Nations Unies

CRC/C/GC/19*

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

20 juillet 2016

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’enfant

Observation générale no 19 (2016) sur l’élaboration des budgets publics aux fins de la réalisation des droits de l’enfant (art. 4)

Table des matières

Page

I.Introduction3

A.Contexte4

B.Justification6

C.Objectif6

II.Analyse juridique de l’article 4 relativement aux budgets publics7

A.« Les États parties s’engagent à prendre »7

B.« Toutes les mesures législatives, administratives et autres qui sont nécessaires »7

C.« Pour mettre en œuvre les droits reconnus dans la présente Convention »8

D.« Dans le cas des droits économiques, sociaux et culturels, les États parties prennent ces mesures dans toutes les limites des ressources dont ils disposent »10

E.« Et, s’il y a lieu, dans le cadre de la coopération internationale »11

III.Principes généraux de la Convention et budgets publics12

A.Droit de ne pas faire l’objet de discrimination (art. 2)12

B.Intérêt supérieur de l’enfant (art. 3)12

C.Droit à la vie, à la survie et au développement (art. 6)13

D.Droit d’être entendu (art. 12)14

IV.Principes de l’élaboration des budgets publics en faveur des droits de l’enfant15

A.Efficacité15

B.Efficience15

C.Équité15

D.Transparence16

E.Durabilité16

V.Mise en œuvre des droits de l’enfant dans les budgets publics16

A.Planification17

B.Adoption21

C.Exécution23

D.Suivi24

VI.Diffusion de la présente observation générale26

I.Introduction

L’article 4 de la Convention relative aux droits de l’enfant est libellé comme suit :

Les États Parties s’engagent à prendre toutes les mesures législatives, administratives et autres qui sont nécessaires pour mettre en œuvre les droits reconnus dans la présente Convention. Dans le cas des droits économiques, sociaux et culturels, ils prennent ces mesures dans toutes les limites des ressources dont ils disposent et, s’il y a lieu, dans le cadre de la coopération internationale.

La présente observation générale aidera les États parties à appliquer les dispositions de l’article 4 s’agissant des budgets publics. Elle précise les obligations qui incombent aux États parties et présente des recommandations sur la manière de réaliser l’ensemble des droits consacrés par la Convention, notamment ceux des enfants vulnérables, par la prise de décisions budgétaires efficaces, efficientes, équitables, transparentes et durables.

Étant donné que l’article 4 porte sur l’ensemble des droits de l’enfant et que les budgets publics peuvent avoir des répercussions sur tous ces droits, la présente observation générale s’applique à la Convention et aux Protocoles facultatifs s’y rapportant. Elle offre aux États parties un cadre visant à permettre que leurs budgets contribuent à la réalisation des droits de l’enfant et, dans la section III, présente une analyse des principes généraux de la Convention, énoncés aux articles 2, 3, 6 et 12.

Dans la présente observation générale, le terme « enfants » se rapporte à toutes les personnes âgées de moins de 18 ans, quel que soit leur sexe, sur les droits desquelles des décisions d’ordre budgétaire ont ou peuvent avoir des effets directs ou indirects, positifs ou négatifs. L’expression « enfants vulnérables » désigne les enfants qui sont particulièrement exposés au risque de subir des violations de leurs droits, y compris, mais pas seulement, les enfants handicapés, les enfants réfugiés, les enfants appartenant à des groupes minoritaires, les enfants qui vivent dans la pauvreté, les enfants placés dans des institutions de protection de remplacement et les enfants en conflit avec la loi.

Les définitions suivantes s’appliquent aux fins de la présente observation générale :

a)Par « budget » on entend la mobilisation des recettes publiques, les allocations de crédits budgétaires et les dépenses des États ;

b)Par « obligations de mise en œuvre » on entend les obligations des États parties énumérées au paragraphe 27 ci-après ;

c)Par « principes généraux de la Convention » on entend les principes présentés dans la section III ;

d)Par « principes budgétaires » on entend les principes présentés dans la section IV ;

e)Par « législation » on entend l’ensemble des instruments et textes normatifs internationaux, régionaux, nationaux et infranationaux concernant les droits de l’enfant ;

f)Par «politiques» on entend l’ensemble des politiques, stratégies, réglementations, directives et déclarations publiques, y compris leurs buts, objectifs, indicateurs et résultats escomptés, qui influent ou pourraient influer sur les droits de l’enfant;

g)Par « programmes » on entend les cadres au moyen desquels les États parties prévoient d’atteindre les buts fixés dans leurs lois et politiques. Ces programmes peuvent avoir des conséquences directes ou indirectes sur les enfants, par exemple, en influant sur certains de leurs droits, sur les processus budgétaires et sur les moyens matériels et humains ;

h)Par « infranational » on entend un niveau administratif inférieur au niveau national, tel que la région, la province, le comté ou la municipalité.

La section I présente le contexte, la justification et l’objectif de la présente observation générale. La section II contient une analyse juridique de l’article 4 relativement aux budgets publics. La section III donne une interprétation des principes généraux de la Convention dans ce contexte. La section IV est consacrée aux principes d’élaboration des budgets publics. La section V traite de la manière dont les budgets publics contribuent à la réalisation des droits de l’enfant. La section VI contient des directives relatives à la diffusion de l’observation générale.

A.Contexte

La présente observation générale se fonde sur l’observation générale no 5 (2003) concernant les mesures d’application générales de la Convention relative aux droits de l’enfant, qui souligne que le concept de « mesures d’application générale » est complexe et que le Comité adoptera probablement en temps voulu des observations générales plus détaillées sur chaque élément. L’utilisation des budgets publics est l’un de ces éléments. La présente observation générale a été élaborée compte tenu également de la journée de débat général organisée en 2007 par le Comité sur la responsabilité des États concernant les ressources pour les droits de l’enfant.

Plusieurs résolutions et rapports de l’Organisation des Nations Unies qui définissent des principes budgétaires dans l’optique des droits de l’homme ont aussi été pris en considération, notamment :

a)La résolution 28/19 du Conseil des droits de l’homme intitulée « Vers un meilleur investissement dans les droits de l’enfant » et le rapport du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, préalable à l’adoption de la résolution et portant le même titre (A/HRC/28/33), qui traitent du rôle des politiques nationales, de la mobilisation des ressources, de la transparence, de la responsabilité, de la participation, de l’allocation et de l’utilisation des ressources, des systèmes de protection de l’enfance, de la coopération internationale et du suivi des investissements en faveur des enfants ;

b)La résolution 67/218 de l’Assemblée générale sur la promotion de la transparence, de la participation et de la responsabilisation en matière de finances publiques, qui insiste sur la nécessité d’améliorer la qualité, l’efficience et l’efficacité de la gestion des finances publiques et encourage les États membres à redoubler d’efforts pour accroître la transparence, la participation et la responsabilisation en matière de finances publiques.

La présente observation générale a également été établie à la lumière des consultations que le Comité a tenues avec les représentants d’États, d’organismes desNations Unies, d’organisations non gouvernementales, les enfants et différents experts, à la faveur d’études, de réunions et de consultations régionales en Asie, en Europe, enAmérique latine et dans lesCaraïbes, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, et enAfrique subsaharienne. Elles’appuie en outre sur les contributions apportées par2 693 enfants originaires de 71 pays dans le cadre d’une enquête en ligne, de groupes de discussion et de consultations régionales en Asie, en Europe et en Amérique latine. Lesenfants consultés différaient par l’âge, le sexe, les aptitudes, l’environnement socioéconomique, la langue et l’origine ethnique et en termes de scolarisation, de déplacements et d’expérience en matière de participation au processus budgétaire. Ils ont adressé aux responsables des budgets les messages suivants:

a)Planifiez bien. Il faut que les ressources budgétaires soient suffisantes pour garantir tous les droits de l’enfant ;

b)Vous ne pouvez pas investir en faveur des enfants sans les consulter ! Nous savons où il faut investir ; vous devriez nous demander ;

c)N’oubliez pas les enfants qui ont des besoins particuliers dans vos budgets ;

d)Utilisez les ressources équitablement et judicieusement. Ne dépensez pas notre argent à des choses inutiles − soyez efficaces et économisez ;

e)Les investissements en faveur des enfants sont des investissements à long terme, qui sont très rentables − il faut que vous le gardiez à l’esprit ;

f)Investir en faveur de nos familles est aussi un bon moyen de garantir nos droits ;

g)Faites en sorte qu’il n’y ait pas de corruption ;

h)Reconnaissez les droits de tous les citoyens, jeunes et vieux, en écoutant ce qu’ils ont à dire sur les questions de gouvernance ;

i)Je voudrais que les pouvoirs publics soient plus transparents et répondent davantage de leurs actes ;

j)Rendez compte des dépenses effectuées ;

k)Donner à tous les enfants des informations sur le budget, sous une forme facilement accessible et dans des médias très utilisés par les enfants, comme les médias sociaux.

Tous les instruments fondamentaux relatifs aux droits de l’homme contiennent des dispositions semblables à celles de l’article 4 de la Convention. En conséquence, les observations générales relatives aux budgets publics qui ont été publiées au titre de ces dispositions devraient être considérées comme complétant la présente observation générale.

La présente observation générale porte sur la manière dont les États parties gèrent leurs ressources financières ; laquelle a des conséquences, directes ou indirectes, sur les enfants relevant de leur juridiction. Elle tient compte du Programme d’action d’Addis‑Abeba issu de la troisième Conférence internationale sur le financement du développement (2015) et du Programme de développement durable à l’horizon 2030 : « Transformer notre monde » (2015). Ces programmes traitent de la gestion par les États des ressources relatives à la coopération internationale concernant les enfants, notamment l’appui aux programmes, les aides sectorielles et l’aide au financement des budgets, la coopération Sud-Sud et la coopération interrégionale. Le Comité rappelle le Protocole d’accord pour une approche de la coopération et de la programmation dans le domaine du développement fondée sur les droits de l’homme, adopté par le Groupe des Nations Unies pour le développement (2003), la Déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide au développement : Appropriation, harmonisation, alignement, résultats et responsabilité mutuelle (2005), le Programme d’action d’Accra (2008) et le Partenariat de Busan pour une coopération efficace au service du développement (2011), qui abordent également cette question de la gestion. De plus, leComité est conscient de l’importance que revêtent pour la présente observation générale les normes nationales, régionales et internationales de gestion des finances publiques en vigueur et leur évolution, à condition qu’elles n’aillent pas à l’encontre des dispositions de laConvention. À cet égard, on peut citer trois exemples: The International Handbook of Public Financial Management, qui met l’accent sur l’efficacité, l’efficience et l’équité en matière de gestion des finances publiques; leCode de transparence des finances publiques, adopté en 2014 par le Fonds monétaire international, qui recommande de communiquer des informations exhaustives, claires, fiables, actualisées et pertinentes sur la situation passée, présente et future des finances publiques en vue d’améliorer la gestion et la transparence budgétaires; et les Principes visant à promouvoir des pratiques responsables pour l’octroi de prêts et la souscription d’emprunts souverains, adoptés en 2012 par la Conférence desNations Unies sur le commerce et le développement.

B.Justification

Le Comité reconnaît que les États parties ont fait des progrès considérables pour ce qui est de réexaminer leurs législations, politiques et programmes et de les mettre en conformité avec les dispositions de la Convention et des Protocoles facultatifs s’y rapportant. Il souligne dans le même temps que ces législations, politiques et programmes ne peuvent être mis en œuvre sans que des ressources financières suffisantes soient mobilisées, affectées et dépensées de manière responsable, efficace, efficiente, équitable, participative, transparente et durable.

Dans le cadre de son examen des rapports soumis par les États parties, de ses échanges avec les représentants des États parties et de ses observations finales, le Comité a exprimé ses préoccupations quant à la question de savoir si les budgets étaient suffisants pour permettre la réalisation des droits de l’enfant. Il réaffirme qu’inscrire les droits de l’enfant au rang de priorité budgétaire, aux niveaux national et infranational, comme la Convention l’exige, contribue non seulement à réaliser ces droits, mais aussi à produire des effets positifs à long terme sur la croissance économique, le développement durable et équitable, et la cohésion sociale.

Compte tenu de ce qui précède, le Comité estime que les États parties devraient prendre en considération tous les droits de l’enfant, à toutes les étapes des processus budgétaires et administratifs, aux niveaux national et infranational. S’il est vrai que les processus budgétaires diffèrent quelque peu entre les États et que certains États ont défini leurs propres méthodes d’élaboration des budgets consacrés aux droits de l’enfant, la présente observation générale fournit des orientations concernant les quatre grandes étapes du processus budgétaire qui intéressent tous les États, à savoir la planification, l’adoption, l’exécution et le suivi.

C.Objectif

L’objectif de la présente observation générale est de faire mieux comprendre les obligations qui découlent de la Convention en matière d’élaboration de budgets en faveur des droits de l’enfant, de manière à renforcer la réalisation de ces droits et à faire véritablement évoluer la manière dont les budgets sont planifiés, adoptés, exécutés et suivis, dans le but de faire progresser la mise en œuvre de la Convention et des Protocoles facultatifs s’y rapportant.

Cet objectif a des incidences sur les mesures prises tout au long du processus budgétaire par les différents pouvoirs (législatif, exécutif et judiciaire), aux différents niveaux ( national et infranational) et par les différentes structures (ministères, directions ou organismes publics) de l’État. Les obligations s’étendent aux donateurs intervenant dans la coopération internationale et aux bénéficiaires de cette coopération.

Cet objectif a aussi des incidences sur d’autres parties prenantes au processus budgétaire telles que les institutions nationales des droits de l’homme, les médias, les enfants, les familles et les organisations de la société civile. Les États parties devraient ménager, de manière adaptée à leur situation, des conditions propices à un suivi actif du processus budgétaire par ces parties prenantes et à leur participation constructive à ce processus.

Enfin, cet objectif a des incidences sur les États en ce qu’il leur faudra sensibiliser les fonctionnaires et les autres personnes concernées à la teneur de la présente observation générale et renforcer leurs capacités en conséquence.

II.Analyse juridique de l’article 4 relativement aux budgets publics

A.« Les États parties s’engagent à prendre »

Les mots « s’engagent à prendre » indiquent que les États parties n’ont pas la possibilité de décider de satisfaire ou de ne pas satisfaire à leur obligation de prendre les mesures législatives, administratives et autres qui sont nécessaires à la réalisation des droits de l’enfant, parmi lesquelles figurent les mesures relatives aux budgets publics.

Par voie de conséquence, tous les pouvoirs et toutes les structures de l’État, à tous les niveaux, qui interviennent dans l’élaboration des budgets doivent exercer leurs fonctions de manière à respecter les principes généraux de la Convention et les principes budgétaires présentés dans les sections III et IV ci-après. Les États parties devraient aussi créer un environnement favorable permettant aux organes législatifs et judiciaires et aux institutions supérieures de contrôle des finances publiques de faire de même.

Les États parties devraient permettre aux responsables des budgets, à tous les niveaux des pouvoirs exécutif et législatif, d’avoir accès aux informations, aux données et aux ressources nécessaires et de renforcer leurs capacités aux fins de la réalisation des droits de l’enfant.

B.« Toutes les mesures législatives, administratives et autres qui sont nécessaires »

L’obligation de prendre « toutes les mesures qui sont nécessaires » comprend le devoir de veiller à ce que :

a)Des lois et des politiques permettent de soutenir la mobilisation de ressources, l’allocation de crédits budgétaires et les dépenses visant à donner effet aux droits de l’enfant ;

b)Les données et les informations nécessaires relatives aux enfants soient recueillies, produites et diffusées pour soutenir la conception et la mise en œuvre des lois, politiques, programmes et budgets adéquats pour promouvoir les droits de l’enfant ;

c)Des ressources publiques suffisantes soient mobilisées, allouées et utilisées de manière efficace pour mettre pleinement en œuvre les lois, les politiques, les programmes et les budgets adoptés ;

d)Les budgets soient systématiquement conçus, adoptés, mis en œuvre et justifiés aux niveaux national et infranational de façon à garantir la réalisation des droits de l’enfant.

Les mesures sont considérées comme étant appropriées lorsqu’elles concourent, directement ou indirectement, à la promotion des droits de l’enfant dans un contexte donné, y compris celui des budgets publics.

Les « mesures législatives »que les États parties sont tenus de prendre en ce qui concerne leurs budgets publics comprennent la révision des lois en vigueur et l’élaboration et l’adoption de textes législatifs visant à garantir que les budgets sont suffisants pour permettre la réalisation des droits de l’enfant aux niveaux national et infranational. Les « mesures administratives » recouvrent, notamment, la conception et la mise en œuvre de programmes qui répondent aux objectifs des lois en vigueur, et les mesures qui visent à garantir que les budgets publics correspondants sont suffisants. Les « autres mesures » s’entendent, par exemple, de la mise en place de mécanismes de participation budgétaire et de données ou de politiques relatives aux droits de l’enfant. Les budgets publics peuvent couvrir ces trois catégories de mesures, tout en étant également indispensables à la réalisation d’autres mesures d’ordre législatif, administratif et autre. Tous les pouvoirs et toutes les structures de l’État, à tous les niveaux, ont la responsabilité de promouvoir les droits de l’enfant.

Le Comité souligne que les États parties ont l’obligation de montrer de quelle manière les mesures d’ordre budgétaire qu’ils choisissent d’adopter contribuent à améliorer les droits de l’enfant. Les États parties doivent démontrer les effets positifs de ces mesures sur les enfants. Pour satisfaire aux dispositions de l’article 4, il ne suffit pas d’indiquer les mesures prises ; il faut aussi en indiquer les résultats.

C.« Pour mettre en œuvre les droits reconnus dans la présente Convention »

Les « droits reconnus dans la présente Convention » sont, notamment, les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels. Les États parties ont le devoir de donner immédiatement effet aux droits civils et politiques et de mettre en œuvre les droits économiques, sociaux et culturels « dans toutes les limites des ressources dont ils disposent ». Il en découle que la pleine réalisation de ces droits sera nécessairement assurée de manière progressive (voir la section II D ci-après).

La mise en œuvre des droits de l’enfant exige qu’une attention étroite soit accordée à chacune des quatre étapes du processus budgétaire : planification, adoption, exécution et suivi. Les États parties devraient prendre en considération les droits de tous les enfants tout au long du processus budgétaire, conformément aux principes généraux de la Convention et aux principes budgétaires énoncés dans la présente observation générale.

En termes budgétaires, « mettre en œuvre les droits de l’enfant » signifie que les États parties doivent mobiliser, attribuer et utiliser les ressources publiques d’une manière qui soit conforme aux obligations qui leur incombent en matière de mise en œuvre. Les États parties doivent respecter, protéger et mettre en œuvre tous les droits de l’enfant, comme suit :

a)« Respecter » signifie que les États parties ne devraient pas entraver, directement ou indirectement, l’exercice des droits de l’enfant. Sur le plan budgétaire, cela signifie qu’ils doivent s’abstenir d’entraver l’exercice des droits de l’enfant en adoptant, par exemple, des décisions budgétaires discriminatoires à l’égard de certains groupes d’enfants, en diminuant ou en réaffectant les fonds alloués aux programmes destinés à permettre l’exercice par les enfants de leurs droits économiques, sociaux ou culturels, excepté dans les circonstances décrites au paragraphe 31 ci-après ;

b)« Protéger » signifie que les États parties doivent empêcher des tiers de porter atteinte aux droits garantis par la Convention et les Protocoles facultatifs s’y rapportant. En ce qui concerne les budgets publics, ces tiers peuvent appartenir, par exemple, au secteur des entreprises et à des institutions financières régionales ou internationales susceptibles de jouer un rôle dans les différentes étapes du processus budgétaire. L’obligation de protéger implique que les États parties devraient veiller à ce que des tiers n’entravent pas ou ne compromettent pas la mobilisation des recettes publiques, les allocations budgétaires et les dépenses. Il faut pour ce faire que les États parties réglementent le rôle de ces tiers, établissent des mécanismes de plainte et interviennent systématiquement en cas d’infraction ;

c)« Mettre en œuvre » les droits de l’enfant signifie que les États parties doivent prendre des mesures pour assurer la pleine réalisation des droits de l’enfant. Les États parties doivent :

i)Favoriser les droits de l’enfant moyennant des mesures propres à permettre aux enfants d’exercer leurs droits et à les aider à le faire. Dans un contexte budgétaire, cela implique, notamment, de fournir à tous les niveaux et à toutes les structures des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire les ressources et les informations voulues pour promouvoir les droits de tous les enfants de façon globale et durable. Cela suppose de prendre des mesures pour faire mieux connaître et comprendre la Convention et les Protocoles facultatifs s’y rapportant aux personnes qui exercent des fonctions étatiques et de favoriser une culture qui respecte, protège et mette en œuvre les droits de l’enfant ;

ii)Préserver les droits de l’enfant lorsque les États ne sont pas en mesure, pour des raisons indépendantes de leur volonté, de mettre en œuvre ces droits eux-mêmes, avec les moyens dont ils disposent. Cette obligation suppose, notamment, de veiller à ce que des données et des informations fiables et ventilées soient rendues publiques pour qu’il soit possible d’évaluer et de déterminer dans quelle mesure les enfants exercent leurs droits, dans différentes parties du territoire de l’État, par exemple ;

iii)Promouvoir les droits de l’enfant en veillant à ce que soient menées des activités adéquates d’information et de sensibilisation sur les processus de décision budgétaire et leurs répercussions. Sur le plan budgétaire, cela implique de mobiliser, d’allouer et d’utiliser suffisamment de ressources pour communiquer et dialoguer avec les enfants, leur famille et les personnes qui s’occupent d’enfants au sujet des décisions d’ordre budgétaire, y compris les lois, politiques et programmes qui les concernent. Les États parties devraient évaluer régulièrement les résultats obtenus dans différents groupes afin de recenser les domaines dans lesquels une promotion plus efficace est nécessaire.

D.« Dans le cas des droits économiques, sociaux et culturels, les États parties prennent ces mesures dans toutes les limites des ressources dont ils disposent »

Conformément à cette obligation, les États parties doivent prendre toutes les mesures possibles pour mobiliser, allouer et utiliser des ressources financières suffisantes. Les fonds alloués aux politiques et aux programmes destinés à promouvoir la réalisation des droits énoncés dans la Convention et les Protocoles facultatifs s’y rapportant doivent être utilisés de façon optimale et conforme aux principes généraux de la Convention et aux principes budgétaires énoncés dans la présente observation générale.

Le Comité prend acte de l’évolution des concepts que recouvrent les expressions « dans toutes les limites des ressources dont ils disposent » et « réalisation progressive » dans d’autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme essentiels et considère que l’article 4 de la Convention englobe ces deux concepts. Il s’ensuit que, dans le cas des droits économiques, sociaux et culturels, les États parties doivent agir dans toutes les limites des ressources dont ils disposent et, s’il y a lieu, dans le cadre de la coopération internationale, en vue d’assurer progressivement le plein exercice de ces droits, sans préjudice des obligations qui sont d’application immédiate en vertu du droit international.

L’expression « les États parties prennent ces mesures dans toutes les limites des ressources dont ils disposent » signifie que les États parties devraient montrer qu’ils ont tout fait pour mobiliser, allouer et utiliser les crédits budgétaires afin de mettre en œuvre les droits économiques, sociaux et culturels de tous les enfants. Le Comité souligne que les droits de l’enfant sont interdépendants et indivisibles et qu’il convient de faire preuve de prudence lorsque l’on distingue entre les droits économiques, sociaux et culturels, d’une part, et les droits civils et politiques, d’autre part. La réalisation des droits économiques, sociaux et culturels a souvent des incidences sur la capacité des enfants d’exercer pleinement leurs droits politiques et civils, et vice versa.

L’obligation faite aux États parties en vertu de l’article 4 de donner effet aux droits économiques, sociaux et culturels des enfants « dans toutes les limites des ressources dont ils disposent » signifie également que les États parties ne doivent pas, délibérément, prendre de mesures régressives concernant les droits économiques, sociaux et culturels. Ils ne devraient pas permettre que le niveau d’exercice des droits de l’enfant diminue. En période de crise économique, des mesures régressives ne peuvent être envisagées qu’après que toutes les autres possibilités ont été évaluées et qu’après s’être assuré que les enfants seront les derniers touchés, en particulier les enfants vulnérables. Les États parties doivent démontrer que de telles mesures sont nécessaires, raisonnables, proportionnées, non discriminatoires et temporaires et que tous les droits ainsi touchés seront rétablis dès que possible. Les États parties devraient prendre des mesures appropriées pour que les groupes d’enfants touchés et les personnes informées de la situation de ces enfants participent au processus de prise de décisions concernant ces mesures. Les obligations d’application immédiate et les obligations fondamentales minimales découlant des droits de l’enfant ne doivent pas être compromises par des mesures régressives, même en période de crise économique.

L’article 44 de la Convention fait obligation aux États parties de soumettre régulièrement des rapports sur les progrès réalisés dans la jouissance des droits de l’enfant par les enfants qui relèvent de leur juridiction. Il conviendrait d’utiliser des objectifs et des indicateurs qualitatifs et quantitatifs clairs et cohérents pour illustrer la réalisation progressive des droits économiques, sociaux et culturels des enfants, dans toutes les limites des ressources disponibles, ainsi que le respect des obligations d’application immédiate découlant de ces droits et la mise en œuvre des droits civils et politiques. Les États parties devraient revoir et améliorer régulièrement les mesures qu’ils ont prises pour garantir la disponibilité et l’optimisation des ressources consacrées aux droits de tous les enfants.

Le Comité considère que des processus décisionnels responsables, transparents, inclusifs et participatifs aux niveaux national et infranational sont très importants en ce qu’ils permettent d’obtenir les ressources nécessaires à la mise en œuvre des droits de l’enfant, y compris les droits économiques, sociaux et culturels.

La corruption et la mauvaise gestion des ressources publiques dans le cadre de la mobilisation des recettes et de l’allocation et de l’utilisation des crédits budgétaires constituent un manquement de la part de l’État à son obligation d’utiliser le maximum des ressources dont il dispose. Le Comité souligne qu’il importe que les États parties allouent les ressources nécessaires à la prévention et à l’élimination de toute corruption nuisant aux droits de l’enfant, conformément à la Convention des Nations Unies contre la corruption.

E.« Et, s’il y a lieu, dans le cadre de la coopération internationale »

Les États parties ont le devoir de coopérer les uns avec les autres pour assurer le respect universel et effectif des droits de l’homme, y compris les droits de l’enfant. Les États qui ne disposent pas des ressources nécessaires pour mettre en œuvre les droits consacrés par la Convention et les Protocoles facultatifs s’y rapportant ont le devoir de faire appel à la coopération internationale, que ce soit au niveau bilatéral, régional, interrégional, mondial ou multilatéral. Les États parties qui peuvent consacrer des ressources à la coopération internationale ont le devoir d’offrir cette coopération pour favoriser la mise en œuvre des droits de l’enfant dans l’État bénéficiaire.

Les États parties devraient démontrer, s’il y a lieu, qu’ils ont tout fait pour solliciter et mettre à profit la coopération internationale aux fins de la réalisation des droits de l’enfant. Cette coopération peut prendre la forme d’un appui technique et financier à la mise en œuvre des droits de l’enfant dans le processus budgétaire, émanant notamment de l’Organisation des Nations Unies.

Les États parties devraient collaborer avec les autres États dans leurs efforts pour mobiliser le maximum de ressources disponibles en faveur des droits de l’enfant.

Les stratégies de coopération des États parties, donateurs ou bénéficiaires, doivent concourir à la réalisation des droits de l’enfant et ne doivent pas avoir d’incidences négatives sur les enfants, en particulier ceux qui sont les plus vulnérables.

Les États parties doivent s’acquitter des obligations qui leur incombent en vertu de la Convention et des Protocoles facultatifs s’y rapportant lorsqu’ils mènent des activités de coopération pour le développement en leur qualité d’États membres d’organisations internationales et lorsqu’ils signent des accords internationaux. De même, les États parties devraient prendre en considération les répercussions potentielles des sanctions économiques sur les droits de l’enfant lorsqu’ils prévoient et mettent en œuvre de telles mesures.

III.Principes généraux de la Convention et budgets publics

Quatre principes généraux énoncés dans la Convention constituent la base de toutes les décisions et actions de l’État qui concernent, directement ou indirectement, les droits de l’enfant, y compris les budgets publics.

A.Droit de ne pas faire l’objet de discrimination (art. 2)

Les États parties sont tenus de protéger les enfants contre toutes les formes de discrimination « indépendamment de toute considération de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou autre de l’enfant ou de ses parents ou représentants légaux, de leur origine nationale, ethnique ou sociale, de leur situation de fortune, de leur incapacité, de leur naissance ou de toute autre situation » (par. 1 de l’article 2). Les États parties, à tous les niveaux de l’administration, devraient s’efforcer de prévenir la discrimination et veiller à ce que les lois, les politiques ou les programmes ayant trait aux budgets, ne soient pas directement ou indirectement discriminatoires à l’égard des enfants, dans leur contenu ou dans leur mise en œuvre.

Les États parties devraient prendre des mesures proactives pour que leurs lois, politiques et programmes aient des résultats positifs pour tous les enfants, en mobilisant des recettes suffisantes et en allouant et utilisant les fonds en conséquence. Pour parvenir à une égalité réelle, les États parties devraient recenser les groupes d’enfants qui réunissent les conditions requises pour bénéficier de mesures spéciales et utiliser les budgets publics pour mettre en œuvre ces mesures.

Les États parties devraient créer un environnement exempt de discrimination et prendre des mesures, notamment moyennant l’allocation de ressources, pour veiller à ce que tous les pouvoirs et toutes les structures de l’État, à tous les niveaux, ainsi que la société civile et le secteur des entreprises, s’emploient activement à promouvoir le droit des enfants de ne pas être soumis à la discrimination.

Pour que les budgets aient une incidence positive sur l’exercice des droits de l’enfant, les États parties ont le devoir de lutter contre les inégalités entre les enfants en réexaminant et en modifiant les lois, politiques et programmes pertinents, en renforçant ou en revoyant l’ordre de priorité de certains crédits budgétaires ou en améliorant l’efficacité, l’efficience et l’équité de leurs budgets.

B.Intérêt supérieur de l’enfant (art. 3)

Le paragraphe1 de l’article3 de la Convention prévoit que, dans toutes les décisions qui concernent les enfants, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale. Les États parties ont le devoir d’intégrer et d’appliquer ce principe dans toutes les procédures législatives, administratives et judiciaires ayant une incidence directe ou indirecte sur les enfants, y compris les budgets. L’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale à chaque stade du processus budgétaire et dans toutes les décisions budgétaires qui concernent les enfants.

Comme le Comité l’a noté dans son observation générale no 14 (2016) sur le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale, les droits énoncés dans la Convention et les Protocoles facultatifs s’y rapportant offrent un cadre permettant d’évaluer et de déterminer l’intérêt supérieur de l’enfant. Cette obligation est fondamentale lorsque les États mettent en balance des priorités concurrentes pour l’allocation et l’utilisation de crédits budgétaires. Les États parties doivent être en mesure de démontrer de quelle manière l’intérêt supérieur de l’enfant a été pris en compte dans les décisions budgétaires, y compris la manière dont ce principe a été mis en balance avec d’autres considérations.

Les États parties devraient réaliser des études d’impact pour déterminer les effets des lois, politiques et programmes, aux niveaux national et infranational, sur tous les enfants, en particulier les enfants vulnérables, qui sont susceptibles d’avoir des besoins particuliers et auxquels il est nécessaire de consacrer une part plus importante des dépenses pour qu’ils puissent réaliser leurs droits. Les études d’impact sur les droits de l’enfant devraient faire partie de chaque étape du processus budgétaire et compléter d’autres mesures de suivi et d’évaluation. Si les États parties peuvent appliquer des méthodes et des pratiques différentes pour réaliser ces études d’impact, ils devraient utiliser la Convention et les Protocoles facultatifs s’y rapportant, ainsi que les observations finales et les observations générales formulées par le Comité, pour concevoir le cadre de ces études. Ces études devraient être éclairées par les parties prenantes, notamment les enfants, les organisations de la société civile, les experts, les organismes publics et les institutions universitaires. L’analyse devrait déboucher sur des recommandations relatives à des modifications, à des solutions de remplacement et à des améliorations à apporter et devrait être rendue publique.

C.Droit à la vie, à la survie et au développement (art. 6)

L’article 6 de la Convention dispose que tout enfant a un droit inhérent à la vie, et que les États parties doivent assurer la survie et le développement de tous les enfants. Dans son observation générale no 5, le Comité indique que le développement de l’enfant est « un concept global, embrassant le développement physique, mental, spirituel, moral, psychologique et social » et que « les mesures d’application devraient viser à assurer le développement optimal de tous les enfants » (par. 12).

Le Comité reconnaît que les enfants ont des besoins divers aux différents stades de leur croissance et de leur développement. Dans leurs décisions budgétaires, les États parties devraient prendre en considération tous les facteurs nécessaires à la survie, à la croissance et au développement des enfants de tous âges. Les États parties devraient montrer leur engagement en faveur des droits de l’enfant en rendant visibles les crédits budgétaires qui concernent les enfants des différents groupes d’âge.

Le Comité reconnaît que l’investissement dans le développement de la petite enfance a une incidence positive sur l’aptitude des enfants à exercer leurs droits, rompt le cycle de la pauvreté et est économiquement très rentable. Un sous-investissement dans la petite enfance peut être préjudiciable au développement cognitif des enfants et peut aggraver les privations, les inégalités et la pauvreté intergénérationnelle.

Il convient, pour garantir le droit à la vie, à la survie et au développement, de prévoir des budgets pour les différents groupes d’enfants de la génération actuelle, tout en tenant compte des générations futures par l’établissement de projections pluriannuelles durables des recettes et des dépenses.

D.Droit d’être entendu (art. 12)

L’article 12 de la Convention consacre le droit qu’a chaque enfant d’exprimer librement son opinion sur toute question l’intéressant et le droit de voir ses opinions dûment prises en considération, eu égard à son âge et à son degré de maturité. Les États parties devraient régulièrement recueillir les opinions des enfants sur les décisions budgétaires qui les concernent, au moyen de mécanismes permettant leur participation effective aux niveaux national et infranational. Les participants aux travaux de ces mécanismes devraient être en mesure d’apporter librement leur contribution, sans craindre une répression ou des railleries, et les États parties devraient leur donner un retour sur ces contributions. En particulier, les États parties devraient consulter les enfants qui rencontrent des difficultés pour faire entendre leur voix, notamment les enfants vulnérables.

Le Comité rappelle que la « Convention impose aux États parties l’obligation claire et immédiate de s’employer à faire respecter le droit de l’enfant d’être entendu sur toute question l’intéressant, son opinion étant dûment prise en considération. [...] Elle suppose aussi de mobiliser des ressources et de prévoir des activités de formation ». Cela montre bien qu’il incombe aux États parties de prévoir des financements pour permettre la participation effective des enfants à toutes les décisions les concernant. Le Comité reconnaît l’importance du rôle que jouent les responsables du pouvoir exécutif, les médiateurs indépendants pour les enfants, les institutions éducatives, les médias, les organisations de la société civile, notamment les organisations et les parlements d’enfants, pour ce qui est de garantir la participation des enfants en ce qui concerne les budgets publics.

Le Comité reconnaît que la transparence budgétaire est une condition préalable à une participation effective. On entend par transparence la mise à la disposition du public, en temps utile, d’informations faciles à exploiter s’agissant de la planification, de l’adoption, de l’exécution et du suivi des budgets. Il s’agit notamment des données budgétaires quantitatives et des informations pertinentes sur la législation, les politiques, les programmes, le calendrier du processus budgétaire, la motivation des priorités et des décisions en matière de dépenses, les produits et les résultats, ainsi que des informations sur la fourniture de services. Le Comité souligne la nécessité pour les États parties de budgétiser et mettre à disposition des matériels, des mécanismes et des institutions adaptés au contexte pour favoriser une participation effective.

Le Comité souligne qu’il importe, pour permettre une participation effective au processus budgétaire, de veiller à ce que les États parties disposent d’une législation et de politiques relatives à la liberté d’information qui accordent, ou à tout le moins ne refusent pas, aux enfants et aux défenseurs des droits de l’enfant le droit d’accéder aux documents budgétaires clefs, tels que les rapports prébudgétaires, les projets de budget, les lois de finances adoptées, les rapports à mi-parcours, les rapports en cours d’exercice et les rapports d’audit.

Le Comité constate qu’un certain nombre d’États ont déjà permis à des enfants de participer véritablement à différentes étapes du processus budgétaire. Il encourage les États parties à mettre en commun ces expériences et à recenser les bonnes pratiques qui sont adaptées à leur situation.

IV.Principes de l’élaboration des budgets publics en faveur des droits de l’enfant

Comme indiqué à la section II ci-dessus, le Comité souligne que les États parties sont tenus, dans le cadre de leur processus budgétaire, de prendre des mesures pour générer des recettes et gérer les dépenses de manière à pouvoir réaliser les droits de l’enfant. Il reconnaît qu’il existe de nombreux moyens d’obtenir des ressources suffisantes pour réaliser les droits de l’enfant, notamment en tenant compte des principes généraux énoncés dans la Convention et des principes budgétaires tels que l’efficacité, l’efficience, l’équité, la transparence et la durabilité. Les États parties à la Convention sont tenus d’honorer leurs obligations budgétaires aux fins de la réalisation des droits de l’enfant.

Le Comité reconnaît que les États ont des connaissances spécialisées et une expérience dans l’application à leurs processus budgétaires des principes généraux de la Convention et des principes budgétaires mentionnés ci-après. Les États parties sont encouragés à mettre en commun et à échanger leurs bonnes pratiques.

A.Efficacité

Les États parties devraient planifier, adopter et exécuter des budgets et en assurer le suivi de manière à faire progresser les droits de l’enfant. Les États parties devraient s’efforcer de comprendre la situation des droits de l’enfant dans leur contexte et élaborer et appliquer une législation, des politiques et des programmes stratégiquement conçus pour surmonter les difficultés liées à la réalisation des droits de l’enfant. Ils devraient évaluer en permanence l’incidence des budgets sur les différents groupes d’enfants et veiller à ce que leurs décisions budgétaires donnent les meilleurs résultats possibles pour le plus grand nombre d’enfants, en accordant une attention particulière aux enfants en situation de vulnérabilité.

B.Efficience

Les ressources publiques consacrées aux politiques et aux programmes dans le domaine de l’enfance devraient être gérées de façon optimale sur le plan économique et en tenant compte de l’obligation de respecter, de protéger et de mettre en œuvre les droits de l’enfant. Les dépenses approuvées devraient être exécutées conformément à la loi de finances adoptée. Les biens et les services visant à promouvoir les droits de l’enfant devraient être obtenus et fournis en toute transparence et en temps voulu et être de bonne qualité. En outre, les fonds alloués aux droits de l’enfant ne devraient pas être gaspillés. Les États parties devraient s’efforcer de surmonter les obstacles institutionnels qui entravent l’utilisation efficiente des fonds. La surveillance, l’évaluation et la vérification des financements publics devraient être des garde-fous favorisant une gestion financière saine.

C.Équité

Les États parties ne doivent pas exercer de discrimination à l’égard d’un enfant ou d’une catégorie d’enfants par la mobilisation de ressources ou par l’allocation ou l’exécution de budgets publics. Une répartition équitable des dépenses ne consiste pas toujours à dépenser le même montant pour chaque enfant, mais plutôt à prendre des décisions en matière de dépenses qui conduisent à une égalité réelle entre les enfants. Les ressources doivent être ciblées équitablement pour promouvoir l’égalité. Les États parties sont tenus d’éliminer tous les obstacles discriminatoires qui peuvent empêcher les enfants d’exercer leurs droits.

D.Transparence

Les États parties devraient mettre en place et maintenir des systèmes et des pratiques de gestion des finances publiques qui soient soumis à une surveillance, et les informations sur les ressources publiques devraient être facilement accessibles en temps utile. La transparence contribue à l’efficacité et à la lutte contre la corruption et la mauvaise gestion des finances publiques, ce qui permet un accroissement des ressources publiques disponibles pour promouvoir les droits de l’enfant. La transparence est également indispensable pour que les pouvoirs exécutif et législatif et la société civile, y compris des enfants, puissent véritablement participer à la procédure budgétaire. Le Comité souligne qu’il importe que les États parties s’emploient activement à promouvoir l’accès à l’information sur les recettes publiques, les allocations budgétaires et les dépenses relatives à l’enfance, et à adopter des politiques visant à soutenir et à encourager un dialogue constant avec les parlements et la société civile, notamment les enfants.

E.Durabilité

L’intérêt supérieur des générations d’enfants actuelles et futures devrait être sérieusement pris en considération dans toutes les décisions budgétaires. Les États parties devraient mobiliser les recettes et gérer les ressources publiques de manière à garantir l’adoption de politiques et la mise en œuvre de programmes visant directement ou indirectement à la réalisation des droits de l’enfant. Les États parties ne peuvent prendre de mesures régressives relatives aux droits de l’enfant que dans les conditions énoncées au paragraphe 31 ci-dessus.

V.Mise en œuvre des droits de l’enfant dans les budgets publics

Dans cette section, le Comité donne des orientations et des recommandations plus détaillées sur la manière de réaliser les droits de l’enfant à chacune des quatre étapes du processus budgétaire :

a)Planification ;

b)Adoption ;

c)Exécution ;

d)Suivi.

Tout en mettant l’accent, dans cette section, sur les processus budgétaires publics nationaux et infranationaux, le Comité insiste sur l’obligation qui incombe aux États parties de promouvoir également la mise en œuvre de la Convention au moyen de la coopération internationale. Cette coopération devrait apparaître dans les budgets nationaux et infranationaux, s’il y a lieu.

Le Comité souligne également l’importance d’une coordination et d’une coopération intersectorielles, interministérielles, interservices et interorganismes efficaces, à tous les stades du processus budgétaire, pour mettre pleinement en œuvre la Convention et les Protocoles facultatifs s’y rapportant. Les États parties devraient dégager des ressources et organiser leurs systèmes d’information pour soutenir cette coordination aux niveaux national et infranational.

A.Planification

1.Évaluation de la situation

La planification budgétaire exige une évaluation réaliste de la situation économique et de la mesure dans laquelle la législation, les politiques et les programmes existants respectent, protègent et mettent en œuvre les droits de l’enfant. Les États ont besoin d’informations et de données ventilées fiables, à jour, accessibles et complètes, dans des formats réutilisables, sur la situation actuelle en matière macroéconomique et budgétaire et en ce qui concerne les droits de l’enfant, et de prévisions dans ces domaines. Ces informations sont essentielles à l’élaboration d’une législation, de politiques et de programmes qui, directement ou indirectement, ciblent et font progresser les droits de l’enfant.

Dans le cadre de la planification du budget, les États parties devraient examiner en détail la situation des différents groupes d’enfants, en particulier les enfants vulnérables, en tenant compte de leur situation passée (sur les trois à cinq dernières années au moins), actuelle et future (pour les cinq à dix prochaines années au moins). Afin de garantir l’accès à des informations fiables et utiles sur la situation des enfants, les États parties sont instamment invités à :

a)Revoir périodiquement les mandats et les ressources des organismes de statistique et des systèmes de collecte, de traitement, d’analyse et de diffusion de données démographiques relatives aux enfants et d’autres données pertinentes ;

b)Veiller à ce que les informations disponibles sur la situation des enfants soient ventilées de manière pertinente, compte tenu des différents groupes d’enfants et du principe de non-discrimination prévu par l’article 2 de la Convention (voir également la section III A ci-dessus) ;

c)Communiquer en temps utile des informations faciles à exploiter et des données ventilées sur la situation des enfants aux responsables du pouvoir exécutif et aux membres des parlements qui participent à l’établissement des budgets aux niveaux national et infranational, ainsi qu’à la société civile, notamment aux enfants ;

d)Mettre en place et alimenter une base de données sur toutes les politiques et ressources concernant les enfants, afin que les personnes qui participent à la mise en œuvre et au suivi des programmes et des services correspondants aient un accès continu à des informations objectives et fiables.

Les États parties devraient enquêter sur les incidences que les décisions budgétaires ont eues dans le passé et pourraient avoir à l’avenir sur les enfants et, à cet effet, ils devraient :

a)Réaliser des audits, des évaluations et des études concernant l’incidence qu’ont eue sur les enfants la perception des recettes publiques, les allocations budgétaires et les dépenses dans le passé ;

b)Consulter les enfants, les personnes qui s’en occupent et celles qui défendent leurs droits et prendre sérieusement en considération les résultats de ces consultations dans les décisions budgétaires ;

c)Passer en revue les mécanismes qui permettent de consulter régulièrement les enfants tout au long de l’exercice budgétaire ou créer de nouveaux mécanismes ;

d)Utiliser les nouvelles technologies pour favoriser une planification budgétaire efficace en ce qui concerne les droits de l’enfant.

2.Législation, politiques et programmes

La législation, les politiques et les programmes relatifs aux questions financières, au processus budgétaire ou aux droits spécifiques de l’enfant ont une incidence directe ou indirecte sur les enfants. Les États parties sont tenus de prendre toutes les mesures possibles pour veiller à ce que l’ensemble de la législation, des politiques et des programmes soient conformes à la Convention et aux Protocoles facultatifs s’y rapportant, reflètent la réalité vécue par les enfants, en particulier ceux qui sont en situation de vulnérabilité, et ne portent pas atteinte aux enfants ou ne les empêchent pas de réaliser leurs droits.

Le Comité est conscient du fait que la législation, les politiques et les programmes macroéconomiques et budgétaires peuvent avoir une incidence indirecte sur les enfants, leurs tuteurs et les autres personnes qui s’occupent d’eux, qui peuvent, par exemple, être touchés par la législation du travail ou la gestion de la dette publique. Les États parties devraient évaluer les incidences sur les droits de l’enfant de l’ensemble de la législation, des politiques et des programmes, y compris ceux de nature macroéconomique et budgétaire, afin de veiller à ce qu’ils ne compromettent pas la réalisation des droits de l’enfant.

La prise de décisions et les opérations relatives à la coopération internationale pour le développement, ainsi que les activités menées par les États parties en leur qualité de membres d’organisations internationales devraient aussi porter sur la législation, les politiques et les programmes concernant les enfants. Un État qui participe à la coopération internationale dans le domaine du développement ou en matière financière devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour que cette coopération soit conforme à la Convention et aux Protocoles facultatifs s’y rapportant.

Le Comité souligne qu’il est important que les États parties effectuent une estimation des coûts pour les projets de lois, de politiques et de programmes qui concernent les enfants, afin de déterminer le niveau de ressources financières nécessaires et de permettre aux planificateurs des budgets et aux décideurs concernés au sein des pouvoirs exécutif et législatif de prendre des décisions en connaissance de cause sur les ressources nécessaires à la mise en œuvre de ces projets.

3.Mobilisation des ressources

Le Comité reconnaît l’importance de la législation, des politiques et des systèmes mis en place par les États en matière de mobilisation des recettes et d’emprunts destinés à pérenniser les ressources consacrées aux droits de l’enfant. Les États parties devraient prendre des mesures concrètes durables pour mobiliser des ressources intérieures aux niveaux national et infranational, comme les impôts et les recettes non fiscales.

Les États parties feront appel à la coopération internationale si les ressources disponibles ne permettent pas de réaliser les droits de l’enfant. Dans le cadre de cette coopération, les États bénéficiaires et les États donateurs doivent tenir compte des dispositions de la Convention et des Protocoles facultatifs s’y rapportant. Le Comité souligne que la coopération internationale et régionale pour la réalisation des droits de l’enfant peut englober la mobilisation de ressources en faveur de programmes ciblés, ainsi que des mesures relatives aux impôts, à la lutte contre la fraude fiscale, à la gestion de la dette, à la transparence et à d’autres sujets.

La mobilisation des ressources en vue de dépenses publiques en faveur des droits de l’enfant devrait elle-même s’effectuer conformément aux principes budgétaires énoncés à la section IV. Un manque de transparence dans les systèmes de mobilisation des ressources peut engendrer un manque d’efficacité, une mauvaise gestion des finances publiques et favoriser la corruption, ce qui peut entraîner une insuffisance des ressources disponibles pour les droits de l’enfant. Les différents régimes fiscaux qui ne prennent pas en considération la capacité de paiement des familles peuvent conduire à des injustices en matière de mobilisation des ressources, ce qui peut faire peser un fardeau disproportionné sur des personnes ayant déjà des ressources financières limitées et dont certaines ont des enfants à charge.

Les États parties devraient mobiliser l’intégralité de leurs ressources disponibles d’une manière qui soit compatible avec leurs obligations de mise en œuvre et, à cet effet, ils devraient :

a)Évaluer les incidences sur les droits de l’enfant de la législation et des politiques relatives à la mobilisation des ressources ;

b)Examiner leurs politiques et leurs formules de répartition des recettes, tant sur le plan vertical (entre les différents niveaux de l’État) que sur le plan horizontal (entre les unités de même niveau), et veiller à ce qu’elles favorisent et renforcent l’égalité entre les enfants des différentes régions ;

c)Examiner et renforcer leur capacité d’élaborer et de gérer leur législation, leurs politiques et leurs systèmes fiscaux, notamment par la signature d’accords internationaux visant à prévenir la fraude fiscale ;

d)Préserver les ressources disponibles pour faire progresser les droits de l’enfant en évitant un gaspillage des ressources causé par l’inefficacité ou la mauvaise gestion et en luttant contre la corruption ou les pratiques illicites à tous les niveaux ;

e)Appliquer les principes budgétaires énoncés à la section IV dans toutes les stratégies de mobilisation des ressources ;

f)Veiller à ce que leurs recettes, leurs dépenses et leurs dettes aboutissent à la réalisation des droits de l’enfant pour les générations actuelles et futures.

Le Comité reconnaît qu’une gestion durable de la dette par les États, au nom des créanciers et des prêteurs, peut contribuer à mobiliser des ressources pour les droits de l’enfant. Une gestion durable de la dette suppose la mise en place d’une législation, de politiques et de systèmes transparents qui définissent clairement les rôles et les responsabilités en matière d’emprunts et de prêts, ainsi que la gestion et la surveillance de la dette. Le Comité reconnaît également qu’une dette insoutenable à long terme peut faire obstacle à la capacité d’un État à mobiliser des ressources pour les droits de l’enfant et entraîner des taxes et des redevances qui ont des retombées négatives sur les enfants. Les incidences sur les droits de l’enfant devraient donc être également évaluées en ce qui concerne les accords relatifs à la dette.

L’allégement de la dette peut accroître la capacité des États à mobiliser des ressources pour les droits de l’enfant. Lorsque les États parties bénéficient d’un allégement de leur dette, les droits de l’enfant doivent être sérieusement pris en considération dans les décisions concernant l’allocation des ressources ainsi dégagées.

Les États parties doivent protéger les droits de l’enfant lorsqu’ils prennent des décisions relatives à la mobilisation de ressources dans le cadre de l’extraction de ressources naturelles. Les accords nationaux et internationaux relatifs à ces ressources, par exemple, devraient prendre en considération les effets qu’ils pourraient avoir sur les générations d’enfants actuelles et futures.

4.Élaboration des budgets

Les rapports prébudgétaires et les projets de budget sont des outils très efficaces qui aident les États à traduire leurs engagements en matière de droits de l’enfant en priorités concrètes et en plans nationaux et infranationaux. Les États parties devraient préparer leurs rapports et projets relatifs au budget de manière à permettre des comparaisons réelles et un suivi des budgets en faveur de l’enfance et, à cette fin :

a)Respecter les nomenclatures budgétaires approuvées sur le plan international, qui permettent notamment une classification fonctionnelle (par secteur ou sous-secteur), économique (par dépenses courantes et dépenses d’investissement), administrative (par ministère, département et organisme) ou programmatique (dans le cas d’une budgétisation par programmes), dans la mesure où elles respectent les droits de l’enfant ;

b)Réviser leurs directives et procédures administratives pour l’établissement des rapports prébudgétaires et des projets de budget, notamment les feuilles de travail et les instructions uniformisées indiquant les parties prenantes à consulter, afin qu’elles soient conformes à la présente observation générale ;

c)Réviser de manière plus approfondie leurs nomenclatures afin de veiller à ce qu’elles comprennent des lignes et des codes budgétaires dans lesquels les informations budgétaires soient, au minimum, ventilées selon les différentes catégories énumérées au paragraphe 84 ci-après ;

d)Veiller à ce que les lignes et codes budgétaires utilisés au niveau national correspondent à ceux utilisés au niveau infranational ;

e)Publier en temps voulu des rapports prébudgétaires et des projets de budget qui soient faciles à comprendre et accessibles aux organes législatifs, aux enfants et aux défenseurs des droits de l’enfant.

Les rapports prébudgétaires et les projets de budget donnent des indications importantes sur la manière dont un État prévoit de remplir ses obligations en matière de droits de l’enfant. Les États partie devraient s’en servir pour :

a)Expliquer de quelle manière la législation, les politiques et les programmes relatifs à l’enfance seront financés et mis en œuvre ;

b)Indiquer les crédits budgétaires qui sont directement alloués aux enfants ;

c)Indiquer les crédits budgétaires qui touchent indirectement les enfants ;

d)Présenter les résultats des évaluations et des audits concernant l’incidence qu’ont eue les budgets précédents sur les enfants ;

e)Détailler les mesures récentes ou celles qui vont être prises pour faire progresser les droits de l’enfant ;

f)Présenter des données financières assorties d’un texte explicatif sur les ressources qui ont été allouées aux droits de l’enfant dans le passé, celles qui le sont actuellement et celles qu’il est prévu d’allouer, ainsi que sur les dépenses réelles ;

g)Fixer des objectifs de rendement reliant les buts des programmes en faveur de l’enfance aux crédits alloués et aux dépenses réelles afin de pouvoir suivre leurs résultats et leur incidence sur les enfants, y compris les enfants en situation de vulnérabilité.

Les rapports prébudgétaires et les projets de budget sont des sources d’information importantes pour les organisations œuvrant dans le domaine des droits de l’enfant, pour les enfants et pour les personnes qui s’occupent d’enfants. Les États partie devraient rendre davantage de comptes aux personnes relevant de leur juridiction, en élaborant des documents d’information faciles à comprendre et accessibles et en les diffusant auprès du public.

Des nomenclatures budgétaires claires fournissent une base sur laquelle les États et autres entités peuvent s’appuyer pour contrôler la manière dont les allocations de crédits budgétaires et les dépenses réelles qui concernent les enfants sont gérées au regard des principes budgétaires. Cela suppose des lignes et codes budgétaires qui, au minimum, présentent toutes les dépenses actuelles, prévues, adoptées et révisées qui concernent directement les enfants, en les ventilant par :

a)Âge, sachant que la définition des tranches d’âges variera d’un État à l’autre ;

b)Sexe ;

c)Région géographique, par exemple par division infranationale ;

d)Catégories existantes et potentielles d’enfants en situation de vulnérabilité, compte tenu de l’article 2 de la Convention (voir aussi la section III A) ;

e)Source des recettes, qu’elle soit nationale, infranationale, régionale ou internationale ;

f)Entités compétentes, par exemple départements, ministères ou organismes nationaux ou infranationaux.

Dans leurs projets de budget, les États parties devraient mentionner tout programme pour l’enfance qu’ils proposent de sous-traiter au secteur privé, ou qui est déjà sous-traité.

Le Comité constate que les États qui ont le plus progressé en matière de visibilité des droits de l’enfant dans leur budget ont tendance à utiliser une méthode de budgétisation par programme. Les États parties sont vivement encouragés à mettre en commun leurs expériences dans ce domaine et à envisager d’appliquer cette méthode en l’adaptant à leur situation.

B.Adoption

1.Examen des projets de budget par les organes législatifs

Le Comité souligne à quel point il est important que les organes législatifs aux niveaux national et infranational aient accès à des informations détaillées et faciles à exploiter relatives à la situation des enfants et puissent se faire une idée claire de la manière dont les projets de budget visent à améliorer le bien-être des enfants et à faire progresser leurs droits.

Les organes législatifs aux niveaux national et infranational ont également besoin de suffisamment de temps, de ressources et d’autonomie pour examiner les projets de budget dans l’optique des droits de l’enfant et, au besoin, pour entreprendre ou faire réaliser des analyses et des études qui mettent en évidence l’incidence des crédits budgétaires sur différents groupes d’enfants.

Pour que le rôle de surveillance des organes législatifs serve l’intérêt supérieur de l’enfant, les membres des parlements et de leurs commissions devraient avoir le pouvoir de remettre en question et de revoir les projets de budget et, si nécessaire, de demander leur modification, pour s’assurer qu’ils fassent progresser les droits de l’enfant conformément aux principes généraux de la Convention et aux principes budgétaires.

Les États parties devraient faire en sorte que les parlementaires bénéficient d’une préparation suffisante pour analyser et discuter les effets des projets de budget sur tous les enfants avant d’adopter une loi de finances, en veillant à ce que les parlements, aux niveaux national et infranational, notamment les commissions parlementaires compétentes :

a)Aient accès à des informations sur la situation des enfants qui soient faciles à comprendre et à utiliser ;

b)Reçoivent de l’exécutif des explications claires sur la manière dont la législation, les politiques et les programmes touchant directement ou indirectement les enfants ont été traduits en lignes budgétaires ;

c)Disposent de suffisamment de temps au cours du processus budgétaire pour recevoir le projet de budget, l’examiner, en discuter et proposer des modifications concernant les enfants avant de l’adopter ;

d)Soient en mesure d’entreprendre ou de faire réaliser de manière indépendante des analyses qui mettent en évidence l’incidence des projets de budget sur les droits de l’enfant ;

e)Puissent organiser des consultations sur les projets de budget avec les parties intéressées, notamment la société civile, les défenseurs des droits de l’enfant et les enfants ;

f)Disposent des ressources nécessaires, par exemple grâce à un service chargé du budget au parlement, pour mener des activités de surveillance telles que celles mentionnées aux alinéas a) à e) ci-dessus.

Pendant la phase d’adoption du budget, les États parties devraient élaborer et diffuser des documents budgétaires nationaux et infranationaux qui :

a)Présentent les informations budgétaires selon une classification cohérente et facile à comprendre ;

b)Facilitent l’analyse et le suivi de par leur compatibilité avec d’autres projets de budget et rapports sur les dépenses ;

c)Comprennent des publications ou des récapitulatifs budgétaires accessibles aux enfants et aux défenseurs des droits de l’enfant, aux parlements et à la société civile.

2.Adoption du budget par les organes législatifs

Le Comité souligne que la nomenclature des budgets adoptés par les organes législatifs doit permettre de comparer les dépenses prévues et les dépenses réelles et d’assurer le suivi de l’exécution du budget au regard des droits de l’enfant.

Le budget adopté est considéré comme un document public qui est non seulement essentiel pour l’État et les organes législatifs aux niveaux national et infranational, mais qui doit aussi être accessible à la société civile, notamment aux enfants et aux défenseurs des droits de l’enfant.

C.Exécution

1.Transfert et dépense des ressources disponibles

Les États parties devraient adopter et maintenir des mécanismes et des systèmes de finances publiques transparents et efficaces pour optimiser l’utilisation des ressources lors de l’achat de biens et de services visant à faire progresser les droits de l’enfant.

Le Comité souligne que les États parties ont le devoir de découvrir les causes profondes de l’inefficacité ou de l’inefficience des dépenses publiques et d’y remédier, notamment en ce qui concerne la mauvaise qualité des biens ou des services, les systèmes inadéquats de gestion des finances ou des systèmes d’achats, les détournements de ressources, les retards de transfert, le manque de clarté des rôles et des responsabilités, une faible capacité d’absorption, les faiblesses du système d’information budgétaire et la corruption. Les États parties ont l’obligation d’expliquer les raisons pour lesquelles ils peuvent avoir gaspillé ou mal géré des ressources destinées à faire progresser les droits de l’enfant et d’exposer les mesures qu’ils ont prises pour résoudre le problème.

Au cours de l’exercice budgétaire, il est possible que les politiques et programmes pour l’enfance ne bénéficient pas à toutes les personnes visées ou entraînent des résultats imprévus. Les États parties devraient suivre les résultats des dépenses engagées pendant l’exécution du processus budgétaire afin de pouvoir intervenir et prendre rapidement des mesures correctives en cas de besoin.

2.Rapports en cours d’exercice sur le budget

Les États parties devraient régulièrement contrôler les budgets relatifs à l’enfance et élaborer des rapports à ce sujet de manière à ce que les États et les organes de surveillance puissent suivre les progrès accomplis dans la réalisation des droits de l’enfant tels qu’ils sont prévus dans le budget adopté.

Le Comité souligne à quel point il est important que les rapports budgétaires soient rendus publics en temps opportun et mettent en évidence les écarts constatés entre le budget adopté, le budget révisé et les recettes et dépenses effectives relativement à la législation, aux politiques et aux programmes qui concernent les enfants.

Le Comité souligne que les États parties devraient utiliser des nomenclatures budgétaires qui permettent de rendre compte des dépenses effectuées en faveur des droits de l’enfant, de les suivre et de les analyser.

3.Exécution du budget

Les États parties devraient suivre et analyser le recouvrement des recettes ainsi que la portée et les résultats des dépenses réelles pour ce qui est des différents groupes d’enfants durant l’exercice budgétaire et d’un exercice à l’autre, par exemple en termes de disponibilité, de qualité, d’accessibilité et d’équité dans la répartition des services. Les États parties sont instamment invités à prévoir les ressources et capacités nécessaires pour mener ces activités de suivi et d’analyse, notamment concernant les services qui sont sous-traités au secteur privé.

Les États parties devraient assurer le suivi de l’exécution des budgets adoptés et publier des informations à ce sujet de manière régulière. Pour ce faire, ils devraient :

a)Comparer les montants inscrits au budget et les montants effectivement dépensés aux différents niveaux administratifs, dans différents secteur sociaux ;

b)Publier un rapport à mi-parcours détaillé présentant les dépenses effectives, les recettes mobilisées et la dette contractée durant la première moitié de l’exercice budgétaire ;

c)Publier davantage de rapports en cours d’exercice, par exemple chaque mois ou chaque trimestre.

Les États parties ont l’obligation de mettre en place des mécanismes de responsabilisation, qui permettent à la société civile, notamment aux enfants, de contrôler les résultats des dépenses publiques.

Les États parties devraient prévoir des processus de contrôle interne et d’audit pour garantir le respect des règles et procédures s’agissant de l’exécution des dépenses en faveur des droits de l’enfant, ainsi que le respect des procédures comptables et des processus d’élaboration de rapports.

D.Suivi

1.Rapports et évaluations de fin d’exercice

Les rapports budgétaires de fin d’exercice permettent aux États de rendre compte, aux niveaux national et infranational, des recettes, des emprunts, de la coopération internationale et des dépenses réelles en rapport avec les droits de l’enfant. Ils constituent une base sur laquelle la société civile et les organes législatifs peuvent s’appuyer pour examiner l’exécution du budget de l’exercice précédent et, si nécessaire, soulever des préoccupations relatives aux dépenses effectivement consacrées à l’enfance et aux programmes relatifs aux droits de l’enfant.

Le Comité souligne que les États parties devraient faire figurer, dans leurs rapports de fin d’exercice, des informations détaillées sur toutes les recettes perçues et les dépenses effectuées qui ont une incidence sur les droits de l’enfant. Ils devraient publier des rapports faciles à exploiter destinés aux organes législatifs nationaux et infranationaux et élaborer des rapports et effectuer des évaluations de fin d’exercice qui soient accessibles et rendus publics en temps opportun.

Les évaluations et autres types d’analyse budgétaire réalisés par l’État ou par des organismes d’évaluation indépendants peuvent fournir des renseignements précieux sur l’incidence qu’ont les recettes perçues et les dépenses engagées sur la situation de différents groupes d’enfants, en particulier des enfants vulnérables. Les États parties devraient procéder régulièrement à des évaluations et analyses concernant les effets des budgets sur la situation des enfants et encourager ces activités, et devraient pour ce faire :

a)Allouer les ressources financières et humaines voulues pour permettre la réalisation régulière de telles évaluations et analyses ;

b)Évaluer et examiner de manière rigoureuse les résultats de ces évaluations et analyses tout au long du processus budgétaire et rendre compte des décisions prises à leur sujet ;

c)Créer des organismes indépendants, notamment des instituts de recherche, chargés d’évaluer l’efficience, l’efficacité, l’équité, la transparence et la durabilité des dépenses effectivement allouées à la réalisation des droits de l’enfant et renforcer les organismes existants ;

d)Veiller à ce que la société civile, notamment les enfants, puisse contribuer aux évaluations et aux analyses, par exemple au moyen d’études d’impact sur les droits de l’enfant.

2.Audits

Les institutions supérieures de contrôle des finances publiques jouent un rôle essentiel dans le processus budgétaire car elles vérifient si le recouvrement des recettes et les dépenses de l’État correspondent au budget adopté. Les auditeurs peuvent examiner l’efficience ou l’efficacité des dépenses et s’intéresser à des secteurs ou des structures gouvernementales précis ou à des aspects transversaux. Les États peuvent se servir des audits portant spécialement sur les droits de l’enfant pour évaluer et améliorer la mobilisation des recettes et les dépenses publiques en faveur de l’enfance. Ils devraient rendre les rapports d’audit accessibles au public en temps opportun.

Le Comité souligne que les institutions supérieures de contrôle des finances publiques devraient être indépendantes de l’État et disposer d’un mandat leur permettant d’accéder aux informations et aux ressources nécessaires pour réaliser des audits et des rapports sur les budgets consacrés à l’enfance de manière indépendante, responsable et transparente.

Les États parties devraient appuyer les institutions supérieures de contrôle des finances publiques dans leur rôle de surveillance du recouvrement des recettes et des dépenses en faveur des droits de l’enfant et, à cette fin :

a)Présenter en temps utile aux institutions supérieures de contrôle des finances publiques des comptes annuels détaillés ;

b)Veiller à ce que les institutions supérieures de contrôle des finances publiques disposent des ressources nécessaires pour réaliser des audits portant sur les droits de l’enfant ;

c)Fournir des réponses publiques aux rapports d’audit portant sur les effets des dépenses effectives de l’État sur les droits de l’enfant, expliquant notamment comment l’État donne suite aux conclusions et recommandations des auditeurs ;

d)Veiller à ce que les agents de l’État puissent se présenter devant des commissions parlementaires pour répondre aux préoccupations soulevées dans les rapports d’audit portant sur les droits de l’enfant.

La société civile, notamment les enfants, peut grandement contribuer à l’audit des dépenses publiques. Les États parties sont encouragés à appuyer la société civile dans ce domaine et à lui donner les moyens de participer aux évaluations et aux audits portant sur la dépense publique consacrée aux droits de l’enfant, en prenant les mesures suivantes :

a)Créer des mécanismes de responsabilisation et les revoir régulièrement pour veiller à ce qu’ils soient accessibles, participatifs et efficaces ;

b)Veiller à ce que les agents de l’État puissent fournir des réponses éclairées aux conclusions de la société civile et des organismes indépendants chargés de la surveillance et de l’audit de la dépense publique consacrée à l’enfance.

Les États parties devraient se servir des audits précédemment réalisés sur la mobilisation des ressources, l’allocation des crédits budgétaires et les dépenses engagées en faveur des droits de l’enfant pour éclairer la planification du budget suivant.

VI.Diffusion de la présente observation générale

Le Comité recommande aux États parties de diffuser largement la présente observation générale auprès de tous les pouvoirs et de toutes les structures de l’État, à tous les niveaux, de la société civile, notamment les enfants et les personnes qui s’occupent d’enfants, ainsi qu’auprès des organismes chargés de la coopération pour le développement, des universités, des médias et des acteurs concernés du secteur privé.

Les États parties devraient traduire l’observation générale dans les langues pertinentes et en proposer des versions adaptées aux enfants.

Des activités devraient être organisées pour mettre en commun les bonnes pratiques relatives à l’observation générale et offrir à tous les professionnels et personnels techniques concernés une formation sur son contenu.

Le Comité encourage toutes les parties prenantes susmentionnées à mettre en commun les bonnes pratiques relatives à la présente observation générale.

Les États parties devraient faire figurer, dans les rapports périodiques qu’ils soumettent au Comité, des renseignements sur les difficultés qu’ils rencontrent et sur les mesures qu’ils ont prises pour appliquer la présente observation générale dans leurs budgets et processus budgétaires.