NATIONS UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/ARG/CO/4/Add.224 janvier 2008

FRANÇAISOriginal: ESPAGNOL

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L ’ ARTICLE 19 DE LA CONVENTION

Observations du Gouvernement de la République argentine*,**concernant les conclusions et recommandations du Comité contre la torture (CAT/C/CR/33/1)

[22 octobre 2007]

Recommandation e)

Relative à la création d ’ un registre national regroupant les renseignements provenant de tous les tribunaux nationaux, sur les cas de torture et de mauvais traitements ob s ervés dans l ’ État.

1.Il y a lieu de rappeler que la création d’un registre national, ou base de données, est une des mesures qui figurent dans le projet de texte normatif relatif à la mise en œuvre du mécanisme national de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants prévu dans le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ratifié par l’Argentine en vertu de la loi no 25.932.

2.Le projet de texte normatif prévoit en effet, entre autres responsabilités qui seront confiées au mécanisme national, la création d’une base de données contenant des informations statistiques sur les cas de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

3.Comme on le verra plus en détail dans la section pertinente, ce projet est actuellement examiné par les organismes compétents de l’Administration avant d’être soumis à l’approbation du Congrès. C’est pourquoi il est encore trop tôt pour se prononcer sur la date à laquelle le registre national sera opérationnel.

4.Nonobstant les considérations qui précèdent, afin de recueillir des renseignements à jour sur les actes de torture et les mauvais traitements infligés à des personnes privées de liberté, le Secrétariat d’État aux droits de l’homme a élaboré un questionnaire à la mi-2006 en s’appuyant sur ce qui avait été fait entre 2001 et 2004 (Annexe 1).

5.Le questionnaire a été remis aux autorités compétentes des provinces et de la ville autonome de Buenos Aires, afin que, bien qu’il n’existe pas de base de données statistiques concernant ces faits pour l’ensemble du pays, l’État puisse s’acquitter de ses obligations au titre de l’instrument international précité.

6.Il convient de souligner que les travaux ont été menés à bien avec l’appui du Conseil fédéral des droits de l’homme, composé des hautes autorités provinciales et de celles de la ville autonome de Buenos Aires compétentes en la matière, au sein duquel le Secrétariat d’État aux droits de l’homme a un rôle de coordination. Le Conseil fédéral est un organisme extrêmement important chargé de jeter les bases de la politique commune en matière de promotion et de protection des droits de l’homme.

7.De nombreuses provinces ont fait savoir qu’elles avaient rencontré des difficultés pour recueillir l’information requise dans leur domaine de compétence respectif, et le Secrétariat d’État aux droits de l’homme continue de recevoir les réponses de plusieurs d’entre elles au questionnaire considéré. C’est pourquoi l’information nécessaire pour mener à bien l’examen de la question, d’un point de vue tant quantitatif que qualitatif, n’a pas encore pu être rassemblée.

8.Cela dit, il convient de noter que, depuis 2001, la province de Buenos Aires dispose d’un registre des affaires pénales relatives à des actes de torture et de mauvais traitements, administré par le Département des droits de l’homme, de la politique pénitentiaire et des plaintes des services du Procureur général auprès de la Cour suprême de la province. Jusqu’en 2005, ce registre comprenait également les affaires liées à des délits économiques mettant en cause l’intérêt général et les délits commis par des agents de l’État dans l’exercice de leurs fonctions. Depuis 2005, seuls les cas relatifs à des affaires pénales concernant des actes de torture et le recours à des contraintes illégales y sont portés.

Recommandation f)

Relative à l ’ adoption de mesures spécifiques pour protéger l ’ intégrité physique de tous les membres des groupes vulnérables.

Situation des garçons, des filles et des adolescents

9.Comme on l’a indiqué dans des rapports antérieurs, la loi de protection intégrale des droits de l’enfant et de l’adolescent (loi no 26.061), définit le cadre juridique de la protection des droits des personnes âgées de moins de 18 ans et les grandes orientations en matière de planification de la politique des pouvoirs publics en faveur de l’enfance (Annexe 2).

10.Il y a lieu de souligner que le texte portant abrogation de la loi no 10.903 sur la «protection‑enfermement» des mineurs reconnaît la qualité de sujet de droit à toutes les personnes de moins de 18 ans, et crée le système de protection globale des droits, en vertu duquel les institutions administratives ou judiciaires disposent d’un certain nombre de mécanismes à mettre en œuvre en cas de violation ou de menace de violation des droits des garçons, des filles et des adolescents.

11.La loi définit également les mesures axées sur la protection intégrale des droits, et prévoit à cet effet des mécanismes à mettre en œuvre en cas de violation ou de menace de violation des droits de ces personnes, afin que celles-ci puissent exercer leurs droits pleinement, effectivement et en permanence.

12.Par ailleurs, la loi porte création du Secrétariat national à l’enfance, à l’adolescence et à la famille et du Conseil fédéral pour l’enfance, l’adolescence et la famille, qui relèvent du pouvoir exécutif − deux institutions qui sont d’ores et déjà opérationnelles. Elle prévoit également d’instituer un Défenseur des droits des garçons, des filles et des adolescents, qui dépendra du pouvoir législatif.

13.Les décrets d’application des dispositions de la loi no 26.061 (décrets nos 415 et 416), promulgués en 2006, ont permis de renforcer la protection des personnes qui appartiennent à ce groupe vulnérable (Annexe 3).

14.Il existe également divers autres projets de lois visant à abolir l’actuel régime pénal des mineurs établi par la loi no 22.278 et à mettre en place un nouveau régime conforme aux principes énoncés dans la Convention relative aux droits de l’enfant. En parallèle de l’examen de ces projets de lois, des décisions judiciaires importantes ont été adoptées, qui remettent en cause la constitutionalité du régime actuel.

15.Au vu de ce qui précède, on peut dire que l’on s’accorde de plus en plus à reconnaître la nécessité d’adopter un nouveau régime (en commençant par l’adoption d’une loi à cet effet) qui limite l’intervention de l’État sur le plan pénal, encore qualifiée à l’heure actuelle de protection(tutela y protección). L’adoption d’un nouveau régime permettra de s’acheminer vers une amélioration substantielle du statut juridique des adolescents accusés d’avoir enfreint la loi pénale.

16.Par ailleurs, l’examen des autres mesures institutionnelles montre que des progrès ont été réalisés en matière de protection des droits des garçons, des filles et des adolescents.

17.C’est ainsi que le Secrétariat aux droits de l’homme a entrepris, conjointement avec le Conseil fédéral des droits de l’homme, de multiples activités qui touchent au suivi de l’application de la Convention relative aux droits de l’enfant et à la protection de ces droits.

18.Parmi les mesures adoptées, on retiendra:

L’élaboration d’avant-projets de loi et de décrets, et la prestation aux législateurs et aux organismes gouvernementaux nationaux ou provinciaux de services consultatifs sur les normes relatives aux droits de l’homme;

L’élaboration du rapport intitulé «Situation des garçons, des filles et des adolescents privés de liberté en Argentine». Ce rapport établit un diagnostic précis de la situation des personnes privées de liberté et permet de se faire une idée de la situation au 31 décembre 2005 (annexe 4);

Le renforcement des mécanismes non privatifs de liberté et de dispositifs destinés aux enfants privés de liberté ou de soins parentaux.

19.D’après le rapport sur les personnes privées de liberté, il existerait 195 programmes, dits «alternatifs», ou «de substitution», fondés sur des mesures non privatives de liberté. Le Secrétariat aux droits de l’homme a lancé un nouveau cycle de collecte de renseignements, et a décidé de confier à la Direction nationale d’aide directe aux personnes et aux groupes vulnérables du Secrétariat aux droits de l’homme le soin de recueillir des renseignements plus précis afin:

a)De repérer les expériences réussies enregistrées dans le pays et de se faire une idée du travail réalisé et des méthodes employées;

b)De promouvoir des espaces de dialogue avec les provinces pour mesurer les progrès accomplis et les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre des programmes;

c)D’assurer le suivi de la loi no 26.061 et d’en étudier l’impact sur la législation locale, les institutions et les pratiques;

d)De donner de la visibilité aux expériences réussies;

e)De renforcer les mécanismes non privatifs de liberté et les dispositifs destinés aux enfants privés de liberté ou de soins parentaux ayant enfreint la loi pénale.

20.Pour atteindre ces objectifs, des formulaires fondés sur les règles relatives aux droits de l’homme ont été établis afin de recueillir des renseignements tant auprès des programmes axés sur les questions pénales que des jeunes privés de liberté ou de soins parentaux. À ce jour, la collecte d’informations auprès des autorités provinciales, qui continuent de transmettre des informations, s’est révélée très fructueuse.

21.D’autre part, l’étude publiée en mai 2005 intitulée «Règles minimales des droits de l’homme pour l’élaboration d’une nouvelle loi sur la justice pénale des mineurs», établie avec le concours du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), est en cours de mise à jour.

22.Enfin, à côté des visites périodiques effectuées par le Secrétariat des droits de l’homme dans les lieux de détention pour garçons, filles et adolescents de plusieurs provinces et de la ville autonome de Buenos Aires, il convient de relever l’important travail de la Commission chargée du suivi du placement en institution des garçons, des filles et des adolescents rattachée au service du Défenseur général de la Nation qui procède à des visites de divers centres fermés administrés par l’État fédéral. La Commission est ainsi en mesure de veiller au respect des droits des garçons, des filles et des adolescents placés dans des centres fermés, d’assurer des services d’orientation, de déposer des plaintes et de solliciter l’établissement de rapports par les services compétents.

Recommandation l)

Relative à l ’ adoption des mesures nécessaires pour garantir le respect de la dignité humaine et des droits de l ’ homme de toute personne dans le contexte des fouilles corporelles, conformément aux normes internationales

23.Les renseignements complémentaires demandés par le Rapporteur spécial chargé du suivi des conclusions et recommandations du Comité étant du ressort du Sous-secrétariat aux affaires pénitentiaires du Ministère de la justice et des droits de l’homme, c’est à lui que la question a été transmise. Le Sous-secrétariat a indiqué qu’en ce qui concerne les fouilles corporelles auxquelles il est procédé dans les établissements pénitentiaires fédéraux, la mise en conformité du droit interne avec les normes internationales n’était pas encore achevée.

24.À cet égard, le Sous-secrétariat a rappelé que certaines dispositions du «Guide sur les règles régissant les fouilles corporelles», approuvé en vertu de la décision no 42/91 de ce qui était alors le Sous-secrétariat à la justice, n’étant pas conformes aux principes directeurs, il s’était fixé pour objectif de les remplacer. C’est ainsi qu’«un texte a été élaboré, sur la base de consultations avec des organismes publics et des organisations non gouvernementales qui ont pour mission de veiller au respect des droits de l’homme dans les établissements pénitentiaires du pays», lequel a été transmis pour examen à M. Andrew Coyle, expert au Centre international d’études pénitentiaires du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord.

25.Le Sous-secrétariat a fait savoir par la suite que cette mesure entrerait en vigueur une fois tranchées les questions que posait la place de ce texte la hiérarchie des normes, tout en précisant que les règles qu’il contient sont déjà appliquées dans les établissements pénitentiaires fédéraux, sur la base de directives précises du Sous-secrétariat.

Recommandati o n o)

Relative à la mise en place d ’ un mécanisme national de prévention, lequel inspecterait périodiquement les centres de détention fédéraux et provinciaux afin de veiller à l ’ application intégrale du Protocole facultatif se rapportant à la Convention

26.Comme on l’a déjà dit, la République argentine ne dispose pas encore d’un mécanisme national de prévention de la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants doté des compétences prévues par le Protocole et indépendant.

27.S’il en est ainsi, c’est que lorsque les départements d’État de l’Administration compétents ont examiné le projet de décret, ils ont formulé un certain nombre d’observations, qui portaient essentiellement sur la place de la mesure dans la hiérarchie des normes. Ces observations, qui préconisaient la création du mécanisme national dans le cadre d’une loi, avaient pour objet de garantir au maximum l’efficacité dudit mécanisme, ainsi que son indépendance et celle de ses membres.

28.C’est pourquoi le Secrétariat aux droits de l’homme a élaboré un nouveau texte prévoyant la création d’une entité dotée de la personnalité juridique, économiquement et financièrement autonome, en vertu d’une loi nationale qui établirait clairement le domaine de compétence de cet organisme, garantissant ainsi le plein exercice des fonctions prévues par le Protocole facultatif.

29.Plusieurs réunions de travail ont été organisées avec la participation d’organisations non gouvernementales spécialisées en la matière qui ont exprimé leur avis sur la mesure envisagée. Ces réunions ont abouti à un certain nombre de points d’accord, ce qui a pour effet de renforcer la participation des citoyens non seulement à l’élaboration de projets de textes normatifs mais à la prise de décisions.

30.Des réunions de travail et des échanges sur le thème de la défense des droits des personnes privées de liberté ont ainsi été organisés en 2006, avec la participation d’organismes gouvernementaux et non gouvernementaux comme le Secrétariat aux droits de l’homme de la province de Buenos Aires, des secrétariats ou organismes de défense des droits de l’homme des diverses provinces; le Comité contre la torture de la Commission pour la mémoire de la province de Buenos Aires; le Centre d’études juridiques et sociales; l’Institut d’études comparées en sciences pénales et sociales; l’Association Xumek de la province de Mendoza; le Groupe de femmes argentines, le Mouvement Pampeano en faveur des droits de l’homme; la Fundación de Detenidos Sociales (FUNDESCO) et le Comité international de la Croix-Rouge, parmi d’autres.

31.Le 4 mai 2007, une séance du Conseil fédéral des droits de l’homme a été convoquée en vue d’examiner le texte du projet de loi, ce qui a permis de recueillir et de comparer différents avis et témoignages, et d’enrichir le projet de texte en cours d’élaboration.

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