Nations Unies

CCPR/C/109/D/1851/2008

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

2 décembre 2013

Français

Original: anglais

Comité des droits de l ’ homme

Communication no 1851/2008

Constatations adoptées par le Comité à sa 109e session(14 octobre‑1er novembre 2013)

Communication présentée par:

Vladimir Sekerko(non représenté par un conseil)

Au nom de:

L’auteur

État partie:

Bélarus

Date de la communication:

17 septembre 2008 (date de la lettre initiale)

Références:

Décision prise par le Rapporteur spécial en application de l’article 97 du Règlement intérieur, communiquée à l’État partie le 15 décembre 2008 (non publiée sous forme de document)

Date de l ’ adoption des constatations:

28 octobre 2013

Objet:

Refus de l’autorisation d’organiser une réunion pacifique.

Questions de fond:

Droit de réunion pacifique; restrictions licites

Questions de procédure:

Épuisement des recours internes

Article du Pacte:

21

Article du Protocole facultatif:

5 (par. 2 b))

Annexe

Constatations du Comité des droits de l’homme au titredu paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatifse rapportant au Pacte international relatifaux droits civils et politiques (109e session)

concernant la

Communication no 1851/2008 *

Présentée par:

Vladimir Sekerko(non représenté par un conseil)

Au nom de:

L’auteur

État partie:

Bélarus

Date de la communication:

17 septembre 2008 (date de la lettre initiale)

Le Comité des droits de l ’ homme, institué en vertu de l’article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 28 octobre 2013,

Ayant achevé l’examen de la communication no 1851/2008 présentée par Vladimir Sekerko en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui ont été communiquées par l’auteur de la communication et l’État partie,

Adopte ce qui suit:

Constatations au titre du paragraphe 4 de l’article 5du Protocole facultatif

1.1L’auteur de la communication est Vladimir Sekerko, de nationalité bélarussienne, né en 1947. Il affirme être victime d’une violation par le Bélarus des droits qui lui sont garantis par l’article 21 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (ci-après «le Pacte»). L’auteur n’est pas représenté par un conseil.

1.2Le 16 février 2009, l’État partie a demandé au Comité d’examiner la question de la recevabilité de la communication séparément du fond, conformément au paragraphe 3 de l’article 97 du Règlement intérieur du Comité. Le 6 mars 2009, par l’intermédiaire de son Rapporteur spécial chargé des nouvelles communications et des mesures provisoires, leComité a décidé d’examiner la recevabilité de la communication en même temps que le fond.

Rappel des faits présentés par l’auteur

2.1L’auteur et un groupe de résidents de la ville de Gomel (ci-après «les autres requérants»), ont demandé au Comité exécutif de la ville de Gomel l’autorisation d’organiser des manifestations de masse en différents endroits de la ville pour protester contre la suppression des prestations sociales pour les personnes dans le besoin. Les manifestations prévues par l’auteur devaient avoir lieu dans des espaces situés devant le Palais de la culture de l’entreprise unitaire privée Vipra et devant le centre commercial Retchitskiy. La demande a été soumise conformément à l’article 5 de la loi du 30 décembre 1997 sur les manifestations de masse en République du Bélarus (ci-après la loi sur les manifestations de masse).

2.2Le 5 décembre 2007, le Comité exécutif de la ville de Gomel a refusé d’autoriser la tenue de ces manifestations de masse au motif que la demande ne contenait pas les informations requises sur les horaires et le déroulement de ces manifestations, en violation des dispositions de l’article 5 de la loi sur les manifestations de masse.

2.3Le 5 décembre 2007, l’auteur et les autres requérants ont déposé une plainte auprès du tribunal du district central de Gomel pour contester la décision du Comité exécutif de la ville de Gomel. Dans cette plainte, l’auteur indiquait qu’il avait fourni les informations requises sur les horaires et le déroulement des manifestations dans un engagement écrit annexé à la demande adressée au Comité exécutif de la ville de Gomel. Le Comité exécutif avait donc restreint son droit de réunion pacifique sans justification.

2.4Le 1er février 2008, le tribunal du district central de Gomel a rejeté les plaintes de l’auteur et des autres requérants, en faisant observer que la demande ne contenait que l’engagement de l’auteur quant à l’organisation desdites manifestations dans le respect des règles et qu’il manquait les informations requises sur les horaires et le déroulement de ces actions. Cependant, selon l’auteur, la raison sous-jacente de la décision du tribunal serait qu’il ait voulu organiser avec les autres requérants des manifestations dans des lieux interdits aux rassemblements. En effet, conformément à la décision no 318 du Comité exécutif de la ville de Gomel du 11 avril 2006, les manifestations de masse ne pouvaient être organisées que dans un seul lieu, dans une ville de 500 000 habitants.L’auteur et les autres requérants ont fait appel de la décision du tribunal de district devant le tribunal régional de la ville de Gomel.

2.5Le 20 mars 2008, le tribunal régional de Gomel a confirmé la décision du tribunal du district central de Gomel. En vertu de l’article 432 du Code de procédure civile bélarussien, les décisions du tribunal régional sont définitives et deviennent exécutoires dès leur adoption. D’après la décision du tribunal régional de Gomel, le Comité exécutif de la ville a refusé de délivrer une autorisation à l’auteur et aux autres requérants au motif que l’engagement écrit annexé à la demande ne contenait pas les informations requises sur les horaires et le déroulement des manifestations prévues, dont la communication était une condition essentielle et obligatoire pour obtenir une autorisation.

2.6L’auteur fait valoir qu’il a épuisé tous les recours internes utiles qui lui étaient ouverts.

Teneur de la plainte

3.1L’auteur dénonce une violation du droit de réunion pacifique garanti par l’article 21 du Pacte. Il affirme que ses droits ont été restreints au motif que sa demande relative à la tenue d’une manifestation de masse était incomplète et qu’il projetait d’organiser une des manifestations dans un lieu non autorisé.Selon lui, les autorités nationales, notamment les tribunaux nationaux, n’ont pas cherché à justifier les restrictions imposées ni à présenter des arguments quant à la nécessité de telles restrictions pour protéger la sécurité nationale ou lasûreté publique, l’ordre public, la santé ou la moralité publiques, ou les droits et libertésd’autrui.

3.2L’auteur affirme que les tribunaux n’ont pas tenu compte des dispositions du Pacte lorsqu’ils ont examiné la décision du Comité exécutif de Gomel. Conformément aux articles 26 et 27 de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités, le Bélarus est lié par le Pacte et devrait l’appliquer de bonne foi et ne peut invoquer les dispositions de son droit interne pour justifier sa non-application. Conformément à l’article 15 de la loi sur les traités internationaux, les principes du droit international et les dispositions des traités internationaux universellement reconnus auxquels le Bélarus est partie font partie intégrante du droit interne. L’auteur souligne que les tribunaux nationaux ont restreint son droit de réunion pacifique au motif qu’il comptait organiser une manifestation dans un lieu non autorisé, en violation d’un règlement. Cette restriction est contraire à l’esprit de l’article 21 du Pacte et aux motifs de restrictions qui y sont énoncés.

Observations de l’État partie sur la recevabilité

4.1Le 16 février 2009, l’État partie a contesté la recevabilité de la communication, arguant que l’auteur n’avait pas épuisé tous les recours internes, puisque l’affaire n’avait pas été examinée par le Bureau du Procureur dans le cadre de la procédure de contrôle.

4.2L’État partie fait également valoir que l’auteur n’a pas demandé au Président du tribunal régional de Gomel ni au Président de la Cour suprême du Bélarus d’engager une procédure de contrôle des décisions du tribunal du district central et du tribunal régional de Gomel, conformément à l’article 439 du Code de procédure civile. L’auteur n’a donc pas épuisé tous les recours disponibles et il n’y a aucune raison de croire que ces moyens de recours n’auraient pas été accessibles ou auraient été inutiles.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie sur la recevabilité

5.Dans une lettre datée du 5 mars 2009, l’auteur rappelle que, conformément au paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte, les particuliers doivent épuiser tous les recours internes disponibles avant de soumettre une requête au Comité. Il fait observer que le Comité a conclu dans d’autres affaires que, lorsque dans l’État partie le déclenchement d’une procédure de contrôle dépend du pouvoir discrétionnaire du juge ou du Procureur, les voies de recours sont limitées au recours en cassation. L’auteur n’a pas demandé au tribunal régional de Gomel ou à la Cour suprême d’engager une procédure de contrôle puisqu’une telle demande n’aurait pas entraîné le réexamen de l’affaire. Conformément à la jurisprudence du Comité, les recours internes doivent être à la fois disponibles et utiles. L’auteur affirme qu’en se pourvoyant en cassation il a épuisé tous les recours internes qui lui étaient ouverts. La décision de la juridiction inférieure a acquis force de chose jugée et est devenue exécutoire dès l’adoption de la décision de la juridiction d’appel.

Commentaires de l’État partie sur le fond

6.1Le 3 août 2009, l’État partie a fait part de ses commentaires sur le fond de l’affaire. Il expose les faits une nouvelle fois et affirme que le Comité exécutif de Gomel a rejeté les plaintes de l’auteur et des autres requérants au motif que l’engagement écrit joint aux demandes d’autorisation d’organiser des manifestations de masse ne contenait pas toutes les précisions requises quant aux horaires et au déroulement de ces manifestations. En vertu de l’article 10 de la loi sur les manifestations de masse, ces renseignements doivent obligatoirement être fournis et leur communication constitue une condition essentielle pour obtenir l’autorisation d’organiser de telles manifestations. En outre, les tribunaux ont établi que l’auteur et les autres requérants n’avaient pas indiqué les mesures prises pour garantir l’ordre public et la sûreté publique, la prestation de soins médicaux et le nettoyage du lieu pendant et après la manifestation, ni fourni les preuves attestant du paiement pour la fourniture de ces services. En outre, certains des requérants avaient demandé à organiser des piquets dans des lieux non autorisés. Dans ces circonstances, qui ne sont pas favorables au maintien de l’ordre public et à la protection de la sûreté publique, le tribunal du district central de Gomel a rejeté la plainte de l’auteur et des autres requérants dans une décision motivée en date du 1er février 2008.

6.2L’organisation et le déroulement des manifestations de masse sont régis par la loi du 30 décembre 1997 sur les manifestations de masse. Cette loi a pour but de créer des conditions favorables à la réalisation des droits et libertés constitutionnels du citoyen et à la protection de l’ordre public et de la sûreté publique pendant la tenue de telles manifestations dans des lieux publics. Conformément à ladite loi, «l’État garantit à chacun la liberté d’organiser des activités de masse qui ne sont pas contraires à l’ordre juridique et ne portent pas atteinte aux droits des autres citoyens de la République du Bélarus».

6.3Le droit de réunion pacifique est consacré à l’article 21 du Pacte. Le Bélarus a ratifié le Pacte et incorporé ses dispositions, y compris celles des articles 19 et 21, dans son droit interne. En particulier, l’article 33 de la Constitution garantit le droit de chacun à la liberté de pensée et d’opinion et à la liberté d’expression, tandis que l’article 35 dispose que la liberté de tenir des réunions, des rassemblements, des défilés de rue, des manifestations et des «piquets» qui ne troublent pas l’ordre public et ne portent pas atteinte aux droits des autres citoyens du Bélarus est garantie par l’État. En outre, conformément à l’article 23 de la Constitution, les droits et libertés des citoyens ne peuvent faire l’objet que des seules restrictions imposées conformément à la loi dans l’intérêt de la sécurité nationale, de la sûreté publique ou pour protéger la santé ou la moralité publiques, ou les droits et les libertés d’autrui.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie sur le fond

7.1Dans une lettre datée du 5 octobre 2009, l’auteur souligne que le droit consacré par l’article 21 du Pacte ne peut faire l’objet de restrictions que sous certaines conditions énumérées dans ledit article, et les restrictions imposées par les États parties sur l’exercice du droit de réunion pacifique ne doivent pas être contraires à l’essence de ce droit. Les États parties doivent s’assurer que les restrictions imposées sont justifiées par l’un des objectifs légitimes énoncés à l’article 21 du Pacte.

7.2Selon l’auteur, même en supposant que l’engagement écrit joint à sa demande d’autorisation d’organiser une manifestation de masse ne contenait pas tous les renseignements requis au titre de l’article 5 de la loi sur les manifestations de masse, et en supposant qu’il avait l’intention d’organiser un rassemblement pacifique dans un lieu non autorisé pour des rassemblements, les autorités avaient la possibilité d’arrêter, en consultation avec lui, des mesures pour protéger son droit. Conformément à l’article 6 de la loi sur les manifestations de masse, le président du Comité exécutif local est habilité ou son adjoint à changer la date, l’heure et le lieu de la manifestation, en accord avec les organisateurs, afin de garantir la protection des droits et des libertés des citoyens, la sûreté publique et le fonctionnement normal des transports et des entreprises. L’auteur affirme une nouvelle fois que le Comité exécutif de Gomel a rejeté sa demande sans apporter aucune justification fondée sur l’article 21 du Pacte. Par conséquent, son droit de réunion pacifique a été bafoué.

7.3L’auteur ajoute que, le 2 avril 2008, le Comité exécutif de Gomel a adopté la décision no 299 sur les manifestations de masse dans la ville de Gomel, qui impose plusieurs restrictions aux organisateurs de manifestations pacifiques autres que les autorités municipales. Ces restrictions constituent une menace pour le droit de réunion pacifique lui‑même. Ainsi, un seul lieu est autorisé pour l’organisation de manifestations, à savoir un espace situé devant le Palais de la culture de l’entreprise unitaire privée Vipra, à la périphérie de la ville. En outre, la décision impose aux organisateurs de conclure des accords avec la police, les services médicaux et des agences de nettoyage avant l’organisation de toute manifestation publique. La décision no 299 remplace la décision no 318 du Comité exécutif de Gomel, qui limitait également l’exercice du droit de réunion.

7.4L’auteur soutient que, compte tenu de ce qui précède, la décision du 2 avril 2008 du Comité exécutif de Gomel porte atteinte à l’essence du droit consacré par l’article 21 du Pacte et qu’il a été privé de son droit de réunion pacifique.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

8.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 93 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

8.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément aux dispositions du paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif, que la même affaire n’était pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

8.3Le Comité prend note de l’argument de l’État partie selon lequel l’auteur aurait pu demander au Bureau du Procureur général et au Président du tribunal régional de Gomel ou au Président de la Cour suprême d’engager une procédure de contrôle des décisions du tribunal du district central de Gomel et du tribunal régional de Gomel. Cependant, l’État partie n’a pas démontré que ces procédures de contrôle étaient réellement disponibles et utiles. En particulier, il n’a pas indiqué si de telles procédures ont déjà été appliquées avec succès dans des affaires concernant le droit de réunion pacifique ni précisé, si tel est le cas, le nombre de ces affaires. Le Comité rappelle sa jurisprudence et selon laquelle les procédures de contrôle par l’État partie des décisions de justice devenues exécutoires ne constituent pas un recours qui doit être épuisé aux fins du paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif. En conséquence, le Comité considère qu’il n’est pas empêché par les dispositions du paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif d’examiner la présente communication.

8.4Le Comité considère que l’auteur a suffisamment étayé le grief au titre de l’article 21 du Pacte aux fins de la recevabilité. En conséquence, il déclare la communication recevable et procède à son examen quant au fond.

Examen au fond

9.1Conformément au paragraphe 1 de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité des droits de l’homme a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées.

9.2.Le Comité doit déterminer si le refus d’autoriser l’organisation des manifestations de masse planifiées par l’auteur avec un groupe de résidents de la ville de Gomel constitue une violation des droits que l’auteur tient de l’article 21 du Pacte.

9.3Le Comité rappelle que le droit de réunion pacifique, garanti par l’article 21 du Pacte, est un droit de l’homme fondamental, qui est essentiel à l’expression publique des points de vue et opinions de chacun et indispensable dans une société démocratique. Ce droit suppose notamment la possibilité d’organiser une réunion pacifique, y compris un rassemblement fixe dans un lieu public (piquet), et d’y participer. Ce droit ne peut faire l’objet d’aucune restriction excepté a) si la restriction en question est imposée conformément à la loi et b) si elle est nécessaire dans une société démocratique, dans l’intérêt de la sécurité nationale, de la sûreté publique, de l’ordre public ou pour protéger la santé ou la moralité publiques, ou les droits et libertés d’autrui.

9.4Le Comité constate que, puisque l’État partie a imposé une procédure pour l’organisation des manifestations de masse et refusé d’autoriser l’auteur à organiser les manifestations de masse prévue, il a établi une restriction à l’exercice du droit à la liberté de réunion. Le Comité doit donc déterminer si les restrictions imposées aux droits de l’auteur de la présente communication sont justifiées au regard des critères fixés dans la seconde phrase de l’article 21 du Pacte. Le Comité souligne que, si l’État partie impose une restriction, c’est à lui de prouver qu’elle est nécessaire pour atteindre les objectifs fixés dans les dispositions dudit article.

9.5Le Comité a pris note des explications de l’État partie selon laquelle l’auteur n’avait pas eu l’autorisation d’organiser des manifestations de masse parce qu’il n’avait pas fourni tous les renseignements requis au titre de la loi sur les manifestations de masse, notamment en ce qui concerne les mesures prises pour garantir la sécurité des participants, pour assurer la prestation de soins médicaux et pour faire en sorte que les lieux restent propres pendant et après la manifestation. Il a également noté que l’État partie considérait qu’en l’absence de ces renseignements l’ordre public et la sûreté publique ne pouvaient être garantis, et que la loi en question visait à créer des conditions favorables pour la réalisation des droits et libertés constitutionnels des citoyens et pour protéger la sûreté publique et l’ordre public lorsque de telles manifestations sont organisées dans des espaces publics.

9.6Le Comité rappelle que, lorsqu’un État partie impose des restrictions dans le but de concilier le droit de réunion d’un particulier avec l’intérêt général mentionné ci-dessus, il devrait chercher à faciliter l’exercice de ce droit et non s’employer à le restreindre par des moyens qui ne sont ni nécessaires ni proportionnés.Toute restriction de l’exercice du droit de réunion pacifique doit répondre aux critères stricts de nécessité et de proportionnalité.

9.7Cependant, le Comité constate que l’État partie n’a pas expliqué en quoi le refus d’accorder une autorisation à l’auteur − même si ce refus était fondé sur une loi − était nécessaire pour parvenir à l’une des fins légitimes prévues dans la seconde phrase de l’article 21 du Pacte. En particulier, l’État partie n’a pas indiqué quelles informations relatives aux horaires et au déroulement des manifestations de masse pouvaient manquer, dont l’absence constituerait une menace à la sûreté publique, à l’ordre public, à la protection de la santé ou de la moralité publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. L’État partie n’a pas non plus montré que, dans le cas d’espèce, ces objectifs ne pouvaient être atteints que par le refus d’autoriser les manifestations de masse prévues. Étant donné que l’État partie n’a pas montré que le refus d’accorder l’autorisation respectait les critères énoncés à l’article 21 du Pacte, le Comité conclut que les faits dont il est saisi font apparaître une violation par l’État partie des droits que l’auteur tient de l’article 21 du Pacte.

10.Le Comité des droits de l’homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte, considère que l’État partie a violé les droits garantis à l’auteur par l’article 21 du Pacte.

11.Conformément au paragraphe 3 a) de l’article 2 du Pacte, l’État partie est tenu d’assurer à l’auteur un recours utile, sous la forme du remboursement des frais de justice encourus par l’auteur, ainsi que d’une indemnisation adéquate. L’État partie est en outre tenu de veiller à ce que des violations analogues ne se reproduisent pas à l’avenir. À ce sujet, le Comité note une nouvelle fois que l’État partie devrait réviser sa législation, en particulier la loi du 30 décembre 1997 sur les manifestations de masse appliquée dans le cas d’espèce, afin que le droit consacré par l’article 21 du Pacte puisse être pleinement exercé dans l’État partie.

12.Étant donné qu’en adhérant au Protocole facultatif l’État partie a reconnu que le Comité avait compétence pour déterminer s’il y avait eu ou non violation du Pacte et que, conformément à l’article 2 du Pacte, il s’est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte et à assurer un recours utile et exécutoire lorsqu’une violation a été établie, le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de cent quatre-vingts jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet à ses constatations. L’État partie est invité en outre à rendre publiques les présentes constatations et à les faire diffuser largement dans le pays en biélorusse et en russe.

[Adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]