CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/452/Add.719 novembre 2004

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DELA DISCRIMINATION RACIALE

RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENTÀ L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Seizièmes rapports périodiques des États parties attendus en 2003

Additif

République‑Unie de Tanzanie*

[27 octobre 2004]

TABLE DES MATIÈRES

Paragraphes Page

INTRODUCTION13

I.INFORMATIONS GÉNÉRALES2 − 53

II.INFORMATION CONCERNANT LES ARTICLES 2 À 7DE LA CONVENTION6 − 613

Article 26 − 93

Articles 3 et 410 − 114

Article 512 − 445

Article 645 − 5612

Article 757 − 6115

III.CONCLUSION6216

INTRODUCTION

1.Conformément à l’article 9 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la République‑Unie de Tanzanie présente ici ses huitième à seizième rapports établis sur la base de directives générales adoptées par le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD/C/70/Rev.5).

I.  INFORMATIONS GÉNÉRALES

2.La République‑Unie de Tanzanie consiste en une union entre la République de Tanganika et Zanzibar, scellée le 26 avril 1964. La Tanzanie est située en Afrique de l’Est entre 29o et 41o de longitude est et de 1o à 12o de latitude sud et a une superficie de 942 600 km2. Elle est limitée par le Kenya et l’Ouganda au nord, le Rwanda, le Burundi et la République démocratique du Congo à l’ouest, la Zambie, le Malawi et le Mozambique au sud et l’océan Indien à l’est. La Tanzanie a un climat de type tropical. Selon le recensement de 2002, la République‑Unie de Tanzanie compte 34 569 232 habitants, dont 51 % de femmes et 49 % d’hommes. 46 % de la population ont moins de 15 ans. On compte environ dans le pays 126 groupes ethniques parlant différentes langues locales. Toutefois, la majorité de la population parle le kiswahili, qui est la langue nationale. Cette langue est un symbole d’unité car elle est le principal moyen de communication et c’est par son biais que se font les transactions commerciales.

3.On ne connaît pas la composition exacte de la population car aucune question sur la religion, les convictions spirituelles ou la race n’est posée au cours du recensement de la population et de l’habitation. Le but est de décourager le tribalisme et l’intolérance religieuse et de promouvoir le socialisme d’État et le sentiment d’appartenance à une nation. Comme cela a été indiqué dans le présent rapport, le kiswahili a été promu langue nationale.

4.Le système juridique tanzanien repose sur la common law. Les tribunaux tanzaniens fondent leurs décisions sur le droit écrit, le droit coutumier, la jurisprudence et l’ordonnance sur la magistrature et l’application des lois de 1961.

5.Depuis 1992, la Tanzanie est un État pluraliste. Il y a 17 partis politiques. L’article 4 de la Constitution dispose que l’autorité de l’État est exercée et contrôlée par trois pouvoirs, le pouvoir législatif (Parlement), le pouvoir judiciaire et le pouvoir exécutif. Ces trois pouvoirs sont indépendants l’un de l’autre. La primauté de la règle de droit est assurée.

II. INFORMATION CONCERNANT LES ARTICLES 2 À 7 DE LA CONVENTION

Article 2

6.La discrimination quelle qu’en soit la forme est interdite par la Constitution (art. 13). Il est interdit aux instances ou autorités qui exercent des fonctions publiques ou fournissent des services de se livrer à une quelconque discrimination fondée sur la couleur, l’origine, la situation sociale, etc. Toute personne qui estime être ou avoir été victime d’une discrimination peut demander réparation devant les tribunaux. La discrimination est dûment définie à l’article 13 de la Constitution. Cette définition est conforme à celle de la Convention.

7.Avant l’indépendance, la fonction publique et les affaires politiques étaient entre les mains des non‑Tanzaniens. La Tanzanie a pris des mesures de discrimination positive en faveur de la population locale, qui était marginalisée jusque‑là par l’autorité coloniale, pour lui permettre de prendre en charge ces activités. Bien que la Tanzanie ne dispose pas d’une législation particulière sur la discrimination raciale, il existe des dispositions spécifiques sur la question. Par exemple, l’article 63 b) 1) du Code pénal (CAP 16) dispose ce qui suit:

«Toute personne qui, dans le cadre d’une réunion, fait une déclaration susceptible de susciter le mécontentement de tout habitant de la République ou de favoriser des sentiments d’animosité entre différentes classes ou différents groupes de personnes se rend coupable d’un délit…».

8.En 1984, une charte des droits a été incorporée à la Constitution de la République‑Unie de Tanzanie. Les droits énoncés dans la Charte peuvent être invoqués devant les tribunaux, conformément à la loi no 33 de 1994 sur l’application des droits et devoirs fondamentaux. L’article 8 de cette loi habilite la Haute Cour à entendre et trancher toute plainte déposée par une personne conformément à l’article 4 de la Constitution. Au cours des 10 dernières années, la Haute Cour et la cour d’appel ont beaucoup contribué à la promotion des droits de l’homme et des droits fondamentaux par le biais du contrôle judiciaire qu’elles exercent. L’article 9 de la Constitution dispose que les autorités et les organismes de l’État exécutent leurs politiques et leurs activités de façon à garantir l’égalité des chances à l’ensemble des citoyens sans distinction de couleur, de race, de tribu, de religion ou de situation sociale. L’alinéa h de l’article 9 interdit toute forme d’injustice, d’intimidation, de discrimination, de corruption, d’oppression ou de favoritisme et en prescrit l’élimination.

9.La Tanzanie est un État laïque. La Constitution garantit la séparation de l’État et de la religion; les citoyens sont encouragés à faire preuve de tolérance religieuse.

Articles 3 et 4

10.La Tanzanie a toujours plaidé en faveur de la non‑discrimination dans les rapports entre tous les citoyens et l’alinéa f de l’article 9 et l’article 13 de la Constitution interdisent clairement la discrimination raciale fondée sur la race, la couleur, l’ascendance et l’origine ethnique. Telle est la position de l’État depuis l’accession à l’indépendance, le 9 décembre 1961. Pendant plus de 40 ans, les Tanzaniens de toutes origines ont pris part à différentes activités sociales, politiques, culturelles et économiques sans discrimination les uns envers les autres, conformément aux dispositions de la Convention. Après l’indépendance, à cause de la faiblesse de l’économie, le niveau de protection sociale et le niveau de vie de la majorité de la population étaient bas. Quelques Tanzaniens d’origine asiatique se sont enrichis et avaient une vie plus facile que les autres segments de la population. Il y avait le sentiment qu’ils contrôlaient l’économie alors que la population autochtone s’appauvrissait. Des hommes d’affaires rivaux d’origine africaine y ont alors mis du leur. Certains partis politiques ont tenté de tirer profit de ces sentiments. La politique du Gouvernement a été maintes fois exposée. Avec l’actuel essor économique de la Tanzanie, ces sentiments s’estompent peu à peu. Le Gouvernement a réitéré sa position, à savoir qu’il n’y a pas de place en Tanzanie pour la discrimination raciale.

11.À ce jour, aucun cas de discrimination raciale n’a été signalé.

Article 5

Égalité devant la loi

12.Les citoyens sont égaux devant la loi, comme le garantit l’article 13 1) de la Constitution. Toutefois, l’accès à la justice pose un problème que le Gouvernement s’efforce de résoudre. L’état de droit régnant en Tanzanie, personne n’est au‑dessus des lois.

13.En garantissant l’égalité devant la loi, l’autorité publique prend en considération le principe de justice naturelle qui confère à la personne le droit d’être entendue par une instance impartiale. Le principe de justice naturelle a été appliqué dans l’affaire Jimmy David Ngonya vNational Insurance Corporation Ltd. Le plaignant avait été démis de ses fonctions de directeur de succursale dans la société poursuivie. Le Conseil d’administration l’avait licencié sur la base d’un rapport d’audit dont le plaignant n’avait jamais eu connaissance. Le Directeur général de la société était présent à la réunion du Conseil d’administration consacrée à l’affaire, mais le plaignant était absent. Le plaignant a demandé au tribunal de prononcer une ordonnance de certiorari et de mandamus au motif que son licenciement était contraire au principe de justice naturelle. Selon M. Ngonya «étant donné que le rapport d’audit était préjudiciable aux intérêts du plaignant et qu’il constituait la base de la décision du Conseil d’administration, il aurait dû être porté à la connaissance du plaignant pour lui permettre de faire des commentaires et, si besoin, d’en contester le contenu; faute de cela, le droit du plaignant de se défendre a été violé car, du fait que le Directeur général, qui agissait comme un procureur, était présent aux délibérations du Conseil d’administration qui avait prononcé le licenciement, il y avait eu vice de procédure».

14.La Tanzanie s’est toujours distinguée par le climat de paix et de stabilité qui y règne. Sa politique étrangère est fondée sur le bon voisinage et le respect des droits, dont le droit à l’autodétermination. C’est cette politique qui a été suivie pendant le combat pour l’indépendance des États d’Afrique australe, ainsi que durant la lutte contre l’apartheid en Afrique du Sud, où le pouvoir de la majorité a été finalement rétabli. La Tanzanie a déclaré catégoriquement que son territoire ne serait jamais utilisé pour lancer des attaques contre ses voisins. Elle interdit aux réfugiés de former des groupes armés en vue d’opérations contre leur pays d’origine.

15.Dans le but de sauvegarder le principe d’égalité devant la loi et celui de la présomption d’innocence, l’article 13 6) b) de la Constitution dispose que nul ne sera présumé coupable d’un délit tant que sa culpabilité n’aura pas été établie. Ce principe est également inscrit dans le Code de procédure pénale de 1985 et dans la loi sur la preuve de 1967. Il convient toutefois de noter que l’accès à la justice est un des principaux problèmes que rencontre le pays: la pauvreté, le manque de moyens pour exécuter les plans de développement du Gouvernement et l’ignorance limitent l’accès des Tanzaniens à la justice. Les pauvres et les personnes appartenant à des minorités n’ont pas les moyens de s’assurer les services d’un avocat, à cause des frais exorbitants. Les seuls cas où le Gouvernement prend à sa charge les honoraires d’avocat sont ceux où une personne est accusée d’homicide ou de haute trahison. Des discussions sont en cours pour qu’une aide judiciaire soit accordée aux femmes, aux pauvres et aux minorités. Le Gouvernement procède à des réformes dans le domaine juridique, dans lesquelles il sera tenu compte de questions telles que celle de l’accès aux services judiciaires.

16.Le Gouvernement a pris plusieurs initiatives pour régler le problème de l’accès à la justice. Dans le cadre de son budget à moyen terme, il consacre des fonds à la construction et à la réfection des locaux des tribunaux, au renforcement des capacités et au recrutement de personnel. La question est également abordée dans le cadre de projets Quick Start (démarrage rapide) qui font partie du programme de réforme. Des partenaires au titre de l’aide au développement complètent les efforts du Gouvernement. Le nombre d’institutions de formation de fonctionnaires judiciaires est passé de 2 à 5, dont 1 située à Zanzibar.

17.La corruption constitue un grave problème qui restreint l’accès des pauvres, des femmes et des minorités à la justice. Le Gouvernement en est conscient et tente de le combattre en renforçant le Bureau de prévention de la corruption, qui est chargé d’enquêter sur toutes les affaires de corruption et de poursuivre les suspects devant les tribunaux. La corruption constitue une infraction en vertu de la loi no 16 de 1971 contre la corruption. Parallèlement aux efforts menés sur le plan juridique, le Gouvernement a élaboré une politique et une stratégie de lutte contre la corruption au niveau national que chaque ministère, département et organisme public est tenu d’appliquer.

18.La majorité des Tanzaniens trouvent le système judiciaire trop lourd et trop bureaucratique. Le Gouvernement tente de remédier à ce problème. Dans le passé, pour intenter une action en justice contre le Gouvernement il fallait, en vertu de la loi no 16 de 1967 telle que modifiée par la loi no 40 de 1974, demander l’autorisation du Procureur général. Cela signifiait que le Gouvernement devait consentir à ce qu’on le poursuive. Cette loi a été remplacée par la loi no 30 de 1994 en vertu de laquelle le plaignant doit simplement donner au Procureur général un préavis de 90 jours en indiquant le motif des poursuites. Actuellement, la Commission de la réforme législative examine les procédures civile et pénale afin d’en recenser les lourdeurs. Une autre faiblesse du système judiciaire tient au fait que l’article 10 de la loi no 33 de 1994 sur l’application des droits et des devoirs fondamentaux prévoit que les requêtes sont examinées par un collège de trois juges au lieu d’un juge unique. Vu le nombre d’affaires à trancher, cela constitue un obstacle. Dans ce contexte, le Gouvernement a déployé des efforts particuliers pour faire face au problème du manque de juges à la Haute Cour, nommant 13 juges en deux ans. Cela devrait améliorer la situation.

19.La Constitution interdit la discrimination entre ressortissants et non‑ressortissants en ce qui concerne l’égalité devant la loi. En vertu de l’article 29 2), chacun jouit d’une égale protection devant la loi et a le droit de bénéficier d’un procès public et d’être à l’abri de toute ingérence arbitraire ou illégale dans sa vie privée, sa vie de famille, son domicile ou sa correspondance. Toutefois, il convient de noter que les non‑ressortissants sont tenus de respecter les lois internes telles que la loi no 6 de 1995 sur la citoyenneté et la loi no 7 de 1995 sur l’immigration qui régissent entre autres la résidence et le travail en Tanzanie.

20.Le Gouvernement s’efforce d’aider les pauvres et les groupes minoritaires. Il a mis en place au cabinet du Vice‑Président un bureau chargé des organisations non gouvernementales. Ce bureau supervise, entre autres, les activités de lutte contre la pauvreté. D’autre part, le Bureau de l’administration régionale et des collectivités locales de la présidence de la République a donné des instructions à tous les conseils municipaux et conseils de district pour qu’ils allouent des fonds à des zones d’activité économique spéciales afin que les pauvres, les femmes, les jeunes et les minorités puissent créer des microentreprises. Différentes institutions financières octroient des prêts aux groupes susmentionnés comme les Savings and Credit Cooperative Societies, PRIDE Tanzania et Small and Medium Enterprises.

21.La Tanzanie fait partie des pays africains où séjourne depuis longtemps une importante population de réfugiés. En 1990 et 1994, des actes de génocide graves ont été commis au Rwanda et au Burundi, ce qui a entraîné une augmentation du nombre de réfugiés en Tanzanie. Certes, plus de 215 000  Burundais sont rentrés dans leur pays depuis 2002, mais de nombreux autres restent à rapatrier. Actuellement, quelque 260 000 réfugiés burundais séjournent dans des camps à l’ouest de la Tanzanie et 470 000, qui avaient quitté pour la plupart le Burundi en 1972, vivent hors des camps. Plus de 83 000 Burundais ont été rapatriés au cours des huit premiers mois de 2004 et pour les quelque 500 000 réfugiés de la nouvelle vague actuellement en cours de rapatriement, une page est ainsi en train d’être tournée. D’autre part, en décembre 2002, environ 23 800 réfugiés rwandais étaient rentrés dans leur pays, ce qui avait mis fin au programme de retour volontaire des réfugiés rwandais. Le Gouvernement de la République‑Unie de Tanzanie a collaboré avec le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés dans le cadre de ces programmes.

22.La Tanzanie offre aux réfugiés somaliens intégrés dans le pays les moyens d’être autonomes. Elle continue d’autre part d’accueillir des réfugiés en provenance de République démocratique du Congo fuyant les combats sporadiques qui se déroulent dans plusieurs régions de ce pays.

Droit à la sécurité de la personne

23.L’article 16 1) de la Constitution consacre le droit à la vie privée et à la sécurité de la personne. Il dispose que toute personne mérite le respect et a droit à une protection pour elle‑même, ainsi que pour sa famille et son foyer. Cette protection s’étend également à sa correspondance personnelle. Toutefois, l’article 16 2) de la Constitution dispose que, pour assurer la sécurité dans le pays, le Gouvernement réglemente les conditions d’exercice des droits à la vie privée et à la sécurité de la personne et fixe la mesure dans laquelle ils peuvent être restreints sans que les dispositions de l’article 16 1) soient violées.

24.À cet égard, le Code de procédure pénale contient des dispositions donnant effet à ce droit. Par exemple, il peut être procédé à une arrestation sur présentation d’un mandat d’arrêt en vertu de l’article 13 du Code, et une fouille peut être effectuée sur présentation d’un mandat de perquisition, conformément à l’article 24. L’article 14 définit les situations où un fonctionnaire de police peut procéder à une arrestation sans mandat, par exemple lorsqu’une personne est trouvée en possession d’objets dont il y a de bonnes raisons de penser qu’ils ont été volés ou lorsqu’une personne empêche volontairement un fonctionnaire de police d’exercer ses fonctions.

25.L’article 24 du Code de procédure pénale dispose qu’un fonctionnaire de police peut procéder à une fouille corporelle lors de l’arrestation d’un suspect. Toutefois, l’article 26 stipule qu’il convient de respecter les règles de décence lors de fouilles opérées sur des femmes et que seul un personnel féminin est habilité à procéder à ces fouilles.

Droits politiques

26.À l’indépendance, en 1961, le multipartisme régnait en Tanzanie. Un système de parti unique a été instauré en 1965, et le parti au pouvoir, la Tanganyika Association National Union (TANU) pour le continent et le Parti Afro Shirazi (ASP) (Zanzibar) sont devenus les seuls partis autorisés à exercer des activités politiques. Tous les autres partis ont été interdits. En 1977, les deux partis susmentionnés ont fusionné pour former le Chama Cha Mapinduzi (CCM). La Constitution a été modifiée pour consacrer la suprématie du parti. Tout cela est maintenant du passé. Les premières élections pluralistes se sont tenues en 1995 et le CCM y a obtenu la majorité au Parlement et a formé le gouvernement qui est au pouvoir aujourd’hui. Des réformes politiques ont renforcé la démocratie. Tous les partis politiques consacrent dans leurs statuts l’égalité des sexes. Le législateur a adopté le treizième amendement à la Constitution pour accroître le nombre de femmes représentées au Parlement. L’article 66 1) b) de la Constitution garantit aux femmes au moins 20 % des sièges au Parlement qui compte 275 membres. Le Parlement siège quatre fois par an dans la capitale, Dodoma. Pour assurer une plus large participation des femmes au processus de prise de décisions, la Constitution a été modifiée de façon à réserver des sièges spéciaux à des femmes issues des partis politiques ayant totalisé au moins 5 % des voix. À l’heure actuelle, 37 femmes occupent des sièges réservés (15 % du total), soit 28 pour le CCM, 4 pour le Front civique uni (CUF), 3 pour la National Convention for Reconstruction and Reform (NCCR, Mageuzi) et 1 chacun pour le Chadema et le United Democratic Party (UDP); en outre, 8 femmes ont été élues dans leur circonscription. Des propositions ont été formulées pour porter à 30 % la proportion de femmes au Parlement.

27.Le pays a bénéficié d’un développement pacifique et fondé sur la participation, ainsi que d’un système politique qui exclut la confrontation. Les partis politiques sont régis par la loi no 5 de 1992 sur les partis politiques. L’article 12 1) de cette loi limite les activités politiques sur le lieu de travail et dans les établissements éducatifs afin d’y éviter les conflits d’intérêts politiques.

28.La liberté d’association est garantie à l’article 20 1) de la Constitution ainsi que dans l’ordonnance sur les associations (CAP no 337), dans la loi no 24 de 2002 sur les organisations non gouvernementales et la loi no 5 de 1992 sur les partis politiques. L’exercice de cette liberté, qui n’est pas absolue, doit être conforme à la loi. La Constitution elle‑même donne le ton dans son article 20 2) a) à e) en en fixant les limites. En outre, l’article 20 4) de la Constitution interdit d’obliger quiconque à adhérer à une association ou à une organisation, tout comme il est interdit à toute association et à tout parti politique de refuser l’adhésion d’une personne sur la seule base de son idéologie ou de sa philosophie.

Liberté d’expression

29.La République‑Unie de Tanzanie respecte la liberté d’expression et le droit des citoyens de recevoir des informations, et d’exprimer et de diffuser leurs opinions. L’article 18 1) et 2) de la Constitution stipule clairement que chacun jouit du droit à la liberté d’opinion et d’expression et du droit de rechercher, recevoir et diffuser des informations et des idées par tout moyen et le droit à ce que le secret de sa correspondance ne soit pas violé.

30.Dans le contexte de l’instauration du pluralisme politique, la liberté de la presse fait partie des éléments nécessaires à la démocratie. De nombreux journaux, chaînes de télévision et stations de radio privés ont été créés. Le Gouvernement ou le parti au pouvoir n’a plus le monopole des médias. Plus de 15 journaux privés couvrant différents domaines sont diffusés auprès du grand public. On peut citer le Guardian, le Business Times, l’East African, le Family Mirror, Majira, Nipashe, Mtanzania, Mwananchi, An Nuur, Msema Kweli et Rai. Le Gouvernement a créé, conformément à la loi de 1993 sur la radio et la télévision, la Tanzania Broadcasting Commission qui est chargée d’octroyer les licences de diffusion ainsi que de veiller à ce que les programmes de radio et de télévision ne portent pas atteinte à la morale publique.

31.La liberté des médias a été synonyme d’une prolifération des chaînes de télévision privées. On peut citer notamment l’Independent Television (ITV), la Dar Es Salaam Television (DTV), la Coastal Television Network (CTN), la Star Television, l’Agape Television (ATN), l’East African Television (EA), la TV Burudani, l’Abood Television, la SUA Television et Channel Ten. Clouds FM, Radio One, Radio Free Africa, Radio Tumaini, Radio Kuizera, WAPO Radio, Radio Uhuru, Radio Quoran et Sauti ya Injili sont quelques‑unes des stations de radio privées qui émettent dans le pays.

32.Les professionnels des médias ont créé, en tant qu’instance de réglementation interne, un conseil des médias tanzaniens pour protéger leurs droits. Le Conseil est une association indépendante non régie par des textes législatifs dont l’action procède de la conviction que le rôle principal de la profession est de servir la vérité en vertu du principe du droit du public à l’information. Le Conseil a pour objectif de préserver la liberté des médias et de garantir le respect des normes professionnelles les plus élevées et l’observation la plus stricte des règles de déontologie par les rédacteurs, les journalistes, les réalisateurs, les producteurs, les professionnels de la radio et de la télévision et tous ceux qui interviennent dans le domaine des médias.

33.Le Conseil veille au respect du Code de déontologie et coopère avec les instances gouvernementales à tous les niveaux. Il produit des rapports et les diffuse auprès du grand public. Le Gouvernement a, pour sa part, publié une directive prévoyant la création de bureaux de l’information dans tous les ministères, offices et organismes publics. Les médias ont beaucoup contribué à sensibiliser le grand public à divers sujets tels que les abus sexuels, l’exploitation des mineurs, l’excision et ses effets sur la santé des femmes, le VIH/sida, la situation politique et économique, etc.

Liberté d’association et de réunion

34.L’article 20 de la Constitution garantit expressément le droit de chacun à la liberté d’association et de réunion pacifique. En vertu de la loi de 1991 sur les syndicats a été créée l’Organization of Tanzania Trade Unions (OTTU) (Fédération des syndicats tanzaniens) qui est l’organe faîtier autonome qui représente tous les travailleurs tanzaniens. Elle a remplacé la «Jumuiya ya Wafanyakazi wa Tanzania» (JUWATA) qui était auparavant affiliée au parti au pouvoir, le CCM, avant que ce dernier ne décide de rayer la JUWATA de la liste des organisations de masse. Les travailleurs ont aujourd’hui le droit de constituer des syndicats sur leur lieu de travail. Des syndicats tels que le TUGHE, le TRAWU et le CHAWATA sont affiliés au Trade Union Congress of Tanzania (TUCTA) qui a été créé en vertu de la loi sur les organisations syndicales de 1998.

Droit au travail

35.La Constitution garantit dans ses articles 22 et 23 un droit égal à l’emploi pour les hommes et les femmes. Les femmes sont fortement encouragées à postuler pour des emplois. Le principe d’un salaire égal pour un travail égal est un droit garanti tant aux hommes qu’aux femmes. Un congé de maternité peut être accordé tous les trois ans aux femmes fonctionnaires en vertu du règlement intérieur de la fonction publique de 1994. La Constitution énonce aussi clairement le droit de toute personne de travailler à l’abri de toute discrimination. Cela comprend notamment le droit au libre choix de la profession, à la promotion, à la sécurité de l’emploi et aux prestations connexes. C’est la législation du travail qui garantit la sécurité de l’emploi; il s’agit notamment de l’ordonnance sur l’indemnisation des travailleurs, de l’ordonnance portant réglementation des salaires et des conditions d’emploi, de l’ordonnance sur l’emploi, de la loi de 1962 sur l’allocation de départ, de la loi de 1994 sur la sécurité de l’emploi et de la loi no 41 de 1967 sur le Tribunal du travail. Par ailleurs, une législation complète sur les relations de travail a été adoptée par l’Assemblée nationale mais n’est pas encore entrée en vigueur.

36.Cependant, la Constitution ne régit et ne protège que les droits de ceux qui ont déjà un emploi. Il n’y a pas de disposition garantissant un travail à chacun. En tant que droit économique, le droit au travail n’est pas considéré comme un droit inhérent à la personne humaine ou inaliénable. Il fait partie des droits accordés par l’État dans les limites de ses possibilités et de son développement économiques.

Droit à la santé et aux soins médicaux

37.En Tanzanie, le droit à la santé ne relève pas de la Charte des droits de l’homme. Ce droit est prévu à l’article 11 1), de la Constitution (deuxième partie).

38.Avant le milieu des années 90, l’enseignement et la santé étaient gratuits. Depuis lors, la politique de partage des coûts des services de santé et d’enseignement a été introduite, tout d’abord dans les centres de santé régionaux et de district. Cette politique a eu une incidence bénéfique sur les groupes vulnérables comme les personnes âgées, les enfants et les femmes. La vaccination contre les six principales maladies est encore gratuite. Les moins de 5 ans et les plus de 70 ans bénéficient de soins médicaux gratuits. Tous les citoyens ont droit à un traitement gratuit contre la tuberculose, la lèpre, la poliomyélite et le cancer. Le Gouvernement, dans le cadre de sa politique visant à éliminer les pratiques dommageables aux personnes, a adopté de nouvelles lois ou modifié les lois existantes. Par exemple, la loi no 4 de 1998 sur les infractions sexuelles (dispositions spéciales) érige l’excision en infraction pénale. Le Gouvernement, par l’intermédiaire des organisations non gouvernementales et des médias, sensibilise les citoyens aux effets néfastes de cette pratique sur la santé des femmes. Il ratifiera bientôt le Protocole de Maputo qui, entre autres, interdit et réprouve les pratiques préjudiciables sous toutes leurs formes, notamment l’excision.

VIH/sida

39.L’épidémie de sida constitue une grave menace pour la Tanzanie. En décembre 2001, la République‑Unie de Tanzanie comptait plus de 2 millions de personnes infectées par le VIH. Plus de 700 000 sont atteintes du sida. Entre le 1er janvier et le 31 décembre 2002, 12 675 nouveaux cas ont été recensés dans le cadre du programme national de lutte contre le sida pour toutes les régions de Tanzanie continentale. Bien que de nombreuses familles tanzaniennes soient touchées par le fléau, la stigmatisation et la discrimination restent très répandues dans la société, au travail et dans les services de santé publique. En 2001, le Président Benjamin Mkapa a déclaré le VIH/sida catastrophe nationale et une commission nationale contre le sida a été créée au Cabinet du Premier Ministre. La Commission s’emploie, entre autres, à mettre en place une politique de lutte contre le VIH/sida, qui porte sur l’organisation de campagnes d’information, le traitement du problème de la transmission du virus de la mère à l’enfant, la lutte contre la discrimination et la stigmatisation et la distribution d’antirétroviraux. Le Gouvernement a réexaminé les lois concernant la propagation du virus. Un rapport a été rédigé et doit être rendu public. Le but visé est de mettre en place une législation complète concernant le VIH/sida. Le Gouvernement examine actuellement les lois en vigueur dans ce domaine. Des programmes de sensibilisation et d’intervention de proximité sont exécutés afin d’enrayer la propagation du virus.

Paludisme

40.Le paludisme tue plus de personnes que le VIH/sida. Le Gouvernement mène, en collaboration avec des partenaires dans le cadre de l’aide au développement, une guerre contre ce fléau. Une campagne pour l’utilisation de filets antimoustiques, l’assainissement de l’environnement et l’épandage de larvicide dans les aires de reproduction des moustiques est en cours. Le Gouvernement associe les efforts de lutte pour l’élimination de la pauvreté à l’action contre le paludisme, par exemple en distribuant des filets antimoustiques aux femmes enceintes et aux enfants et en subventionnant les filets antimoustiques traités de façon à les rendre accessibles.

Sécurité sociale

41.Le système de sécurité sociale tanzanien, à l’instar de celui d’autres pays en développement, n’est pas aussi bien établi que dans les pays développés. La protection dépend d’arrangements dans des structures telles que la famille élargie. Il existe des systèmes de sécurité sociale ou une sorte de système d’assurance sociale pour les accidents du travail, la vieillesse ou le décès. Ces systèmes sont financés par des cotisations des travailleurs. Il s’agit du National Social Security Fund (Fonds national de sécurité sociale), du Parastatal Pension Fund (Fonds de pension paraétatique), du Local Authorities Pension Fund (Fonds de pension des collectivités locales), de la National Insurance Corporation (Société nationale d’assurance) et du National Health Fund (Fonds national d’assurance maladie), auquel les fonctionnaires ont l’obligation de cotiser. Il existe une forme moderne de sécurité sociale pour les salariés. Toutefois, les changements inhérents aux réformes économiques et à la modernisation tendent à faire disparaître certains systèmes et institutions traditionnels de sécurité sociale comme la structure familiale élargie.

Droit à l’éducation et à la formation

42.La Constitution appuie les objectifs du document relatif à la politique éducative. L’article 11 2) énonce le droit à l’auto‑apprentissage, alors qu’en vertu de l’article 11 3) le Gouvernement a le devoir de garantir un environnement propice à l’éducation.

43.Deux lois garantissent la mise en œuvre de la politique en matière d’éducation. La loi no 25 de 1978 sur l’éducation nationale pour la Tanzanie continentale et la loi no 6 de 1982 sur l’éducation pour Zanzibar. En vertu de la loi sur l’éducation nationale, l’école primaire est obligatoire entre 7 et 13 ans. En Tanzanie continentale, le système d’enseignement prévoit 7 ans d’études primaires obligatoires, 4 ans d’études secondaires du premier cycle et 2 ans d’études secondaires du deuxième cycle. À Zanzibar, c’est la loi sur l’éducation qui régit l’enseignement primaire. L’enseignement obligatoire dure 10 ans, dont 7 ans d’école primaire et 3 ans d’école secondaire du premier cycle.

44.Afin de promouvoir et protéger la morale et les valeurs traditionnelles, le Gouvernement a formulé en 1999 sa politique culturelle qui vise à assurer la protection et la promotion de la culture. Il a créé, par le biais du Musée national de Tanzanie, un système permettant aux tribus d’exposer leur culture. Les tribus doivent enregistrer leurs symboles culturels auprès du Musée national en vue de leur préservation.

Article 6

Information sur les mesures d’ordre législatif et judiciaire

45.Le système juridique tanzanien est, à travers la Constitution, basé sur la common law. La Tanzanie a adopté la common law par le biais de l’ordonnance de 1961 sur la magistrature et l’application des lois, qui a été adaptée au contexte tanzanien. L’article 2.2 de cette ordonnance confère à la Haute Cour de Tanzanie le pouvoir de juger à la fois les affaires pénales et les affaires civiles.

46.La séparation des pouvoirs est reconnue par la Constitution et le pouvoir est exercé par l’exécutif, le législatif et le judiciaire. L’indépendance du système judiciaire est garantie à l’article 107A de la Constitution et la primauté du pouvoir législatif est consacrée à l’article 64.

47.Les tribunaux de paix (Ward tribunals) sont des instances administratives chargées de rendre la justice au niveau communautaire. Ils s’occupent de conciliation. Ils ne font pas partie du système judiciaire. Les tribunaux de paix ne couvrent pas l’ensemble du pays. Ils sont peu nombreux par rapport à la population desservie. Toutefois, ils permettent de régler des affaires qui auraient autrement été portées devant les tribunaux et nécessité un temps considérable pour être tranchées. Les tribunaux de paix contribuent largement à l’accès à la justice.

48.Au bas de la hiérarchie des instances judiciaires il y a le tribunal d’instance qui comprend un magistrat de première instance et deux assesseurs. Le rôle joué par les assesseurs consacre le principe de la participation du peuple à l’administration de la justice. Les jugements sont en vertu de la loi rendus à la majorité. À la Haute Cour, les assesseurs ont pour tâche de conseiller le tribunal quant aux faits de la cause mais pas quant au droit. Les tribunaux de district sont présidés par des magistrats de district, les tribunaux permanents de première instance par un magistrat permanent et la Haute Cour par un juge. À la Cour suprême, les assesseurs siègent aux côtés du juge dans les affaires pénales comme les homicides, la trahison et les crimes économiques. À la Haute Cour, les assesseurs ne siègent pas dans les affaires civiles. Mis à part le fait que la Haute Cour a une juridiction plus large s’agissant des litiges, elle comprend deux chambres compétentes pour connaître des affaires commerciales et foncières respectivement. La cour d’appel de Tanzanie est l’instance la plus haute du système judiciaire du pays. Elle est actuellement composée de sept juges d’appel.

49.Il existe également des tribunaux spéciaux comme la Cour martiale, qui a été créée en vertu de la loi no 24 de 1966 sur la défense nationale et qui connaît des affaires de discipline militaire, le tribunal du travail (loi no 14 de 1997), les tribunaux pour mineurs, les tribunaux des baux, qui ont été créés en vertu des instructions gouvernementales nos 435 et 240 de 1990 et qui connaissent des litiges concernant les loyers, la Commission des recours relatifs aux impôts (loi no 15 de 2000) et les tribunaux de paix, qui statuent sur les litiges dans les villages.

50.Le système judiciaire comprend également une Cour constitutionnelle spéciale créée en vertu de l’article 125 de la Constitution. Elle a pour seule fonction, conformément à l’article 126 de la Constitution, d’examiner et de trancher les affaires concernant l’interprétation en cas de litige sur le sens ou l’application de la Constitution entre le Gouvernement de la République‑Unie de Tanzanie et le Gouvernement révolutionnaire de Zanzibar. Selon la Constitution «la Cour constitutionnelle spéciale n’a pas compétence pour statuer sur une décision de la Haute Cour ou de la cour d’appel, rendue conformément aux dispositions de l’article 83 de la présente Constitution, ni pour modifier une telle décision pas plus qu’elle n’a compétence sur les décisions de la cour d’appel conformément à l’article 117...».

Recours contre la discrimination raciale

51.Afin d’assurer que le problème de la discrimination raciale soit traité comme il se doit, le Gouvernement a, en vertu de l’article 129 de la Constitution, créé en 2000 la Commission des droits de l’homme et de la bonne gouvernance, en lieu et place de la Commission d’enquête permanente. La Commission a pour fonction d’enquêter sur les plaintes relatives aux violations des droits de l’homme dont elle est saisie. Elle a eu à examiner des plaintes telles que celle de l’East Africa Gold Mines Limited, district de Tarime, contre la Resolute (Tanzania) Limited et consorts à Nzega et contre le Gouvernement, district de Serengeti. La Commission a, d’autre part, publié un rapport sur les conditions dans les prisons. Elle remplit sa fonction de sensibilisation du public en organisant des réunions, des ateliers et des colloques pour informer la population sur les droits de l’homme.

52.La Tanzanie a un système juridique dualiste au regard des instruments internationaux, lesquels ne sont appliqués qu’après avoir été traduits en lois nationales. Le processus de ratification doit être suivi par l’adoption de textes législatifs pour que l’instrument ait le même statut que les lois internes. La ratification incombe au Parlement, en vertu de l’article 63 3) e) de la Constitution. Les tribunaux ont souligné que le Gouvernement avait l’obligation de respecter les engagements contractés dans le cadre d’instruments internationaux ou régionaux. Dans l’affaire Transport Equipment Ltd. and John Nolan v. Devram P. Valambhia (requête civile no 49 de 1993), le tribunal a considéré (en passant) que le fait que des instruments internationaux auxquels la République‑Unie de Tanzanie était partie n’étaient pas intégrés au droit interne n’exonérait pas le Gouvernement de ses obligations. Les instruments internationaux deviennent applicables du simple fait de la signature, qui crée une coutume internationale reconnue dans la pratique. On peut donc conclure, sur la base de l’avis ci‑dessus donné indirectement par le tribunal, que les conventions, qui sont assimilées aux coutumes découlant des principes généraux de la common law, peuvent, même si elles ne sont pas intégrées au droit interne, être invoquées en tant que droit coutumier international (normes obligatoires). Cet avis n’est qu’incident au regard de la Constitution, et selon la pratique de l’État il ne met pas sur un pied d’égalité les conventions non incorporées au droit interne, car les normes de ce type ont un rang inférieur dans la hiérarchie des règles de droit. Elles sont même considérées comme inférieures au droit coutumier local, qui est, lui, codifié. Le Gouvernement effectue actuellement des réformes juridiques, et procède notamment à un réexamen du droit écrit. Une telle opération est nécessaire pour éliminer les contradictions entre le droit interne et les instruments internationaux, ce à quoi l’État s’est fermement engagé.

53.La Charte des droits de l’homme, qui est incorporée à la Constitution aux articles 12 à 29, s’apparente à la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948. Les droits qu’elle consacre peuvent être invoqués en justice, conformément à la loi no 33 de 1984 sur l’application des droits et devoirs fondamentaux. Toutes les lois doivent être conformes à la Charte, sous peine d’être déclarées anticonstitutionnelles par les tribunaux. Une des critiques dont ces lois font en général l’objet porte sur les restrictions qui affaiblissent les droits de l’homme. Dans l’affaire Director of Public Prosecutions v. Daudi Pete (1993) (TLR 22), la cour d’appel a statué que «tout texte de loi dont la portée serait si large qu’il relèverait en partie des dispositions de l’article (l’article 30 de la Constitution) mais s’inscrirait en partie en dehors du champ de ces dispositions serait invalidé, car en voulant protéger la société il la mettrait en danger». Le Gouvernement est actuellement en train de réviser la Constitution pour lui apporter les améliorations nécessaires.

54.Afin d’assurer que la justice protège efficacement les droits fondamentaux, une procédure faisant intervenir trois juges a été mise en place. La Haute Cour est dotée de 11 greffes qui se trouvent à Arusha, Moshi, Tabora, Dodoma, Mwanza, Mtwara, Mbeya, Songea, Dar es‑Salaam, Tanga et Bukoba. Le Gouvernement a l’intention de faire en sorte qu’il y en ait un dans chacune des 22 régions.

Pratiques et décisions des tribunaux

55.Il y a lieu de noter que les partis politiques du pays observent le principe de non‑discrimination qui est inscrit dans leurs statuts. Par exemple, les articles 4 1), 2) et 5 11) des statuts du parti au pouvoir, le CCM, condamnent la discrimination raciale sous toutes ses formes et il en va de même pour l’article 13 des statuts du NCCR Mageuzi. Le Parti démocratique insiste au chapitre 1 de ses statuts sur le fait que nul ne doit faire l’objet d’une discrimination. Le Front démocratique populaire condamne dans ses statuts (chap. 2, art. 9 c)) la discrimination raciale quelle qu’en soit la forme. Le Front civique unique décourage la discrimination à l’article 6 1) de ses statuts, le Forum pour la restauration de la démocratie (chap. 1, art. 6 1) b)), l’Union pour une démocratie multipartite (art. 2 3)) et le Parti travailliste tanzanien (art. 8 1)) condamnent également la discrimination dans leurs statuts. Toutefois, la Tanzanie n’a pas créé de tribunaux particuliers pour les questions de discrimination raciale car il ne s’agit pas d’un problème de grande ampleur. Toutefois des tribunaux qui jugent les affaires civiles peuvent s’en occuper (voir par. 49).

Informations relatives à la recommandation générale XXVI de 2000 concernant l’article 6

56.La Tanzanie se conforme à la recommandation générale XXVI qui confirme le droit de demander une juste réparation pour tout dommage subi du fait de la discrimination, conformément à l’article 6 de la Convention. Le système judiciaire tanzanien a compétence pour indemniser une personne ayant subi une humiliation ou victime d’une discrimination raciale.

Article 7

Éducation et formation

57.La Tanzanie était, dans les années 70, très active dans la lutte contre l’illettrisme. Au milieu des années 80, le taux d’alphabétisation était de 80 % grâce à l’enseignement primaire et à l’éducation pour adultes gratuits. Aujourd’hui, la qualité de l’enseignement à tous les niveaux s’est détériorée à cause des problèmes économiques et sociaux dont souffre le pays. L’analphabétisme chez les adultes a augmenté de 10 % en 1986 et de 16 % au début des années 90 et croît selon les estimations de l’UNICEF à un rythme de 2 % par an.

58.Le taux d’inscription brut dans l’enseignement supérieur est de 1 % du groupe d’âge, avec des disparités liées au sexe, à l’origine sociale et aux régions. Cela dit, le taux d’inscription à l’école primaire a augmenté en 2002 avec l’abolition de la contribution scolaire obligatoire. En ce qui concerne l’enseignement secondaire, le taux de passage de l’école primaire à l’école secondaire qui était de 19,5 % en 2001 a atteint 21,7 % en 2002. La proportion de filles inscrites en cinquième a également augmenté de 38 à 42 %, et un total de 4 367 élèves de sexe féminin de la première à la sixième année continuent de recevoir une aide au titre du Programme d’appui à l’enseignement secondaire des filles qui soutient les élèves qui ont les aptitudes requises et dont les parents ne peuvent assumer les frais de scolarité. Au total, 15 991 salles de classe ont été construites en 2002 contre 13 868 dans le cadre du Programme communautaire de développement de l’enseignement primaire. Le taux général d’inscription a atteint les 98,6 % au cours de l’année alors que le taux net d’inscription était à 80,7 %, soit en dessous de l’objectif de 85 % pour 2003. Les données indiquent que le nombre total d’élèves a augmenté de 23 %. Le Gouvernement a augmenté de 5,8 % le nombre d’enseignants et de 4,8 % le rythme de construction d’écoles primaires (données de l’UNICEF) pour faire face aux besoins. Conscient de l’importance de l’éducation, il garantit l’enseignement en primaire universel gratuit. Cependant, les parents doivent prendre en charge les frais d’enseignement supérieur. Il existe des prêts publics aux étudiants pour leur permettre de poursuivre des études supérieures à l’université et dans d’autres établissements du tertiaire.

Information concernant la lutte contre les préjugés qui nourrissent la discrimination raciale

59.Bien que la Tanzanie n’ait pas de politique en matière de discrimination raciale, la loi sur l’éducation interdit formellement l’inscription des élèves et des étudiants en fonction de critères raciaux. Il n’y a donc pas de place pour la discrimination raciale dans le système éducatif tanzanien.

60.En 1974, le Gouvernement a pris l’initiative d’inscrire des enfants massaïs, wahdzabes et barbaigs à l’école primaire et secondaire avec des barèmes de notation spéciaux.

61.Le Gouvernement a formulé une politique culturelle ayant les objectifs suivants:

a)Faire du kiswahili la langue nationale;

b)Promouvoir les langues vernaculaires;

c)Promouvoir les arts et les métiers;

d)Protéger et promouvoir le patrimoine culturel;

e)Faire en sorte que les activités récréatives soient fondées sur les valeurs nationales;

f)Sensibiliser le public pour qu’il participe pleinement aux activités culturelles;

g)Veiller à ce que la famille soit respectée en tant qu’institution de base importante;

h)Promouvoir l’enseignement et la formation dans différentes professions liées à la culture.

III. CONCLUSION

62.La République‑Unie de Tanzanie apprécie le travail accompli par le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale en vue de promouvoir les droits de l’homme dans le monde. Son action permet de faire contrepoids aux pouvoirs des États parties pour protéger la dignité des êtres humains. Le Gouvernement a pris le ferme engagement d’appliquer la Convention et de présenter au Comité des rapports périodiques, ce qu’il n’avait pas fait depuis un certain temps. Avec le présent rapport, il ouvre une nouvelle page dans le processus d’établissement de rapports prévu à l’article 9 de la Convention.

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