Nations Unies

CRPD/C/KOR/CO/1

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

29 octobre 2014

Français

Original: anglais

Comité des droits des personnes handicapées

Observations finales concernant le rapport initial de la République de Corée *

I.Introduction

Le Comité a examiné le rapport initial de la République de Corée (CRPD/C/KOR/1) à ses 147e et 148e séances, tenues respectivement les 17 et 18 septembre 2014, et a adopté les observations finales ci-après à sa 165e séance, le 30 septembre 2014.

Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de la République de Corée, qui a été rédigé conformément aux directives du Comité concernant l’établissement des rapports, et il remercie l’État partie de ses réponses écrites (CRPD/C/KOR/Q/1/Add.1) à la liste de points élaborée par le Comité.

Le Comité se réjouit du dialogue fructueux qu’il a eu avec la délégation de l’État partie et remercie ce dernier d’avoir dépêché une délégation de haut niveau, composée de nombreux représentants des ministères concernés. Le Comité salue le fait que la Commission nationale des droits de l’homme de la République de Corée a participé de manière indépendante aux travaux.

II.Aspects positifs

Le Comité félicite l’État partie pour les progrès qu’il a accomplis dans de multiples domaines visés par la Convention et pour le travail d’harmonisation des textes législatifs qu’il a effectué, y compris l’adoption de la loi relative à la protection sociale des enfants handicapés, qui est entrée en vigueur le 5 août 2012. Il prend acte avec satisfaction de l’existence de la loi relative à la lutte contre la discrimination à l’égard des personnes handicapées et aux recours qui leur sont ouverts. Il salue également l’élaboration du Plan quinquennal de développement des politiques en faveur des personnes handicapées.

Le Comité sait gré à l’État partie des nombreuses mesures qu’il a prises dans le domaine de la coopération internationale relative aux droits des personnes handicapées, notamment de son initiative visant à soutenir le lancement et la mise en œuvre de la Stratégie d’Incheon pour la réalisation des droits des personnes handicapées en Asie et dans le Pacifique.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Obligations et principes généraux (art. 1er à 4)

Le Comité est préoccupé par le fait que la loi relative à la protection sociale des personnes handicapées repose sur l’approche médicale du handicap.

Le Comité recommande à l ’ État partie de réviser la loi relative à la protection sociale des personnes handicapées et de faire en sorte qu ’ elle s ’ accorde avec l ’ approche du handicap fondée sur les droits de l ’ homme consacrée par la Convention.

Le Comité juge préoccupant que le nouveau système de détermination du handicap et d’évaluation du degré de handicap établi dans le cadre de la loi relative à la protection sociale des personnes handicapées subordonne la fourniture de services aux seules évaluations médicales et qu’il ne tienne pas compte des différents besoins des personnes handicapées et ne s’applique pas à l’ensemble de ces personnes, notamment celles qui présentent un handicap psychosocial. Il craint que ce système ne limite le nombre de personnes handicapées admises à bénéficier de services d’aide sociale et de services d’accompagnement personnalisé, sur la base du taux de handicap qui leur est reconnu.

Le Comité recommande à l ’ État partie de réviser l ’ actuel système de détermination du handicap et d ’ évaluation du degré de handicap établi dans le cadre de la loi relative à la protection sociale des personnes handicapées pour faire en sorte que l ’ évaluation tienne compte des caractéristiques, de la situation particulière et des besoins des personnes handicapées, et que les services d ’ aide sociale et d ’ accompagnement personnalisé soient étendus à toutes les personnes handicapées, y compris celles qui présentent des handicaps psychosociaux, en fonction de leurs besoins.

Le Comité encourage l ’ État partie à ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention.

B.Droits spécifiques (art. 5 à 30)

Égalité et non-discrimination (art. 5)

Le Comité s’inquiète que la loi de 2008 relative à la lutte contre la discrimination à l’égard des personnes handicapées et aux recours qui leur sont ouverts ne soit pas réellement appliquée. Il est particulièrement préoccupé par le fait que la plupart des plaintes en réparation restent sans suite. Le Comité note que les tribunaux devraient user du pouvoir d’injonction qui leur est reconnu.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ augmenter les ressources humaines et de renforcer l ’ indépendance de la Commission nationale des droits de l ’ homme. Il recommande également qu ’ une exonération ou une réduction des frais de justice soit prévue pour les personnes victimes d ’ une discrimination fondée sur le handicap, afin de garantir l ’ accès aux voies de recours juridictionnelles, et que les conditions dans lesquelles le Ministre de la justice peut ordonner des mesures correctives (énoncées à l ’ article 43 de la loi relative à la lutte contre la discrimination à l ’ égard des personnes handicapées et aux recours qui leur sont ouverts) soient revues à la baisse. Le Comité encourage aussi l ’ État partie à sensibiliser les juges à la nécessité d ’ appliquer effectivement la loi relative à la lutte contre la discrimination à l ’ égard des personnes handicapées et aux recours qui leur sont ouverts et d ’ user du pouvoir d ’ injonction qui leur est reconnu.

Femmes handicapées (art. 6)

Le Comité est préoccupé par le fait que la législation et les politiques concernant les personnes handicapées ne prennent pas en compte la question du genre. Il s’inquiète aussi de l’insuffisance des mesures visant à prévenir les violences familiales contre les femmes handicapées ainsi que les violences sexuelles dont elles peuvent faire l’objet aussi bien en établissement d’accueil qu’à l’extérieur. Il est inquiet en outre des difficultés que rencontrent les femmes et les filles handicapées s’agissant de participer à des programmes de formation continue, ainsi que de l’insuffisance de l’appui apporté aux femmes handicapées pendant la grossesse et à l’accouchement.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intégrer les questions de genre dans sa législation et ses politiques relatives au handicap et d ’ élaborer des politiques spéciales à l ’ intention des femmes handicapées. Il lui recommande aussi de prendre des mesures concrètes pour lutter contre les violences à l ’ égard des femmes handicapées en établissement d ’ accueil comme à l ’ extérieur, notamment en faisant une place à la problématique du handicap dans les programmes éducatifs visant à prévenir les violences sexuelles et familiales. Il lui recommande en outre de s ’ assurer que les femmes handicapées bénéficient d ’ une formation continue appropriée adaptée à leurs choix et à leurs besoins, qu ’ elles aient achevé leurs études dans le cadre du système éducatif ordinaire ou qu ’ elles aient été exclues du système. Le Comité recommande enfin à l ’ État partie de renforcer l ’ aide apportée aux femmes handicapées pendant la grossesse et au moment de l ’ accouchement.

Sensibilisation (art. 8)

Le Comité observe que l’État partie néglige d’effectuer un travail systématique et continu de diffusion de l’information et de sensibilisation sur le contenu et l’objet de la Convention auprès des responsables gouvernementaux, des parlementaires, des médias et du grand public.

Le Comité encourage l ’ État partie à développer les campagnes de sensibilisation de façon à donner une image positive des personnes handicapées en tant que détenteurs de tous les droits fondamentaux. Il lui recommande en particulier d ’ effectuer un travail systématique et permanent de diffusion de l ’ information et de sensibilisation sur le contenu et l ’ objet de la Convention auprès des responsables gouvernementaux, des parlementaires, des médias et du grand public.

Accessibilité (art. 9)

Le Comité s’inquiète du faible nombre d’autobus et de taxis accessibles aux personnes handicapées dans les zones rurales et urbaines. Il relève aussi avec préoccupation que les normes en matière d’accessibilité applicables aux bâtiments sont limitées par des règles relatives à la dimension, à la capacité et à la date de construction des édifices, et qu’elles ne sont pas encore appliquées à tous les bâtiments ouverts au public. Il juge préoccupant en outre que de nombreux sites Web demeurent inaccessibles aux personnes présentant une déficience visuelle et que l’accessibilité des contenus Web pour chaque type de handicap (déficience auditive ou handicap intellectuel ou psychosocial, par exemple) reste faible.

Le Comité recommande à l ’ État partie de revoir ses politiques de transport pour faire en sorte que les personnes handicapées puissent utiliser tous les moyens de transport publics facilement et en toute sécurité. Il l ’ encourage à appliquer les normes en matière d ’ accessibilité à tous les bâtiments, installations et lieux de travail ouverts au public, indépendamment de leur dimension, de leur capacité ou de leur date de construction, conformément à l ’ article 9 de la Convention et à l ’Observation générale  n o  2 (2014) du Comité sur l ’ accessibilité. Il lui recommande en outre de modifier les lois pertinentes de telle sorte que toutes les personnes handicapées puissent accéder à l ’ information sur Internet, sur la base de l ’ égalité avec les autres, et de faciliter l ’ accès aux téléphones intelligents pour les personnes qui présentent des déficiences visuelles ou autres.

Situations de risque et situations d’urgence humanitaire (art. 11)

Le Comité est préoccupé par le fait qu’il n’existe pas de plans d’action sous des formes accessibles à toutes les personnes handicapées pour ce qui concerne les situations d’urgence, dont les catastrophes naturelles. Il s’inquiète tout particulièrement de noter que les décrets d’application de la loi-cadre relative aux bâtiments et de la loi relative à la promotion des aménagements en faveur des personnes handicapées, des personnes âgées et des femmes enceintes ne prévoient pas de dispositifs d’évacuation pour les personnes handicapées.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter et d ’ appliquer un plan d ’ ensemble propre à garantir, dans les situations de risque, notamment en cas de catastrophe naturelle, la protection et la sécurité des personnes handicapées, compte tenu de la nature de leur handicap, et à garantir aussi l ’ accessibilité universelle et la prise en compte du handicap à toutes les étapes et à tous les niveaux de l ’ élaboration et de l ’ application de l ’ ensemble des politiques de réduction des risques de catastrophe.

Reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité (art. 12)

Le Comité s’inquiète du fait que le nouveau système de protection des adultes, qui est entré en vigueur en juillet 2013, permet aux tuteurs de prendre des décisions sur des questions touchant au patrimoine et à la situation personnelle d’individus jugés durablement incapables de gérer certaines tâches en raison d’atteintes psychologiques liées à la maladie, au handicap ou au grand âge. Il note qu’un tel système continue de privilégier la prise de décision substitutive par rapport à la prise de décision assistée, contrairement à ce que prévoient les dispositions de l’article 12 de la Convention, telles qu’elles ont été précisées par le Comité dans son Observation générale no 1 (2014) sur la reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité.

Le Comité recommande à l ’ État partie de passer de la prise de décision substitutive à la prise de décision assistée, qui respecte l ’ autonomie de la personne, ainsi que sa volonté et ses préférences, et est pleinement conforme à l ’ article 12 de la Convention et à l ’ Observation générale n o  1 du Comité, notamment pour ce qui est du droit de chacun, à titre individuel, de donner et de retirer son consentement éclairé à recevoir un traitement médical, d ’ accéder à la justice, de voter, de se marier, de travailler et de choisir son lieu de résidence. Il lui recommande en outre de dispenser, en concertation et en collaboration avec les personnes handicapées et les organisations qui les représentent, aux niveaux national, régional et local, des formations sur la reconnaissance de la capacité juridique des personnes handicapées et les mécanismes de prise de décision assistée à tous les acteurs concernés, notamment aux agents de l ’ État, aux juges et aux travailleurs sociaux.

Accès à la justice (art.13)

Le Comité est préoccupé par le fait que l’article 26 de la loi relative à la lutte contre la discrimination à l’égard des personnes handicapées et aux recours qui leur sont ouverts, qui exige du Gouvernement qu’il prévoie des aménagements raisonnables en faveur des personnes handicapées pendant les procédures judiciaires, n’est pas appliqué effectivement. Il s’inquiète aussi de constater que le personnel judiciaire n’est pas suffisamment informé des droits des personnes handicapées. Le Comité relève que la Cour suprême de la République de Corée a publié, en 2013, des lignes directrices concernant l’assistance judiciaire aux personnes handicapées.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intensifier ses efforts pour assurer l ’ application effective de l ’ article 26 de la loi relative à la lutte contre la discrimination à l ’ égard des personnes handicapées et aux recours qui leur sont ouverts. Il recommande également que des modules de formation standard relatifs au travail avec les personnes handicapées, aux aménagements raisonnables, en particulier les aménagements procéduraux et les aménagements en fonction de l ’ âge, ainsi que du genre, et à la garantie d ’ accès à la justice soient intégrés dans les programmes de formation à l ’ intention des policiers, des agents pénitentiaires, des avocats, des magistrats et des auxiliaires de justice. Il recommande en outre que les lignes directrices concernant l ’ assistance judiciaire aux personnes handicapées publiées par la Cour suprême aient force obligatoire et soient appliquées de manière effective.

Liberté et sécurité de la personne (art. 14)

Le Comité s’inquiète du fait que les dispositions juridiques contenues dans la loi relative à la santé mentale et le projet de modification de la loi autorisent la privation de liberté fondée sur le handicap. Il est également préoccupé par le nombre élevé de cas où des personnes présentant un handicap psychosocial sont placées en institution, y compris pour des périodes prolongées, sans que leur consentement libre et éclairé ait été obtenu.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ abroger les dispositions juridiques autorisant la privation de liberté fondée sur le handicap, notamment le handicap psychosocial et intellectuel, et de prendre les mesures voulues pour garantir que la prestation de services de soins de santé, notamment de tous les services de soins de santé mentale, se fasse avec le consentement libre et éclairé de la personne concernée. Il recommande aussi que, tant que la loi n ’ aura pas été modifiée, tous les cas de personnes handicapées privées de liberté et placées dans un hôpital ou en institution spécialisée fassent l ’ objet d ’ un réexamen, et que ce réexamen comporte la possibilité de faire appel de la décision retenue.

Le Comité s’inquiète de l’absence de renseignements sur les garanties en vigueur permettant aux personnes handicapées qui sont déclarées inaptes à être jugées d’exercer leur droit à un procès équitable. Le Comité prend acte des informations fournies par l’État partie au sujet de l’aide juridictionnelle dont bénéficient ces personnes et des verdicts de non-culpabilité rendus à leur endroit. Aucune indication n’a toutefois été donnée quant aux mesures concrètes que la République de Corée applique à titre de sanction aux personnes déclarées inaptes à subir un procès.

Le Comité recommande la mise en place d ’ aménagements procéduraux propres à offrir aux personnes handicapées les garanties d ’ un procès équitable et d ’ une procédure régulière. Il recommande également que la procédure de déclaration d ’ inaptitude à subir un procès soit supprimée du système de justice pénale afin que les personnes handicapées puissent bénéficier d ’ une procédure régulière dans des conditions d ’ égalité.

Droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (art. 15)

Le Comité juge préoccupant que, dans les hôpitaux psychiatriques, les personnes présentant des handicaps psychosociaux fassent l’objet d’actes considérés comme cruels, inhumains ou dégradants, notamment qu’elles soient mises à l’isolement, continuellement battues ou soumises à des moyens de contention, ou qu’on leur administre des traitements médicamenteux excessifs.

Le Comité exhorte l ’ État partie à abolir les traitements forcés qui reviennent à soumettre les personnes handicapées à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Tant que le placement en institution sera maintenu, le Comité engage vivement l ’ État partie à protéger les personnes handicapées hospitalisées en établissement psychiatrique contre la violence, les sévices et les mauvais traitements de toutes sortes en mettant en place de réels mécanismes de surveillance indépendants externes qui garantissent la représentation des organisations de personnes handicapées.

Droit de ne pas être soumis à l’exploitation, à la violence et à la maltraitance (art. 16)

Le Comité juge préoccupant que les personnes handicapées continuent d’être exposées à la violence, à la maltraitance et à l’exploitation, y compris au travail forcé. Il s’inquiète aussi de voir que l’État partie ne punit pas les responsables et n’offre pas réparation aux victimes et qu’il n’existe pas de refuges pour les personnes handicapées, sauf pour celles qui sont victimes de violences sexuelles ou familiales.

Le Comité invite instamment l ’ État partie à enquêter sur tous les cas de violence, d ’ exploitation et de maltraitance concernant des personnes handicapées en institution et hors institution; à veiller à ce que les auteurs de tels actes soient punis et à ce que les victimes reçoivent réparation; et à mettre en place des refuges accessibles pour les personnes handicapées victimes d ’ actes de cette nature. Il lui recommande en particulier d ’ approfondir ses enquêtes sur les cas où des personnes handicapées sont astreintes à travailler et d ’ offrir aux victimes une protection adéquate.

Protection de l’intégrité de la personne (art. 17)

Le Comité constate avec préoccupation qu’il existe des cas de stérilisation forcée de femmes handicapées malgré les dispositions légales qui interdisent cette pratique. Il s’inquiète également de l’absence de toute information sur des enquêtes menées par l’État partie à ce sujet.

Le Comité engage instamment l ’ État partie à prendre des mesures pour éliminer la pratique de la stérilisation forcée, y compris en menant un travail de sensibilisation auprès des familles, des communautés et du personnel des établissements d ’ accueil sur les droits des femmes et des filles handicapées, et en s ’ assurant que des mécanismes garantissant la protection contre la stérilisation forcée sont en place et accessibles. Le Comité recommande aussi à l ’ État partie d ’ enquêter sur les cas de stérilisation forcée récents ou actuels.

Droit de circuler librement (art. 18)

Le Comité est préoccupé par les dispositions de l’article 11 de la loi relative à la maîtrise de l’immigration interdisant l’entrée sur le territoire national de toute personne présentant un handicap psychosocial qui n’est pas douée de raison et n’est pas accompagnée d’un assistant pour la durée de son séjour, et par celles de l’article 32 de la loi relative à la protection sociale des personnes handicapées qui restreignent l’accès des migrants handicapés aux services de base fournis aux personnes handicapées.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ abroger l ’article  11 de la loi relative à la maîtrise de l ’ immigration et l ’article  32 de la loi relative à la protection sociale des personnes handicapées pour faire en sorte que les personnes handicapées ne soient pas privées du droit d ’ entrer en République de Corée sur la base de leur handicap et lever toute restriction s ’ appliquant aux migrants handicapés en matière d ’ accès aux services de base fournis aux personnes handicapées.

Autonomie de vie et inclusion dans la société (art. 19)

Le Comité s’inquiète du manque d’efficacité des stratégies de désinstitutionalisation et de l’insuffisance des mesures visant à intégrer les personnes handicapées dans la société, attestés par l’augmentation du nombre d’institutions pour personnes handicapées et du nombre de personnes résidant en établissement, ainsi que de l’absence de politiques d’insertion sociale, prévoyant tous les services d’accompagnement nécessaires, y compris des services d’aide à la personne.

Le Comité engage vivement l ’ État partie à élaborer des stratégies de désinstitutionalisation efficaces fondées sur l ’ approche du handicap axée sur les droits de l ’ homme et à développer de façon conséquente les services d ’ accompagnement à la vie sociale, y compris les services d ’ assistance à la personne.

Le Comité juge préoccupant que le montant qu’une personne handicapée doit acquitter pour bénéficier des services d’un assistant personnel soit calculé à partir de son «degré de handicap» et non de ses caractéristiques, de sa situation personnelle et de ses besoins, et sur la base des revenus de sa famille, et non de ses revenus propres, mode de calcul qui prive certaines personnes handicapées des services d’un assistant personnel.

Le Comité encourage l ’ État partie à veiller à ce que les programmes d ’ assistance sociale prévoient une aide financière équitable et suffisante de façon que les personnes handicapées puissent mener une vie autonome dans la société. Le Comité lui recommande, en particulier, de prendre en compte, pour le calcul du montant à verser pour les services d ’ un assistant personnel, des caractéristiques, de la situation personnelle et des besoins de l ’ intéressé, et non pas son «degré de handicap», ainsi que ses revenus propres, et non pas ceux de sa famille.

Liberté d’expression et d’opinion, et accès à l’information (art. 21)

Le Comité relève avec préoccupation que la langue des signes utilisée en République de Corée n’est pas reconnue comme langue officielle de l’État partie et que le projet de loi proclamant le braille alphabet officiel est encore devant l’Assemblée nationale. Le Comité juge préoccupant également que le règlement qui garantit l’accès des personnes handicapées aux contenus diffusés, en particulier aux émissions télévisées, fixe une norme relative à la quantité d’émissions, mais n’en prévoie aucune propre à garantir la qualité desdites émissions et la pleine accessibilité de l’information grâce à la langue des signes, au sous‑titrage optionnel, à l’audiodescription et la vidéodescription, à la présentation du contenu sous une forme facile à lire ou facile à comprendre, et sous d’autres formes et par le biais d’autres modes et moyens de communication accessibles.

Le Comité encourage l ’ État partie à reconnaître la langue des signes coréenne en tant que langue officielle de la République de Corée et à adopter le projet de loi portant reconnaissance du braille en tant qu ’ alphabet officiel de l ’ État partie. Le Comité recommande d ’ inclure, dans le règlement qui vise à garantir l ’ accès des personnes handicapées aux contenus diffusés, des normes concernant la qualité des émissions, ainsi que la pleine accessibilité de l ’ information par la prestation de services d ’ interprétation en langue des signes, de sous-titrage optionnel, d ’ audiodescription et de vidéodescription , et de présentation du contenu sous une forme facile à lire ou facile à comprendre, ainsi que sous d ’ autres formes et par le biais d ’ autres modes et moyens de communication accessibles.

Respect du domicile et de la famille (art. 23)

Le Comité est préoccupé par le fait que seuls les ménages à faible revenu comprenant des personnes lourdement handicapées bénéficient des services d’accompagnement à l’intention des familles d’enfants handicapés. L’offre étant limitée, même ces services sont insuffisants. Le Comité s’inquiète aussi de constater que le Gouvernement accorde davantage de subventions et de prestations aux familles qui adoptent des enfants handicapés qu’aux familles d’origine de ces enfants, ce qui constitue un encouragement à l’abandon des enfants handicapés par les familles, en particulier par les mères célibataires victimes d’une double stigmatisation, et prive ainsi l’enfant du droit à la famille.

Le Comité recommande à l ’ État partie de créer la base juridique nécessaire à la mise en place de politiques globales visant à permettre aux parents d ’ enfants handicapés, y compris aux mères célibataires, de bénéficier d ’ une aide pour élever l ’ enfant au sein de la famille et à garantir les droits de l ’ enfant à la famille et à la participation à la société dans des conditions d ’ égalité avec les autres enfants, ainsi que de mettre en œuvre de telles politiques.

Éducation (art. 24)

Le Comité s’inquiète du fait que, malgré l’existence d’une politique d’éducation inclusive, des élèves ou étudiants handicapés qui fréquentaient une école ordinaire sont renvoyés dans un établissement d’enseignement spécialisé. Il est également préoccupé par les informations selon lesquelles des élèves ou étudiants handicapés inscrits dans des écoles ordinaires ne reçoivent pas un enseignement adapté aux besoins liés à leur handicap.

Le Comité recommande à l ’ État partie de:

a) Mener des travaux de recherche sur l ’ efficacité de la politique actuelle en matière d ’ intégration scolaire;

b) Redoubler d ’ efforts pour permettre la scolarisation des élèves ou étudiants handicapés dans l ’ enseignement ordinaire et prévoir des aménagements raisonnables dans les écoles et autres établissements d ’ enseignement, notamment en équipant les salles de cours des technologies et dispositifs d ’ assistance voulus, en adaptant et rendant accessibles les supports pédagogiques et les programmes d ’ enseignement, et en rendant l ’ environnement scolaire accessible;

c) Renforcer la formation dispensée aux professionnels de l ’ éducation, notamment aux enseignants et aux administrateurs des écoles ordinaires.

Santé (art. 25)

Le Comité juge préoccupant que l’article 732 de la loi sur les transactions commerciales, dont le texte a été récemment modifié, dispose qu’une personne handicapée ne peut souscrire un contrat d’assurance-vie que si elle est «douée de capacité mentale». Le Comité observe que le refus de souscription d’un contrat d’assurance sur la base de la «capacité mentale» constitue une discrimination à l’égard des personnes handicapées.

Le Comité encourage l ’ État partie à abroger l ’ article 732 de la loi sur les transactions commerciales, selon lequel une personne handicapée ne peut souscrire un contrat d ’ assurance-vie que si elle est «douée de capacité mentale», et à retirer la réserve qu ’ il a émise à propos de la disposition relative à l ’ assurance-vie figurant à l ’ alinéa  e de l ’ article 25 de la Convention.

Travail et emploi (art. 27)

Le Comité est préoccupé par le fait que la loi relative au salaire minimum dispose que les personnes handicapées «qui sont manifestement dans l’incapacité de travailler» ne peuvent bénéficier du salaire minimum, et qu’elle ne fixe pas clairement des normes pour la conduite des évaluations et la prise des décisions s’agissant de déterminer l’incapacité du travail. Il juge préoccupant également que, de ce fait, un grand nombre de personnes handicapées qui travaillent, en particulier celles qui présentent un handicap psychosocial, perçoivent une indemnité inférieure au salaire minimum, et s’inquiète de la persistance de la pratique consistant à placer ces personnes dans des ateliers protégés qui n’ont pas vocation à les préparer à intégrer le marché du travail ordinaire.

Le Comité encourage l ’ État partie à mettre en place un système de compensation salariale tel que les personnes handicapées qui sont exclues, par application de la loi relative au salaire minimum, du dispositif garantissant un salaire minimum perçoivent l ’ équivalent du salaire minimum, ainsi qu ’ à supprimer les ateliers protégés et à chercher des solutions de remplacement conformes aux dispositions de la Convention afin de promouvoir l ’ emploi des personnes handicapées, en étroite concertation avec les organisations de personnes handicapées.

Le Comité s’inquiète de constater que, malgré le système de quota obligatoire d’emploi de personnes handicapées qui est en place, le taux de chômage est plus élevé parmi les personnes handicapées, et en particulier les femmes handicapées, que dans la population générale.

Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place des mesures pour réduire les écarts dans les taux d ’ emploi, en prêtant une attention particulière à l ’ emploi des femmes handicapées. Il lui recommande notamment de veiller à la pleine application du dispositif de quota obligatoire d ’ emploi de personnes handicapées, ainsi qu ’ à la publication de statistiques pertinentes sur les réalisations et résultats dans ce domaine.

Niveau de vie adéquat et protection sociale (art. 28)

Le Comité constate avec préoccupation que la loi sur la sécurité des moyens de subsistance de base exclut du bénéfice de la prestation visant à garantir un niveau de vie minimum toute personne handicapée dont la famille dispose de revenus ou d’un patrimoine atteignant un seuil donné. Il juge préoccupant également que l’admissibilité à cette prestation soit déterminée sur la base du système d’évaluation du degré de handicap existant et que seules les «personnes lourdement handicapées» peuvent y prétendre.

Le Comité recommande à l ’ État partie de se fonder, pour décider de l ’ attribution à une personne handicapée de la prestation garantissant un niveau de vie minimum, sur les caractéristiques, la situation et les besoins particuliers de l ’ intéressé, et non sur le système d ’ évaluation du degré de handicap et sur les revenus et le patrimoine de sa famille.

Participation à la vie politique et à la vie publique (art. 29)

Le Comité juge préoccupant qu’un grand nombre de bureaux de vote ne soient pas pleinement accessibles aux personnes handicapées et qu’il ne soit pas tenu compte des dives types de handicap pour fournir aux personnes handicapées les informations utiles au vote. Il est également préoccupé par le faible taux de participation des personnes handicapées aux activités politiques et par le faible nombre de personnes handicapées qui se portent candidates aux élections, ce en raison des obstacles auxquels elles continuent de se heurter dans ce domaine. Le Comité note aussi avec préoccupation que les personnes déclarées incapables sont privées du droit de voter et de se porter candidates aux élections.

Le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour garantir que le vote soit pleinement accessible à tous, indépendamment du handicap, et que les informations utiles au vote soient disponibles dans tous les formats accessibles. Il lui recommande aussi de prendre des mesures visant spécifiquement à promouvoir la participation des personnes handicapées aux organes élus. Il lui recommande en outre d ’ abroger les dispositions qui privent certaines personnes du droit de voter et de se présenter aux élections, et de garantir le droit de toute personne de voter et de se porter candidate aux élections, indépendamment du type de handicap dont elle est atteinte.

Participation à la vie culturelle et récréative, aux loisirs et aux sports (art. 30)

Le Comité note avec préoccupation que l’État partie n’a pas ratifié le Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées, qui permet à ces différentes catégories de personnes d’accéder aux œuvres publiées.

Le Comité encourage l ’ État partie à prendre toutes les mesures appropriées pour ratifier et appliquer dès que possible le Traité de Marrakech.

C.Obligations spécifiques (art. 31 à 33)

Statistiques et collecte des données (art. 31)

Le Comité observe avec préoccupation que les données statistiques relatives aux personnes handicapées recueillies par l’État partie ne tiennent pas compte de la diversité des personnes handicapées, et qu’il est dès lors impossible d’évaluer l’impact de chaque politique sur les personnes handicapées. Il s’inquiète aussi de voir que les données statistiques ne sont pas produites et diffusées sous tous les formes accessibles.

Le Comité recommande à l ’ État partie de systématiser la collecte, l ’ analyse et la diffusion des données, ventilées par sexe, âge, handicap, lieu de résidence, zone géographique et type de prestations reçues, et de faire en sorte que toutes les personnes handicapées aient librement accès aux statistiques en diffusant les informations sous des formes accessibles.

Application et suivi au niveau national (art. 33)

Le Comité note que le Bureau des politiques en faveur des personnes handicapées est chargé de la mise en œuvre générale de la Convention, que le Comité de coordination des politiques en faveur des personnes handicapées élabore la politique générale à l’égard des personnes handicapées, et coordonne et supervise sa mise en œuvre, et que la Commission nationale des droits de l’homme formule des avis ou des commentaires à l’intention du Comité de coordination des politiques en faveur des personnes handicapées quant à l’application de la Convention. Le Comité relève toutefois avec préoccupation que le Comité de coordination des politiques en faveur des personnes handicapées ne fonctionne pas correctement et que la Commission nationale des droits de l’homme ne dispose pas de ressources humaines et financières suffisantes pour surveiller efficacement la mise en œuvre de la Convention.

Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que le Comité de coordination des politiques en faveur des personnes handicapées s ’ acquitte de la mission qui lui incombe d ’ élaborer et de mettre en œuvre de manière effective les politiques à l ’ égard des personnes handicapées, et de fournir à la Commission nationale des droits de l ’ homme des ressources humaines et financières suffisantes pour lui permettre de surveiller effectivement l ’ application de la Convention. Le Comité recommande également à l ’ État partie d ’ adopter des dispositions juridiques propres à garantir la pleine participation des personnes handicapées et des organisations qui les représentent au suivi de l ’ application de la Convention.

Suivi et diffusion

Le Comité demande à l’État partie de mettre en œuvre les recommandations contenues dans les présentes observations finales. Il lui recommande de transmettre ces observations finales, pour examen et suite à donner, aux membres du Gouvernement et du Parlement, aux responsables des différents ministères, aux autorités locales et aux membres des professions concernées, tels que les professionnels de l’éducation, de la santé et de la justice, ainsi qu’aux médias, en utilisant pour ce faire les stratégies de communication sociale modernes.

Le Comité encourage vivement l’État partie à associer les organisations de la société civile, en particulier les organisations de personnes handicapées, à l’élaboration de ses rapports périodiques.

Le Comité prie l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales sous des formes accessibles, notamment auprès des organisations non gouvernementales et des organisations qui représentent les personnes handicapées, ainsi qu’auprès de ces personnes et de leurs proches, dans les langues nationales et minoritaires, notamment la langue des signes. Il lui demande aussi de les diffuser sur le site Web du Gouvernement consacré aux droits de l’homme.

Prochain rapport

Le Comité demande à l’État partie de soumettre ses deuxième et troisième rapports périodiques en un seul document au plus tard le 11 janvier 2019, et d’y faire figurer des renseignements sur la mise en œuvre des présentes observations finales. Il invite l’État partie à étudier la possibilité de soumettre ces deux rapports selon la procédure simplifiée. Dans le cadre de cette procédure, le Comité établit une liste de points à traiter, au moins un an avant la date prévue pour la soumission du ou des rapports attendus. Les réponses de l’État partie à cette liste constituent son rapport.