Nations Unies

CRC/C/82/D/36/2017

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

8 novembre 2019

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’enfant

Décision adoptée par le Comité au titre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications, concernant la communication no 36/2017 * , **

Communication présentée par:

A. S. (représenté par un conseil, N. E. Hansen)

Victime(s) présumée(s) :

L’auteur

État partie :

Danemark

Date de la communication:

18 octobre 2017 (date de la lettre initiale)

Date de la décision :

26 septembre 2019

Objet:

Expulsion d’un enfant et de sa mère vers le Pakistan

Question(s) de procédure :

Épuisement des recours internes ; défaut de fondement des griefs

Question(s) de fond:

Interdiction de la discrimination ; intérêt supérieur de l’enfant ; mise en œuvre des droits ; droit à la vie ; droit de l’enfant d’être élevé par ses parents ; droit de l’enfant de préserver son identité

Article(s) de la Convention:

2, 3, 4, 6, 7 et 8

Article(s) du Protocole facultatif:

7 c), e) et f)

1.1L’auteur de la communication est A. S., de nationalité pakistanaise, né en 2008. L’auteur et sa mère font l’objet d’un arrêté d’expulsion. L’auteur affirme que son expulsion constituerait une violation des droits qu’il tient des articles 2, 3, 4, 6, 7 et 8 de la Convention. Il est représenté par un conseil. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour le Danemark le 7 janvier 2016.

1.2Le 23 octobre 2017, le Groupe de travail des communications, agissant au nom du Comité et se fondant sur l’article 6 du Protocole facultatif, a demandé à l’État partie de ne pas renvoyer l’auteur et sa mère dans leur pays d’origine tant que la communication serait à l’examen.

Rappel des faits présentés par l’auteur

2.1En mai 2011, alors qu’il était âgé de 2 ans, l’auteur est arrivé au Danemark avec ses parents. Le 18 juin 2012, la famille s’est vu accorder l’asile et a obtenu un permis de séjour. À une date non précisée, les parents de l’auteur ont divorcé et, depuis, l’auteur vit avec sa mère. Bien que l’auteur reste en contact avec son père, qui vit dans la même ville, celui-ci, en raison d’un « handicap mental », n’est pas en mesure de s’occuper de l’auteur. L’auteur affirme que, furieux de voir que ses parents avaient divorcé et que son père « avait perdu son statut de chef de famille », les membres de sa famille paternelle au Pakistan ont proféré des menaces contre l’auteur et sa mère.

2.2En janvier 2013, un magazine danois a publié un article dans lequel le père de l’auteur était accusé d’avoir obtenu le statut de réfugié en mentant sur sa situation. En conséquence, l’affaire a été présentée par un parti de droite représenté au Parlement danois comme un exemple de fraude à l’asile, et le dossier de demande de permis de séjour de la famille a été rouvert par le Service danois de l’immigration. Le 17 décembre 2014, le Service de l’immigration a révoqué et supprimé les permis de séjour qui avaient été accordés à l’auteur et à ses parents.

2.3La mère de l’auteur a contesté la décision du Service de l’immigration devant la Commission danoise de recours des réfugiés, alléguant qu’en raison de son divorce et de son statut de mère célibataire, elle craignait qu’elle‑même et l’auteur soient persécutés au Pakistan. Elle a contesté séparément la révocation des permis de séjour accordés à l’auteur et à elle-même, compte tenu du divorce et du fait que la famille ne constituait plus une « communauté ». Elle a fait valoir que l’auteur, en sa qualité d’enfant, ne devait pas subir les conséquences négatives des actes frauduleux que son père aurait commis.

2.4Le 24 mars 2015, la Commission de recours des réfugiés a confirmé la décision du Service de l’immigration, estimant que la demande d’asile de la mère était identique à celle du père et qu’il avait été prouvé que les informations cruciales fournies dans ce contexte avaient été inventées de toutes pièces. La Commission a en outre fait observer que la mère de l’auteur n’avait pas tissé de liens avec le Danemark au cours des années passées dans ce pays, qu’elle avait de la famille au Pakistan et qu’elle n’avait pas démontré qu’elle risquait de faire face à des problèmes si elle était renvoyée dans ce pays.

2.5L’auteur a demandé un permis de séjour à titre individuel, faisant valoir qu’il avait vécu au Danemark cinq années décisives pour son développement, qu’il n’avait aucun souvenir du Pakistan puisqu’il était arrivé au Danemark à l’âge de 2 ans et qu’il était par conséquent dans son intérêt supérieur de rester au Danemark. Le 22 septembre 2015, le Service de l’immigration a rejeté sa demande. Le 9 décembre 2015, la Commission de recours en matière d’immigration a également rejeté le recours introduit par l’auteur contre cette décision. L’auteur souligne que la Commission de recours en matière d’immigration a considéré que « puisque l’auteur était âgé de 7 ans et qu’il était donc mineur, la Commission de recours des réfugiés avait présumé dans sa décision que la véritable destinataire de la décision était la mère de l’auteur ».

2.6Le 9 février 2016, l’auteur a demandé au Département des affaires civiles une aide juridictionnelle gratuite en vue de faire appel de la décision de la Commission de recours en matière d’immigration. Le 5 juillet 2016, sa demande a été rejetée et, le 20 octobre 2016, ce rejet a été confirmé par la Commission danoise d’autorisation des recours.

Teneur de la plainte

3.1L’auteur affirme que son expulsion vers le Pakistan violerait le principe de non‑refoulement énoncé à l’article 2, lu conjointement avec les articles 6, 7 et 8 de la Convention. Il ajoute qu’en ne tenant pas compte du risque qu’il court d’être persécuté et de voir sa vie menacée en cas de retour au Pakistan, la Commission danoise de recours des réfugiés n’a pas pris en compte la gravité du dommage irréparable auquel il serait exposé ni l’éventualité de son décès.

3.2Le renvoi de l’auteur au Pakistan irait également à l’encontre de son droit à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale, énoncé à l’article 3 de la Convention. Ce renvoi exposerait l’auteur au risque d’être séparé de sa mère, en violation des articles 7 et 8 de la Convention. L’auteur affirme que, selon la loi pakistanaise, un enfant de sexe masculin « appartient » jusqu’à l’âge de 7 ans à sa mère et au-delà à son père et, qu’en l’espèce, lui-même « appartient » à la famille de son père, au Pakistan.

3.3L’auteur affirme que son retour au Pakistan mettrait gravement en péril sa vie, sa survie et son développement, en violation de l’article 6 de la Convention. Ce retour violerait son droit d’être enregistré, d’acquérir une nationalité et d’être élevé par ses parents conformément à l’article 7 de la Convention. Il serait également contraire à l’obligation qui incombe à l’État partie de protéger le droit de l’auteur de ne pas être privé de son identité, prévue à l’article 8 de la Convention.

3.4En refusant d’accorder à l’auteur une aide juridictionnelle gratuite pour lui permettre de saisir les tribunaux danois, l’État partie a violé l’article 4 de la Convention en ce qu’il a empêché l’auteur d’engager une procédure visant à ce que les tribunaux internes constatent des violations de la Convention. En outre, l’auteur affirme que le manque d’accès des enfants à l’aide juridictionnelle gratuite, dû aux nouvelles règles adoptées par le Danemark, témoigne de la non-prise en compte des besoins des enfants.

Observations de l’État partie sur la recevabilité

4.1Dans ses observations datées du 22 décembre 2017, l’État partie affirme que la communication est irrecevable car les recours internes n’ont pas été épuisés. Le 9 décembre 2015, la Commission de recours en matière d’immigration a confirmé la décision du Service danois de l’immigration de ne pas examiner la demande de permis de séjour présentée par l’auteur. La décision de la Commission de recours en matière d’immigration est susceptible de recours devant les tribunaux conformément à l’article 63 de la Constitution. Par conséquent, la décision n’est définitive qu’une fois qu’elle a fait l’objet d’un recours et que le droit à un contrôle juridictionnel a été exercé.

4.2L’État partie fait valoir que le refus d’accorder à l’auteur une aide juridictionnelle gratuite ne change rien au fait que l’auteur n’a pas épuisé les recours internes. L’État partie renvoie à la décision rendue par le Comité des droits de l’homme dans l’affaire P . S . c . Danemark , dans laquelle le Comité a jugé que des considérations financières et des doutes quant à l’utilité des recours internes ne sauraient dispenser l’auteur d’épuiser les voies de recours. L’État partie affirme que le Comité devrait être lié par la jurisprudence du Comité des droits de l’homme et que les recours internes n’ont pas été épuisés en l’espèce.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie concernant la recevabilité

5.1Dans des commentaires datés des 5 février et 30 avril 2018 l’auteur affirme que, comme il n’avait pas droit à une aide juridictionnelle gratuite, sa demande a été rejetée par le Service danois de l’immigration et il n’a pas eu la possibilité de faire appel. Le 20 octobre 2016, la Commission d’autorisation des recours a confirmé la décision de refus de l’aide juridictionnelle gratuite. Le 15 novembre 2017, la Cour suprême nationale a jugé dans une autre affaire que les demandeurs d’asile ne bénéficiaient pas du droit de rester au Danemark pendant la procédure et que la décision n’était pas susceptible d’appel. L’auteur affirme que ces décisions le privent de recours utiles.

5.2L’auteur fait valoir que l’argument de l’État partie selon lequel des considérations financières et des doutes quant à l’utilité des recours internes ne sauraient le dispenser d’épuiser les voies de recours est nul et confirme que les décisions de la Commission danoise de recours des réfugiés ne sont pas vraiment susceptibles d’appel.

5.3Enfin, l’auteur affirme que son statut d’enfant accompagné le prive de toute possibilité de faire examiner son cas par la justice et que les recours internes ont donc été épuisés.

Observations de l’État partie sur le fond

6.1Dans ses observations datées du 3 décembre 2018, l’État partie affirme qu’en sa qualité d’enfant, l’auteur ne peut pas invoquer de motifs d’asile individuels. Il ajoute que l’auteur tient son permis de séjour uniquement de ceux qui ont été accordés à ses parents. En conséquence, les faits présentés en l’espèce justifient la révocation du permis de séjour de l’auteur pour les mêmes raisons que celles qui ont motivé la révocation des permis de séjour de ses parents. L’État partie ajoute que, lorsqu’elle a statué sur la révocation du permis de séjour de l’auteur, la Commission de recours des réfugiés a pris en compte les droits que l’auteur tient de la Convention.

6.2L’État partie fait observer que l’évaluation par la Commission de recours des réfugiés de la demande d’asile présentée par les parents de l’auteur était pertinente. La Commission a considéré les déclarations du père comme étant les motifs d’asile de la famille et a estimé que la mère savait que son permis de séjour et celui de son ex‑conjoint avaient été obtenus de manière frauduleuse. Étant donné que le père de l’auteur avait fait des déclarations contradictoires, imprécises et incohérentes et avait obtenu des permis de séjour de manière frauduleuse, la demande d’asile présentée par l’auteur et par sa mère a également été rejetée et leurs permis de séjour ont été révoqués.

6.3En ce qui concerne les liens de l’auteur avec le Danemark, l’État partie fait observer que, lorsqu’elle a décidé de révoquer le permis de séjour de l’auteur, la Commission de recours des réfugiés a tenu compte de la situation particulière de celui‑ci (à savoir son âge, sa scolarisation au Danemark, sa bonne connaissance du danois et l’absence de famille élargie vivant au Danemark), élément qui fait partie intégrante de l’examen du dossier. La Commission a estimé que, comme l’auteur était très jeune à son arrivée au Danemark, il ne lui serait pas particulièrement pénible de retourner au Pakistan et qu’il était dans son intérêt supérieur de rester avec ses parents.

6.4L’État partie fait observer que l’auteur n’a relevé aucune irrégularité dans la prise de décisions ni mentionné aucun facteur de risque dont les autorités danoises n’auraient pas dûment tenu compte.

6.5L’État partie affirme que l’auteur n’a pas suffisamment établi que son renvoi au Pakistan constituerait une violation des articles 2, 3, 6, 7 ou 8 de la Convention. Se fondant sur le libellé du paragraphe 27 de l’observation générale no 6 (2005) du Comité sur le traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine, l’État partie affirme que le retour d’un enfant dans son État d’origine ne constitue pas une violation de la Convention, tant que l’enfant n’est pas exposé à un risque réel de dommage irréparable. L’État partie fait valoir en outre que les nouveaux éléments d’information concernant les menaces proférées par les membres de la famille paternelle de l’auteur sont peu crédibles et sont confus et que, par conséquent, l’auteur ne court pas le risque d’être séparé de sa mère s’il est renvoyé au Pakistan. Le droit danois prend en compte l’intérêt supérieur de l’enfant, et la Commission de recours des réfugiés et la Commission de recours en matière d’immigration ont déjà estimé que la situation décrite par l’auteur ne laissait pas supposer que celui-ci serait exposé à un risque de dommage irréparable.

6.6L’État partie souligne en outre que le grief de l’auteur selon lequel l’article 3 de la Convention serait violé s’il était renvoyé au Pakistan est dénué de fondement. L’État partie affirme que l’auteur n’a fourni aucun élément d’information ou document montrant que lui‑même et sa mère ne pourraient pas résider ensemble dans leur pays d’origine.

6.7En ce qui concerne l’article 2 de la Convention, l’État partie fait observer que l’auteur n’a fait l’objet d’aucune discrimination fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, les opinions politiques ou autres, l’origine nationale, ethnique ou sociale de lui-même ou de ses parents, la fortune, le handicap, la naissance ou toute autre situation.

6.8En outre, l’État partie affirme qu’il n’a pas violé l’article 4 de la Convention en refusant d’accorder à l’auteur une aide juridictionnelle gratuite. Il fait valoir que l’auteur n’a pas suffisamment établi que lui‑même ou son représentant ne disposait pas de voies de recours utiles et appropriées pour faire constater d’éventuelles violations de la Convention. S’appuyant sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, notamment l’arrêt Steel et Morris c . Royaume-Uni, dans lequel la Cour a jugé que « [t]outefois, le droit d’accès aux tribunaux n’est pas absolu ; il peut donner lieu à des limitations à condition que celles-ci poursuivent un but légitime et soient proportionnées », l’État partie affirme que la Commission d’autorisation des recours, à l’issue de la procédure juridique prévue, a estimé que les conditions n’étaient pas réunies pour accorder l’aide juridictionnelle gratuite dans le cas de l’auteur. En conséquence, l’État partie n’a pas violé l’article 4 de la Convention.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie concernant le fond

7.1Dans ses commentaires datés du 18 mars 2019, l’auteur signale que la question de l’aide juridictionnelle gratuite, aux niveaux national et international, est cruciale en ce qu’elle peut avoir une incidence sur la capacité des enfants à faire appel de décisions judiciaires. Il ajoute que l’aide juridictionnelle gratuite permet de garantir que les mécanismes de protection des droits de l’homme sont accessibles à tous les enfants, et pas seulement à ceux qui ont les moyens de rémunérer un avocat. Il fait remarquer que lesaffaires traitées par le Danemark sont concernées puisqu’il n’y a eu aucun cas d’octroi d’une aide juridictionnelle gratuite par les autorités danoises dans des affaires d’expulsion depuis que les règles nationales relatives à l’aide juridictionnelle au niveau international ont été modifiées dans le pays.

7.2L’auteur affirme que l’État partie a mis davantage l’accent sur le dossier d’asile de son père que sur les faits qui le concernent personnellement. Il soutient que les autorités danoises n’ont pas tenu compte de sa situation particulière (à savoir l’âge qu’il avait lorsqu’il est arrivé au Danemark, le temps qu’il a passé dans le pays, le fait qu’il ait fréquenté une école maternelle, sa connaissance du danois, etc.). Il fait valoir qu’au vu de ces circonstances, sa propre demande d’asile et celle de son père sont tout à fait distinctes.

7.3L’auteur affirme que, lorsqu’il a examiné la question de savoir si l’auteur serait séparé de sa mère une fois rentré au Pakistan, l’État partie a supposé à tort que le Pakistan respecterait une décision rendue par les autorités danoises en matière de garde.

7.4Enfin, l’auteur demande que son dossier soit rouvert, et renvoie à cet égard à l’affaire L . G . et X . C . c . Danemark.

Observations complémentaires de l’État partie

8.1Dans ses observations datées du 3 juin 2019, l’État partie affirme que l’auteur n’a fourni aucune nouvelle information dans ses commentaires.

8.2En ce qui concerne la demande de l’auteur tendant à ce que son dossier soit rouvert, l’État partie fait valoir que l’affaire L . G . et X . C . c . Danemark n’est pas comparable, puisque des circonstances nouvelles non contestées y ont été présentées (la mère de l’auteur était enceinte), alors qu’en l’espèce l’auteur n’a pas établi qu’il existait des motifs sérieux de croire que sa vie serait en danger s’il retournait au Pakistan, puisqu’il n’a fait état d’aucune circonstance nouvelle.

8.3L’État partie réaffirme que l’auteur n’a pas suffisamment établi que lui-même ou son conseil ne disposaient pas de recours utiles appropriés pour faire constater d’éventuelles violations de la Convention. Il fait également observer qu’il appartient au Comité non pas de décider dans l’abstrait si la législation interne est ou non compatible avec la Convention, mais de déterminer si une violation a été commise dans le cas particulier qui lui est soumis.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

9.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité doit, conformément à l’article 20 du Règlement intérieur au titre du Protocole facultatif, déterminer si la communication est recevable au regard du Protocole facultatif.

9.2Le Comité prend note de l’argument de l’État partie, qui affirme que l’auteur n’a pas épuisé les recours internes puisque : a) il n’a pas fait appel devant les tribunaux de la décision rendue le 9 décembre 2015 par la Commission de recours en matière d’immigration ; et b) le refus de l’aide juridictionnelle gratuite ne change rien au fait que l’auteur n’a pas épuisé les recours internes. Toutefois, le Comité prend également note des arguments de l’auteur, qui fait valoir que les décisions de la Commission de recours des réfugiés ne sont pas susceptibles d’appel, qu’il a essayé d’obtenir une aide juridictionnelle pour être en mesure de demander un contrôle juridictionnel approprié et qu’il a été débouté, ce qui l’a privé de toute voie de recours. Compte tenu de ce qui précède, le Comité considère que l’article 7 e) du Protocole facultatif ne fait pas obstacle à la recevabilité de la communication.

9.3Le Comité prend note des griefs que l’auteur tire des articles 2, 6, 7 et 8 de la Convention. Il constate toutefois que ces griefs ont un caractère général et que l’auteur ne présente aucune information ni aucun argument qui puissent montrer en quoi les droits que lui confèrent les dispositions invoquées seraient violés en cas d’expulsion vers le Pakistan. Le Comité considère par conséquent que ces griefs sont manifestement infondés et les déclare irrecevables au regard de l’article 7 f) du Protocole facultatif.

9.4Le Comité prend également note des griefs de l’auteur fondés sur l’article 3 de la Convention, à savoir que son renvoi au Pakistan serait contraire à son intérêt supérieur, l’exposant au risque d’être séparé de sa mère, et que les autorités danoises n’ont pas tenu compte de sa situation particulière dans les différentes procédures. Toutefois, le Comité prend note de l’argument de l’État partie, qui fait valoir que l’intérêt supérieur de l’auteur a été dûment pris en considération tout au long des différentes procédures, l’examen de la situation particulière de l’auteur (notamment son âge, sa scolarisation, ses compétences linguistiques et sa situation familiale) ayant fait partie intégrante de ces procédures, et que l’auteur n’a pas relevé d’irrégularités particulières dans la prise de décisions ni mentionné de facteurs de risque dont les autorités danoises n’auraient pas dûment tenu compte.

9.5Le Comité rappelle que l’existence d’un risque de violation grave de la Convention dans l’État d’accueil devrait être appréciée eu égard à l’âge et au sexe de l’enfant, que l’intérêt supérieur de l’enfant devrait être une considération primordiale dans les décisions concernant le renvoi d’un enfant, et que ces décisions devraient garantir que l’enfant, à son retour, sera en sécurité, sera correctement pris en charge et jouira de ses droits. La prise en considération de l’intérêt supérieur de l’enfant devrait être expressément assurée au moyen de procédures individuelles, faisant partie intégrante de toute décision administrative ou judiciaire concernant le renvoi d’un enfant.

9.6Le Comité rappelle également que, d’une manière générale, c’est aux organes des États parties qu’il incombe d’examiner et d’apprécier les faits et les éléments de preuve pour déterminer s’il existe un risque de violation grave de la Convention en cas de renvoi, à moins qu’il ne soit établi que cette évaluation a été manifestement arbitraire ou a constitué un déni de justice.

9.7En l’espèce, le Comité constate que la Commission de recours des réfugiés et la Commission de recours en matière d’immigration ont examiné, en même temps que la situation particulière de l’auteur, le nouveau motif d’asile invoqué par celui-ci, à savoir les menaces qui auraient été proférées par les membres de sa famille paternelle au Pakistan, mais qu’elles ont rejeté ce motif, considérant qu’il était peu crédible et présenté de manière confuse. Elles ont conclu que l’auteur ne risquerait pas d’être séparé de sa mère s’il était renvoyé au Pakistan et qu’il était dans son intérêt supérieur de rester avec sa mère.

9.8Le Comité fait observer que, s’il conteste les conclusions de la Commission de recours des réfugiés et de la Commission de recours en matière d’immigration, l’auteur n’a pas établi que leur appréciation des faits et des éléments de preuve qu’il avait présentés était arbitraire ou avait constitué un déni de justice. Le Comité considère donc que cette partie de la communication n’est pas non plus suffisamment étayée et la déclare irrecevable au regard de l’article 7 f) du Protocole facultatif.

9.9Enfin, le Comité prend note du grief de l’auteur selon lequel l’État partie a violé les obligations qui lui incombent au titre de l’article 4 de la Convention, la Commission d’autorisation des recours ayant rejeté la demande d’aide juridictionnelle gratuite que l’auteur avait présentée pour porter sa demande d’asile devant les tribunaux danois. Le Comité prend également note de l’affirmation de l’État partie selon laquelle la Commission d’autorisation des recours, à l’issue de la procédure juridique prévue, a estimé que les conditions n’étaient pas réunies pour accorder l’aide juridictionnelle gratuite dans le cas de l’auteur. Le Comité considère que l’article 4 de la Convention, qui dispose que les États parties s’engagent à prendre toutes les mesures législatives, administratives et autres qui sont nécessaires pour mettre en œuvre les droits reconnus dans la présente Convention, englobe le droit à un recours utile lorsqu’une violation de la Convention a été établie. Toutefois, le Comité considère que l’article 4 énonce des obligations générales qui ne peuvent être invoquées que conjointement avec d’autres droits garantis par la Convention dans le cadre de la procédure de présentation de communications par des particuliers au titre du Protocole facultatif. Étant donné que l’auteur de la présente communication n’a pas étayé, aux fins de la recevabilité, ses allégations de violation des droits qu’il tient des articles 2, 3, 6, 7 et 8 de la Convention, son allégation de violation de l’article 4 de la Convention est également irrecevable au regard de l’article 7 f) du Protocole facultatif. Le Comité déclare donc que le grief soulevé par l’auteur au titre de l’article 4 est irrecevable au regard de l’article 7 f) du Protocole facultatif.

10.En conséquence, le Comité décide :

a)Que la communication est irrecevable au regard de l’article 7 f) du Protocole facultatif ;

b)Que la présente décision sera communiquée à l’auteur de la communication et, pour information, à l’État partie.