Observations finales concernant le septième rapport périodique du Congo *

Le Comité a examiné le septième rapport périodique du Congo (CEDAW/C/COG/7) à ses 1633e et 1634e séances (voir CEDAW/C/SR.1633 et CEDAW/C/SR.1634), le 24 octobre 2018. La liste de points et de questions établie par le Comité figure dans CEDAW/C/COG/Q/7 et les réponses de l’État partie, dans CEDAW/C/COG/Q/7/Add.1.

A.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le septième rapport périodique de l’État partie. Il le remercie des réponses écrites apportées aux points et questions soulevés par le groupe de travail d’avant-session ainsi que de l’exposé oral de sa délégation et des éclaircissements complémentaires donnés en réponse aux questions posées oralement par le Comité au cours du dialogue.

Le Comité remercie l’État partie d’avoir envoyé une délégation de haut niveau placée sous la conduite de la Ministre de la promotion de la femme et de l’intégration de la femme au développement, Mme Inès Nefer Bertille Ingani. Cette délégation comprenait aussi des représentants du Ministère de la promotion de la femme et de l’intégration de la femme au développement, du Ministère de la justice et des droits humains, du cabinet du Premier Ministre, du Ministère de la fonction publique, de la réforme de l’État, du travail et de la sécurité sociale, du Ministère de l’enseignement primaire, secondaire et de l’alphabétisation et de la Mission permanente du Congo auprès de l’Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève.

B.Aspects positifs

Le Comité salue les progrès accomplis depuis l’examen en 2012 du sixième rapport périodique de l’État partie (CEDAW/C/COG/CO/6) dans la mise en œuvre des réformes législatives, en particulier l’adoption de :

* Adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session (22 octobre-9 novembre 2018) .

a)La loi no 21-2018 du 13 juin 2018 fixant les règles d’occupation et d’acquisition des terres et terrains ;

b)La loi no 40-2014 du 1er septembre 2014 modifiant et complétant certaines dispositions de la loi électorale.

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie en vue d’améliorer son cadre institutionnel et politique, le but étant d’accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et de promouvoir l’égalité des sexes, notamment avec :

a)Le plan d’action national de la résolution 1325 (2000) (8 mai 2018) ;

b)Le programme national de promotion du leadership féminin dans la vie politique et publique, 2017-2021 (21 octobre 2016) ;

c)Le plan d’action pour l’amélioration de la protection des droits des femmes vivant avec le VIH, 2017-2021 (8 décembre 2016) ;

d)Le Conseil consultatif de la femme créé conformément aux articles 232 et 233 de la Constitution du 6 novembre 2015 ;

e)L’article 17 de la Constitution du 6 novembre 2015, qui dispose que la femme a les mêmes droits que l’homme et que la loi garantit la parité et assure la promotion ainsi que la représentativité de la femme à toutes les fonctions politiques, électives et administratives.

Le Comité se félicite de ce que, durant la période écoulée depuis l’examen du précédent rapport, l’État partie ait ratifié les instruments internationaux et régionaux ci-après, ou y ait adhéré :

a)Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (2017) ;

b)Convention relative aux droits des personnes handicapées et son protocole facultatif (2014) ;

c)Convention de l’Union africaine sur la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique (2014).

Objectifs de développement durable

Le Comité se félicite de l’appui apporté par la communauté internationale aux objectifs de développement durable et invite l’État partie à réaliser l’égalité de jure (dans la loi) et de facto (effective) des femmes et des hommes, conformément aux dispositions de la Convention, dans tous les aspects de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Il rappelle l’importance de l’objectif 5 et de la prise en compte des principes d’égalité et de non-discrimination dans la réalisation des 17 objectifs. Il exhorte l’État partie à reconnaître le rôle moteur des femmes dans le développement durable du pays et à adopter des politiques et stratégies en conséquence.

C.Parlement

Le Comité souligne le rôle essentiel du pouvoir législatif s ’ agissant de garantir la pleine mise en œuvre de la Convention (voir A/65/38 , deuxième partie, annexe VI). Il invite le Parlement, dans le cadre de son mandat, à prendre les mesures nécessaires en vue de mettre en œuvre les présentes observations finales avant la soumission du prochain rapport périodique, en application de la Convention.

D.Facteurs et difficultés empêchant la mise en œuvre effective de la Convention

Le Comité observe que le conflit dans le département du Pool a gravement entravé les efforts déployés par l’État partie pour s’acquitter des obligations que lui impose la Convention. Ce conflit a touché environ 180 000 personnes et en a fait fuir quelque 130 000. Le Comité rappelle en outre que la chute des cours du pétrole brut trois ans plus tôt a entraîné une instabilité financière et une réduction des dépenses publiques. Il est préoccupé par le fait que la discrimination à l’égard des femmes, plus particulièrement les stéréotypes fondés sur le genre, est profondément ancrée dans l’État partie, que ce soit dans les comportements traditionnels, les pratiques institutionnelles et la société dans son ensemble, qu’elle prive les femmes de la jouissance de leurs droits sur un pied d’égalité avec les hommes et qu’elle contribue aux niveaux élevés de violence dont sont victimes les femmes et les filles.

E.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Cadre législatif

Le Comité est préoccupé par la lenteur extrême du processus d’adoption des huit codes révisés, en particulier le Code civil, le Code des personnes et de la famille ainsi que le Code pénal. Ces codes, dont certains remontent à l’époque coloniale, continuent de faire sérieusement obstacle à la mise en œuvre de la Convention et d’empêcher les femmes d’exercer pleinement leurs droits. Le Comité constate avec préoccupation que, bien que l’État partie ait bénéficié de l’appui de l’Union européenne et que les projets aient été soumis au Ministère de la justice il y a deux ans, ces derniers n’ont toujours pas été transmis au Parlement et doivent encore faire l’objet de consultations approfondies. Le Comité prend note de l’assurance donnée par la délégation que les codes révisés seront adoptés avant la fin de 2018, mais regrette l’absence de calendrier précis, concret et réaliste pour leur adoption.

Conformément à sa recommandation générale n o 28 (2010) concernant les obligations fondamentales des États parties découlant de l ’ article 2 de la Convention, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accorder la priorité à son processus de réforme législative et de fixer un calendrier précis concernant l ’ établissement de la version finale et l ’ adoption des huit projets de codes révisés, en particulier le Code civil, le Code des personnes et de la famille et le Code pénal, afin de garantir les droits des femmes.

Définition de la discrimination à l’égard des femmes

Le Comité prend note de l’article 17 de la Constitution, en date du6 novembre 2015, qui garantit aux femmes l’égalité des droits avec les hommes. Il s’inquiète toutefois de l’absence de définition de la discrimination englobant toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes dans tous les domaines de l’activité humaine.

Le Comité réitère ses précédentes recommandations (voir CEDAW/C/COG/CO/6 , par. 14) et recommande à l ’ État partie d ’ adopter une définition globale de la discrimination à l ’ égard des femmes conformément à l ’ article premier de la Convention, couvrant tous les motifs de discrimination prohibés, qu ’ il s ’ agisse de discrimination directe ou indirecte dans la vie publique et privée, et les formes de discrimination croisées.

Accès à la justice et systèmes de justice traditionnels

Le Comité prend note des campagnes de sensibilisation menées par l’État partie concernant la primauté du droit écrit sur le droit coutumier. Il prend également note des mesures visant à rénover les locaux des tribunaux, recruter un plus grand nombre de juges, mettre un terme à la corruption, éliminer les frais cachés et faire venir les audiences foraines dans les régions reculées. Le Comité demeure néanmoins préoccupé par :

a)Le recours exclusif aux tribunaux traditionnels qui persiste dans de nombreuses régions et, qui se traduit souvent par des décisions discriminatoires à l’égard des femmes et des filles ;

b)La faible connaissance des femmes et des filles des droits que leur confère la Convention ;

c)Le fait que l’accès des femmes à la justice est entravé par des facteurs géographiques et économiques ;

d)L’absence de programme d’aide juridictionnelle gratuite ;

e)La corruption généralisée et le manque d’indépendance de la justice.

Conformément à sa recommandation générale n ° 33 (2015) sur l ’ accès des femmes à la justice, le Comité rappelle l ’ obligation de l ’ État partie de veiller à ce que les droits des femmes soient protégés contre les violations commises par toutes les composantes des mécanismes de justice pluriels. Il recommande à l ’ État partie  :

a) De poursuivre le développement de l ’ appareil judiciaire afin de doter chaque région d ’ un tribunal de grande instance, et d ’ engager un processus de réforme visant à créer une structure unique et unifiée sur l ’ ensemble du territoire, conforme aux dispositions de la Convention ;

b) De mieux informer les femmes et les filles de leurs droits et des moyens de les faire valoir, notamment en renforçant la coopération avec les organisations de la société civile ;

c) D ’ accroître la couverture de l ’ appareil judiciaire, notamment en augmentant les ressources humaines, techniques et financières consacrées aux audiences foraines, et supprimer tous les frais directs et indirects qui entravent l ’ accès des femmes à la justice ;

d) De réviser la loi n ° 001/84 du 20 janvier 1984 portant réorganisation de l ’ assistance judiciaire et veiller à ce que les femmes manquant de moyens aient accès à une aide gratuite afin de pouvoir faire valoir leurs droits ;

e) D ’ enquêter sur les affaires de corruption de membres du corps judiciaire et de poursuivre et dûment sanctionner leurs auteurs, et garantir l ’ indépendance du pouvoir judiciaire.

Mécanisme national de promotion des femmes

Le Comité se félicite de la création du Conseil consultatif de la femme, qui émet des avis sur les questions liées à la condition des femmes et fait au Gouvernement des propositions visant à promouvoir l’intégration des femmes au développement. Il est toutefois préoccupé par le retard pris dans l’application de la politique nationale en matière de genre deuxième génération et du plan d’action en vue de sa mise en œuvre (2017-2021). Le Comité s’inquiète également de ce que le Ministère de la promotion de la femme et de l’intégration de la femme au développement rencontre de sérieuses difficultés budgétaires, que l’Observatoire genre n’est pas opérationnel et qu’il n’existe pas de coordination entre les parties prenantes concernant les politiques relatives au genre.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ accélérer l ’ application de la politique nationale en matière de genre deuxième génération et du plan d ’ action en vue de sa mise en œuvre (2017-2021 )  ;

b) D ’ allouer des ressources financières, techniques et humaines suffisantes pour assurer le bon fonctionnement du Ministère de la promotion de la femme et de l ’ intégration de la femme au développement et veiller à ce que l ’ Observatoire genre soit opérationnel. L ’ État partie devrait également faire en sorte que toutes les parties prenantes coordonnent l ’ action qu ’ elles mènent pour assurer l ’ application des politiques et mesures relatives au genre.

Institution nationale de défense des droits de l’homme

Le Comité prend note du projet de loi modifiant et complétant certaines dispositions de la loi n° 5-2003 du 18 janvier 2003 définissant les attributions, l’organisation et le fonctionnement de la Commission nationale des droits de l’homme. Il demeure toutefois préoccupé par le fait que, bien que l’État partie se soit engagé lors de l’examen précédent à mettre la Commission en conformité avec les Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris), rien n’indique que des mesures aient été prises en ce sens. Le Comité s’inquiète particulièrement de la faible représentation des femmes au sein de la Commission, du processus de sélection et de nomination de ses membres, de son indépendance et de son manque de ressources financières.

Le Comité recommande à l ’ État partie de renforcer l ’ indépendance, l ’ efficacité et la visibilité de l ’ institution nationale de défense des droits de l ’ homme, conformément aux Principes de Paris, et de la doter de ressources humaines et financières suffisantes.

Organisations de la société civile et défenseures des droits de l’homme

Le Comité se félicite de la mise en place d’un cadre d’échanges entre les membres des organisations de la société civile et les représentants du Gouvernement de l’État partie. Il est toutefois préoccupé par les informations qu’il a reçues et selon lesquelles les défenseures des droits de l’homme, en particulier celles qui s’occupent des questions ayant trait à l’attribution des terres et terrains, à l’extraction des ressources naturelles et à la lutte contre la corruption, font souvent l’objet d’actes d’intimidation, de harcèlement et de menaces. Le Comité s’inquiète aussi du fait que le cadre législatif, notamment la Constitution et la loi de 1901 relative au contrat d’association, n’offre pas une protection juridique suffisante aux défenseures des droits de l’homme.

Le Comité invite l ’ État partie  :

a) À prendre et mettre en œuvre sans retard des mesures efficaces, notamment des lois, pour protéger les défenseures des droits de l ’ homme  ;

b) À enquêter sérieusement sur tous les cas d ’ intimidation, de harcèlement et de menaces visant des défenseures des droits de l ’ homme, à poursuivre et à punir comme il convient les auteurs de tels actes et à offrir des recours effectifs aux victimes  ;

c) À permettre aux défenseures des droits de l ’ homme de prendre part librement aux affaires publiques, notamment lorsqu ’ il s ’ agit des questions liées à la gestion et à la surveillance des ressources naturelles.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité note avec préoccupation que les femmes continuent d’être sous-représentées dans tous les domaines de la vie publique et privée et que les agents de l’État partie ne comprennent pas la nature, la portée et la nécessité des mesures temporaires spéciales visant à accélérer l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.

Conformément aux dispositions du paragraphe  1 de l ’ article 4 de la Convention et à sa recommandation générale n o 25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales, le Comité recommande à l ’ État partie de fixer des objectifs assortis de délais et de consacrer des ressources suffisantes à la mise en œuvre de mesures temporaires spéciales, telles que l ’ établissement de quotas et d ’ autres initiatives, accompagnées de sanctions en cas de non-respect, dans le but d ’ instaurer une égalité réelle entre les femmes et les hommes dans tous les domaines visés par la Convention où les femmes sont sous-représentées ou défavorisées.

Stéréotypes et pratiques préjudiciables

Le Comité se félicite des mesures prises par l’État partie pour lutter contre les stéréotypes discriminatoires et les pratiques préjudiciables aux femmes et aux filles, notamment l’intensification du travail de sensibilisation et la suppression, dans les manuels scolaires, des stéréotypes discriminatoires à l’égard des femmes. Il demeure toutefois préoccupé par le fait que :

a)Des pratiques préjudiciables et des stéréotypes sexistes discriminatoires persistent à tous les niveaux de la société dans toutes les régions de l’État partie et que 27 % des femmes sont mariées avant l’âge de 18 ans ;

b)Les mutilations génitales féminines sont très répandues, en particulier parmi certains groupes religieux minoritaires, et aucune loi n’interdit cette pratique ;

c)La polygamie et le paiement d’une dot continuent d’être largement pratiqués et ne sont pas interdits par la loi.

Rappelant la recommandation générale/observation générale conjointe n o 31 du Comité pour l ’ élimination de la discrimination à l ’ égard des femmes et n o 18 du Comité des droits de l ’ enfant (2014) sur les pratiques préjudiciables, et conformément à la cible 5.3 des objectifs de développement durable consistant à éliminer toutes les pratiques préjudiciables, le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ adopter et d ’ appliquer des mesures globales pour modifier et transformer les stéréotypes discriminatoires concernant le rôle et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et à tous les niveaux de la société, et pour éliminer les stéréotypes sexistes  ;

b) D ’ adopter une législation interdisant les pratiques préjudiciables, telles que les mariages forcés, les mariages d ’ enfants et les mutilations génitales féminines, et punir comme il convient les auteurs de ces pratiques  ;

c) De mener régulièrement des campagnes de sensibilisation à l ’ intention du grand public, en particulier des chefs de communautés et personnalités religieuses, sur le caractère criminel des pratiques préjudiciables et leurs effets néfastes sur les droits des femmes  ;

d) De dispenser une formation systématique aux juges, aux procureurs, aux juristes, aux responsables de l ’ application des lois et au personnel médical sur la stricte application des dispositions du droit pénal pour réprimer les mariages d ’ enfants, les mariages forcés, les mutilations génitales féminines et le lévirat  ;

e) De prendre des mesure concrètes, notamment législatives et politiques, pour mettre fin à la polygamie et au paiement de la dot.

Violence à l’égard des femmes fondée sur le genre

Le Comité se félicite de la mise en place d’une permanence téléphonique permettant aux victimes et aux témoins d’actes de violence fondée sur le genre de contacter la police anonymement. Il se félicite également du projet qu’a l’État partie de recueillir, en collaboration avec l’ONU, des données sur ce type de violence, ainsi que des mesures prises pour renforcer les capacités de la police. Il est toutefois préoccupé par l’ampleur du phénomène de la violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre, notamment la violence domestique, et en particulier par :

a)L’absence de données fiables, ventilées par âge et par relation entre la victime et l’auteur, sur la violence fondée sur le genre et le harcèlement sexuel, tant à l’école qu’au travail ;

b)Le retard pris dans l’adoption du projet de loi et du projet de stratégie contre la violence fondée sur le genre ;

c)Le faible nombre de poursuites engagées, la clémence des peines prononcées à l’encontre des auteurs, et le fait que les femmes et les filles victimes de violence fondée sur le genre n’obtiennent pas réparation ;

d)L’insuffisance des ressources allouées à la prévention de la violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre et le manque de centres d’accueil adéquats ;

e)L’absence d’incrimination du viol conjugal.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De renforcer encore les efforts déployés par l ’ Institut national de statistique en vue d ’ établir un système national efficace de collecte de données, ventilées par âge et par relation entre la victime et l ’ auteur, sur la violence fondée sur le genre et le harcèlement sexuel dont les femmes et les filles sont victimes, tant à l ’ école qu ’ au travail ;

b) D ’ accélérer l ’ adoption du projet de loi et du projet de stratégie contre la violence fondée sur le genre  ;

c) De veiller à ce que les allégations de violence à l ’ égard d ’ une femme, y compris les allégations de violence familiale, donnent lieu à une enquête et à des poursuites, les auteurs soient dûment punis et les victimes bénéficient d ’ une réparation appropriée, notamment sous la forme d ’ une indemnisation ;

d) D ’ allouer des ressources suffisantes à la prévention de la violence à l ’ égard des femmes et des filles fondée sur le genre et de créer des centres d ’ accueil supplémentaires pour les victimes ;

e) De veiller à ce que le code pénal et le code de procédure pénale révisés érigent le viol conjugal en infraction distincte et que la définition du viol couvre tout acte sexuel non consenti.

Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles un grand nombre de femmes ont fait l’objet de violence sexuelle pendant le conflit dont le département du Pool a été le théâtre entre avril 2016 et décembre 2017. Il prend note des mesures prises par l’État partie pour créer un centre d’aide juridique et fournir une assistance juridique et un soutien psychologique aux victimes. Il est toutefois préoccupé par le fait que les accusations de violence sexuelle et fondée sur le genre généralisée n’ont pas donné lieu à des enquêtes.

Dans le droit fil de sa recommandation générale n o  30 (2013) sur les femmes dans la prévention des conflits, les conflits et les situations d ’ après conflit, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ enquêter sur les allégations de violations des droits de l ’ homme visant les forces de sécurité et les groupes armés, et en particulier sur les violences qui auraient été commises contre des femmes et des filles pendant le conflit dont le département du Pool a été le théâtre entre avril 2016 et décembre 2017. Il recommande également à l ’ État partie de poursuivre les auteurs présumés de ces actes, de punir comme il convient les coupables et d ’ offrir aux victimes une réparation adéquate.

Traite des personnes et exploitation de la prostitution

Le Comité est préoccupé par le fait que l’État partie est un pays d’origine, de transit et de destination des victimes de la traite des personnes. Il s’inquiète en particulier :

a)De l’absence de données sur le nombre de victimes de la traite des personnes et le nombre d’enquêtes, de poursuites et de condamnations auxquelles les cas de traite des personnes donnent lieu ;

b)Du faible taux de poursuites et de condamnations et de l’absence de mécanismes permettant d’identifier les victimes de la traite des personnes et de les orienter vers les services appropriés ;

c)Du fait que le projet de loi sur la traite des personnes, établi en 2012 et validé en 2013, n’a pas été adopté ;

d)Du fait que, malgré l’adoption du décret no 2012-171 du 12 mars 2012 portant ratification du Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, l’État partie n’a pas déposé l’instrument de ratification auprès du Secrétaire général.

Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur l ’ objectif de développement durable 5.2, qui consiste à éliminer de la vie publique et de la vie privée toutes les formes de violence faites aux femmes et aux filles, y compris la traite des personnes et l ’ exploitation sexuelle et d ’ autres types d ’ exploitation, et recommande à l ’ État partie :

a) De r ecueillir systématiquement des données ventilées sur le nombre de victimes de la traite des personnes et le nombre d ’ enquêtes, de poursuites et de condamnations auxquels ces pratiques donnent lieu ;

b) D ’ e nquêter sur les cas de traite des personnes, en particulier la traite des femmes et des filles, de poursuivre et de punir comme il convient les auteurs et de fournir une protection et une réparation adéquates aux femmes et aux filles qui en sont victimes ;

c) D ’ accélérer l ’ adoption du projet de loi sur la traite des personnes et de veiller à ce qu ’ il soit conforme aux dispositions de la Convention ;

d) De déposer l ’ instrument de ratification du Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, afin que ce texte soit véritablement ratifié.

Le Comité constate avec préoccupation que la pauvreté continue de contraindre nombre de femmes et de jeunes filles à se prostituer, en particulier dans les villes de Brazzaville et Pointe-Noire. Il est en outre préoccupé par le fait qu’il n’existe pas suffisamment de programmes destinés à aider les femmes et les filles qui souhaitent renoncer à la prostitution et que les programmes existants ne sont pas dûment financés.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De s ’ attaquer aux causes profondes de l ’ exploitation de la prostitution des femmes et des filles en proposant des formations à celles qui sont à risque et en leur offrant d ’ autres moyens de gagner leur vie ;

b) De concevoir et de mettre en œuvre des programmes dûment financés d ’ aide aux femmes et aux filles qui souhaitent renoncer à la prostitution.

Participation à la vie politique et publique

Le Comité se félicite que la loi électorale ait été modifiée de sorte que le quota de candidates aux élections législatives et municipales soit porté de 15 % à 30 %. Il se félicite également de l’augmentation du nombre de femmes dans les ministères et dans le corps diplomatique. Néanmoins, il demeure préoccupé par le fait que les femmes continuent d’être sous-représentées aux postes de décision dans tous les secteurs, notamment dans les organes dont les membres sont élus ou nommés. De surcroît, il s’inquiète du retard pris dans l’adoption du projet de loi sur la parité.

Dans le droit fil de sa recommandation générale n o  23 (1997) sur les femmes dans la vie politique et publique, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De modifier la loi électorale pour interdire la présentation de listes de candidats ne respectant pas le nouveau quota de 30 % de femmes, imposer la pratique consistant à inscrire une femme tous les deux rangs sur les listes des candidats et appliquer des sanctions en cas de non-respect de la législation ;

b) D ’ appliquer des mesures temporaires spéciales visant à assurer la parité des sexes en ce qui concerne la nomination aux postes de décision dans la fonction publique, le corps diplomatique et l ’ appareil judiciaire ;

c) D ’ a ccélérer la rédaction de la version finale du projet de loi sur la parité et l ’ adoption de ce texte ;

d) De multiplier les programmes de formation et de renforcement des capacités destinés aux femmes qui souhaitent entrer dans la vie politique ou occuper une charge publique et de continuer d ’ encourager les médias à veiller à ce que les candidats ou les représentants élus des deux sexes bénéficient de la même couverture, en particulier en période électorale ;

e) De sensibiliser les personnalités politiques, les médias, les chefs traditionnels et le grand public au fait que la participation pleine, libre et démocratique des femmes à la vie politique et publique, sur un pied d ’ égalité avec les hommes, est indispensable à la bonne application de la Convention, ainsi qu ’ à la stabilité politique et au développement économique du pays.

Les femmes et la paix et la sécurité

Le Comité se félicite de l’adoption, le 8 mai 2018, d’un plan d’action national pour l’application de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité. Il est néanmoins préoccupé par le fait que l’État partie n’a pas alloué de crédits budgétaires à l’exécution de ce plan et que la Commission ad hoc mixte paritaire ne comprend aucune femme.

Le Comité recommande à l ’ État partie : 

a) De définir une feuille de route aux fins de l ’ application du plan d ’ action national, assortie d ’ échéances précises, d ’ objectifs chiffrés et d ’ un budget tenant compte des besoins particuliers des femmes, et d ’ élaborer des indicateurs permettant de suivre régulièrement l ’ état d ’ avancement de ce plan ;

b) De veiller à ce que la composition de la Commission ad hoc mixte paritaire respecte le principe de la parité entre les sexes ;

c) D ’ a ssocier pleinement les femmes à toutes les étapes de la reconstruction après un conflit, y compris à la prise de décisions, conformément à la résolution 1325 (2000) , et de tenir compte de l ’ ensemble des objectifs du Conseil de sécurité concernant les femmes et la paix et la sécurité tels qu ’ ils sont définis dans les résolutions 1820 (2008) , 1888 (2009) , 1889 (2009) , 2122 (2013) et 2242 (2015) , ainsi que de sa recommandation générale n o  30.

Nationalité

Le Comité se félicite que tous les enfants nés sur le territoire congolais, y compris ceux nés de parents étrangers, aient droit à la nationalité congolaise. Il est toutefois préoccupé par les dispositions de la loi sur la nationalité qui accordent aux hommes, mais non aux femmes, le droit d’obtenir la naturalisation d’un conjoint étranger. Il est également préoccupé par le fait que le nombre de naissances non enregistrées reste élevé, en particulier dans les régions à forte population autochtone. En outre, il s’inquiète de ce que l’État partie n’ait pas encore adhéré à la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De m odifier la loi sur la nationalité afin qu ’ elle permette aux Congolaises d ’ obtenir la naturalisation de leur conjoint étranger, sur un pied d ’ égalité avec les Congolais ;

b) De redoubler d ’ efforts pour que l ’ enregistrement des naissances et la délivrance des actes de naissance se fassent gratuitement et en temps voulu sur l ’ ensemble du territoire, et notamment de mener des campagnes d ’ information sur l ’ importance de l ’ enregistrement des naissances et d ’ établir des antennes mobiles chargées d ’ enregistrer les actes d ’ état civil, en accordant une attention particulière aux enfants autochtones ;

c) D ’ adhérer à la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d ’ apatridie.

Éducation

Le Comité se félicite de la stratégie sectorielle de l’éducation pour la période 2015-2025, qui prévoit des stratégies de lutte contre l’abandon scolaire progressives et différentes selon le sexe, la création de centres d’alphabétisation et de réinsertion scolaire ainsi que des cours de post alphabétisation. Il est toutefois préoccupé par le faible taux de scolarisation et le taux élevé d’abandon des filles dans l’enseignement secondaire, et par leur faible taux d’inscription dans les disciplines mathématiques et les filières scientifiques, la mauvaise qualité de l’enseignement et des infrastructures scolaires et le taux élevé d’analphabétisme chez les filles. Le Comité constate également avec préoccupation que les frais d’achat de manuels et d’uniformes et les coûts de l’assurance maladie empêchent de scolariser les enfants, en particulier ceux des communautés autochtones.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De redoubler d ’ efforts pour assurer la scolarisation et le maintien à l ’ école des filles, en particulier dans le secondaire, une attention particulière devant être accordée aux filles autochtones ;

b) De prendre des mesures pour accroître le taux de scolarisation des filles dans les disciplines mathématiques et les filières scientifiques, telles que l ’ octroi de bourses pour élargir l ’ accès des filles à ces filières et les inciter à poursuivre des études dans ces disciplines ;

c) De construire et d ’ améliorer les infrastructures scolaires dans les zones rurales et reculées afin de garantir l ’ accès des filles à une éducation de qualité, et d ’ améliorer la qualité de l ’ enseignement à distance ;

d) D ’ éliminer les coûts indirects de la scolarisation et d ’ améliorer l ’ offre de programmes de distribution de repas scolaires et d ’ installations sanitaires appropriées pour les filles ;

e) De renforcer les programmes d ’ alphabétisation pour les adultes, en particulier les femmes des zones rurales.

Emploi, autonomisation économique, avantages économiqueset prestations sociales

Le Comité se félicite des initiatives que l’État partie a prises pour former les mères adolescentes à l’exercice d’une activité indépendante et des activités visant à promouvoir l’autonomisation économique dans le cadre du projet de protection sociale « Lisungi » mis en œuvre dans le département de la Likouala. Il prend note également des mesures prises pour veiller à ce que les femmes qui travaillent dans le secteur non structuré aient accès à la Caisse nationale de sécurité sociale. Le Comité est toutefois préoccupé par le faible taux d’emploi des femmes et par le fait que le secteur non structuré occupe 70 % d’entre elles, ce qui les exclut dans la plupart des cas du régime de protection sociale. Le Comité constate également avec inquiétude que si dans un couple marié, les deux époux sont fonctionnaires, les prestations sociales ne sont versées qu’au mari. Il constate en outre avec préoccupation que le conflit armé dans le département du Pool et la crise financière actuelle ont eu de graves conséquences pour les femmes, qui exercent des activités essentiellement dans l’économie informelle.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ ouvrir l ’ accès des femmes à l ’ emploi dans le secteur structuré par des mesures, y compris des mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et à la recommandation générale n o  25 du Comité, telles que l ’ offre d ’ incitations visant à encourager les employeurs des secteurs public et privé à recruter des femmes, la mise en place de structures facilitant le travail comme la création de garderies et le renforcement de la formation professionnelle des femmes ;

b) De garantir l ’ application des régimes de protection sociale à toutes les femmes, y compris celles qui travaillent dans le secteur non structuré ;

c) D ’ abolir toute discrimination à l ’ égard des couples mariés, lorsque les deux époux sont fonctionnaires, afin de garantir que les prestations sociales soient versées au mari et à la femme dans des conditions d ’ égalité ;

d) De prendre des mesures pour traiter de manière globale les problèmes auxquels se heurtent les femmes qui ont été victimes du conflit dans le département du Pool et les femmes employées dans l ’ économie informelle qui ont particulièrement souffert de la crise financière, l ’ objectif étant de répondre à leurs besoins en matière d ’ emploi et autres services de base.

Santé

Le Comité note avec satisfaction que les principales opérations obstétricales, les soins néonatals d’urgence et le dépistage et le traitement du VIH/sida, entre autres, sont gratuits. Il prend note avec satisfaction du cadre stratégique de lutte contre le VIH/sida et les maladies sexuellement transmissibles, élaboré en 2014, qui comprend un programme expressément axé sur la transmission du VIH de la mère à l’enfant. Il relève toutefois avec inquiétude les points suivants :

a)Malgré les efforts déployés pour réduire les inégalités entre les zones urbaines et rurales en ce qui concerne l’accès aux services de soins de santé, y compris la décision de l’État partie de placer les soins de santé de base sous la responsabilité des autorités locales, des disparités importantes subsistent entre les zones urbaines et rurales ;

b)L’avortement est criminalisé ;

c)Bien que presque tous les hommes et toutes les femmes connaissent au moins une méthode contraceptive moderne, le taux d’utilisation des contraceptifs n’est que de 30 % ;

d)Seulement 26,7 % des jeunes femmes (15-24 ans) ont une connaissance approfondie des modes de transmission de l’infection à VIH contre 45,3 % des hommes du même groupe d’âge.

Les avortements non médicalisés étant l ’ une des principales causes de mortalité et de morbidité maternelles, le Comité engage l ’ État partie :

a) À redoubler d ’ efforts pour améliorer l ’ accès aux soins de santé, en particulier dans les zones rurales, en améliorant l ’ infrastructure et en augmentant le nombre de personnel médical formé ;

b) À légaliser l ’ avortement, notamment dans les cas de viol, de menaces pesant sur la vie et la santé de la mère, d ’ inceste et de malformations graves du fœtus, de décriminaliser l ’ avortement dans tous les autres cas, et d ’ offrir aux femmes des soins de qualité à la suite d ’ un avortement ;

c) À veiller à ce que les adolescents, filles et garçons, aient accès à des informations exactes sur leur santé et leurs droits en matière de sexualité et de procréation, y compris les comportements sexuels responsables, la prévention des grossesses précoces et les maladies sexuellement transmissibles ;

d) À intégrer une éducation à la santé sexuelle et reproductive adaptée à l ’ âge des enfants dans les programmes scolaires, y compris des cours sur la transmission du VIH.

Femmes des zones rurales

Le Comité se félicite de l’adoption de la loi sur l’occupation et l’acquisition des terres et terrains, qui interdit les coutumes et traditions empêchant les femmes d’occuper, d’acquérir ou d’hériter des terres ou terrains, ou limitant leurs droits en la matière. Il se félicite également de la mise en place du programme Observer, Réfléchir, Agir, qui vise à intégrer les autochtones dans le système éducatif. Le Comité demeure toutefois préoccupé par l’accès effectif des femmes des zones rurales à la terre et par l’accès des autochtones aux terres ancestrales. Il craint en outre que les plans de développement municipaux et la réforme agraire n’obligent les femmes des zones rurales à se reconvertir vers d’autres activités pour gagner leur vie ou les laissent sans terre et sans indemnisation appropriée. Le Comité est également préoccupé par le fait que les femmes ont été touchées de manière disproportionnée par le conflit dans le département du Pool, par la perte de terres fertiles, de revenus et d’accès à une eau salubre en quantité suffisante et à un logement convenable, et par la détérioration de la situation sanitaire. Il est préoccupé par le taux élevé de pauvreté des femmes rurales, en particulier dans le département de la Likouala, et par leur accès limité aux services et infrastructures de base.

Conformément à sa recommandation générale n o  34 (2016) sur les droits des femmes rurales, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De veiller à ce que les femmes des zones rurales aient accès à la terre dans des conditions d ’ égalité avec les hommes, notamment en faisant mieux connaître la loi sur l ’ occupation et l ’ acquisition des terres et terrains, et l ’ interdiction des coutumes et traditions empêchant souvent les femmes d ’ occuper ou d ’ acquérir des terres et terrains, ou limitant leurs droits en la matière, et l ’ importance de l ’ accès des femmes à la terre dans des conditions d ’ égalité, facteur permettant de favoriser le développement et de parvenir à une égalité réelle entre les femmes et les hommes ;

b) De veiller à ce que les intérêts des femmes des zones rurales soient protégés lors de l ’ élaboration des politiques foncières et de l ’ attribution des terres et terrains et de veiller à ce que les utilisateurs traditionnels des terres, notamment les communautés autochtones, puissent avoir accès à la propriété ainsi qu ’ à des réparations et indemnisations appropriées afin de pleinement compenser les pertes subies ;

c) De veiller à ce que les femmes des zones rurales aient accès dans des conditions d ’ égalité avec les hommes et les citadines aux services et infrastructures de base, tels que des soins de santé appropriés, l ’ éducation, les transports publics, l ’ alimentation, l ’ eau et l ’ assainissement, des activités génératrices de revenus et la protection sociale, en particulier dans les départements de la Likouala et du Pool, notamment en adoptant des mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et à la recommandation générale n o  25 du Comité.

Groupes de femmes défavorisés

Le Comité prend note avec satisfaction de l’initiative visant à renforcer les droits des veuves dans le code de la famille révisé. Il se félicite de la ratification de la Convention de l’Union africaine sur la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique en 2014 et prend note du projet de loi sur l’asile. Il est toutefois gravement préoccupé par les points suivants :

a)Les actes de discrimination généralisés et systématiques et les violations des droits des veuves dans l’État partie, en particulier en ce qui concerne le droit d’héritage, la pratique du lévirat et la discrimination à l’égard des veuves dont les époux sont morts des suites de maladies liées au VIH/sida ;

b)Le code de la famille n’a pas encore été adopté et la population est peu sensibilisée aux changements proposés ;

c)L’État partie accueille de nombreux réfugiés, demandeurs d’asile et personnes déplacées, sans leur fournir des infrastructures appropriées, notamment des foyers, et des services de base, tels que l’accès aux soins de santé et à l’éducation ;

d)Le projet de loi sur l’asile ne contient pas de dispositions relatives aux personnes déplacées.

Le Comité invite instamment l ’ État partie :

a) À accélérer l ’ adoption des réglementations proposées afin de mieux protéger les droits des veuves ;

b) À mener des programmes de sensibilisation pour faire évoluer les mentalités traditionnelles à l ’ égard des veuves et lutter ainsi contre toutes les formes de discrimination et de violence à leur égard ;

c) À recueillir des données ventilées sur la situation des veuves et inclure ces informations dans son prochain rapport périodique ;

d) À ouvrir des foyers, notamment grâce à un soutien financier suffisant, et à veiller à ce que les réfugiés, les demandeurs d ’ asile et les personnes déplacées aient accès à des services de base tels que des soins de santé et l ’ éducation ;

e) À inclure des dispositions relatives aux personnes déplacées avant d ’ adopter le projet de loi sur l ’ asile.

Mariage et rapports familiaux

Le Comité note avec satisfaction les efforts déployés par l’État partie pour revoir entièrement tous les aspects obsolètes et discriminatoires de sa législation. Il est toutefois préoccupé par le fait que certaines dispositions discriminatoires ont été conservées dans la législation proposée, en particulier celles ayant trait à la pratique de la dot et de la polygamie. Le Comité est également préoccupé par le fait que 70 % des femmes sont mariées selon le droit coutumier. Il s’inquiète en outre des incertitudes qui subsistent quant à savoir si l’État partie a tenu compte de ses recommandations antérieures concernant l’âge minimum du mariage pour les filles et les garçons, le choix du lieu de résidence familiale, l’autorité parentale exercée par le père et la criminalisation de l’adultère (voir CEDAW/C/COG/CO/6, par. 44) pour élaborer ses projets de lois.

Le Comité, rappelant ses précédentes observations finales et sa recommandation générale n o 21 (1994) sur l ’ égalité dans le mariage et les rapports familiaux, engage vivement l ’ État partie  :

a) À veiller à ce que tous les mariages coutumiers soient dûment enregistrés devant un officier de l ’ état civil afin que les femmes mariées selon le régime coutumier jouissent des mêmes droits que les femmes ayant contracté un mariage civil  ;

b) À faire en sorte que toutes les dispositions discriminatoires existantes soient supprimées des codes révisés, en particulier en ce qui concerne l ’ âge minimum du mariage pour les filles et les garçons, le choix du domicile conjugal, l ’ autorité parentale exercée par le père et les sanctions disproportionnées frappant les femmes coupables d ’ adultère, ainsi que l ’ absence d ’ incrimination du viol conjugal, comme l ’ a recommandé le Comité dans ses précédentes observations finales [voir CEDAW/C/COG/CO/6 , par. 44 a)]  ;

c) À revoir sa position sur les pratiques de la dot et de la polygamie, que le Comité jugeait discriminatoires à l ’ égard des femmes  ;

d) À mener une vaste campagne de formation et de sensibilisation à l ’ échelon national avant l ’ entrée en vigueur du nouveau code de la famille et des textes de lois révisés connexes et veiller à ce que les pratiques discriminatoires dans le mariage et les rapports familiaux n ’ aient plus cours.

Collecte et analyse de données

Le Comité se félicite de l’existence d’un institut national de statistique et de la centralisation future de toutes les informations sur les plaintes concernant les violences faites aux femmes une fois mise en place la permanence téléphonique spécialement prévue à cet effet. Il est toutefois préoccupé par le manque général de données actualisées et ventilées par sexe. Il rappelle qu’il faut disposer de données ventilées par sexe, âge et situation géographique pour évaluer avec précision la condition de toutes les femmes, élaborer des politiques ciblées et fondées sur des données factuelles et suivre et évaluer systématiquement les progrès accomplis dans l’instauration d’une égalité réelle entre les femmes et les hommes dans tous les domaines visés par la Convention.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ améliorer la collecte, l ’ analyse et la diffusion de données complètes, ventilées par sexe, âge, handicap, appartenance ethnique, lieu de résidence et situation socio-économique, et de recourir à des indicateurs mesurables pour évaluer l ’ évolution de la situation des femmes et les progrès accomplis pour instaurer une égalité réelle entre les femmes et les hommes dans tous les domaines visés par la Convention.

Protocole facultatif à la Convention et modification du paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention

Le Comité invite l ’ État partie à ratifier dans les meilleurs délais le Protocole facultatif à la Convention et à accepter la modification apportée au paragraphe  1 de l ’ article 20 de la Convention concernant la durée des sessions du Comité.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité invite l ’ État partie à s ’ appuyer sur la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing dans l ’ action qu ’ il mène pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention.

Diffusion

Le Comité prie l ’ État partie de veiller à diffuser rapidement les présentes observations finales, dans les langues officielles de l ’ État partie aux institutions publiques concernées à tous les niveaux (national, régional et local), en particulier au Gouvernement, aux ministères, au Parlement et au corps judiciaire, afin d ’ en permettre la pleine application.

Assistance technique

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ établir un lien entre l ’ application de la Convention et l ’ action qu ’ il mène en faveur du développement, et de solliciter à cette fin l ’ assistance technique régionale ou internationale.

Ratification d’autres instruments

Le Comité souligne que l ’ adhésion de l ’ État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme contribuerait à promouvoir l ’ exercice effectif des droits de la personne et libertés fondamentales par les femmes dans tous les aspects de l ’ activité humaine. Il l ’ invite donc à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées à laquelle il n ’ est pas encore partie.

Suite donnée aux observations finales

Le Comité regrette que l ’ État partie n ’ ait pas présenté d ’ informations sur les mesures prises pour appliquer les recommandations désignées comme appelant une action immédiate formulées dans ses précédentes observations finales. Il prie l ’ État partie de lui communiquer par écrit, dans un délai de deux ans, des informations sur les mesures qu ’ il aura prises pour appliquer les recommandations énoncées plus haut aux paragraphes 11, 27 b) et 51 a) et c).

Établissement du prochain rapport

Le Comité prie l ’ État partie de soumettre son huitième rapport périodique en novembre 2022. Le rapport devr a être soumis à cette date et couvrir toute la période écoulée jusque-là.

Le Comité prie l ’ État partie de se conformer aux directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, dont le document de base commun et les rapports correspondant à chaque instrument (voir HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).