NATIONS UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/IDN/CO/22 juillet 2008

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTUREQuarantième sessionGenève, 28 avril‑16 mai 2008

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L ’ ARTICLE 19 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité contre la torture

INDONÉSIE

1.Le Comité contre la torture a examiné le deuxième rapport périodique de l’Indonésie (CAT/C/72/Add.1) à ses 820e et 823e séances, les 6 et 7 mai 2008 (CAT/C/SR.820 et CAT/C/SR.823), et a adopté à sa 833e séance, le 15 mai 2008 (CAT/C/SR.833), les observations finales ci‑après.

A. Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le deuxième rapport périodique de l’Indonésie qui, s’il suit généralement les directives du Comité pour la soumission des rapports, est dépourvu de données statistiques et de renseignements concrets sur l’application des dispositions de la Convention et de la législation interne pertinente.

3.Le Comité exprime ses remerciements pour les réponses écrites détaillées apportées à la liste des questions à traiter (CAT/C/IDN/Q/2). Il a également apprécié la compétence de la délégation nombreuse et de haut niveau, et le dialogue exhaustif et fructueux qu’il a eu avec les représentants de l’État partie ainsi que les renseignements supplémentaires donnés oralement par ceux‑ci aux questions posées et aux préoccupations exprimées pendant l’examen du rapport.

B. Aspects positifs

4.Le Comité accueille avec satisfaction l’action continue de l’État partie en vue de renforcer ses institutions et sa législation de façon à garantir la protection universelle des droits de l’homme, notamment la création de la Cour constitutionnelle, de la Commission juridique nationale, de la Commission judiciaire, du Bureau du médiateur, de la Commission des poursuites, de la Commission de la police et de la Commission de lutte contre la corruption, conformément aux articles 2 et 10 de la loi no 4 de 2004 relative à l’autorité judiciaire.

5.Le Comité accueille aussi avec satisfaction la réforme en cours du cadre législatif de l’État partie, avec l’adoption des textes ci‑après:

a)La loi no 21/2007 relative à la lutte contre les actes criminels de traite des personnes;

b)La loi no 13/2006 sur la protection des témoins et des victimes;

c)La loi no 39/2004 sur le placement et la protection des travailleurs migrants;

d)La loi no 23/2004 sur la violence dans la famille;

e)La loi no 23/2002 sur la protection de l’enfance;

f)Le décret présidentiel no 40/2004 sur le deuxième Plan national d’action relatif aux droits de l’homme (2004‑2009);

g)Le décret présidentiel no 87/2003 sur le Plan national d’action pour l’élimination de l’exploitation sexuelle des femmes et des enfants, le décret no 88/2002 sur le Plan national d’action visant à lutter contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales et le décret présidentiel no 59/2002 sur le Plan national d’action de lutte contre les pires formes du travail des enfants, ainsi que le règlement du Gouvernementno 9/2008 relatif aux procédures et méthodes pour l’intégration des services en faveur des témoins et des victimes de la traite de personnes.

6.Le Comité accueille avec satisfaction la ratification par l’Indonésie du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en 2006.

7.Le Comité relève également avec appréciation que l’Indonésie a donné une réponse positive à la recommandation qu’il lui avait faite d’accueillir le Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et qu’une visite a eu lieu en novembre 2007. Le Comité note en outre que le Gouvernement indonésien a accueilli d’autres rapporteurs spéciaux du Conseil des droits de l’homme, dont le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme des migrants, la Représentante spéciale du Secrétaire général concernant la situation des défenseurs des droits de l’homme et le Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats.

8.Le Comité note aussi avec satisfaction que des rapports spécifiques lui ont été adressés par la Commission nationale sur la violence à l’égard des femmes (Komnas Perempuan) et par la Commission nationale des droits de l’homme (Komnas HAM). Il regrette que cette dernière n’ait pas pu se faire représenter aux séances.

9.Le Comité accueille aussi avec satisfaction les efforts des organisations non gouvernementales, spécialement les organisations nationales et locales, qui lui ont adressé des rapports et des renseignements utiles et encourage l’État partie à renforcer encore sa coopération avec ces organisations en ce qui concerne l’application des dispositions de la Convention.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

Pratique généralisée de la torture et des mauvais traitements et insuffisance des garanties pendant la garde à vue

10.Le Comité est profondément préoccupé par le grand nombre d’allégations persistantes, crédibles et concordantes, confirmées par le Rapporteur spécial sur la question de la torture dans son rapport (A/HRC/7/3/Add.7) et par d’autres sources, faisant état de l’utilisation systématique et généralisée de la torture et des mauvais traitements sur les suspects en garde à vue, en particulier pour obtenir des aveux ou des renseignements qui seront versés à la procédure dans des affaires pénales. De plus, les garanties légales pour les détenus sont insuffisantes, ainsi:

a)Les détenus ne sont pas traduits sans délai devant un juge, ce qui fait qu’ils peuvent rester en garde à vue jusqu’à soixante et un jours;

b)Il n’existe pas d’enregistrement systématique de tous les détenus, y compris des mineurs, et il n’est pas tenu de registre pour toutes les périodes de détention avant jugement;

c)La possibilité de communiquer avec un avocat et de voir un médecin indépendant est limitée et les détenus ne sont pas informés de leurs droits quand ils sont placés en détention, notamment du droit de prendre contact avec leur famille (art. 2, 10 et 11).

À titre d ’ urgence, l ’ État partie devrait prendre des mesures immédiates pour empêcher la pratique de la torture et des mauvais traitements dans tout le pays, et annoncer une politique de tolérance zéro concernant tout mauvais traitement ou acte de torture de la part d ’ agents de l ’ État.

Dans le cadre de cette action, l ’ État partie devait mettre rapidement en œuvre des mesures efficaces afin de garantir que tous les suspects placés en détention bénéficient réellement de toutes les garanties fondamentales pendant la détention. Il s ’ agit en particulier du droit de bénéficier de l’assistance d ’ un avocat et d ’ être examiné par un médecin indépendant, d’aviser un proche et d ’ être informé de ses droits au moment du placement en détention, y compris du droit d ’ être informé des charges qui pèsent contre eux ainsi que du droit d ’ être déféré devant un juge dans un délai conforme aux normes internationales. L ’ État partie devrait également veiller à ce que tout suspect qui fait l ’ objet d ’ une enquête pénale soit inscrit sur un registre, en particulier s ’ il s ’ agit d ’ enfant s .

L ’ État partie devrait également renforcer ses programmes de formation à l ’ intention de tous les agents des forces de l ’ ordre ainsi que de tous les membres de l ’ appareil judiciaire et d es procureurs en ce qui concerne l ’ interdiction absolue de la torture, étant donné que la Convention lui fait obligation d ’ organiser une telle formation. De plus, il devrait exercer une surveillance systématique sur les règles, instructions, méthodes et pratiques d ’ interrogatoire en vue d ’ éviter tout cas de torture.

Emploi disproportionné de la force et pratique généralisée de la torture pendant les opérations militaires

11.Le Comité est également profondément préoccupé par le grand nombre d’allégations persistantes, crédibles et concordantes, confirmées par le Rapporteur spécial sur la question de la torture dans son rapport et par d’autres sources, faisant état de l’utilisation systématique et excessive de la force et de la pratique généralisée de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants par les membres des forces de sécurité et les forces de police, ainsi que par les membres des forces armées, des brigades mobiles («Brimob») et des groupes paramilitaires, pendant les opérations militaires et les opérations de«ratissage» en particulier en Papouasie, à Aceh et dans d’autres provinces qui ont été le théâtre de conflits armés (art. 2, 10 et 11).

L ’ État partie devrait prendre sans délai toutes les mesures nécessaires pour empêcher les forces de sécurité et les forces de police d’utiliser une force excessive et de pratiquer la torture pendant les opérations militaires, en particulier sur la personne d’enfants.

L’État partie devrait mettre sans délai en œuvre des mesures efficaces pour garantir que toutes les personnes en détention bénéficient de toutes les garanties fondamentales. En particulier, il faudrait organiser des programmes de formation à l’intention de tous les personnels militaires au sujet de l’interdiction absolue de la torture. L’État partie devrait également faire en sorte que toutes les personnes détenues pendant des opérations militaires soient toujours enregistrées.

Impunité

12.Le Comité note avec une vive inquiétude que les allégations crédibles faisant état d’actes de torture et de mauvais traitements imputés à des membres de forces de l’ordre, des forces armées et des services du renseignement font rarement l’objet d’enquêtes et de poursuites et que les auteurs sont rarement condamnés ou, quand ils le sont, sont condamnés à des peines légères qui ne sont pas en rapport avec la gravité de leurs crimes. Le Comité se déclare de nouveau sérieusement préoccupé par le climat d’impunité qui règne en faveur des auteurs d’actes de torture, notamment des membres des forces armées, de la police et d’autres corps de l’État, en particulier ceux qui occupent des positions élevées, qui auraient planifié, ordonné ou perpétré des actes de torture. Il note avec regret qu’aucun agent de l’État présumé avoir commis un acte de torture n’a été reconnu coupable, comme le confirme le Rapporteur spécial sur la question de la torture (art. 2 et 12).

L ’ État partie devrait faire en sorte que toutes les allégations d’actes de torture ou de mauvais traitements fassent l’objet d’enquêtes immédiates, effectives et impartiales et que leurs auteurs soient poursuivis et condamnés en fonction de la gravité de leurs actes, comme l’exige la Convention.

Eu égard à l’engagement réaffirmé par l’État partie lors de l’Examen périodique universel de lutter contre l’impunité (A/HRC/WG.6/1/IDN/4, par. 76.4), les autorités devraient annoncer publiquement une politique de tolérance zéro pour les auteurs d’actes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants et appuyer les poursuites.

Définition de la torture et peines appropriées pour les actes de torture

13.Le Comité note que l’État partie reconnaît qu’il n’existe pas de texte législatif couvrant la définition de la torture telle qu’elle figure à l’article premier de la Convention mais il reste préoccupé par le fait que le Code pénal indonésien ne contient pas de définition de la torture et que le crime de torture, tel qu’il est défini à l’article premier (sect. 4) de la loi no 39/1999 relative aux droits de l’homme et à l’article 9 (al. f) de la loi no 26/2000 portant création des tribunaux des droits de l’homme est limité, de sorte qu’elle ne s’applique qu’aux «violations flagrantes des droits de l’homme». Aucun auteur d’actes de torture n’a été condamné en vertu de ces lois. Le Comité s’inquiète également de l’absence dans le Code pénal de dispositions prévoyant des peines appropriées applicables aux actes de torture, qualifiés de «mauvais traitements» aux articles 351 à 358 (art. 1er et 4).

Le Comité réitère s es recommandations précédentes et celles formulées par le Rapporteur spécial sur la question de la torture à l’issue de sa visite en Indonésie, et recommande à l’État partie d’introduire sans délai une définition de la torture dans sa législation pénale actuelle, qui soit entièrement conforme à l’article premier de la Convention. Deux possibilités peuvent être étudiées: a) l’adoption rapide d’un projet de Code pénal complet et b) l’adoption d’un projet de loi autonome, spécifiquement consacré à l’infraction de torture, étant donné que l’État partie a déjà adopté d’autres lois autonomes dans le domaine des droits de l’homme comme les textes que le Comité a relevés avec satisfaction au paragraphe 5.

L’État partie devrait faire en sorte que tous les actes de torture soient passibles de peines appropriées qui prennent en considération leur gravité, comme le prévoit le paragraphe 2 de l’article 4 de la Convention.

Aveux sous la contrainte

14.Le Comité est préoccupé par le fait que le système d’enquête actuellement en vigueur dans l’État partie admette les aveux comme forme courante de preuve aux fins de poursuites, ce qui crée des conditions qui peuvent favoriser l’utilisation de la torture et des mauvais traitements sur la personne du suspect. Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas suffisamment expliqué les dispositions législatives qui garantissent que toute déclaration qui peut avoir été faite sous la torture ne soit pas acceptée comme preuve dans toute procédure, comme l’exige la Convention, et regrette aussi qu’il n’ait pas donné de renseignements statistiques au sujet de ces affaires (art. 15).

L’État partie devrait prendre les mesures nécessaires pour garantir que les condamnations pénales soient prononcées sur la foi de preuves autres que les aveux de l’inculpé et pour garantir que les déclarations qui ont été faites sous la torture ne soient pas invoquées comme un élément de preuve dans une procédure, si ce n’est contre la personne accusée de torture, conformément aux dispositions de la Convention.

L’État partie est engagé à passer en revue les condamnations pénales prononcées exclusivement sur la foi d’aveux afin d’identifier les cas dans lesquels la condamnation irrégulière fondée sur des aveux obtenus par la torture ou des mauvais traitements, à prendre des mesures correctives appropriées et à informer le Comité de ses conclusions.

Règlements locaux et violations de la Convention

15.Le Comité relève avec une vive préoccupation que des règlements locaux, comme le Code pénal de la province d’Aceh adopté en 2005, ont introduit des châtiments corporels pour certaines nouvelles infractions. Il s’inquiète de ce que l’application de ces dispositions relève de l’autorité d’une «police des mœurs», la Wilayatul Hisbah, qui exerce une compétence non définie et dont le contrôle par les institutions publiques de l’État est peu clair. En outre, le Comité note avec préoccupation que les garanties fondamentales nécessaires n’existent pas pour les personnes arrêtées par les membres de cette police, notamment l’absence de droit à l’assistance d’un conseil, la manifeste présomption de culpabilité, l’exécution de la peine en public et l’utilisation de méthodes physiquement douloureuses (comme les coups de fouet ou de canne) qui sont contraires à la Convention et à la législation nationale. De plus, il est signalé que les peines infligées par cet organe de police touchent de façon disproportionnée les femmes (art. 2 et 16).

L’État partie devrait revoir tous les textes législatifs en matière pénale, nationaux et locaux, en particulier le Code pénal d’Aceh de 2005, qui autorisent l’application de châtiments corporels à titre de sanction pénale, en vue de les abroger immédiatement étant donné que de telles peines constituent un manquement aux obligations inscrites dans la Convention. De plus, un tel organe de police compromet l’application des dispositions de la loi n o  22/1999 sur l’autonomie régionale et de la loi n o  23/2004 relative au gouvernement local, qui disposent que les domaines de la loi, de la religion et de la sécurité restent sous l’autorité du gouvernement central.

L’État partie devrait aussi faire en sorte que les membres de la Wilayatul Hisbah exercent une compétence bien définie, reçoivent une formation appropriée et agissent dans le respect des dispositions de la Convention, en particulier en ce qui concerne l’interdiction de la torture et des mauvais traitements, et que leurs actes soient soumis à un contrôle des autorités judiciaires ordinaires. Les institutions de l’État devraient exercer leur contrôle sur les actions de la Wilayatul Hisbah et veiller à ce que les garanties fondamentales s’appliquent à toutes les personnes accusées d’atteintes dans des matières qui relèvent de sa compétence. L’État partie devrait de plus mettre en place un mécanisme d’aide juridictionnelle afin d’assurer à toute personne un droit opposable à l’assistance d’un avocat et d’autres garanties d’une procédure équitable, de façon que tous les suspects aient la possibilité de se défendre et de porter plainte en cas de traitements attentatoires aux dispositions de la législation nationale et à la Convention.

L’État partie devrait étudier, par l’intermédiaire de ses institutions compétentes, notamment des autorités gouvernementales et judiciaires à tous les niveaux, tous les règlements locaux, afin de vérifier qu’ils sont conformes à la Constitution et aux instruments internationaux auxquels il est partie, en particulier la Convention.

Violences contre les femmes, violences sexuelles et violences dans la famille

16.Le Comité est préoccupé par les informations faisant état d’une incidence élevée des viols dans les zones de conflits, commis par les membres des forces armées comme une forme de torture et de mauvais traitements, et par le fait qu’aucune enquête n’est ouverte sur de tels actes et que leurs auteurs ne sont pas poursuivis et condamnés. De plus, le Comité note avec préoccupation la définition étroite du viol donnée dans le Code pénal et l’obligation en matière de preuve faite au paragraphe 2 de l’article 185 du Code de procédure pénale qui impose qu’une plainte pour viol doit être confirmée par deux témoins. Le Comité prend note de l’adoption de la loi no 23/2004 relative à la violence dans la famille mais il est toujours préoccupé par l’incidence élevée de violences familiales signalées dans l’État partie, par l’absence de règlement pour mettre en œuvre les dispositions de la loi, par la connaissance et la formation insuffisantes des agents des forces de l’ordre et par l’insuffisance des fonds alloués par le Gouvernement pour appuyer le nouveau système ainsi que par l’absence de données statistiques sur le phénomène. En outre, le Comité a pris note des renseignements donnés par la délégation au sujet des mutilations génitales féminines et demeure sérieusement préoccupé par le fait qu’elles soient largement pratiquées dans l’État partie (art. 16).

L’État partie devrait faire en sorte que des enquêtes immédiates, impartiales et effectives soient menées sur toutes les plaintes pour viol et violences sexuelles, y compris quand les faits ont eu lieu dans les zones de conflit armé, et veiller à ce que les auteurs soient poursuivis et sanctionnés par des peines proportionnées à la gravité de leurs actes. L’État partie devrait abroger sans délai toutes les dispositions législatives discriminatoires à l’égard des femmes, notamment le paragraphe 2 de l’article 185 du Code de procédure pénale.

L’État partie devrait adopter toutes les mesures voulues pour éradiquer la pratique des mutilations génitales féminines, notamment par des campagnes de sensibilisation menées en coopération avec les organisations de la société civile.

L’État partie devrait adopter toutes les mesures nécessaires pour assurer la mise en œuvre de la loi n o  23/2004, qui prévoit la formation des agents des forces de l’ordre, en particulier en coopération avec les organisations de la société civile, allouer les ressources financières suffisantes et recueillir des renseignements pertinents en vue de prévenir et de combattre la violence dans la famille.

Système de justice des mineurs

17.Le Comité prend note de l’intention de l’État partie de porter à 12 ans l’âge minimal de la responsabilité pénale, mais il est vivement préoccupé de ce qu’il soit toujours fixé à 8 ans, de ce que les enfants en détention ne soient pas totalement séparés des adultes, de ce qu’un grand nombre d’enfants soient condamnés à l’emprisonnement pour des délits mineurs et de ce que les châtiments corporels soient licites et fréquemment appliqués dans les établissements pénitentiaires pour mineurs, comme la prison de Kutoarjo. Le Comité est également préoccupé par l’absence d’un système de justice des mineurs complet, axé sur l’éducation et la socialisation des enfants en conflit avec la loi. De plus, il n’existe pas de protection adéquate des enfants des rues contre la violence (art. 2 et 16).

L’État partie devrait relever d’urgence l’âge minimal de la responsabilité pénale afin de le mettre en conformité avec les normes internationales généralement acceptées dans ce domaine et abolir tout châtiment corporel sur les enfants.

L’État partie devrait prendre les mesures nécessaires pour assurer le bon fonctionnement d’un système de justice des mineurs notamment, entre autres mesures, en traitant les mineurs d’une façon appropriée à leur âge, conformément à l’Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing), aux Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad) et aux Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté.

Personnes déplacées à l’intérieur du pays

18.Le Comité est préoccupé par la situation des réfugiés et des personnes déplacées à la suite du conflit armé, spécialement des enfants qui vivent dans des camps de réfugiés, comme les enfants timorais séparés de leur famille, qui sont souvent l’objet de mauvais traitements (art. 14 et 16).

L’État partie devrait prendre des mesures efficaces pour empêcher la violence dont sont l’objet les réfugiés et les personnes déplacées, spécialement les enfants, qui devraient être enregistrés à la naissance et en faveur desquels des mesures devraient être prises pour empêcher qu’ils ne soient employés dans le conflit armé. L’État partie devrait également renforcer les mesures prises pour assurer le rapatriement, et la réinstallation, en toute sécurité, de tous les réfugiés et personnes déplacées, en coopération avec l’Organisation des Nations Unies .

Violences contre les Ahmadis et les personnes appartenant à d’autres minorités

19.Le Comité est préoccupé par les incitations à la violence et les actes de violence à l’encontre de personnes appartenant à des minorités, en particulier la minorité ahmadie et d’autres communautés religieuses minoritaires. De plus, des informations inquiétantes et persistantes signalent l’absence systématique d’enquêtes sur ces violences et l’absence de volonté de la part de la police et des autorités pour assurer aux Ahmadis la protection voulue ou pour mener des enquêtes rapides, impartiales et effectives sur de tels actes. Le Comité est particulièrement préoccupé par le fait que le Procureur général a annoncé des plans visant à rendre public un décret ministériel commun qui tendra à criminaliser les activités des Ahmadis. Le Comité note avec préoccupation, dans le rapport de la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction, l’intention de l’État partie d’interdire les activités des Ahmadis (E/CN.4/2006/5/Add.1, par. 163); il rappelle l’opinion de la Rapporteuse spéciale qui souligne qu’«il n’y a aucune excuse pour justifier l’usage de la violence» contre les membres de cette communauté. Le Comité relève avec une préoccupation particulière que les autorités de l’État partie qui peuvent autoriser un décret interdisant les Ahmadis, ce qui expose les membres de cette communauté à un risque accru de mauvais traitements et de violences physiques, expriment également l’idée que les Ahmadis doivent s’abstenir de «provoquer» les membres de la communauté, rejetant en fait le blâme sur le groupe menacé (art. 2, 12 et 16).

À la lumière de l ’ Observation générale n o  2 du Comité ( CAT/C/GC/2 , par. 21 ) , l ’ État partie devrait assurer la protection des membres de groupes qui sont particulièrement exposés au risque de mauvais traitements, en engageant des poursuites pour tout acte de violence et d’atteinte contre ces individus et en punissant leurs auteurs, et en faisant en sorte que des mesures positives de prévention et de protection soient appliquées.

L ’ État partie devrait faire en sorte que des enquêtes rapides, impartiales et effectives soient menées sur tous les cas de violences et de discrimination motivés par l’origine ethnique de la victime, notamment les actes dirigés contre des personnes appartenant à des minorités ethniques et religieuses, et pour engager des poursuites contre les auteurs et les sanctionner par des peines en rapport avec la nature des actes.

L’État partie devrait également condamner publiquement l’incitation à la haine et les crimes et autres actes violents de discrimination raciale et de violence apparentée et devrait travailler à obtenir que les responsables publics ou les agents des forces de l’ordre n’incitent pas à la haine et ne jouent aucun rôle en acceptant ou tolérant cette violence. Il devrait faire en sorte que les agents de l’État soient tenus de rendre compte de leurs actions ou omissions constituant des violations de la Convention.

L’État partie devrait envisager rapidement de recruter dans les forces de l’ordre des personnes appartenant à des minorités ethniques ou nationales et de donner une réponse favorable à la demande de visite de la Rapporteu se spécial e sur la liberté de religion ou de conviction.

Trafic et violence dont sont l’objet les travailleurs migrants

20.Le Comité prend note de l’adoption de la loi no 21/2007 sur la traite des êtres humains, mais il est toujours préoccupé par le chiffre estimatif élevé donné par l’État partie des victimes de trafic, par rapport au petit nombre d’enquêtes ouvertes sur de telles affaires, et par l’absence d’informations sur les poursuites et les condamnations éventuelles.

Le Comité est également préoccupé par les cas de mauvais traitements de travailleurs migrants qui lui sont signalés, spécialement de femmes qui seraient trompées par des agences de recrutement indonésiennes, ce qui les met fréquemment dans des situations qui portent atteinte à l’exercice de leurs droits fondamentaux quand elles sont à l’étranger, où elles subissent notamment la servitude pour dette, le travail servile et d’autres mauvais traitements, y compris des atteintes sexuelles (art. 16).

L’État partie devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre en œuvre les dispositions législatives qui visent à lutter contre la traite et pour assurer aux victimes une protection et l’accès à des services médicaux et sociaux, à des services de réinsertion sociale et à des services juridiques, y compris des services de conseils, le cas échéant. L’État partie devrait également créer les conditions de nature à permettre aux victimes d’exercer leur droit de porter plainte, mener des enquêtes rapides, impartiales et effectives sur tous les cas signalés de trafic et faire en sorte que les responsables soient traduits en justice et sanctionnés par des peines en rapport avec la nature de leurs crimes.

L’État partie est vivement encouragé à renforcer le rôle de ses missions diplomatiques et consulaires à l’étranger, conformément à l’Instruction présidentielle n o  6/2006, qui intensifie les services consultatifs pour les citoyens, et à resserrer sa coopération avec les pays qui accueillent des travailleurs migrants indonésiens. L’État partie devrait mettre en place un système indépendant de surveillance du terminal 3 de l’aéroport international de Jakarta, en associant les organisations de la société civile.

Harcèlement et violence contre les défenseurs des droits de l’homme

21.Le Comité est préoccupé par les renseignements faisant état de cas courants et systématiques de harcèlement et de violence contre les défenseurs des droits de l’homme, corroborés par la Représentante spéciale du Secrétaire général concernant la situation des défenseurs des droits de l’homme dans son rapport sur sa visite en Indonésie, en juin 2007 (A/HRC/7/28/Add.2). De telles actions entravent gravement la capacité de fonctionnement des groupes de la société civile qui surveillent la situation.

Le Comité relève avec satisfaction l’arrêt de la Cour suprême, en date du 25 janvier 2008, reconnaissant un individu coupable du meurtre de Munir Said Thalib et le condamnant à un emprisonnement de vingt ans mais regrette que les instigateurs de ce crime n’aient pas encore été traduits en justice (art. 16).

L’État partie devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que toutes les personnes, notamment celles qui surveillent la situation des droits de l’homme, soient protégées contre tout acte d’intimidation ou de violence du fait de leurs activités et de l’exercice des garanties des droits de l’homme, et veiller à ce que de tels actes fassent l’objet d’une enquête immédiate, impartiale et effective.

Administration de la justice et appareil judiciaire

22.Le Comité est préoccupé par le grand nombre d’allégations détaillées, corroborées dans son rapport par le Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats (E/CN.4/2003/65/Add.2) et par d’autres sources, faisant état de la corruption de l’administration de la justice, en particulier au sein de l’appareil judiciaire, et de la collusion et du népotisme dans les services du procureur, ainsi qu’avec des membres de la profession judiciaire insuffisamment réglementée (art. 2 et 12).

En poursuivant son processus de transition vers un régime démocratique attaché à la défense de la primauté du droit et des droits fondamentaux, l’État partie devrait renforcer l’indépendance de l’appareil judiciaire, prévenir et combattre la corruption, la collusion et le népotisme dans l’administration de la justice, et réglementer la profession judiciaire.

Tribunaux des droits de l’homme et tribunaux des droits de l’homme spéciaux

23.Le Comité est inquiet de constater que les tribunaux des droits de l’homme, y compris les tribunaux spéciaux qui ont été mis en place pour traiter «spécifiquement des violations flagrantes des droits de l’homme», dont la torture, le génocide et les crimes contre l’humanité, conformément à la loi no 26/2000, n’ont pas été en mesure d’obtenir la condamnation d’un seul des responsables présumés des violations flagrantes des droits de l’homme commises dans les affaires du Tanjung Priok (1984), du Timor oriental (1999) et d’Abepura (2000), en particulier maintenant que la Cour suprême a acquitté Eurico Guterres (art. 2, 6 et 12).

L’État partie devrait envisager de modifier sa législation relative aux tribunaux des droits de l’homme puisque ceux ‑ci ont de grandes difficultés à s’acquitter de leur mandat judiciaire, ce qui a conduit à une impunité de fait pour les auteurs de violations flagrantes des droits de l’homme.

Commission nationale des droits de l’homme

24.Le Comité demeure préoccupé par les difficultés que la Commission nationale des droits de l’homme (Kom n as HAM) a rencontrées pour s’acquitter de ses fonctions, en raison en partie du manque de coopération d’autres institutions de l’État partie, par le fait que les fonctionnaires de l’État ne publient pas les rapports sur ses enquêtes, par l’impossibilité dans laquelle elle se trouve de contester une décision du Procureur général de ne pas engager de poursuites dans une affaire, ainsi que par l’absence de sécurité dans leur poste de ses membres. Étant donné que, en vertu de la loi no 26/2000, la Kom n as HAM a la responsabilité exclusive de mener les enquêtes préliminaires sur les «violations flagrantes des droits de l’homme», y compris les cas de torture, ces limites peuvent entraver les efforts visant poursuivre les auteurs d’actes de torture. Le Comité est préoccupé par le fait que les membres du Gouvernement ont déclaré que les responsables militaires devaient ignorer les convocations adressées par la Kom n as HAM dans le cadre de ses enquêtes sur les violations flagrantes des droits de l’homme, comme dans l’affaire de la tuerie de Talangsari dans la province de Lampung (art. 2 et 12).

L’État partie devrait garantir le fonctionnement efficace de la Kom n as HAM en adoptant les mesures voulues, notamment en augmentant son indépendance, ses compétences et ses ressources, en améliorant ses procédures et en renforçant l’indépendance et la sécurité de ses membres. Les membres du Gouvernement et les autres agents d’État de haut rang devraient coopérer sans réserve avec la Kom n as HAM .

Absence d’enquêtes et de poursuites effectives par le Procureur général

25.Le Comité note avec préoccupation que les services du Procureur général ne mènent pas immédiatement des enquêtes impartiales et effectives sur les allégations de torture et de mauvais traitements, même dans les affaires qui lui sont renvoyées par la Commission nationale des droits de l’homme (Komnas HAM), comme l’affaire de Wasior, l’affaire des disparitions forcées de Wamena (1997/1998) ou dans les affaires de Trisakti, Semanggi I et Semanggi II (art. 12).

L’État partie devrait procéder à une réforme des services du Procureur général de façon à garantir qu’il engage des poursuites pénales dans les cas signalés de torture et de mauvais traitements, en toute indépendance et impartialité. De plus, l’État partie devrait établir un mécanisme de contrôle efficace et indépendant afin que toutes les allégations dénonçant des actes de torture ou des mauvais traitements fassent immédiatement l’objet d’une enquête impartiale et effective. Il devrait également rendre publics sans retard les rapports d’enquête de la Komnas HAM .

Surveillance des lieux de détention et mécanismes de prévention

26.Le Comité est préoccupé par le fait qu’il n’existe pas de mécanisme indépendant effectif de surveillance de la situation des détenus pouvant effectuer des visites inopinées dans tous les lieux de détention ou de garde. Il craint en outre que le transfert aux autorités locales de l’exercice de différentes fonctions de contrôle de cette nature auquel l’État partie a l’intention de procéder n’aboutisse à des degrés de surveillance des lieux de détention différents selon les régions (art. 2).

L’État partie devrait arrêter des normes cohérentes et complètes pour assurer la surveillance indépendante de tous les lieux de détention, garantissant que tout organe qui pourrait être créé, au niveau national ou au niveau local, ait un mandat solide et impartial et les ressources suffisantes.

Coopération judiciaire internationale

27.Le Comité note avec préoccupation que l’État partie ne participe pas à la coopération judiciaire internationale dans les enquêtes, les poursuites ou l’extradition des auteurs de violations graves des droits de l’homme, en particulier en ce qui concerne les actes perpétrés au Timor oriental en 1999. De plus, il est profondément préoccupé par les informations montrant que les responsables présumés de crimes de guerre recherchés par Interpol, comme le colonel Siagian Burhanuddhin, pour lequel Interpol a lancé un avis de recherche international, sert actuellement dans les Forces armées indonésiennes. Le Comité regrette le refus de l’État partie de donner des renseignements sur les résultats de sa coopération avec l’Organisation des Nations Unies et les institutions timoraises, d’autant plus qu’il lui avait déjà recommandé de coopérer pleinement avec ces institutions dans ses précédentes observations finales. Le Comité est également inquiet de voir que la Commission pour la vérité et l’amitié entre l’Indonésie et le Timor‑Leste a pour mandat de recommander l’amnistie même dans le cas des personnes impliquées dans des violations graves des droits de l’homme (art. 5, 6, 7, 8 et 9).

L’État partie devrait coopérer entièrement avec les institutions timoraises, les institutions des Nations Unies et d’autres institutions internationales compétentes, en particulier en apportant son concours aux enquêtes ou aux procédures judiciaires, ce qui suppose d’accorder un accès sans réserve aux dossiers, d’autoriser des visites et de transférer les suspects recherchés par Interpol ou par d’autres organes dûment autorisés. L’État partie devrait procéder activement à des enquêtes et faire arrêter les personnes soupçonnées de violations des droits de l’homme, qui devraient être soit extradées soit jugées dans l’État partie.

L’État partie ne devrait pas mettre en place un mécanisme de réconciliation quelconque qui encourage l’amnistie en faveur des auteurs d’actes de torture, de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité, ni participer à un tel mécanisme.

Non ‑refoulement et risque de torture (art. 3)

28.Le Comité note avec préoccupation que l’État partie n’explique pas comment il assure dans sa législation nationale ou dans la pratique le respect de l’interdiction de renvoyer une personne dans un pays où elle court un risque réel d’être soumise à la torture, et par conséquent comment il garantit que ses obligations en vertu de l’article 3 de la Convention sont bien honorées (art. 3).

L’État partie ne devrait en aucune circonstance expulser, renvoyer ou extrader une personne vers un État où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture.

Pour déterminer si les obligations qui lui incombent en vertu de l’article 3 de la Convention s’appliquent, l’État partie devrait examiner minutieusement, sur le fond, chaque cas particulier, et s’assurer qu’il existe des dispositifs judiciaires adéquats pour réexaminer la décision, que toute personne qui fait l’objet d’une demande d’extradition dispose des moyens de défense suffisants et qu’il existe des arrangements effectifs pour suivre la situation de l’intéressé après son retour.

L’État partie devrait adopter des dispositions législatives appropriées pour incorporer dans son droit interne l’obligation qui découle de l’article 3 de la Convention, empêchant ainsi quiconque d’être expulsé, renvoyé ou extradé vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu’il risque d’être soumis à la torture.

Compétence universelle

29.Le Comité regrette l’absence de clarté et de renseignements au sujet de l’existence des mesures législatives nécessaires pour établir la compétence de l’État partie aux fins de connaître des infractions de torture (art. 5, 6, 7 et 8).

L’État partie devrait établir sa compétence aux fins de connaître des actes de torture quand l’auteur présumé de l’infraction se trouve sur tout territoire sous sa juridiction, que ce soit pour l’extrader ou pour le poursuivre, conformément aux dispositions de la Convention.

Commission pour la vérité et la réconciliation

30.Le Comité donne acte de ce que la Cour constitutionnelle a abrogé la loi no 27/2004 sur la Commission pour la vérité et la réconciliation parce qu’elle aurait approuvé l’amnistie pour des faits qui ne peuvent pas être amnistiés. Néanmoins, le Comité demeure préoccupé par le mandat de la commission qu’il est prévu de créer, tel qu’il est exposé dans les réponses de l’État partie à la liste des questions du Comité (art. 2, 12 et 14).

L’État partie devrait étudier avec attention le mandat de la future commission pour la vérité et la réconciliation, à la lumière d’autres expériences internationales analogues et conformément à ses obligations en vertu de la Convention. Une telle commission devrait notamment être habilitée à mener des enquêtes sur les violations flagrantes des droits de l’homme et à ordonner l’indemnisation des victimes, tout en proscrivant l’amnistie en faveur des auteurs d’actes de torture.

Protection des témoins et des victimes

31.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption de la loi no 13/2006 sur la protection des témoins et des victimes mais il continue d’être préoccupé par l’absence de règlements d’application, par le traitement inadéquat des témoins et des victimes et par l’insuffisance de la formation des agents chargés de faire appliquer la loi et des fonds alloués par le Gouvernement pour appuyer le nouveau système (art. 12, 13 et 14).

L’État partie devrait établir sans retard un organe de protection des témoins et des victimes, avec toutes les mesures nécessaires pour mettre en œuvre la loi n o 13/2006, notamment l’octroi du financement nécessaire pour le fonctionnement de ce nouveau système, la formation adéquate des agents des forces de l’ordre, particulièrement en coopération avec les organisations de la société civile, ainsi qu’un nombre équilibré d’hommes et de femmes composant cet organe.

Indemnisation et réadaptation

32.Le Comité note avec préoccupation que les victimes de torture et de traitements cruels, inhumains ou dégradants ne sont pas indemnisées et qu’il n’existe que peu de mesures de réadaptation pour les victimes de torture, de mauvais traitements, de trafic, de violence dans la famille et de violences sexuelles (art. 14).

L’État partie devrait faire en sorte que les victimes de torture et de mauvais traitements reçoivent une indemnisation adéquate et que des programmes de réadaptation soient organisés à l’intention de toutes les victimes d’actes de torture, de mauvais traitements, de trafic, de violence dans la famille ou de violences sexuelles, prévoyant notamment une assistance médicale et psychologique.

Aide juridictionnelle

33.Le Comité relève avec préoccupation les difficultés rencontrées par des personnes, y compris des personnes appartenant à des groupes vulnérables, pour exercer leur droit de porter plainte, d’obtenir réparation et d’être indemnisées équitablement et de manière adéquate en tant que victime d’actes de torture (art. 13 et 14).

L’État partie devrait prendre des mesures pour mettre en place un régime d’aide juridictionnelle gratuite effectif, en particulier à l’intention des personnes en situation de risque ou appartenant à des groupes mis en situation de vulnérabilité. Il devrait doter ce système de ressources suffisantes afin que toutes les victimes d’actes de torture et de mauvais traitements puissent exercer les droits consacrés dans la Convention.

Formation dans le domaine des droits de l’homme

34.Le Comité donne acte des divers programmes et manuels établis par l’État partie mais il regrette l’insuffisance de la formation concernant les dispositions de la Convention donnée aux personnels des forces de l’ordre, des forces armées et des organismes de sécurité ainsi qu’aux juges et procureurs. Il note aussi avec préoccupation qu’il n’existe pas de formation spécifique pour le personnel médical exerçant dans les centres de détention afin de leur permettre de détecter les signes de torture et de mauvais traitements (art. 10 et 11).

L’État partie devrait renforcer les programmes de formation à l’intention de l’ensemble des personnels des forces armées et des forces de l’ordre en ce qui concerne l’interdiction absolue de la torture, ainsi qu’à l’intention des juges et des procureurs en ce qui concerne les obligations spécifiques qui découlent de la Convention.

L’État partie devrait aussi faire en sorte que tout le personnel médical qui s’occupe de détenus reçoive une formation leur permettant de détecter les signes de torture et de mauvais traitements, conformément aux normes internationales telles qu’elles sont énoncées dans le Protocole d’Istanbul.

Collecte de données

35.Le Comité regrette l’absence de données détaillées et ventilées sur les plaintes, les enquêtes, les poursuites et les condamnations dans des affaires de torture et de mauvais traitements imputés à des agents de la force publique et à des membres des forces armées, ainsi que sur la traite d’êtres humains, les disparitions forcées, les déplacements de personnes à l’intérieur du pays, la violence contre les enfants, les mauvais traitements subis par les travailleurs migrants, les actes de violence contre les minorités, la violence dans la famille et les violences sexuelles.

L’État partie devrait rassembler des données statistiques intéressantes pour la surveillance de l’application de la Convention au plan national, notamment sur les plaintes, les enquêtes, les poursuites et les condamnations portant sur les affaires de torture et de mauvais traitements, la traite, les disparitions forcées, les déplacements de personnes à l’intérieur du pays, la violence contre les enfants, les mauvais traitements subis par les travailleurs migrants, les actes de violence contre les minorités, la violence dans la famille et les violences sexuelles, tout spécialement dans les zones de conflit armé, ainsi que sur l’indemnisation et la réadaptation assurées aux victimes.

36.Le Comité encourage l’État partie à donner effet aux recommandations figurant dans le rapport du Rapporteur spécial sur la question de la torture à l’issue de sa visite dans le pays, en novembre 2007 (A/HRC/7/3/Add.7), dans le rapport du Rapporteur spécial sur les droits de l’homme des migrants sur sa visite de décembre 2006 (A/HRC/4/24/Add.3), du rapport de la Représentante spéciale du Secrétaire général concernant la situation des défenseurs des droits de l’homme sur sa visite de juin 2007 (A/HRC/7/28/Add.2) et dans le rapport du Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats sur sa visite de juillet 2002 (E/CN.4/2003/65/Add.2).

37.Le Comité encourage aussi l’État partie à envisager de faire la déclaration prévue à l’article 22 de la Convention, par laquelle il reconnaîtrait la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications émanant de particuliers.

38.Le Comité recommande de nouveau à l’État partie d’envisager de retirer les réserves et les déclarations qu’il a formulées à l’égard de la Convention.

39.Étant donné que l’Indonésie s’est engagée à ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention d’ici à 2009, comme il est annoncé dans son deuxième plan national d’action sur les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de mettre en place un mécanisme national de prévention.

40.L’État partie devrait envisager de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, instrument fondamental des Nations Unies relatif aux droits de l’homme auquel il n’est pas encore partie.

41.L’État partie devrait diffuser largement son rapport, ses réponses à la liste des questions à traiter, les comptes rendus analytiques des séances et les présentes observations finales, par le biais des sites Web officiels et des médias, en particulier aux groupes mis en situation de vulnérabilité.

42.Le Comité invite l’État partie à soumettre son document de base commun en suivant les directives harmonisées concernant l’établissement de rapports, selon les recommandations des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (HRI/MC/2006/3 et Corr.1).

43.Le Comité demande à l’État partie de lui faire parvenir, dans un délai d’un an, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations formulées aux paragraphes 10, 15, 19, 20, 21 et 25.

44.L’État partie est invité à faire parvenir son prochain rapport périodique, qui sera son troisième rapport, avant le 30 juin 2012.

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