CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/65/CO/610 décembre 2004

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATIONDE LA DISCRIMINATION RACIALESoixante‑cinquième session2‑20 août 2004

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

PORTUGAL

1.Le Comité a examiné les dixième et onzième rapports périodiques du Portugal, soumis en un seul document (CERD/C/447/Add.1) à ses 1660e et 1661e séances (CERD/C/SR.1660 et 1661). À sa 1670e séance (CERD/C/SR.1670), tenue le 19 août 2004, il a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

2.Le Comité se félicite de la soumission en temps opportun du rapport de l’État partie, des renseignements supplémentaires que la délégation a fournis oralement et par écrit et des réponses constructives qu’elle a données aux questions posées. Toutefois, le Comité note que la structure du rapport ne respecte pas pleinement ses principes directeurs concernant la présentation des rapports.

B. Aspects positifs

3.Le Comité accueille avec satisfaction la promulgation du décret‑loi no 251/2002 du 22 novembre 2002 qui, entre autres, étend la structure et les compétences du Haut‑Commissariat à l’immigration et aux minorités ethniques et établit le Conseil consultatif pour les affaires de l’immigration, chargés d’assurer la participation des associations représentatives des immigrants, des associations patronales et des institutions de solidarité sociale à l’élaboration des politiques d’intégration sociale et de lutte contre l’exclusion.

4.Le Comité prend note avec satisfaction du fait que le budget du Haut‑Commissariat à l’immigration et aux minorités ethniques a été considérablement augmenté dans la période récente.

5.Le Comité prend note en l’appréciant de l’action menée par le Bureau du multiculturalisme, notamment la promotion de nombreux programmes et projets éducatifs pour les enfants appartenant aux minorités ethniques, en particulier les minorités roms/gitanes.

6.Le Comité prend note également avec satisfaction des différents mécanismes créés pour aider les personnes immigrant au Portugal, tels que l’Observatoire de l’immigration, la ligne «SOS‑immigrant» et les centres locaux et nationaux d’appui aux immigrants.

7.Le Comité prend note en outre avec satisfaction de l’interdiction, depuis la quatrième révision de la Constitution, frappant les organisations racistes (les organisations professant une idéologie fasciste étant déjà proscrites).

C. Sujets de préoccupation et recommandations

8.Le Comité constate l’absence de données statistiques sur la composition ethnique de la population en raison de la législation de l’État partie qui interdit la collecte de données et de statistiques portant sur la race et l’appartenance ethnique.

Le Comité est d’avis que, si l’on veut suivre les progrès accomplis dans l’élimination de la discrimination fondée sur la race, la couleur, l’ascendance et l’origine nationale ou ethnique, des indications doivent être données sur le nombre de personnes susceptibles de subir une discrimination pour ces motifs. Le Comité recommande donc à l’État partie, conformément au paragraphe 8 des principes directeurs concernant la présentation des rapports, de fournir des renseignements sur l’emploi de la langue maternelle en tant qu’indicateurs de différences ethniques, ainsi que des renseignements tirés d’enquêtes sociales non contraignantes et respectueuses de la vie privée et de l’anonymat des personnes concernées.

9.Tout en prenant note des efforts faits par l’État partie pour combattre la violence et la discrimination racistes, le Comité reste préoccupé de ce que les actes racistes et les activités d’incitation à la haine ainsi que l’intolérance et la discrimination de fait persistent, en particulier à l’encontre des minorités ethniques. En outre, le Comité est préoccupé par les activités du Parti national pour la rénovation, qui vise les immigrants dans ses manifestes et campagnes.

Le Comité recommande au Gouvernement de poursuivre et d’intensifier ses efforts en vue d’éliminer totalement l’incitation à la discrimination raciale et les actes de discrimination raciale. À cet égard, à la lumière de sa recommandation générale XXX, le Comité recommande à l’État partie d’incorporer dans son droit pénal une disposition établissant que le fait de commettre une infraction ayant un motif ou un but raciste constitue une circonstance aggravante. Le Comité souhaiterait en outre obtenir des informations plus détaillées sur la procédure applicable aux organisations considérées comme racistes et sur les autorités compétentes en la matière.

10.Le Comité est préoccupé par des allégations qui lui sont parvenues faisant état d’irrégularités policières à l’encontre de minorités ethniques ou de personnes d’origine non portugaise, notamment de l’emploi excessif de la force, de mauvais traitements et d’actes de violence.

Le Comité recommande à l’État partie d’instruire de façon approfondie, impartiale et efficace toutes les allégations faisant état de mauvais traitements, d’actes de violence ou de l’emploi excessif de la force par des fonctionnaires de police, de traduire les responsables devant la justice et de fournir des voies de recours et des réparations adéquates aux victimes. En outre, à la lumière de sa recommandation générale XIII, le Comité recommande à l’État partie de continuer de donner une formation intensive aux responsables de l’application des lois afin de veiller à ce qu’ils respectent et protègent la dignité humaine dans l’exercice de leurs fonctions et qu’ils maintiennent et défendent les droits de l’homme de toutes les personnes sans distinction de race, de couleur, d’ascendance ou d’origine nationale ou ethnique.

11.Le Comité note que les immigrants d’Europe centrale et orientale seraient plus aisément acceptés et intégrés dans la société portugaise que d’autres immigrants, en particulier les Africains. Le Comité craint que ce phénomène d’intégration «à deux vitesses» ne se traduise par une discrimination de fait contre certains groupes d’immigrants.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures possibles en vue de promouvoir et assurer la jouissance de chances égales de tous les immigrants du pays, quelle que soit leur origine.

12.Le Comité est préoccupé par l’isolement relatif de certains groupes d’immigrants et membres de minorités ethniques dans des quartiers ou zones marginalisés et par leur situation difficile quant aux conditions de logement.

Le Comité encourage l’État partie à continuer de prendre des mesures en vue d’éviter la marginalisation de certains groupes d’immigrants et membres de minorités ethniques dans des quartiers semblables à des ghettos et à garantir la jouissance égale du droit de tous à un logement adéquat.

13.Tout en notant les mesures prises par l’État partie pour améliorer la situation des Roms/Gitans, le Comité demeure préoccupé par les difficultés auxquelles sont confrontés de nombreux membres de cette communauté dans les domaines de l’emploi, du logement et de l’éducation, ainsi que par des discriminations qui se produiraient dans la vie quotidienne. En outre, le Comité invite l’État partie à tenir compte plus concrètement, dans tous les programmes et projets prévus ou mis en œuvre et dans toutes les mesures adoptées, de la situation des femmes roms/gitanes, qui sont souvent victimes d’une double discrimination.

Le Comité demande instamment à l’État partie de continuer de prendre des mesures spéciales, conformément au paragraphe 2 de l’article 2 de la Convention, en vue d’assurer une protection adéquate des Roms/Gitans et de promouvoir l’égalité des chances pour leur permettre d’exercer pleinement leurs droits économiques, sociaux et culturels.

14.Le Comité prend note des nouvelles règles relatives au regroupement familial, appliquées depuis la promulgation récente de nouvelles dispositions législatives régissant l’entrée, le séjour et le départ des étrangers et leur éloignement du territoire national.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures en vue de faciliter le regroupement familial des immigrants en situation régulière. En outre, il invite l’État partie à envisager de signer et de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et les membres de leur famille.

15.Le Comité est préoccupé de ce que l’appel formé pendant l’examen de la recevabilité d’une demande d’asile n’est pas suspensif, ce qui peut créer une situation irréversible même lorsque la décision des autorités administratives est ensuite annulée en appel.

Le Comité demande instamment à l’État partie de garantir le respect des protections juridiques des demandeurs d’asile et de veiller à ce que sa législation et ses procédures en matière d’asile soient conformes à ses obligations internationales dans ce domaine.

16.Le Comité recommande instamment à l’État partie de ratifier l’amendement au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adopté le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvé par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, le Comité appelle l’attention de l’État partie sur la résolution 57/194 de l’Assemblée générale, dans laquelle l’Assemblée a demandé instamment aux États parties de hâter leurs procédures internes de ratification de l’amendement et d’informer par écrit le Secrétaire général dans les meilleurs délais de leur acceptation de cet amendement. L’Assemblée générale a renouvelé cette demande dans sa résolution 58/160.

17.Le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il applique dans son ordre juridique interne les dispositions de la Convention, en particulier celles des articles 2 à 7, de tenir compte des passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, et d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les plans d’action et autres mesures adoptés pour appliquer cette déclaration et ce programme d’action au niveau national.

18.Le Comité encourage l’État partie à continuer de consulter les organisations de la société civile œuvrant dans le domaine de la lutte contre la discrimination raciale lors de l’élaboration de son prochain rapport périodique.

19.Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports périodiques aisément disponibles au public dès qu’ils sont soumis et de publier de la même manière les observations finales du Comité.

20.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre conjointement ses douzième et treizième rapports périodiques en un seul document, attendu le 23 septembre 2007, et d’y traiter tous les points soulevés dans les présentes observations finales.

-----