N ation s Unies

CAT/C/ARG/7

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

21 mars 2022

Français

Original : espagnol

Anglais, espagnol et français seulement

Comité contre la torture

Septième rapport périodique soumis par l’Argentine en application de l’article 19 de la Convention selon la procédure simplifiée d’établissement des rapports, attendu en 2021 * , **

[Date de réception : 12 mai 2021]

I.Méthode

1.Le présent rapport a été établi par la Direction nationale des affaires juridiques internationales relatives aux droits de l’homme du Secrétariat aux droits de l’homme du Ministère national de la justice et des droits de l’homme.

2.Aux fins de son élaboration, des contributions ont été obtenues des différents secteurs de l’État compétents en la matière, parmi lesquels les suivants : Ministère de la justice et des droits de l’homme, Ministère de la sécurité, Ministère de la santé, Ministère des femmes, du genre et de la diversité, Secrétariat national à l’enfance, à la famille et à l’adolescence, Direction nationale des migrations, Chambre fédérale de cassation pénale et Bureau du Procureur chargé de la lutte contre la violence institutionnelle, lequel relève du ministère public chargé de l’action pénale (Ministerio Público Fiscal).

3.Pour que ce rapport puisse porter sur l’ensemble du territoire, le Conseil fédéral des droits de l’homme, qui relève du Secrétariat aux droits de l’homme, a lancé un processus d’échanges avec les juridictions provinciales du pays. Ce processus a permis de recueillir des informations communiquées par 14 provinces. Sans préjudice des informations fournies dans le présent document, toutes les contributions qui ont pu être recueillies sont reproduites à l’annexe I.

II.Introduction

4.Le 10 décembre 2019, un nouveau Gouvernement national de la République argentine est entré en fonctions, avec la ferme volonté d’améliorer le fonctionnement des institutions de notre pays et de garantir le plein respect des droits de l’homme.

5.L’actuel Président de la nation, M. Alberto Fernández, a reconnu dès ses premières interventions publiques que notre démocratie avait encore des progrès à faire et expressément présenté la défense des droits de l’homme comme la « colonne vertébrale » des politiques qui seraient adoptées dans notre pays.

6.C’est ainsi que plusieurs mesures ont été adoptées pour garantir la promotion et la protection des droits de l’homme de la population argentine, notamment au bénéfice des groupes les plus vulnérables de la société, comme on le verra plus loin.

7.On ne saurait cependant ignorer que la crise mondiale provoquée par la pandémie de COVID‑19 a aggravé la difficile situation d’urgence économique et sociale dans laquelle se trouvait l’Argentine qui, au moment où est entrée en fonctions la nouvelle administration, connaissait une forte augmentation de la pauvreté, de la misère et de sa dette extérieure. Cette situation a obligé le Gouvernement à lancer un certain nombre de politiques publiques visant à atténuer les incidences de la pandémie sur les droits de l’homme de l’ensemble de la population.

8.C’est dans ce contexte et en application de l’article 19 de la Convention qu’est présenté ce septième rapport périodique, établi en réponse à la liste de points dressée par le Haut‑Commissariat aux droits de l’homme et conformément au paragraphe 45 des dernières observations finales du Comité (CAT/C/ARG/CO/5-6).

III.Renseignements en réponse à la liste de points

Renseignements concernant spécifiquement la mise en œuvre des articles 1 à 16 de la Convention, notamment au regard des précédentes recommandations du Comité

1.Questions retenues aux fins du suivi dans les précédentes observations finales

9.En plus des renseignements présentés dans le rapport de suivi (CAT/C/ARG/CO/5‑6/Add.1), nous fournissons ici de nouveaux renseignements sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre des recommandations tendant à ce que soient diligentées des enquêtes sur les violations des droits de l’homme commises par les forces de sécurité et à dûment sanctionner les auteurs de ces violations.

10.On signalera d’abord qu’à la différence de l’administration précédente, la direction actuelle du Secrétariat aux droits de l’homme compte parmi ses priorités celle de promouvoir une transformation culturelle propre à éliminer les violations des droits de l’homme de toutes catégories commises par des agents de la force publique, étant entendu que toute pratique structurelle de violation des droits commise par des agents et agentes appartenant aux forces de sécurité, aux forces armées, aux services pénitentiaires et aux prestataires de soins de santé dans des contextes d’enfermement doit être réputée violence institutionnelle.

11.Pour cette raison, le Secrétariat aux droits de l’homme a renforcé les effectifs et les compétences de l’équipe de la Direction nationale des politiques contre la violence institutionnelle et s’est porté partie civile dans plusieurs affaires introduites par des victimes de violence institutionnelle, en choisissant ces affaires suivant un critère stratégique pour s’assurer d’obtenir des condamnations face à des actes d’une grande gravité. Il a également adopté une ferme position de réprobation publique dans chacune de ces affaires.

12.L’un des principaux axes d’intervention du Secrétariat aux droits de l’homme a été de procéder à un recensement national des affaires de violence institutionnelle portées devant les tribunaux, afin de disposer d’informations plus nombreuses et plus pertinentes sur ce phénomène. Pour constituer cette base de données, une coopération a été instituée entre la Direction nationale de la politique pénale en matière de justice et de législation pénale du Ministère de la justice et des droits de l’homme et la Direction nationale des politiques contre la violence institutionnelle du Secrétariat aux droits de l’homme.

13.Comme première contribution à la base de données, on a entrepris d’inventorier les condamnations prononcées dans l’ensemble du pays à partir des données figurant dans le Registre national de la récidive. Ont été retenues non seulement les infractions commises par des fonctionnaires ou des membres des forces de sécurité, mais aussi d’autres infractions dont les caractéristiques donnent à penser qu’elles peuvent relever de la violence institutionnelle et présenter un intérêt pour l’étude du phénomène.

14.Cette base de données opère une distinction entre les peines pour infraction consommée et les peines pour tentative. Ont notamment été pris en compte : les homicides commis par des membres des forces de sécurité, de la police ou de l’administration pénitentiaire abusant de leurs fonctions ou de leur position ; les abus sexuels commis par des membres de la police ou des forces de sécurité dans l’exercice de leurs fonctions ; la privation illégale de liberté par fonctionnaire ou agent public ; la privation illégale de liberté qualifiée par fonctionnaire ou agent public ; la privation abusive de liberté, les sévices, les violences et la contrainte illégale ; le génocide ; la torture ; le défaut de prévention ou de dénonciation d’actes de torture ; et les crimes contre l’humanité.

15.Les premiers résultats de ce recensement national sont attendus dans le courant de l’année 2021.

16.L’active participation du Secrétariat aux droits de l’homme à la rédaction et à l’accompagnement d’un projet de loi générale contre la violence institutionnelle a été un autre de ses axes d’intervention. Ce projet de loi, défendu par une composante du bloc majoritaire de la Chambre nationale des députés, vise à créer les outils intégrés nécessaires pour prévenir et éliminer les cas de violence institutionnelle dans l’ensemble du pays et accompagner et indemniser les victimes.

17.Parmi ses dispositions les plus remarquables, il prévoit : la création d’un programme de formation et de perfectionnement des forces de sécurité conçu selon une perspective transversale des droits de l’homme ; l’ouverture de centres de réception des plaintes ; la création d’un registre national chargé de produire les données statistiques voulues pour poser des diagnostics et faciliter la prise de décisions ; la mise en œuvre de protocoles d’accompagnement et d’indemnisation des victimes ; et la définition des principes fondamentaux encadrant l’utilisation des armes létales et non létales conformément aux normes internationales. Ce projet de loi peut être consulté à l’annexe II.

18.De même, dans le but de parvenir à un changement de paradigme en ce qui concerne la violence institutionnelle, le Sous-Secrétariat à la promotion des droits de l’homme du Secrétariat aux droits de l’homme, par le truchement de sa Direction nationale de la formation aux droits de l’homme, organise des actions de formation des forces de sécurité aux droits de l’homme, et notamment des cours de formation à l’intention des agents des forces de sécurité provinciales et fédérales. Cette tâche est réalisée en coordination avec le Ministère national de la sécurité.

19.Comme il est dit dans le rapport de suivi présenté le 11 mai 2018 sous la cote CAT/C/ARG/CO/5-6/Add.1, un Comité national pour la prévention de la torture a été constitué le 27 décembre 2017 et se réunit régulièrement depuis cette date.

20.D’autre part, pour compléter les informations communiquées par l’État, et spécifiquement en ce qui concerne le procès des tortures infligées à Ezequiel Villanueva et Iván Navarro, on notera que le Tribunal oral en matière pénale et correctionnelle no 9 de la capitale fédérale a rendu sa décision le 21 septembre 2018. Par cette décision, il a condamné les six agents de la Préfecture navale argentine mis en examen en tant que coauteurs pénalement responsables du crime de torture − concurremment avec les infractions de privation illégale de liberté qualifiée, blessures mineures et vol avec circonstances aggravantes − à des peines allant de huit à dix ans d’emprisonnement et à l’interdiction absolue et perpétuelle d’exercer une fonction publique. Les motifs de la décision sont joints à l’annexe III.

Articles 1 et 4

2. Conformité de la définition de la torture

21.Comme il était dit dans le rapport de l’Argentine valant cinquième et sixième rapports périodiques (CAT/C/ARG/5-6), au centre de l’infraction visée à l’article 144 ter du Code pénal se trouve le fait de soumettre une personne, légitimement ou illégitimement privée de liberté, à toute forme de torture − au sens d’actes qui provoquent une souffrance aiguë, mentale ou physique, commis intentionnellement par un agent de la force publique ou quiconque agit à son instigation, quel qu’en soit le motif.

22.Dans la législation argentine, la torture constitue une infraction multiple qui touche la liberté lato sensu − intégrité physique et morale de la personne, vie, dignité humaine et honneur. Dans notre pays, cette qualification pénale s’applique à l’infraction commise par un agent de la fonction publique contre une personne détenue soumise à son autorité, sans qu’il soit nécessaire que ce soit l’agent auteur des actes de torture lui-même qui ait procédé à l’arrestation légale ou illégale.

23.En outre, deux projets de modification de l’article 144 ter du Code pénal sont en cours d’examen. Le premier est un projet de loi déposé à la Chambre des députés sous la cote 0413‑D-2020, que l’on peut consulter à l’adresse suivante : https://www.hcdn.gob.ar/proyectos/textoCompleto.jsp?exp=0413-D-2020&tipo=LEY. Le second est un projet de loi déposé au Sénat en mars 2019 sous la cote 52-PE-2019 et portant le titre de « Révision du Code pénal », qui n’est pas devenu caduc en vertu de l’exception établie par la loi no 13.640 relative à la caducité des projets de loi et que l’on peut consulter à l’adresse suivante : https://www.senado.gob.ar/parlamentario/comisiones/verExp/52.19/PE/PL.

Article 2

3. Protection des droits au moment de l’arrestation

24.En ce qui concerne les mesures visant à prévenir les abus policiers dans le cadre des arrestations effectuées par les forces de sécurité sans mandat, il est important de noter que la Direction nationale des statistiques criminelles du Ministère de la sécurité enregistre chaque mois les arrestations effectuées par les membres des quatre forces fédérales, à savoir la Police fédérale (PFA), la Police aéroportuaire (PSA), la Gendarmerie nationale (GNA) et la Préfecture navale (PNA).

25.Le registre ainsi constitué donne accès non seulement au nombre des arrestations, mais encore à des informations sur l’âge, le sexe assigné à la naissance, le genre et la nationalité de l’intéressé, ainsi que le type d’arrestation (flagrance ou exécution d’un mandat) et la catégorie de l’infraction pour laquelle l’arrestation a été effectuée. Il permet également de dresser un tableau des types d’arrestation effectués par les forces de sécurité qui aboutissent à un placement en détention et, sur cette base, de formuler les recommandations nécessaires et/ou d’adopter les protocoles voulus pour réduire autant que possible les éventuelles violations des droits des citoyens au moment de l’arrestation.

26.Les mesures d’isolement qui ont dû être mises en place pour empêcher la propagation de la COVID-19 ont sans aucun doute créé des difficultés supplémentaires pour ce qui est de contrôler les abus policiers. À cet égard, depuis mars 2020, et étant admis que les forces de sécurité ont joué un rôle fondamental dans le contrôle du respect des mesures d’isolement social, les forces de sécurité fédérales parmi elles ont reçu une série de recommandations qui tendaient à réduire au maximum le risque d’atteinte aux droits des personnes contrevenant à l’interdiction de circuler, en définissant des critères d’intervention propres à limiter le nombre des interpellations et arrestations de contrevenants. Ces recommandations ont été transmises aux ministères de la sécurité de chacune des provinces par l’intermédiaire du Conseil fédéral de la sécurité intérieure.

27.Le Ministère national de la sécurité administre également une ligne téléphonique de réception des plaintes (no 134), à laquelle on peut signaler les situations de violence institutionnelle, les abus policiers et toute irrégularité commise par des agents de police et des membres des forces de sécurité. Ce centre d’appels fonctionne 24 heures sur 24, 365 jours par an. Lorsque des plaintes visent un cas de violence institutionnelle et/ou des abus policiers − commis dans le cadre d’une arrestation ou d’une détention sans mandat, par exemple −, elles sont transmises à la Direction du contrôle et de la prévention de la violence institutionnelle.

28.Moins de 1 % des plaintes reçues entre décembre 2019 et décembre 2020 concernaient des présomptions d’abus commis au moment de l’arrestation, et celles-ci portaient sur des atteintes verbales et/ou physiques.

29.De même, la Direction nationale des politiques contre la violence institutionnelle, qui relève du Secrétariat aux droits de l’homme, offre des conseils juridiques et une assistance psychologique et sociale aux victimes de violence institutionnelle et administre une ligne téléphonique gratuite − no 0800-122-5878 − ouverte 24 heures sur 24 et ayant bénéficié d’une large publicité, qui reçoit les plaintes de victimes de violence commise par des agents des forces de sécurité ou des fonctionnaires.

30.Afin de mieux encadrer l’action des forces de sécurité fédérales dans les situations où des enfants et des adolescents sont impliqués − que ce soit comme victimes ou dans le cadre du régime pénal des mineurs −, un groupe de travail technique a été constitué au sein du Ministère de la sécurité et chargé de rédiger un protocole définissant des normes et modalités d’intervention élémentaires et obligatoires applicables à toute intervention de la police et des forces de sécurité fédérales visant des enfants et des adolescents, ledit protocole devant aussi définir des critères de collecte d’informations dans ce domaine. Ce protocole de conduite réglementera également les modalités d’arrestation et de détention afin de garantir que ces interventions se déroulent en conformité avec les normes internationales en la matière.

31.De son côté, la plateforme du Ministère national de la justice et des droits de l’homme publie chaque année des statistiques pénitentiaires et judiciaires élaborées par la Direction nationale de la politique pénale en matière de justice et de législation pénale, qui est chargée du Système national de statistiques judiciaires et du Système national de statistiques pénitentiaires.

32.Le Système national de statistiques judiciaires a pour objectif général de compiler des informations provenant du système judiciaire et, en particulier, de sa branche pénale, sur l’organisation et le fonctionnement des institutions judiciaires et des parquets de l’ensemble du pays. Quant au Système national de statistiques pénitentiaires, il établit les statistiques pénitentiaires du pays et compile des informations annualisées sur le nombre total de personnes privées de liberté à raison d’infractions pénales.

33.Les systèmes statistiques nationaux susmentionnés ont été établis à des fins statistiques et constituent un premier pas vers l’élargissement de l’accès aux données judiciaires et pénitentiaires du pays et vers leur systématisation, tout en garantissant leur transparence et leur actualisation permanente.

34.Les liens ci-après donnent accès aux rapports du Système national de statistiques judiciaires et du Système national de statistiques pénitentiaires, ainsi qu’au système de consultation de la base de données et des rapports spéciaux :

https://www.argentina.gob.ar/justicia/politicacriminal/estadisticas/snej ;

https://www.argentina.gob.ar/justicia/politicacriminal/estadisticas/sneep.

4.Mécanismes locaux de prévention de la torture

35.Le Secrétariat aux droits de l’homme s’emploie activement à encourager la mise en place de mécanismes locaux de prévention de la torture dans les provinces qui ne s’en sont pas encore dotées.

36.À cette fin, lors de la réunion plénière du Conseil fédéral des droits de l’homme qui s’est tenue le 15 juillet 2020, le Secrétariat aux droits de l’homme et les organismes des droits de l’homme de toutes les juridictions du pays ont signé un communiqué les engageant à créer des mécanismes locaux et à assurer leur fonctionnement. Comme suite à cet engagement, le Secrétaire aux droits de l’homme a adressé en décembre 2020 une note officielle aux gouverneurs de chacune des provinces qui ne disposaient pas encore d’un mécanisme local pour les exhorter à prendre les mesures voulues pour le mettre en place.

37.De même, la Direction nationale des politiques contre la violence institutionnelle du Secrétariat aux droits de l’homme organise avec les fonctionnaires des différentes provinces des réunions bilatérales à l’ordre du jour desquelles figure l’obligation de mettre en place des mécanismes locaux, assortie d’une offre d’assistance technique à cet effet.

38.Depuis la présentation du rapport publié sous la cote CAT/C/ARG/CO/5-6/Add.1 en mai 2018, des progrès ont été accomplis dans certaines provinces qui ne disposaient pas de mécanismes locaux, qu’ils fussent créés par la voie législative ou par voie de désignation.

39.Le 13 septembre 2019, l’Assemblée législative de la province de Jujuy a adopté la loi no 6137 portant création du Mécanisme local pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants de la province de Jujuy, qui est composé du Comité provincial − lequel constitue le mécanisme local proprement dit − et du Conseil consultatif interinstitutionnel, qui a pour mission d’assister le Comité en préparant des recommandations, des campagnes et des politiques de prévention. Le 2 février 2021, le Gouverneur de Jujuy a promulgué le décret d’application de la loi qui organise le fonctionnement du mécanisme local (décret no 2662-G2021).

40.Dans la province de Neuquén, la loi no 3213 portant création du Comité provincial pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants a été adoptée le 20 novembre 2019. Cet organe, qui œuvre dans le cadre du corps législatif provincial, dispose de l’autonomie fonctionnelle et financière et peut, entre autres, créer des divisions autonomes, nommer leur personnel et gérer les fonds qui leur sont affectés conformément à la législation en vigueur. En attendant que soit approuvé le budget du Comité, le pouvoir exécutif provincial devra procéder aux rectifications budgétaires nécessaires pour se conformer à l’obligation imposée par la loi (art. 16). Il se prépare à publier prochainement le décret d’application de la loi susmentionnée afin d’assurer l’application effective de ses dispositions.

41.Le 13 novembre 2019, dans la province de Buenos Aires, le Conseil fédéral des mécanismes locaux a adopté son arrêté CFML 1/19 portant désignation de la Commission provinciale de la mémoire comme mécanisme local, en vertu de la procédure prévue au paragraphe h) de l’article 22 de la loi no 26.827. On notera que la Commission provinciale de la mémoire a été désignée à titre provisoire, en attendant qu’un mécanisme local soit créé et désigné par la loi.

42.Des projets de lois sont en cours d’examen ou en préparation dans plusieurs autres provinces.

43.En juin 2020, la province de Chubut a déposé à l’Assemblée législative provinciale un projet de loi portant création du Comité provincial d’évaluation du suivi et de la mise en œuvre de la Convention contre la torture. En août de la même année, la Commission des lois a tenu sa première séance d’information sur ce projet, au cours de laquelle divers organismes publics ainsi que des experts ont été appelés à présenter leur position et à faire connaître leurs vues. Le Comité national pour la prévention de la torture a lui aussi fait connaître ses vues. La Commission des lois poursuit actuellement son examen du projet.

44.À la fin de 2020, dans la province de La Pampa, le Sous-Secrétariat aux droits de l’homme, soucieux de mettre en place un mécanisme local capable de garantir aux personnes privées de liberté la jouissance des droits reconnus par l’ordre juridique en vigueur, a déposé un projet de loi tendant à créer un mécanisme local de prévention de la torture et autres mauvais traitements.

45.Dans la province de La Rioja, un projet de loi tendant à créer un mécanisme local qui avait été dûment déposé en 2014 avant de devenir caduc a été réintroduit en mars 2021. Dans ce contexte, la Présidente et divers membres de l’Assemblée provinciale ont reçu la visite du Secrétaire national aux droits de l’homme et se sont engagés à examiner et approuver ce projet.

46.Dans la province de Santa Fe, le Secrétariat provincial aux droits de l’homme et à la diversité a promu un projet de mécanisme local élaboré par l’Université nationale de Rosario qui est conforme aux principes énoncés dans le Protocole facultatif se rapportant à la Convention.

47.Dans la province de Santa Cruz, le Secrétariat provincial aux droits de l’homme s’emploie à obtenir la création d’un mécanisme local ; à cette fin, il a adressé au Comité national pour la prévention de la torture, en août 2020, une demande d’assistance technique préalable au dépôt d’un projet de loi à la Chambre provinciale des députés.

48.Dans la province de la Terre de Feu, un projet de loi tendant à organiser la création du mécanisme local est en cours de rédaction. Il existe dans cette province deux lois susceptibles de s’interpréter comme des mécanismes complémentaires, mais non substitutifs, du mécanisme local : la loi no 857 portant création du Comité d’évaluation du suivi et de l’application de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et la loi no 1027 portant création du Bureau du Contrôleur des lieux de privation de liberté (Procuración Penitenciaria).

49.Pour finir, on lira ci-dessous des informations sur quelques provinces qui disposent déjà de mécanismes locaux créés par la voie législative.

50.Dans la province de Misiones, la Commission provinciale de prévention de la torture a mené en 2020 les activités suivantes, entre autres : 237 visites de prisons, commissariats de police, communautés guaranies et foyers pour personnes âgées ; présentation de 270 rapports aux organes provinciaux ; rédaction de 13 protocoles ; dépôt de 13 plaintes au pénal ; 24 présentations judiciaires ; et réception de plaintes formelles et de plaintes par téléphone et par WhatsApp.

51.Dans la province du Chaco, le dispositif provincial de prévention de la torture a été entièrement réformé en 2020 par la loi no 3264-B, qui l’a mis en conformité avec les dispositions du Protocole facultatif et les recommandations du Sous-Comité de prévention de la torture, notamment en ce qui concerne la transparence du processus de sélection de ses membres, la conformité de sa composition, l’indépendance dans l’exercice de ses fonctions et l’indépendance de son personnel. Depuis la mise en place du mécanisme local, son budget a augmenté de manière exponentielle, avec une progression de 1 497,41 % entre les années 2016 et 2021.

52.En 2020, dans la province de Rio Negro, l’adoption du décret no 317/20 a permis de créer un Comité spécial de gestion de la COVID‑19 en milieu carcéral, qui a pour objet de veiller à la bonne exécution de la peine purgée par les personnes privées de liberté dans le contexte de la pandémie, tout en garantissant la protection des droits de l’homme et, en particulier, du droit à la santé de la population pénitentiaire.

5. Violence à l’égard des femmes, des filles et des adolescentes

53.En ce qui concerne les mesures visant à prévenir le féminicide, la traite et toutes les formes de violence à l’égard des femmes, il convient de souligner la création, en décembre 2019, d’un Ministère national des femmes, du genre et de la diversité. Cette mesure fait suite aux engagements pris par l’Argentine en ce qui concerne les droits des femmes et la diversité et souligne l’importance accordée aux questions de genre dans les politiques publiques.

54.Le Ministère des femmes, du genre et de la diversité a pour mandat de formuler, coordonner et mettre en œuvre des politiques propres à garantir au niveau national le droit des femmes et des personnes LGBTI+ à une vie autonome et délivrée de la violence et des inégalités.

55.En conformité avec la loi no 27.499, qui soumet toutes les personnes appartenant aux trois pouvoirs de l’État à une obligation de formation aux questions de genre, loi connue sous le nom de loi Micaela, le Ministère des femmes, du genre et de la diversité s’est attaché à travailler en priorité à la conception et à l’exécution de politiques de formation et de renforcement des capacités concernant les questions de genre, la violence à l’égard des femmes et les personnes LGBTI+. En janvier 2020, le Président de la nation et tous les membres de son cabinet ont reçu cette formation, et depuis cette date des formations ont été dispensées à différents corps de l’administration nationale, à la Chambre nationale des députés et au Sénat national, si bien qu’à ce jour, seuls les magistrats et magistrates de la Cour suprême de justice de la nation n’ont pas encore bénéficié de cette formation.

56.En ce qui concerne les mesures visant à prévenir, éliminer et réprimer le féminicide, le Ministère des femmes, du genre et de la diversité peut compter sur plusieurs services spécialisés dans la lutte contre l’extrême violence fondée sur le genre. On notera en particulier sa Direction de l’approche intégrée des infractions de féminicide, de travesticide, de transféminicide et d’atteinte à l’intégrité sexuelle, qui relève du Secrétariat chargé des politiques de lutte contre la violence fondée sur le genre et qui a fondamentalement pour mandat d’élaborer et administrer des politiques publiques tendant à prévenir et réprimer les infractions commises avec violences à raison du genre, de poursuivre leurs auteurs et d’offrir une réparation aux victimes.

57.En juillet 2020, le pouvoir exécutif national a publié un plan d’action national contre la violence fondée sur le genre (2020-2022) qui donne suite aux dispositions de la loi de protection intégrale tendant à prévenir, réprimer et éliminer les violences contre les femmes commises dans leurs relations interpersonnelles (loi no 26.485). Ce plan d’action s’attaque de manière intégrée à un problème structurel et généralisé et comprend plus de 100 engagements dont la réalisation est placée sous la responsabilité directe de 42 administrations de l’État national. Parmi ses composantes figure un programme interministériel de lutte intégrale contre l’extrême violence fondée sur le genre, qui met en place une stratégie mise au point par le Ministère des femmes, le Ministère de la justice et le Ministère de la sécurité unissant leurs efforts face au problème posé par le féminicide, le travesticide et le transféminicide.

58.Dans le cadre de ce programme interministériel, un Conseil fédéral chargé de prévenir et combattre le féminicide, le travesticide et le transféminicide a été créé en février 2021, avec pour mandat d’instituer au niveau fédéral la collaboration nécessaire pour que les organismes compétents de l’État national, des provinces et de la Ville autonome de Buenos Aires adoptent des directives permettant de normaliser leurs interventions et de coordonner leurs approches.

59.De même, en juillet 2020 a été créé un programme de soutien d’urgence et d’assistance immédiate et intégrale en cas de féminicide, de travesticide et de transféminicide qui vise à fournir aux membres de la famille et/ou aux proches des victimes de féminicide, de travesticide et de transféminicide une assistance intégrée sous forme de prestations économiques, de soutien psychologique et/ou de conseils juridiques.

60.En ce qui concerne les données sur les plaintes pour violence fondée sur le genre, la Direction nationale de la planification, du suivi et de la gestion de l’information du Ministère des femmes, du genre et de la diversité s’est dotée d’un fichier intégré des cas de violence fondée sur le sexe, dont l’objectif principal est de systématiser les informations disponibles sur ce type de violence. Des directives organisant l’adhésion des organismes nationaux, provinciaux et municipaux à ce fichier ont été approuvées par voie d’arrêté (arrêté no 60/2021).

61.Une ligne téléphonique nationale gratuite (no 144) ouverte 24 heures sur 24 et 365 jours par an offre des conseils, un soutien, une coordination et un suivi des cas et des consultations concernant des situations de violence fondée sur le genre. On trouvera à l’annexe IV un rapport soumis par le Ministère des femmes, du genre et de la diversité qui contient des données sur la ligne téléphonique no 114 allant de 2017 à 2020.

62.Les statistiques officielles sur les féminicides sont produites par la Cour suprême de justice de la nation à partir du registre de données statistiques sur les affaires judiciaires de mort violente de femme fondée sur le genre créé par son ordonnance no 42/2017. Le protocole de travail du Registre national des féminicides de la justice argentine établi par la Cour suprême de justice de la nation dispose que les sources d’information du Registre seront les affaires de mort violente de femmes, de personnes transgenres et de travestis dont sont saisies les 24 juridictions du pays, et que les définitions de la Convention de Belém Do Pará en seront les principes directeurs.

63.Selon le Registre national des féminicides de la justice argentine, le nombre total des victimes de féminicide direct et par association était de 268 en 2019, dont 252 victimes directes et 5 travesticides/transféminicides ; les données pour 2020 ne sont pas encore disponibles, car elles sont traitées six mois après la fin de l’année considérée. Il ressort de ce registre que le féminicide intime est le plus fréquent, puisque 90 % des victimes avaient un lien avec l’auteur ou les auteurs du féminicide. On constate également que 82 % des cas se sont produits dans un contexte de violence domestique. Dans 7 % seulement des cas enregistrés, les auteurs étaient des personnes inconnues de la victime, et dans 3 % des cas aucune information sur cette variable n’a pu être recueillie.

64.Le 8 mars 2021l, le Conseil national du pouvoir judiciaire a adopté son arrêté no 8/2021 portant création d’un Registre public des plaintes contre juge à raison de situations associées à la violence de genre, qui constitue un progrès important vers une réponse judiciaire effective dans les affaires de violence fondée sur le genre. La création de ce registre donnait suite à un engagement pris par l’État argentin dans le cadre d’un accord de règlement amiable conclu avec le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.

65.En ce qui concerne les protocoles hospitaliers d’accès à l’avortement légal, le Ministère national de la santé a adopté l’arrêté no 1/2019 portant approbation du protocole de prise en charge intégrale des personnes ayant droit à une interruption légale de grossesse, qui doit guider les équipes de santé dans l’exercice de leurs responsabilités en matière d’interruption légale de grossesse dans le cadre juridique actuel.

66.Ce protocole est un impératif de la politique sanitaire nationale en matière de sexualité et de procréation et poursuit les objectifs suivants : garantir les droits de chacune, et notamment des patientes, en matière de sexualité et de procréation ; faire reposer les décisions sur les données scientifiques les plus récentes ; protéger et accompagner les équipes sanitaires dans leur mission de prise en charge de la santé de la population ; et appliquer le principe d’équité de façon à mettre les meilleures pratiques au service de celles qui en ont le plus besoin. Il suit les recommandations internationales concernant les procédures d’interruption légale de grossesse − dosage des médicaments et aspiration manuelle intra‑utérine (AMIU) − et met l’accent sur l’importance d’un accès rapide à des soins complets.

67.En ce qui concerne l’accès à l’avortement légal, le Congrès national a adopté la loi no 26.710, entrée en vigueur en janvier 2021, qui réglemente l’accès à l’interruption volontaire de grossesse et aux soins post-avortement et modifie les articles 85, 86, 87 et 88 du Code pénal national.

68.Son objectif est de réglementer l’accès à l’interruption volontaire de grossesse et aux soins post-avortement, conformément aux engagements pris par l’État argentin en matière de santé publique et de droits humains des femmes et des personnes invoquant une autre identité de genre qui sont douées de la capacité de gestation.

69.Selon le dispositif légal prévu, les femmes et autres personnes douées de la capacité de gestation ont le droit de décider d’interrompre volontairement leur grossesse et ont accès à la procédure d’interruption volontaire de grossesse jusqu’à la quatorzième semaine de gestation incluse et, après ce délai, elles ont encore le droit de décider d’interrompre volontairement leur grossesse et ont encore accès à une interruption légale de grossesse si celle‑ci est la conséquence d’un viol ou si leur vie ou leur santé est en danger.

70.La nouvelle loi est d’ordre public et d’application obligatoire sur tout le territoire national. Son caractère obligatoire vaut pour les trois sous-systèmes de santé, ce qui veut dire que les prestataires de soins publics, les œuvres sociales, les entreprises et les organismes de médicaments prépayés doivent prendre les mesures et effectuer les changements nécessaires pour garantir l’application effective de la loi.

Article 3

6.Droits des migrants et des réfugiés

71.Le pouvoir exécutif national a adopté le décret de nécessité et d’urgence no 138/2021, publié le 5 mars 2021, qui porte abrogation du décret de nécessité et d’urgence no 70/2017, rétablissant ainsi la pleine validité de la loi sur les migrations (loi no 25.871).

72.Les considérants du décret d’abrogation no 138/2021 font notamment valoir que certaines dispositions fondamentales du décret qu’il abroge n’étaient conformes ni à notre Constitution nationale ni au système international de protection des droits de l’homme ; parmi ces défauts de conformité, on mentionnera la violation des garanties d’une procédure régulière, la violation du droit de bénéficier d’une assistance juridique et d’avoir un défenseur, les restrictions imposées au large et suffisant contrôle que le pouvoir judiciaire doit pouvoir exercer sur les actes des autorités administratives, la facilité avec laquelle la rétention préventive pouvait être décidée sans que soient définies les causes la justifiant, et enfin les restrictions imposées aux droits au regroupement familial et aux dérogations pour raisons humanitaires, tous défauts de conformité qui n’étaient pas compensés par des améliorations notables d’autres dispositions.

73.Le décret d’abrogation, qui a bénéficié de l’actif soutien de la Direction nationale des migrations, s’appuie en outre expressément sur les observations formulées par le Comité contre la torture, le Comité des droits de l’enfant et le Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille., qui ont exprimé leur profonde préoccupation et exhorté l’État argentin à abroger le décret incriminé

74.L’abrogation susmentionnée a incité ces trois Comités à publier un communiqué commun dans lequel ils applaudissent la décision du Président Alberto Fernández d’invalider le décret no 70/17.

75.Le décret d’abrogation crée au sein de la Direction nationale des migrations une Commission consultative sur la politique migratoire qui a pour mandat de proposer des mesures non contraignantes concernant l’application et l’actualisation de la loi sur les migrations.

76.On notera également la création en 2020, au sein du Secrétariat aux droits de l’homme, d’une Direction nationale de l’équité raciale, des migrants et des réfugiés qui a pour objectifs d’assurer l’intégration d’une perspective intersectionnelle et ethnoraciale dans les politiques publiques de l’État national, de renforcer la promotion des droits des migrants et des réfugiés et de coordonner les actions prévues pour célébrer la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine.

77.En ce qui concerne le non-refoulement de personnes risquant d’être soumises à la torture, la loi générale no 26.165 relative à la reconnaissance et à la protection des réfugiés consacre le droit qu’ont tous les étrangers de déposer une demande de reconnaissance du statut de réfugié et établit une obligation de garantir le respect du principe de non-refoulement (art. 2 et 7), ainsi qu’une obligation de notifier immédiatement les demandes de statut de réfugié au Secrétariat exécutif de la Commission nationale pour les réfugiés (CONARE).

78.La procédure de demande de protection internationale à la frontière est régie par l’arrêté DNM no 20193/2005. Cet arrêté dispose que lorsqu’un étranger se présente au contrôle migratoire aux frontières et demande à bénéficier de la protection internationale en tant que réfugié en Argentine, il doit, après consultation de l’autorité migratoire de la juridiction concernée, être admis sur le territoire national et se voir délivrer un titre de séjour de quarante-huit heures pour qu’il puisse se présenter au bureau ou à la délégation des services d’immigration la plus proche et y déposer une demande de reconnaissance du statut de réfugié.

79.Actuellement, suite aux mesures d’urgence sanitaire et aux dispositions des décrets nos 331/2020 et suivants relatifs à la fermeture des frontières, la Commission nationale pour les réfugiés a demandé à la Direction nationale des migrations d’appliquer des critères spécifiques aux demandes de dérogation à ces décrets motivées par un besoin de protection internationale et/ou une situation humanitaire et/ou le regroupement familial.

80.En ce qui concerne les victimes de la traite et de la violence fondée sur le genre, il existe au Ministère des femmes, du genre et de la diversité une unité chargée de coordonner la prise en charge des personnes migrantes victimes de violence fondée sur le genre qui a pour mandat, entre autres, d’organiser des mesures d’aide et de prise en charge de ces personnes.

81.Il existe également une unité chargée de coordonner les actions de soutien et de suivi des politiques de lutte contre la traite et l’exploitation des personnes, qui a pour mandat, entre autres, d’aider à formuler les politiques publiques de prévention de la traite et de l’exploitation des personnes et de participer aux travaux du Comité exécutif de lutte contre la traite et l’exploitation des personnes et de protection et d’assistance aux victimes créé par la loi no 26.842 relative à la traite des personnes.

82.Dans le cadre du Plan national de lutte contre la traite et l’exploitation des personnes pour 2020-2022 mis au point par le Comité précité, une série d’engagements et de mesures ont été pris en matière de prévention, d’aide aux victimes, de poursuites judiciaires et de renforcement des institutions, qui visent à définir des politiques publiques de lutte contre la traite des personnes et à assurer aux victimes le plein exercice de leurs droits et garanties.

7. Informations sur les réfugiés

83.On trouvera ci-dessous des statistiques, ventilées par année depuis 2017 à ce jour, des demandes de statut de réfugié qui ont été déposées et des reconnaissances du statut de réfugié qui ont été délivrées, étant entendu qu’il n’y a eu aucun cas de personne demandant l’asile qui ait été refoulée, extradée ou expulsée.

Graphique 1 Nombre total de demandes par année

Graphique 2 Nombre total de demandes par année et par tranche d’âge

Graphique 3 Nombre total de demandes par année et par nationalité

Graphique 4 Nombre total de reconnaissances du statut de réfugié par année

Graphique 5 Nombre total de reconnaissances du statut de réfugié par année et par tranche d’âge

Graphique 6 Nombre total de reconnaissances du statut de réfugié par année et par nationalité

* Statistiques au 15 mars 2021.

84.On trouvera à l’annexe V des données détaillées sur les procédures judiciaires ayant abouti à l’expulsion effective de personnes migrantes depuis l’année 2017.

8.Refoulements et expulsions

85.Le principe de non-refoulement est l’un des principes fondamentaux de la protection des réfugiés dans notre pays. En devenant partie à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, l’État argentin a assumé l’obligation d’interdire l’expulsion et le refoulement de réfugiés. Ce principe est expressément encadré par la procédure administrative exceptionnelle d’expulsion d’un réfugié (ou d’un demandeur d’asile) prévue par la loi no 26.165.

86.Dans tous les cas, le réfugié a le droit de présenter tout type de preuve à décharge et de faire appel de toute mesure d’expulsion devant les autorités administratives et judiciaires.

87.Si la mesure d’expulsion est confirmée, le réfugié doit se voir accorder un délai raisonnable pour qu’il puisse se faire admettre légalement dans un pays tiers, et l’expulsion ne pourra être exécutée que vers le territoire d’un État qui garantit son droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne, ainsi que sa protection contre l’expulsion, le refoulement ou l’extradition. Cette procédure d’expulsion exceptionnelle offre au réfugié les plus grandes garanties et assure le respect du principe de non-refoulement.

88.Par ailleurs, on n’a repéré aucun cas de remise effective à leur pays d’origine de demandeurs d’asile ou de réfugiés statutaires visés par une demande d’extradition émanant de leur pays.

89.En application de l’article 18 de la loi no 24.767 relative à l’entraide judiciaire internationale en matière pénale, l’État argentin, avant d’extrader un individu réclamé, demande à l’État requérant de garantir que cet individu ne pourra pas être poursuivi, jugé ou inquiété pour des faits antérieurs aux faits constituant l’infraction pour laquelle l’extradition a été accordée ou pour des faits différents.

90.De même, le paragraphe e) de l’article 8 de cette loi prévoit expressément qu’il n’est pas procédé à l’extradition lorsqu’il existe des motifs sérieux de croire que l’individu réclamé risque d’être soumis à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et pour cette raison il est demandé à l’autorité requise de garantir que de tels motifs n’existent pas avant de remettre l’intéressé à l’État requérant.

Articles 5 à 9

9/10. Extradition et entraide judiciaire

91.La torture et les infractions connexes visées à l’article 4 de la Convention donnent lieu à extradition, dans la mesure où elles sont incriminées dans le Code pénal argentin et pourvu que toutes les conditions auxquelles est subordonnée l’entraide judiciaire pénale qui sont prévues dans les traités signés par notre pays et dans son droit interne soient remplies.

92.La République argentine a signé la Convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la torture, qui prévoit qu’« en conformité avec leur législation nationale sur l’extradition et leurs engagements internationaux en la matière, les États parties prennent les mesures nécessaires pour accorder l’extradition de toute personne accusée d’avoir commis le crime de torture ou condamnée pour avoir commis ce crime ».

93.Il convient de noter à cet égard qu’aucune infraction spécifique − y compris la torture − n’est expressément mentionnée dans les traités ou conventions d’extradition signés par notre pays, la formule généralement utilisée pour désigner les infractions donnant lieu à extradition consistant à renvoyer aux « faits qualifiés d’infraction par les lois des deux parties et punis d’une peine privative de liberté d’un maximum d’au moins un an ou d’une peine plus sévère », sans qu’il y soit mentionné une quelconque infraction spécifique.

Article 10

11.Formation des forces de l’ordre

94.En ce qui concerne les programmes de formation professionnelle des forces de sécurité et des agents dépositaires de l’autorité publique, il convient de noter tout d’abord que le Sous‑Secrétariat à la formation et aux carrières du Ministère de la sécurité a placé au cœur de ses activités l’enseignement d’un modèle d’usage rationnel et progressif de la force qui s’applique tant aux forces de sécurité fédérales qu’aux polices provinciales. C’est pourquoi l’une des premières actions engagées par sa Direction nationale de la formation et de l’entraînement dès son entrée en fonctions en décembre 2019 a été l’élaboration d’un cours intitulé « Modèle opérationnel d’usage rationnel de la force : réflexions pour l’action policière ».

95.La teneur de ce cours s’appuie sur des modalités d’intervention professionnelle conformes aux normes internationales en matière de droits de l’homme et adaptées au contexte législatif et réglementaire national. Le cours consiste à expliquer le modèle opérationnel d’usage rationnel de la force, et ce, en vue d’améliorer la pratique professionnelle des membres des forces de police. Il est dispensé en ligne, auto-administré et d’une durée de quarante heures, y compris une évaluation finale obligatoire. En juin 2020, plus de 2 000 membres des forces fédérales avaient suivi cette formation, et une deuxième campagne est prévue pour cette année, y compris à l’intention des forces de sécurité provinciales.

96.La même Direction nationale a lancé une révision du plan annuel de formation élaboré par les forces de sécurité fédérales. Cette révision vise à évaluer la présence, la portée et les caractéristiques du modèle d’usage rationnel et progressif de la force dans la formation offerte, afin d’identifier des bonnes pratiques pédagogiques et les possibilités d’amélioration de cet enseignement.

97.En outre, le Ministère de la sécurité a arrêté les grandes lignes de la mise en conformité académique du cours de formation initiale des officiers et sous-officiers des forces de sécurité fédérales et décidé que ce cours doit être dispensé sur neuf mois, ce qui allonge la durée de la formation professionnelle et accroît la charge horaire des plans de formation des agents de la Police fédérale, de la Sûreté aéroportuaire, de la Gendarmerie nationale et de la Préfecture navale. Ces programmes de formation intègrent de façon transversale la perspective des droits de l’homme dans les cadres conceptuels, normatifs et pratiques de l’action policière.

98.En outre, le Ministère de la sécurité, agissant par le biais de son Conseil de sécurité intérieure, met au point, à l’intention des forces de police provinciales, des activités de formation centrées sur les droits de l’homme. Des cours sur « les droits de l’homme et les politiques de sécurité » et sur « l’usage rationnel de la force » ont été proposés dans ce cadre.

99.Par ailleurs, il a été proposé aux juridictions provinciales de signer un protocole d’adhésion à l’arrêté no 37/2020 du Ministère de la sécurité relatif à l’obligation faite aux forces de l’ordre de respecter l’identité de genre et de s’abstenir de toute discrimination fondée sur l’orientation sexuelle.

100.De même, on a préparé un projet de règlement d’application de la loi no 26.290 relative aux forces de sécurité, qui dispose que les forces composant le système de sécurité intérieure doivent inclure dans leurs programmes de formation un enseignement sur les droits des enfants et des adolescents.

101.Au sein du Service pénitentiaire fédéral, qui est rattaché au Ministère de la justice et des droits de l’homme, les programmes de formation et de perfectionnement sont obligatoires pour l’ensemble du personnel pénitentiaire, visent à garantir le respect des droits de l’homme et appliquent de nouveaux critères de suivi criminologique et de sécurité.

102.L’École nationale d’administration pénitentiaire, qui est un établissement d’enseignement consacré à la formation des officiers du Service pénitentiaire fédéral, offre actuellement deux programmes d’études à jour de la législation en vigueur, à savoir une formation professionnelle en administration pénitentiaire d’une durée de trois ans et un diplôme de traitement pénitentiaire d’une durée de quatre ans. Ces formations comprennent une discipline appelée prévention des risques pénitentiaires qui étudie les mécanismes de règlement des différends, la prévention et la réduction des cas de suicides, les fouilles et perquisitions et l’usage rationnel de la force, ainsi que les infractions imputables aux agents pénitentiaires. Le cours consacré à la politique et à la législation pénitentiaire présente le système national de prévention de la torture créé par la loi no 26.827, ainsi que les normes et engagements internationaux en la matière, tels que l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus, les observations finales des organes de traité, les protocoles et la jurisprudence internationale. Il traite également de sujets comme les nouveaux paradigmes constitutionnels relatifs aux personnes privées de liberté, les diverses formes de châtiment et de traitements cruels, inhumains et dégradants et le droit international des droits de l’homme.

103.De son côté, l’École des sous-officiers dispense des cours obligatoires sur la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (743 agents ont réussi ce cours en 2017 ; 405 en 2018 ; 475 en 2019 ; et 45 en 2020), en sus de cours sur les interventions en situation de crise et de cours de mise à niveau en cas de promotion hiérarchique, qui offrent un contenu renforcé sur les droits de l’homme.

104.L’Académie supérieure d’études pénitentiaires propose des cours de formation destinés au personnel subalterne et au personnel supérieur qui abordent des sujets essentiels pour la promotion des droits de l’homme et pour le traitement et l’élimination de la violence institutionnelle. C’est ainsi que, de 2017 à mars 2021, ont été dispensés des cours sur les matières suivantes : code de conduite pour les responsables de l’application des lois (461 agents ont réussi ce cours en 2017 ; 1 947 en 2018 ; 3 019 en 2020 ; et 63 pendant les premiers mois de 2021) ; prévention de la torture et des peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants (461 agents ont réussi ce cours en 2017 ; 1 947 en 2018 ; 3 019 en 2020 ; et 63 pendant les premiers mois de 2021) ; et intégrité et prévention de la corruption (79 agents ont réussi ce cours en 2018 ; 173 en 2019 ; et 1 270 en 2020).

105.De même, des activités de formation ont été engagées en 2021 en application des dispositions de la loi Micaela et doivent toucher 15 600 agents du Service pénitentiaire fédéral.

12. Formation des personnels judiciaires

106.En mars 2020, le Bureau du Procureur chargé de la lutte contre la violence institutionnelle, qui est une unité spécialisée du ministère public national chargé de l’action pénale, agissant en collaboration avec la Direction générale de l’accompagnement, de l’orientation et de la protection des victimes, a publié à l’intention des procureurs, fonctionnaires et employés du ministère public un guide pratique sur la façon de « recueillir des témoignages sur des faits de violence institutionnelle ». Ce guide contient une série de recommandations et d’outils de travail visant à faciliter la réception des témoignages des victimes de violence institutionnelle et à faire en sorte que ces victimes soient traitées avec respect et considération, ce qui permet d’éviter la reproduction de dynamiques évoquant le moment où elles ont subi les faits de violence en cause et de prévenir des épisodes de revictimisation.

107.Des formations ont également été dispensées aux fonctionnaires de la Direction de l’accès à la justice du ministère public chargé de l’action pénale, laquelle a des bureaux dans différents quartiers populaires de la Ville autonome de Buenos Aires, dans le but de leur faire adopter des critères communs dans leur approche des cas de torture et de donner aux institutions éducatives et sanitaires de ces quartiers les moyens voulus pour dresser le plus rapidement possible un constat des atteintes physiques subies par les victimes, en s’appuyant sur les dispositions du Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d’Istanbul).

Article 11

13. Taux d’incarcération et mesures de substitution à la privation de liberté

108.L’un des plus grands problèmes auxquels notre pays ait dû faire face ces dernières années a été la croissance soutenue de la population carcérale, qui a créé une situation difficile en raison de la diminution correspondante de la capacité opérationnelle des établissements pénitentiaires fédéraux.

109.Compte tenu de cette situation, une Commission d’évaluation du risque fonctionnel a été créée en avril 2017 et chargée de coordonner les actions à mettre en œuvre pour réduire l’impact de l’hébergement des détenus du Service pénitentiaire fédéral sur le coefficient fonctionnel des établissements pénitentiaires, en s’inspirant des orientations données par le Manuel des Nations Unies sur les stratégies de réduction de la surpopulation carcérale.

110.La superficie des lieux d’hébergement est calculée conformément aux dispositions des « conditions élémentaires d’habitabilité des établissements dépendant du Service pénitentiaire fédéral » énoncées dans l’arrêté no 2892/2008.

111.Les travaux de mise en conformité de l’équipement sanitaires et des installations électriques avec les dispositions des articles I.1.3 et I.2.3 de cet arrêté, intitulés « Équipement sanitaire minimum », sont en cours d’exécution.

112.Sans préjudice de ces travaux, le Sous-Secrétariat aux affaires pénitentiaires du Ministère de la justice et des droits de l’homme a organisé en 2020 un groupe de travail comprenant des représentants du Service pénitentiaire, du Secrétariat aux droits de l’homme et du Programme fédéral d’architecture pénitentiaire, qui a été chargé de rédiger un nouveau texte réglementaire actualisant l’arrêté no 2892/2008 et fixant une capacité spécifique pour chaque établissement pénitentiaire fédéral, en tenant compte des réglementations internationales en vigueur en la matière.

Données statistiques sur la capacité des établissements pénitentiaires, le nombre de prévenus et de condamnés et le taux d’occupation de chaque lieu de détention du Service pénitentiaire fédéral

113.Les données correspondant aux années 2017 et 2018 figurent à l’annexe XVII.

Année 2019

Unité d’hébergement

Situation juridique

Nombre total de détenus hébergés

Capacité opérationnelle utilisable

Taux d’occupation

Prévenus

Condamnés

Irresponsables

Total

7 598

6 282

3

13 883

12 235

113,47 %

C.P.F. I

1 814

620

3

2 437

1 943

125,42 %

C.P.F. II

1 784

868

2 652

2 404

110,32 %

C.P.F. III

340

297

637

471

135,24 %

C.P.F.C.A.B.A.

1 449

449

1 898

1 754

108,21 %

C.P.F. IV

398

197

595

552

107,79 %

C.F.J.A.

237

115

352

352

100,00 %

C.P.F . VI

348

282

630

218

288,99 %

U. 4

86

449

535

476

112,39 %

U. 5

40

273

313

304

102,96 %

U. 6

48

446

494

507

97,44 %

U. 7

156

236

392

387

101,29 %

U. 8

77

92

169

162

104,32 %

C.P.F. V

16

511

527

388

135,82 %

U. 10

59

54

113

123

91,87 %

U. 11

89

99

188

190

98,95%

U. 12

34

269

303

317

95,58 %

U. 13

36

39

75

68

110,29 %

U. 14

33

104

137

138

99,28 %

U. 15

17

86

103

110

93,64 %

U. 16

103

85

188

136

138,24 %

U. 17

55

145

200

201

99,50 %

U. 18

1

1

9

11,11 %

U. 19

7

267

274

284

96,48 %

U. 21

19

12

31

51

60,78 %

U. 22

42

56

98

99

98,99 %

U. 23

11

3

14

22

63,64 %

U. 25

25

25

29

86,21 %

U. 30

5

16

21

25

84,00 %

U. 31

81

60

141

243

58,02 %

U. 34

63

12

75

112

66,96 %

U. 35

75

114

189

160

118,13 %

S.C.A.

76

76

N. B. : Données au 31 décembre.

Année 2020

Unité d’hébergement

Situation juridique

Nombre total de détenus hébergés

Capacité opérationnelle utilisable

Taux d’occupation

Prévenus

Condamnés

Irresponsables

Total

5 788

5 678

4

11 470

12 198

94,03 %

C.P.F. I

1 365

683

4

2 052

1 978

103,74 %

C.P.F. II

1 417

777

2 194

2 433

90,18 %

C.P.F. III

192

287

479

465

103,01 %

C.P.F.C.A.B.A.

1 107

420

1 527

1 187

128,64 %

C.P.F. IV

244

133

377

533

70,73 %

C.F.J.A.

188

109

297

278

106,83 %

C.P.F . VI

359

268

627

701

89,44 %

U. 4

86

409

495

460

107,61 %

U. 5

17

262

279

304

91,78 %

U. 6

32

358

390

489

79,75 %

U. 7

147

230

377

372

101,34 %

U. 8

52

76

128

165

77,58 %

C.P.F. V

26

430

456

530

86,04 %

U. 10

40

57

97

123

78,86 %

U. 11

90

83

173

182

95,05 %

U. 12

29

243

272

288

94,44 %

U. 13

18

27

45

83

54,22 %

U. 14

30

95

125

134

93,28 %

U. 15

14

97

111

113

98,23 %

U. 16

64

81

145

142

102,11 %

U. 17

68

136

204

201

101,49 %

U. 18

1

1

9

11,11 %

U. 19

6

159

165

283

58,30 %

U. 21

4

7

11

38

28,95 %

U. 22

19

49

68

99

68,69 %

U. 23

7

6

13

21

61,90 %

U. 25

14

14

27

51,85 %

U. 30

6

7

13

35

37,14 %

U. 31

46

46

92

249

36,95 %

U. 34

52

10

62

112

55,36 %

U. 35

63

118

181

164

110,37 %

N. B. : Données au 31 décembre.

Année 2021

Unité d’hébergement

Situation juridique

Nombre total de détenus hébergés

Capacité opérationnelle utilisable

Taux d’occupation

Prévenus

Condamnés

Irresponsables

Total

6 136

5 448

4

11 588

12 198

95,00 %

C.P.F. I

1 384

599

4

1 987

1 978

100,46 %

C.P.F. II

1 567

618

2 185

2 433

89,81 %

C.P.F. III

215

268

483

465

103,87 %

C.P.F.C.A.B.A.

1 206

378

1 584

1 187

133,45 %

C.P.F. IV

251

134

385

533

72,23 %

C.F.J.A.

207

97

304

278

109,35 %

C.P.F . VI

371

278

649

701

92,58 %

U. 4

83

432

515

460

111,96 %

U. 5

23

269

292

304

96,05 %

U. 6

26

342

368

489

75,26 %

U. 7

146

235

381

372

102,42 %

U. 8

40

99

139

165

84,24 %

C.P.F. V

29

463

492

530

92,83 %

U. 10

40

60

100

123

81,30 %

U. 11

93

80

173

182

95,05 %

U. 12

29

241

270

288

93,75 %

U. 13

15

31

46

83

55,42 %

U. 14

25

100

125

134

93,28 %

U. 15

19

94

113

113

100,00 %

U. 16

71

75

146

142

102,82 %

U. 17

65

135

200

201

99,50 %

U. 18

0

1

1

9

11,11 %

U. 19

6

157

163

283

57,60 %

U. 21

13

1

14

38

36,84 %

U. 22

20

64

84

99

84,85 %

U. 23

7

5

12

21

57,14 %

U. 25

12

12

27

44,44 %

U. 30

7

6

13

35

37,14 %

U. 31

56

44

100

249

40,16 %

U. 34

52

10

62

112

55,36 %

U. 35

69

120

189

164

115,24 %

S.C.A.

1

1

N. B. : Données au 10 mars 2021 .

114.En ce qui concerne les données statistiques, il convient de rappeler que la Direction nationale de la politique pénale en matière de justice et de législation pénale du Ministère de la justice et des droits de l’homme est l’organe chargé de compiler les statistiques officielles sur la criminalité et le fonctionnement du système de justice pénale, conformément aux dispositions de la loi no 25.266.

115.Comme il est dit plus haut, en 2002 était lancé le Système national de statistiques sur l’exécution des peines, qui couvre l’ensemble de la population privée de liberté à raison d’infractions pénales et qui a pour objectif de fournir des informations sur l’exécution des peines au sens large, c’est-à-dire non seulement l’exécution des peines privatives de liberté, mais aussi l’exécution des mesures de sûreté et des peines contraventionnelles emportant privation de liberté. On trouvera de plus amples renseignements sur la question à l’adresse suivante, mentionnée plus haut : https://www.argentina.gob.ar/justicia/politicacriminal/estadisticas/sneep.

116.La Direction de l’assistance aux personnes sous surveillance électronique du Ministère de la justice et des droits de l’homme a pour tâche d’appliquer des mesures de substitution à la privation de liberté mesures hors des établissements pénitentiaires, selon des modalités qui favorisent la promotion des droits, et de contribuer à la prévention de la criminalité par le tissage de liens sociaux sains qui facilitent la réinsertion sociale. La Direction supervise la mise en œuvre du dispositif de surveillance électronique des personnes poursuivies ou condamnées qui font l’objet d’une mesure d’assignation à résidence ou d’autres types de mesures de détention ou d’exécution de la peine au sein de la République argentine.

117.Le Direction de l’assistance aux personnes sous surveillance électronique s’occupe d’adultes qui font l’objet de poursuites ou qui ont été condamnées par la justice pénale nationale, fédérale ou provinciale et qui peuvent bénéficier d’une mesure d’assignation à résidence ou de toutes autres modalités de détention ou d’exécution de la peine, conformément aux paramètres fixés par la loi (Code pénal national, loi no 24.660 telle que modifiée).

118.La procédure commence par l’introduction d’une requête en justice, à la suite de laquelle la Direction de l’assistance aux personnes sous surveillance électronique établi un rapport technique sur la possibilité de recourir à une telle mesure et sur le cadre général et social dans lequel elle s’inscrirait, lequel est soumis à l’autorité judiciaire, l’application effective de la mesure faisant ultérieurement l’objet d’une décision de justice. Outre s’acquitter des tâches susmentionnées, la Direction met à disposition une équipe de soutien interdisciplinaire qui, par ses interventions et son action, contribue au développement des compétences personnelles de la personne concernée et à la création d’un nouveau lien avec la communauté.

119.En ce qui concerne le dispositif de surveillance électronique des personnes assignées à résidence, établi par la loi no 24.660 relative à l’exécution des peines privatives de liberté, le Ministère de la justice et des droits de l’homme, par son arrêté no 808/2016, a mis en application le Protocole d’application prioritaire du dispositif de surveillance électronique.

120.Le Protocole établit un ordre préférentiel et sans exclusive d’application des dispositifs, afin de garantir que les groupes de personnes qui se trouvent en situation de vulnérabilité particulière et pour lesquels l’approche interdisciplinaire constitue a priori un outil utile dans le processus de réinsertion sociale puissent en bénéficier. L’arrêté classe les situations susceptibles d’appeler l’application du dispositif de contrôle selon l’ordre de priorité suivant :

a)Femme enceinte ;

b)Mère d’un enfant mineur de moins de 5 ans ou d’une personne handicapée dont elle a la charge ;

c)Mère d’un enfant âgé de 5 à 10 ans, à condition que l’autorité judiciaire compétente estime raisonnable d’accorder une mesure d’assignation à résidence en dérogation de ce qui est prévu par la loi ;

d)Détenu atteint d’une maladie incurable en phase terminale ;

e)Détenu malade, quand la privation de liberté dans l’établissement pénitentiaire l’empêche de se remettre ou de se soigner correctement et son état ne justifie pas une hospitalisation ;

f)Détenu handicapé, quand la privation de liberté dans l’établissement carcéral n’est pas adaptée à sa situation et constitue un traitement dégradant, inhumain ou cruel ;

g)Détenu âgé de plus de 70 ans ;

h)Détenu qui a été considéré par l’organisme technico-criminologique comme peu dangereux ou qui accompli le dernier tiers de sa peine et à qui le bénéfice d’un autre dispositif a été refusé, à condition que l’autorité judiciaire compétente estime raisonnable d’accorder l’assignation à résidence en dérogation de ce qui est prévu par la loi ;

i)Détenu LGBT ;

j)Autres cas examinés par les juges concernés.

121.En ce qui concerne les femmes privées de liberté, diverses stratégies fondées sur une approche tenant compte des questions de genre ont été conçues pour garantir l’exercice de leurs droits et pour mettre en évidence les inégalités et les discriminations structurelles qui touchent tout particulièrement ces femmes.

122.La Direction de l’assistance aux personnes sous surveillance électronique assure un accompagnement psychosocial sur l’ensemble du territoire aux femmes qui font l’objet de poursuites ou qui ont été condamnées par la justice pénale nationale, fédérale ou provinciale et qui sont assignées à résidence. L’objectif de cet accompagnement est de garantir que l’assignation à résidence s’accomplisse dans le respect des droits de ces femmes, en cherchant à renforcer leurs capacités individuelles et à favoriser leur autonomisation et la création de liens sains avec la communauté.

123.Face à la nécessité de prendre des dispositions concernant l’accès à la justice des femmes assignées à résidence qui se trouvent en situation de violence, la Direction de l’assistance aux personnes sous surveillance électronique a élaboré un protocole d’action qui prévoit un mécanisme applicable dans les situations d’urgence comme dans les situations où il n’y a pas d’urgence afin de garantir l’accès à la justice des femmes victimes de tout type de violence visé par la loi no 26.485. La Direction de l’assistance aux personnes sous surveillance électronique, le Ministère de la femme et la Direction de l’exécution des peines chargée du contrôle et de l’assistance, qui relève du pouvoir judiciaire national, ont conçu un guide d’action applicable en cas de plainte pour violence domestique fondée sur le genre visant une personne assignée à résidence.

124.Depuis son entrée en activité en 2015, la Direction de l’assistance aux personnes sous surveillance électronique a suivi 2 467 personnes assignées à résidence ou détenues selon d’autres modalités et placées sous surveillance électronique. Il a été mis fin, pour diverses raisons (remise en liberté, décès, révocation de la mesure), à la surveillance dans 1 277 cas, de sorte que le nombre total de personnes faisant l’objet d’une surveillance électronique active en mars 2021 s’élevait à 1 190.

125.Le proportion des femmes qui sont assignées à résidence et suivies dans le cadre du programme est actuellement de 32 % (379 femmes). La proportion de ces femmes ayant un enfant ou un parent à charge ou qui sont enceintes − principaux motifs d’octroi de la mesure d’assignation à résidence − est de 69 %, et la proportion de celles qui sont poursuivies ou qui ont été condamnées pour des infractions à la loi no 23.737 relative aux stupéfiants est de 74 %.

126.Compte tenu de ce que l’assignation à résidence avec surveillance électronique est une mesure qui atténue les effets négatifs de l’emprisonnement, il convient de préciser que 70 % des femmes font actuellement l’objet d’une procédure pénale dans laquelle une décision n’a pas encore été rendue, tandis que 30 % d’entre elles ont été condamnées.

127.Les personnes LGBTIQ+ représentent actuellement 1 % du nombre total de personnes suivies par la Direction de l’assistance aux personnes sous surveillance électronique.

128.En novembre 2020, 75 des 1 072 personnes (7 %) ayant cessé d’être surveillées par la Direction de l’assistance aux personnes sous surveillance électronique avaient réintégré un établissement relevant du Service pénitentiaire fédéral. Cela montre que le recours à une mesure de substitution à l’emprisonnement et à un accompagnement psychosocial à des fins de réinsertion sociale réduit le taux de retour dans les centres pénitentiaires fédéraux.

129.Le Secrétariat national à l’enfance, à l’adolescence et à la famille est chargé d’établir les lignes directrices et les paramètres des politiques publiques en faveur des enfants, conformément à la loi no 26.061 relative à la protection intégrale des droits des enfants et des adolescents. Il veille à ce que tout soit mis en œuvre pour assurer l’effectivité des droits et garanties reconnus par cette loi. La loi no 26.061 prévoit que le Gouvernement national doit convenir avec les gouvernements provinciaux et la Ville autonome de Buenos Aires des modalités de transfert des services de prise en charge directe des enfants et adolescents privés de liberté, ainsi que des ressources qui y sont affectées.

130.À l’heure actuelle, toutes les circonscriptions judiciaires disposent de services de prise en charge directe, qui sont chargés des dispositifs du système pénal pour mineurs, lesquels comprennent des établissements spécialisés d’arrêt et de services qui interviennent dès le premier moment de l’arrestation, ainsi que des établissements chargés de l’application des mesures judiciaires de caractère pénal.

131.En février 2017, le Secrétariat national à l’enfance, à l’adolescence et à la famille a mis en place un programme national de création de centres d’admission et d’orientation des adolescents présumés avoir commis une infraction et de renforcement des centres existants, dont l’objectif est de promouvoir la pleine application du principe de spécialité s’agissant des enfants et les adolescents qui sont arrêtés par les forces de sécurité dans chaque circonscription judiciaire du pays.

132.Les centres d’admission et d’orientation sont des centres de détention spécialisés qui accueillent temporairement des adolescents de moins de 18 ans qui ont été arrêtés pour la commission présumée d’une infraction. Il ne s’agit pas d’établissements résidentiels, car le séjour des enfants et des adolescents qui y sont admis est de courte durée, les démarches nécessaires à leur orientation devant être effectuées dans un délai de douze à vingt‑quatre heures au maximum. Ils ont pour objet d’éviter la détention dans les commissariats de police et de d’assurer aux adolescents un traitement spécialisé dès leur arrestation. Les centres d’admission et d’orientation sont principalement situés dans des endroits stratégiques et facilement accessibles, et fonctionnent 24 heures sur 24, 365 jours par an.

133.Dans le cadre des politiques visant à réduire la durée du séjour des enfants et des adolescents dans les commissariats de police, des équipes de garde spécialisées ont été créées dans les différentes circonscriptions judiciaires. Ces équipes interdisciplinaires interviennent lorsqu’un mineur de moins de 18 ans qui a été arrêté par la police ou une autre force de sécurité est emmené au commissariat de police, afin de prendre les dispositions et effectuer les démarches nécessaires à leur orientation dans les plus brefs délais.

134.Le Secrétariat national à l’enfance, à l’adolescence et à la famille assure un suivi mensuel dans les circonscriptions judiciaires qui disposent d’établissements de détention spécialisés et d’équipes de garde spécialisées en service dans les commissariats de police, et rend compte du flux quotidien des admissions et des départs d’adolescents.

Placement dans les établissements de détention spécialisés et équipes de garde spécialisées dans les commissariats de police − Premier semestre 2019 et 2020

Détentions par type de dispositif − J anvier à juin 2019

Type de dispositif

Province

Lieu

Nombre de détentions

Centre de détention spécialisé

Ville autonome de Buenos Aires

Ville autonome de Buenos Aires

1 069

Catamarca

San Fernando del Valle de Catamarca

445

Río Negro

Viedma

16

Équipes spécialisées de garde dans les commissariats de police

Córdoba

Villa María

146

Río Negro

Bariloche

35

Bolsòn

0

Total

1 711

Détentions par type de dispositif − J anvier à juin 20 20

Type de dispositif

Province

Lieu

Nombre de détentions

Buenos Aires

Mar del Plata

251

San Martín

184

San Nicolás

175

Centre de détention spécialisé

Ville autonome de Buenos Aires

Ville autonome de Buenos Aires

921

Catamarca

San Fernando del Valle de Catamarca

461

Bariloche

51

Río Negro

Viedma

22

Équipes spécialisées de garde dans les commissariats de police

Córdoba

Villa María

161

Total

1 711

135.S’agissant du respect des droits des enfants et des adolescents, il convient de signaler que, le 28 février 2020, le Sénat a approuvé la nomination de la titulaire du poste − qui était vacant depuis quinze ans − de Défenseuse des droits des enfants et des adolescents, institution qui constitue la plus haute autorité de contrôle du système de protection intégrale des droits de l’enfant. Des défenseurs adjoints ont également été nommés.

136.Il convient de fournir des renseignements portant spécifiquement sur la province de Buenos Aires, celle-ci et le district fédéral de Bueno Aires comptant ensemble le plus grand nombre de centres de détention et de détenus dans le pays. Dans le cadre de l’état d’urgence déclaré dans cette province en vertu de la loi no 14.806, un plan de construction d’infrastructures a été conçu pour réduire progressivement la surpopulation carcérale, qui a atteint un niveau critique.

137.Le plan prévoit trois grandes étapes : la poursuite des travaux en cours et des travaux prévus, qui aboutiront à la création de 1 940 nouvelles places ; la construction, dans les centres existants, de 16 cliniques ; la réalisation de travaux visant à créer 18 000 nouvelles places et à améliorer les conditions de détention au sein du système pénitentiaire provincial, à savoir la construction de nouveaux établissements pénitentiaires, de centres de détention départementaux et de foyers de réinsertion.

138.En outre, conformément à la décision rendue en octobre 2020 dans l’affaire no 100.983 intitulée Internos de las Unidades Carcelarias N° 17, 30 y 31 del Servicio Penitenciario de la Provincia de Buenos Aires s/ Habeas Corpus Colectivo, le Ministère provincial de la justice et des droits de l’homme a élaboré une proposition de décongestion progressive des commissariats de police, dont la mise en œuvre est actuellement suivie par les autorités judiciaires et le Bureau du Défenseur du peuple de la province de Buenos Aires.

14.Détention dans les commissariats de police et soins de santé

139.La détention dans les installations des forces fédérales relevant du Ministère de la sécurité est de nature transitoire et ne doit pas dépasser vingt-quatre à quarante-huit heures, ces installations n’ayant pas vocation à accueillir des personnes de manière permanente et n’offrant donc pas les conditions nécessaires pour cela.

140.Cependant, étant donné que, pour diverses raisons, dans certaines installations les détenus sont retenus plus longtemps que la durée indiquée, le Ministère a mis au point le Système fédéral de mesures de sécurité et d’hébergement, qui permet un accès immédiat aux informations sur le nombre de personnes détenues dans chacun des établissements des forces fédérales, le tribunal duquel relève une mesure de détention donnée, le nom de l’affaire, la date d’admission de la personne concernée et le nombre de places disponibles dans chaque lieu.

141.Ce suivi en temps réel permet de repérer plus facilement les installations surpeuplées et ainsi de prendre les dispositions nécessaires avec les autorités judiciaires ayant ordonné la détention, d’examiner la possibilité d’un transfert et de prendre les mesures pertinentes nécessaires avec le Service pénitentiaire fédéral.

142.Depuis décembre 2019, le Ministère de la sécurité a pris de nombreuses mesures en ce sens, ce qui a permis de réduire considérablement le nombre de personnes placées dans les installations des forces fédérales.

143.En matière de soins de santé, l’un des principaux objectifs du Gouvernement national est de fournir des soins de santé primaires et d’assurer l’accès aux soins de santé à toutes les personnes détenues dans les prisons fédérales, en accordant une attention particulière aux groupes particulièrement vulnérables.

144.Comme indiqué dans les rapports précédents, en 2012 a été créé le Programme de santé en milieu carcéral en vertu de l’arrêté no 1009/12 du Ministère national de la santé. Ce programme vise à améliorer l’accès aux soins de santé des personnes en milieu carcéral par le renforcement des systèmes de santé carcéraux fédéral et provinciaux dans l’ensemble du pays et la conception de stratégies qui garantissent le plein exercice du droit d’accéder aux soins.

145.Les services pénitentiaires étant responsables au premier chef des soins de santé des personnes privées de liberté, toutes les interventions sont effectuées en coordination avec eux. Des accords de coopération et d’assistance sont conclus à cette fin avec les Ministères de la santé, de la justice et de la sécurité ou du gouvernement de chaque région, selon le cas.

146.De même, en application d’accords spécifiques, les services pénitentiaires (fédéraux et provinciaux) reçoivent des médicaments dans le cadre du plan Remediar, lesquels sont envoyés directement aux services de santé de chaque établissement.

147.En outre, des formations portant sur la santé des détenus sont dispensées aux agents pénitentiaires et aux équipes de santé dans le cadre du Programme de santé en milieu carcéral. Les sujets les plus fréquemment abordés sont la santé dans son ensemble (outils de prévention et de promotion de la santé), la santé sexuelle et procréative, le VIH, la santé mentale et les problèmes de consommation, la tuberculose, la réanimation cardiopulmonaire et les premiers secours, le diabète, l’hypertension artérielle et la santé maternelle et infantile. En 2020 ont été ajoutées des formations liées à la COVID‑19.

148.Des représentants du Programme de santé en milieu carcéral participent, avec des représentants du Ministère de la femme, à des séances de groupes de travail à caractère administratif portant sur la question de l’accès des femmes privées de liberté à la santé, dans le cadre desquelles sont conçues des stratégies d’intervention et de formation en coordination avec les services pénitentiaires.

149.La cellule de coordination de la lutte contre la violence fondée sur le genre en milieu carcéral du Ministère des femmes, du genre et de la diversité contribue également à l’élaboration de politiques spécifiques relatives aux femmes et aux personnes transgenres dans le cadre de programmes portant sur le recours à la force, de dispositifs de surveillance et de contrôle externes des conditions de détention et de programmes de surveillance et d’analyse des décès en détention.

150.Une première enquête sur la fréquence des situations de violence fondée sur le genre chez les personnes privées de liberté sera réalisée dans le cadre d’un groupe de travail interinstitutionnel réunissant le Ministère de la justice et des droits de l’homme et le Sous‑Secrétariat aux affaires pénitentiaires du Ministère des femmes, du genre et de la diversité. Cette enquête sera menée en deux étapes : la première, qui sera réalisée au cours du premier semestre de 2021, consistera à étudier les liens entre les violences vécues et le parcours délinquantiel de jeunes femmes adultes ; et la deuxième consistera à réaliser une enquête sur l’ensemble de la population des femmes et d’autres groupes privés de liberté, conçue en fonction des résultats obtenus au cours de la première étape.

151.Si tous les établissements pénitentiaires relevant du Ministère national de la santé disposent d’une équipe de santé, tout examen complémentaire ou consultation entre services nécessaire ne pouvant être réalisé dans un établissement donné est pris en charge dans un centre hospitalier extérieur, de même que toute urgence ne pouvant être traitée dans l’établissement.

152.Au nombre des mesures prises pour améliorer les conditions de détention dans la province de Buenos Aires figure l’élaboration du plan de développement des infrastructures pénitentiaires mentionné précédemment, qui prévoit la réalisation de nouvelles places dans les prisons et centres de détention relevant du Ministère provincial de la justice.

153.Ce plan changera considérablement les choses en ce qui concerne l’accès des personnes privées de liberté aux soins de santé, grâce à la création de 16 hôpitaux modulaires répartis dans 12 complexes pénitentiaires et offrant en tout 384 places de soins de santé primaires au sein même des établissements. Ainsi, de nouveaux hôpitaux modulaires ont été ouverts dans l’unité pénitentiaire no 8, qui accueille des femmes et des personnes transgenres, et dans l’unité pénitentiaire no 33, qui accueille des femmes avec enfants. La Direction provinciale de la santé en milieu pénitentiaire met également en œuvre des mesures et des stratégies visant à promouvoir la santé en milieu carcéral, en encourageant la détection des maladies, la collecte de données et la surveillance épidémiologique.

154.Dans le domaine de la santé mentale, divers protocoles d’assistance psychologique et de prise en charge des personnes dont le comportement dénote un risque de suicide sont utilisés ; un accompagnement psychologique à distance est proposé et des ateliers de sensibilisation et de réflexion destinés aux personnes privées de liberté sont organisés. Toujours dans la province de Buenos Aires, la Direction de la lutte contre la violence fondée sur le genre, en collaboration avec la Direction provinciale de la santé en milieu carcéral, a réalisé une enquête visant à recenser les principaux problèmes de santé des femmes et des personnes transgenres. Il s’en est suivi la mise en œuvre de diverses politiques, telles que le protocole d’accouchement humanisé en milieu carcéral, les protocoles d’action relatifs aux grossesses à risque et aux grossesses menées à terme dans un établissement carcéral et un plan de vaccination et d’examen périodique des enfants.

15. Examens médicaux dans les lieux de privation de liberté

155.Au sein du Service pénitentiaire fédéral, des professionnels de la santé examinent chaque détenu lors de son admission afin de prendre connaissance de ses antécédents et de son état de santé et de prendre les mesures nécessaires à une prise en charge adéquate. L’équipe de santé mentale de chaque établissement procède également à une évaluation des détenus. Tous ces actes sont consignés dans le dossier médical du patient, qui comprend la fiche d’admission, sur laquelle figure un tableau où sont inscrites les lésions et/ou les constatations.

156.Le Service pénitentiaire de Buenos Aires procède depuis le début de la pandémie au téléchargement des dossiers médicaux numériques (simplifiés) afin d’entamer le processus de normalisation progressive de l’information, en accordant la priorité aux cas de pathologie transmissible et non transmissible (telles que diabète et hypertension artérielle).

157.L’enquête menée par le Ministère provincial de la justice a montré que les dossiers médicaux des détenus étaient inaccessibles ou que l’accès en était restreint. C’est pourquoi la numérisation des dossiers médicaux des femmes cisgenres, trans et travesties privées de liberté a été lancée. En outre, lors de l’admission dans l’unité carcérale pour femmes, il est procédé à divers examens cliniques et gynécologiques, ainsi qu’à un test de grossesse.

16. Mesures d’isolement et procédures de fouille et de transfert des détenus

158.La procédure d’isolement provisoire en vigueur au sein du Service pénitentiaire fédérale est, du point de vue juridique, fondée sur le règlement relatif au régime disciplinaire applicable aux détenus, établi en vertu du décret no 18/97, qui régit l’application du chapitre IV (intitulé « Discipline ») de la loi relative à l’exécution de la peine de privation de liberté (loi no24.660).

159.Ce décret établit les sanctions légalement applicables pour les infractions disciplinaires qualifiées de « graves » (art. 20 c)), à savoir le placement pour une période pouvant aller jusqu’à quinze jours consécutifs en hébergement individuel ou cellulaire dans des conditions qui ne sont pas plus mauvaises que ce qu’autorise la loi, et jusqu’à sept week‑ends consécutifs ou alternés en hébergement individuel ou cellulaire dans des conditions qui ne sont pas plus mauvaises que ce qu’autorise la loi.

160.En outre, l’isolement provisoire peut être ordonné en tant que mesure de précaution dans les quatre cas suivants (art. 35) : a) lorsque l’infraction, à première vue, est grave ; b) lorsque cela est nécessaire au maintien de l’ordre ; c) lorsque cela est nécessaire pour protéger la personne concernée ; d) lorsque cela est nécessaire à l’établissement des faits.

161.Cette mesure doit être ordonnée par le directeur de l’unité et le juge compétent doit en être informé, lequel doit décider de la levée de la mesure de précaution ou de sa prolongation dans les vingt-quatre heures suivant son application. L’éventuelle prolongation doit faire l’objet d’une décision motivée, et la durée de l’isolement provisoire ne peut excéder trois jours.

162.Par ailleurs, le 20 avril 2021, le Président de la nation a présenté au Congrès un projet de loi portant modification du régime disciplinaire décrit ci-dessus (chap. IV de la loi no 24.660) et qui fait suite à une proposition ayant fait l’objet d’un accord avec le Bureau du Défenseur général de la nation dans le cadre de l’affaire no 12.672 (Guillermo Patricio Lynn vs. Argentina), qui est examinée par la Commission interaméricaine des droits de l’homme.

163.Dans son message de saisine du Congrès, l’exécutif a souligné que partout dans le monde le régime disciplinaire carcéral est régi de manière centrale par les législations pénitentiaires, et que l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus des Nations Unies (Règles Nelson Mandela) comporte des dispositions prévoyant expressément que le régime disciplinaire a pour objectif d’assurer le maintien de la sécurité, le bon fonctionnement de la prison et le bon ordre de la vie communautaire. Il a souligné en particulier que la réglementation actuellement en vigueur est fondée sur des principes qui doivent être mis à jour afin de prendre en compte les normes régionales et internationales les plus récentes en la matière. Le texte du projet de loi est reproduit à l’annexe VI.

164.Les procédures de fouille des visiteurs, des détenus et de leurs effets personnels sont régis par les articles 70 et 163 de la loi no 24.660. Dans plusieurs établissements, les fouilles manuelles ont été remplacées par des capteurs électroniques non intensifs, dont la procédure officielle d’utilisation est régie par le Protocole relatif à la procédure de contrôle des entrées et des sorties dans les établissements pénitentiaires fédéraux.

165.En ce qui concerne les mesures adoptées pour garantir le placement des détenus dans un établissement pénitentiaire proche de leur domicile, le 8 février 2021 a été approuvé, en vertu de l’arrêté DI-2021-103-APN-SPF#MJ, le Protocole de transfert des personnes privées de liberté au sein du Service pénitentiaire fédéral, élaboré en application de l’arrêt rendu le 25 novembre 2019 par la Cour interaméricaine des droits de l’homme en l’affaire López y otros vs. Argentina. Le texte du Protocole est reproduit à l’annexe VII.

166.Le principe général sur lequel repose ce règlement est que les personnes privées de liberté doivent être placées, dans la mesure du possible, dans un établissement proche de leur famille, de leur communauté, de la personne assurant leur défense et de l’autorité judiciaire compétente (art. 1). À cet fin, un accent particulier a été mis sur le rôle des services d’assistance sociale dans la procédure, qui doivent fournir des informations sur la situation générale et familiale de chaque personne et sur le lieu de résidence du groupe familial principal, indiquer si cette personne reçoit des visiteurs, si elle a des enfants mineurs et si une procédure de remise en liberté, de visite de prison à prison ou de visite extraordinaire est en cours, et préciser quelles conséquences aurait le transfert dans le cas considéré.

167.Il a été déterminé que, pour assurer une procédure de contrôle adéquate, la décision devait être notifiée au défenseur de la personne concernée et à l’autorité judiciaire de laquelle relève le cas au moins soixante-douze heures avant la date prévue pour le transfert, en indiquant les raisons qui justifient la mesure.

168.L’arrêté no 1938/2010 du Ministère de la justice de Buenos Aires fixe les lignes directrices et les principes applicables au transfert des détenus au sein du Service pénitentiaire de la province. Ce texte dispose que, dans le cadre des transferts, priorité doit être donnée, dans la limite des possibilités qui s’offrent, au placement des détenus dans une unité pénitentiaire proche de leur domicile et de leur noyau familial, et que cette question doit faire l’objet d’une attention particulière. De la même manière, priorité est donnée au placement dans les unités pénitentiaires situées à proximité ou dans le ressort des tribunaux qui jugent l’affaire les concernant, afin de contribuer à assurer leur accès à la justice en temps voulu.

17. Violence entre détenus − Prévention de la maltraitance d’enfants et d’adolescents

169.Le Système national de statistiques pénitentiaires recense chaque année les actes de violence commis par des détenus dans les établissements pénitentiaires du pays.

170.Entre 2017 et 2019, les services pénitentiaires ont enregistré 41 109 cas de troubles, notamment des cas dans lesquels des personnes ont été blessées ou tuées, des prises d’otages et des cas dans lesquels des dommages ont été causés, auxquels s’ajoutent des cas dans lesquels aucun de ces faits n’a été commis.

171.Les données fournies par le Service pénitentiaire fédéral sur les cas de violence entre détenus enregistrés dans les établissements fédéraux entre 2017 et 2020 figurent à l’annexe VIII.

172.On trouvera en outre à l’annexe IX un rapport établi par Bureau du Procureur chargé de la lutte contre la violence institutionnelle comportant des informations sur la violence en milieu carcéral et les mesures prises pour y faire face.

173.Le Secrétariat national à l’enfance, à l’adolescence et à la famille a élaboré un protocole relatif aux mesures à prendre en cas de plainte pour usage de contrainte illégale dans les institutions pénales pour mineurs, qui détaille les mesures devant être prises par les membres des équipes d’intervention, auquel est venu s’ajouter un protocole relatif aux mesures à prendre en cas de plainte pour mauvais traitements, qui établit la procédure à suivre lorsqu’un adolescent est blessé ou victime de mauvais traitements pendant son séjour dans un établissement fermé ou semi-fermé et qu’un adulte membre du personnel est impliqué dans les faits.

174.Les principales mesures prévues par le protocole sont : le signalement immédiat de la situation au directeur de l’établissement et au juge qui a ordonné la privation de liberté ; la présentation d’une plainte à l’autorité judiciaire ; et la fourniture d’un appui, d’une assistance médicale et de conseils juridiques à l’adolescent. Pendant l’enquête sur les faits et le déroulement de la procédure administrative, l’agent impliqué prima facie est coupé de tout contact avec l’adolescent plaignant et affecté à des tâches n’entraînant pas de contact avec des jeunes. Le protocole prévoit également que des mesures disciplinaires peuvent être prises, qu’une enquête administrative peut être ouverte et, qu’en dernier recours, l’adolescent peut être transféré dans un autre établissement, avec son consentement et après que le juge chargé de l’affaire en a été informé.

175.En ce qui concerne les mesures adoptées au complexe Esperanza, dans la province de Córdoba, le Ministère provincial de la justice et des droits de l’homme, par l’arrêté no 319/18 du 16 novembre 2018 (voir annexe X), a approuvé le projet de centre socioéducatif de cet établissement.

176.Le protocole réglemente et structure la méthode pédagogique utilisée depuis lors, dont le principe directeur est la primauté de la bientraitance en tant qu’élément fondamental et incontournable de tout processus éducatif et social. Il dispose que le personnel de sécurité des centres socioéducatifs doit permettre le déroulement des projets éducatifs individuels des adolescents et favoriser l’instauration de relations interpersonnelles fondées sur le respect et le souci de l’autre. Depuis 2018, l’ensemble du personnel suit une formation continue en ce sens.

177.En cas de conduite répréhensible, de mauvais traitements ou d’infraction de la part d’un agent, une plainte doit être adressée à la justice et une enquête administrative est ouverte pour déterminer qui est l’auteur des faits et établir les responsabilités. Le service juridique qui mène la procédure disciplinaire est externe et indépendant du complexe Esperanza et du système provincial de justice pénale pour mineurs. Le protocole interdit expressément l’utilisation de moyens de contrainte à titre de punition.

178.En 2019, la province de Córdoba a adopté la loi no 10.636, qui crée la fonction d’avocat de l’enfant, lequel défend l’intérêt des enfants et des adolescents dans les procédures administratives ou judiciaires, ainsi que la loi no 10.637, qui modifie le système de promotion et de protection intégrale des droits des enfants et des adolescents et étend l’usage des mesures non privatives de liberté.

18. Décès en milieu carcéral

179.En ce qui concerne la prévention des morts violentes, les règles de procédure du Service pénitentiaire fédéral relatives à l’assistance immédiate à apporter à la victime dans les situations de danger de mort définissent les modalités d’action du personnel pénitentiaire dans les situations où l’intégrité physique d’un détenu est menacée et les procédures qui doivent être suivies pour protéger la vie des détenus en cas d’urgence. Le personnel pénitentiaire est formé à l’assistance à apporter aux victimes dans les situations de danger de mort et à la manière dont il doit agir en cas de pendaison, de brûlure, de blessure par arme blanche et de perte de connaissance.

180.Le Système national de statistiques pénitentiaires recense chaque année les décès dans les établissements pénitentiaires de l’ensemble du pays. Entre 2017 et 2019, les services pénitentiaires ont enregistré 831 décès de personnes privées de liberté dans les établissements qui en relèvent.

181.On trouvera à l’annexe XI les données fournies par le Service pénitentiaire fédéral concernant les décès survenus dans les établissements fédéraux entre 2017 et 2021.

182.On trouvera à l’annexe XII des renseignements sur les décès de personnes privées de liberté enregistrés entre 2017 et 2021 par l’Unité de gestion et de coordination statistique du Service pénitentiaire de Buenos Aires.

183.En novembre 2020, le Ministère de la justice et des droits de l’homme de la province de Buenos Aires a créé, au sein de la Direction de la lutte contre la violence institutionnelle, l’Unité d’enregistrement et de surveillance des décès en milieu carcéral, qui enregistre les décès traumatiques et non traumatiques survenus dans les différents établissements pénitentiaires et centres de détention de la province depuis sa création.

184.On trouvera ci-après des renseignements sur des cas précis évoqués par le Comité.

185.En ce qui concerne le décès de Roberto Agustín Yrusta, l’affaire est en cours de traitement par l’unité no 135 du parquet de Santa Fe, spécialisée dans les infractions complexes (CUIJ 21-06995476-3). L’unité a convoqué Estela et Alejandra Yrusta une nouvelle fois pour les entendre et les informer de leurs droits. Elle a également demandé qu’il soit fait droit à leur demande de se constituer partie civile dans l’affaire. De nouvelles dispositions ont été prises, une audience a été fixée pour recueillir le témoignage des personnes qui étaient détenues dans le même quartier qu’Yrusta, et de nouvelles mesures ont été prises pour reconstituer les faits.

186.En mars 2021, le magistrat instructeur a décidé que les déclarations des agents Julio Dellavita, Guido Reinoso, Ricardo Giménez, Adrián Quiroga et Alberto Acosta, soupçonnés d’actes de torture ayant causé la mort, infraction visée par l’article 144 ter du Code pénal, seraient recueillies en avril 2021.

187.Concernant le décès de Daniel Oblita Flores, le 23 janvier 2018, le tribunal fédéral de première instance no 2 de Rawson a ordonné l’établissement d’un rapport d’enquête de police, procédure actuellement engagée sous le numéro de dossier FCR. 175-2018 (procédure intitulée N.N. S / Averiguación de Delito − Victima: Oblita Flores Daniel y otros) (N.N. S/enquête sur une infraction − Victime : Oblita Flores Daniel et autres). L’établissement pénitentiaire a ordonné la réalisation d’une enquête sommaire (enregistrée sous le dossier no 01382/2018 (U.6)), qui est actuellement en cours et dans le cadre de laquelle sont attendues des réponses aux demandes formulées auprès du tribunal chargé de l’affaire.

188.En ce qui concerne l’enquête sur les décès survenus lors de l’incendie du 15 novembre 2018 au commissariat de police no 3 d’Esteban Echeverría, une enquête administrative préliminaire (no 1050-42874/1118) a été ouverte devant le bureau de contrôle no 2, qui a ordonné le licenciement de cinq agents le 29 novembre 2018 et les a mis en disponibilité, mesure qui est toujours en vigueur.

189.Sur le plan pénal, l’unité d’enquête no 4 du parquet de Lomas de Zamora a ouvert l’enquête préliminaire no 07-03-018714-18, intitulée Incendio seguido de muerte y otros, seccional 3ra. de Esteban Echeverría (incendie suivi de meurtre et autres, troisième commissariat de police d’Esteban Echeverría), afin de déterminer quelles sont les personnes à l’origine de cet incendie qui a fait plusieurs morts, ainsi que les responsabilités des divers fonctionnaires qui étaient de service. Entre août 2020 et mars 2021, des audiences ont été tenues et les dépositions des agents pénitentiaires impliqués ont été recueillies ; des rapports budgétaires portant sur la période comprise entre 2015 et 2018 ont été demandés concernant l’augmentation des places de prison, les travaux d’infrastructure dans les commissariats de police et les mesures visant à remédier à la surpopulation carcérale ; des examens psychologiques et médicaux des victimes ont été ordonnés ; des entretiens avec les proches des victimes ont été menés.

190.En ce qui concerne le décès de Matías Iberra au deuxième commissariat de Merlo le 1er juillet 2019, les circonstances l’entourant font l’objet d’une enquête administrative préliminaire (no 1050-48329/719) menée par le bureau de contrôle no 3. Dans le cadre de l’enquête ont été demandés une copie du rapport d’autopsie ainsi que les résultats des expertises des téléphones de policiers qui avaient été saisis.

191.Sur le plan pénal, l’unité d’enquête no 3 du parquet de Morón a ouvert l’enquête préliminaire no 10-00-0305578-19, dans le cadre de laquelle des témoignages de policiers ont été recueillis.

192.En ce qui concerne la prévention du suicide, un programme de détection des risques de suicide chez les personnes privées de liberté et d’intervention ciblée fondée sur le niveau de ce risque est en place au sein du Service pénitentiaire fédéral. Ce programme a pour objectif de repérer les personnes privées de liberté qui présentent des problèmes précis pouvant conduire à l’automutilation. Des directives relatives aux interventions sont appliquées de manière systématique afin de prévenir les comportements suicidaires, lesquelles énoncent expressément la procédure à suivre et les mesures devant être prises par les différents professionnels (surveillance, traitement et soins de santé).

19. Internement de personnes ayant un handicap psychosocial

193.La loi no 26.657 relative à la santé mentale garantit les droits des personnes ayant une maladie mentale et a créé l’Organe de révision de la loi relative à la santé mentale, chargé de protéger les droits de l’homme dans ce contexte et de superviser et de surveiller les internements pour raisons de santé mentale.

194.L’Organe de révision de la loi relative à la santé mentale est notamment chargé de superviser et de contrôler les conditions d’internement, de surveiller le respect de la loi en matière de protection des droits des usagers du système de santé mentale et de formuler des recommandations au Ministère national de la santé. Le contrôle des conditions d’internement s’effectue au moyen de visites dans les établissements, lesquelles ont à la fois pour objet d’intervenir dans des cas individuels et d’assurer une surveillance d’ensemble des établissements.

195.La Direction nationale de la santé mentale et des dépendances du Ministère national de la santé s’emploie à assurer la transition d’un modèle fondé sur l’enfermement à un modèle fondé sur des dispositifs inclusifs, qui permettent aux personnes de se réinsérer dans la communauté. À cette fin, un réseau national de services de santé mentale est en place, composé d’hôpitaux généraux, de centres de soins de santé primaires et de centres d’intégration communautaires.

196.Dans la province de Buenos Aires, le Gouvernement actuel s’est employé dès son entrée en fonctions à réformer le modèle de soins de santé mentale afin de faire de Buenos Aires une province sans asiles, par le renforcement d’un modèle de soins basé sur la communauté. À cette fin, le Sous-Secrétariat provincial à la santé mentale a mis en œuvre un certain nombre de mesures pendant l’année 2020. Un processus de réforme des établissements publics provinciaux de neuropsychiatrie a été lancé sur la base de principes directeurs assortis d’échéances concrètes pour l’élaboration et la mise en œuvre des projets prévus. En octobre 2020, chaque hôpital provincial a élaboré un plan d’adaptation. Ces plans consistent en des projets globaux de réforme des institutions ayant des composantes sanitaires et non sanitaires et fondés sur la loi no 26.657 et les traités internationaux relatifs aux droits de l’homme.

197.Il a également été créé le Programme d’appui à la désinstitutionnalisation durable, destiné aux personnes placées dans les hôpitaux neuropsychiatriques provinciaux. Ce programme a pour objet la conception d’outils permettant un changement du modèle de soins de santé mentale et met l’accent sur la transformation des hôpitaux neuropsychiatriques en établissements communautaires.

198.Il a été entrepris de mettre au point un instrument d’enquête sur les processus de soins et d’adaptation, et de suivi périodique de ceux-ci. Cet instrument, destiné aux hôpitaux publics de neuropsychiatrie et dont l’utilisation est obligatoire, fournira des informations périodiques concernant quatre domaines, à savoir les admissions dans les services de soins aigus, les admissions dans les services de soins à long terme, les services de soins ambulatoires et la sortie d’institution et l’inclusion sociale. En outre, une disposition a été émise conjointement avec la Direction provinciale des hôpitaux pour mettre un terme aux admissions et aux réadmissions dans les services de soins de longue durée et de soins destinés aux malades chroniques dans quelque secteur que ce soit des hôpitaux neuropsychiatriques publics.

199.On trouvera à l’annexe XIII un rapport comportant des données sur les placements dans les hôpitaux neuropsychiatriques publics de Buenos Aires, qui met en évidence les progrès réalisés, lesquels ont permis de fermer le pavillon 12 de l’hôpital Cabred. Un des pavillons de l’hôpital Korn devrait également être fermé prochainement.

200.Toutes les mesures décrites ci-dessus s’appliquent à l’hôpital neuropsychiatrique Alejandro Korn de Melchor Romero qui, suite à l’affaire Centro de Estudios Legales y Sociales (CELS) c/ Provincia de Buenos Aires s/Amparo, est également doté d’un groupe de travail permanent qui se réunit tous les quinze jours. Différentes commissions de travail ont ainsi été créées (santé sexuelle, utilisation de médicaments psychotropes à des fins thérapeutiques, violence institutionnelle, et droits de l’homme et accès à la justice), aux travaux desquels participent les plaignants, les autorités et les travailleurs de l’hôpital, ainsi que le Sous-Secrétariat à la santé mentale. Le groupe de travail est à l’origine d’une série de mesures visant à permettre de réaliser les travaux d’infrastructure voulus pour atteindre les objectifs fixés dans les plans d’adaptation, à savoir la fourniture de garanties et la construction et l’attribution de logements pour favoriser la désinstitutionnalisation des personnes concernées.

20.Rétention de migrants

201.En ce qui concerne la privation de liberté de migrants en situation irrégulière, il importe de préciser que la Direction nationale des migrations ne procède pas à des placements en détention − qui ne sont effectués qu’à la demande d’un tribunal pour des motifs liés à la commission d’une infraction − et qu’elle n’a que des pouvoirs de « rétention ». La rétention est une mesure ordonnée par la justice à la demande de la Direction nationale des migrations, et constitue la dernière étape de la procédure précédant l’expulsion.

202.La loi no 25.871 relative à l’immigration prévoit deux cas dans lesquels la Direction nationale des migrations peut exécuter un arrêté administratif d’expulsion : en vertu de la mesure d’éloignement prévue à l’article 64, et au motif de la commission d’une infraction à la législation sur l’immigration objective prévue aux articles 29, 61 et 62.

203.Le premier cas concerne les étrangers qui accomplissent une peine prononcée dans le cadre d’une affaire pénale. Autrement dit, il se présente dans le cadre d’une procédure pénale n’ayant aucun lien avec une question de migration et concerne l’exécution d’une peine. C’est le juge compétent qui doit autoriser l’exécution de la mesure d’expulsion, une fois que la décision administrative de ne pas autoriser l’étranger à rester dans le pays est devenue définitive.

204.Le deuxième cas est celui où la Direction nationale des migrations ordonne l’expulsion et demande l’autorisation aux tribunaux fédéraux de placer un étranger en rétention dans le seul but d’exécuter cet ordre d’expulsion (art. 70 de la loi et décret d’application no 616/2010). Le juge examine la légalité de la procédure administrative, après quoi il rend une décision autorisant la rétention de la personne aux fins d’exécution de l’ordre d’expulsion.

205.La Direction nationale des migrations ne place pas un étranger en rétention si l’ordre d’expulsion n’est pas définitif, afin qu’il ne soit pas privé de liberté dans l’attente de l’aboutissement de la procédure.

206.Pour éviter le placement en rétention, l’étranger peut quitter volontairement le pays. Si l’étranger peut prouver qu’il quittera le territoire dans les soixante-douze heures après que la décision d’expulsion est devenue définitive et qu’il n’y a pas de raison objective de supposer que l’étranger ne s’y conformera pas, la Direction nationale des migrations peut s’abstenir de demander le placement en rétention.

207.La période maximum de rétention autorisée est de quinze jours, laquelle peut être prolongée pour une période supplémentaire maximum de trente jours.

208.Une fois la mesure de rétention ordonnée et exécutée, la Direction nationale des migrations doit informer le tribunal tous les dix jours de l’avancement de la procédure administrative d’expulsion et des raisons justifiant le maintien de la mesure de rétention s’il n’a pas encore été procédé à l’expulsion.

209.Si un étranger ou une étrangère en rétention prétend être le père ou la mère, l’enfant ou le conjoint ou la conjointe d’un Argentin ou d’une Argentine, la Direction nationale des migrations doit suspendre l’expulsion et vérifier l’existence du lien allégué dans les quarante‑huit heures.

210.Dans le cas où la personne intéressée ne quitte pas le pays volontairement et les autorités ne peuvent pas procéder à son expulsion dans le délai maximum fixé pour le maintien en rétention, cette personne reste en liberté sous caution juratoire ou réelle et doit se présenter à la Direction nationale des migrations pendant la période fixée par l’acte administratif en vertu duquel elle est en liberté provisoire, jusqu’à ce qu’il puisse être procédé à son expulsion.

211.On trouvera à l’annexe XIV des précisions sur les expulsions de ressortissants étrangers non privés de liberté auxquelles il a été procédé entre 2017 et 2020 dans le cadre de la procédure administrative prévue par la loi no25.871.

Articles 12 et 13

21.Enquêtes sur les actes de torture et les mauvais traitements

212.Depuis l’entrée en fonctions du nouveau Gouvernement, les chaînes et les organes de contrôle de la Police fédérale et des forces de sécurité ont été renforcées.

213.Il a été créé au sein du Ministère de la sécurité le Sous-Secrétariat au contrôle et à la transparence institutionnelle, dont les fonctions comprennent l’élaboration et la mise en œuvre de politiques visant à assurer la transparence des forces de l’ordre, le respect par celles‑ci de la légalité et l’intégrité et le professionnalisme de leurs agents, ainsi que la conception de mesures visant à appliquer les normes nationales et internationales en la matière.

214.La Direction nationale du contrôle de la police, qui relève du Sous-Secrétariat, est expressément habilitée à contrôler l’action de la Police fédérale et des forces de sécurité fédérales, notamment : à élaborer des directives relatives au traitement des cas de violence dans les institutions ; à superviser les enquêtes et les procédures disciplinaires liées aux faits de violence dans les institutions ; à concevoir des dispositifs d’observation et de contrôle pour prévenir les pratiques irrégulières et les violences ; à élaborer des projets de règlements sur le recours à la force.

215.Dans la province de Buenos Aires, la loi no 13.204 a créé l’Inspection générale des affaires internes, placée sous l’autorité du Ministre de la sécurité de la province de Buenos Aires, afin de mener des actions visant à prévenir les comportements de policiers qui peuvent constituer des manquements à la déontologie et de graves abus de fonctions.

216.L’Inspection générale a le statut de Sous-Secrétariat et est dirigée par des fonctionnaires civils, de sorte qu’elle jouit d’une indépendance totale vis-à-vis de la police. Elle est compétente en premier ressort pour traiter d’office ou suite à une plainte les cas d’actes de torture commis par le personnel de la police et pour ouvrir une enquête administrative préliminaire.

217.Le Bureau du Procureur chargé de la lutte contre la violence institutionnelle du ministère public est compétent pour connaître des infractions relevant de la juridiction fédérale ou nationale et, partant, il est chargé d’enquêter sur les faits de violence institutionnelle et de les poursuivre. Il peut donc intervenir face à des faits survenant dans les établissements relevant du Service pénitentiaire fédéral et à des crimes ou des délits commis par les forces de sécurité fédérales.

218.Entre 2017 et 2020, le Bureau du Procureur chargé de la lutte contre la violence institutionnelle a pris part, en collaboration avec les bureaux des procureurs concernés, à l’instruction directe de 277 affaires portant sur des infractions qui auraient été commises par des agents pénitentiaires dans des établissements de détention. Au cours de la même période, 88 plaintes ont été déposées concernant des violations commises dans des prisons et dont la réalité a été confirmée par des inspections et des échanges avec des personnes privées de liberté.

22.Droits et garanties reconnus aux victimes de torture

219.Afin de coordonner l’aide intégrale apportée aux victimes d’infractions dans l’ensemble du pays, il a été créé, en application de la loi no 27.372 relative aux droits et garanties reconnus aux victimes d’infractions, le Centre d’aide aux victimes d’infractions, qui relève du Ministère de la justice et des droits de l’homme et qui a pour principale responsabilité de fournir une aide, des conseils et un accompagnement aux victimes d’infractions relevant de la juridiction fédérale sur tout le territoire et, à la demande des juridictions locales, aux victimes d’infractions relevant de la justice ordinaire.

220.La loi précitée a notamment pour objectif de coordonner les actions et les mesures nécessaires pour que les victimes puissent effectivement exercer leurs droits, et de mettre en place des mécanismes permettant de garantir que toutes les autorités, dans le cadre de leurs compétences respectives, s’acquittent de l’obligation qui leur incombe de prévenir les infractions, d’enquêter sur celles-ci et de les réprimer, ainsi que d’offrir aux victimes des réparations pour les violations de leurs droits subies.

221.Selon les registres du Centre d’aide aux victimes d’infractions, depuis sa création en juin 2018 six demandes liées à des cas de torture lui ont été adressées, lesquelles ont été dûment aiguillées.

222.Enfin, sans préjudice du droit de toute personne victime d’une infraction donnant lieu à une action publique de se constituer partie civile, la loi no 27.372 a modifié le Code de procédure pénale de la nation en reconnaissant une série de droits à la victime, qui y sont énoncés à l’article 5.

23.Données de la justice nationale sur les cas de torture

223.Le système judiciaire de la République argentine est composé du pouvoir judiciaire national et du pouvoir judiciaire de chacune des provinces, conformément au caractère fédéral de l’État argentin.

224.Ainsi, d’une part, il y a un système de justice fédéral, ayant compétence dans l’ensemble du pays pour connaître des infractions qualifiées de fédérales − crimes contre l’humanité, traite, infractions liées aux stupéfiants, contrebande, évasion fiscale, blanchiment d’argent et autres infractions ayant une incidence sur les recettes et la sécurité de la nation − et, d’autre part, chacune des provinces argentines est dotée de son propre système judiciaire provincial, qui a compétence pour les infractions de droit commun (également appelées infractions relevant de la justice ordinaire), de ses propres organes judiciaires et de sa propre législation procédurale.

225.On trouvera à l’annexe XV une liste des affaires en cours et des arrêts rendus par la Cour fédérale de cassation pénale, qui est la plus haute juridiction pénale fédérale du pays, liste établie sur la base de la compilation effectuée par les chambres qui la composent.

24.Procès pour crimes contre l’humanité

226.En décembre 2020, le Secrétariat aux droits de l’homme a lancé le Plan stratégique d’appui aux procès pour crime contre l’humanité, qui a pour objet de tracer la voie à suivre pour accélérer les procès pour crime contre l’humanité, renforcer les enquêtes et mieux accompagner les victimes. Ce plan, qui est reproduit à l’annexe XVI, est l’aboutissement de diverses actions qui étaient déjà menées. Par exemple, en 2019, le Secrétariat aux droits de l’homme a réactivé son Groupe spécial d’enquête sur les crimes contre l’humanité commis à des fins économiques, qui recueille des informations sur de tels crimes et sur la responsabilité des entreprises. Il a également réalisé, en collaboration avec le corps des avocats et différents services d’enquête, de documentation et d’archivage, des travaux qui ont contribué à des enquêtes judiciaires.

227.En raison de l’état d’urgence sanitaire déclaré au motif de la pandémie, les audiences des procès publics pour crime contre l’humanité ont été tenues de manière virtuelle et à distance. Dans cette optique, le Service de la coordination de l’aide aux témoins victimes du Secrétariat aux droits de l’homme a mis en place un protocole comportant des lignes directrices visant à garantir les droits des témoins victimes cités à comparaître aux audiences, ainsi que de toutes les parties à la procédure, en tenant compte de leur situation particulière.

228.Entre 2017 et 2020, des procès ont continué de se tenir, avec la participation active des avocats du Secrétariat aux droits de l’homme, qui engagent les procédures en qualité de plaignants.

229.Entre le moment où les procès ont repris, à savoir janvier 2006, et décembre 2020, 250 jugements ont été rendus, en vertu desquels 1 013 personnes ont été reconnues coupables et 164 personnes ont été acquittées.

230.En 2020, malgré la pandémie et les mesures restrictives qu’elle a entraînées, 26 procédures orales se sont poursuivies, dont 13 ont abouti à un jugement. Dans le cadre du traitement de ces affaires, le Service de coordination de l’aide aux victimes a, entre 2017 et 2020, contacté et notifié 6 856 témoins et jeunes présumés soustraits à leur famille, dont 2 313 pour la seule année 2020.

231.En ce qui concerne les mesures d’exécution des peines prononcées, 863 personnes sont actuellement détenues, dont 638 sont assignées à résidence et 225 sont placées dans un établissement carcéral. Les données statistiques mettent en évidence un recours accru à l’assignation à résidence, celle-ci ayant été prononcée dans 74 % des cas.

Article 14

25.Mesures de réparation et d’indemnisation

232.La dictature civilo-militaire au pouvoir en République argentine de 1976 à 1983 est devenue un « État terroriste » qui a mis sur pied des structures clandestines et a institutionnalisé des pratiques répressives telles que la torture, les enlèvements, les disparitions forcées et l’enfermement dans des centres de détention clandestins.

233.Le retour à la démocratie a marqué le début d’un processus qui s’est traduit par une série d’initiatives correspondant à une volonté de mémoire, de vérité, de justice et de réparation exhaustive en faveur des victimes des graves violations des droits de l’homme qui avaient été commises. Ces années ont été le théâtre d’une évolution remarquable, qui témoigne de la volonté de l’État argentin d’appliquer effectivement les droits de l’homme et de réparer les violations commises.

234.Le système de réparation argentin trouve son origine dans les affaires portées devant la Commission interaméricaine des droits de l’homme. Dans un premier temps, le Gouvernement a promulgué le décret no 70/91, qui prévoyait l’indemnisation des personnes qui avaient été mises à la disposition du pouvoir exécutif national et avaient engagé des actions en dommages et intérêts avant le 10 décembre 1985 ; ensuite, les lois suivantes ont été adoptées : la loi no 24.043, portant indemnisation des anciens détenus et détenues ; la loi no 24.411, portant indemnisation pour disparition forcée ou décès causé par le terrorisme d’État ; la loi no 25.914, concernant les personnes nées pendant la privation de liberté de leur mère ou détenues avec le père ou la mère ; la loi no 26.564, portant extension des avantages prévus par les lois nos 24.043 et 24.411 ; et, enfin, la loi no 26.913, octroyant une pension à vie pour les anciens détenus et détenues.

235.Les procédures prévues par ces lois de réparation, confiées à la Direction des politiques de réparation du Secrétariat aux droits de l’homme, sont extrêmement faciles à introduire car elles sont gratuites et ne requièrent pas de représentation juridique ; de plus, les exigences en matière de preuve sont minimes et le principe favorable au demandeur est établi. En outre, les lois prévoient qu’il n’y a ni délai ni prescription.

236.Les sommes d’argent déterminées par les lois spéciales ont été fixées par le Congrès national, sur la base d’une estimation qui tient compte de l’ensemble des faits qui ont entraîné des dommages économiquement indemnisables, majorée pour les cas les plus graves (torture, usurpation d’identité, mort), ou des nécessités de la réadaptation, s’agissant de couvrir les dépenses régulières d’assistance clinique et psychologique.

237.L’Argentine s’est ainsi employée avec détermination à réparer les souffrances et les conséquences matérielles subies par les victimes de la répression et du terrorisme d’État, soit 32 027 personnes entre 1990 et juin 2020. Plus précisément, la loi no 24.043 a permis d’indemniser 12 939 personnes ; la loi no 24.411, 7 981 personnes ; la loi no 25.914, 4 435 personnes ; et la loi no 26.913, 6 672 personnes.

26. Mesures de réadaptation

238.Le Centre d’assistance aux victimes de violations des droits de l’homme Dr. Fernando Ulloa, qui relève du Secrétariat aux droits de l’homme et apporte un appui aux victimes de violations des droits de l’homme par une assistance directe et un accompagnement des personnes et de leur famille, a élargi son champ d’action ; en effet, il ne cible plus seulement les victimes du terrorisme d’État, mais fournit aussi une assistance exhaustive aux victimes d’autres atteintes aux droits de l’homme. De 2017 à 2020, une assistance psychothérapeutique interdisciplinaire a été apportée directement à 768 victimes de torture et à leurs proches, et des équipes sanitaires interdisciplinaires ont été formées et conseillées au niveau fédéral dans toutes les juridictions qui en ont fait la demande.

239.Le Centre Ulloa a également apporté son aide à 4 037 victimes et leur famille au niveau judiciaire, à la demande des acteurs de la procédure pénale (ministère public, juges et demandeurs).

240.Il convient de préciser que le Centre Ulloa propose aussi un accompagnement et une assistance aux victimes de la violence institutionnelle, dont la torture, et qu’il assure la formation et le renforcement des capacités des responsables de la santé mentale des différentes juridictions du pays.

Articles 15 et 16

27. Usage excessif de la force

241.L’usage raisonnable et proportionné de la force par les agents de la force publique est un pilier fondamental de l’action du Ministère de la sécurité.

242.Peu après son entrée en fonctions, en décembre 2019, le nouveau Gouvernement a abrogé l’arrêté no 956/2018, qui portait adoption du Règlement général relatif à l’usage des armes à feu par les membres des forces de sécurité fédérales et qui élargissait considérablement les circonstances permettant l’utilisation d’armes létales par les agents de la police et des forces de sécurité.

243.Il a aussi rétabli le Programme sur l’usage de la force et des armes à feu dans son arrêté no 377/2020 et mis en place un groupe de travail permanent réunissant les divers acteurs concernés, qui a été chargé d’évaluer toutes les circonstances dans lesquelles des membres des forces de sécurité fédérales font usage de la force et de leurs armes réglementaires.

244.Par son arrêté no 32/2021, le Gouvernement a créé un groupe de travail dans chacune des forces de sécurité fédérales, qui a été chargé de programmer des entraînements et du recyclage, selon le modèle opérationnel relatif à l’usage raisonnable de la force. Ces groupes de travail élaboreront un plan visant à garantir que tous les membres des forces policières et de sécurité fédérales suivront un recyclage dans le cadre du modèle opérationnel relatif à l’usage raisonnable de la force au cours des trois prochaines années.

245.Dans la province de Buenos Aires, le Ministère de la justice et des droits de l’homme élabore actuellement un nouveau protocole de principes sur l’usage réglementé de la force et la protection de la vie et de l’intégrité psychophysique dans les situations conflictuelles au Service pénitentiaire de Buenos Aires, que les agents pénitentiaires seront tenus d’appliquer dans toute situation conflictuelle concernant les détenus du Service pénitentiaire.

246.En ce qui concerne les cas particuliers recensés par le Comité, on retiendra que :

•Concernant l’affaire relative à la mort de Lucas Cabello, le procès s’est tenu devant le Tribunal oral en matière pénale et correctionnelle nº 1 qui, le 5 décembre 2019, a condamné l’agent Ricardo Ayala, membre de la police métropolitaine de l’époque, à une peine de seize ans de prison pour « tentative d’homicide aggravé, l’acte ayant été commis en abusant de la fonction policière et au moyen d’une arme à feu ». La peine a été assortie de l’interdiction de posséder ou de porter une arme, et de travailler dans le domaine de la sécurité pendant dix ans ;

•En ce qui concerne la procédure engagée au sujet de la disparition et de la mort de Santiago Maldonado dans le cadre de l’opération menée par la Gendarmerie nationale argentine, dans les premiers jours qui ont suivi la prise de fonctions du nouveau Gouvernement, la Ministre de la sécurité, Sabina Frederic, a ordonné à la Gendarmerie nationale de mener une enquête sur les opérations de dispersion menées par ladite force de sécurité dans la province de Chubut. Dans cette instruction, il était indiqué que le Ministère s’attachait à rechercher la vérité dans son aspect disciplinaire ou administratif, sans préjudice de l’activité du pouvoir judiciaire, dont l’indépendance était respectée, et que l’enquête disciplinaire visait à apporter des éléments permettant d’étudier l’affaire à des fins de formation, en mettant en évidence les procédures appropriées et en soulignant les erreurs à éviter.

247.Ainsi, l’enquête menée sous la responsabilité du directeur adjoint de la Gendarmerie (procédure administrative no 1/2020) a permis de recueillir et d’analyser des pièces justificatives, des enregistrements filmés et sonores, ainsi que des témoignages d’agents ayant participé aux opérations et de leurs chefs, dans trois dossiers totalisant environ 600 pages, à la différence de l’enquête purement formelle menée en 2017 (dossier KW7‑1012/02 du registre de la Agrupación XIV, de Chubut). Cette première enquête n’avait cherché qu’à consacrer l’impunité de ceux qui, grâce à la nouvelle enquête menée, se sont avérés être les responsables politiques et opérationnels de l’opération de dispersion du 1er août 2017.

248.La Gendarmerie a pu établir que ladite opération de dispersion n’était pas nécessaire ni prudente et qu’elle n’était pas non plus raisonnable ni urgente, et que son exécution ne pouvait s’expliquer que par les ordres et instructions verbales qui avaient été donnés par le chef de cabinet du Ministère de la sécurité de l’époque, Pablo Nocetti, et par les directives de la hiérarchie.

249.Il ressort aussi de l’enquête menée par la Gendarmerie que ces instructions visant l’usage de la force pour disperser les manifestants se fondaient sur le projet de protocole que la Ministre de l’époque, Patricia Bullrich, avait annoncé et rendu public le 17 février 2016, et qui n’a jamais été adopté ni doté d’une quelconque force normative. La particularité de ce projet de protocole résidait dans le fait qu’on y considérait les manifestations comme un flagrant délit, ce qui autorisait l’inculpation et l’arrestation de tous ceux qui y participaient.

250.L’enquête menée par la Gendarmerie met également en évidence la négligence et les fautes graves commises par les commandants qui se sont succédé à la tête de l’opération − et qui, le matin même des faits, se sont retirés du lieu, manquant de manière inexcusable à leurs responsabilités − ainsi que les fautes commises par le commandant principal, qui a finalement ordonné de procéder à la dispersion des manifestants au peu d’agents encore sur place, dont les hommes de l’escadron d’Esquel, alors que ces agents étaient peu préparés et ne disposaient pas des éléments nécessaires. Tout cela alors qu’un détachement mobile de la Gendarmerie était censé arriver en quelques heures, avec un personnel adéquat et réellement formé à la gestion des manifestations.

251.À la suite de ces constatations, le Ministère de la sécurité a déposé une plainte pénale pour déterminer la responsabilité de l’ancien chef de cabinet et les conséquences des ordres qu’il avait donnés, qui avaient obligé la Gendarmerie à agir en tant qu’organe auxiliaire de la justice et l’avaient poussée à prendre des mesures, avec sa hiérarchie institutionnelle de l’époque, dans le cadre de la procédure de flagrant délit, contrairement à ce qu’exigeait le protocole alors en vigueur (arrêté no 210/11). La plainte pénale visait aussi les commandants concernés.

252.Les chefs de l’opération de dispersion ont eux aussi été soumis à l’évaluation par les conseils de qualification, qui sont chargés d’évaluer les négligences graves et les erreurs inexcusables commises. Il n’a pas été possible de leur infliger une sanction disciplinaire car le temps écoulé depuis la conclusion de la première enquête de la Gendarmerie, en 2017, a entraîné la prescription.

253.La Gendarmerie a décidé d’incorporer l’étude de cette affaire dans ses programmes d’études et de formation de ses agents, et le Directeur national de l’institution a formulé un protocole d’action précis qui sera suivi par les futures opérations d’encadrement de manifestations, dans le respect des normes de sécurité démocratique et citoyenne, d’usage raisonnable de la force et des droits de l’homme.

254.D’autre part, dans le cadre de la procédure internationale engagée devant la Commission interaméricaine des droits de l’homme (plainte P-1834-19 « Sergio Andrés Maldonado »), l’État argentin − par l’intermédiaire du Ministère des affaires étrangères et du Secrétariat aux droits de l’homme − a proposé l’ouverture d’un dialogue avec les plaignants, conformément à sa politique traditionnelle de coopération avec les organes du système international de protection des droits de l’homme. Dans ce contexte, les parties à cette affaire s’efforcent de trouver le consensus nécessaire pour parvenir à un règlement à l’amiable.

255.En ce qui concerne les événements du 25 novembre 2017, dans lesquels Rafael Nahuel a trouvé la mort après une intervention de la Préfecture navale argentine, la Secrétaire adjointe du contrôle et de la transparence institutionnelle a ordonné une série de mesures dans l’enquête administrative no 24/17 ouverte par la Préfecture navale le 28 novembre 2017, qui visaient à garantir l’efficacité et l’objectivité de l’enquête et à progresser dans la détermination des responsabilités administratives des agents concernés. La Direction du contrôle et de la prévention de la violence institutionnelle suit attentivement la procédure et demande des mesures fondamentales afin de déterminer la responsabilité administrative des agents impliqués dans les événements.

256.Les procédures administratives menées au niveau de la Préfecture ne sont certes pas étroitement liées à l’évolution de la procédure judiciaire, mais il convient néanmoins d’intégrer dans cette dernière les progrès qui peuvent être obtenus par l’action administrative, car ils constituent le cadre dans lequel doit s’inscrire la responsabilité administrative des agents ayant participé aux événements.

257.Le 2 mars 2021, le juge fédéral suppléant de Bariloche a décidé d’accepter le Secrétariat aux droits de l’homme comme partie civile dans l’affaire relative à l’assassinat de Rafael Nahuel en 2017, et a élargi l’enquête en convoquant cinq des préfets actifs le jour du décès. En vertu de la décision qui le désigne partie civile, le Secrétariat aux droits de l’homme peut accéder au dossier judiciaire, demander des éléments de preuve, contrôler les moyens de preuve produits et en attente de production, et contester les décisions prises concernant le déroulement de l’enquête.

258.En ce qui concerne les événements survenus lors de la répression de la manifestation de la Journée de la femme qui a eu lieu le 8 mars 2017 dans la ville de Buenos Aires, le Bureau du Procureur chargé de la lutte contre la violence institutionnelle a ouvert une enquête préliminaire sur les allégations d’actes violents et injustifiés des forces de la police de la Ville autonome de Buenos Aires.

259.Des récits recueillis auprès des victimes, il ressort que plusieurs d’entre elles ont subi des fouilles humiliantes comprenant différentes formes de violence de genre et un traitement discriminatoire fondé sur l’identité de genre et l’orientation sexo-affective. En conséquence, en collaboration avec les spécialistes de la violence policière, l’Unité de la lutte contre la violence à l’égard des femmes (UFEM) a recueilli les témoignages des victimes et a contribué à l’élaboration de la plainte pénale, conformément aux normes internationales et nationales de protection des femmes et des dissidences, qui a ensuite donné lieu à l’ouverture d’une instruction (affaire no 22.765/17) actuellement en cours.

260.En ce qui concerne les faits survenus lors de la répression de la manifestation des enseignants à Buenos Aires, le 9 avril 2017, et sur la base des témoignages fournis par les Secrétaires de l’Union des travailleurs de l’État (UTE) et du syndicat des enseignants CTERA au siège du Bureau du Procureur chargé de la lutte contre la violence institutionnelle, l’enquête préliminaire no 6791 a été instruite aux fins de produire divers moyens de preuve concernant les faits.

261.À l’issue de l’enquête préliminaire, tous les moyens de preuve demandés (rapports sur les forces de sécurité présentes, caméras de sécurité installées sur les lieux, etc.) ayant été produits, le 29 juin 2017 le Bureau du Procureur chargé de la lutte contre la violence institutionnelle a officialisé la plainte pour que les faits fassent l’objet d’une enquête.

262.Concernant la répression des manifestations contre la réforme des retraites qui s’étaient tenues dans la ville de Buenos Aires en décembre 2017 à proximité du Congrès national, le Bureau du Procureur chargé de la lutte contre la violence institutionnelle a ouvert l’enquête préliminaire no 7829. Dans ce cadre, plusieurs plaintes ont été reçues le 14 décembre 2017 et ont ensuite été dûment transmises au Tribunal fédéral en matière pénale et correctionnelle no 12 de la Capitale fédérale, devant lequel les affaires nos 20270/2017 et 4412/2018 étaient instruites.

263.Le Bureau du Procureur a ouvert une enquête préliminaire pour déterminer les faits qui s’étaient produits le 18 décembre 2017. Dans ce contexte, il a recueilli les témoignages de nombreuses victimes et, une fois l’instruction achevée, a renvoyé l’enquête préliminaire au Tribunal fédéral en matière pénale et correctionnelle no 12, lorsqu’il a eu connaissance de l’existence d’une affaire en cours portant sur le même objet procédural.

264.Dans le cadre de cette affaire, il y a eu une demande partielle de renvoi devant le tribunal pour les accusés, un agent de la Police fédérale argentine et deux agents de la Police de la Ville autonome de Buenos Aires, pour des actes différents commis sur deux victimes distinctes. Le 12 octobre 2020, le Tribunal oral fédéral no 3 de la Capitale fédérale a condamné l’agent de la Police fédérale à trois ans de prison et à une interdiction d’exercer une fonction publique pendant six ans, l’ayant jugé pénalement responsable de blessures graves, aggravées par un abus de pouvoir en sa qualité de membre des forces de sécurité.

28.Protection de la société civile

265.Par un accord signé le 13 février 2020, il a été procédé à la création du Bureau du règlement extrajudiciaire des différends territoriaux avec les peuples autochtones, composé de représentants du Ministère de la justice et des droits de l’homme, du Ministère de l’environnement et du développement durable, du Ministère de la sécurité, de l’Institut national des affaires autochtones et de l’Administration des parcs nationaux.

266.Le Bureau a pour mission d’intervenir dans l’analyse et le règlement des différends en recherchant des solutions consensuelles entre les acteurs concernés, fondées sur le respect total des droits des peuples autochtones à l’accès à la terre et à un mode de vie durable. Ce mécanisme peut être déclenché à la demande de l’un des organismes composant le Bureau, des communautés autochtones concernées, ou d’un ou plusieurs gouvernements provinciaux, qui sont invités à participer à ses activités.

267.L’intervention du Bureau a été sollicitée dans le cadre de faits de violence commis à l’encontre de membres de la communauté mapuche Lof Che Buenuleo, à San Carlos de Bariloche. En avril et mai 2020, le Bureau s’est rendu en visite sur le territoire de la communauté et une réunion a eu lieu entre les autorités nationales, provinciales et communautaires, qui ont signé un protocole d’accord dans lequel elles ont établi des principes qui devraient permettre de progresser dans le règlement du différend territorial et de garantir la protection de la communauté.

268.Il convient aussi de noter que le projet de loi générale contre la violence institutionnelle susmentionné, qui figure à l’annexe II, comprend un chapitre consacré aux « Règles minimales relatives à l’intervention des forces de police et de sécurité dans les manifestations publiques ». Il y est établi que l’objectif des forces de police et de sécurité agissant lors de rassemblements publics ou de manifestations est de protéger les droits des participants. Il y est aussi précisé que les manifestants ne peuvent être harcelés, arrêtés, détenus, transférés et ne peuvent être soumis à toute autre restriction de leurs droits au seul motif qu’ils exercent leurs droits à la liberté d’expression, de manifestation et de revendication, et qu’il est expressément interdit aux agents encadrant des rassemblements ou des manifestations de porter des armes létales, qu’ils soient ou non en contact direct avec les manifestants.

IV.Autres questions

29.Mesures prises dans le cadre de la pandémie de COVID‑19

269.Le Gouvernement national a adopté une série de mesures visant à protéger la vie et la santé de la population, notamment en renforçant le système de santé, et a mis en œuvre une série d’initiatives sociales, économiques et fiscales visant à atténuer les difficultés provoquées par la pandémie.

270.La Secrétaire adjointe à la protection et aux relations internationales dans le domaine des droits de l’homme, qui relève du Secrétariat aux droits de l’homme, a élaboré un document intitulé « Mesures de l’État argentin en faveur de la protection des droits de l’homme pendant la pandémie de COVID‑19 », qui reprend les principales mesures adoptées par le Gouvernement national et les détaille en fonction du groupe vulnérable visé, conformément aux principales recommandations émises par les organismes internationaux pour la protection des droits de l’homme pendant la pandémie.

271.Le document est disponible sur le lien suivant : https://www.argentina.gob.ar/noticias/medidas-del-estado-argentino-para-la-proteccion-de-los-derechos-humanos-durante-la-pandemia.

272.Outre les mesures qui y sont prévues, face à la persistance de la pandémie et dans un contexte d’augmentation des cas, de nouvelles mesures de santé publique ont été prises. C’est ainsi que les mesures d’appui dans les domaines sanitaire, économique et social mises en œuvre depuis le début de la pandémie ont été prolongées et que de nouvelles mesures ont été adoptées, notamment le Programme stratégique de vaccination contre la COVID‑19 en République argentine, qui établit que les vaccins sont fournis par l’État national. Le programme de vaccination est mis en œuvre par étapes, gratuitement et sur la base du volontariat, les vaccins étant distribués à toutes les juridictions aux fins de l’immunisation de la population cible (population prioritaire et autres populations).