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Introduction

3

Méthode et procédure d’établissement du rapport

3

Renseignements d’ordre général

4

Cadre constitutionnel et législatif

6

Accès à la justice

12

Mécanisme national de promotion des femmes

14

Instance nationale des droits de l’homme

20

Mesures temporaires spéciales

21

Stéréotypes

21

Violence à l’égard des femmes fondée sur le genre

23

Violence fondée sur le genre à l’égard des femmes dans les situations de conflit et de consolidation de la paix

28

Traite des personnes et exploitation de la prostitution

30

Participation à la vie politique et publique

33

Nationalité

39

Enseignement

40

Emploi

42

Santé

46

Émancipation économique des femmes

51

Émancipation économique et sociale des femmes en milieu rural

53

Catégories de femmes défavorisées

54

Mariages et liens de famille

58

Introduction

La Tunisie a signé le 24 juillet 1980 la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et l’a ratifiée le 12 juillet 1985 par la loi no 68 de 1985. Elle en a ratifié le Protocole facultatif par la loi no 35 du 9 juin 2008.

Le décret no 103 du 24 octobre 2011 a porté autorisation du retrait de la déclaration et des réserves émises par le Gouvernement tunisien et a été suivi de la promulgation de l’ordonnance no 4260 du 28 novembre 2011 portant ratification du retrait desdites déclaration et réserves.

La Tunisie a soumis son septième rapport selon la procédure simplifiée, en application de l’article 18 de la Convention et de la recommandation no 70 des observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, à la suite de l’examen, à ses 949e et 950e sessions tenues en novembre 2010, de son rapport unique valant cinquième et sixième rapports périodiques (CEDAW/C/TUN/QPR/7).

Le présent rapport a été établi au lendemain d’une période charnière de l’histoire de la Tunisie au cours de laquelle celle-ci a connu des bouleversements radicaux à la suite de la révolution de décembre 2010-janvier 2011, qui a entraîné une modification du système politique, suivie de changements considérables à plusieurs niveaux.

Le présent rapport dresse le bilan des progrès enregistrés sur le plan de l’application des articles de la Convention et des faits récents les plus importants qui se sont produits sur les plans législatif, réglementaire, judiciaire, administratif, institutionnel et pratique en général, sur la base des recommandations et observations formulées par le Comité ainsi que des précédents rapports périodiques du pays et du document de base commun (HRI/CORE/TUN/2016).

La Commission nationale de coordination, d’élaboration et de présentation des rapports et de suivi des recommandations dans le domaine des droits de l’homme a entrepris d’établir le présent rapport au moyen d’une approche participative, dans le cadre d’un processus et d’une méthode auxquels elle est restée fidèle depuis sa création.

Méthode et procédure d’établissement du rapport

Dans le cadre de son approche participative à l’élaboration des rapports nationaux et en coopération avec la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme en Tunisie et l’Entité des Nations Unies pour l’égalité entre les sexes et l’autonomisation de la femme (ONU-Femmes), la Commission nationale a organisé des activités avec la participation d’associations de la société civile, d’organisations constitutionnelles et nationales et d’organismes gouvernementaux, qui ont débouché sur un certain nombre de recommandations (voir annexe I). Ces activités comprenaient :

•des consultations électroniques au moyen de l’envoi d’une liste de questions à 35 associations de défense des droits des femmes ;

•une concertation régionale tenue dans la ville de Tabarka (gouvernorat de Jendouba) le 26 juin 2020 à laquelle ont participé 75 personnes dont des représentants de plus de 12 associations de la société civile des gouvernorats de Beja, de Kef et de Siliana ;

•une consultation nationale à Tunis le 10 juillet 2020, à laquelle ont participé 82 personnes, dont des représentants de 26 associations.

La Commission nationale a également organisé le 11 juin 2020, à l’intention de ses membres, une journée de formation à la Convention.

La Commission nationale considère que le présent rapport est une occasion de renouer des contacts constructifs avec le Comité, d’autant plus que 10 années se sont écoulées depuis la présentation du dernier rapport et les observations et recommandations qui y avaient été formulées.

I.Renseignements d’ordre général

A.Renseignements d’ordre général sur la situation des femmes

Sur la base des données du recensement général de la population et de l’habitat de 2014 et des données fournies par les organismes de statistique, les femmes constituent 50,2 % de l’ensemble de la population. L’âge moyen des femmes est estimé à 32,4 ans contre 31,7 ans pour les hommes.

Le nombre moyen de naissances vivantes chez les femmes de moins de 20 ans est passé de 0,02 en 2004 à 0,07 en 2014, malgré la baisse de la moyenne générale des naissances, qui est passé de 1,51 à 1,33 au cours de la même période.

Les ménages dirigés par des femmes ne représentaient que 14,5 % du nombre total de familles. Parmi ces femmes, 49 % avaient plus de 60 ans et 24,6 % vivaient seules.

Le taux de scolarisation au cours de l’année scolaire 2019/20 était de 99,6 % pour les filles âgées de six ans, contre 99,5 % pour les garçons. Le taux d’inscription était le même pour les deux sexes dans la tranche d’âge des 6-11 ans, soit 99,1 %. Le taux de scolarisation des filles de la tranche d’âge des 12-18 ans était de 87,5 %, contre 76,7 % pour les garçons. Le nombre d’étudiantes dans les universités publiques en 2018/19 était de 154 109 contre 79 583 étudiants. Le nombre d’étudiantes inscrites dans le secteur privé était de 14 987 contre 18 475 étudiants. Le pourcentage de femmes détentrices d’un diplôme d’études universitaires a dépassé celui des hommes : le nombre de diplômées de l’enseignement supérieur public en 2017/18 était de 34 671, sur un total de 50 307 diplômés. Dans les institutions privées, elles étaient 3 663 sur un total de 7 741 diplômés. Dans le domaine de la formation professionnelle, le nombre d’hommes titulaires d’un certificat de formation était 1,5 fois plus élevé que celui des femmes.

Le taux de chômage chez les femmes est resté inférieur à celui des hommes (26,6 % de femmes contre 68 % d’hommes en 2019). Il a cependant augmenté chez les femmes pour passer à 25 %, contre 15,2 %, au deuxième trimestre de 2020. Par ailleurs, 44,3 % des femmes actives ont un niveau d’instruction élevé.

Au niveau de la santé, la répartition géographique a continué d’entraver l’égalité d’accès à des services de santé concernant les deux sexes, 42 % des femmes et 72 % des hommes vivant à moins de 2 kilomètres de l’hôpital, du dispensaire ou du centre de santé le plus proche.

En ce qui concerne les conditions de vie des personnes, il n’existe pas d’écarts notables dans les conditions de logement. Par ailleurs, les deux sexes bénéficient d’une égalité d’accès aux services de base, notamment au niveau du raccordement au réseau de distribution d’eau ou aux réseaux d’assainissement.

Dans le domaine politique et de la participation aux prises de décision, bien que 36,5 % des femmes occupent des postes dans la fonction publique, dont 32 % relevant de la sous-catégorie A1 (2016), elles n’étaient que 5,9 % à occuper le rang de greffière dans un ministère, de directrice générale ou d’un poste analogue. La proportion de femmes à l’Assemblée des représentants du peuple aux dernières élections législatives était de 24,4 %.

Le rapport comprend diverses statistiques reflétant la situation des femmes dans plusieurs domaines.

B.Renseignements sur le système statistique

La Tunisie s’emploie à élaborer, conformément aux normes nationales et internationales, dont celles liées à la Convention, un système statistique qui revêt une grande importance pour mesurer le degré d’intégration de la question du genre dans les politiques et programmes d’autonomisation des femmes et d’instauration de l’égalité des sexes.

L’Institut national de la statistique mène donc périodiquement des enquêtes auprès des ménages et des recensements de la population qui permettent de produire des données désagrégées par âge et par sexe. Il dispose également de statistiques sur la répartition du handicap par région.

Avec l’appui d’ONU-Femmes, l’Institut a parachevé une étude intitulée Analyse genre du recensement général de la population et de l ’ habitat 2014 et a établi le premier rapport national sur des statistiques ventilées par sexe en 2015, qui est cours de mise à jour.

Dans le cadre de l’accord conclu avec le Ministère des affaires de la femme (le programme Égalité, financé par l’Union européenne), l’Institut crée actuellement une page spéciale consacrée aux statistiques de genre sur son site Web.

De nombreux organismes publics tels que les ministères des affaires de la femme, de la justice, de l’intérieur, de l’éducation et de l’enseignement supérieur, de la santé et des affaires sociales produisent des statistiques et des données désagrégées par sexe, en se fondant sur :

•la loi organique no 15 de 2019, qui fixe les modalités de préparation du budget par l’État et les organismes publics, selon des objectifs et des indicateurs garantissant l’égalité entre les sexes et l’égalité des chances entre les hommes et les femmes et d’une manière générale entre les différentes catégories sociales, sans discrimination ;

•le Code des collectivités locales qui énonce que sur la base des données statistiques disponibles, les collectivités locales proposent aux autorités centrales des programmes d’appui à la lutte contre la pauvreté et à la prise en charge des personnes nécessiteuses.

Le Ministère des affaires de la femme s’appuie également sur la Stratégie nationale d’institutionnalisation du genre social (2016-2020), pour définir des politiques publiques et des plans de développement tenant compte de la question du genre et qui se fondent sur des statistiques, un suivi et une évaluation du genre.

Le Centre de recherches, d’études, de documentation et d’information sur la femme (CREDIF), relevant du Ministère des affaires de la femme, agit par l’entremise de l’Observatoire pour l’égalité des chances afin de suivre les questions relatives aux femmes en collectant des données et des indicateurs statistiques désagrégés par sexe dans cinq domaines fondamentaux : démographie, éducation et formation, emploi, santé et vie publique et politique.

L’Observatoire s’emploie à revoir et à analyser des données au moyen d’une démarche tenant compte de la question du genre, qu’il met à la disposition des usagers par la voie de diverses publications et études spécialisées recouvrant des aspects qualitatifs qui ne peuvent être saisis par des indicateurs quantitatifs.

Les travaux de l’Observatoire ont récemment été renforcés et étendus à des approches qualitatives, à des méthodes d’observation modernes, à la production d’indicateurs spécifiques et au suivi de la situation de femmes relevant de diverses catégories aux niveaux régional et local.

L’Observatoire comprend plusieurs bases de données :

•la base de données statistiques Bchira Ben Mrad, qui recouvrent les cinq domaines précités ;

•une base de données qualitatives sur les « associations œuvrant pour l’égalité des chances entre les femmes et les hommes en Tunisie » tirées d’enquêtes de terrain sur le paysage associatif après 2011 ;

•la base « Who is She » (Tunisie), créée en 2013 avec l’appui du Centre danois pour la recherche et l’information sur le genre, l’égalité et la diversité, qui collecte des données sur les compétences des femmes dans divers domaines et appuie leur participation dans diverses instances.

Bien que les résultats importants obtenus aient enrichi les données désagrégées dans divers domaines, des lacunes subsistent, auxquelles les organismes concernés cherchent à remédier par l’élaboration d’un système global et unifié, le renforcement de la coordination entre les différents secteurs aux niveaux central et local, la fourniture des ressources humaines et financières nécessaires et une formation à cette fin.

II.Cadre constitutionnel et législatif

A.Formation et éducation

Outre les renseignements fournis dans le document de base commun (HRI/CORE/TUN/2016) et conformément à l’article 39 de la Constitution, la question des droits humains a été intégrée dans les programmes d’éducation et de formation à différents niveaux.

Dans le cadre de la coopération en cours avec de nombreuses organisations internationales, le Ministère de la justice a élaboré des programmes de formation et des activités concernant les instruments internationaux relatifs aux droits humains. Depuis 1992, l’Institut supérieur de la magistrature enseigne la question des droits humains aux juges stagiaires. Il organise des cours à l’intention des juges et des procureurs, pour les aider à perfectionner leurs compétences. L’École nationale des prisons et de la rééducation forme également les officiers et les employés des établissements pénitentiaires et correctionnels aux questions et mécanismes relatifs aux droits humains.

Le Ministère de la défense nationale a élaboré un programme d’enseignement des droits humains et du droit international humanitaire à toutes les étapes de la formation dans les académies et écoles militaires, afin de sensibiliser les élèves aux principes relatifs aux droits humains et à l’importance de respecter les traités internationaux lors des interventions militaires sur le terrain. Les hauts responsables militaires et civils de l’Institut de défense nationale suivent une formation au moyen de cours intégrant les droits humains.

Le Ministère de l’intérieur a, pour sa part, intégré la question des droits humains au programme d’enseignement à tous les niveaux de formation. Il a publié et distribué une édition révisée du manuel des droits humains comportant le texte de divers instruments internationaux et de textes de loi nationaux relatifs aux droits humains à l’intention de tous les agents chargés d’appliquer la loi.

Après 2011, le Ministère a également renforcé sa coopération avec les organismes spécialisés des Nations Unies pour produire du matériel de formation et organiser des cours afin de renforcer les capacités des professionnels dans le domaine des droits humains, y compris de la Convention.

Les établissements d’enseignement supérieur, en particulier ceux de spécialisation juridique, ont intégré dans leurs programmes des unités consacrées aux droits humains et aux instruments internationaux. Un master de recherche en droit international humanitaire et en droits de l’homme, un autre sur les mécanismes africains des droits humains et un master professionnel en droits de l’homme ont également été créés.

Le Ministère des affaires de la femme a organisé des formations à l’intention des membres de l’Assemblée nationale constituante et de représentants de ministères, d’organismes gouvernementaux et d’associations de la société civile, pour les sensibiliser davantage à la Convention et rallier un soutien en vue de son application.

Le Ministère a également formé plus de 150 personnes, dont des membres du réseau des pairs pour l’égalité des genres et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et des militants d’organisations de la société civile. Elle a organisé plus de 10 sessions de formation sur la démarche tenant compte de la question du genre, au profit de plus de 190 participants, femmes et hommes.

Plusieurs activités de sensibilisation ont également été organisées en vue du retrait des réserves à la Convention, notamment des campagnes, des initiatives et une action de la société civile et des militants politiques, qui ont effectivement abouti au retrait des réserves en 2011.

Le CREDIF œuvre au renforcement des compétences des femmes à des postes de direction. Depuis 2011, il a intensifié ses activités de formation et de sensibilisation pour faire connaître la Convention à divers publics. En 2013, il a tenu un colloque international sur la Convention en vue permettre à des pays comme l’Afrique du Sud, le Danemark et le Maroc d’échanger des données d’expérience.

Des associations de défense des droits des femmes ont également organisé plusieurs programmes dans le cadre de la Convention, pour ce qui est de faire connaître et d’interpréter les droits qui y sont énoncés et de sensibiliser à l’importance de les appliquer, ainsi que dans les domaines de la formation et du renforcement des capacités.

B.Évolution du cadre juridique

S’appuyant sur le document de base commun, la Tunisie a ratifié :

•le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications ;

•le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique ainsi que la promulgation du sixième alinéa de l’article 34 du Protocole portant statut de la Cour africaine de justice et des droits de l’homme pour recevoir les plaintes de personnes et d’organisations non gouvernementales en juillet 2018 ;

•la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels.

Le Conseil de l’Europe a également approuvé la demande de la Tunisie d’adhérer à la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique. La Tunisie s’emploie actuellement à parachever les procédures de ratification.

La Tunisie a promulgué un certain nombre de lois organiques relatives aux droits des femmes, comme suit :

•loi organique no 61 de 2016 relative à la prévention et la lutte contre la traite des personnes ;

•loi organique no 7 de 2017, modifiant et complétant la loi relative aux élections et aux référendums ;

•loi organique no 58 de 2017, relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes ;

•loi organique no 29 de 2018 relative au Code des collectivités locales ;

•loi organique no 47 de 2018 portant dispositions communes aux instances constitutionnelles indépendantes ;

•loi organique no 50 de 2018 relative à l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale ;

•loi organique no 51 de 2018 relative à l’Instance des droits de l’homme ;

•loi organique no 15 de 2019 portant loi organique du budget ;

•loi organique no 60 de 2019 relative à l’Instance du développement durable et des droits des générations futures ;

•loi no 51 de 2019 portant création d’une catégorie de transport de travailleurs agricoles ;

•loi no 30 de 2020 relative à l’économie sociale et solidaire.

Plusieurs textes ont été promulgués au niveau règlementaire, dont le décret gouvernemental portant création du Conseil des pairs pour l’égalité et l’égalité des chances entre femmes et hommes et le décret gouvernemental portant création de l’Observatoire national pour la lutte contre la violence à l’égard des femmes. Des travaux sont actuellement en cours concernant le décret gouvernemental portant création de la Commission nationale de lutte contre la discrimination raciale. Une direction générale des droits de l’homme a également été créée au Ministère de l’intérieur, chargée d’écouter les doléances des citoyens, de leur donner des conseils et de traiter les pétitions et les plaintes relatives aux droits humains.

Dans le domaine de la conformité des lois avec les normes internationales, y compris la Convention, une Commission nationale a été créée en vue de l’harmonisation des textes juridiques relatifs aux droits de l’homme avec les dispositions de la Constitution et avec les conventions internationales ratifiées, pour promouvoir les liens avec les organes constitutionnels et la société civile. Elle s’emploie à examiner les lois en vigueur, pour veiller à ce qu’elles soient conformes aux dispositions de la Constitution et aux normes internationales.

Plusieurs comités ministériels ont également été créés pour examiner et modifier les lois discriminatoires. La loi portant création de l’Instance des droits de l’homme donne également la possibilité de soumettre des propositions visant à harmoniser les textes législatifs avec les normes internationales.

Quelques-unes des recommandations relatives aux droits des femmes, issues de l’examen du système juridique mené en 2012 par le Ministère des affaires de la femme, ont été intégrées à la loi no 46 de 2015 accordant à chacun des deux parents le pouvoir d’obtenir une autorisation et des documents de voyage, concernant leurs enfants mineurs, et les autres ont été renvoyées pour examen au Comité national pour l’harmonisation des textes juridiques.

Eu égard aux recommandations émises par la Commission des libertés individuelles et de l’égalité figurant dans son rapport d’août 2018 sur la discrimination, le Conseil des ministres, tenu le 23 novembre 2018, a approuvé un projet de loi organique sur l’égalité successorale entre femmes et hommes. Il a été soumis pour examen à l’Assemblée des représentants du peuple.

C.Définition de la discrimination

La Constitution de janvier 2014 consacre le principe d’égalité et de non-discrimination entre les sexes. Dans son préambule, elle énonce que l’État garantit l’égalité de tous les citoyens et citoyennes en droits et en devoirs et l’équité entre les régions. Les citoyens et les citoyennes sont égaux en droits et en devoirs et sont égaux devant la loi sans discrimination (art. 21). L’État veille à garantir la représentativité de la femme dans les assemblées élues (art. 34). Tout citoyen et toute citoyenne a droit au travail. L’État prend les mesures nécessaires afin de le garantir sur la base du mérite et de l’équité. Tout citoyen et toute citoyenne a droit au travail dans des conditions favorables et avec un salaire équitable (art. 40).

La Constitution dispose également que l’État s’engage à protéger les droits acquis de la femme et veille à les consolider et les promouvoir. Il garantit l’égalité des chances entre l’homme et la femme pour l’accès aux diverses responsabilités et dans tous les domaines. Il s’emploie à̀ consacrer la parité́ entre la femme et l’homme dans les assemblées élues (art. 46). Il doit assurer aux enfants toutes les formes de protection sans discrimination et conformément à l’intérêt supérieur de l’enfant (art. 47). Il protège les personnes handicapées contre toute discrimination (art. 48) Toute personne a droit à un procès équitable et dans un délai raisonnable. Les justiciables sont égaux devant la justice. Le droit d’ester en justice et le droit de défense sont garantis. La loi facilite l’accès à la justice et assure l’aide judiciaire aux personnes démunies (art. 108).

La loi organique no 58 de 2017 relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes définit explicitement la discrimination contre les femmes en son article 3 comme « toute distinction, exclusion ou restriction qui a pour effet ou pour but de porter atteinte à la reconnaissance aux femmes, des droits de l’homme et des libertés, sur la base de l’égalité complète et effective, dans les domaines civil, politique, économique, social et culturel, ou de compromettre cette reconnaissance ou la jouissance ou l’exercice de ces droits par les femmes, quelle que soit la couleur, la race, la religion, la pensée, l’âge, la nationalité, les conditions économiques et sociales, l’état civil, l’état de santé, la langue ou le handicap ».

Cette définition se fonde sur le libellé de la Convention et la phrase suivante y a été ajoutée : « Ne sont pas considérées discriminatoires, les procédures et mesures positives visant à accélérer l’instauration de l’égalité entre les deux sexes ».

La loi précitée non seulement définit la discrimination, mais l’incrimine, en énonçant en son article 21 : « Est puni d’un mois à deux ans d’emprisonnement et d’une peine de mille à cinq mille dinars ou de l’une de ces deux peines, quiconque exerce volontairement une discrimination au sens de la présente loi s’il résulte de son acte :

•la privation ou la restriction pour la victime de bénéficier de ses droits ou d’obtenir un bien ou un service ;

•l’interdiction à la victime d’exercer ses activités de façon normale ;

•le refus d’embauche de la victime, son licenciement ou la sanction de celle-ci.

Durant la rédaction de la Constitution de janvier 2014, l’Assemblée constituante a adopté la définition de la discrimination à l’égard des femmes figurant dans le document sur l’appui en faveur de la constitutionnalisation des droits des femmes, qui lui avait été présenté à l’occasion du dialogue qui s’était tenu avec des militants des droits des femmes.

Dans ce contexte, le système juridique comprend plusieurs dispositions relatives au principe d’égalité et de non-discrimination. Il est énoncé dans le Code du travail (art. 5 bis) : « Il ne peut être fait de discrimination entre l’homme et la femme dans l’application des dispositions du code et des textes pris pour son application ». À l’article 11 de la loi no 112 de 1983 portant statut général des personnels de l’État, des collectivités publiques locales et des établissements publics à caractère administratif, il est indiqué que « sous réserve des dispositions spéciales commandées par la nature des fonctions et qui peuvent être prises à ce sujet, aucune distinction n’est faite entre les deux sexes pour l’application de la loi ».

Les dispositions discriminatoires entre la mère et le père dans le domaine de l’octroi de la nationalité aux enfants ont également été abrogées en permettant à la mère tunisienne de transmettre, sur un pied d’égalité avec le père, sa nationalité à ses enfants, par la loi no 55 de 2010 modifiant certaines dispositions du Code de la nationalité tunisienne.

Aux termes de la loi organique no 46 de 2015, l’un ou l’autre parent a le pouvoir de demander un document de voyage concernant un enfant mineur et d’autoriser le voyage d’un enfant mineur, un droit qui était réservé exclusivement au père.

Le Code des collectivités territoriales susmentionné énonce le respect de l’égalité entre les personnes et de l’égalité́ des chances entre les sexes, notamment les articles 40, 106, 210 et 308.

Au sens de la loi organique no 50 de 2018 relative à l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, on entend par discrimination raciale, toute distinction, exclusion, restriction ou préférence opérée sur le fondement de la race, la couleur, l’ascendance, l’origine nationale ou ethnique ou toute autre forme de discrimination raciale au sens des conventions internationales ratifiées, qui est à même d’empêcher, d’entraver ou de priver la jouissance ou l’exercice, sur la base de l’égalité, des droits et libertés, ou entraînant des devoirs et des charges supplémentaires. Ne constitue pas une discrimination raciale toute distinction, exclusion, restriction ou préférence établie entre les Tunisiens et les étrangers à condition de ne cibler aucune nationalité au détriment des autres, tout en prenant en compte les engagements internationaux de la République tunisienne.

La loi fondamentale no 15 de 2019, relative à la loi organique du budget, dispose au paragraphe 4 de l’article 18 qu’il faut veiller à la préparation du budget suivant des objectifs et des indicateurs garantissant l’équité et l’égalité des chances entre les hommes et les femmes et d’une manière générale entre les différentes catégories sociales, sans discrimination.

Au niveau des textes d’application, le décret no 4030 de 2014 approuvant le code de conduite et de déontologie de l’agent public dispose que « l’agent public est tenu de respecter les droits et les intérêts des citoyens et de leur accorder le même traitement sans distinction de race, de sexe, de nationalité, de religion ou de conviction, d’opinion politique, d’appartenance régionale, de fortune, de statut professionnel ni aucune autre forme de discrimination ».

Les organismes publics indiquent également que les femmes ayant des besoins spécifiques doivent être traitées en tenant compte de leur situation particulière et du principe de non-discrimination.

III.Accès à la justice

A.Veiller à ce que les femmes connaissent leurs droits

Outre ce qui est mentionné aux paragraphes 77 à 84 du document de base commun, le Ministère des affaires de la femme a élaboré un programme visant à sensibiliser les femmes de tous horizons à leurs droits. Le programme qu’il a mis en place à partir de 2011, dans le cadre d’une coopération avec l’Agence espagnole de coopération internationale, vise à établir une culture de la citoyenneté parmi les femmes des zones rurales.

Les programmes de travail des centres de consultations et d’accompagnement des familles ou de protection des femmes victimes de violences comprenaient également des activités de conseil juridique, en collaboration avec les associations actives dans ce domaine.

Dans le cadre du programme Égalité, géré en partenariat avec l’Union européenne et ONU-Femmes, le Ministère a élaboré un guide d’orientation juridique destiné aux femmes victimes de violences et a organisé plusieurs formations sur ce guide à l’intention des participantes, notamment des représentants régionaux en la matière, pour les aider à sensibiliser les femmes, notamment en milieu rural.

Le Ministère a également élaboré un guide d’accompagnement commenté de la loi organique no 58 de 2017 pour expliquer les dispositions de la loi et en normaliser l’application. Des formations ont été organisées sur la bonne application de cette loi.

Le Ministère a mis à la disposition des femmes présentant une déficience visuelle un exemplaire de la loi en braille afin qu’elles puissent la consulter et y recourir le cas échéant.

L’article 5 de la loi organique no 58 de 2017 a également consacré le principe consistant à fournir des conseils juridiques aux victimes de violences, et son article 13 a accordé à ces dernières le droit à des conseils juridiques concernant les dispositions régissant les procédures judiciaires et les services disponibles.

L’institut de conseil juridique, situé dans chaque tribunal de première instance, est essentiel à la réalisation du droit à des conseils juridiques. Le conseiller juridique (un assistant du Procureur de la République), qui est disponible tous les jours pendant les heures de travail, rencontre et écoute les femmes victimes de violences et les oriente vers les diverses ressources juridiques et judiciaires auxquelles elles peuvent avoir accès, l’objectif étant de protéger leurs droits, de défendre leurs intérêts et d’engager des poursuites contre les agresseurs.

Un représentant a également été nommé au bureau du procureur militaire pour fournir des conseils juridiques aux membres de l’armée en général et aux femmes soldates et aux membres féminins du personnel militaire qui ont été victimes de violences en particulier.

Le Médiateur administratif, qui n’examine pas lui-même les affaires, fournit néanmoins des conseils, en particulier aux femmes, sur la manière de défendre leurs droits, notamment des conseils juridiques et une assistance judiciaire. Il n’intervient pas dans la procédure judiciaire, mais peut fournir des directives et des conseils pertinents aux femmes présentant une requête.

Dans les affaires non judiciaires, le Médiateur administratif peut se saisir directement d’une affaire et contacter les parties concernées pour obtenir des éclaircissements et formuler des recommandations.

En 2019, le Médiateur administratif s’est saisi de 198 affaires, dont la plupart de zones urbaines et 4,9 % seulement de zones rurales. Les femmes des zones rurales n’ont pas eu accès aux services du médiateur en raison de leur éloignement du bureau principal et des quatre bureaux régionaux.

B.Accès à la justice

Le Ministère de la justice a approuvé une stratégie de réforme du système judiciaire (2012-2016) visant à renforcer l’indépendance de la magistrature et à faire respecter les droits des justiciables par des mesures législatives et institutionnelles.

Le Ministère a adopté également le Plan d’action de la réforme du système judiciaire et pénitentiaire (2015-2019) comprenant deux axes principaux, l’un lié à la qualité de la justice et à la protection des droits des justiciables, et l’autre à l’accès à la justice.

Pour consolider le droit d’accès à la justice et faciliter les droits des justiciables, la Tunisie a pris, depuis 2002, un certain nombre de mesures législatives, telles que la loi no 52 de 2002 relative à l’aide judiciaire, qui permet aux justiciables ne pouvant pas s’acquitter des charges d’un contentieux de demander une aide judiciaire, qu’elle soit en matière pénale ou civile et que la personne soit demanderesse ou défenderesse.

La loi no 3 de 2011 relative à l’aide juridictionnelle devant le tribunal administratif a été promulguée pour couvrir le système de justice administrative.

Pour ce qui est des spécificités des crimes violents fondés sur le genre et des lourds frais de justice qu’ils occasionnent, la loi organique no 58 de 2017 permet aux femmes victimes de violences d’obtenir l’aide judiciaire nécessaire.

Au niveau institutionnel, pour renforcer le droit d’ester en justice au double degré de juridiction et rapprocher la justice des justiciables, le Ministère de la justice a amélioré les infrastructures des tribunaux et, depuis 2011, fait évoluer la carte judiciaire avec la création de cinq nouvelles cours d’appel, au vu de l’augmentation des activités des tribunaux existants et de la distance entre les tribunaux et les centres démographiques.

Compte tenu du confinement généralisé qui a été imposé pendant la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19), l’État a pris un train de mesures pour faciliter l’accès à la justice, en particulier concernant les femmes, par la promulgation d’un certain nombre de textes juridiques visant à garantir les droits des personnes devant la justice :

•le décret-loi no 8 de 2020 portant suspension des procédures et délais ;

•le décret-loi no 12 de 2020 complétant le Code de procédure pénale, qui autorise la tenue d’audiences et le prononcé du jugement en utilisant des moyens de communication audiovisuels sécurisés pour assurer la communication entre la salle d’audience dans laquelle le tribunal est installé et l’espace pénitentiaire équipé à cet effet, et ce, après avis du ministère public et accord du prévenu.

De même, en coordination avec le Ministère de la justice, le Ministère des affaires de la femme a pris des mesures spéciales pendant le confinement pour lutter contre les violences faites aux femmes, qui ont été multipliées par neuf pendant cette période par rapport à la même période l’année antérieure. Les juges de la famille ont continué de traiter les demandes de protection de façon immédiate, sans report ni délai. Les femmes victimes ont également continué d’obtenir des ordonnances de protection malgré la suspension de toute activité non urgente dans l’ensemble des tribunaux. Le Bureau du Procureur poursuit également ses travaux pour veiller à ce que les affaires de violence conjugale soient entendues et bénéficient de la priorité qui leur est due.

IV.Mécanisme national de promotion des femmes

La création du Conseil des pairs pour l’égalité et l’équivalence des chances entre les femmes et les hommes par le décret gouvernemental no 626 de 2016 représente un acquis institutionnel fondamental, s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre du Plan de développement 2016-2020 et incarne l’objectif de développement durable 5, notamment la cible 5.1.

L’article 4 du décret susmentionné énonce que le Conseil est présidé par le Chef du Gouvernement, l’intérim pouvant être assuré par le Ministre des affaires de la femme. Cela permet la prise de décisions au plus haut niveau du Gouvernement et de veiller à leur respect par tous les membres du Conseil. Le Chef du Gouvernement est également habilité à présenter les projets de loi au Parlement, conformément à l’article 62 de la Constitution, ou à prendre des décrets en sa qualité de chef de l’exécutif. Il dispose d’un pouvoir réglementaire général, selon l’article 94 de la Constitution. Il a également le droit, en sa qualité de Premier Ministre, d’adresser par voie de circulaires des instructions à l’intention des directions des divers ministères et organismes placés sous sa tutelle.

Le Conseil des pairs se compose de représentants, outre ceux des ministères, de la Présidence de la République, de l’Assemblée des représentants du peuple et de la société civile, en qualité de membres permanents. Cette représentation dénote une vision globale de la prise en compte des questions de genre.

Le Conseil des pairs est chargé de l’intégration d’une démarche tenant compte des questions de genre dans la planification, l’évaluation et dans le budget, afin d’éliminer toutes les formes de discrimination entre les femmes et les hommes et de concrétiser l’égalité de droits et devoirs entre eux. Ses tâches sont énoncées à l’article 2 du décret gouvernemental en portant création.

Alors que le décret susmentionné énonce en son article premier que le Conseil des pairs est un conseil consultatif, il apparaît clairement, si l’on examine ses fonctions, qu’il a des pouvoirs décisionnels, qui ont une influence sur la politique gouvernementale, tels que la nécessité d’approuver le plan annuel sectoriel et d’assurer le suivi du programme relatif à l’intégration des questions de genre au Conseil des ministres.

Le Conseil joue également un rôle important pour ce qui est d’observer les difficultés rencontrées concernant l’intégration de la question du genre et cherche à y remédier en soumettant des propositions de réformes législatives et réglementaires et de mesures administratives, l’objectif étant d’élaborer des politiques gouvernementales harmonieuses et efficaces pouvant aboutir à l’introduction de projets de loi, à l’adoption d’arrêtés réglementaires ou encore à la promulgation de circulaires à l’intention des organismes publics.

Le Conseil des pairs joue également un rôle important de par sa fonction consultative qui lui permet d’intervenir dans la sphère législative ou réglementaire et d’influencer les règles et mécanismes régissant les droits des femmes dans l’espace public ou privé. Il peut ainsi, par cette fonction, être consulté sur tous les nouveaux textes qui sont soumis à un vote.

Alors que le Conseil a les compétences d’un conseil, ses membres ont des aptitudes de base qui sont étroitement liées aux directions dont ils relèvent.

Compte tenu de l’importance du Conseil des pairs, le Ministère des affaires de la femme s’emploie actuellement à réviser le décret gouvernemental no 626 de 2016, conformément aux recommandations du Conseil, figurant dans son rapport annuel, relatives au renforcement de l’institutionnalisation de cet organe ainsi que des pouvoirs des personnes référentes qui en font partie.

Stratégies nationales d’égalité et de non-discrimination

Elles sont fondées sur le Plan national d’intégration et d’institutionnalisation du genre social.

Le Plan a été approuvé par le Conseil des pairs en juin 2018 et s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre de l’objectif de développement durable 5. Il vise à guider les politiques gouvernementales par la définition de priorités visant à éliminer l’écart entre les genres et à consacrer l’égalité femmes-hommes et l’égalité des chances dans tous les domaines.

Pour veiller à la bonne exécution du plan, des critères et des indicateurs permettant de mesurer et d’évaluer les progrès ont été élaborés, visant à :

•établir un système d’application du principe de responsabilité, permettant d’éliminer toutes les formes de discrimination et de violence à l’égard des femmes dans la législation et dans la pratique ;

•accroître la représentation des femmes et la participation de ces dernières aux organes et aux conseils élus et aux postes de décision aux niveaux national, régional et local ;

•instaurer des politiques garantissant l’émancipation économique et financière des femmes et le droit à un travail décent et à un salaire équitable ;

•mettre en place des politiques publiques, des plans de développement et des budgets tenant compte des questions de genre ;

•élaborer un plan national de communication dans le domaine de l’intégration des questions de genre.

Le Ministère des affaires de la femme est chargé de suivre la préparation et l’exécution du plan susmentionné en concertation et coordination avec tous les organismes concernés, qui ont la responsabilité d’élaborer des plans annuels sectoriels à cette fin.

Dans un souci d’examiner de près et d’améliorer l’intégration des questions de genre, la priorité a été donnée au début de 2019 à une démarche tenant compte des questions de genre, durant l’organisation d’activités de formation aux plans annuels de formation des ministères, conformément à la circulaire no 27 du 1er octobre 2018 de la Présidence du Gouvernement, portant sur l’intégration des questions de genre au niveau du Ministère des affaires de la femme.

Le Ministère a organisé bon nombre d’ateliers et de dialogues à l’intention des membres du Conseil des pairs, de son secrétariat permanent, de membres d’autres ministères chargés des questions liées aux femmes ainsi que de l’élaboration et de l’exécution des budgets.

Le Ministère a également proposé un certain nombre de mesures à cet égard, comme suit :

•création du prix récompensant la meilleure initiative en matière d’égalité des genres et d’égalité des chances entre les femmes et les hommes, conformément au décret gouvernemental no 611 de 2018 du 26 juillet 2018 ;

•imposition de la parité dans les conseils et comités de divers types, notamment ceux liés aux promotions, aux affectations et aux questions disciplinaires, depuis le décret gouvernemental no 314 de 2020 fixant les principes relatifs au choix, à l’évaluation des performances des administrateurs représentant les participants publics et des administrateurs indépendants et à leur révocation, qui énonce, au paragraphe 2 de l’article premier, que la représentation équilibrée entre les deux sexes est prise en considération, lors de l’application du décret gouvernemental et que la représentation de l’un des deux sexes ne peut pas être inférieure à 40 % ;

•allocation d’un espace consacré aux enfants des fonctionnaires féminins et masculins du Ministère, notamment pendant les vacances ;

•proposition visant à augmenter l’allocation pour les enfants qui, depuis l’indépendance, devait être adaptée au niveau de vie en cours ;

•proposition de rendre obligatoire le respect de la circulaire sur la désignation de postes de direction et mise en place d’un mécanisme de contrôle pour surveiller les manquements en matière d’exécution ;

•instauration de la parité dans le plan des représentants régionaux du Ministère.

Stratégie nationale pour l’autonomisation économique et sociale des femmes et des filles en milieu rural (2017-2020)

Cette stratégie et le plan d’action qui en découle comportent cinq grands axes d’intervention :

•autonomisation économique : accroître l’emploi des femmes en milieu rural par la voie de l’élargissement de l’accès à la formation professionnelle et de la diversification des spécialisations, garantir l’accès aux ressources et aux moyens de production, faciliter le passage du secteur non structuré au secteur structuré de l’économie, accompagner l’initiative économique, diffuser une culture sociale de l’économie solidaire et garantir l’accès aux marchés ;

•autonomisation sociale : lutter contre le décrochage scolaire et toute régression vers l’analphabétisme, offrir des conditions de travail décentes, ouvrir l’accès aux services de santé et en améliorer la qualité ;

•participation à la vie publique et à la gouvernance locale : diffuser une culture de la citoyenneté, préparer les femmes et les filles à la participation à la vie publique et aux affaires locales ;

•assurer une qualité de vie en milieu rural, mettre à disposition des installations et des infrastructures, proposer des activités culturelles et récréatives et en faciliter l’accès ;

•produire des données et des statistiques ventilées par genre et par lieu géographique et s’en servir dans la préparation et l’évaluation des plans de développement.

En application de la Stratégie et de son plan d’action, plusieurs projets ont été mis en œuvre, dont le projet national intégré de lutte contre le décrochage scolaire, en particulier pour les filles en milieu rural, et des projets destinés aux femmes dans le secteur agricole et les industries agricoles traditionnelles ou manufacturières, concourant à briser l’isolement des femmes dans ces zones et à les faire participer à des programmes de développement global. On trouvera des informations supplémentaires aux paragraphes 344 à 351.

Plan d’action national de mise en œuvre de la résolution 1325(2000) du Conseil de sécurité sur les femmes et la paix et la sécurité, et ses programmes sectoriels

Le Plan a été approuvé en juin 2018 par le Conseil des ministres et lancé en juillet 2018. Il a été élaboré en partenariat avec des organismes gouvernementaux et des associations de la société civile, avec le soutien de la Finlande, d’ONU-Femmes et du Centre de recherche et de formation pour les femmes arabes (CAWTAR).

Le Plan vise à autonomiser les femmes et les filles et à les faire participer davantage à l’édification d’une paix et d’une stabilité durables, en concourant à l’élimination de toutes les formes de discrimination fondée sur le genre et en veillant à protéger la société contre les dangers des conflits, de l’extrémisme et du terrorisme.

Les objectifs du plan se présentent comme suit :

•protéger les femmes et les filles contre toutes les formes de violence avant, pendant et après les conflits, les crises et les catastrophes naturelles, et contre la menace terroriste ;

•garantir la protection des femmes et des filles contre toutes les formes de violence et de discrimination fondée sur le genre dans les situations de conflit et de terrorisme, veiller à leur sécurité et à leur santé physique, psychologique et mentale et faciliter leur accès à la justice et à l’exercice effectif de leurs droits humains ;

•renforcer la participation des femmes et des filles à la vie politique et publique et aux prises de décision afin de maintenir la paix, de régler les conflits et de combattre le terrorisme ;

•assurer les secours, la construction, le maintien de la paix et la reconstruction, avec la participation effective des femmes et des filles en tant que partenaires actives sur le plan de la consolidation et de la pérennisation de la paix, de la reconstruction et de la lutte contre le terrorisme ;

•veiller à sensibiliser le public et à diffuser des informations dans le cadre de l’exécution du Plan.

Des plans sectoriels ont été élaborés au sein des comités regroupant 168 membres dont 23 représentants de la société civile et 125 d’entités ministérielles ou d’organismes indépendants. Ils sont actuellement en cours de réalisation malgré le budget limité qui leur a été alloué.

En prévision de la définition des nouvelles orientations du Plan, qui est en voie d’achèvement, le Ministère des affaires de la femme a organisé un atelier en juillet 2020 afin d’en suivre l’exécution, d’en évaluer les progrès et de formuler des propositions concrètes en vue d’une évolution future.

Stratégie nationale de lutte contre les violences faites aux femmes à travers le cycle de la vie

La Stratégie, approuvée en 2008 et relancée en 2012, repose sur quatre axes principaux :

•surveiller et évaluer le phénomène des violences faites aux femmes et y donner suite ;

•offrir des services adéquats et diversifiés en matière de prise en charge les victimes ;

•modifier les comportements par la mobilisation sociale et une prise de conscience collective afin d’éliminer les violences faites aux femmes ;

•rallier un soutien pour examiner et renforcer les textes de loi afin de prévenir la violence à l’égard des femmes et de pénaliser les auteurs de tels actes.

La Stratégie a contribué à l’élaboration de la loi organique no 58 et à la création de plusieurs centres d’accueil, de conseil et d’hébergement pour les femmes victimes de violences, contribuant en 2020 à :

•la conclusion d’une convention-cadre avec l’Association tunisienne de gestion et d’équilibre social à l’appui de la mise en place du service d’assistance téléphonique (1899) destiné à accueillir et à orienter les femmes victimes de violences (janvier 2020) ;

•la signature en février 2020 de conventions de partenariat avec quatre associations actives sur le terrain visant à garantir le fonctionnement du service d’assistance téléphonique en permanence (Association des femmes tunisiennes pour la recherche sur le développement, Association tunisienne de gestion et d’équilibre social, Association de développement Gafsa sud et Association pour le développement durable et la coopération internationale).

À la suite de la promulgation de la loi organique no 58 de 2017, la Stratégie a été mise à jour, selon une démarche visant à encourager la participation du personnel des organismes gouvernementaux et des organisations de la société civile. Elle sera présentée sous sa forme actualisée et définitive au Conseil des ministres pour approbation.

Programme de promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes en Tunisie (Égalité)

En 2015, une convention de partenariat a été conclue entre le Ministère des affaires de la femme et l’Union européenne concernant la mise en œuvre du programme Égalité, qui vise à réduire les inégalités entre les femmes et les hommes aux niveaux national, régional et local.

Le plan d’exécution du programme reposait sur les axes suivants :

•renforcer les capacités du personnel du Ministère des affaires de la femme et de ses partenaires dans le domaine des questions de genre ;

•améliorer la participation des femmes à la vie politique et publique ;

•contribuer à réduire les discriminations et les violences fondées sur le genre.

Programme « Raida » d’entrepreneuriat des femmes

Le programme s’inscrit dans la politique de l’État visant à investir dans tous les gouvernorats, à augmenter le nombre de femmes participant à l’activité économique et à encadrer la transition des femmes du secteur informel au secteur structuré de l’économie. Il est mis en œuvre en coopération avec la Banque tunisienne de solidarité.

Ses principaux objectifs se présentent comme suit :

•réduire le taux de chômage, en particulier chez les femmes titulaires d’un diplôme d’études avancées, ainsi que la pauvreté et les disparités entre les régions ;

•promouvoir la participation des femmes à l’économie ;

•fournir le minimum nécessaire pour permettre aux femmes d’avoir une vie décente ;

•affiner les indicateurs de développement relatifs à la lutte contre la pauvreté et à la marginalisation dans les régions, réduire le chômage et promouvoir la paix sociale.

Pour assurer l’efficacité et le succès du programme Raida, une ligne de financement a été créée, à l’intention des femmes. Cela a contribué à la création de près de 2 300 projets actuellement, avec un coût d’investissement total de près de 17 millions de dinars tunisiens.

Un certain nombre de mesures ont été également annoncées en faveur des femmes des zones rurales à l’occasion de la célébration de la Journée internationale de la femme, comme suit :

•augmenter de 3 millions à 10 millions de dinars les crédits prévus pour le programme de développement de l’entrepreneuriat féminin en 2020 ;

•quintupler le pourcentage de prêts alloués aux projets agricoles des femmes, qui passe de 6 % à 30 % ;

•affectation de 70 % du montant alloué au programme de financement de l’entrepreneuriat féminin dans les régions de l’intérieur, dans le cadre de la discrimination positive ;

•coordination avec la Banque tunisienne de solidarité visant à donner la priorité aux nouveaux entrants dans les organismes professionnels des associations de développement agricole et des coopératives, afin qu’ils bénéficient du programme ;

•organisation d’une exposition nationale annuelle de produits fabriqués par des femmes en milieu rural en partenariat avec les ministères des affaires de la femme et de l’agriculture et la Banque tunisienne de solidarité.

Planification et budgétisation sensible au genre

L’article 18 de la loi organique no 15 de 2019 relative à la loi organique du budget énonce que « le chef de programme veille à la préparation du budget suivant des objectifs et des indicateurs garantissant l’équité et l’égalité des chances entre les hommes et les femmes et d’une manière générale entre les différentes catégories sociales, sans discrimination, et qui feront l’objet d’une évaluation sur cette base ».

Cette approche a également été énoncée dans le Journal officiel des collectivités locales , dont l’article 156 dispose que « les collectivités locales œuvrent pour que les crédits soient ouverts dans leurs budgets annuels selon des programmes et des missions qui mettent en œuvre le plan de développement et les plans d’aménagement. Dans l’établissement du budget, sont prises en compte les dépenses obligatoires et l’impératif de concourir à la justice sociale et à l’égalité des chances entre les sexes sur la base des données statistiques dont dispose la collectivité ».

En conséquence, le Ministère des finances a publié en 2019 une note à l’intention des ministères relatif au projet de budgétisation tenant compte des questions de genre.

Les principales étapes de l’élaboration du système sont les suivantes :

•préparer et proposer une stratégie de travail visant à élaborer un budget tenant compte des questions de genre, au même titre que la budgétisation axée sur des résultats ;

•mettre effectivement en place la budgétisation tenant compte des questions de genre dans des ministères modèles ;

•élaborer un guide de référence sur la budgétisation tenant compte des questions de genre à partir des résultats obtenus au moyen de projets pilotes ;

•recenser les éléments de méthode liés au système de gestion budgétaire en fonction des objectifs à examiner, afin d’intégrer progressivement les notions de genre ;

•préparer et lancer un programme de communication sur le projet de budgétisation tenant des questions de genre.

V.Instance nationale des droits de l’homme

La loi organique no 51 de 2018 relative à l’Instance des droits de l’homme a été promulguée à l’issue de consultations nationales et régionales avec les différentes parties prenantes. Elle garantit à l’Instance des pouvoirs et des tâches élargis, principalement en matière de contrôle du respect des droits humains et de leur protection et de leur renforcement. Elle surveille tous les cas de violations des droits humains sur le terrain, mène les enquêtes nécessaires et prend toutes les mesures juridiques pour y remédier. Toute ingérence dans ses travaux est proscrite par quelque partie que ce soit.

Les membres de l’Instance doivent exercer leurs fonctions à plein temps et en toute indépendance, pour pouvoir être désignés par l’Assemblée des représentants du peuple. Ils bénéficient d’une immunité dans l’exercice de leurs fonctions, d’après la Constitution et la loi. Ils sont désignés au moyen d’un mécanisme spécial. L’Instance bénéficie d’une autonomie administrative et financière, conformément à l’article premier de la loi no 54 de 2018. Elle est dotée d’un budget indépendant qu’elle établit et qui fait l’objet d’un examen par l’Assemblée des représentants du peuple. Le budget est exécuté en toute indépendance et sans contrôle préalable.

L’Instance est actuellement mise en place. Une fois que ses membres auront été élus par l’Assemblée, elle s’emploiera à demander un statut d’accréditation auprès de l’Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l’homme.

VI.Mesures temporaires spéciales

La Constitution de janvier 2014 a consacré le principe de parité, puisqu’elle énonce en son article 21 que l’État garantit l’égalité des chances entre les hommes et les femmes dans l’exercice des diverses responsabilités et dans tous les domaines et s’emploie à réaliser la parité entre eux dans les conseils élus.

Avec la promulgation du décret-loi no 35 de 2011 relatif à l’élection d’une assemblée nationale constituante, le principe de la parité entre les femmes et les hommes a été établi du fait de la classification des candidats dans les listes de façon alternée entre femmes et hommes, ce qui a contribué à augmenter le nombre de femmes à l’Assemblée. Les femmes n’ont cependant remporté au cours des élections que 65 des 217 sièges, soit 29,95 %.

La loi organique no 16 de 2014 relative aux élections et aux référendums énonce le principe de la parité verticale aux élections législatives, ce qui a permis aux femmes de recueillir 32 % des sièges à l’Assemblée des représentants du peuple en 2014, même si ce chiffre est tombé à moins de 30 % aux élections de 2019.

Le principe de la parité horizontale et verticale, consacré aux élections locales par la loi organique no 7 de 2017, a favorisé une augmentation de la représentation des femmes dans les municipalités à la suite des élections locales de 2019, qui est passée à 47,05 %, tandis que le pourcentage de femmes maires était de 19,5 %.

En application du principe d’égalité des chances entre les sexes, garantissant la représentation des femmes dans les conseils élus, et conformément à la loi organique no 34 de 2016 relative au Conseil supérieur de la magistrature, une mesure positive a été adoptée pour mettre en œuvre l’égalité des genres. L’alinéa 2 de l’article 26 dispose ce qui suit : « Est nul tout bulletin méconnaissant le principe de parité́ quant au nombre de candidats à choisir pour chaque ordre, et ce, dans la limite de ce qu’impose le nombre impair des sièges réservés à chaque ordre et grade, à l’exception des cas où le nombre de candidats de l’un des deux sexes est insuffisant ». Cela a contribué à l’augmentation de la représentation des femmes au Conseil, où elles constituent près de la moitié des membres.

VII.Stéréotypes

Depuis 2002, l’État tunisien a introduit plusieurs réformes sur le plan de l’enseignement, en modifiant les programmes et les outils pédagogiques, en intégrant les principes d’égalité des sexes et des droits humains et en ajoutant des unités dans les cours d’éducation civique sur les droits des femmes et les réformes tunisiennes en la matière. Des textes relatifs aux droits humains et aux libertés publiques ont également été introduits dans tous les établissements d’enseignement supérieur en vue d’une sensibilisation aux principes d’égalité femmes-hommes et d’égalité des chances entre eux.

Le secteur des médias a connu des changements considérables depuis 2011, notamment la dissolution du Ministère de la communication, la restructuration de nombreux médias et la création de médias privés. La Haute Autorité indépendante de la communication audiovisuelle a également été mise en place, son cahier des charges fixant les conditions d’octroi d’une licence de création et d’exploitation d’une chaîne de radio ou de télévision privée ou associative, à savoir quiconque souhaite obtenir une telle licence doit adhérer à un ensemble de principes de base, dont « la protection des droits de la femme et l’abolition des stéréotypes entachant son image dans les médias », l’objectif étant d’instaurer un paysage audiovisuel équilibré. 

D’après le paragraphe 2 de l’article 11 de la loi organique no 58 de 2017 relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes, « sont interdites la publicité et la diffusion, par tous moyens et supports médiatiques, des matières contenant des images stéréotypées, scènes, paroles, ou actes préjudiciables à l’image des femmes, ou concrétisant la violence exercée contre elles ou atténuant sa gravité ».

Dans le cadre de son partenariat avec les organisations de la société civile, le Ministère des affaires de la femme a lancé en 2014, avec l’Institut arabe des droits de l’homme, une campagne de sensibilisation au rôle des compétences féminines présentes dans tous les domaines, sous le slogan « Femmes tunisiennes, une compétence nationale ». Il cherche également à combattre les images irrespectueuses et stéréotypées des femmes et demande aux électeurs et aux électrices de soutenir les candidatures de femmes qui défendent les valeurs d’égalité et de liberté et les principes relatifs aux droits humains.

Les programmes de partenariat avec des composantes de la société civile et des organisations internationales et régionales visant à propager une culture des droits des femmes et à promouvoir l’éducation à une telle culture ont augmenté en nombre. Ils visent des publics divers d’enfants, de jeunes et d’hommes ainsi que les femmes elles-mêmes, dans les milieux tant urbains que ruraux.

Le Ministère des affaires de la femme a intensifié ses mesures de sensibilisation à cet égard, par la diffusion de messages sur des chaînes nationales publiques et privées.

Le CREDIF a mis en place un mécanisme de vigilance, concernant le traitement médiatique des questions relatives aux femmes, par la réalisation de deux études, portant respectivement sur le traitement des violences faites aux femmes dans la presse et le traitement médiatique de la participation des femmes à la vie politique en 2019. Elles ont donné lieu à des formations destinées aux journalistes, au cours desquelles le CREDIF a présenté ses résultats et demandé que les questions relatives aux femmes soient abordées de manière objective, en s’écartant des stéréotypes. Il a organisé plusieurs cours depuis la création de ce mécanisme et prévoit d’en proposer d’autres sur divers sujets.

Le CREDIF mène également des campagnes de sensibilisation, à la suite d’une étude menée sur la cyberviolence fondée sur le genre, dont sa récente campagne sur Facebook contre le harcèlement à l’égard des femmes, sur le thème « Ceci est mon visage », affirmant que les femmes n’ont pas à se conformer à l’image définie par la société pour elles. D’autres campagnes seront également lancées en fonction des résultats d’études émanant du dispositif de vigilance.

Malgré ces efforts, les questions relatives aux droits des femmes et la contribution de ces dernières aux affaires publiques ne sont pas suffisamment prises en compte par les médias. La visibilité des femmes dans les médias est restée en-deçà des attentes, qu’il s’agisse d’émissions-débats télévisées ou radiophoniques ou d’enquêtes journalistiques. Cela dénote une méconnaissance, de la part des professionnels des médias, de la démarche tenant compte des questions de genre et du principe de l’égalité des chances pour les femmes. En outre, la présence plus marquée des femmes dans le secteur des médias ne s’est pas traduite par un plus grand accès, en ce qui les concerne, à des postes de décision.

La modeste participation des femmes aux postes de direction dans les partis et les syndicats reflète la monopolisation du discours par les hommes dans l’espace médiatique, quels que soient les sujets abordés.

VIII.Violence à l’égard des femmes fondée sur le genre

A.Statistiques et mesures exceptionnelles

On trouvera à l’annexe II les statistiques du Ministère de l’intérieur sur les cas de violence depuis 2010 et l’entrée en vigueur de la loi no 58 de 2017. On trouvera à l’annexe III le nombre d’affaires de crimes violents jugées et enregistrées au cours de l’année judiciaire 2018-2019.

Le nombre de notifications de violences faites aux femmes pendant la période de confinement liée à la pandémie de COVID-19 a augmenté en 2020 par rapport à la même période en 2019, le service d’assistance téléphonique 1899 ayant enregistré 3 085 appels du 23 mars 2020 au 30 juin 2020 liés à des violences faites aux femmes, dont 90 % de violences verbales, 84 % de violences psychologiques, 76 % de violences physiques, 37 % de violence économique, 17 % de violences sexuelles, tandis que 22 % des appels concernaient des violences commises contre des enfants.

Le Ministère des affaires de la femme a donc pris des mesures exceptionnelles en faveur des femmes victimes de violences et obtenu que le service d’assistance téléphonique 1899 reçoive des appels en permanence.

Par ailleurs, 18 spécialistes ont été formées pour conseiller les femmes victimes de violences et 12 formations collectives et 18 sessions individuelles ont été organisées à distance, afin d’inculquer des méthodes d’assistance téléphonique.

Une plateforme électronique interactive intitulée « vous n’êtes pas seuls, nous sommes avec vous » a été lancée pour fournir des services d’assistance aux enfants et aux familles, par la mise en place d’un numéro vert gratuit (1809), notamment un accompagnement psychologique et des conseils, de huit heures à minuit, tous les jours de la semaine.

Le Ministère a également demandé, en partenariat avec la radio nationale, qu’une tranche médiatique quotidienne soit consacrée à la fourniture de conseils, par ses propres psychologues, sur la façon de se comporter entre les membres de la famille pendant la période de confinement.

Pour garantir la continuité des services rendus aux femmes victimes de violences, avec l’appui du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) et en partenariat avec la société civile, le Ministère des affaires de la femme a prévu un centre d’accueil pour les femmes victimes de violences et leurs enfants, pendant la période de confinement obligatoire de 14 jours, avant qu’elles ne puissent intégrer un foyer d’hébergement de victimes de violences.

Au début de 2016, la première unité médico-légale a été créée à l’hôpital Charles Nicolle pour accueillir les femmes et les enfants victimes d’agressions sexuelles, dans des cas où des procédures judiciaires avaient été engagées. L’unité assure une prise en charge immédiate des personnes, d’un point de vue médical, psychologique et social, et fournit à la justice des indices et des éléments de preuve, permettant de poursuivre les agresseurs. En 2017, elle a accueilli plus de 800 victimes de viol, dont 65 % étaient des enfants de moins de 18 ans et 80 % des femmes.

B.Interdiction du viol conjugal

La loi relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes ne comporte pas le terme « viol conjugal », mais la lecture de ses dispositions laisse entrevoir cette possibilité, puisque son article 2 énonce que « la loi concerne toutes les formes de discrimination et de violence subies par les femmes fondées sur la discrimination entre les sexes, quels qu’en soient les auteurs [mari, père, fils] ou le domaine [famille, lieu de travail, rue] ».

L’article 3 de la loi définit la violence sexuelle comme « tout acte ou parole dont l’auteur vise à soumettre la femme à ses propres désirs sexuels ou aux désirs sexuels d’autrui, au moyen de la contrainte, du dol, de la pression ou autres moyens, de nature à affaiblir ou porter atteinte à la volonté, et ce, indépendamment de la relation de l’auteur avec la victime ».

Étant donné que le viol est qualifié de violence sexuelle, le viol conjugal peut être incriminé et son auteur puni, sachant que l’article 227 (nouveau) du Code pénal n’exclut pas la possibilité de punir le mari pour les mêmes infractions.

C.Mise en œuvre des dispositions de la loi organique relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes

Conformément aux dispositions de l’article 46 de la Constitution, aux normes internationales pertinentes et à la cible 5.2 de l’objectif de développement durable 5, la Tunisie a promulgué la loi organique no 58 de 2017 relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes, entrée en vigueur le 15 février 2018, qui adopte une approche globale fondée sur la lutte contre les différentes formes de violence à l’égard des femmes au moyen de la prévention, de la poursuite et de la répression des auteurs de ces violences, et de la protection et la prise en charge des victimes, quels qu’en soient les auteurs ou le domaine (l’espace privé, dont la famille, et l’espace public).

Les mesures suivantes ont été prises en vue de l’application de la loi, comme suit :

•en matière de prévention : adoption de mesures de prévention et de protection contre la violence, comme suit :

•organisation de campagnes de sensibilisation par la voie de messages et d’annonces à la radio, à la télévision et dans les médias sociaux, visant à modifier les représentations sociales, les stéréotypes et les images dénigrantes des femmes.

Le CREDIF a pris les mesures suivantes :

•appuyer les campagnes de sensibilisation liées à la lutte contre les violences faites aux femmes dans les transports, en partenariat avec le Ministère des transports, et mettre en place les versions 1 et 2 de la campagne « Le harceleur ne monte pas avec nous » ;

•mener chaque année un certain nombre d’activités de sensibilisation et d’éducation aux niveaux local et régional dans le cadre de la campagne annuelle « 16 journées de mobilisation contre la violence de genre » ;

•dispenser des formations aux différents fonctionnaires du Ministère et aux partenaires aux niveaux national et régional sur les dispositions de la loi organique, notamment à l’intention des équipes de sécurité spécialisées dans les cas de violences faites aux femmes.

L’accent mis sur la formation revêt une grande importance. En partenariat avec des organisations internationales telles que la Fondation Friedrich Ebert et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), le Ministère de l’intérieur a renforcé les capacités des chefs d’équipe chargés d’enquêter sur les crimes violents commis contre des femmes, des enfants et des travailleuses, en organisant des formations sur l’aide à apporter aux femmes victimes de violence et des ateliers sur les mécanismes d’application de la loi sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes, en fournissant des moyens de prodiguer des conseils aux victimes et en adoptant des mesures conjointes de soutien et de protection des femmes et des enfants victimes de violence. Plus de 5 000 assistants et fonctionnaires y ont participé.

Le Ministère de l’intérieur a également prévu l’organisation de cours, durant la phase de formation de base, au profit des fonctionnaires et des stagiaires. Dans le cadre du programme de formation continue, des fonctionnaires travaillant à plein temps ont reçu des supports de formation sur les questions de violence à l’égard des femmes et des enfants.

Au Ministère de la justice, la question des violences faites aux femmes a été inscrite dans les formations continues des magistrats n’ayant pas plus de six ans d’ancienneté, et plusieurs formations spécialisées ont été dispensées au niveau national et régional par l’Institut supérieur de la magistrature, en coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et l’Organisation internationale de droit du développement.

En partenariat avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme et l’Organisation internationale de droit du développement, le Ministère a élaboré également un manuel de formation à la magistrature et organisé trois cours de formateurs à l’intention de 15 juges. Un manuel du formateur a également été établi à la fin de l’année 2020 concernant les juges formant d’autres juges dans les régions.

Le Ministère des affaires sociales a organisé en outre des formations à l’intention de 27 employés régionaux. En coopération avec ONU-Femmes, une formation s’est tenue au profit de 80 travailleurs sociaux et de 60 spécialistes de la protection sociale.

L’Office national de la famille et de la population, relevant du Ministère de la santé, s’emploie à mettre en place un programme sur cinq ans de formation du personnel de la santé à la détection et à l’évaluation de toutes les formes de violence à l’égard des femmes, ainsi qu’au dépistage, à la prise en charge et au suivi.

L’Office a également élaboré un module de formation d’introduction destiné aux professionnels de la santé et une formation à l’intention des formateurs. Par la suite, des ateliers ont été organisés dans 23 gouvernorats, destinés à 540 membres du personnel médical et paramédical, médico-légal ou administratif, ainsi qu’à des psychologues, des médecins urgentistes, des réceptionnistes et des techniciens.

L’Office a également dispensé quatre formations de formateurs sur la violence conjugale au profit de 23 participants d’organismes gouvernementaux et de la société civile.

Une clinique juridique a également été mise en place à la Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis, qui a fourni une formation intégrée visant à renforcer les compétences et les capacités des étudiants à gérer des situations réelles de violence fondée sur le genre.

Outre l’étude réalisée en 2010 par l’Office national de la famille et de la population sur les indicateurs de violence et l’étude menée en 2015 par le CREDIF sur la violence fondée sur le genre dans l’espace public, une étude a été menée pour évaluer les services de sensibilisation aux femmes victimes de violence en Tunisie (2017) et une autre étude psychosociale a été faite sur les représentations sociales des violences faites aux femmes chez les hommes, jeunes et adultes (2018).

Le CREDIF a également mis en place un plan national inclusif en vue de l’élaboration d’indicateurs statistiques sur la violence à l’égard des femmes : 38 indicateurs ont été établis en 2019 et sont actuellement utilisés au niveau sectoriel dans les ministères de premier rang (justice, intérieur, santé, affaires sociales et affaires de la femme).

Sur le plan de la protection, les victimes peuvent exercer leurs droits sur les plans juridique et pratique et avoir accès aux procédures administratives, judiciaires et sur le plan de la sécurité. Les mesures suivantes ont été prises à cette fin :

•mise en place d’un numéro vert (1899) pour faciliter la notification des cas de violences. Le service d’assistance téléphonique est accessible en permanence, depuis le début de la pandémie de COVID-19 ;

•mise en place d’un numéro vert (1809) visant à apporter un soutien psychologique et à accompagner les enfants et les femmes victimes ;

•adoption de nombreuses décisions et mesures de protection, qui ont néanmoins été réduites durant la période de confinement liée à COVID-19 ;

•promulgation de plusieurs décisions relatives à l’aide judiciaire pour aider les femmes à garantir leurs droits et faciliter leur accès à la justice.

Il convient de noter que l’article 13 de la loi organique no 58 de 2017 énonce que la femme victime de violence et les enfants qui résident avec elle bénéficient d’un certain nombre de droits, dont l’accès à l’information et le conseil juridique concernant les dispositions régissant les procédures judiciaires et les services disponibles, et le bénéfice de l’aide judiciaire. L’article 39 de la même loi dispose que les personnes chargées de la protection de la femme de la violence doivent informer la plaignante de tous ses droits pour qu’elle sache ce à quoi elle est habilitée au regard de la loi.

La section des services et des institutions comprend les procédures, les services et les institutions chargées de la protection des femmes victimes de violence. Les mesures suivantes ont été prises :

•affectation de juges du parquet aux affaires de violence à l’égard des femmes dans tous les tribunaux de première instance ;

•formation de 128 équipes spécialisées dans les questions de violence dans chaque zone de sécurité et dans chaque garde nationale. Les femmes représentent 12,5 % des chefs d’équipe, et 40 % des équipes sont composées d’agentes de sécurité ;

•mise en place des procédures pénales spéciales prévues par la loi, notamment en ce qui concerne les auditions privées, dans le cadre d’enfants, tout en notant que les ressources financières, techniques et humaines (c’est-à-dire les spécialistes) font défaut à cet égard. Des travaux sont en cours avec l’UNICEF pour élaborer un guide pratique de soutien aux enfants victimes de violence ;

•promulgation du décret gouvernemental no 126 du 25 février 2020 portant création d’un observatoire national pour la lutte contre la violence à l’égard des femmes et fixant son organisation administrative et financière ;

•élaboration de mécanismes multisectoriels destinés à protéger les femmes victimes de violence par les mesures suivantes :

•approbation en décembre 2016 de mesures sectorielles visant à protéger les femmes victimes de violences par les ministères de la justice, de l’intérieur, de la santé, des affaires sociales et des affaires de la femme ;

•signature en janvier 2018 d’un accord conjoint entre les ministères précités concernant l’organisation et la coordination du travail des fonctionnaires s’occupant de ces secteurs ;

•préparation de manuels de travail sectoriel à l’intention des ministères précités sur la protection sectorielle conjointe des femmes victimes de violence ;

•mise en place d’un organe central de coordination et de 24 organes de coordination dans tous les gouvernorats comprenant des représentants des divers organismes gouvernementaux concernés et de diverses associations ayant des compétences dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes.

Le Ministère des affaires de la femme a également élaboré une cartographie nationale des services destinés aux femmes victimes des violences ou en situation de vulnérabilité, ainsi qu’une liste des organismes gouvernementaux et des organisations de la société civile fournissant des services connexes dans les différentes régions du pays. Cette cartographie constitue un outil de travail, d’information et de coordination qui permet de référencer les différents prestataires de services et de faciliter l’accès des femmes à ces services. Un site a également été créé à l’adresse www.sosfemmesviolences.tn.

Le Ministère a renforcé ses partenariats financiers et techniques avec les associations concernées, par la création de centres visant à accueillir ou héberger les femmes victimes de violences. Le premier centre modèle est géré par l’Association des femmes tunisiennes pour la recherche et le développement. Un appui a été fourni à six associations régionales en vue de la création de centres pour les victimes de violences dans divers gouvernorats (Ariana, Kairouan, Sfax, Gafsa, Médenine et Jendouba), dont quatre dans le cadre du programme Égalité. Un appui technique a également été apporté au moyen de formations dans les domaines requis.

Le Ministère œuvre actuellement, selon une approche participative, à l’élaboration d’un projet de décret gouvernemental concernant les femmes et les enfants victimes de violences et d’un projet de décision portant approbation du cahier des charges.

Le Ministère a publié le premier rapport annuel sur l’application de la loi, qui comprend des données globales relatives à la mise en œuvre de la loi organique no 58 de 2017.

Concernant la question de l’interdiction des châtiments corporels à l’égard des filles, la loi no 40 du 26 juillet 2010 modifiant les dispositions de l’article 319 du Code pénal a supprimé la possibilité de punir indifféremment les filles comme les garçons en supprimant la phrase « la correction infligée à un enfant par les personnes ayant autorité sur lui n’est pas punissable ». Ainsi, le prétexte légal relatif à l’utilisation de la violence comme moyen de discipline par des figures d’autorité telles que les parents et les éducateurs a été éliminé.

Depuis 1995, il existe une fonction de Délégué à la protection de l’enfance, qui est chargé d’une mission d’intervention préventive dans tous les cas où il s’avère que la santé de l’enfant ou son intégrité physique ou morale est menacée ou exposée à un danger. Toute personne, y compris celle qui est tenue au secret professionnel, est soumise au devoir de signaler au Délégué tout ce qui est de nature à constituer une menace contre la santé de l’enfant ou son intégrité physique ou morale. Le signalement est obligatoire en cas de maltraitance ou d’exploitation sexuelle de tout enfant, fille ou garçon, conformément au Code de protection de l’enfant. Le manquement au devoir de notification dans ces images est sanctionné pénalement.

Les enfants victimes de violences peuvent soumettre des plaintes aux représentants de la protection de l’enfance dans tous les gouvernorats, en personne, par courrier ou par courriel, sans révéler l’identité de la personne qu’ils dénoncent. Les unités chargées d’enquêter sur les crimes violents contre les femmes et les enfants peuvent également accepter des signalements et les transmettre aux autorités judiciaires compétentes. Les juges de la famille peuvent accepter des notifications reçues directement d’enfants, de citoyens ou d’institutions de l’État sur toute situation dans laquelle un enfant ou une femme a été soumis à la violence.

Outre la ligne d’assistance téléphonique susmentionnée et en coordination avec d’autres ministères concernés dans le domaine de l’enfance, le Ministère des affaires de la femme a publié des manuels de règlementation à l’intention des professionnels de la santé, de l’éducation et des affaires sociales, leur rappelant le mécanisme de signalement obligatoire des menaces graves contre les enfants, conformément à l’article 20 du Code de protection de l’enfant, notamment en ce qui concerne les cas de maltraitance sexuelle des enfants.

D.Mise en œuvre de la Stratégie nationale de lutte contre les violences faites aux femmes à travers le cycle de vie (voir par. 104 à 106)

IX.Violence fondée sur le genre à l’égard des femmes dans les situations de conflit et de consolidation de la paix

Sous le précédent régime et durant la première année de la révolution, les statistiques suivantes ont été enregistrées :

•En 2010, 21 984 cas de violence contre des femmes (physique et sexuelle) ont été signalés, soit 35,53 % de tous les cas, et 4 158 cas de violence contre des enfants, soit 6,72 % de tous les cas enregistrés ;

•En 2011, 15 342 cas de violence contre des femmes (physique et sexuelle) ont été signalés, soit 21,19 % de tous les cas, et 2 639 cas de violence contre des enfants, soit 3,64 % de tous les cas enregistrés.

A.Intégration des questions de genre dans le processus de justice transitionnelle

La loi organique no 53 de 2013 réglemente les divers domaines de la justice transitionnelle, notamment la révélation de la vérité, la préservation de la mémoire, la redevabilité et l’obligation de rendre compte, la réparation des préjudices, la réhabilitation et la réforme des institutions, et a porté création de l’Instance Vérité et dignité pour assurer la mise en œuvre effective de ce processus.

L’Instance Vérité et dignité a mené un certain nombre d’activités durant son mandat. Elle a présenté son rapport final le 31 décembre 2018, en application des dispositions de la loi précitée et aux trois présidences. Le rapport a été publié au Journal officiel de la République tunisienne en juillet 2020, conformément aux engagements pris devant le Comité des droits de l’homme lors du débat sur le dernier rapport périodique de la Tunisie en mars 2020.

Conformément au règlement intérieur de l’Instance Vérité et dignité, la Commission de la femme a été créée à la suite de l’attachement à l’intégration d’une démarche tenant compte des questions de genre dans l’application de la loi sur la justice transitionnelle. Elle se coordonne avec les organes de l’Instance pour veiller à la prise en compte des questions relatives aux femmes lors de l’examen des violations des droits des femmes et de l’élaboration de programmes de réparation et d’indemnisation. Dans sa résolution 8 du 27 mai 2016, le Conseil de l’Instance a approuvé le manuel de procédure de la Commission de la femme.

La Commission de la femme propose principalement des mécanismes visant à assurer des conditions adéquates d’accueil, d’assistance et de protection aux femmes victimes souhaitant dénoncer anonymement des violations. Elle se coordonne avec les organisations enquêtant sur les violations commises contre les femmes ainsi qu’avec les bureaux régionaux et les divers comités concernant le traitement spécifique de ces femmes.

Dans le cadre du rapport final complet sur les travaux de l’Instance Vérité et dignité, un volume consacré aux violations subies par les femmes a été publié.

B.Chambres de la justice transitionnelle

Selon l’article 7 de la loi sur la justice transitionnelle, l’application des principes de redevabilité et de l’obligation de rendre compte relève de la compétence des instances et pouvoirs judiciaires et administratifs, conformément à la législation en vigueur. Treize chambres spécialisées en justice transitionnelle ont été créées à Tunis, Bizerte, Nabeul, Sousse, Sfax, Sidi Bouzid, Gabès, Médenine, Gafsa, Kasserine, Kef, Kairouan et Monastir, et saisies de 25 dossiers de violations graves des droits humains, à savoir des assassinats, des actes de torture et des disparitions forcées. Les affaires en sont encore au stade préliminaire.

Les chambres spécialisées s’emploient à établir la vérité, à demander des comptes aux responsables et à obtenir des réparations équitables pour les victimes, femmes ou hommes, par l’application des dispositions de la loi sur la justice transitionnelle, sans aucune discrimination fondée sur le genre dans les procédures d’indemnisation ou le montant de celle-ci. Les chambres appliquent également les dispositions du Code de procédure pénale et d’autres textes régissant l’octroi d’une indemnisation, indépendamment du sexe de la victime, l’indemnisation étant fondée uniquement sur l’étendue et la nature du préjudice subi.

X.Traite des personnes et exploitation de la prostitution

Progrès accomplis dans l’application de la loi organique no 61 de 2016

La loi organique no 61 de 2016 a porté création de l’Instance nationale de lutte contre la traite des personnes, qui relève du Ministère de la justice. L’Instance a été effectivement mise en place par le décret gouvernemental no 219 de 2017, portant nomination de son président et de ses membres, qui relèvent d’organismes gouvernementaux et d’organisations non gouvernementales, pour une durée de cinq ans non renouvelable.

Depuis janvier 2018, l’Instance est dotée d’un siège et le décret gouvernemental no 653 de 2019 en fixe l’organisation et les modalités de fonctionnement.

En application des dispositions de l’article 46 de la loi précitée et avec l’appui technique de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), l’Instance a élaboré une Stratégie nationale de lutte contre la traite des personnes (2018-2023), selon une approche participative.

L’Instance a élaboré également un plan d’action visant à mettre en œuvre les principaux éléments de la Stratégie durant la période 2017-2019. Un cadre a été établi, conformément aux cibles 16.2 et 16.4 de l’objectif de développement durable 16 et à la cible 5.2 de l’objectif de développement durable 5.

La Stratégie vise à élaborer une démarche globale de lutte contre la traite, notamment pour ce qui est d’appliquer les mesures de protection et de fournir une assistance aux victimes, outre l’établissement d’une base de données sur la traite des personnes, visant à faciliter les travaux de l’Instance.

La Stratégie comprend quatre axes principaux :

•concevoir, sur le plan de la prévention, le mécanisme nécessaire à la réalisation des objectifs de la Stratégie, notamment en ce qui concerne la formulation de politiques globales visant à prévenir la traite d’êtres humains par l’application efficace des dispositions juridiques, l’harmonisation des lois, l’évaluation de la réalité de la traite, tout en remédiant à ses causes profondes, et la sensibilisation de la société au danger du phénomène par des mesures préventives ; d’autres aspects de ce volet comprennent la promotion de la recherche et d’études, l’amélioration de la formation et le renforcement des capacités ;

•mettre en place, sur le plan de la protection, des méthodes d’identification des victimes en publiant des directives pertinentes et en établissant des mécanismes de signalement sociaux, sanitaires et juridiques ;

•engager des poursuites visant à dissuader efficacement tout crime de traite des êtres humains en renforçant les organismes spécialisés dans l’application de la loi et en protégeant les droits des victimes et des témoins pendant les procédures judiciaires ;

•établir un partenariat et une coopération aux niveaux national et international : renforcer la coopération entre les acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux, ainsi qu’aux échelons bilatéral, régional et international, et établir des mécanismes en vue d’une évaluation et d’un suivi périodiques.

L’Instance a mis en place un comité regroupant les divers organismes concernés qui harmonisera les divers textes de loi relatifs à l’exploitation d’enfants, qui constitue quelque 75 % des cas de traite. Le cadre juridique pertinent comprend des notions qui se recoupent et se chevauchent, ainsi que des différences au niveau des peines, ce qui complique toute intervention visant à fournir une protection et un accompagnement ou à établir une définition juridique de l’infraction.

L’Instance s’emploie également à élaborer des textes réglementaires, dont un projet de décret gouvernemental fixant les conditions et modalités de prise en charge gratuite des victimes. Elle a également participé à la révision du décret gouvernemental no 1061 du 26 septembre 2017 fixant les tarifs des droits de chancellerie concernant les étrangers ayant dépassé la durée maximale de leur séjour en Tunisie.

Dans le domaine de la sensibilisation, l’Instance s’est associée à la « Campagne Cœur bleu de lutte contre la traite des êtres humains » le 30 juillet 2019 et a organisé un colloque international du 26 au 28 juillet 2020 pour promouvoir cette campagne aux niveaux régional et national. Elle a également signé deux accords dans le domaine des médias pour sensibiliser au phénomène de la traite.

L’Instance a consolidé ses partenariats avec des organisations internationales telles que l’Organisation internationale pour les migrations (OMI) et l’ONUDC et avec des organisations régionales telles que le Conseil de l’Europe. Des accords de coopération ont été conclus avec des associations de la société civile telles que Terre d’Asile Tunisie, l’Association des jeunes avocats, l’Association des avocats et des magistrats américains, Avocats Sans Frontières, l’Ordre national des avocats de Tunisie, l’Institut tunisien pour la réhabilitation des victimes de la torture (NEBRAS) et l’Association Amal pour la famille et l’enfant.

En matière de renforcement des capacités, l’Instance a organisé plusieurs activités de formation à l’intention de magistrats, d’attachés judiciaires, de membres des forces de sécurité intérieure, de responsables des ministères des affaires sociales, des affaires de la femme, des affaires religieuses et de la santé, et de professeurs d’université.

Au niveau judiciaire, plus de 200 participants ont bénéficié de formations. Des cours sur les traités internationaux et leur application ou encore sur les normes internationales relatives à la lutte contre le trafic et la traite des personnes ont été organisés de 2015 à 2018 à l’intention de juges en exercice, de 125 magistrats du parquet et juges d’instruction et de 28 juges servant de référence à leurs collègues dans la lutte contre la traite des personnes. Plusieurs cours ont également été organisés à l’intention des juges de la famille et du ministère public chargé des affaires de violence à l’égard des femmes, dans tous les tribunaux de première instance.

Au niveau de la justice militaire, quatre juges militaires ont participé à une formation sur la traite des personnes organisée par le Centre de formation du Partenariat pour la paix à Ankara, l’objectif étant de renforcer les capacités d’enrayer efficacement la traite des personnes et de sensibiliser aux mécanismes et aux mesures adoptés pour lutter contre le phénomène.

Quelque 25 agents de la police judiciaire des forces de sécurité intérieure ont suivi quatre formations sur la traite des personnes, et huit formateurs nationaux ont été choisis. En outre, 104 personnes ont participé à quatre cours régionaux organisés par l’Instance.

Des agents des centres de protection sociale ont participé à des formations et à des ateliers sur les méthodes d’identification des victimes, et 26 des participants ont été choisis pour servir de points de contact. En outre, 25 agents de la protection de l’enfance ont été formés dans le cadre d’un programme de formation des formateurs, et 41 agents des régions ont participé à plusieurs formations.

En 2018 et en partenariat avec l’OMI, l’Instance a organisé 29 activités de formation à l’intention de plus de 2 000 participants.

Au niveau de la protection des victimes, l’Instance :

•fournit une assistance médicale pour permettre le relèvement physique et psychologique des victimes ;

•donne aux victimes des conseils sur les procédures judiciaires et administratives à suivre pour obtenir une indemnisation ;

•aide les victimes à constituer des dossiers pour obtenir une assistance légale ;

•reçoit des notifications concernant la traite des personnes et les oriente vers les autorités judiciaires compétentes ;

•donne des directives pour identifier et aider les victimes ;

•collabore avec les diverses autorités publiques compétentes pour protéger les victimes, les témoins et les lanceurs d’alerte et pour aider les victimes ;

•suit auprès des pouvoirs publics et en coordination avec les organisations non gouvernementales les dossiers des victimes, afin de les aider à surmonter les obstacles qu’elles pourraient rencontrer ;

•apporte l’aide sociale nécessaire aux victimes pour faciliter leur réinsertion dans la vie sociale et leur assure un hébergement.

Mécanisme national d’orientation des victimes de la traite des personnes

Afin d’être mieux à même d’identifier et de poursuivre les trafiquants d’êtres humains et d’offrir une protection et une assistance aux victime, en coopération avec le Conseil de l’Europe et en partenariat avec les secteurs public et privé, la société civile et la communauté internationale, l’Instance nationale de lutte contre la traite des personnes a mis en place un mécanisme national visant à identifier les victimes de la traite, à les orienter vers les services appropriés et à leur apporter une aide et une protection.

Lors de l’élaboration du mécanisme, les rôles des organismes gouvernementaux et non gouvernementaux ont été définis dans l’objectif d’établir un cadre général et un fondement pour la prise en charge des victimes et l’adoption d’une approche participative, depuis le moment de la commission du crime, jusqu’à celui de l’intégration de la victime dans la société ou de son retour pleinement consenti dans son pays, pour lui éviter de faire à nouveau l’objet d’une traite. Les victimes bénéficient de toute l’assistance et de la protection que dicte leur situation, conformément aux normes internationales et nationales pertinentes. De nombreux outils ont été élaborés pour faciliter la coordination entre les partenaires et faire respecter les droits des victimes.

Afin de s’assurer de l’efficacité du mécanisme et de son application effective, l’Instance a décidé de le tester avant de l’approuver pour de bon. Il a donc été de nouveau éprouvé en 2020 dans le cadre de simulations effectuées lors de trois ateliers régionaux dans divers gouvernorats.

Dans l’attente de l’adoption du mécanisme, l’aide aux victimes doit continuer d’être assurée par les organismes compétents, en coordination avec les divers acteurs concernés.

Au niveau de la collecte de données et avec le soutien de l’OIM, l’Instance établit un rapport annuel sur les victimes de la traite des personnes qui ont bénéficié d’une aide. Elle a accompagné 742 victimes en 2017, 780 en 2018 et 723 en 2019 (voir annexe IV).

L’Instance élabore actuellement un système d’information qui lui permettra de numériser le processus d’accompagnement et de réunir des statistiques sur les diverses situations saisies.

En ce qui concerne la modification ou l’abrogation de l’article 231 du Code pénal, relatif à la pénalisation de la prostitution, le Ministère de la justice procède à une révision complète du Code pénal et du Code de procédure pénale pour veiller à les harmoniser avec les dispositions de la Constitution et les normes internationales.

XI.Participation à la vie politique et publique

A.Participation des femmes à la vie publique et aux prises de décision

Malgré l’adoption du principe d’alternance hommes-femmes sur les listes électorales au cours des élections législatives de 2011, la représentation des femmes à l’Assemblée est restée en-deçà des attentes. Les femmes représentaient 25 % des membres de l’Assemblée nationale constituante au début de la session parlementaire en janvier 2012, taux qui est passé à 30,59 % en juin 2014. L’Assemblée des représentants du peuple, élue en octobre 2014, comptait 35,94 % de femmes.

Quant à la législature de 2019-2024, le nombre de femmes a baissé pour passer à 24,88 %, soit 54 députées sur 163 élus.

Depuis septembre 2020, le Gouvernement actuel compte 27,5 % de femmes, dont sept femmes ministres ou secrétaires d’État parmi les 29 membres du Gouvernement. Pour la première fois dans l’histoire du pays, une femme avait accédé à la fonction de Ministre de la justice, un des cinq ministères régaliens, dans le précédent Gouvernement (février-septembre 2020).

En ce qui concerne la représentation des femmes dans les conseils municipaux, elles étaient 3 385 (47,05 %) à avoir été élues, tandis que le nombre de femmes têtes de liste qui ont été élues dans les municipalités était de 573, soit 29,55 % de toutes les têtes de liste.

Les femmes sont faiblement représentées au niveau régional, une seule femme occupant le poste de gouverneure dans les 24 gouvernorats.

Les femmes représentent 37 % des agents de la fonction publique, un pourcentage qui passe à 46 % si l’on tient compte des femmes actives aux ministères de l’intérieur et de la défense.

Les femmes représentent 35,8 % des agents qualifiés dans la fonction publique. Les pourcentages de femmes se présentent comme suit, sur le plan des fonctionnaires qualifiés :

•25 % des directeurs généraux ;

•30,1 % des directeurs ;

•33,8 % des sous-directeurs ;

•40,2 % des chefs de service.

La présence des femmes dans le système judiciaire a également augmenté de manière sensible et régulière de 2010 à 2018, passant respectivement de 32,4 % à 43,12 %. De 1986 à 2018, le pourcentage de magistrates a doublé, passant de 32 % à 68,5 %. En 2020, elles étaient plus de 70 %. Actuellement, la proportion de femmes auprès des tribunaux de l’ordre judiciaire est de 55 % (juges de premier grade), 23 % (juges de deuxième grade) et 22 % (juges de troisième grade).

La présence des magistrates aux postes de décision reste néanmoins faible et l’on ne compte aucune femme occupant l’un des sept postes réservés aux magistrats de haut rang.

Auprès des juridictions administratives, le nombre de magistrates a nettement progressé, passant de 39 en 2010 à 61 en 2016. Concernant les juridictions financières, le nombre de magistrates a également augmenté, passant de 30 en 2010 à 79 en 2016 (soit de 30 % à 45,14 %).

Auprès des conseils de la magistrature, le nombre de femmes est passé de 5 (dont 4 étaient membres de l’Instance provisoire de la justice judiciaire) à 19 membres, parmi lesquelles 4 membres du Conseil supérieur de la magistrature (soit de 10,5 % à 42,2 %).

Au niveau de l’administration de la justice militaire, le pourcentage de femmes a augmenté de 13,36 % en 2011 à 33,33 % en 2018. Les femmes militaires ont également occupé des postes de direction au sein de la justice militaire, dans les deux régimes d’un procureur général près la cour d’appel militaire et un procureur général de l’État, directeur de la justice militaire, pendant la période allant du 2 septembre 2016 au 30 juin 2019.

Au niveau de l’institution militaire dans son ensemble, le pourcentage de femmes dans les rangs de l’Armée nationale pour les années 2018-2019 était de 5,58 % en 2018 et de 5,74 % en 2019.

Au niveau de la diplomatie, le nombre de femmes diplomates en mission à l’étranger est de 66. Par ailleurs, 131 femmes occupent des postes dans le corps diplomatique, dont :

•4 ministres plénipotentiaires hors grade ;

•24 ministres plénipotentiaires dont 12 nommés à l’étranger ;

•49 conseillères en affaires étrangères ;

•53 secrétaires aux affaires étrangères (20 à l’étranger et 33 à l’administration centrale).

Le nombre de femmes ambassadrices est de 7 et le nombre de consules est de 5. Le nombre de femmes attachées à des organisations internationales est de 5.

B.Cadre légal de la parité hommes-femmes

Le principe d’alternance hommes-femmes sur les listes électorales est consacré depuis les élections à l’Assemblée nationale constituante et a été intégré dans la loi électorale après l’adoption de la Constitution du 27 janvier 2014. Le principe de la parité verticale dans la liste n’a été appliqué qu’au cours des élections législatives. La demande de maintenir la parité dans les têtes de listes électorales (parité horizontale) n’a pas été abordée lors du débat sur la loi électorale. Avec l’adoption de la loi électorale de 2017, le législateur a néanmoins introduit la parité horizontale et la parité verticale concernant les élections municipales et régionales.

La loi organique no 29 de 2018 relative au Code des collectivités locales comporte également de nombreuses dispositions relatives aux principes de parité (art. 44) et d’égalité entre les personnes et d’égalité des chances entre les sexes (art. 106). Le cadre juridique créé par cette loi est conforme à la cible 5.5 des objectifs de développement durable et vise à obtenir la participation égale des femmes à la vie publique et aux prises de décision.

En application de ces dispositions, la Commission électorale indépendante a rejeté toutes les listes de candidats qui ne respectaient pas les principes de parité et d’alternance entre hommes et femmes, que ce soit aux élections législatives ou municipales.

Il ressort des affaires examinées par la justice à l’occasion des contestations de candidatures aux élections législatives de 2019 que nombre d’entre elles étaient liées à l’une des conditions que doit remplir la liste des candidats. La condition de parité verticale ne faisait néanmoins pas partie de celles qui ont posé des problèmes majeurs lors de ces élections, contrairement aux élections législatives de 2014 et municipales de 2018, où le non-respect de cette condition a été l’une des principales raisons du rejet et de la contestation des candidatures devant la justice. L’exigence de parité verticale a été ajoutée à celle de parité horizontale conformément à la loi électorale, selon laquelle les candidatures aux assemblées municipales et régionales doivent également être présentées sur la base du principe de parité femmes-hommes dans les têtes de listes des partis et des coalitions qui se présentent dans plus d’une circonscription électorale. Les listes de partis et de coalitions ne respectant pas cette règle sont irrecevables, à moins qu’elles ne soient régularisées dans le délai prescrit par la loi.

L’absence d’adoption de la parité horizontale aux élections législatives a cependant conduit à un faible nombre de femmes têtes de liste (voir annexe V).

C.Mesures prises pour accroître la participation des femmes à la vie publique et politique

Il convient de rappeler le Plan national d’intégration du genre, dans le cadre duquel une attention particulière est prêtée à la promotion de la participation des femmes à la vie politique et à la gestion des affaires publiques (par. 91 à 96). Le plan national de mise en œuvre de la résolution 1315 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes et la paix et la sécurité et la paix comprend un volet sur la participation des femmes à la vie politique et à la gestion des affaires publiques et aux prises de décision en vue du maintien de la paix, du règlement des conflits et de la lutte contre le terrorisme.

Le Premier Ministre a également publié la circulaire no 31 de 2018, qui énonce l’adoption du principe de la parité dans les nominations et les postes de direction. Cette décision a été appuyée par la publication d’une deuxième circulaire du Premier Ministre, en 2019, qui rappelle la nécessité de proposer un homme et une femme pour chaque poste dans l’administration et dans la fonction publique et pour chaque poste de décision.

Par l’adoption de la loi organique no 58 de 2017 relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes, la Tunisie a été le premier pays arabe et africain à avoir reconnu la violence politique contre les femmes comme une forme de violence et à l’avoir pénalisée. La loi va au-delà de la portée des instruments internationaux pertinents, qui engagent les États à consacrer l’égalité dans le domaine politique. Les acteurs de la société civile actifs dans ce domaine se mobilisent désormais pour rallier un appui à l’intégration de la violence, notamment de la violence politique, dans les instruments, et pour obtenir la définition d’un cadre conceptuel juridique international qui facilite l’adoption d’une législation comparable dans ce domaine.

Une série d’indicateurs scientifiques ont été établis à partir de ce cadre et d’un certain nombre d’études pertinentes. Il s’agit notamment d’une étude intitulée « Présence des femmes dans la fonction publique et accès aux postes de décision en Tunisie », qui a été réalisée par la Présidence du Gouvernement, en coopération avec ONU-Femmes, et d’études réalisées par le CREDIF, dont les plus récentes sont les suivantes :

•un mécanisme de suivi et de surveillance des femmes tunisiennes occupant des postes de responsabilité administrative dans le secteur public ;

•le Comité national d’appui à l’égalité des chances des femmes et des hommes dans la gestion des affaires locales.

À l’occasion des élections de 2014, un partenariat a été créé entre les ministères des affaires de la femme, des affaires sociales et de l’intérieur et la Commission électorale indépendante pour mettre en œuvre un programme visant à aider les femmes en zones rurales à obtenir des pièces d’identité nationales. La Commission a produit des bulletins de sensibilisation qui s’adressaient aux femmes, en premier lieu, ainsi qu’à d’autres groupes tels que les jeunes, les personnes âgées et les personnes handicapées. En 2014, les électrices qui se sont inscrites volontairement représentaient 50,5 % de tous les électeurs nouvellement inscrits, ce qui a porté le nombre d’électrices à 2 446 393, soit 46,10 % du nombre total d’électeurs inscrits.

Des groupes précis, notamment, les femmes rurales, ont été ciblés concernant l’inscription aux élections de 2019. Il en est résulté un équilibre presque parfait entre les proportions de femmes (49 %) et d’hommes parmi les électeurs inscrits. Ces efforts ont été menés en coordination avec des organisations de la société civile.

La violence fondée sur le genre est abordée dans le Guide des règles et procédures de la campagne électorale et fait partie des irrégularités que les observateurs de la campagne doivent surveiller, conformément à la loi no 58 de 2017. À cet égard, un document d’orientation a été préparé à l’intention des observateurs électoraux, clarifiant la notion de violence fondée sur le genre.

En ce qui concerne le renforcement des capacités des candidates issues de groupes défavorisés et en collaboration avec le Forum of Federations (Canada), le CREDIF a organisé au début de mars 2020 un atelier de formation régional sur le thème d’une direction porteuse de transformation, à l’intention de 21 femmes actives dans la vie publique et politique en Jordanie, au Maroc et en Tunisie, afin de leur donner les moyens d’accéder à des postes de décision au sein des partis et de renforcer leur présence dans les milieux politiques.

En 2019, en partenariat avec le Forum of Federations, le CREDIF a organisé une académie politique sur le thème « Femmes dirigeantes pour une gouvernance inclusive », visant à garantir une présence de femmes dans les structures centrales des partis et dans les instances régionales et à appuyer l’élaboration de mécanismes renforçant les alliances politiques de femmes. Elle cherche également à appliquer une stratégie commune pour mobiliser des groupes et obtenir un réel changement. Sept ateliers de formation ont été organisés durant l’académie politique. Des préparatifs seront en cours en vue de la tenue d’une deuxième édition de l’académie politique.

Le CREDIF organise régulièrement des séminaires et des ateliers de réflexion à l’intention de divers groupes de femmes et de représentantes d’associations et de partis politiques, afin de soutenir les adhérentes, concernant les affaires locales, et les candidates aux élections municipales. Il met actuellement à jour et enrichit sa base de données « Who is She » pour inclure, outre les expertes et les universitaires, des femmes qualifiées occupant des postes de responsabilité administrative afin de mettre des informations sur leur parcours à la disposition des décideurs, des organisations nationales et internationales et des médias.

En octobre 2019, le Réseau arabe des femmes et des élections a été lancé et la Tunisie a été élue à la tête du comité directeur. Le Réseau travaille au niveau régional à élaborer des programmes visant à renforcer la participation des femmes aux élections et dans la sphère politique. Au titre de sa stratégie triennale, en cours d’élaboration, il compte :

•organiser un programme de formation sur les femmes dirigeantes dans les élections et la politique ;

•préparer une campagne d’information sur ses objectifs et sa démarche ;

•produire des documents et des programmes sur la lutte contre les violences politiques faites aux femmes ;

•observer les élections en tenant compte des questions de genre, dans le respect des principes internationaux, de manière à être inclusif, à recouvrir tous les groupes et à servir de pilier à la démocratie, au transfert pacifique du pouvoir et à la stabilité.

D.Protection des défenseuses des droits humains

Les articles 35, 36 et 37 de la Constitution prévoient la liberté de réunion et de manifestation pacifiques, le droit syndical, le droit de grève et le droit de constituer des partis politiques, des syndicats et des associations. Le décret-loi no 88 de 2011 portant organisation des associations a introduit des changements radicaux au niveau de la liberté d’association, car il a aboli le régime d’autorisation et l’a remplacé par un régime de déclaration. Toute réglementation ultérieure des associations se fait par voie judiciaire. Cela a conduit à une augmentation importante du nombre d’associations.

Selon l’article 6 du décret 88, « il est interdit aux autorités publiques d’entraver ou de ralentir l’activité́ des associations de manière directe ou indirecte ». Selon l’article 7, « l’État prend toutes les mesures nécessaires garantissant à tout individu sa protection par les autorités compétentes contre toute violence, menace, vengeance, discrimination préjudiciable de fait ou de droit, pression ou toute autre mesure abusive suite à l’exercice légitime de ses droits prévus par le décret-loi ».

La Tunisie ne dispose cependant pas d’un cadre juridique complet pour la protection des défenseuses des droits humains. Ces violations sont traitées en vertu du droit général (Code pénal ou lois spéciales). Cette situation a conduit certaines organisations de la société civile à commencer à rédiger un projet de loi sur la protection des défenseuses des droits humains.

E.Application du Plan d’action national sur les femmes et la paix et la sécurité

Outre les informations fournies aux paragraphes 99 à 103, il convient de noter que le CREDIF a achevé la première étude sur le cadre institutionnel de l’application de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur laquelle le Ministère des affaires de la femme s’est appuyé pour élaborer le Plan d’action national y relatif.

En 2018, le CREDIF a procédé à la première vérification scientifique qualitative sur la sécurité des femmes au moyen de quatre zones modèles, afin de mesurer le sentiment de sécurité des femmes dans les espaces publics et de répertorier les espaces non sécurisés. En 2019, le CREDIF a achevé un projet de recherche sur la prévention de l’extrémisme violent dans les divers gouvernorats du pays, en vue de fournir des analyses sur le rôle des femmes et des jeunes des deux sexes dans la prévention de l’extrémisme violent, de mener des activités pour appuyer leurs capacités et de se protéger contre l’extrémisme violent au moyen d’une action de sensibilisation.

L’adoption du plan national a donné lieu à divers plans sectoriels de la part de 13 organismes publics et de 22 organisations de la société civile puis à un plan opérationnel général, ce dernier servant de document-cadre à tous les plans sectoriels jusqu’à la fin de 2020. Un colloque international a été organisé en octobre 2019 afin de mobiliser un appui à la mise en œuvre et au financement du plan opérationnel.

Des plans sectoriels ont été achevés concernant les ministères suivants : affaires de la femme, défense, intérieur, affaires étrangères, santé, affaires religieuses, jeunesse et sports, transports, affaires culturelles, développement, investissement et coopération internationale, agriculture, ressources hydrauliques et pêche maritime et affaires sociales.

Les parties prenantes ont pris à cet égard les mesures suivantes :

•préparer des critères de sélection des partenaires en vue du programme du plan opérationnel ;

•affiner la méthode de travail en vue de l’élaboration de plans sectoriels et établir un programme et un calendrier de travail relatifs à la deuxième partie du volet ;

•ajouter au processus de nouveaux ministères (transports, affaires culturelles, agriculture, jeunesse et sports, et industrie) ;

•organiser des ateliers visant à formuler des plans sectoriels ;

•organiser des réunions d’appui technique à l’intention des partenaires, et des sessions de travail sectorielles ;

•organiser des ateliers avec des associations et des organisations de la société civile sur les modalités de coopération sur le plan de l’exécution des plans sectoriels.

Les résultats escomptés se présentent comme suit :

•établir une base de données actualisées partagées par tous les organismes publics ;

•promulguer des lois et adopter des mesures favorisant le principe de parité dans tous les organes élus et les organismes et bureaux indépendants aux niveaux national et local et veiller à ce que les lois et règlements soient harmonisés avec la Constitution et les normes internationales ;

•prendre des mesures appropriées et mettre en place des mécanismes nationaux pour protéger les femmes et les filles contre l’extrémisme violent et le terrorisme ;

•renforcer la capacité des organismes de sécurité de façon qu’ils puissent répondre aux violations des droits des femmes et des filles ;

•augmenter la proportion de femmes à des postes de décision et à des fonctions de responsabilité de haut niveau dans les domaines civil, judiciaire et militaire ;

•augmenter le nombre de programmes et de mesures visant à promouvoir l’emploi des femmes et des filles.

L’élément principal du plan sectoriel du Ministère des affaires de la femme est le programme intitulé « Un projet de vie pour chaque région », reposant sur une approche globale, participative et intégrée en faveur de la création de projets économiques destinés aux femmes dans les régions menacées par le terrorisme et l’extrémisme violent, qui sont fortement peuplées et souffrent de pauvreté et de marginalisation, l’objectif étant de valoriser les produits issus de chaque région. Cet objectif est accompli en adoptant les principes de la solidarité économique et sociale dans un cadre organisé et structuré et en encourageant la population à rester dans sa région tout en maintenant un niveau de vie décent. La région est dotée des installations nécessaires, tels que des écoles, des jardins d’enfants, des crèches, des centres de jeunesse, des espaces de loisirs, des dispensaires et des bureaux de poste, ainsi que de toute infrastructure requise, telle que l’éclairage, les réseaux d’égouts et d’assainissement et les routes et les moyens de transport, afin d’attirer les investisseurs dans la région.

XII.Nationalité

Le droit tunisien de la nationalité a connu une évolution importante qui s’est concrétisée par les révisions successives du Code de la nationalité, qui ont été faites dans un souci d’harmoniser ledit code avec la Constitution et d’en éliminer les dispositions discriminatoires, notamment après la révision importante de la loi no 55 de 2010. Le Ministère des affaires de la femme a donc présenté un projet de loi qui permettrait aux Tunisiennes mariées à des étrangers de transmettre la nationalité tunisienne à leurs enfants nés à l’étranger.

Le projet vise à mettre la législation nationale en conformité avec les dispositions des instruments internationaux ratifiés par la Tunisie dont le plus important est la Convention sur la nationalité de la femme mariée, ratifiée par la loi no 41 de 1967 du 21 novembre 1967.

Pour comprendre l’importance de la révision proposée, prière de se reporter à l’annexe VI, indiquant les étapes de l’évolution qu’a connue le Code de la nationalité tunisienne, afin de recenser les lacunes et de signaler les changements à apporter au moyen du projet d’amendement.

Le droit des femmes mariées à des étrangers de transmettre la nationalité tunisienne à leurs enfants nés à l’étranger est l’une des raisons les plus importantes pour lesquelles la nationalité tunisienne est considérée comme discriminatoire. Dans ses observations finales concernant les cinquième et sixième rapports périodiques de la Tunisie, le Comité a recommandé que le pays adopte une loi établissant l’égalité entre les femmes et les hommes pour ce qui est de la possibilité de transmettre la nationalité à leurs enfants sans discrimination, conformément à l’article 9 de la Convention. Le principe de non-discrimination a été introduit dans les modifications apportées au Code de la nationalité, en particulier ses articles 6 et 12, en application de la loi no 55 de 2010. Elles n’ont cependant pas été suffisantes et n’ont concrètement pas produit l’effet escompté. Le Ministère des affaires de la femme a donc décidé de présenter un projet de loi visant à réviser la loi no 55 de 2010.

Il convient de noter qu’en l’absence de formulation claire, le pouvoir judiciaire tunisien a lu les dispositions de manière non discriminatoire dans le respect du principe d’égalité. Par exemple, le Tribunal de première instance de Tunis, dans son jugement no 7482 du 2 avril 2018, a clairement indiqué que le législateur avait décidé, comme l’énonce le nouvel article 6 du Code de la nationalité, que les enfants de mère tunisienne acquièrent la nationalité tunisienne par filiation, quel que soit leur lieu de naissance. Cela démontre une volonté constante d’éliminer la discrimination entre les hommes et les femmes. Dans le nouvel article 6 du Code de la nationalité, le législateur reconnaît que les enfants nés de père et de mère tunisiens doivent bénéficier de la nationalité tunisienne, qu’ils soient nés en Tunisie ou à l’étranger. Cette décision, qui a été adoptée à l’issue de l’abrogation de l’ancien article 6 et de son remplacement par le nouvel article 6, établit que la filiation de la personne qui demande la nationalité tunisienne, et non son lieu de naissance, est le fondement du droit des femmes tunisiennes de transmettre leur nationalité à leurs enfants, quel que soit leur lieu de naissance.

Enseignement

Les données consignées mettent en évidence l’augmentation constante de la proportion de filles inscrites dans les établissements d’enseignement. Comme indiqué au paragraphe 13, le nombre de filles inscrites dans les écoles primaires et secondaires dépasse celui des garçons (voir annexe VII). Les taux de réussite témoignent de l’excellence de l’éducation des filles, et elles connaissent des taux d’abandon et d’échec moins élevés.

L’année préscolaire joue un rôle important pour garantir aux élèves les meilleures chances de réussite scolaire ; elle les aide à améliorer leurs résultats scolaires et leur intégration sur les plans social et de l’enseignement. Des mesures ont donc été prises pour veiller à mettre largement à disposition les programmes de l’année préscolaire, en particulier dans les zones rurales et les quartiers à forte densité de population. Au cours de l’année scolaire 2019/20, 59 544 enfants étaient inscrits dans des classes préscolaires, dont 29 356 (soit 49,3 %) de filles (voir annexe VIII).

En ce qui concerne l’enseignement primaire, quelque 1 171 569 élèves étaient inscrits à l’école publique durant l’année scolaire 2019/20, dont 48 % de filles (voir annexe IX).

Le taux de réussite des filles au niveau de l’école primaire, durant l’année scolaire 2018/2019, était de 4,7 points plus élevé que celui des garçons. On trouvera à l’annexe X les taux de réussite, de redoublement et d’abandon.

Le cycle préparatoire vient compléter l’enseignement primaire et donne accès à l’enseignement secondaire : il est ouvert à tous ceux qui, au vu de leurs résultats, remplissent les conditions d’accès requises, énoncées à l’article 25 de la loi d’orientation pertinente.

Le nombre d’élèves dans les cycles d’enseignement préparatoire et secondaire était de 926 832 durant l’année scolaire 2019/20, avec un écart de 9,6 points en faveur des filles.

Afin de consacrer l’égalité et de promouvoir l’égalité des chances, un programme d’intégration scolaire des enfants ayant un handicap a été lancé dans le cadre d’un plan national d’intégration scolaire qui est en place depuis 2003.

Ces mesures ont permis d’obtenir une augmentation du nombre de garçons et de filles inscrits dans le programme d’enseignement classique, des unités de formation ont été introduites, des écoles intégrées ont été créées et équipées, et des conseils et un accompagnement pédagogiques ont été mis à disposition.

Des sections préparatoires ont également été ouvertes pour les enfants ayant un handicap et une stratégie nationale de communication et d’information a été définie dans le domaine de l’intégration scolaire.

D’après les statistiques de l’année scolaire 2019/20, le nombre d’élèves ayant un handicap (et ceux ayant des besoins particuliers), est passé à 6 113, dont 2 205 filles (voir annexe XI).

La Rapporteuse spéciale sur le droit à l’éducation s’est rendue en Tunisie en 2012 et en 2019 et a formulé une série de recommandations qui ont été transmises aux parties prenantes afin qu’elles s’en puissent s’en inspirer au cours de l’élaboration de plans d’action en vue de promouvoir l’égalité des chances entre les sexes.

Au niveau de la formation professionnelle, de nombreuses mesures ont été prises pour améliorer l’enseignement technique afin de renforcer les capacités et les qualifications des élèves. Les écoles de formation technique ont été transformées en écoles professionnelles en 2000/01 et des écoles techniques ont été ouvertes en 2007/08.

Les filles et les garçons inscrits dans ces écoles reçoivent une formation technique et appliquée qui leur permet de se qualifier pour des secteurs essentiels tels que l’industrie, la construction et les services ; ils reçoivent également une instruction dans le domaines des langues, des sciences et des disciplines sociales. Les trois formations de base sont l’enseignement en classe, la formation en alternance et la formation en cours d’emploi.

Au niveau de l’enseignement supérieur, l’article 6 de la loi no 2008-19 du 25 février 2008 relative à l’enseignement supérieur énonce que « l’accès à l’enseignement supérieur est ouvert aux titulaires du baccalauréat ou d’un diplôme étranger reconnu équivalent », sur la base du mérite et sans discrimination.

Cela s’est traduit par l’inscription d’un nombre important de jeunes femmes dans les établissements publics d’enseignement supérieur. Durant l’année universitaire 2018/19, elles constituaient 66 % des étudiants inscrits dans les universités publiques et 69 % des titulaires de diplômes supérieurs issus d’universités publiques.

Le taux d’analphabétisme chez les femmes est de 25,7 % contre 12,9 % chez les hommes. Il est plus élevé en milieu rural : 41,8 % et 23,2 % chez les femmes et les hommes.

Bon nombre de mesures ont été prises pour éliminer l’analphabétisme et assurer un enseignement pour les adultes. Depuis 2000, le Programme national d’enseignement pour adultes vise les personnes qui, du fait de circonstances particulières, n’ont pas pu entamer d’études ou les ont abandonnées prématurément, les replongeant dans l’analphabétisme. Les participants reçoivent une éducation culturelle complète au moyen de cours de communication sur des sujets tels que la famille, l’éducation, la santé, la citoyenneté, le dialogue et l’environnement.

La direction de la lutte contre l’analphabétisme et de l’enseignement pour adultes tient compte de la situation sociale des apprenants et offre des incitations telles que des aides financières ou en espèces aux personnes indigentes ou démunies. Il s’intéresse également à la situation des femmes et aide à promouvoir leur rôle dans la famille et dans la société en sensibilisant le public à leurs droits. Il enseigne également aux jeunes étudiants les compétences de base et leur fournit le cas échéant les moyens de participer à des activités rémunératrices. On trouvera à l’annexe XII des statistiques sur les réalisations obtenues par le Centre national d’éducation pour les adultes durant l’année scolaire 2019/20, désagrégées par gouvernorat, groupe d’âge et genre.

Le Ministère des affaires de la femme met également en œuvre depuis 2016 le programme de développement social des femmes, qui s’inscrit dans une vision stratégique nationale d’élimination de l’analphabétisme à l’horizon 2030 et a été lancé dans le gouvernorat de Kairouan (délégation d’Ala) avant d’être diffusé dans tous les gouvernorats, l’accent étant mis sur les zones prioritaires qui connaissent un taux d’analphabétisme élevé.

Le programme vise à éliminer progressivement l’analphabétisme et à empêcher toute régression, permettant aux femmes qui en sont bénéficiaires de renforcer leurs compétences et leurs connaissances, de lutter contre la marginalisation, la pauvreté et le chômage, d’avoir une vie décente et de participer à la vie publique.

Emploi

D’après l’article 40 de la Constitution, « tout citoyen et toute citoyenne a droit au travail. L’État prend les mesures nécessaires afin de le garantir sur la base du mérite et de l’équité́. Tout citoyen et toute citoyenne a droit au travail dans des conditions favorables et avec un salaire équitable ».

Par conséquent, des mesures ont été prises pour accroître la présence des femmes sur le marché du travail. Le Ministre de l’emploi et de la formation professionnelle a mis en œuvre plusieurs programmes dans le domaine de l’emploi, de l’initiative privée et de la formation professionnelle.

Ces dernières années, les femmes représentaient quelque 70 % des personnes qui ont bénéficié de divers programmes d’emploi actifs financés par les ressources du Fonds national de l’emploi. Ces programmes offrent une formation complémentaire, visant à permettre à un plus grand nombre de chômeurs d’obtenir un emploi et à inciter les institutions du secteur privé à y contribuer en proposant des stages et des formations professionnelles.

Un programme visant à améliorer l’employabilité des demandeurs d’emploi a été lancé dans le cadre du plan visant à réviser et à réformer les programmes et mécanismes d’emploi et à appliquer une stratégie sectorielle en la matière. Ce programme vise à fournir aux demandeurs d’emploi des deux sexes une formation adaptée aux besoins particuliers du marché du travail. En outre, un programme de subventions à l’emploi destiné aux entreprises à haute valeur ajoutée a été lancé afin d’encourager le recrutement de titulaires de diplômes supérieurs dans le cadre de contrats de travail ou à temps plein.

La Tunisie a continué de prendre des mesures visant à garantir l’égalité des chances en matière d’emploi et à éliminer toute forme de discrimination, notamment par l’annonce d’entretiens pour tous les candidats et l’adoption de normes de compétence.

En matière d’égalité de rémunération, outre les dispositions pertinentes de la Constitution du pays et les lois en vigueur, la Tunisie a ratifié toutes les conventions internationales sur l’égalité, y compris la Convention de 1951 sur l’égalité de rémunération (no 100) de l’Organisation internationale du travail (OIT) relative à l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale.

Le principe de non-discrimination, qui comprend un salaire pour un travail de valeur égale, tant pour les femmes que pour les hommes, est inscrit dans le droit national. L’article 6 de la loi organique no 58 de 2017 relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes prévoit que « l’État prend toutes les mesures nécessaires pour éliminer toutes les pratiques discriminatoires à l’égard des femmes, notamment au niveau de la rémunération ».

Lors de leurs visites dans des établissements du secteur privé, les inspecteurs du travail vérifient la classification de chaque emploi et comparent les salaires et les primes versés aux femmes et aux hommes pour un emploi donné en fonction de l’ancienneté, afin de s’assurer qu’il n’existe pas de discrimination dans l’entreprise. Lorsqu’ils constatent des violations du Code du travail, ils rédigent un rapport et le soumettent au tribunal chargé d’enquêter sur les violations des droits des travailleurs. En outre, le non-versement à un employé, homme ou femme, d’un salaire approuvé légalement constitue une infraction punissable par la loi.

Dans le secteur public, l’égalité de la rémunération entre les hommes et les femmes est garantie par la loi portant statut général des personnels de l’État, des collectivités publiques locales et des établissements publics à caractère administratif, dont l’article 13 énonce que les agents ont droit, après service fait, à une rémunération, outre un certain nombre d’autres avantages qui ne sont en aucune façon spécifiques au genre.

Pour ce qui est de l’incrimination du harcèlement sexuel au travail, outre ce qui était mentionné à l’article 226 bis du Code pénal, l’article 226 ter (nouveau) énonce : « Est puni de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de cinq mille dinars celui qui commet le harcèlement sexuel ».

Est considéré comme harcèlement sexuel toute persistance dans la gêne d’autrui par la répétition d’actes ou de paroles ou de gestes susceptibles de porter atteinte à sa dignité ou d’affecter sa pudeur, et ce, dans le but de l’amener à se soumettre à ses propres désirs sexuels ou aux désirs sexuels d’autrui, ou en exerçant sur lui des pressions de nature à affaiblir sa volonté de résister à ses désirs. De par la loi, la peine prévue est aggravée dans certaines circonstances, notamment lorsque l’auteur a une autorité sur la victime ou abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions, ou encore si l’infraction commise est facilitée par la situation de vulnérabilité apparente de la victime, ou connue par l’auteur.

Des données précises sur l’emploi des femmes dans le secteur non structuré de l’économie ne sont pas disponibles. Compte tenu cependant de la croissance et des conséquences de l’économie parallèle, les parties prenantes ont décidé d’inclure un point spécial dans le contrat social, dans la section sur les politiques de l’emploi et la formation professionnelle, demandant aux travailleurs de passer progressivement du secteur non structuré au secteur structuré de l’économie et soulignant la nécessité d’organiser une formation professionnelle à cet effet.

Dans le cadre du programme intégré qui a été élaboré, les inspecteurs mènent des campagnes de sensibilisation à l’intention des travailleurs, des artisans et de ceux qui exercent des activités non structurées, hommes et femmes, afin de les aider à passer du secteur non structuré au secteur structuré de l’économie en les encourageant à adhérer à un régime de sécurité sociale. Dans le cadre de l’approche globale visant à instaurer la justice sociale et à étendre la couverture de la sécurité sociale, la réforme du système de protection sociale garantira que chaque citoyen, y compris ceux travaillant dans l’économie parallèle, bénéficie d’une couverture sociale et de soins de santé adéquate.

Pour ce qui est de la protection des travailleurs domestiques, le Ministère des affaires de la femme a cherché à promouvoir l’émancipation économique des femmes issues de groupes vulnérables, en particulier celles qui ont été touchées par la période de confinement et n’ont pas pu poursuivre leur travail habituel. Un fonds de financement a donc été mis en place pour aider les travailleurs domestiques par l’octroi d’un montant de 1 000 dinars sous forme de crédit sans intérêt, avec une période de grâce de deux mois et un délai de remboursement de 24 mois.

Le Ministère travaille à l’adoption d’un cadre législatif qui protégera les travailleurs domestiques et a lancé un processus consultatif multilatéral avec le soutien de l’OIT. Un atelier de réflexion sur la révision du cadre juridique des travailleurs domestiques en Tunisie et de la promotion de l’adhésion de la Tunisie à la Convention de 2011 sur les travailleuses et travailleurs domestiques (no 189) a été organisé en juin 2020. Un comité d’experts a été créé pour évaluer le cadre actuel et proposer une stratégie en vue de son évolution, conformément aux normes internationales. Le Ministère soutient l’adhésion de la Tunisie à la Convention no 189 de l’OIT.

Le Ministère est en train d’élaborer une base de données sur le travail domestique en Tunisie, qui vise à favoriser l’enregistrement de tous les travailleurs domestiques et de leurs employeurs, faisant ainsi du travail domestique une profession visible et mieux organisée.

En ce qui concerne la lutte contre le travail des filles, le législateur tunisien a prévu des peines pour toute personne qui enfreint les lois et règlements relatifs au travail des enfants. Le Code du travail accorde aux inspecteurs du travail des prérogatives importantes afin de faciliter leurs tâches, y compris le pouvoir de pénétrer, sans avertissement et à tout moment, dans toute institution soumise à l’inspection du travail et de demander l’accès à tous les dossiers, registres et documents qui doivent être tenus ou conservés conformément à la législation du travail, afin d’en vérifier la conformité avec les dispositions légales, réglementaires et contractuelles pertinentes. Si les inspecteurs du travail rencontrent des difficultés ou des obstacles dans l’exercice de leurs fonctions, comme par exemple l’interdiction de pénétrer dans un établissement, le Code du travail les autorise, en qualité d’officiers de police judiciaire, à recourir à l’assistance de la force publique dans l’exercice de leurs devoirs. La police et la Garde nationale sont également habilitées à enquêter sur les violations du Code du travail et à rédiger des rapports à ce sujet, y compris sur le travail des enfants.

Il convient de rappeler à cet égard l’article 20 de la loi organique no 58 de 2017, relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes, selon laquelle « est puni de trois à six mois d’emprisonnement et d’une amende de deux à cinq mille dinars, quiconque embauche volontairement et de manière directe ou indirecte, des enfants comme employés de maison. Encourt la même peine prévue par le paragraphe précédent, quiconque se porte intermédiaire pour embaucher des enfants comme employés de maison. La peine est portée au double en cas de récidive. La tentative est punissable ».

En ce qui concerne le programme de lutte contre le travail des enfants et en application du Plan national de lutte contre le travail des enfants, un rapport sur les mesures prises pour élaborer et appuyer la coopération entre les différentes parties prenantes a été élaboré en 2018 dans le cadre du projet PROTECT.

À cette fin, deux ateliers de formation ont été organisés en septembre 2019 dans les gouvernorats de Sfax et de Jendouba à l’intention du personnel du Ministère des affaires sociales, des affaires de la femme, de la famille, de l’enfance et des personnes âgées ainsi que des représentants de l’Union générale tunisienne du travail et de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat. Les ateliers ont porté sur la manière de s’attaquer aux pires formes de travail des enfants, les méthodes permettant d’améliorer les qualifications et les compétences des participants, les principaux rôles et responsabilités confiés à chaque partie et l’intensification des campagnes de sensibilisation à la lutte contre le travail des enfants.

Un guide sur les lois relatives au travail des enfants a été élaboré. Ses principaux thèmes sont la promotion de la recherche sur le travail des enfants, la mise en place des mécanismes de prévention et de protection nécessaires pour combattre le travail des enfants et la création d’un cadre intégré et participatif à l’intention des diverses parties prenantes s’occupant de cette question. Le guide s’adresse principalement aux personnes référentes des institutions concernées.

Dans le rapport annuel du Département du travail des États-Unis sur les pires formes de travail des enfants de 2018, il a été noté que la Tunisie avait accompli d’importants progrès pour ce qui était d’éliminer les pires formes de travail des enfants.

Concernant la ratification des conventions internationales relatives au travail, depuis que la Tunisie a adhéré à l’OIT en 1956, elle a signé 65 conventions internationales du travail (voir annexe XIII).

En 2019, la Tunisie a ratifié la Convention de 1969 sur l’inspection du travail (agriculture) (no 129), complétant ainsi la ratification des quatre conventions internationales du travail relatives à la gouvernance. Elle a également ratifié la Convention de 2006 sur le cadre promotionnel pour la sécurité et la santé au travail (no 187) afin d’améliorer davantage l’environnement de travail.

En consultation avec les partenaires sociaux, les autorités mènent les études nécessaires à la ratification de plusieurs accords internationaux relatifs à la santé et sécurité au travail et à d’autres domaines.

En ce qui concerne la prestation de services sociaux aux femmes qui travaillent et la redistribution des rôles au sein de la famille, cette dernière nécessite un changement des comportements sociaux réduisant les femmes à un rôle de procréation, ces dernières assumant la responsabilité de l’éducation des enfants en l’absence de toute mesure les aidant à concilier les exigences de la vie familiale et professionnelle. Des travaux sont en cours pour prévoir des mesures telles que des centres de garde d’enfants ou encore de développement social et éducatif. Les crèches pour les enfants de moins de trois ans sont peu nombreuses et leur répartition géographique connaît de grands écarts.

Le Ministère des affaires de la femme a préparé un projet de loi sur le congé de maternité et de paternité pour les secteurs public et privé qui établirait et réglementerait le congé parental concernant les mères et les pères travaillant dans les secteurs public et privé. Les autorités concernées suivent l’évolution de ce projet.

En ce qui concerne la loi no 58 de 2006, elle dispose que « les mères peuvent sur leurs demandes bénéficier du régime spécial de travail à mi-temps avec le bénéfice des deux tiers du salaire. Peut bénéficier de cette mesure une mère ayant un enfant de moins de seize ans. La condition d’âge ne s’applique pas aux enfants handicapés. Cette durée peut être renouvelée deux fois durant la carrière administrative de l’agent et selon les mêmes conditions, quel que soit le nombre d’enfants. Les mères bénéficiaires du régime spécial de travail à mi-temps conservent intégralement leurs droits à l’avancement, à la promotion, aux congés et à la couverture sociale ».

Bien que la loi susmentionnée offre une possibilité de concilier vie professionnelle et vie familiale, elle s’adresse aux femmes et non aux hommes, ce qui a posé des problèmes à certaines d’entre elles en matière d’avancement professionnel. Afin d’appliquer la loi à d’autres secteurs, il faudra réaliser une étude actualisée sur les effets de la conciliation de la vie familiale et du droit des femmes au travail.

Santé

Afin de garantir l’égalité d’accès à des soins de santé de qualité pour tous, le Ministère de la santé a adopté un plan de réforme visant à fournir des services préventifs et thérapeutiques et une couverture sanitaire universelle de qualité pour tous les citoyens, dont les femmes vivant dans les zones les plus défavorisées.

À cet effet, les investissements dans le secteur de la santé publique ont été réaffectés, selon le principe de discrimination positive, en faveur des gouvernorats prioritaires, qui ont reçu plus de 70 % de l’ensemble des investissements dans les infrastructures afin de faciliter l’accès de tous, notamment des femmes, aux services de soins de santé essentiels dans les trois divisions du système de santé dans l’ouest et le sud du pays. Ainsi, en 2020, le budget des soins de santé a atteint près de 3 392,4 millions de dinars, soit environ 5,4 % du budget de l’État. Cela représente une augmentation de quelque 525,6 millions de dinars, soit 18,3 %, par rapport aux 2 486,866 millions de dinars qui ont été alloués dans le cadre de la loi de finances de 2019.

Le Ministère de la santé a créé et équipé des centres de soins de santé primaires dans les zones rurales afin de rapprocher les services de soins de santé de la population rurale. Il a également créé des centres de soins intermédiaires ou primaires de niveau IV, selon la région, afin de dispenser et de rapprocher les services de santé de qualité des femmes vivant en milieu rural.

Afin de garantir le droit de tous de bénéficier d’une gamme complète de services de santé sexuelle et reproductive de qualité, le Ministère de la santé a :

•renforcé la capacité des médecins et du personnel paramédical de suivre les grossesses ;

•assuré des services préventifs de santé sexuelle et reproductive aux jeunes étudiants et en a élargi l’accès par la mise en place d’une unité de santé reproductive et la fourniture d’informations et de conseils sur la santé procréative et la préparation à la vie familiale aux étudiants dans les dortoirs universitaires et dans certaines écoles secondaires ;

•formé des professionnels de la santé à l’application d’une approche fondée sur la loi, respectant les choix des femmes, des adolescents et des personnes les plus vulnérables, et garantissant la confidentialité des services.

L’adoption d’une approche fondée sur l’égalité femmes-hommes et l’égalité des chances entre les divers groupes de la société se manifeste par l’orientation stratégique du programme de soins de santé primaires, dont le budget est passé à quelque 430 millions de dinars en 2020 et dont l’une des principales composantes est la fourniture de services de base à la population dans les régions de l’intérieur, en particulier des services de soins de santé pour les mères et les enfants.

Dans le cadre du renforcement des programmes destinés aux femmes en particulier, quelque 300 millions de dinars ont été alloués au plan quinquennal 2016-2020 de mise en œuvre de la politique préventive en matière de santé, en vue de renforcer la stratégie nationale de santé maternelle et infantile. Des plans d’action régionaux ont également été adoptés concernant les gouvernorats se situant encore en dessous de la moyenne nationale.

La santé de la mère et du nouveau-né est l’un des objectifs de développement durable qui s’applique à la santé et au bien-être de ce groupe. Compte tenu de ses convictions et de son attachement aux conventions internationales, la Tunisie a inscrit l’objectif visant à améliorer la santé de la mère et de l’enfant parmi ses priorités dans le programme national de santé maternelle et infantile, visant à réduire la mortalité et les maladies maternelles et infantiles, comme suit :

•appui des autorités à la politique de santé reproductive afin d’assurer une croissance démographique équilibrée, conformément au plan national de politique démographique pour l’avenir ;

•amélioration des indicateurs de santé maternelle et néonatale au moyen du programme de périnatalité, de l’intensification de l’action visant à recenser et à suivre les grossesses à risque et des activités de sensibilisation et d’éducation à la sécurité maternelle, menées dans tout le pays, en particulier dans les zones prioritaires ;

•fourniture de bons services de suivi de la grossesse et de soins post-partum, qui ne se limitent pas à la sensibilisation et à l’éducation des mères, pour faire en sorte qu’elles se rétablissent et soient incitées à poursuivre l’allaitement.

Selon les résultats définitifs des enquêtes nationales en grappes à indicateurs multiples de 2018, 84,1 % des femmes âgées de 15 à 49 ans à l’échelle nationale ont eu au moins quatre consultations médicales avec un médecin ou un soignant paramédical pendant la dernière partie de leur grossesse. Parmi ce groupe, 88,5 % vivaient en milieu urbain et 76,6 % en milieu rural. D’après les enquêtes, 26,4 % des femmes ont été examinées par un médecin ou un soignant paramédical une semaine après l’accouchement, tandis que 58,6 % des femmes n’ont subi aucun examen médical. Le taux d’examen des nouveau-nés était de 96,1 % le jour de la naissance et de 34,7 % durant la première semaine suivant la naissance, tandis que 40,6 % n’ont subi aucun examen.

Comme susmentionné, la couverture des services de soins de santé, y compris la santé maternelle et néonatale, a appréciablement augmenté. La mortalité maternelle est néanmoins passée à 44,8 cas pour 100 000 naissances vivantes en 2019.

Le taux national de mortalité néonatale était de 9 décès pour 1 000 naissances vivantes, de 14 décès concernant des nourrissons et de 17,6 décès pour 1 000 naissances vivantes concernant les enfants de moins de cinq ans.

La stratégie nationale de la santé maternelle et néonatale 2020-2024 a été mise à jour. Elle doit être appliquée sur cinq ans et son coût est de quelque 32 millions de dinars. L’objectif est de réduire la morbidité et la mortalité maternelles et néonatales en réponse aux problèmes et aux demandes connexes, auxquels fait face le système de santé, ainsi que de fournir à toutes les mères et à tous les enfants des services de soins de santé de qualité, accessibles à tous les groupes et à toutes les régions sur une base équitable.

La stratégie comporte cinq volets : faciliter constamment l’accès aux services de santé pour tous les groupes dans l’ensemble des régions, en améliorer la qualité, consolider la gouvernance, mieux exploiter les ressources et demander des comptes. La stratégie vise également à soutenir la participation des communautés et de la société civile afin de promouvoir la santé maternelle et néonatale et d’appuyer les systèmes de suivi et d’évaluation.

Concernant l’adoption d’une politique nationale de santé prenant en compte les considérations de genre, malgré les résultats obtenus au cours des décennies précédant le lancement du programme national de santé reproductive et de planification familiale, de nombreux problèmes subsistent, notamment en ce qui concerne la capacité de fournir des services de santé reproductive aux citoyens sans distinction, d’une part, et la capacité d’enrayer des problèmes sociaux tels que les mariages tardifs, les taux élevés de célibat et les comportements à risque chez les jeunes, notamment les relations sexuelles non protégées, le tabagisme et la toxicomanie, d’autre part.

Les statistiques régionales de ces dernières années indiquent un déclin généralisé de l’utilisation des services médicaux et d’éducation sur la santé reproductive. Cela s’explique notamment par l’insuffisance des ressources humaines, en particulier de personnel médical et paramédical, dans la plupart des régions, l’obsolescence des infrastructures des centres de santé reproductive qui doivent être réparées et entretenues, la nécessité de créer de nouvelles cliniques pour répondre à la demande et une flotte de transport limitée.

Les travaux se poursuivent dans le cadre du programme de soins de santé, pour régler ces problèmes et réformer le système, en tenant compte de la disparité des indicateurs de santé entre les femmes et les hommes et entre tous les groupes sociaux, qui se reflète dans les objectifs et cibles de mesure de la performance.

Dans le cadre de la réalisation de l’égalité femmes-hommes, les autorités mèneront des campagnes de sensibilisation pour réduire le taux de tabagisme chez les femmes et les inciter à suivre des programmes de renoncement au tabagisme. Les campagnes seront adaptées aux besoins et aux exigences de ce groupe.

Durant la période 2012-2017, l’Union européenne a financé un projet visant à réduire les inégalités sociales et à promouvoir des services des soins de santé primaires et intermédiaires dans les régions défavorisées. Une démarche tenant compte des questions de genre a été adoptée afin de procéder à une évaluation de ce programme et de produire des données pouvant servir de points de référence pour examiner les inégalités ou la discrimination entre les sexes. Les résultats de cette évaluation ont montré qu’il n’existait pas de discrimination fondée sur le genre en ce qui concernait l’accès aux services de soins de santé ou l’égalité d’accès aux services de soins de santé.

Sur le plan de la santé des femmes pendant la pandémie de COVID-19, des mesures spéciales ont été prises pour protéger les groupes vulnérables considérés comme étant les plus à risque d’infection ou de préjudice. Le décret gouvernemental no 208 du 2 mai 2020, portant fixation des prescriptions de confinement ciblé, a énoncé des mesures par lesquelles un confinement total a été imposé à certains groupes, comme les femmes enceintes, les mères d’enfants de moins de 15 ans, les personnes handicapées et les personnes atteintes de maladies chroniques, qui sont citées dans le décret susmentionné.

Malgré la fermeture de certains établissements médicaux et de soins, le Ministère de la santé a pris plusieurs mesures pour garantir l’accès des malades aux soins requis, comme suit :

•recenser les groupes les plus touchés par la COVID-19, afin de répondre à leurs besoins sanitaires particuliers et de les protéger, réduisant ainsi le nombre de cas critiques et de décès ;

•faire un effort exceptionnel pour veiller à la disponibilité constante des médicaments, notamment ceux contre les maladies chroniques, les équipements de protection individuelle et les fournitures sanitaires et pour éviter aux personnes vulnérables d’avoir à se déplacer pour se faire soigner et ainsi de s’exposer ;

•veiller à ce que les personnes souffrant de maladies chroniques et celles recevant un traitement dans les hôpitaux aient un accès prioritaire aux dispensaires, en raison de l’interruption des services médicaux et de transport ;

•veiller à garantir la fourniture ininterrompue de services de soins de santé vitaux ou urgents, tels que les services de vaccination, les services de soins de santé pour les femmes enceintes et les mères, les services de santé reproductive, les services de soins de santé pour les groupes vulnérables comme les enfants, les femmes et les personnes âgées, les centres de nutrition et les services dentaires d’urgence.

En mars 2019, une quinzaine de nouveau-nés à l’hôpital universitaire de Tunis sont morts et, en juillet 2019, six nouveau-nés sont morts dans un hôpital de Nabeul. Outre les poursuites juridiques engagées contre divers responsables, le Ministère a pris plusieurs mesures pour éviter la répétition de tels accidents.

Les mesures à court terme se présentent comme suit :

•augmentation des effectifs des équipes médicales, paramédicales et pharmaceutiques et désignation d’un personnel chargé de préparer des solutions intraveineuses, ainsi que des techniciens et des pharmaciens pour superviser l’unité ;

•rénovation de la salle de préparation des solutions (coût : 80 000 dinars) et formation par le bureau compétent ;

•rénovation du service néonatal ;

•allocation de fonds pour l’acquisition de matériel et de fournitures médicales (un montant estimé à 350 000 dinars sera nécessaire pour équiper les unités du Service de médecine infantile et la salle de stérilisation) et de 10 couveuses, et renforcement des capacités par l’ajout de neuf couveuses supplémentaires et d’un respirateur.

Outre ces mesures, l’ensemble des fournitures et articles consommables légers à usage unique seront mis à disposition, en permanence, afin de garantir la sécurité des nourrissons et des sacs pour perfusions intraveineuses, et un système de contrôle et d’analyse en laboratoire des sacs pour perfusions intraveineuses avant utilisation sera mis en place, à un coût annuel estimé à 300 000 dinars.

Les mesures à moyen terme se présentent comme suit :

•élaboration de plans en vue de la création d’unités centrales de préparation de perfusions intraveineuses dans le nord et le centre du pays, réalisation d’études de sites de modèles d’ingénierie et allocation de fonds à cette fin ;

•création d’un comité technique national chargé de surveiller la création et l’équipement des unités de préparation des solutions intraveineuses.

En ce qui concerne les grossesses et les avortements chez les adolescentes et en coopération avec le FNUAP, l’Office national de la famille et de la population a mené une étude sur les comportements procréateurs et l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive et de planification familiale. Cette étude est divisée en deux parties, dont la première est une évaluation des services de santé sexuelle, reproductive et de planification familiale dans divers centres de santé.

La première phase de cette activité, à savoir la note de cadrage, les méthodes de travail et les outils de recherche, a été achevée. Le travail sur le terrain sera effectué au second semestre de 2020. La deuxième partie de l’étude, qui sera menée en 2020, consistera en une enquête nationale sur les comportements procréateurs.

L’Office national a fourni des services de santé reproductive 468 588 fois en 2019, contre 461 667 fois en 2018, soit une augmentation de 1,5 %.

Quelque 159 754 femmes ont bénéficié d’un dépistage précoce du cancer du sein en 2019, contre 148 898 en 2018, soit une augmentation de 7,3 %. Au total, 7 074 femmes ont fait une mammographie et 251 cas de cancer ont été détectés à l’échelle de la nation. Les services de dépistage du cancer du col de l’utérus ont diminué de 13,1 % (22 376 frottis vaginaux ont été effectués en 2019). Au total, 110 colposcopies ont été réalisées, ce qui a permis la détection précoce de 223 cas de cancer.

Bien que l’article 214 du Code pénal établisse en principe que l’avortement ainsi que les efforts visant à procurer un avortement soient interdits, une exception est faite lorsque l’interruption de la grossesseest pratiquée au premier trimestre et par la suite lorsque la santé de la mère ou son équilibre psychique risquent d’être compromis par la continuation de la grossesse ou encore lorsque l’enfant à naître risquerait de souffrir d’une maladie ou d’une infirmité grave.

Pour promouvoir la santé sexuelle et reproductive, en particulier chez les adolescents et les autres jeunes, l’Office national de la famille et de la population a renforcé la prestation de services dans ce domaine afin de prévenir les rapports sexuels non protégés et les avortements répétés. Il a également facilité l’accès aux services de santé, afin de consolider le droit de toutes les personnes aux services de santé sexuelle et reproductive ; plus de 60 000 services sont enregistrés dans ce domaine chaque année.

Les femmes en milieu rural ont également bénéficié de l’amélioration des services de soins de santé, notamment par l’élargissement de l’accès à ces services et l’extension du réseau de centres de soins de santé primaires. Les dispensaires de santé reproductive et de planification familiale fournissent des services aux femmes rurales gratuitement et sans distinction entre les régions.

Pour remédier aux difficultés auxquelles se heurtent certaines femmes mariées ou célibataires dans les zones rurales, qui les empêchent d’accéder aux services d’interruption de grossesse, le Ministère de la santé a élaboré un plan d’action visant à promouvoir les services de planification familiale et de santé reproductive et à s’attaquer aux divers risques et obstacles, d’ordre interne ou externe, qui peuvent porter atteinte au droit des femmes rurales d’accéder à ces services. Les contraceptifs et les services éducatifs et médicaux sont fournis gratuitement dans 36 centres situés dans tout le pays, tandis que 32 équipes mobiles et deux unités mobiles assurent également ces services, concernant notamment les femmes dans les zones reculées.

Le nombre total de services d’interruption de grossesse en 2019 a augmenté de 229 % (164 414 en 2019, contre 13 351 en 2018).

En 2019, quelque 718 avortements chirurgicaux ont été pratiqués, contre 1 176 en 2018, soit une baisse de 38,9 %. Le nombre d’avortements médicamenteux était de 15 696 en 2019, contre 12 175 en 2018, soit une augmentation de 28,9 %.

Émancipation économique des femmes

Concernant l’accès des femmes aux services bancaires, des différences subsistent entre elles et les hommes, en ce qui concerne la propriété et l’accès au financement, alors qu’elles ont un niveau avancé d’éducation et de compétences, en particulier les jeunes femmes, et contribuent dans une grande mesure aux dépenses du ménage. La propriété chez les femmes, notamment concernant la terre, les biens immobiliers, le patrimoine ou d’autres ressources reste très faible et elles n’ont pas accès aux services financiers bancaires traditionnels sur un pied d’égalité avec les hommes.

Des groupes de femmes, notamment dans les zones rurales, sont donc écartées des réseaux de financement. En effet, elles ne disposent pas des garanties nécessaires pour obtenir des prêts. Elles se tournent donc, tout comme d’autres groupes à faible revenu, vers le microfinancement ou le microcrédit, qui ne nécessitent pas de biens immobiliers en garantie.

L’État a mis en place des mécanismes pour étendre le microcrédit, comme la création de la Banque tunisienne de solidarité, où plus d’un tiers des entreprises financées sont dirigées par des femmes. Il a également instauré des mesures pour encourager d’autres institutions à accorder des prêts aux femmes et élaboré une stratégie qui applique depuis 2012 une nouvelle loi sur le microfinancement. Ces mesures sont intégrées aux politiques et programmes de lutte contre la pauvreté, en particulier dans les zones rurales, et aux programmes nationaux et sectoriels, tels que les stratégies de développement économique et social 2012-2016 et 2016-2020, les projets de développement intégré et les programmes de mentorat à l’intention des femmes rurales.

S’agissant des mesures prises pour promouvoir l’émancipation économique des femmes, de nombreuses mesures ont été élaborées pour renforcer les programmes de formation et d’accompagnement avant et après la création d’une entreprise. Des mécanismes de financement de la création de petites et moyennes entreprises ont également été étayés à la suite de la création de la Banque tunisienne de solidarité et de la Banque de financement des petites et moyennes entreprises.

Pour faciliter la création de petites entreprises, le Ministère de l’emploi et de la formation professionnelle cherche à développer des institutions sociales et solidaires pour appuyer les initiatives conjointes de jeunes entrepreneurs, en particulier ceux qui ont des diplômes supérieurs, et de diplômés de la formation professionnelle.

Malgré tous ces efforts, les femmes sont encore relativement sous-représentées aux postes de chefs d’entreprise ou dans les professions où elles travaillent à leur compte. Pour y remédier, un programme d’action a été élaboré en 2012 afin de réduire la féminisation de la pauvreté et de renforcer les capacités des femmes rurales en consolidant leurs compétences techniques dans le domaine de la création et de l’exploitation de petites entreprises agricoles, en favorisant l’emploi indépendant et en intégrant les femmes dans l’économie en fonction des spécificités régionales.

Pour sa part, le Ministère des affaires de la femme a appliqué le programme d’appui économique à l’intention des femmes chefs de ménage par le financement de petites entreprises. Le programme garantit une vie décente et une indépendance financière pour ses bénéficiaires qu’il encourage activement à participer au développement local et national. Des zones d’intervention ont été répertoriées dans les 14 gouvernorats prioritaires du Kef, Zaghouan, Kairouan, Kasserine, Médenine, Gafsa, Tozeur, Tataouine, Kébili, Sidi Bouzid, Siliana, Jendouba, Béja et Manouba, et plus de 20 femmes de chaque province ont bénéficié du programme.

En 2014, le Ministère a conclu un accord de partenariat avec le Ministère de l’emploi et de la formation professionnelle visant à accroître l’emploi des femmes, à accompagner leur intégration économique et à améliorer leur participation au développement, ainsi qu’à renforcer les capacités des demandeurs d’emploi, notamment les titulaires de diplômes supérieurs, en leur donnant les outils nécessaires pour investir dans les enfants et les personnes âgées.

En coopération avec la Banque tunisienne de solidarité, le Ministère des affaires de la femme met également en œuvre le programme d’initiative économique des femmes dit Raida, dans le cadre des mesures prises sur le plan national pour réduire le taux de chômage, en particulier parmi les titulaires de diplômes supérieurs, en aidant ceux qui souhaitent créer des petites et moyennes entreprises.

Le programme se fonde principalement sur l’accompagnement, l’orientation et la formation des entrepreneuses dans la préparation et l’étude de l’entreprise, ainsi que sur la mise en place de lignes de financement au moyen de prêts concessionnels pour financer les microentreprises et les petites et moyennes entreprises, puis, en phase finale, le suivi et le soutien des créateurs jusqu’à obtenir la stabilisation de l’entreprise.

Quelque 2 300 entreprises sont actuellement financées dans le cadre du programme Raida, avec un investissement total en 2018 pouvant atteindre 17 millions de dinars tunisiens.

Le gouvernorat de Tatouine, qui compte 188 entreprises, est en tête, suivi de Kébili (183), de Jendouba (177) et de Tozeur (152). Cette situation est conforme à l’article 12 de la Constitution, qui prévoit que l’État agit en vue d’assurer la justice sociale, le développement durable et l’équilibre entre les régions, en tenant compte des indicateurs de développement et du principe de l’inégalité́ compensatrice.

Cherchant à accroître la couverture géographique des services de la petite enfance, notamment dans les régions intérieures, le Ministère des affaires de la femme a réussi, au moyen du programme Raida, à financer 217 institutions, dont 193 jardins d’enfants et 18 crèches, ainsi que 6 institutions récréatives et culturelles pour enfants.

Pour sa part, le Ministère de l’emploi et de la formation professionnelle s’est employé à :

•élaborer un plan d’action clair au niveau national pour favoriser le travail indépendant et l’entrepreneuriat des femmes ;

•encourager la création de nouveaux types d’entreprise relative à une économie sociale coopérative, en réunissant de multiples aptitudes et compétences chez les femmes dans des secteurs d’activité porteurs qui sont liés à des spécificités régionales ;

•encourager les investissements dans les secteurs manufacturiers avancés sur le plan technologique et dans les secteurs de pointe qui permettent la transformation des matières agricoles et d’autres ressources primaires produites dans les régions du nord, du centre et du sud-ouest ;

•augmenter les investissements dans les infrastructures et les équipements afin d’encourager les jeunes entrepreneuses à être autonomes, qu’il s’agisse de petites entreprises privées individuelles ou collectives ;

•fournir des incitations spéciales aux femmes créatrices de petites et moyennes entreprises ;

•diversifier les entreprises et l’artisanat traditionnels des femmes.

Afin d’encourager l’innovation dans les technologies modernes, la loi no 20 de 2018 du 17 avril 2018 relative aux start-up a été promulguée et s’inscrit dans le cadre d’un programme gouvernemental intégré dénommé « Tunisie émergente ». Elle vise à stimuler la création et le développement des jeunes pousses par l’innovation, les technologies modernes et la réalisation d’une haute valeur ajoutée et d’une compétitivité aux niveaux national et international. La loi offre aux entrepreneurs et aux entrepreneuses, notamment parmi les jeunes, des avantages et des bénéfices concrets en les soutenant et en leur offrant les solutions logistiques et financières nécessaires pour les encourager à créer et à développer des entreprises.

À la suite des effets de la pandémie de COVID-19 sur les institutions économiques dirigées par des femmes et en partenariat avec la Banque tunisienne de solidarité, le Ministère des affaires de la femme s’est employé à fournir aux entrepreneuses des crédits sous forme de financement sans intérêt pour les entreprises. Dans divers gouvernorats, 70 autorisations ont été accordées pour un montant de 350 000 dinars tunisiens comme premier versement afin d’aider les entrepreneuses et les institutions pour enfants touchées par la pandémie de COVID‑19 à s’acquitter des dépenses de fonctionnement et d’entretien. Il est remboursable sur une période de 24 mois et est assorti d’une période de grâce de six mois.

Émancipation économique et sociale des femmes en milieu rural

Sur la base de plusieurs études examinant les conditions des femmes et des filles rurales, plus particulièrement une étude de terrain complète sur la situation des femmes en milieu rural et leur accès aux services publics, et une autre sur le travail et l’accès à la protection sociale des femmes rurales, le Ministère des affaires de la femme a élaboré en 2017 la Stratégie nationale pour l’autonomisation économique et sociale des femmes et des filles en milieu rural (2017-2020) et son plan d’action, qui reposent sur les cinq composantes décrites au paragraphe 97.

La Stratégie et le Plan d’action ont été approuvés par deux cabinets restreints convoqués à cet effet (le 8 mars 2017 et le 11 août 2017). Un comité directeur a également été mis en place pour suivre l’application du plan d’action, assurer la coordination entre les parties concernées, créer des comités de suivi régionaux et allouer des fonds annuels relatifs l’exécution du plan.

En juillet 2018, un protocole de coopération a été signé entre le Ministère des affaires de la femme et l’Agence espagnole de la coopération internationale pour le développement portant sur l’appui à l’application de la Stratégie nationale, en vue de préparer des programmes d’exécution régionale pour les zones d’intervention (Jendouba, Mahdia et Sfax).

En vue d’appliquer le plan d’action et les recommandations ministérielles relatives à la couverture sociale des travailleuses en milieu rural par l’harmonisation de la législation en vigueur, au vu de la nature et des caractéristiques particulières du travail, et de mettre en place un système spécial permettant aux travailleuses en milieu rural d’accéder à la couverture sociale, un accord-cadre a été conclu en octobre 2018 entre les ministères des affaires de la femme, de la famille, de l’enfance et des personnes âgées, des affaires sociales et de l’agriculture, par lequel des mécanismes spéciaux ont été mis en place pour permettre aux femmes rurales travaillant dans le secteur agricole de bénéficier d’une couverture sociale dans le cadre du système « Ahmini ». On trouvera à l’annexe XIV le nombre d’arrêtés et de décisions pris à cet effet.

Outre ce qui a été indiqué aux paragraphes 97 et 98 sur la Stratégie nationale pour l’autonomisation économique et sociale des femmes et des filles en milieu rural, le Ministère des affaires de la femme a élaboré un projet de valorisation et de transformation des produits agricoles et de création de petites entreprises agricoles afin de favoriser le travail indépendant des femmes, de former et d’accompagner les femmes rurales en les aidant à obtenir des financements et des moyens de production. Des femmes des gouvernorats de Gabès, Kasserine, Médenine, Gafsa, Kairouan, Zaghouan, Sidi Bouzid et Siliana ont bénéficié de ces formations.

Depuis le septième Plan Tunisie (1986-1992), le Ministère de l’agriculture a accordé une importance particulière à la promotion de la femme rurale, compte tenu de son rôle dans le développement du secteur agricole comme productrice, agricultrice de subsistance ou ouvrière agricole, au moyen de projets de développement intégré qui comportent une composante spéciale sur la promotion de la femme rurale et le développement collectif. Dans certains projets, la proportion des crédits alloués à cette composante atteint 5 % du montant total des fonds affectés.

La Commission dédiée au développement rural, au genre social et aux femmes a été créée dans le cadre du plan de développement 2016-2020 et est chargée de formuler des programmes visant à promouvoir davantage l’autonomisation économique et sociale des femmes. Le Bureau d’appui à la femme rurale a également été créé au Ministère et doté de pouvoirs importants.

En ce qui concerne le développement rural, le genre et les travailleuses agricoles, la période du plan 2016-2020 a été marquée par l’adoption de plusieurs mesures, notamment la fourniture d’un financement, à commencer par le budget de 2017, en vue du projet d’émancipation économique et de développement des femmes en milieu rural et par la publication de la circulaire no 266 de 2016 du Ministre de l’agriculture sur l’attribution d’espaces dans le cadre de l’exposition et de la vente de produits provenant de femmes rurales dans toutes les régions. Un accord-cadre a été également signé entre les ministères des affaires de la femme et de l’agriculture pour favoriser la coopération dans la lutte contre le chômage et le soutien au travail indépendant des femmes en milieu rural. Plusieurs projets ont été mis en œuvre pour renforcer l’émancipation économique des femmes et des familles rurales, comme indiqué à l’annexe XV.

Catégories de femmes défavorisées

Le CREDIF attache de l’importance à l’étude de la situation des femmes ayant des besoins particuliers et des femmes marginalisées sur les plans économique et social. Les résultats finals d’une étude sur les travailleurs domestiques, les moyens de subsistance, les parcours et le positionnement social ont été présentés en mars 2020 et le Ministère des affaires de la femme a adopté les recommandations issues de l’étude sur l’élaboration d’un cadre législatif visant à réglementer le travail domestique comme profession.

Le CREDIF a également achevé une étude, sous presse, sur la violence à l’égard des adolescentes. Il réalisera également deux études sur les femmes migrantes ainsi que sur les groupes de femmes vulnérables et les moyens d’intégration.

Pour ce qui est de la lutte contre le décrochage scolaire des filles en milieu rural, le Ministère des affaires de la femme a lancé en 2015 un projet intégré de lutte contre ce phénomène, en partenariat avec les ministères de l’éducation, des transports, de l’intérieur et des affaires culturelles et avec l’association Almadanya. Ce projet est au cœur de la stratégie nationale et du plan d’action concernant l’émancipation économique et sociale des femmes et des filles en milieu rural. Les mesures suivantes ont été prises à cet égard :

•préparation d’espaces polyvalents d’accueil d’élèves entre les cours dans les établissements d’enseignement (notamment les gouvernorats de Kairouan, Jendouba, Bizerte, Sidi Bouzid, Siliana, Zaghouan, Kasserine et Kef jusqu’en 2019, qui comptaient en moyenne cinq établissements d’enseignement avec des chiffres élevés de décrochage scolaire) ;

•émancipation économique des mères d’élèves menacés de décrochage scolaire dans 15 gouvernorats par la création de microentreprises génératrices de revenus et la création de quelque 160 projets rémunérateurs (à la fin de 2019) ;

•allocation de fonds dans le cadre du transport scolaire rural avec l’association partenaire Almadanya dans plusieurs gouvernorats en réduisant les tarifs de transport des élèves et en obtenant la coopération des compagnies de transport. En conséquence, les élèves utilisant les transports ruraux sont passés de 416 au cours de l’année scolaire 2015/16 à 8 134 au cours de l’année scolaire 2017/18 ;

•aide apportée depuis mars 2011 par Almadanya aux élèves des zones rurales reculées (vivant à au moins trois kilomètres d’établissements d’enseignement) pour qu’ils accèdent à des transports en vue de se rendre à l’école. Depuis le début de l’année 2019, le département des services scolaires, sous la supervision du Ministère de l’éducation, surveille le transport scolaire rural en coopération avec Almadanya.

Les complexes destinés à l’enfance, qui existent dans la plupart des régions, y compris les zones rurales, renforcent les efforts nationaux de lutte contre l’abandon scolaire, en desservant un nombre important d’enfants issus de familles à faible revenu. En 2018, 4 430 enfants en tout ont bénéficié de services d’aide sociale dans ce cadre, sous forme de vêtements, de repas, de fournitures scolaires et de suivi scolaire, ainsi que d’activités éducatives et sociales.

Le plan sectoriel de l’éducation (2016-2020) comprend un objectif autonome de lutte contre l’échec scolaire. Le Ministère de l’éducation a mis en place le système de la « deuxième chance » en coordination avec les ministères de l’emploi et de la formation professionnelle et des affaires sociales, avec l’appui de partenaires financiers et techniques et en partenariat avec des organisations de la société civile.

En coopération avec l’UNICEF, les ministères de l’éducation, des affaires sociales et de la santé ont lancé en 2019 la mise en œuvre d’un programme pilote en quatre volets pour lutter contre le décrochage scolaire. Il vise à créer des dispositifs pédagogiques et à communiquer avec les établissements d’enseignement pour réduire les cas de décrochage scolaire, notamment dans les zones rurales, où le taux demeure élevé.

Pour ce qui est des femmes issues de minorités religieuses et ethniques, la Constitution consacre le principe d’égalité et de non-discrimination sous toutes ses formes, qui est énoncé à l’article 2 de la loi organique 50 de 2018 relative à l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (voir par. 59).

La loi accorde également aux victimes de discrimination raciale le droit à une assistance psychosociale appropriée, à une protection juridique et à une réparation judiciaire juste et proportionnée aux préjudices matériel et moral subis.

En juillet 2020, une circulaire a été publiée par le Ministère des affaires locales garantissant la liberté de nommer les nouveau-nés, ce qui permettra d’éviter les problèmes rencontrés par les familles, notamment amazighes, pour inscrire leurs nouveau-nés à l’état civil avec des noms amazighs.

Un décret gouvernemental établissant un comité national de lutte contre la discrimination raciale a été approuvé par le Conseil des ministre le 21 juillet 2020. Cela fournit les cadres juridiques et institutionnels nécessaires à la lutte contre toute discrimination à l’égard des femmes issues de minorités religieuses, raciales ou ethniques.

En ce qui concerne les femmes réfugiées migrantes, en l’absence de cadre juridique national régissant l’asile, toutes les procédures et demandes d’asile sont examinées par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.

On trouvera à l’annexe XVI les statistiques pertinentes publiées par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.

Dans le cadre de ses obligations internationales, la Tunisie s’efforce de soutenir ces groupes, en particulier les femmes et les enfants, car elle compte un certain nombre de camps de réfugiés sur son sol. Elle travaille en partenariat avec les organismes internationaux compétents pour relever le niveau des services qu’elle fournit à ces groupes en attendant de trouver des solutions pratiques.

Concernant les femmes migrantes, l’Office national de la famille et de la population a continué de mettre en œuvre un programme de coopération avec l’OIM, visant à faciliter l’accès des migrants aux services de santé reproductive fournis par l’Office. En 2019, plusieurs activités d’information et d’éducation ont été menées pour répertorier et satisfaire les besoins des migrants. Elles comprenaient des formations régionales sur les techniques d’enquête, le conseil et le soutien aux victimes de la traite, ainsi qu’une formation destinée à 30 employés régionaux sur la création d’un système d’orientation à l’intention des migrants se présentant dans les centres de l’Office. Des visites sur le terrain ont également été organisées au sujet d’unités modèles dans plusieurs gouvernorats afin de suivre la phase de mise à l’essai du registre de collecte de données, relatif aux services de santé reproductive destinés aux migrants.

Le Ministère de la santé a également pris un certain nombre de mesures, comme la publication de la circulaire no 10 de 2019, qui réglemente l’accueil des migrants, la communication avec eux dans les organismes de santé publique et la formation du personnel chargé d’aider les femmes et les filles victimes de violences se trouvant en situation de vulnérabilité, telle que les migrations et les conflits.

En réponse à la pandémie de COVID-19, un comité a été créé sous l’égide du Ministère des droits de l’homme pour suivre la situation des migrants et des demandeurs d’asile et élaborer un plan d’action visant à coordonner les efforts des diverses parties et à recenser les actes et les mécanismes de distribution de l’aide à ces groupes vulnérables, hommes et femmes.

Une plateforme numérique a été mise en place pour le traitement à distance des dons et de l’aide. Elle reçoit les demandes d’assistance d’étudiants étrangers, de réfugiés et de demandeurs d’asile ou de leurs représentants, quel que soit leur statut légal, et accepte l’aide matérielle et les dons des particuliers, des entreprises et des institutions souhaitant appuyer ces groupes.

La plateforme a reçu 787 demandes d’assistance concernant 1 342 personnes, et 403 colis ont été distribués. Les données ventilées par sexe ne sont toutefois pas disponibles.

La loi no 58 de 2017 sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes cite expressément les femmes handicapées dans sa définition de la discrimination à l’égard des femmes et considère le handicap comme une situation de vulnérabilité.

D’après les statistiques du recensement général de la population et de l’habitat de 2014, le nombre de personnes handicapées ayant obtenu une carte d’invalidité est de 241 240, dont 119 160 femmes handicapées (soit 49 %).

Les femmes handicapées bénéficient également des mesures de protection suivantes :

•gratuité des soins ou soins à tarif réduit dans les établissements de santé publics ;

•allocation mensuelle fixe pour les femmes en situation de pauvreté et aide ponctuelle pour les enfants scolarisés et pour les fêtes religieuses ;

•soutien financier pour aider les femmes handicapées à établir une source de revenus ;

•aides techniques facilitant l’intégration ;

•placement en famille d’accueil en échange d’une allocation mensuelle ;

•hébergement dans des institutions sociales pour les femmes démunies ou ne bénéficiant pas d’un soutien familial, prise en charge, éducation et formation dans des centres éducatifs spécialisés.

L’article 4 de la loi d’orientation no 2002-80 du 23 juillet 2002 relative à l’éducation et à l’enseignement scolaire dispose que l’État garantit le droit à l’enseignement gratuit dans les établissements scolaires à tous ceux qui sont en âge d’être scolarisés et l’égalité de chances dans la jouissance de ce droit. Elle prévoit également que l’État veille à assurer les conditions adéquates permettant aux enfants aux besoins spécifiques de jouir de ce droit. À cela s’ajoutent les dispositions de la loi no 83 de 2005 du 15 août 2005 relative à la promotion et à la protection des personnes handicapées.

La Présidence du Gouvernement coordonne avec le Ministère des finances l’élaboration de plans relatifs au recrutement de personnes handicapées, au vu des estimations annuelles globales de recrutement. Depuis 2013, le Ministère des affaires sociales est chargé de superviser le comité national chargé d’organiser des concours pour le recrutement de personnes handicapées. Les dispositions de la loi-cadre sur la promotion des personnes handicapées consacrent le droit de ces personnes de ne pas être exclues de l’emploi ou de la nomination à des postes publics au motif de leur handicap. Un quota a été fixé pour l’emploi des personnes ayant un handicap dans la fonction publique et le secteur privé. Des concessions ont également été accordées aux institutions du secteur privé pour les encourager à recruter des personnes ayant un handicap.

La loi organique no 16 de 2014 relative aux élections et aux référendums énonce que les personnes handicapées doivent être incluses dans les listes de réserve. De nombreuses femmes ont participé aux élections municipales de 2018 et aux élections législatives de 2019.

Sur le plan de l’aide aux mères célibataires, il existe des mesures de prévention et de sensibilisation visant à aider ces mères à garder leurs enfants au lieu de les abandonner et à éviter que de telles situations se reproduisent.

À cette fin, depuis 2012, le Ministère des affaires de la femme a conclu des accords de partenariat avec les organismes et associations concernés dans le cadre de formations et de sensibilisation à la santé reproductive, du fonctionnement d’unités résidentielles pour les mères célibataires et leurs enfants et de formation destinées aux femmes dans plusieurs domaines afin de faciliter leur intégration économique et sociale.

Pour ce qui est du programme d’appui aux femmes incarcérées ou libérées, en application de l’accord de coopération conclu entre les ministères des affaires de la femme et de la justice sur la réadaptation et l’intégration des femmes détenues, un programme de soutien aux femmes emprisonnées et libérées a été élaboré en 2016 afin d’accompagner ces groupes, de prévenir toute récidive et de faciliter la réhabilitation ainsi que la réintégration sociale et économique de ces femmes, une fois qu’elles ont purgé leur peine.

Mariages et liens de famille

L’alinéa 4 de l’article 23 du Code du statut personnel dispose que le mari, en tant que chef de famille, doit subvenir aux besoins de l’épouse et des enfants dans la mesure de ses moyens et selon leur état dans le cadre des composantes de la pension alimentaire. La femme doit contribuer aux charges de la famille si elle a des biens. Par conséquent, le rôle du mari en tant que chef de famille n’est pas consacré par le droit tunisien, sauf en ce qui concerne les dépenses.

Le système législatif et les lois discriminatoires font actuellement l’objet d’un examen pour veiller à leur conformité avec la Constitution et les normes internationales.

En ce qui concerne le régime successoral en Tunisie, il convient de rappeler que les citoyens et les citoyennes ont les mêmes droits et devoirs en vertu de la Constitution. En 2018, sur proposition de la Commission de l’égalité et des libertés individuelles, la Présidence de la République a soumis une initiative législative à l’Assemblée des représentants du peuple visant à réviser certaines dispositions relatives à l’héritage afin de garantir que les sœurs et les frères héritent de parts égales.

En ce qui concerne la garde, l’article 58 du code du statut personnel fixe un certain nombre de conditions générales et particulières exigées des hommes et des femmes, ainsi que le statut de chacun lors de l’attribution de la garde ; ces conditions et ce statut ne sont pas réservés spécifiquement aux hommes ou aux femmes. Si cet ensemble de conditions n’est pas rempli, la mère peut demander la garde exclusive. En outre, l’article ne se contente pas d’énoncer que ces conditions doivent être remplies, mais s’assure qu’elles sont dans l’intérêt supérieur de l’enfant, conformément à l’article 47 de la Constitution et à l’article 4 du Code de la protection de l’enfant concernant l’intérêt supérieur de l’enfant. Ainsi, le juge doit s’efforcer de faire prévaloir l’intérêt supérieur de l’enfant et n’est pas contraint de révoquer la garde de la mère si celle-ci épouse quelqu’un d’autre qu’un parent dans un décret de consanguinité qui exclut le mariage (maharam). Par conséquent, il existe peu de circonstances dans lesquelles une mère peut perdre la garde de l’enfant simplement parce qu’elle s’est remariée.

Le droit tunisien n’établit pas de régime particulier de propriété entre les époux ; chacun est propriétaire de ses biens sans que l’autre ait un droit sur ceux-ci. Après de nombreux cas où l’épouse n’a pas pu faire valoir qu’elle avait contribué à l’acquisition du domicile conjugal et a donc été contrainte de le quitter à la suite du divorce, notamment en l’absence d’enfants mineurs, la loi no 94 de 1998 du 9 novembre 1998 a donc été adoptée. Elle permet aux époux de choisir un régime de communauté des biens qui vise à permettre le partage de biens entre les époux lorsqu’ils sont propres à l’usage familial, étant entendu que cela ne s’applique ni aux biens acquis avant le mariage, ni par héritage ni par donation.