Nations Unies

CED/C/BFA/CO/1

Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

Distr. générale

24 mai 2016

Original : français

Comité des disparitions forcées

Observations finales concernant le rapport soumis par le Burkina Faso en application du paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention *

1.Le Comité des disparitions forcées a examiné le rapport soumis par le Burkina Faso en application du paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention (CED/C/BFA/1), à ses 160e et 161eséances (CED/C/SR.160 et 161), les 8 et 9mars 2016. À sa 171e séance, le 16 mars 2016, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport soumis par le Burkina Faso en application du paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention, qui a été élaboré conformément aux directives pour l’établissement des rapports, ainsi que les informations qui y figurent. Le Comité apprécie la qualité du dialogue, franc et constructif, qu’il a eu avec la délégation de l’État partie sur les mesures prises pour appliquer les dispositions de la Convention, qui lui a permis de dissiper bon nombre de points, et salue, en particulier, la compétence, la rigueur et l’ouverture d’esprit avec lesquelles la délégation a répondu aux questions qu’il a soulevées. Le Comité remercie enoutre l’État partie de ses réponses écrites (CED/C/BFA/Q/1/Add.1) à la liste de points (CED/C/BFA/Q/1), qui ont été complétées par les interventions orales de la délégation et les informations supplémentaires communiquées par écrit.

B.Aspects positifs

3.Le Comité félicite l’État partie d’avoir ratifié la quasi-totalité des principaux instruments des Nations Unies relatifs aux droits de l’homme et des protocoles facultatifs s’y rapportant ainsi que le Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

4.Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption de la Politique nationale des droits humains et de la promotion civique 2013-2022.

5.Le Comité salue l’État partie pour avoir consulté les organisations de la société civile sur la rédaction du rapport soumis en application de l’article 29, paragraphe 1, de la Convention.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

6.Le Comité estime que, au moment de la rédaction des présentes observations finales, le cadre législatif en vigueur dans l’État partie n’était pas pleinement conforme aux obligations que la Convention impose aux États l’ayant ratifiée. Tout en notant que l’État partie a initié un processus législatif visant à la mise en œuvre complète de la Convention, le Comité recommande à l’État partie de tenir compte de ses recommandations, qui ont été formulées dans un esprit constructif et coopératif, pour faire en sorte que, dans les meilleurs délais, le cadre législatif et la manière dont il est appliqué par les autorités de l’État partie respectent pleinement les droits et les obligations énoncés dans la Convention.

Renseignements d’ordre général

Compétence du Comité au titre des articles 31 et 32 de la Convention

7.Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas encore fait les déclarations au titre des articles 31 et 32 afin de permettre une pleine application de la Convention. Il note que l’État partie envisage de mener des consultations avec les acteurs publics et privés aux fins d’examiner la possibilité d’accepter la compétence du Comité au titre des articles 31 et 32 (art. 31 et 32).

8. Le Comité invite l’ État partie à reconnaître , dans les meilleurs délais, la compétence du Comité au titre des articles 31 et 32 de la Convention.

Institution nationale des droits de l’homme

9.Le Comité prend bonne note de la décision prise en 2009 de créer une nouvelle Commission nationale des droits humains, mais déplore que celle-ci soit depuis lors confrontée à des difficultés qui empêchent son fonctionnement effectif. Il se félicite de ce que l’État partie a entamé un processus de révision de la loi qui institue la Commission avec un avant-projet élaboré en 2015 visant à la rendre plus efficace et plus indépendante, notamment sur le plan financier, en pleine conformité avec les Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) [art. 2].

10. Le Comité encourage l’État partie à accélérer le processus de révision de la loi instituant la Commission nationale des droits humains afin de la rendre pleinement indépendante et de lui allouer des ressources humaines et financières suffisantes pour son fonctionnement, en pleine conformité avec les Principes de Paris . Il invite l’ État partie à inclure explicitement dans son mandat la question des disparitions forcées.

Observatoire national de prévention de la torture et autres pratiques assimilées

11.Le Comité prend note de la mise en place de l’Observatoire national de prévention de la torture et autres pratiques assimilées prévu par la loi no 022-2014/AN du 27 mai 2014. Il relève néanmoins que cet observatoire ne fonctionne pas encore (art. 2).

12. Le Comité encourage l’ État partie à prendre l es mesures nécessaires afin de rendre effectif le fonctionnement de l’Observatoire , notamment en le dotant des ressources humaines et financières nécessaires.

Définition et criminalisation de la disparition forcée (art. 1 à 7)

Incorporation de la définition et criminalisation de la disparition forcée dans le Code pénal

13.Le Comité note que le Code pénal de l’État partie ne contient pas une définition ni une incrimination de la disparition forcée comme le requièrent les articles 2 et 4 de la Convention. Il note toutefois que l’État partie a entamé un processus législatif visant, entre autres, à définir et à criminaliser la disparition forcée dans son Code pénal en tant qu’infraction autonome. Il relève qu’en l’absence d’une définition et d’une incrimination de la disparition forcée, l’État partie renvoie, pour certaines questions, au régime général et aux règles pénales régissant d’autres infractions considérées comme rentrant dans la définition de la disparition forcée telles que l’arrestation, la détention, la séquestration et l’enlèvement, mais qui ne constituent pas le crime de disparition forcée. Le Comité considère qu’il ne suffit pas de renvoyer à plusieurs infractions ni aux règles les régissant pour satisfaire à cette obligation, car l’infraction de disparition forcée n’est pas une série d’infractions distinctes, mais une seule infraction complexe commise par des agents de l’État ou par des personnes ou des groupes de personnes agissant avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État et qui constitue une violation de plusieurs droits. Dans ce contexte, le Comité considère que la qualification de la disparition forcée en tant qu’infraction autonome permettrait à l’État partie de s’acquitter de l’obligation découlant de l’article 4, laquelle est étroitement liée à d’autres obligations de caractère législatif prévues dans la Convention, comme celles énoncées à l’article 6, paragraphe 1, alinéa a, et à l’article 7. Le Comité prend note que l’État partie a établi un moratoire sur la peine de mort et qu’il envisage de l’abolir(art. 2, 4, 6 et 7).

14. Le Comité recommande à l’ État partie d’accélérer le processus de révision du Code pénal visant à mettre en œuvre la Convention afin de définir et d’incriminer la disparition forcée comme une infraction autonome, conformément à la définition inclus e dans l’article 2 de la Convention , et passible de peines appropriées qui prennent en compte son extrême gravité, en é vitant l ’ imposition de la peine de mort.

Ordre d’un supérieur

15.Le Comité prend note qu’aux termes de l’article 70 du Code pénal « [n’]est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte commandé par l’autorité légitime, sauf si cet acte est manifestement illégal » et qu’en vertu de l’article 141 du Code pénal tout fonctionnaire public qui ordonne ou fait ordonner quelque acte arbitraire ou attentatoire à la liberté individuelle ou aux droits civiques d’une ou plusieurs personnes est exempt de peine s’il justifie qu’il a agi par ordre légal de ses supérieurs. Le Comité note également les explications fournies par la délégation de l’État partie, mais constate que ces dispositions ne sont pas précises et ne semblent pas offrir les garanties prévues au paragraphe 1, alinéas b et c, et au paragraphe 2 de l’article 6 de la Convention (art. 6).

16.Le Comité recommande à l’ État partie, lorsqu’il établira la disparition forcée comme incrimination dans son Code pénal, de clarifier les dispositions des articles 70 et 141, paragraphe 2, de ce même Code, de sorte à les rendre pleinement conformes aux dispositions d u paragraphe 1 , alinéa sb et c, et du paragraphe 2 de l’article 6 de la Conve ntion.

Circonstances atténuantes et aggravantes

17.Le Comité prend note de ce que le Code pénal de l’État partie prévoit un régime général de circonstances atténuantes et aggravantes pour les crimes et les délits. Qu’en outre, il existe des circonstances aggravantes pour des infractions liées à l’acte de disparition forcée, qui, selon l’État partie, s’appliqueraient en matière de disparitions forcées. Le Comité estime, néanmoins, que ces dispositions du Code pénal ne sont pas pleinement conformes à l’article 7, paragraphe 2, de la Convention.

18. Le Comité recommande à l’ État partie, lorsqu’il établira la disparition forcée comme une infraction autonome, de modifier également son Code pénal afin d’y prévoir des circonstances atténuantes et aggravantes applicables à l’acte de disparition forcée, qui recouvrent tous les éléments prévus à l’article 7, paragraphe 2, de la Convention . Il lui recommande également de faire en sorte que les circonstances atténuantes ne donnent en aucun cas lieu à l’absence de sanction appropriée.

Responsabilité pénale et entraide judiciaire en matière de disparition forcée (art. 8 à 15)

Nature continue de l’infraction de disparition forcée et prescription

19.Le Comité prend note du fait que l’État partie reconnaît le caractère continu de la disparition forcée et envisage de l’inscrire dans son Code pénal. Il note, néanmoins, que, selon l’État partie, les délais de prescription de l’action pénale pour le crime de disparition devraient relever du régime commun des délits et crimes prévu dans son Code pénal, c’est-à-dire dix ans pour les crimes et trois ans pour les délits. Le Comité note également les informations fournies par la délégation selon lesquelles, la prescription de l’action pénale pour la disparition forcée débuterait dès la cessation de l’infraction (art. 8).

20. Le Comité recommand e à l’État partie de s’assurer qu’il intègre dans le nouveau Code pénal l es dispositions nécessaires afin que la nature continue du crime de disparition forcée soit spécifiquement reconnue ; et de s’assurer que le délai de prescription de l’action pénale prenne en compte l’extrême gravité du crime de disparition forcée et ne commence à courir que lorsque c elui-ci cesse . N é anmoins, le C omit é encourage l ’ État partie , lorsqu ’ il fera de la disparition forc é e une infraction autonome, à veiller à ce que cette infraction ne puisse faire l ’ objet d ’ aucune prescription.

Juridictions militaires

21.Le Comité prend note des éclaircissements donnés par la délégation de l’État partie, mais observe que les tribunaux militaires seraient compétents pour juger les crimes de disparition forcée commis par les militaires dans l’exercice de leurs fonctions ou dans des installations militaires. Le Comité rappelle sa position selon laquelle, par principe, les juridictions militaires ne sauraient offrir l’indépendance et l’impartialité requises par la Convention pour connaître de violations des droits de l’homme telles que les disparitions forcées (art. 11).

22. Le Comité , rappelant sa déclaration sur les disparitions forcées et l a juridiction militaire ( A/70/56, annex e III), recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires, d’ordre législatif ou autre , pour faire en sorte que les disparitions forcées restent expressément en dehors du champ de compétence des juridictions militaires dans tous les cas et ne puissent être l’objet d’enquêtes et de jugement que par les tribunaux ordinaires .

Protection des plaignants, des témoins, des proches de la personne disparue et de leurs conseils ainsi que de ceux qui participent à l’enquête

23.Le Comité prend note des informations de l’État partie, selon lesquelles la protection des catégories des plaignants et des témoins peut être requise par le Procureur ou le juge d’instruction qui, au titre des articles 41 et 50 du Code de procédure pénale, disposent du droit de requérir directement la force publique. Le Comité relève que, d’une part, ces dispositions sont très générales, que, d’autre part, elles ne sont ni suffisantes, ni suffisamment explicites sur la protection de toutes les catégories prévues au paragraphe 1 de l’article 12 de la Convention, et que, par conséquent, elles n’en remplissent pas les exigences (art. 12).

24. Le Comité recommande à l’ État partie de prendre des mesures nécessaires afin de garantir de manière explicite, dans le cadre de la réforme de son Code de procédure pénale, la protection de toutes les catégories de personnes citées au paragraphe 1 de l’article 12 de la Convention , contre tout mauvais traitement ou toute intimidation en raison de la plainte déposée o *1608121 u de toute déposition faite . Il invite l’ État partie à envisager la mise en place * de programmes spécifiques de protection.

Personnes soupçonnées d’avoir commis un crime de disparition forcée

25.Le Comité prend note des informations de l’État partie, selon lesquelles « dans la pratique, lorsqu’un élément d’une unité chargée du maintien de l’ordre est accusé d’avoir commis une infraction, les membres de cette unité sont écartés de l’enquête ». Le Comité relève, néanmoins, que cette pratique n’est pas inscrite dans la législation de l’État partie (art. 12).

26. Le Comité recommande à l’État partie d’adopter dans sa législation pénale, conformément au paragraphe 4 de l’article 12 de la Convention, des mesures pour garantir que les personnes soupçonnées d’avoir commis un crime de disparition forcée et leurs unités, ne soient pas en mesure d’influer, directement ou indirectement, elles-mêmes ou par l’intermédiaire de tiers, sur le cours des enquêtes.

Participation des victimes aux enquêtes

27.Le Comité prend note que, selon l’État partie, en vertu du Code de procédure pénale, la victime participe à l’enquête sur les disparitions forcées, par le biais de la constitution de partie civile ou comme témoin. Le Comité constate, néanmoins, que ces dispositions du Code de procédure pénale (art. 84 et suiv.) ne sont pas très explicites sur l’étendue de la participation de la victime à la procédure pénale. Le Comité note aussi l’absence dans l’État partie d’organismes spécialisés pour mener des enquêtes et instruire les affaires de disparition forcée. Il relève que, selon la délégation de l’État partie, la compétence d’enquêtes et de poursuites est du ressort de la police judiciaire, des juridictions ordinaires et, dans une certaine mesure, de la Commission nationale des droits humains (art. 12).

28. Le Comité encourage l’État partie à s’assurer, lors de la réforme du Code de procédure pénale, que celui-ci donne aux victimes de disparition forcée la possibilité de participer activement et sans réserve aux procédures judiciaires relatives à de tels actes. Il invite , en outre , l’État partie à envisager de former spécifiquement certains agents a u sein de la police judiciaire et des juridictions qui pour raient enquêter , le cas échéant, sur les cas présumés de disparition forcée et mener des poursuites pénales dans les affaires de cette nature.

Mesures de prévention des disparitions forcées (art. 16 à 23)

Non-refoulement

29.Le Comité note les renseignements fournis par l’État partie sur les différentes procédures en matière d’expulsion et d’extradition et les recours possibles. Il constate, néanmoins, que, selon la délégation de l’État partie, le principe de non-refoulement n’est pas expressément prévu par la législation ce qui n’offre pas une protection juridique certaine pour des personnes qui pourraient être victimes de disparitions forcées en cas de renvoi (art. 16).

30. Le Comité recommande à l’ État partie de prendre l es mesures nécessaires pour inscrire le principe de non-refoulement, de manière explicite, dans sa législation afin d’éviter que des personnes ne soient exposées à un risque de disparition forcée en cas de renvoi.

Recours spécifique concernant la légalité de la détention

31.Le Comité note qu’un recours spécifique permettant à toutes les catégories de personnes prévues par la Convention de saisir un tribunal pour statuer dans un bref délai sur la légalité de la détention n’est pas prévu par la législation de l’État partie. Le Comité relève qu’une telle absence priverait la personne détenue et, en cas d’incapacité de l’exercer elle-même, toute personne ayant un intérêt légitime tel que prévu au paragraphe 2, alinéa f, de l’article 17 de la Convention, d’un moyen de recours sur l’établissement de la légalité de sa détention (art. 17).

32.Le Comité encourage l’État partie à prendre les mesures nécessaires pour prévoir dans sa législation pénale un recours spécifique permettant à toutes les catégories de personne s prévues par la Convention, de saisir un tribunal pour statuer dans un bref délai sur la légalité de l a détention et ordonner la libération de la personne, si cette privation de liberté est illégale, conformément aux dispositions d u paragraphe 2, alinéaf, de l’article 17 de la Convention et aux autres normes internationales pertinentes .

Tenue des registres et accès à l’information

33.Le Comité relève avec préoccupation que le manquement intentionnel à l’enregistrement d’une privation de liberté ou des renseignements prévus au paragraphe 3 de l’article 17 de la Convention n’est pas automatiquement sanctionné. Le Comité prend note qu’un tel manquement ne peut donner lieu à une enquête que s’il y a intention, de la part du responsable du registre officiel, de se rendre complice d’une infraction. Le Comité constate aussi l’absence d’informations sur la possibilité de sanctionner le refus de fournir des informations sur une privation de liberté ou la fourniture d’informations inexactes (art. 17, 18 et 22).

34. Le Comité recommande à l’ État partie de s’assurer de la bonne tenue des registres et de garantir que toute personne ayant un intérêt légitime ait le droit et la possibilité effective d’accéder aux information s concernant la personne présumée disparue visée au paragraphe 3 de l’article 17, en conformité avec le paragraphe 1 de l’article 18. Il lui recommande également de prévoir de manière explicite dans sa législation pénale, conformément aux dispositions de l’article  22 de la Convention, des sanctions au manquement intentionnel d’enregistrer une privation de liberté ou l es renseignements prévus , ainsi que des sanctions au refus intentionnel de fournir de tels renseignements.

Formation aux droits de l’homme, en particulier aux dispositions de la Convention

35.Le Comité prend note des renseignements concernant la formation du personnel de la police et des agents pénitentiaires aux droits de l’homme et aux normes régissant la privation de liberté. Le Comité constate, néanmoins, que ces formations ne portent pas expressément sur la Convention (art. 23).

36. Le Comité encourage l’ État partie à s’assurer que les formations dispensées au personnel militaire et civil chargé de l’application des lois, au personnel médical, aux agents de la fonction publique et aux autres personnes qui peuvent intervenir dans la garde ou le traitement de toute personne privée de liberté, y compris les juges, les procureurs et autres praticiens du droit de tous rangs, intègrent l’enseignement de la Convention, conformément à son article 23.

Mesures de réparation et mesures de protection des enfants contre les disparitions forcées (art. 24 et 25)

Réparation

37.Le Comité prend note avec satisfaction des informations sur les différents mécanismes de réparation qui existent dans l’État partie et auxquels pourraient recourir les victimes de disparition forcée. Le Comité note également que l’État partie a mis en place un Haut Conseil pour la réconciliation et l’unité nationale, qui a, en particulier, pour mandat de recevoir et traiter des plaintes au regard des violations des droits de l’homme ayant eu lieu dans le passé afin de pourvoir à une réparation et qui a, dans ce cadre, recensé environ 5 000 dossiers (art. 24).

38. Le Comité invite l’ État partie à lui fournir des renseignements sur de possibles cas de disparitions forcées qui auraient été recensés et traités par le Haut Conseil pour la r éconciliation et l’ u nité nationale et sur les mesures d e réparation proposées. Il l’invite également à lui fournir des renseignements sur le nombre de cas pour lesquels les plaignants ont préféré recour ir à des juridictions ordinaires aux fins de poursuites .

Protection de la personne disparue

39.Le Comité constate que le Code des personnes et de la famille de l’État partie fixe des délais pour l’établissement de la déclaration de décès de l’absent ou du disparu, qui ouvrent le droit au règlement de la situation légale de la personne disparue dans les domaines de la protection sociale, des questions financières, du droit de la famille et des droits de propriété. Le Comité note que la déclaration de décès peut entraîner la clôture des recherches de la personne disparue, à moins que le Procureur ne fasse une demande expresse afin de poursuivre celles-ci. Le Comité comprend qu’il est important de clarifier la situation légale des proches d’une personne disparue ainsi que leurs droits en matière de protection sociale, mais il considère que cette procédure légale ne devrait pas être fondée sur le postulat que la personne disparue est décédée tant que son sort n’a pas été élucidé, eu égard au caractère continu d’une disparition forcée (art. 24) .

40. Le Comité invite l’État partie à envisager de revoir sa législation en vue d’y intégrer des dispositions qui prévoient qu’en cas de disparition forcée, la déclaration d e décès de l’absent ou du disparu n’étei nt pas l’obligation de recherche faite à l’ État partie au titre des paragraphes 3 et 6 de l’article 24 de la Convention. Le Comité invite l’ État partie à veiller à établir , dans sa législation, un équilibre entre la nécessité de clarifier la situation légale des proches d’une personne disparue ou absente ainsi que leurs droits, et l’intérêt et les droits de la personne disparue, en particulier l’obligation de recherche faite à l’ État partie.

Législation relative à la protection des enfants

41.Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour incriminer le faux et l’usage de faux. Il constate, néanmoins, que, selon la délégation de l’État partie, la législation ne comporte pas de dispositions expresses permettant de prévenir ou de réprimer pénalement la falsification, la dissimulation ou la destruction de documents attestant la véritable identité des enfants visés au paragraphe 1, alinéa a, de l’article 25.

42.Le Comité recommande à l’ État partie de renforcer sa législation pénale pour prévenir et réprimer expressément les cas de falsification, de dissimulation ou de destruction de documents attestant la véritable identité des enfants visés au paragraphe 1, alinéaa, de l’article 25.

D.Diffusion et suivi

43.Le Comité tient à rappeler les obligations auxquelles les États ont souscrit en ratifiant la Convention et, à ce propos, engage l’État partie à s’assurer que toutes les mesures qu’il adopte, quelles que soient leur nature et l’autorité dont elles émanent, sont pleinement conformes aux obligations qu’il a assumées en ratifiant la Convention et d’autres instruments internationaux pertinents. À cet égard, le Comité exhorte l’État partie à garantir spécifiquement l’efficacité des enquêtes sur toutes les disparitions forcées et la pleine satisfaction des droits des victimes tels qu’inscrits dans la Convention.

44.Le Comité tient également à souligner que les disparitions forcées ont des effets particulièrement cruels sur les droits des femmes et des enfants. Les femmes victimes de disparition forcée sont particulièrement vulnérables à la violence sexuelle et à d’autres formes de violence sexiste. Lorsqu’elles sont les parentes d’une personne disparue, les femmes sont particulièrement exposées à des conséquences sociales et économiques graves ainsi qu’à la violence, aux persécutions et aux représailles du fait des efforts qu’elles déploient pour localiser leur proche. Pour leur part, les enfants victimes de disparition forcée, qu’ils soient eux-mêmes soumis à une disparition ou qu’ils subissent les conséquences de la disparition de membres de leur famille, sont particulièrement exposés à de multiples violations des droits de l’homme, notamment la substitution d’identité. C’est pourquoi le Comité insiste sur la nécessité, pour l’État partie, de tenir compte des questions de genre et de la sensibilité des enfants dans l’application des droits et le respect des obligations qui découlent de la Convention.

45.L’État partie est invité à diffuser largement la Convention, le rapport qu’il a soumis en application du paragraphe 1 de l’article 29, ses réponses écrites à la liste de points élaborée par le Comité et les présentes observations finales, en vue de sensibiliser les autorités judiciaires, législatives et administratives, la société civile, les organisations non gouvernementales qui sont actives dans le pays et le grand public. Le Comité invite aussi l’État partie à encourager la société civile à participer à la mise en œuvre des présentes observations finales.

46.Conformément au règlement intérieur du Comité, l’État partie doit communiquer, au plus tard le 18 mars 2017, des informations utiles sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations du Comité figurant aux paragraphes 10, 14 et 32.

47.En application du paragraphe 4 de l’article 29 de la Convention, le Comité demande à l’État partie de lui soumettre, au plus tard le 18 mars 2022, des informations précises et actualisées sur la mise en œuvre de toutes les recommandations formulées, ainsi que tous renseignements nouveaux concernant l’exécution des obligations découlant de la Convention, dans un document conforme aux prescriptions énoncées au paragraphe 39 des Directives concernant la forme et le contenu des rapports que les États parties doivent soumettre en application de l’article 29 de la Convention (CED/C/2). Le Comité encourage l’État partie à promouvoir et à faciliter la participation de la société civile à la compilation de ces informations.