Nations Unies

CCPR/C/MDA/CO/2

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

4 novembre 2009

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’homme

Quatre-vingt- dix- septième session

12-30 octobre 2009

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte

Observations finales du Comité des droits de l’homme

République de Moldova

1.Le Comité des droits de l’homme a examiné le deuxième rapport périodique soumis par la République de Moldova (CCPR/C/MDA/2) à ses 2659e et 2660e séances, les 13 et 14 octobre 2009, et a adopté, à sa 2682e séance, le 29 octobre 2009, les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le deuxième rapport périodique de la République de Moldova, qui contient des renseignements utiles sur les mesures adoptées pour poursuivre la mise en œuvre du Pacte. Il relève toutefois que si le rapport donne des renseignements sur les mesures d’ordre législatif et autre, il ne traite pas suffisamment de la mise en œuvre de ces mesures ou de leurs incidences. Le Comité exprime ses remerciements pour les réponses données oralement par la délégation et pour les réponses écrites à la liste des points à traiter qui n’ont malheureusement été soumises que quelques jours avant l’examen du rapport de l’État partie. Le Comité tient à souligner combien il importe que les réponses écrites à la liste des points à traiter soient soumises suffisamment à l’avance pour faciliter un débat plus approfondi au sujet de la mise en œuvre du Pacte.

B.Aspects positifs

3.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures législatives et autres ci-après, adoptées depuis l’examen du rapport initial:

a)La suppression, conformément à la loi no 185-XVI du 29 juin 2006, de la disposition de la Constitution qui autorisait l’application de la peine de mort «pour des actes commis en situation de guerre ou de menace de guerre»;

b)La modification, en 2005, du Code pénal, qui introduit une disposition prévoyant l’incrimination de la torture;

c)L’adoption, en février 2006, de la loi sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes;

d)La Stratégie nationale de 2004 visant à prévenir et à combattre la corruption;

e)Le Plan national pour la promotion de l’égalité entre hommes et femmes dans la société pour la période 2006-2009; et

f)La ratification du deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte, du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et du Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

4.Le Comité se déclare préoccupé par l’absence de progrès réels dans la mise en œuvre de nombreuses recommandations qu’il avait faites précédemment, en particulier celles qui portaient sur les conditions dans les établissements de détention, la traite des êtres humains, la durée de la détention avant jugement, l’indépendance du pouvoir judiciaire, l’exercice du droit à la liberté de religion, la participation des femmes aux postes de décision élevés dans le secteur public et le secteur privé, le recours à l’avortement en tant que moyen de contraception, et la discrimination subie par des minorités comme les Roms.

L’État partie devrait intensifier ses efforts pour donner suite aux recommandations du Comité dans ces domaines.

5.Le Comité prend note de l’information donnée par l’État partie qui explique qu’il ne peut pas exercer de contrôle effectif sur le territoire de la Transnistrie, ce qui continue d’entraver la mise en œuvre du Pacte dans cette région. Il note toutefois que l’État partie a toujours l’obligation de garantir le respect des droits reconnus dans le Pacte à l’égard de la population de la Transnistrie, dans les limites de son pouvoir effectif.

L’ État partie devrait renouveler ses efforts pour surmonter les obstacles qui entravent la mise en œuvre du Pacte en Transnistrie et devrait faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les mesures qu’il aura prises à cette fin.

6.Le Comité note que, en vertu de la Constitution de l’État partie, les dispositions relatives aux droits de l’homme doivent être interprétées conformément à la Déclaration universelle des droits de l’homme et aux instruments internationaux auxquels il est partie, et que les obligations internationales relatives aux droits de l’homme l’emportent sur la législation interne. Il relève toutefois que, dans la pratique, les dispositions du Pacte ne sont pas invoquées par les tribunaux de l’État partie (art. 2).

L’État partie devrait faire des efforts sérieux pour diffuser une information sur les dispositions du Pacte auprès des juges, de façon à leur permettre d’appliquer le Pacte dans les cas voulus, et auprès des avocats et de la population pour leur permettre d’invoquer les dispositions du Pacte devant les tribunaux. L’État partie devrait donner dans son prochain rapport périodique des exemples détaillés de l’application du Pacte par les juridictions nationales.

7.Le Comité note avec préoccupation que l’État partie n’a pas adopté de législation complète interdisant la discrimination, de façon à prévenir et à combattre la discrimination dans tous les domaines (art. 2 et 26).

L’État partie devrait adopter une législation de lutte contre la discrimination complète, qui interdise expressément tous les motifs de discrimination énoncés dans le Pacte, et qui prévoie aussi des sanctions et une réparation adéquates.

8.Le Comité exprime sa préoccupation face aux informations crédibles faisant état de violations graves des droits de l’homme commises contre des protestataires à la suite des manifestations postélectorales en avril 2009. À ce sujet, le Comité prend acte de la déclaration de la délégation qui a affirmé que les agents des forces de l’ordre avaient «outrepassé leurs pouvoirs». Il est particulièrement préoccupé par les rapports faisant état d’arrestations arbitraires, de l’utilisation de méthodes violentes pour maîtriser la foule, y compris de coups, et des tortures et des mauvais traitements infligés à des personnes arrêtées dans le cadre des manifestations postélectorales (art. 2, 6, 7, 9 et 21).

L’État partie devrait:

a) Faire p rocéder à des enquêtes approfondies sur toutes les plaintes pour abus de pouvoir commis par les agents des forces de l’ordre pendant les manifestations d’avril 2009, par un organe indépendant et impartial dont les conclusions devront être rendues publiques;

b) Prendre des mesures pour garantir que les agents des forces de l’ordre reconnus responsables d’avoir infligé de s tortures et de s mauvais traitements à de s manifestants, y compris ceux qui occupent d es postes de commandement, rendent compte de leurs actes et fassent l’objet de poursuites et de mesures disciplinaires appropriées et que, pendant la durée de l’enquête, les agents impliqués soient suspendus de leurs fonctions;

c) Veiller à ce qu’une indemnisation appropriée soit versée aux victimes d’actes de torture et d’ autres formes de mauvais traitements qui ont été commi s pendant les manifestations d’avril 2009, indépendamment de l’issue des poursuites pénales engagées contre les responsables, et que des mesures de réadaptation médicale et psychologique soient offertes aux victimes; et

d) Garantir le respect du droit à la liberté de réunion consacré à l’article 21 du Pacte, en particulier en assurant la mise en œuvre de la loi de 2008 sur les réunions, et mettre en place des moyens de prévention , comme une formation appropriée , permettant d’éviter que de telles violations des droits de l’homme par les agents des forces de l’ordre ne se reproduisent à l’avenir .

9.Le Comité note avec une grave préoccupation l’incidence de la torture et des mauvais traitements dans les postes de police et autres lieux de détention de l’État partie. Malgré l’explication de la délégation qui a affirmé que les procureurs étaient tenus par la loi de se rendre quotidiennement dans les lieux de détention provisoire, inspections pendant lesquelles les personnes en état d’arrestation pouvaient parler librement avec le procureur, le Comité s’inquiète de ce que la pratique de la torture soit généralisée. Le Comité est préoccupé par le fait que souvent les plaintes pour torture ne sont pas correctement enregistrées ou ne font pas l’objet d’enquêtes sérieuses et qu’il y a une tendance à rejeter les plaintes en les déclarant «manifestement dénuées de fondement». De plus, le Comité relève l’insuffisance des voies de recours ouvertes, c’est-à-dire que la Commission des plaintes ne fonctionne pas et que les avocats parlementaires, auxquels les plaintes peuvent également être adressées, ont des moyens très limités pour y donner suite (art. 2, 7 et 10).

L’État partie devrait:

a) Prendre d’urgence des mesures pour faire cesser la pratique de la torture dans les locaux de la police et d’autres lieux de détention, notamment en dispensant une formation appropriée aux fonctionnaires de police et aux agents pénitentiaires, en veillant à ce que toutes les plaintes pour torture et autres formes de mauvais traitements fassent l’objet d’une enquête et à ce que les responsables soient poursuivis et punis et en faisant en sorte que la loi interdisant d’admettre des preuves obtenues par la torture soit effectivement appliquée; et

b) Faire en sorte que des voies de recours utiles soient ouvertes et permettent d’offrir une indemnisation, selon qu’il convient, aux victimes de la torture et d’autres formes de mauvais traitements.

10.Le Comité note avec préoccupation que le mécanisme national de prévention de la torture semble ne pas être doté de ressources suffisantes et n’a pas encore recruté tous les experts nécessaires. Il note en outre que plusieurs des visites déjà entreprises dans des lieux de détention avaient été annoncées à l’avance (art. 2, 7 et 10).

L’État partie devrait renforcer son mécanisme national de prévention de la torture et assurer son indépendance, en particulier:

a) En augmentant les ressources financières qui lui sont allouées;

b) En accélérant le recrutement d’experts qualifiés pour le composer;

c) En garantissant que toutes les personnes qui participent à l’administration des lieux de détention soient informées que le mécanisme national de prévention a le droit de se rendre dans tout lieu de détention, sans être accompagné et sans aucune forme de notification préalable ; et

d) En rendant publics et en diffusant les rapports annuels du mécanisme national de prévention.

11.Le Comité est préoccupé par le fait que le Centre des droits de l’homme ne dispose pas de ressources financières suffisantes et dépend du pouvoir exécutif pour son financement. Il relève aussi avec préoccupation que la majorité des plaintes adressées au Centre des droits de l’homme ne font pas l’objet d’une véritable enquête. Le Comité note l’absence de renseignements sur les mesures prises pour faire connaître à la population l’existence et les attributions du Centre des droits de l’homme et du mécanisme national de prévention (art. 2).

L’État partie devrait prendre les mesures voulues afin de garantir que le Centre des droits de l’homme soit doté des ressources humaines et financières suffisantes pour lui permettre de s’acquitter efficacement de son mandat. Il devrait également prendre des mesures énergiques pour faire mieux connaître l’existence et le mandat de ces institutions en vue d’obtenir une parfaite conformité avec le paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte .

12.Le Comité est préoccupé par le fait que les personnes porteuses du VIH/sida se heurtent à une discrimination et une stigmatisation dans l’État partie, notamment dans le domaine de l’enseignement, de l’emploi, du logement et des soins de santé, et par le fait que les étrangers soient soumis arbitrairement à des tests de dépistage du VIH/sida dans le cadre de la réglementation relative à l’immigration. En particulier, le Comité s’inquiète de ce que les professionnels des soins de santé ne respectent pas toujours la confidentialité à l’égard des patients. Il s’inquiète également de ce que la législation interdit l’adoption d’enfants porteurs du VIH/sida, ce qui les prive d’un environnement familial (art.2, 17 et26).

L’État partie devrait prendre des mesures pour lutter contre la stigmatisation subie par les personnes porteuses du VIH/sida, notamment en organisant des campagnes de sensibilisation et d’information sur le VIH/sida, et il devrait modifier sa législation et sa réglementation de façon à supprimer les dispositions interdisant l’adoption d’enfants porteurs du VIH/sida, ainsi que les autres dispositions législatives ou réglementaires relatives au VIH/sida qui sont discriminatoires.

13.Le Comité note avec préoccupation que, en vertu d’un règlement promulgué en août 2009, les personnes souffrant de tuberculose peuvent être placées de force en détention dans le cas où elles sont réputées «se soustraire au traitement». En particulier, ce règlement ne définit pas clairement ce que l’on entend par «se soustraire au traitement» et ne prévoit pas, notamment, la confidentialité à l’égard du patient ou la possibilité d’obtenir un examen judiciaire de la décision de placement forcé d’un patient en détention (art. 2, 9 et 26).

L’État partie devrait réexaminer d’urgence cette pratique pou r la rendre compatible avec le P acte , en faisant en sorte que toute mesure coercitive dictée par des considérations de santé publique soit prise en tenant dûment compte du respect des droits des patients, en garantissant un examen judiciaire de la décision et la confidentialité et en veillant à ce que les personnes souffrant de tuberculose soient à tous autres égards traitées avec humanité.

14.Le Comité prend note avec préoccupation des informations indiquant que la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle semble être généralisée dans tous les secteurs de la société (art. 2 et 26).

L’État partie devrait prendre des mesures pour lutter contre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle, notamment en organisant des programmes de formation à l’intention des fonctionnaires de police et des personnels de santé , ainsi que des campagnes visant à faire connaître aux victimes potentielles leurs droits et les dispositifs en place pour obtenir réparation.

15.Le Comité note avec préoccupation que la participation des femmes sur le marché de l’emploi reste considérablement plus faible que celle des hommes et qu’il existe toujours un écart salarial en défaveur des femmes du fait, entre autres facteurs, d’une culture de la ségrégation entre hommes et femmes sur le lieu de travail. Le Comité prend acte des mesures telles que l’adoption du Plan national pour la promotion de l’égalité des hommes et des femmes dans la société, qui porte sur la période 2006-2009, et de la loi sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes, mais il s’inquiète aussi de ce que la représentation des femmes aux postes élevés reste faible dans le secteur public comme dans le secteur privé, et tout particulièrement dans l’appareil judiciaire, dans les organes électifs et dans les institutions universitaires (art. 3 et 25).

L’État partie devrait renforcer la mise en œuvre des dispositions législatives et des mesures de politique générale de façon à garantir que les femmes aient en toute égalité accès au marché de l’emploi et perçoivent un salaire égal pour un travail d’égale valeur. Il devrait également intensifier ses efforts en vue d’obtenir une réelle égalité entre hommes et femmes dans l’exerc ice des droits garantis par le P acte et, à ce sujet , devrait prendre des mesures pour encourager la participation accrue des femmes aux postes de décision dans le secteur public et le secteur privé.

16.Le Comité accueille avec satisfaction la décision rendue le 25 septembre 2009 par un tribunal d’Anenii Noi, qui a émis une ordonnance de protection en faveur de la victime dans une affaire de violence familiale. Néanmoins, il se déclare préoccupé par la violence familiale dans l’État partie, par la rareté des mesures d’intervention prises par l’appareil judiciaire, par le petit nombre et la capacité limitée des foyers d’accueil pour les victimes de violence familiale et par les informations indiquant que la violence familiale n’est considérée comme justifiant l’intervention de la police que dans les cas où la victime a subi des lésions graves (art. 3, 7 et 26).

L’État partie devrait assurer la mise en œuvre de la loi sur la violence famil iale et apporter un soutien aux victimes en ouvrant davantage de foyers d’accueil, en assurant des services de conseils à titre gratuit et en prenant toute autre mesure nécessaire pour la protection des victimes. Le Comité invite instamment l’État partie à prendre des mesures de prévention et à organiser une formation sur la façon de traiter les affaires de violence famil iale , à l’intention de tous les professionnels appelés à s’occuper de telles affaires, y compris les fonctionnaires de police, les procureurs, les juges et les travailleurs sociaux, en mettant l’accent sur les aspects de la violence liés au sexe de la victime . L’État partie devrait également donner dans son prochain rapport périodique des renseignements sur l’incidence de la violence famil iale , sur les mesures qu’il a ura prises pour s’occuper du problème, notamment la délivrance d’ordonnance s d’interdiction temporaire, et sur les résultats éventuels de l’application de ces mesures.

17.Le Comité s’inquiète de ce que, malgré la mise en place de la Stratégie nationale pour la santé (2005-2015), le recours à l’avortement en tant que moyen de contraception est généralisé. Il note à ce sujet que la loi sur l’assurance médicale obligatoire, qui prévoit le remboursement de contraceptifs dans les prestations de base, n’a pas été mise en œuvre. De plus, le Comité est préoccupé par le fait que, alors que l’avortement n’est pas interdit par la loi, il est arrivé que des femmes soient poursuivies pour meurtre ou infanticide après avoir avorté, et que des soins postavortement ne soient pas dispensés en prison (art. 3, 9 et 10).

L’État partie devrait:

a) Prendre des mesures pour que l’avortement ne soit plus utilisé comme moyen de contraception , en garantissant notamment la fourniture à un prix abordable de moyens de contraception et en introduisant dans les programmes scolaires et à l’intention du grand public des cours d’éducation sur la santé de la procréation et sur l’hygiène sexuelle;

b) Appliquer rigoureusement la loi de façon que les femmes qui se font avorter ne soient pas poursuivies en justice pour meurtre ou infanticide;

c) Remettre en liberté les femmes qui exécuteraient actuellement une peine après avoir été condamnées pour ce motif; et

d) Faire en sorte que les femmes qui ont subi un avortement et qui se trouvent dans un établi ssement pénitentiaire reçoivent les soins de santé nécessaires.

18.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption de la loi de 2005 visant à prévenir et combattre la traite des êtres humains, et la mise en place du centre de réadaptation pour les victimes de traite. Il reste toutefois préoccupé par le fait que l’État partie est toujours un pays d’origine et de transit pour la traite, en particulier des femmes et des enfants, en dépit de l’adoption d’une législation et d’une politique générale dans ce domaine (art. 3, 7, 8 et 26).

L ’ État partie devrait renforcer la mise en œuvre de sa législation et des mesures de politique générale visant à lutter contre la traite , notamment en agissant de façon plus concertée pour poursuivre les délinquants et protéger les victimes. Il devrait également élargir l’application des mesures en place afin d’ aider les victimes à se réinsérer dans la société et d’ assurer un accès effectif aux soins de santé et aux services de conseil dans toutes les régions du pays.

19.Le Comité note avec préoccupation que la durée maximale prévue par la loi pour la garde à vue est de soixante-douze heures après l’arrestation et que de surcroît cette durée est souvent dépassée. De plus, le Comité est préoccupé par le fait que le placement en détention avant jugement est décidé en fonction de la peine fixée pour l’infraction dont l’intéressé est inculpé. Le Comité s’inquiète également de ce que, d’après les renseignements apportés par l’État partie, cette période peut être prolongée de six à douze mois, en fonction du chef d’inculpation, qu’elle ne fait l’objet d’un contrôle judiciaire qu’à des intervalles trimestriels et qu’elle peut être prolongée à la discrétion du Procureur général (art. 9 et 14).

L ’ État partie devrait limiter la durée de la garde à vue après l ’ arrestation et la durée de la détention avant jugement , conform ément au paragraphe 3 c) de l ’ article 14 du Pacte , et devrait veiller à ce que les dispositions de l ’ article 9 soient rigoureusement respectées. À ce sujet, l ’ État partie devrait tenir dûment compte de l ’ Observation générale n o 32 (2007) relative au droit à l ’ égalité devant les tribunaux et les cours de justice et à un procès équitable, et de l ’ Observation générale n o 8 (1982) relative au droit à la liberté et la sécurité de la personne.

20.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures prises par l’État partie pour appliquer des méthodes autres que la détention dans le cas des enfants en conflit avec la loi, comme la probation et la médiation, mais il est toujours préoccupé par le fait que les mineurs sont fréquemment placés en détention (art. 9, 10, 14 et 24).

L ’ État partie devrait:

a) Continuer à élargir le mode d’approche concernant la délinquance des mineurs, en s’attaquant aux facteurs sociaux sous-jacents et en n’ordonnant l’emprisonnement qu’à titre de mesure de dernier recours;

b) Veiller à ce que tous les professionnels qui participent à l ’ administration de la justice des mineurs reçoivent une formation sur les normes internationales applicables, notamment les L ignes directrices en matière de justice dans les affaires impliquant les enfants victimes et témoins d ’ actes criminels (Conseil économique et social, résolution 2005/20); et

c) Mettre en œuvre des politiques visant à diminuer la récidive.

21.Le Comité prend note de la diminution importante du nombre total de détenus incarcérés dans l’État partie mais il est préoccupé par la surpopulation qui règne dans certains établissements et par le fait que les conditions de détention sont toujours pénibles − aération et lumière insuffisantes, mauvaises conditions d’hygiène et installations sanitaires inadéquates et accès insuffisant aux soins de santé. Le Comité note l’information donnée par l’État partie selon laquelle toutes les personnes en détention ont le droit d’être examinées par un médecin, à leur demande, mais il a appris avec préoccupation que, quand ces examens étaient effectués, ils étaient souvent sommaires (art. 10).

L ’ État partie devrait , à titre d ’ urgence, veiller à améliorer les conditions de vie dans les lieux de détention de façon à les rendre conformes à la norme énoncée au paragraphe 1 de l ’ article 10 du Pacte.

22.Le Comité se déclare préoccupé par le fait que les garanties d’un procès équitable énoncées dans le Pacte sont fréquemment violées dans la pratique. En particulier, il s’inquiète de ce que le droit à l’assistance d’un avocat et le droit d’être jugé en audience publique ne sont pas automatiquement respectés dans les actions en justice. Il note à ce sujet que l’État partie a fait savoir que la majorité des plaintes adressées au Centre des droits de l’homme portaient sur des griefs de violations des garanties d’un procès équitable (art.14).

L ’ État partie devrait veiller à ce que les procédures judiciaires soient menées dans le respect absolu de l ’ article 14 du Pacte.

23.Le Comité est préoccupé par les difficultés rencontrées dans l’administration de la justice dans l’État partie, notamment l’inexécution des décisions judiciaires, l’inefficacité et le professionnalisme limité de l’administration des tribunaux, le manque de salles d’audience adéquates, le manque d’interprètes et les niveaux élevés de corruption (art. 14).

L ’ État partie devrait appliquer la législation déjà en place pour rectifier les déficiences de l ’ administration de la justice, allouer des ressources suffisantes à l ’ appui du système judiciaire, veiller à ce que les personnels de justice sui vent des études et une formation appropriées . Il devrait aussi prendre des mesures pour mener des enquêtes et engager des poursuites dans les cas de corruption.

24.Le Comité tient à souligner le rôle crucial que joue un appareil judiciaire indépendant pour le respect de la légalité et note que l’inamovibilité des juges est un élément majeur de cette indépendance. À ce sujet, le Comité note avec préoccupation que les juges sont nommés pour une période initiale de cinq ans et que ce n’est qu’après cette période que leur nomination peut devenir définitive (art. 14).

Le Comité réitère sa recommandation précédente tendant à ce que l ’ État partie ré vis e sa législation de façon à garantir que la durée du mandat des juges soit suffisamment longue pour assurer leur indépendance, conformément aux prescri ptions du paragraphe 1 de l ’ article 14 du Pacte.

25.Le Comité est préoccupé par les restrictions que l’État partie impose à l’exercice de la liberté de religion. À ce sujet, il note avec préoccupation que, en application de la loi qui oblige les organisations religieuses à se faire enregistrer, des sanctions administratives ont été prises contre des personnes appartenant à des organisations religieuses non enregistrées. Le Comité est également préoccupé par les informations indiquant que l’enregistrement a été refusé à de nombreuses organisations religieuses (art. 18).

L ’ État partie devrait prendre d ’ urgence des mesures pour rendre sa législation et sa pratique co mpatible s avec l ’ article 18 du Pacte.

26.Le Comité est préoccupé par les informations qui signalent que des groupes d’intérêts et des individus politiquement influents font jouer les lois relatives à la diffamation pour s’en prendre à des journalistes indépendants. Il relève également avec préoccupation les informations selon lesquelles des entreprises de télédiffusion indépendantes ont fait l’objet de poursuites (art. 19 et 26).

L ’ État partie devrait prendre d ’ urgence des mesures pour garantir l ’ exercice du droit à la liberté d ’ expression par les journalistes et les médias, conformément à l ’ article 19 du Pacte.

27.Le Comité note que la délégation a expliqué que l’extrême pauvreté qui est le lot de la communauté rom était due à un manque d’instruction et de qualifications. Il relève toutefois avec préoccupation que les Roms sont toujours marginalisés du point de vue social et économique et ont un accès limité aux services sociaux comme les soins de santé, l’emploi, l’éducation et le logement. Il s’inquiète également des attitudes discriminatoires à l’égard des Roms dans la société en général, comme le montre notamment leur exclusion de facto de toute participation à la vie publique (art. 2, 25 et 26).

L ’ État partie devrait prendre toute s les mesures nécessaires pour faire en sorte que dans la pratique les Roms exerce nt les droits qui leur sont garantis par le Pacte sur un pied d’égalité avec tous les autres groupes sociaux , notamment des action s visant à les intégrer et à les insérer dans l e reste de l a société, à mettre effectivement en œuvre l ’ interdiction de la discrimination raciale et à faire connaître à la population les droits reconnus par le Pacte .

28.Le Comité note que l’État partie a reconnu que les organisations de la société civile n’avaient pas été invitées à participer à l’établissement du rapport, et réaffirme qu’il estime que les organisations de la société civile peuvent apporter une contribution importante à la réalisation des droits de l’homme, dont ceux qui sont énoncés dans le Pacte.

L ’ État partie devrait faciliter la participation des organisations de la société civile , par un processus de consultation approprié, à l ’ établissement des rapports qu ’ il soumettra à l ’ avenir conformément au Pacte.

29.Le Comité demande à l’État partie de rendre public le deuxième rapport périodique et les présentes observations finales, en les diffusant largement auprès du grand public et des autorités judiciaires, législatives et administratives. Le texte de ces documents devrait être distribué aux universités, aux bibliothèques publiques, à la bibliothèque du Parlement ainsi que dans d’autres lieux. Le Comité demande également à l’État partie de faire connaître le deuxième rapport périodique et les présentes observations finales aux organisations de la société civile et aux organisations non gouvernementales présentes sur son territoire.

30.Conformément au paragraphe 5 de l’article 71 du Règlement intérieur du Comité, l’État partie devrait faire parvenir dans un délai d’un an des renseignements sur la situation en général et sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations formulées par le Comité aux paragraphes 8, 9, 16 et 18.

31.Le Comité demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique, qui devrait lui parvenir avant le 31 octobre 2013, des renseignements sur les mesures qu’il aura prises pour donner effet aux autres recommandations et sur l’application du Pacte dans son ensemble. À ce propos, le Comité demande également que le rapport que l’État partie soumettra porte sur toutes les régions de la République de Moldova.