Nations Unies

CRC/C/OPAC/ARG/CO/1

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

18 juin 2010

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’enfant

Cinquante-quatrième session

25 mai-11 juin 2010

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 8 du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés

Observations finales: Argentine

1.Le Comité a examiné le rapport initial de l’Argentine (CRC/C/OPAC/ARG/1) à sa 1526e séance (voir CRC/C/SR.1526), tenue le 3 juin 2010, et a adopté les observations finales ci-après lors de sa 1541e séance, tenue le 11 juin 2010.

Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de l’État partie ainsi que ses réponses écrites à la liste des points à traiter (CRC/C/OPAC/ARG/Q/1/Add.1). Il se félicite également du dialogue franc et constructif qu’il a eu avec la délégation intersectorielle de l’État partie.

3.Le Comité rappelle à l’État partie qu’il convient de lire les présentes observations finales en parallèle avec celles qu’il a adoptées concernant les troisième et quatrième rapports périodiques de l’État partie (CRC/C/ARG/CO/3-4) et de celles qu’il a adoptées à l’issue de l’examen du rapport initial soumis par l’État partie en vertu du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/ARG/CO/1).

Aspects positifs

4.Le Comité se félicite de l’abolition du service militaire obligatoire en application de la loi n° 1537 de 1994 et de ce que l’âge minimum du service militaire volontaire ait été fixé à 18 ans par la loi n° 24429 de 1995. Il se félicite en outre de ce qu’en vertu de la loi n° 17531 l’âge minimum de la conscription soit de 18 ans même en cas de conscription exceptionnelle.

5.Le Comité accueille également avec satisfaction la ratification par l’État partie des instruments suivants:

a) Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (en 2003);

b)Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (en 2004);

c)La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (en 2007).

I.Mesures d’application générales

Diffusion et sensibilisation

6.Le Comité est préoccupé de ce que le Protocole facultatif soit très peu connu du grand public et de ce que l’État partie n’ait pas pris de mesure visant expressément à le diffuser auprès dudit public et, en particulier, des enfants.

7. Eu égard au paragraphe 2 de l’article 6 du Protocole facultatif, le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que les principes et les dispositions du Protocole facultatif soient largement diffusés auprès du public et des enfants.

Formation

8.Le Comité note avec satisfaction qu’un enseignement sur les droits de l’homme, notamment sur le Protocole facultatif, est dispensé aux élèves du secondaire. Il regrette cependant l’absence d’informations sur les activités de formation au Protocole facultatif, en particulier sur celles qui sont destinées aux membres des forces armées et à certaines catégories de professionnels qui travaillent auprès des enfants.

9. Le Comité encourage l’État partie à continuer d’organiser des activités de formation à l’intention des membres des forces armées et de certaines catégories de professionnels qui travaillent avec des enfants, tels que les enseignants, les personnes travaillant dans les médias, le personnel des services qui s’occupent d’enfants, les avocats et les juges, les policiers et les fonctionnaires de l’immigration. Il recommande en outre à l’État partie de faire largement connaître le Protocole facultatif au grand public, et en particulier aux enfants et à leurs parents, grâce, notamment, aux programmes scolaires et à l’éducation aux droits de l’homme.

II.Prévention

Lycées militaires

10.Le Comité prend note de la réforme intégrale des lycées militaires et des résolutions nos 228 et 516 du Ministère de la défense, dans lesquelles il est souligné que la modernisation et la démocratisation constituent les principes fondamentaux sur lesquels reposent les programmes scolaires et les enseignements. Il prend également acte des efforts déployés pour mettre les programmes d’études des lycées militaires en conformité avec la loi relative à l’éducation nationale. Tout en notant que l’âge de l’instruction au maniement des armes a été relevé à 17 ans, le Comité reste préoccupé de ce que des enfants ayant entre 17 et 18 ans continuent de recevoir une telle instruction. Il est également préoccupé par le fait que le Ministère de l’éducation n’ait qu’un rôle consultatif en ce qui concerne les lycées militaires.

11.Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre ses efforts de réforme des lycées militaires, notamment d’aligner les programmes d’études de ces lycées sur ceux des écoles relevant du Ministère de l’éducation et de faire en sorte que les châtiments corporels soient expressément interdits dans tous les contextes, y compris dans les lycées militaires. Le Comité recommande également à l’État partie de poursuivre ses efforts concernant l’interdiction de l’instruction des enfants au maniement des armes, y compris des enfants ayant entre 17 et 18 ans. Le Comité encourage en outre l’État partie à persévérer dans ses efforts visant à transférer la responsabilité des lycées militaires au Ministère de l’éducation.

Éducation pour la paix

12. Tout en prenant acte des efforts déployés par l’État partie en ce qui concerne la mémoire des victimes du passé, le Comité recommande à celui-ci de renforcer ses programmes et activités tendant à instaurer un climat de tolérance, de paix et de compréhension, notamment d’inscrire l’éducation aux droits de l’homme, et en particulier l’éducation pour la paix, au programme d’études de toutes les écoles.

III.Interdiction et questions connexes

Législation pénale et compétence

13.Le Comité note avec inquiétude que la constitution de groupes armés et le recrutement dans ceux-ci ne constituent pas des infractions pénales dans l’État partie. Il prend bonne note de l’affirmation de la délégation de l’État partie selon laquelle il n’y a pas de groupes armés sur le territoire. Cependant, l’absence de forces ou de groupes armés n’exclut pas la possibilité que des personnes ou des groupes tentent de recruter des enfants dans des forces ou des groupes armés étrangers, raison pour laquelle le Comité est préoccupé de ce que le recrutement d’enfants ne soit pas expressément incriminé par le Code pénal. En outre, le Comité déplore le manque d’informations sur les dispositions du droit interne qui portent sur les crimes de guerre et qui incriminent le fait de procéder à la conscription ou à l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans dans les forces armées nationales ou de les faire participer activement à des hostilités, conformément au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, auquel l’Argentine est partie.

14. Afin de renforcer les mesures internationales visant à prévenir l’enrôlement d’enfants dans les forces armées et leur utilisation dans des hostilités, le Comité recommande à l’État partie:

a) De veiller à ce que les violations des dispositions du Protocole facultatif concernant l’enrôlement et l’implication d’enfants dans des hostilités soient expressément incriminés par la législation de l’État partie, compte tenu des instruments pertinents auxquels il est partie, notamment le Statut de Rome de la Cour pénale internationale;

b) De veiller à ce que les codes, manuels et autres directives militaires soient conformes aux dispositions du Protocole facultatif.

Compétence et extradition

15.Le Comité note que, dans l’État partie, l’extradition est régie par des accords bilatéraux et multilatéraux. Il regrette toutefois que la législation de l’État partie ne prévoie pas expressément la possibilité d’extrader les auteurs d’infractions visées par le Protocole facultatif.

16. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que sa législation lui permette d’établir et d’exercer sa compétence extraterritoriale pour le crime de guerre consistant à procéder à la conscription ou à l’enrôlement d’enfants pour les faire participer à des hostilités. Il lui recommande en outre de renforcer les mesures visant à établir sa compétence extraterritoriale pour les infractions visées par le Protocole facultatif.

IV.Protection, réadaptation et réinsertion

Aide à la réadaptation physique et psychologique

17.Le Comité note avec préoccupation qu’aucune mesure spécifique n’a été prise pour repérer, parmi les enfants entrant en Argentine, ceux qui auraient pu être enrôlés ou utilisés dans des hostilités à l’étranger. Il est préoccupé par les informations selon lesquelles ces enfants ne bénéficient pas des services d’un interprète ou d’un traducteur lorsqu’ils sont vus par un médecin ou par un travailleur social. Il est préoccupé, en outre, de ce qu’aucune aide à la réadaptation physique et psychologique ne soit offerte à ces enfants après leur sortie des structures médicales.

18. Le Comité recommande à l’État partie de repérer les enfants entrant en Argentine qui auraient pu être enrôlés ou utilisés dans des hostilités à l’étranger et de leur fournir immédiatement une assistance multidisciplinaire et adaptée à leur culture en vue de faciliter leur réadaptation physique et psychologique, conformément au paragraphe 3 de l’article 6 du Protocole facultatif. La Commission nationale des réfugiés (CONARE), le Ministère du développement social et la ville de Buenos Aires, où se trouvent la plupart des réfugiés et des demandeurs d’asile, devraient adopter les programmes d’assistance nécessaires pour les enfants non accompagnés ou séparés. Il conviendrait en outre de faciliter l’accès des enfants aux services d’un interprète ou d’un traducteur lorsqu’ils sont vus par un médecin ou par un travailleur social. Une aide à la réadaptation physique et psychologique devrait être garantie à ces enfants après leur sortie des structures médicales.

V.Assistance et coopération internationales

Exportation d’armes

19.Le Comité relève avec préoccupation que la législation de l’État partie ne comporte pas de disposition interdisant expressément l’exportation d’armes vers des pays en situation de conflit, où des enfants peuvent être recrutés ou utilisés dans des hostilités.

20. Le Comité recommande à l’État partie d’inscrire dans sa législation l’interdiction expresse de vendre des armes à des pays où l’on sait que des enfants sont enrôlés ou utilisés dans des hostilités ou dans lesquels ils pourraient l’être.

Coopération internationale

21.Le Comité recommande en outre à l’État partie de poursuivre sa coopération bilatérale, multilatérale et internationale aux fins de l’application du Protocole facultatif, conformément à l’article 7 de ce dernier, notamment pour la prévention de toute activité contraire au Protocole facultatif et pour la réadaptation et la réinsertion sociale des personnes qui sont victimes d’actes contraires au Protocole, y compris par une coopération technique et une assistance financière.

VI.Suivi et diffusion

22. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour garantir la pleine application des présentes recommandations, notamment en les transmettant aux membres du Congrès national, au Ministère de la défense et aux autres ministères concernés, ainsi qu’aux autorités locales, le cas échéant, pour examen et suite à donner.

23. Le Comité recommande que le rapport initial soumis par l’État partie et les observations finales adoptées par le Comité soient largement diffusés dans toutes les langues de l’État partie, y compris les langues parlées par les populations autochtones, afin de susciter un débat et de faire mieux connaître le Protocole facultatif, son application et son suivi.

VII.Prochain rapport

24. Conformément au paragraphe 2 de l’article 8 du Protocole facultatif, le Comité prie l’État partie de faire figurer un complément d’information sur l’application du Protocole facultatif dans le prochain rapport périodique qu’il soumettra au titre de la Convention relative aux droits de l’enfant, conformément à l’article 44 de la Convention.