez les victimes qui peuvent se retrouver prises en charge par le secteur médical. Une journée de sensibilisation du secteur a aussi été organisée dans le cadre Benelux.

246.La loi sur les étrangers a par ailleurs été modifiée afin de changer le type de document qui était délivré aux victimes dans le cadre de la période de réflexion de 45 jours. Il s’agissait auparavant d’un « ordre de quitter le territoire de 45 jours » qui était un document à connotation négative pour les victimes. Il s’agit depuis 2017 d’une annexe 15 (attestation de séjour provisoire).

247.De nombreuses autres actions mises en œuvre par Fedasil, la Cellule Interdépartementale de coordination de la lutte contre la traite et le trafic illicite d’êtres humains et d’autres entités peuvent être trouvées dans l’annexe 9.

L.4Statistiques

248.Le Rapport annuel traite et trafic des êtres humains 2018 mineurs en danger majeur de Myria contient de nombreuses statistiques dont une partie reprend la variable nationalité.

Article 6 : Voies de recours et suites judiciaires réservées aux plaintes

249.Pour plus d’informations à ce sujet, il est renvoyé à l’article 2, C. 4. 3.

Article 7 : Non-discrimination dans les domaines de l’enseignement, de l’éducation, de la culture et de l’information

250.En Communauté française, l’éducation à la philosophie et à la citoyenneté, inscrite au programme des écoles primaires (2016) et secondaires (2018) compte parmi ses objectifs pédagogiques « se connaître soi-même et s’ouvrir à l’autre », « construire la citoyenneté dans l’égalité en droits et en dignité » ainsi que l’acquisition de compétences facilitant la déconstruction des préjugés et des discriminations. Les principes d’égalité et de non-discrimination ont été introduits dans les critères d’agrément des manuels scolaires (décret du 30 juin 2016 modifiant le décret relatif au pilotage du système éducatif de la Communauté française). Le renforcement de la gouvernance du système éducatif prévu dans la cadre du Pacte d’excellence donne aux écoles les outils de mise en place de stratégies de promotion de la citoyenneté et de prévention des discriminations dans le cursus et l’orientation scolaire. Un soutien scolaire renforcé sera mis en place à la rentrée 2019-2020. L’adoption d’un tronc commun (de 3 à 15 ans) vise notamment la réduction des séparations verticales et horizontales de la population scolaire. Outre cet effet structurel, elle donne lieu à une adaptation des approches pédagogiques dans le but de mieux prendre en compte la diversité de la population scolaire. La réforme de la formation initiale des enseignants, adoptée en février 2019, inclut un volet important visant le renforcement de la démocratie scolaire, notamment par l’acquisition de compétences en psychologie sociale et dans le domaine de la diversité culturelle et des inégalités fondées sur les critères du décret du 12 décembre 2008 relatif à la lutte contre certaines formes de discriminations. L’offre de formation scolaire a été développée, notamment dans les domaines de l’accueil et l’inclusion des primo-arrivants, la prise en compte de la diversité culturelle, la place du droit à l’école, l’éducation à la citoyenneté, l’égalité des genres et la compréhension des processus de radicalisation menant à la violence.

A.Le port de symboles religieux

251.Pour plus d’informations à ce sujet, il est renvoyé à l’article 2, C. 5.

B.Les cultures et les langues des groupes de migrants établis sur le territoire

252.Une campagne flamande s’est déroulée en 2017 contre la discrimination et les préjugés de tous bords. Un petit film, diffusé à la télévision nationale, montre l’impact de remarques inappropriées et désobligeantes. La campagne était axée sur différents groupes cibles et avait pour slogan « Zit u hier voor iets tussen? » (y êtes-vous pour quelque chose ?). La campagne se décline également en un certain nombre de petits films web et de témoignages de victimes diffusés sur les médias sociaux.

253.En Communauté flamande, la langue d’enseignement est le néerlandais. Diverses initiatives sont en cours pour renforcer le néerlandais des nouveaux arrivants de langue étrangère.

254.Les écoles peuvent prendre certaines initiatives pour la sensibilisation à ou l’enseignement de différentes langues vivantes. Dans l’enseignement primaire, les écoles peuvent commencer à sensibiliser leurs enfants dès la maternelle, quelle que soit la langue. Dans l’enseignement secondaire, toutes les langues vivantes peuvent être enseignées à l’école. Vu que ces initiatives sont facultatives et non obligatoires, seule une minorité d’écoles les organisent.

255.La campagne « Het is gauw gebeurd » (C’est vite arrivé) a déjà été décrite aux paragraphes 34, 87, 88.

Autres recommandations

A.Déclaration et programme d’action de Durban

256.Il est renvoyé au § 15 du présent rapport.

B.Amendement à l’article 8 de la Convention

257.La Belgique a accepté l’Amendement à l’article 8 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, 1992 (11 novembre 2016).