Nations Unies

CAT/C/CZE/CO/4-5

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

13 juillet 2012

Français

Original: anglais

Comité contre la torture

Quarante-huitième session

7 mai-1er juin 2012

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 19 de la Convention

Observations finales du Comité contre la torture

République tchèque

1.Le Comité contre la torture a examiné les quatrième et cinquième rapports de la République tchèque soumis en un seul document (CAT/C/CZE/4-5) à ses 1068e et 1071e séances, tenues les 14 et 15 mai 2012 (CAT/C/SR.1068 et CAT/C/SR.1071), et a adopté à sa 1087e séance (CAT/C/SR.1087) les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction les quatrième et cinquième rapports de la République tchèque, qui ont été soumis dans les délais et sont conformes à ses directives, ainsi que les réponses détaillées (CAT/C/CZE/Q/4-5/Add.1) apportées à la liste des points à traiter (CAT/C/CZE/Q/4-5). Le Comité remercie l’État partie d’avoir accepté la procédure facultative pour l’établissement des rapports, même s’il ne l’a pas utilisée car la rédaction de son rapport était déjà à un stade avancé.

3.Le Comité se félicite du dialogue ouvert et constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de l’État partie, qu’il remercie pour ses réponses aux questions soulevées par les membres du Comité.

B.Aspects positifs

4.Le Comité note avec satisfaction que, depuis l’examen de son troisième rapport périodique, l’État partie a ratifié les instruments internationaux suivants ou y a adhéré:

a)Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (20 juillet 2006);

b)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (26 janvier 2005);

c)La Convention relative aux droits des personnes handicapées (28 septembre 2009);

d)Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (21 juillet 2009).

5.Le Comité prend note des efforts considérables que fait l’État partie pour réviser sa législation dans des domaines relevant de la Convention, notamment:

a)La modification de la loi sur le Médiateur, accordant à celui-ci le pouvoir d’agir en tant que mécanisme national de prévention conformément au Protocole facultatif se rapportant à la Convention, qui est entré en vigueur le 1er janvier 2006 (loi no 381/2005);

b)Les modifications apportées au Code de procédure pénale en 2008 et 2011 concernant l’extradition et les demandes d’indemnisation présentées par les victimes d’infractions, y compris d’actes de torture (lois no 457/2008 et n° 181/2011);

c)Les modifications apportées à la loi sur l’asile en 2006 (loi no 165/2006) et en 2011 (loi n° 303/2011);

d)Les modifications apportées à la loi sur la violence intrafamiliale, entrées en vigueur le 1er janvier 2007 (loi no 135/2006);

e)La nouvelle loi sur les forces de police de la République tchèque (loi no 273/2008);

f)L’entrée en vigueur le 1er janvier 2009 de la nouvelle loi sur la rétention de sûreté (loi no 129/2008);

g)L’entrée en vigueur le 1er septembre 2009 de la loi no 198/2009 sur l’égalité de traitement et l’égalité des moyens de protection contre la discrimination (loi contre la discrimination);

h)L’entrée en vigueur le 1er janvier 2010 du nouveau Code pénal (loi no 40/2009) faisant de la motivation raciale une circonstance aggravante pour un certain nombre d’infractions;

i)La nouvelle loi sur les services médicaux spéciaux, entrée en vigueur le 1er avril 2012 (loi no 373/2012 Rec.)

6.Le Comité prend également note avec satisfaction des efforts faits par l’État partie pour modifier ses politiques, programmes et mesures administratives en vue de garantir une meilleure protection des droits de l’homme et de donner effet à la Convention, à savoir:

a)L’adoption de la Stratégie relative au travail des forces de police tchèques en rapport avec les minorités 2008-2012;

b)L’adoption du Plan national d’action pour la mise en œuvre de la Stratégie nationale pour la prévention de la violence contre les enfants en République tchèque 2008-2018;

c)L’adoption du Plan national d’action en vue de transformer et d’unifier le système de protection des enfants vulnérables 2009-2011;

d)L’adoption du Plan national d’action pour la prévention de la violence intrafamiliale 2011-2014;

e)L’adoption de la Stratégie nationale contre la traite des êtres humains en République tchèque 2012-2015;

f)L’instauration de l’Inspection générale des forces de sécurité en janvier 2012 (loi n° 341/2011).

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Définition de la torture

7.Le Comité note qu’en application de l’article 10 de la Constitution, les traités internationaux approuvés par le Parlement priment la législation interne, mais relève avec préoccupation que le nouveau Code pénal se borne à réprimer le crime de torture et autres traitements inhumains et cruels mais ne définit par la torture elle-même conformément à la Convention (art. 1).

Le Comité recommande à l ’ État partie de modifier son Code pénal afin d ’ adopter une définition de la torture qui comprenne tous les éléments énoncés à l ’ article premier de la Convention.

Vols à des fins de transfert et assurances diplomatiques

8.Le Comité note avec préoccupation que dans ses réponses écrites l’État partie a invoqué la Convention relative à l’aviation civile internationale (Convention de Chicago) comme raison de ne pas demander à inspecter les aéronefs civils. Le Comité relève que pendant le dialogue l’État partie a précisé que l’application de la Convention de Chicago ne visait pas à empêcher ni à décourager l’application de la Convention contre la torture. Il note aussi avec préoccupation que l’État partie a accepté des assurances diplomatiques en relation avec l’extradition de personnes vers des États dans lesquels ces personnes risqueraient d’être soumises à la torture. Enfin, il relève avec préoccupation qu’aucune information n’a été donnée au sujet du type d’assurances diplomatiques reçues ou demandées (art. 3, 6 et 7).

Le Comité recommande à l ’ État partie de refuser d ’ accepter des assurances diplomatiques en relation avec l ’ extradition de personnes vers des États dans lesquels ces personnes risqueraient d ’ être soumises à la torture car ces assurances ne sauraient être prises en considération lors de la détermination d ’ une possible violation de l ’ article 3 de la Convention. Il le prie également de lui communiquer le nombre et le type d ’ assurances diplomatiques reçues depuis 2004, en précisant les pays concernés.

Conditions de détention

9.Le Comité est préoccupé par l’aggravation de la surpopulation dans les centres de détention, qui conduit à une violence accrue entre détenus, par l’utilisation de gaz poivre dans des espaces fermés, à l’intérieur des prisons, par le nombre de suicides dans les lieux de détention et l’absence d’informations concernant leurs causes, par la présence de personnel pénitentiaire lors de l’examen des détenus par un médecin, par l’examen de détenus par des psychiatres à travers des barreaux et par l’absence d’information sur les allégations de détention au secret (art. 11 et 16).

Le Comité recommande à l ’ État partie de faire un plus grand usage des mesures non privatives de liberté conformément aux Règles minima des Nations Unies pour l ’ élaboration de mesures non privatives de liberté (Règles de Tokyo) et de réduire le nombre d ’ incarcérations dues à la non - application de peines de substitution qui sont par la suite converties en peines d ’ emprisonnement . Il lui recommande de réviser la réglementation relative à l ’ usage du gaz poivre dans les espaces fermés. Il recommande également qu ’ une étude soit menée sur les causes de suicide en détention, que l ’ A dministration pénitentiaire renforce la surveillance et le repérage des détenus à risque et prenne des mesures pour prévenir les suicides et les violences entre détenus, notamment en i nstallan t de s caméras et en augmentan t le nombre d ’ agents pénitentiaires. Il recommande en outre de modifier les règles régissant l ’ examen médical des détenus de manière à garantir que l ’ examen soit effectué en privé et de manière indépendante et que les détenus ne soient pas examinés par des psychiatres à travers des barreaux, et de transférer au Ministère de la santé les services de santé destinés aux détenus, qui sont actuellement sous la tutelle de l ’ A dministration pénitentiaire, laquelle relève du Ministère de la justice. Il prie l ’ État partie de lui faire parvenir des renseignements sur la pratique de la détention au secret, notamment de lui communiquer les lois et règlements régissant la détention au secret, de l ’ informer de la durée de cette détention et du nombre de personnes détenues au secret et d ’ indiquer si la détention au secret fait l ’ objet d ’ un contrôle juridictionnel qui prévoit le réexamen des décisions.

10.Le Comité est préoccupé par la persistance de la politique obligeant certaines catégories de détenus à payer jusqu’à 32 % du coût de leur incarcération (art. 2 et 11).

Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre fin sans attendre à la politique obligeant certaines catégories de détenus à payer pour leur incarcération.

Traitement de la minorité rom

11.Le Comité est vivement préoccupé par les informations indiquant que les membres de la minorité rom continuent d’être marginalisés et d’être victimes de discrimination. Plusieurs faits se sont produits récemment, dont la mort de trois Roms, des manifestations anti-Roms et des incendies volontaires d’habitations roms. Le Comité note également avec préoccupation que ces faits n’ont pas donné lieu à l’ouverture rapide d’enquêtes impartiales et efficaces ni à des poursuites (art. 2, 12, 13 et 16).

L ’ État partie devrait:

a) Assurer la protection des Roms et de leurs biens en renforçant les mesures de surveillance et de prévention. Tous les actes de violence ou de discrimination visant des Roms devraient faire l ’ objet d ’ enquêtes approfondies et efficaces, leurs auteurs devraient être traduits en justice et les victimes devraient obtenir réparation et être indemnisées. Les agents de la force publique devraient recevoir une formation à la lutte contre les infractions visant des minorités et des membres de la communauté rom devraient être recrutés dans la police. Le Comité recommande à l ’ État partie de recueillir des statistiques sur les infractions à connotation extrémiste ainsi que sur les résultats des enquêtes, les poursuites et les mesures de réparation qui ont été prises;

b) Condamner publiquement les agressions verbales et physiques contre des Roms, interdire et empêcher l ’ incitation à la haine et organiser des campagnes de sensibilisation et d ’ information faisant la promotion de la tolérance et du respect de la diversité. La loi sur l ’ égalité de traitement et l ’ égalité de moyens de protection contre la discrimination (loi contre la discrimination) devrait être traduite en langue rom.

12.Le Comité est préoccupé par les informations indiquant que des femmes roms ont été stérilisées sans leur consentement libre et éclairé, par la destruction des dossiers médicaux sur les stérilisations non volontaires et par les difficultés qu’ont les victimes à obtenir réparation (art. 2, 14 et 16).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ enquêter sans délai, de manière impartiale et efficace, sur toutes les allégations de stérilisation non volontaire de femmes roms, d ’ allonger les délais pour le dépôt de plainte, de poursuivre et punir les auteurs de tels actes et d ’ assurer aux victimes une réparation équitable et adéquate. Le personnel médical procédant à des stérilisations sans le consentement libre , entier et éclairé des personnes concernées pourrait voir sa responsabilité pénale engagée et les dossiers médicaux relatifs à de possibles stérilisations non volontaires ne devraient pas être détruits avant l ’ expiration du délai prévu par la loi. Le personnel médical devrait être formé aux moyens efficaces d ’ obtenir un consentement libre et éclairé de la part des femmes subissant une stérilisation et tous les documents écrits relatifs à la stérilisation devraient être traduits en langue rom.

Réparation et indemnisation, y compris la réadaptation

13.Le Comité est préoccupé par l’absence de statistiques sur l’indemnisation des victimes d’actes de torture et de mauvais traitements, y compris les victimes de stérilisation ou de castration chirurgicale non volontaires, de mauvais traitements dans les établissements médicaux ou psychiatriques, d’agressions violentes dirigées contre des minorités ethniques, de la traite ou de violence intrafamiliale ou sexuelle. Il est également préoccupé par les délais fixés pour le dépôt de plainte (art. 14 et 16).

Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les victimes de torture ou de mauvais traitements aient droit à une réparation et à une indemnisation suffisante, y compris des moyens de réadaptation, et les obtiennent, conformément à l ’ article 14 de la Convention. Il le prie de lui communiquer des statistiques sur le nombre de victimes, y compris les victimes de stérilisation ou de castration chirurgicale non volontaires , de mauvais traitements infligés dans des établissements médicaux ou psychiatriques, d ’ agressions violentes dirigées contre des minorités ethniques, de la traite ou de violence intrafamiliale ou sexuelle, qui ont été indemnisées ou ont bénéficié d ’ autres formes d ’ assistance. Il lui recommande en outre d ’ allonger les délais pour le dépôt de plainte.

Enfants roms

14.Le Comité est préoccupé par le placement d’enfants roms dans des structures éducatives conçues pour des enfants souffrant d’un handicap mental léger ou proposant un programme scolaire allégé utilisé précédemment par les écoles spécialisées, ce qui compromet la poursuite de leur instruction (art. 2, 10, 12, 13 et 16).

Compte tenu de son Observation générale n o  2 (2007) sur l ’ application de l’article 2 par les États parties , le Comité rappelle que la protection spéciale de certaines minorités ou personnes ou groupes marginalisés particulièrement exposés fait partie des obligations de l ’ État partie au titre de la Convention. À cet égard, l ’ État partie devrait veiller à ce que les enfants roms soient admis dans les écoles ordinaires, à moins qu ’ un examen en bonne et due forme ait conclu que l ’ enfant souffre d ’ une déficience mentale et que le représentant légal de l ’ enfant ait demandé que celui-ci soit placé dans une école spécialisée. Les tests normalisés devraient être adaptés aux spécificités sociales, culturelles et linguistiques des minorités et les éducateurs comme le personnel des écoles devraient bénéficier d ’ une formation aux principes de la non-discrimination.

Plaintes, enquêtes et poursuites dans des affaires de torture ou de mauvais traitements

15.Le Comité est préoccupé par les difficultés d’enregistrement des plaintes et s’inquiète de l’indépendance du système chargé d’évaluer ces plaintes. Il est en particulier préoccupé par le contraste entre le nombre de plaintes pour torture ou mauvais traitements dans des lieux de privation de liberté, en particulier de plaintes décrites comme étant fondées ou partiellement fondées, et l’absence de poursuites pour des actes de torture ou des mauvais traitements infligés par des policiers ou des agents pénitentiaires (art. 12 et 13).

Le Comité recommande que l’Inspection générale des forces de sécurité enquête sans délai, de manière impartiale et efficace sur toutes les allégations de torture et de mauvais traitements visant des agents de la force publique et des agents pénitentiaires, poursuive en justice les auteurs de ces actes et assure aux victimes une réparation, sous la forme notamment d’une indemnisation. L’État partie devrait communiquer au Comité des données ventilées par sexe, âge, appartenance ethnique et origine de la victime, et classées selon les catégories de motifs de plainte établis par la loi.

Traite des personnes

16.Le Comité note avec préoccupation que les victimes de la traite ne bénéficient pas toutes d’une protection suffisante et d’un accès aux soins de santé et aux services de conseil, à un hébergement et à une réparation, sous la forme notamment d’une indemnisation et de moyens de réadaptation, car seules celles qui coopèrent avec les autorités bénéficient d’un régime spécial (art. 10, 12, 13, 14 et 16).

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer les enquêtes sur tous les types de traite, de poursuivre les auteurs et d’assurer dans des conditions d’égalité à toutes les victimes de la traite, y compris aux victimes de la traite aux fins d’exploitation sexuelle ou d’exploitation par le travail, une protection et un accès aux soins de santé et aux services de conseil, à un hébergement et à une réparation, sous la forme notamment d’une indemnisation et de moyens de réadaptation. Des efforts devraient être faits pour sensibiliser et former les agents de la force publique, les juges et les procureurs aux moyens de lutter contre la traite des personnes et pour améliorer l’identification des personnes qui en sont victimes.

Détention de demandeurs d’asile et d’autres non-nationaux

17.Le Comité est préoccupé par la persistance de la pratique du placement en rétention des demandeurs d’asile, y compris de familles avec enfants et de mineurs accompagnés d’un tuteur, par les restrictions imposées à la liberté de circulation des demandeurs d’asile placés dans des centres d’accueil fermés et par le régime et les conditions matérielles de détention qui prévalent dans les centres pour étrangers en attente d’expulsion (art. 3 et 11).

Le Comité recommande à l’État partie de mettre en œuvre des mesures de substitution au placement en rétention des demandeurs d’asile, y compris la libération sans conditions, en particulier en ce qui concerne les familles avec enfants et les adultes qui ont la responsabilité d’ enfants. Il recommande aussi que les demandeurs d’asile placés dans des centres d’accueil fermés jouissent de la liberté de circulation et bénéficient de conditions d’accueil appropriées. En outre, il recommande à l’État partie de revoir la durée des restrictions à la liberté de circulation des demandeurs d’asile placés dans des centres d’ accueil fermés et de revoir le régime et les conditions matérielles dans les centres pour étrangers en attente d’expulsion afin de garantir le respect du principe de non-refoulement énoncé à l’ article  3 de la Convention et dans la Convention de 1951 sur le statut des réfugiés.

Formation

18.Le Comité note avec préoccupation que l’État partie affirme que les signes de traumatismes physiques et psychologiques causés par la torture sont si spécifiques qu’un soignant expérimenté n’a pas besoin de formation (art. 10).

Le Comité recommande vivement que la formation à la détection des signes de traumatismes physiques et psychologiques causés par la torture et les mauvais traitements et au traitement de ces traumatismes, conformément au Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d’Istanbul), fasse partie de la formation du personnel infirmier, médical, paramédical et des autres professionnels participant aux enquêtes sur les allégations de torture et de mauvais traitements pour garantir que tous les cas de torture soient détectés et les auteurs dûment sanctionnés.

Apatrides

19.Le Comité note que l’État partie a ratifié la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie, mais il est préoccupé par la situation particulièrement précaire des apatrides, en particulier des personnes qui n’ont pas de documents valides et n’ont pas le statut de résident permanent dans l’État partie. Il est également préoccupé par l’absence de définition de l’apatridie, de base de données centralisée sur les apatrides, de cadre juridique et de procédure ou mécanisme permettant de déterminer le statut de ces personnes. Enfin, il craint que la nouvelle loi sur la nationalité n’établisse une discrimination entre différentes catégories d’apatrides (art. 3 et 16).

Le Comité recommande à l’État partie d’inscrire une définition de l’apatridie dans sa législation, de mettre en place des procédures et des mécanismes permettant de déterminer le statut d’apatride et de créer une base de données centralisée sur les apatrides vivant sur son territoire. Afin d’éviter la discrimination entre différentes catégories d’apatrides, l’État partie devrait revoir les dispositions du projet de loi sur la nationalité qui portent sur l’acquisition de la nationalité par les enfants qui, sinon, seraient apatrides ou qui sont nés hors mariage de mère étrangère ou apatride. En outre, le Comité recommande de délivrer des documents d’identité aux personnes apatrides.

Castration chirurgicale des délinquants sexuels

20.Le Comité note avec préoccupation que la castration chirurgicale des délinquants sexuels placés en détention reste une pratique en vigueur, qu’elle est généralement réalisée dans le cadre d’un traitement de protection (traitement obligatoire dans un hôpital psychiatrique) et que l’article 99 du Code pénal laisse entendre que les patients peuvent être internés et traités sans leur consentement. Il relève également avec préoccupation qu’en vertu de la nouvelle loi sur «la détention à des fins médico-légales», les délinquants sexuels pourraient rester en détention pour une durée indéterminée. Il note en outre avec préoccupation que, par le passé, les personnes étaient amenées à croire que, si elles refusaient la castration chirurgicale, elles resteraient en détention toute leur vie (art. 2 et 6).

Le Comité recommande à l’État partie de renoncer à la pratique de la castration chirurgicale et de modifier sa législation pour la mettre en conformité avec les normes internationales telles que les Normes relatives au traitement des délinquants sexuels adultes . La législation relative aux délinquants sexuels devrait comprendre des garanties de procédure et des règles et instructions professionnelles précises quant au traitement des délinquants sexuels et à leur détention, y compris sa durée.

Établissements psychiatriques

21.Malgré l’évolution de la législation annoncée par la délégation de l’État partie, le Comité prend note avec préoccupation des informations indiquant que les personnes présentant des déficiences intellectuelles ou psychosociales sont souvent placées dans des institutions sociales, médicales ou psychiatriques sans leur consentement libre et éclairé et que les lits-cages, pourtant interdits par la loi, et les lits à filet sont encore utilisés, ainsi que d’autres moyens de contrainte tels que des sangles de lit ou des menottes ou des mesures de mise à l’isolement, en application desquelles le patient est souvent délaissé dans des conditions insalubres. Le Comité est également préoccupé par l’absence d’enquêtes sur les mauvais traitements et les décès, y compris par suicide, de personnes confinées dans des lits-cages ou des lits à filet (art. 11 et 16).

Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’allouer des fonds suffisants à l’application du plan national de transformation des services psychiatriques, sanitaires, sociaux et autres destinés aux adultes et aux enfants présentant des déficiences intellectuelles ou psychosociales, afin d’accélérer la désinstitutionalisation au profit d’un système centré sur les services communautaires et/ou des logements abordables ;

b) De faire en sorte que des organes judiciaires supervisent et surveillent étroitement tout placement en institution de personnes présentant des déficiences intellectuelles ou psychosociales, en mettant en place les garanties juridiques appropriées et un système de visites par des organes de surveillance indépendants. Le placement en institution et le traitement devraient être subordonnés au consentement libre et éclairé des personnes concernées et celles-ci devraient être informées à l ’ avance du traitement prévu ;

c) De prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir, dans les faits, l ’ interdiction de l ’ utilisation des lits-cages, conformément aux dispositions de la loi s ur les services médicaux (loi n o 372/2011). Le Comité recommande en outre que la loi soit modifiée de manière à interdire l ’ utilisation des lits à filet, dont les effets sont analogues à ceux des lits-cages ;

d) De veiller à ce que les conditions de vie en institution, y compris les conditions d ’ hygiène et les cas de délaissement, fassent l ’ objet d ’ une surveillance effective et d ’ une évaluation indépendante. L ’ État partie devrait mettre en place un mécanisme de plainte s , assurer des services de conseils et veiller à ce que le personnel médical et non médical soit formé à l ’ administration de soins non violents et non coercitifs. Tous les cas de mauvais traitements et tous les décès, notamment le décès de Vera Musilova, 30 ans, en 2006, et le suicide d ’une femme de 51 ans le 20  janvier 2012, devraient faire l ’ objet d ’ enquêtes effectives, des poursuites devraient être engagées et les victimes et leur famille devraient obtenir réparation, y compris une indemnisation et des moyens de réadaptation.

Châtiments corporels

22.Le Comité note avec préoccupation que les châtiments corporels sont largement tolérés dans l’État partie et qu’il n’existe pas de loi les interdisant expressément. Il relève aussi avec préoccupation que la loi no 94/1963 Rec. sur la famille dispose que les parents ont le droit de faire usage de «mesures éducatives adaptées» et que la question sera traitée de manière analogue dans le nouveau Code civil (art. 2 et 16).

Le Comité recommande à l’État partie de modifier sa législation, notamment la loi sur la famille et le nouveau Code civil, en vue d’interdire expressément les châtiments corporels dans tous les contextes. L’État partie devrait mener des campagnes de sensibilisation du grand public pour faire comprendre que les châtiments corporels sont inacceptables et préjudiciables.

Collecte de données

23.Le Comité regrette de ne pas disposer de données complètes et ventilées sur les plaintes, les enquêtes, les poursuites et les condamnations portant sur des actes de torture ou des mauvais traitements infligés par les forces de l’ordre, les forces de sécurité et le personnel pénitentiaire, y compris en relation avec des stérilisations non volontaires, des castrations chirurgicales, des traitements non consentis et des placements en institution sociale, notamment l’utilisation de moyens de contrainte, ainsi que sur des agressions violentes contre des minorités ethniques, en particulier les Roms, sur la traite et sur la violence intrafamiliale ou sexuelle.

L’État partie devrait rassembler des données statistiques permettant d’évaluer la mise en œuvre de la Convention à l’échelon national, telles que des données sur les plaintes déposées, les enquêtes menées, les poursuites engagées et les condamnations prononcées dans des affaires de torture ou de mauvais traitements, en relation avec des stérilisations non volontaires, des castrations chirurgicales, des traitements non consentis, des placements en institution sociale et l’utilisation de moyens de contrainte, et dans des affaires d’agressions violentes contre des minorités ethniques, notamment les Roms, de traite et de violence intrafamiliale ou sexuelle, ainsi que sur les recours ouverts aux victimes pour obtenir réparation, sous la forme notamment d’une indemnisation et de moyens de réadaptation.

24.Le Comité invite l’État partie à ratifier les principaux instruments des Nations Unies relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, à savoir la Convention sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

25.L’État partie est prié de diffuser largement le rapport qu’il a soumis au Comité ainsi que les observations finales du Comité dans toutes les langues voulues, par l’intermédiaire des sites Web officiels, des médias et des organisations non gouvernementales.

26.Le Comité prie l’État partie de lui faire parvenir, d’ici au 1er juin 2013, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations formulées aux paragraphes 11, 14 et 21 portant sur a) la mise en place de garanties juridiques pour les personnes détenues ou le renforcement des garanties existantes, b) la conduite rapide d’enquêtes impartiales et effectives et c) les poursuites engagées contre les suspects et les sanctions prises contre les auteurs d’actes de torture ou de mauvais traitements.

27.L’État partie est invité à soumettre son prochain rapport périodique, qui sera le sixième, le 1er juin 2016 au plus tard. À cette fin, le Comité soumettra en temps voulu à l’État partie une liste préalable de points à traiter puisque l’État partie a accepté d’établir son rapport conformément à la procédure facultative.