Nations Unies

CCPR/C/107/D/1788/2008

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

13 mai 2013

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’homme

Communication no 1788/2008

Décision adoptée par le Comité à sa 107e session(11-28 mars 2013)

Communication p résentée par:

B. W. M. Z.(non représenté par un conseil)

Au nom de:

L’auteur

État partie:

Pays-Bas

Date de la communication:

26 juin 2007 (date de la lettre initiale)

Références:

Décision prise par le Rapporteur spécial en application de l’article 97 du Règlement intérieur, communiquée à l’État partie le 8 mai 2008 (non publiée sous forme de document)

Date de la présente décision:

25 mars 2013

Objet:

Conduite d’une procédure disciplinaire

Questions de fond:

Indépendance et impartialité du tribunal; droit d’être entendu

Questions de procédure:

Non-épuisement des recours internes; défaut de fondement

Article du Pacte:

14

Article s du Protocole facultatif:

2 et 5 (par. 2 b))

[Annexe]

Annexe

Décision du Comité des droits de l’homme en vertudu Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (107e session)

concernant la

Communication no 1788/2008 *

Présentée par:

B. W. M. Z.(non représenté par un conseil)

Au nom de:

L’auteur

État partie:

Pays-Bas

Date de la communication:

26 juin 2007 (date de la lettre initiale)

Le Comité des droits de l ’ homme, institué en vertu de l’article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 25 mars 2013,

Adopte ce qui suit:

Décision concernant la recevabilité

1.L’auteur de la communication est B. W. M. Z., de nationalité néerlandaise. Il affirme être victime d’une violation par les Pays-Bas des droits protégés par l’article 14 du Pacte. L’auteur n’est pas représenté par un conseil.

Rappel des faits présentés par l’auteur

2.1L’auteur est un avocat qui exerce aux Pays-Bas. En mars 2003, M. et Mme L. H. ont déposé deux plaintes contre lui auprès du Conseil de discipline de la juridiction d’Amsterdam. Dans la plainte no 03-354H, ils affirmaient que l’auteur avait agi en violation de l’article 46 de la loi relative aux professions juridiques en: a) les amenant à passer un contrat d’assistance juridique par l’exercice de pressions, par tromperie et par dol; b) ne travaillant pratiquement pas sur l’affaire qui lui avait été soumise; c) demandant des honoraires forfaitaires de 10 000 euros hors TVA, payables à l’avance, auxquels s’ajoutaient 25 % du montant qui serait éventuellement perçu à terme. La plainte no 03‑055H dénonçait une violation de l’article 46 de la loi relative aux professions juridiques, l’auteur ayant refusé de rembourser l’avance d’honoraires qu’il avait perçue après s’être contenté de traiter l’affaire sommairement pendant une période de neuf semaines.

2.2Dans une décision en date du 29 septembre 2003, le Conseil de discipline a écarté le grief formulé dans la partie a) de la première plainte, considérant qu’il n’était pas compétent pour statuer sur la validité juridique d’un contrat passé entre un avocat et son client, sauf si ce contrat était manifestement nul. Cependant, il a retenu les griefs formulés dans les parties b) et c) de la plainte no 03-054H, ainsi que dans la plainte no 03-055H, et a adressé à l’auteur un blâme à titre de sanction disciplinaire. M. et Mme L. H. ont contesté cette décision auprès du tribunal d’appel en matière disciplinaire qui, le 4 juin 2004, a annulé la décision du Conseil de discipline concernant le grief formulé dans la partie a) de la plainte no 3-054H et a condamné l’auteur à l’interdiction d’exercer pendant une période de trois mois, lui ordonnant de rembourser aux plaignants la somme de 11 900 euros.

2.3Entre-temps, une nouvelle plainte visant l’auteur avait été déposée auprès du Conseil de discipline. Le 20 octobre 2003, M. et Mme P. ont dénoncé des violations par l’auteur de la loi relative aux professions juridiques, affirmant qu’il avait enfreint un accord portant sur la manière dont il procéderait et qu’il avait conservé à tort des dossiers leur appartenant. Le Conseil de discipline a fait droit à la plainte et a condamné l’auteur à un mois d’interdiction d’exercer avec sursis. Le 19 novembre 2003, l’auteur a contesté cette décision auprès du tribunal d’appel en matière disciplinaire, qui l’a confirmée le 10 juin 2004.

2.4L’auteur fait valoir qu’en vertu de la loi relative aux professions juridiques, ce tribunal est la plus haute instance en matière disciplinaire. Il en découle que les recours internes ont été épuisés en l’espèce. L’auteur a également porté l’affaire devant la Cour européenne des droits de l’homme. Le 23 mars 2005, il a été informé que la Cour, siégeant en comité de trois juges, avait décidé de déclarer sa requête irrecevable car elle ne faisait apparaître aucune violation des droits et libertés énoncés dans la Convention ou les Protocoles s’y rapportant.

Teneur de la plainte

3.1L’auteur affirme que les procédures devant le tribunal d’appel en matière disciplinaire n’étaient pas conformes à l’article 14 de la Convention. Premièrement, le 22 mars 2004, il a informé le tribunal par téléphone qu’il ne serait pas en mesure de prendre part à l’audience prévue le 4 juin 2004 car la santé de son père s’était subitement détériorée. Le tribunal aurait dû reporter l’examen de l’affaire et donner à l’auteur la possibilité d’être entendu, ce qu’il n’a pas fait. De ce fait, l’auteur n’a pas pu invoquer l’article 14 du Pacte devant le tribunal. Il en a résulté que le tribunal lui a imposé une lourde sanction, en se fondant sur la seule déclaration du plaignant. Qui plus est, la sanction, en comparaison avec celle imposée dans d’autres affaires, était disproportionnée.

3.2Deuxièmement, le tribunal a interdit à l’auteur d’exercer sa profession pendant trois mois, dont un mois avec sursis subordonné au versement de 10 000 euros à M. et Mme L. H. Or la décision concernant ce versement était illégale car c’est à une juridiction civile qu’il appartient de connaître des demandes portant sur le versement d’une somme d’argent et non pas à un tribunal en matière disciplinaire.

3.3Troisièmement, l’un des membres du tribunal qui a statué sur l’affaire était V. B., qui, à l’époque, était impliqué dans une procédure civile visant l’auteur. V. B. représentait une personne qui avait déposé plainte contre l’auteur parce que celui-ci avait refusé de la représenter devant les tribunaux, ce qui l’avait amenée à faire une tentative de suicide. Cette plainte avait été rejetée par la cour d’appel d’Amsterdam. L’auteur affirme que le cabinet juridique auquel appartient V. B. nourrit de l’animosité à son endroit pour cette raison. En outre, il est possible que V. B. ait eu des préjugés à l’égard de l’auteur dus au fait que celui-ci avait par le passé intenté une action contre un juge du tribunal régional et de la cour d’appel de La Haye qui avait des liens familiaux avec V. B. De surcroît, trois des membres du tribunal d’appel en matière disciplinaire qui a statué sur le cas de l’auteur sont non seulement avocats, mais aussi juges suppléants. Par le passé, l’auteur avait critiqué le système des juges suppléants, à la suite de quoi un projet de loi visant à abolir ce système avait été soumis au Parlement. Malgré ce projet de loi, le système n’avait pas entièrement disparu. Pour toutes ces raisons, l’auteur soutient que le tribunal qui a statué sur l’affaire le concernant n’était pas impartial.

3.4L’auteur affirme également que faire juger un avocat par ses confrères dans le cadre d’une procédure disciplinaire constitue une violation de l’article 14 du Pacte. Le fait qu’ils soient tous en concurrence sur le plan professionnel compromet en soi le caractère impartial et indépendant des jugements rendus. La loi relative aux professions juridiques est donc, à cet égard, contraire à l’article 14 du Pacte.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond

4.1Le 10 décembre 2008, l’État partie a communiqué ses observations sur la recevabilité et sur le fond. Il rappelle la décision d’irrecevabilité rendue par la Cour européenne des droits de l’homme et demande au Comité d’adopter, pour des raisons de sécurité juridique, une approche similaire, c’est-à-dire de déclarer la communication irrecevable ou de conclure que les faits qui y sont visés ne constituent pas une violation du Pacte. Dans le cas contraire, l’État partie se trouverait en présence de deux jugements contradictoires sur la même question rendus par deux organes de surveillance internationaux.

4.2L’État partie explique que tant le Conseil de discipline que le tribunal d’appel en matière disciplinaire sont composés de juges et d’avocats en exercice. Les recours dont est saisi le tribunal sont examinés et tranchés par un collège de cinq membres composé de trois juges et deux avocats. Les juges qui siègent au tribunal sont nommés pour un mandat de cinq ans parmi les membres de l’appareil judiciaire chargés de l’administration de la justice tandis que les avocats sont élus pour un mandat de cinq ans par le Conseil des délégués des barreaux régionaux.

4.3Par une lettre datée du 28 novembre 2003, le tribunal a notifié l’auteur de la date de l’audience à laquelle serait examiné le recours. L’auteur a également été informé du fait que dans les jours qui suivaient il pouvait demander au greffier de fixer une autre date d’audience. Cependant, il ne s’est pas prévalu de cette possibilité. Il a également été demandé à l’auteur de répondre par écrit, au plus tard six semaines avant l’audience, à l’exposé des motifs du recours formé par M. et Mme L. H. Le 20 février 2004, une citation à comparaître définitive a été envoyée à l’auteur par voie de courrier recommandé avec accusé de réception. Elle confirmait que l’audience se tiendrait le 22 mars 2004 et informait l’auteur qu’il y serait attendu. La citation était accompagnée d’une liste des documents figurant au dossier de l’affaire et l’auteur a été informé qu’il pouvait demander une copie de ces documents ou examiner le dossier s’il le souhaitait. Il a également été demandé une nouvelle fois à l’auteur de soumettre une réponse écrite à l’exposé des motifs du recours. Enfin, la citation informait l’auteur de la composition du tribunal qui examinerait le recours. Le 19 mars 2004, le tribunal a informé l’auteur que la composition dudit tribunal avait changé. Le 22 mars 2004, date de l’audience, l’auteur a informé le greffier du tribunal par téléphone qu’il ne s’y présenterait pas. L’auteur n’a pas soumis de réponse écrite à l’exposé des motifs du recours.

4.4L’auteur n’a pas épuisé les voies de recours internes. Devant les juridictions nationales, il n’a pas invoqué l’article 14 du Pacte ni soulevé les griefs qui font l’objet de sa communication, privant ainsi le Conseil de discipline et le tribunal de la possibilité d’yrépondre. L’auteur était présent à l’audience du Conseil de discipline, et il aurait également pu faire part des griefs qu’il tire de l’article 14 du Pacte dans une réponse écrite à l’exposé des motifs du recours. Il ne l’a pas fait. Qui plus est, il a introduit un recours dans le cadre de la procédure concernant la plainte déposée par M. et Mme P. Or dans son exposé des motifs du recours, il n’a pas invoqué les arguments qu’il présente au Comité.

4.5L’État partie fait observer que si l’obligation d’épuiser les recours internes n’implique pas celle de se prévaloir des voies de recours extraordinaires, l’auteur n’a pas présenté de demande de réexamen de la décision. Selon la jurisprudence du tribunal, une décision peut être réexaminée dans des circonstances exceptionnelles, pour autant qu’un principe juridique fondamental ait été violé.

4.6L’auteur aurait pu contester l’impartialité des membres du tribunal dans le cadre de la procédure engagée devant celui-ci. En vertu du paragraphe 6 de l’article 56 de la loi relative aux conseils, lu conjointement avec les articles 512 à 518 du Code de procédure pénale, tout membre d’une juridiction chargée d’examiner une affaire peut faire l’objet, de la part de l’une des parties, d’une contestation motivée par des faits ou des circonstances susceptibles de compromettre l’impartialité de ladite juridiction. Le fait que l’auteur n’était pas présent à l’audience du tribunal ne signifie pas qu’il n’aurait pas pu contester les membres de celui-ci dans le cadre des procédures conduites par les juridictions nationales. L’auteur a été informé à deux reprises de la composition du tribunal. Il connaissait donc cette composition et il aurait pu présenter une contestation pour partialité dès qu’il a eu connaissance de faits ou circonstances pertinents. Il n’a jamais prétendu qu’il ne connaissait pas les faits qu’il invoque maintenant pour mettre en doute l’impartialité des membres du tribunal.

4.7Les allégations formulées par l’auteur reposent en grande partie sur des conjectures et les liens qu’il invoque ne sont pas de nature à avoir eu une véritable incidence sur la décision qui a été rendue dans l’affaire le concernant et, partant, à soulever des questions au regard de l’article 14 du Pacte. L’État partie conclut donc que l’auteur n’a pas suffisamment étayé ses griefs aux fins de la recevabilité.

4.8En ce qui concerne le fond, l’État partie estime que la communication est dénuée de fondement. Il souligne que l’auteur n’a fourni aucun élément à l’appui de son affirmation selon laquelle les membres du tribunal qui sont avocats ne peuvent pas être impartiaux compte tenu de leur situation professionnelle. Le seul fait que des confrères de l’auteur siègent au tribunal ne justifie pas objectivement des craintes de partialité et ne constitue pas un motif suffisant pour conclure à une partialité manifeste. Les modalités de désignation des membres de ces organes, conjuguées aux règles édictées par la loi relative aux conseils concernant l’incompatibilité des activités de ceux-ci avec l’exercice de certaines fonctions, offrent des garanties suffisantes pour assurer l’indépendance de ces membres. Le fait que la majorité des membres du tribunal sont des juges constitue une garantie supplémentaire que les recours sont examinés de manière indépendante et impartiale. L’État partie estime donc que cette partie de la communication est non seulement irrecevable, l’auteur n’étant pas une victime au sens de l’article premier du Protocole facultatif et n’ayant pas épuisé les recours internes, mais aussi dénuée de fondement.

4.9En ce qui concerne l’affirmation de l’auteur selon laquelle il n’a pas été entendu par le tribunal, l’État partie fait observer que bien que le dossier montre que l’auteur a avisé le tribunal qu’il ne serait pas présent à l’audience, il ne comporte aucune indication qu’il ait demandé au tribunal de reporter cette audience. À supposer que l’auteur ait bien formulé une telle demande, le dossier n’indique pas non plus qu’il ait donné à celle-ci la raison qu’il invoque maintenant, à savoir l’empêchement dû à la maladie soudaine de son père. En tout état de cause, rien dans les dossiers du tribunal ou dans la présente communication ne vient le confirmer. En conséquence, l’État partie conclut que le tribunal n’avait aucune raison de reporter l’audience prévue et qu’il n’existe aucun motif de conclure à une violation de l’article 14 du Pacte.

4.10L’affirmation de l’auteur selon laquelle le tribunal a fondé sa décision exclusivement sur les déclarations de la partie adverse ne repose sur aucun élément factuel. Le tribunal fonde son examen sur la décision du Conseil de discipline et sur le dossier du Conseil. Le fait que l’auteur ne s’est pas prévalu de la possibilité de répondre par écrit à l’exposé des motifs du recours relève de sa seule responsabilité. Aussi cette partie de la communication est-elle non seulement irrecevable au motif que les recours internes n’ont pas été épuisés, mais également dénuée defondement.

4.11En ce qui concerne l’allégation relative au fait que le tribunal aurait outrepassé sa compétence, l’État partie souligne qu’elle ne repose sur aucun élément factuel. Par sa décision du 4 juin 2004, le tribunal, outre qu’il a condamné l’auteur à l’interdiction temporaire d’exercer sa profession d’avocat, a ordonné à celui-ci de verser la somme de 11 900 euros à la partie adverse dans un délai d’un mois à compter de la date à laquelle la décision lui serait envoyée. La loi relative aux conseils fournit une base juridique qui permet d’imposer cette obligation. Le paragraphe 1 de l’article 48 b) de cette loi, lu conjointement avec son article 57 a), prévoit que lorsque le tribunal condamne un avocat à une interdiction temporaire d’exercer, il peut lui imposer l’obligation de verser une indemnité pour réparer, pleinement ou dans la mesure déterminée par le tribunal, le préjudice causé par ses actes, dans un délai fixé par ce même tribunal. La décision du tribunal entrait donc dans le champ des compétences que lui confère la loi. Par conséquent, cette partie de la communication est non seulement irrecevable au motif que les recours internes n’ont pas été épuisés, mais également dénuée de fondement.

Commentaires de l’auteur sur les observations de l’État partie

5.1Le 13 février 2009, l’auteur a répondu aux observations de l’État partie. Concernant la décision de la Cour européenne des droits de l’homme, il rappelle que ce n’est que lorsque la même question est en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement que le Comité n’a pas compétence pour examiner une communication en vertu du paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif. En outre, le Comité est investi d’une compétence autonome qui lui permet de statuer sur une affaire indépendamment de l’issue que peut avoir la même affaire si elle est portée devant la Cour européenne des droits de l’homme. Le Comité n’a pas d’obligation morale ou juridique d’adopter des constatations compatibles avec les décisions de la Cour.

5.2L’auteur formule à nouveau ses allégations concernant le droit d’être entendu et affirme qu’il n’y avait aucune raison pour que le tribunal ne reporte pas les audiences. Qui plus est, l’auteur n’avait aucune obligation juridique d’exposer ses griefs au tribunal par écrit. S’il avait été entendu il aurait pu le faire oralement et le tribunal aurait eu la possibilité derépondre.

5.3Comme l’admet l’État partie, la loi relative aux conseils ne prévoit pas la possibilité de procéder à un réexamen. Selon la jurisprudence du tribunal, cette possibilité est donnée dans des circonstances exceptionnelles. Il incombe à l’État partie de faire la preuve de l’efficacité des recours dont il dit qu’ils ne sont pas épuisés, et il doit être suffisamment manifeste que le recours invoqué est ouvert. En l’espèce, l’État partie ne présente aucun élément indiquant qu’il y avait raisonnablement lieu de s’attendre à ce qu’un tel réexamen soit utile et que ce recours était manifestement ouvert.

5.4L’auteur reprend ses précédents griefs concernant le manque d’indépendance et d’impartialité du tribunal et le fait que celui-ci aurait outrepassé ses compétences. Il a été informé de la composition du tribunal le 20 février 2004 et de la modification de celle-ci le 19 mars 2004, soit deux jours seulement avant l’audience. Il n’aurait donc disposé que de peu de temps pour se pencher sur les antécédents des nouveaux membres et sur d’éventuels liens inappropriés. En tout état de cause, V. B., qui connaissait l’auteur, aurait dû se rendre compte qu’il ne présentait pas l’apparence d’impartialité et d’indépendance voulue pour examiner cette affaire. Malgré cela, il ne s’est pas récusé comme membre du tribunal. Si le fait que les conseils de discipline et le tribunal ont été instaurés par une loi, que leurs pouvoirs sont régis par la loi et que la majorité de leurs membres sont des juges constitue théoriquement autant de garanties, dans la pratique celles-ci sont inopérantes.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

6.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 93 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

6.2Le Comité relève que la question qui fait l’objet de la présente communication a été examinée par la Cour européenne des droits de l’homme avant d’être portée à l’attention du Comité. Cependant, ce n’est que lorsque la même question est en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement que le Comité n’a pas compétence pour examiner une communication au titre du paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif. Cette disposition n’empêche donc pas le Comité d’examiner la présente communication.

6.3L’auteur affirme que le tribunal d’appel en matière disciplinaire ne lui a pas donné la possibilité d’être entendu dans une procédure le visant et que certains de ses membres avaient des préjugés à son égard et n’avaient pas agi de manière impartiale. L’État partie indique qu’il a été demandé à l’auteur de répondre par écrit, au plus tard six semaines avant l’audience, à l’exposé des motifs du recours, mais que l’auteur n’a jamais soumis de réponse et n’a pas fourni de preuve attestant qu’il avait bien demandé un report de l’audience; en outre, il n’a pas engagé de procédure en vertu du paragraphe 6 de l’article 56 de la loi relative aux conseils, lu conjointement avec les articles 512 à 518 du Code de procédure pénale, afin de contester l’impartialité du tribunal. L’auteur n’ayant pas présenté d’argument convaincant pour réfuter les observations de l’État partie, le Comité considère qu’il n’a pas étayé son grief relatif au droit d’être entendu. Ce grief est donc irrecevable en vertu de l’article 2 du Protocole facultatif. Pour ce qui est du grief d’impartialité du tribunal, le Comité considère que les arguments de l’auteur reposent sur des conjectures et relève que l’auteur ne s’est pas prévalu de quelque procédure que ce soit pour faire protéger ses droits à cet égard. En conséquence, le Comité considère que cette partie de la communication est irrecevable en vertu du paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif, en raison du non-épuisement des recours internes. Tous les autres griefs formulés par l’auteur sont également dénués de fondement et donc irrecevables en vertu de l’article 2 du Protocole facultatif.

7.En conséquence, le Comité des droits de l’homme décide:

a)Que la communication est irrecevable en vertu de l’article 2 et du paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif;

b)Que la présente décision sera communiquée à l’État partie et à l’auteur de la communication.

[Adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]