CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.

GÉNÉRALE

CERD/C/64/CO/2

28 avril 2004

FRANÇAIS

Original: ANGLAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DELA DISCRIMINATION RACIALESoixante‑quatrième session23 février‑12 mars 2004

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

BRÉSIL

1.Le Comité a examiné les quatorzième à dix‑septième rapports périodiques du Brésil, qui étaient attendus les 4 janvier 1996, 1998, 2000 et 2002 respectivement, soumis en un seul document (CERD/C/431/Add.8), à ses 1632e et 1633e séances (CERD/C/SR.1632 et 1633), tenues les 5 et 8 mars 2004. À sa 1641e séance, tenue le 12 mars 2004, le Comité a adopté les conclusions suivantes.

A. Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport soumis par l’État partie et se félicite de l’occasion qui lui a été donnée d’engager un dialogue franc et constructif avec l’État partie.

3.Tout en notant que le rapport n’est pas pleinement conforme à ses principes directeurs en la matière, le Comité accueille avec satisfaction son approche autocritique et le fait que l’État partie y a traité la plupart des sujets de préoccupation et des recommandations figurant dans les précédentes observations finales du Comité (CERD/C/304/Add.11).

B. Aspects positifs

4.Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption, en 2002, du Programme national d’action positive, mécanisme important pour l’application de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, et du nouveau Programme national pour les droits de l’homme.

5.Le Comité se félicite de l’entrée en vigueur, en janvier 2003, du nouveau Code civil, qui est conforme à la Constitution de 1988 et élimine les restrictions discriminatoires touchant l’exercice des droits civils des populations autochtones, présentes dans l’ancien Code civil de 1916.

6.Le Comité prend note de l’adoption de la loi no 9459 du 13 mai 1997, portant modification de la loi no 7716 de 1989, dont elle élargit la portée aux infractions découlant non plus seulement d’une discrimination fondée sur la race ou la couleur, mais aussi d’une discrimination fondée sur l’ethnie, la religion ou la nationalité.

7.Le Comité prend note de la création d’institutions spécialisées dans la lutte contre la discrimination raciale, qui témoigne de l’engagement de l’État partie dans ce domaine, et notamment le Conseil national de la lutte contre la discrimination, créé en 2001, qui deviendra le Conseil national de la promotion de l’égalité raciale en 2004 et le Secrétariat spécial pour la promotion de l’égalité raciale, créé en 2003.

8.Le Comité se félicite que l’État partie ait fait en 2002 la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention.

9.Le Comité prend note avec satisfaction de l’entrée en vigueur, en août 2003, de la Convention no 169 de l’OIT concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants.

10.Le Comité prend note avec satisfaction de l’invitation permanente adressée par le Président à tous les rapporteurs thématiques de la Commission des droits de l’homme à se rendre à tout moment au Brésil.

11.Le Comité note en outre avec satisfaction que les organisations non gouvernementales ont été consultées pour la préparation du rapport.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

12.Le Comité réitère la préoccupation exprimée dans ses précédentes observations finales (CERD/C/304/Add.11) au sujet de la persistance d’inégalités structurelles profondes dont pâtissent les communautés noires et métisses et les communautés autochtones.

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour combattre la discrimination raciale et éliminer les inégalités structurelles et de fournir des informations sur l’application des mesures qui ont été adoptées, en particulier celles prévues dans le deuxième Programme national pour les droits de l’homme et le Programme national d’action.

13.Le Comité est préoccupé par la ségrégation raciale de fait à laquelle sont confrontées certaines populations noires, métisses et autochtones dans les zones urbaines et rurales, notamment celles appelées communément «favelas», et déplore que l’État partie n’ait pas fourni suffisamment de renseignements à ce sujet.

Compte tenu de sa recommandation générale XIX, le Comité rappelle à l’État partie qu’une situation de ségrégation raciale peut également survenir sans que les autorités en aient pris l’initiative ou y contribuent directement et il invite l’État partie à continuer de contrôler toutes les tendances susceptibles de provoquer la ségrégation raciale ou ethnique et à œuvrer pour éliminer toutes les conséquences négatives qui en découlent. Il invite en outre l’État partie à lui fournir des renseignements sur les mesures qu’il a prises pour remédier à cette situation.

14.Le Comité prend note de ce qu’un nouveau statut des communautés autochtones (Estatuto da Sociedades Indígenas) est en cours d’élaboration au Congrès national.

Le Comité recommande à l’État partie de fournir des informations actualisées à ce sujet.

15.Tout en prenant note de l’objectif que s’est fixé l’État partie d’achever le processus de délimitation des terres autochtones d’ici à 2007, mesure qui lui paraît importante pour assurer le respect des droits des peuples autochtones, le Comité demeure préoccupé par le fait que la possession et l’utilisation effectives des terres et la jouissance des ressources des populations autochtones sont toujours menacées et entravées par des actes récurrents d’agression contre ces populations.

Compte tenu de la recommandation générale XXIII concernant les droits des populations autochtones, le Comité recommande à l’État partie d’achever le processus de délimitation des terres d’ici à 2007. Il recommande en outre à l’État partie d’adopter de toute urgence des mesures visant à reconnaître et protéger, dans la pratique, le droit des populations autochtones de posséder, de mettre en valeur, de contrôler et d’utiliser leurs terres, leurs territoires et leurs ressources. À cet égard, le Comité invite l’État partie à présenter des informations sur l’issue de conflits d’intérêts concernant des terres et ressources des peuples autochtones, et en particulier des cas dans lesquels des groupes autochtones ont été déplacés de leurs terres.

16.Le Comité est préoccupé par le fait que seul un petit nombre de communautés quilombos ont été officiellement reconnues comme telles et qu’un nombre plus petit encore ont obtenu des titres de propriété permanents sur leurs terres.

Le Comité recommande à l’État partie d’accélérer le processus de recensement des communautés et terres quilombos et de distribution des titres de propriété les concernant à toutes ces communautés.

17.Le Comité est préoccupé par les allégations de discrimination à l’encontre des Tziganes en matière d’enregistrement des naissances et d’accès de leurs enfants à l’éducation.

Compte tenu de la recommandation générale XXVII sur la discrimination à l’encontre des Roms (Tziganes), le Comité invite l’État partie à fournir des précisions à ce sujet.

18.Le Comité note avec préoccupation qu’en dépit de multiples infractions liées à la discrimination, les dispositions pertinentes de la législation nationale visant les crimes racistes ne sont, semble‑t‑il, guère appliquées.

Le Comité recommande à l’État partie de fournir des renseignements statistiques sur les poursuites engagées et les peines prononcées pour des infractions se rapportant à des crimes racistes et pour lesquels les dispositions pertinentes du droit interne en vigueur ont été appliquées. Il recommande en outre à l’État partie d’améliorer les programmes de sensibilisation et de formation concernant les crimes racistes commis par des membres de l’administration judiciaire, y compris les juges, les procureurs, les avocats et les agents de la force publique, et les mesures dont ils relèvent.

19.Le Comité est inquiet de l’augmentation du nombre d’organisations racistes telles que des groupes néonazis et de la diffusion de la propagande raciste sur Internet.

Le Comité recommande à l’État partie d’apporter des précisions sur le contenu et l’application des dispositions pertinentes du droit interne qui concernent l’existence et l’activité des organisations racistes et sur celles qui interdisent la propagande raciste sur Internet.

20.Le Comité réitère sa préoccupation, exprimée dans ses précédentes observations finales, au sujet du fait que les citoyens illettrés, que l’on trouve surtout parmi les groupes autochtones, noirs ou métis, n’ont pas le droit d’être élus à des fonctions publiques.

En application de l’article 5 c) de la Convention, le Comité recommande à l’État partie d’adopter les mesures nécessaires pour combattre l’illettrisme et d’assurer à tous les citoyens la jouissance de tous les droits politiques, en particulier le droit d’être élus à des fonctions publiques.

21.Le Comité note que le rapport ne contient pas suffisamment de renseignements concernant les droits culturels des personnes appartenant à des minorités, eu égard à l’article 5 de la Convention. Il ne contient notamment aucune référence au droit des groupes minoritaires et ethniques de recevoir un enseignement dans leur propre langue.

Le Comité recommande à l’État partie de fournir un complément d’information dans ce domaine.

22.Le Comité prend note de l’intention de l’Institut brésilien de géographie et de statistique (IBGE) de modifier les méthodes qu’il utilise pour le classement des différentes catégories de population.

Le Comité invite l’État partie à fournir des informations actualisées sur la situation dans ce domaine.

23.Le Comité encourage l’État partie à continuer de consulter des organisations de la société civile qui participent à la lutte contre la discrimination raciale lors de l’élaboration de ses rapports périodiques.

24.Le Comité demande instamment à l’État partie de ratifier l’amendement au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adopté le 15 janvier 1992 à la quatorzième réunion des États parties à la Convention et approuvé par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, il renvoie à la résolution 57/194 de l’Assemblée générale, de 2002, dans laquelle l’Asssemblée générale a demandé instamment aux États parties de hâter leurs procédures internes de ratification de l’amendement et d’informer par écrit le Secrétaire général dans les meilleurs délais de leur acceptation de cet amendement. L’Assemblée générale a renouvelé cette demande dans sa résolution 58/160.

25.Le Comité recommande à l’État partie de diffuser largement des informations sur les recours internes disponibles contre les actes de discrimination raciale, sur les voies légales permettant d’obtenir un dédommagement en cas de discrimination et sur la procédure de présentation de plaintes individuelles prévue par l’article 14 de la Convention.

26.Le Comité recommande à l’État partie de mettre à la disposition du grand public ses rapports périodiques dès leur soumission et de faire connaître de la même manière les conclusions correspondantes du Comité.

27.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses dix‑huitième, dix‑neuvième et vingtième rapports périodiques en un seul document constituant un rapport actualisé attendu le 4 janvier 2008, et d’y traiter tous les points abordés dans les présentes conclusions.

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