NATIONS UNIES

CCPR

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr.GÉNÉRALE

CCPR/C/DNK/CO/527 novembre 2008

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMMEQuatre-vingt-quatorzième sessionGenève, 13‑31 octobre 2008

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 40 DU PACTE

Observations finales du Comité des droits de l’homme

DANEMARK

1.Le Comité des droits de l’homme a examiné le cinquième rapport périodique du Danemark (CCPR/C/DNK/5) à ses 2570e et 2571e séances (CCPR/C/SR.2570 et 2571), les 13 et 14 octobre 2008, et a adopté les observations finales ci-après à sa 2591e séance (CCPR/C/SR.2591), le 28 octobre 2008.

A. Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le cinquième rapport périodique du Danemark, qui contient des renseignements détaillés sur les mesures adoptées pour tenir compte des préoccupations formulées dans les observations finales précédentes (CCPR/CO/70/DNK), ainsi que les réponses écrites à la liste des points à traiter (CCPR/C/DNK/Q/5/Add.1).

3.Le Comité se félicite du dialogue qu’il a eu avec la délégation de l’État partie, qui comprenait des experts de ministères responsables de l’application du Pacte.

B. Aspects positifs

4.Le Comité accueille avec satisfaction les nombreuses mesures d’ordre législatif, administratif et de politique générale adoptées depuis l’examen du quatrième rapport périodique en vue d’améliorer la promotion et la protection des droits de l’homme, et notamment:

a)L’adoption de la loi sur l’égalité de traitement ethnique et le plan d’action visant à promouvoir l’égalité de traitement et la diversité et à lutter contre le racisme;

b)L’introduction dans le Code pénal d’un article spécialement consacré à la torture qui dispose notamment que la responsabilité pénale pour les actes de torture n’est plus soumise à la prescription;

c)L’adoption d’un certain nombre de mesures législatives et de mesures de politique générale visant à éliminer la violence à l’égard des femmes, y compris le lancement d’un plan d’action quadriennal 2005-2008 pour lutter contre la violence familiale exercée par les hommes contre les femmes et les enfants et l’élaboration, en mai 2008, d’instructions révisées concernant les enquêtes et les poursuites dans les affaires de violence familiale;

d)La réforme de grande envergure du système judiciaire, qui vise à rationnaliser le système des tribunaux et à réduire la durée des procédures au pénal et au civil;

e)La mise en place, en mai 2008, du Conseil de l’égalité de traitement qui est compétent pour recevoir des plaintes individuelles dénonçant des cas de discrimination fondée sur le sexe, la race, la couleur, la religion ou la conviction, le handicap, l’opinion politique, l’âge ou l’orientation sexuelle, l’origine nationale, sociale ou ethnique.

C. Principaux sujets de préoccupation et recommandations

5.Le Comité regrette que l’État partie entende maintenir toutes les réserves qu’il a formulées lors de la ratification du Pacte. Il considère en particulier qu’à la suite de la réforme récente du système de jugement par jury (CCPR/C/DNK/5, par. 350), qui a introduit le droit de faire réexaminer la déclaration de culpabilité et la condamnation par une juridiction supérieure en ce qui concerne les affaires pénales les plus graves, la portée de la réserve formulée à l’égard du paragraphe 5 de l’article 14 pourrait être réduite.

L’État partie devrait garder à l’étude la question des réserves à l’égard du Pacte en vue de les retirer, en tout ou en partie. Il devrait envisager en particulier de réduire la portée de la réserve à l’égard du paragraphe 5 de l’article 14 du Pacte, à la lumière de la réforme apportée récemment au système de jugement par jury.

6.Le Comité note avec préoccupation la décision prise par l’État partie de ne pas incorporer le Pacte dans son ordre juridique interne, contrairement à ce qu’avait recommandé la Commission d’incorporation des instruments relatifs aux droits de l’homme dans la législation danoise (art. 2).

L’État partie devrait réexaminer sa décision de ne pas incorporer le Pacte dans son ordre juridique interne, en vue de garantir qu’il soit donné intégralement effet dans la loi interne à tous les droits protégés par le Pacte.

7.Le Comité note avec préoccupation que, malgré les différentes mesures adoptées par l’État partie pour faire avancer l’égalité entre hommes et femmes et augmenter la représentation des femmes dans les organes électifs, les femmes continuent d’être sous-représentées aux postes de prise de décisions politiques, en particulier au niveau local. Le Comité relève aussi avec préoccupation la faible représentation des femmes dans les postes de haut niveau et les postes de direction ainsi qu’aux conseils d’administration des entreprises privées (art. 2, 3, 25 et 26).

L’État partie devrait renforcer son action afin d’augmenter la participation des femmes aux postes de prise de décisions politiques, en particulier au niveau local, en organisant notamment des campagnes de sensibilisation et, quand cela est possible, en adoptant des mesures spéciales d’application temporaire. L’État partie devrait également chercher les moyens de soutenir davantage la participation des femmes aux postes de haut niveau et aux postes de direction ainsi qu’aux conseils d’administration des entreprises privées par une coopération et un dialogue accrus avec les partenaires du secteur privé.

8.Le Comité demeure préoccupé par la persistance de la violence contre les femmes, y compris de la violence dans la famille, malgré les efforts déployés par l’État partie pour éliminer ce phénomène (art. 3, 7 et 26).

L’État partie devrait poursuivre ses efforts visant à éliminer la violence à l’égard des femmes, notamment la violence dans la famille, par exemple en organisant des campagnes d’information mettant en évidence le caractère criminel de ces pratiques et en dégageant des ressources financières suffisantes pour prévenir cette violence et apporter une protection et un appui matériel aux victimes.

9.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles l’espace aérien et les aéroports de l’État partie auraient été utilisés pour transférer des personnes de pays tiers vers des pays où elles risquent d’être soumises à la torture ou à des mauvais traitements. Le Comité note que l’État partie a constitué un groupe de travail interministériel pour enquêter sur la question (art. 7, 9 et 14).

L’État partie devrait faire tenir au Comité le rapport du groupe de travail interministériel chargé d’enquêter sur les allégations selon lesquelles des avions servant à des transferts illégaux auraient transité par son territoire, dès qu e ce rapport sera disponible. Il devrait aussi mettre en place un système de surveillance afin de garantir que son espace aérien et ses aéroports ne soient pas utilisés à de telles fins.

10.Le Comité prend note avec satisfaction de la déclaration de la délégation qui a reconnu que les assurances diplomatiques n’exonéraient pas le Danemark des obligations qui lui incombent en vertu du droit international des droits de l’homme, du droit humanitaire et du droit des réfugiés, mais il relève avec préoccupation que l’État partie n’écarte pas l’idée de recourir aux assurances diplomatiques pour renvoyer des étrangers dans des pays où l’on pense que des traitements contraires à l’article 7 du Pacte ont lieu (art. 7, 9 et 14).

L’État partie devrait faire preuve de la plus grande circonspection dans le recours aux assurances diplomatiques quand il envisage de renvoyer des étrangers dans des pays où l’on pense qu ’il se produit des traitements contr aires à l’article 7 du Pacte . Il  devrait aussi surveiller la façon dont les personnes ainsi renvoyées sont traitées après leur reto ur et prendre les mesures voulu es quand les assurances ne sont pas honorées.

11.Le Comité demeure préoccupé par la pratique du placement au secret de longue durée pendant la détention avant jugement, et en particulier par la possibilité de prolonger sans limite cette mesure dans le cas de personnes inculpées d’une infraction visée aux parties 12 et 13 du Code pénal, même dans le cas de mineurs de 18 ans (art. 7, 9 et 10).

L ’ État partie devrait procéder à une révision de sa législation et de sa pratique en ce qui concerne le placement à l’isolement pendant la détention avant jugement, à l’effet de garantir que cette mesure ne soit appliquée que dans des circonstances exceptionnelles et pour une durée limitée.

12.Le Comité prend note de l’explication de la délégation qui a précisé que le statut particulier accordé à l’Église évangélique luthérienne en tant qu’«Église établie du Danemark» (art. 4 de la Loi constitutionnelle du 5 juin 1953) tient à des facteurs historiques et sociaux, ainsi qu’au fait que la grande majorité de la population appartient à cette Église. Néanmoins, le Comité note avec préoccupation que l’appui financier direct que l’Église évangélique luthérienne reçoit de l’État et les fonctions administratives qui lui sont confiées, comme l’enregistrement d’actes d’état civil et la gestion des cimetières, pourrait aboutir à une discrimination à l’encontre d’autres groupes religieux (art. 2, 18 et 26).

L ’ État partie devrait prendre des mesures pour garantir l ’ exercice en toute égalité de la liberté de religion ou de conviction et veiller à ce que sa législation et ses pratiques soient parfaitement conformes à l ’ article  1 8 du Pacte. En particulier, l’État partie devrait envisager de réviser sa législation et ses pratiques administratives en ce qui concerne l’appui financier direct apporté à l’Église établie et confier aux autorités de l’État les fonctions administratives relatives à l’enregistrement des actes d’état civil et à la gestion des cimetières.

13.Le Comité note avec préoccupation que dans sa décision du 28 novembre 2003, la Cour suprême n’a pas reconnu la communauté groenlandaise de Thulé comme un groupe distinct capable de faire valoir ses droits, alors que cette tribu se perçoit elle‑même comme un tel groupe (art. 2, 26 et 27).

L’État partie devrait porter une attention particulière à l’auto ‑identification des individus concernés lors de la détermination de leur statut en tant que personnes appartenant à des minorité s ou à des peuple s autochtone s.

14.L’État partie devrait rendre publics et faire largement connaître le texte de son cinquième rapport périodique, les réponses écrites qu’il a apportées à la liste des points à traiter établie par le Comité et les présentes observations finales. En plus du danois, le Comité suggère que le rapport et les observations finales soient traduits dans les langues minoritaires parlées dans le pays, y compris en féroïen.

15.Conformément au paragraphe 5 de l’article 71 du Règlement intérieur du Comité, l’État partie devrait faire parvenir, dans un délai d’un an, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 8 et 11.

16.Le Comité demande à l’État partie de faire figurer dans son sixième rapport périodique, qui devra lui être soumis avant le 31 octobre 2013 des renseignements à jour sur toutes ses recommandations et sur le Pacte dans son ensemble, notamment des renseignements détaillés sur l’application du Pacte dans les îles Féroé et au Groenland. Le Comité demande aussi que le sixième rapport périodique soit élaboré avec la participation de la société civile et des organisations non gouvernementales présentes dans l’État partie.

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