Observations finales concernant le neuvième rapport périodique de Cabo Verde *

* Adoptées par le Comité à sa soixante-treizième session (1 er -19 juillet 2019).

1.Le Comité a examiné le neuvième rapport périodique de Cabo Verde (CEDAW/C/CPV/9) à ses 1704e et 1705e séances (voir CEDAW/C/SR.1704 et CEDAW/C/SR.1705), tenues le 11 juillet 2019. La liste de points et questions établie par le Comité figure dans CEDAW/C/CPV/Q/9, les réponses de Cabo Verde dans CEDAW/C/CPV/Q/9/Add.1.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le neuvième rapport périodique de l’État partie. Il le remercie des réponses écrites apportées à la liste de points et questions établie par le groupe de travail d’avant-session, complétées oralement par la délégation, et des éclaircissements complémentaires donnés en réponse aux questions orales posées par le Comité pendant le dialogue.

3.Le Comité remercie l’État partie d’avoir envoyé une délégation de haut niveau, conduite par la Ministre de l’éducation et Ministre de la famille et de l’inclusion sociale, Maritza Rosabal Peña. La délégation comprenait aussi des représentants de l’Institut pour l’égalité et l’équité entre les sexes et de la Mission permanente de Pays auprès de l’Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève.

BAspects positifs

4.Le Comité salue les progrès accomplis dans la mise en œuvre de réformes législatives depuis l’examen, en 2013, du rapport de l’État partie valant septième et huitième rapports périodiques (CEDAW/C/CPV/7-8), en particulier l’adoption, en 2015, du cadre réglementaire de la Loi relative à la violence fondée sur le genre.

5.Le Comité salue les efforts de l’État partie pour améliorer le cadre politique et institutionnel visant à accélérer l’élimination de la discrimination envers les femmes et à promouvoir l’égalité des genres, notamment grâce aux mesures suivantes :

a)Création, en 2018, de la Commission interministérielle pour la prise en compte systématique du genre ;

b)Création, en 2016, du Ministère de la famille et de l’inclusion sociale ;

c)Adoption, en 2016, du Programme national de lutte contre la violence sexuelle à l’égard des enfants et des adolescents 2017-2019 ;

d)Création de postes de coordonnateurs pour les questions d’égalité des sexes au niveau municipal.

6.Le Comité note avec satisfaction que, depuis l’examen du rapport précédent, l’État partie a ratifié, en 2014, le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

C.Objectifs de développement durable

7.Le Comité se félicite de l ’ appui apporté par la communauté internationale aux objectifs de développement durable et invite l ’ État partie à réaliser l ’ égalité de jure (dans la loi) et de facto (effective) des femmes et des hommes, conformément aux dispositions de la Convention, dans tous les aspects de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l ’ horizon 2030. Il souligne l ’ importance de l ’ objectif 5 et de la prise en compte systématique des principes d ’ égalité et de non-discrimination dans la réalisation des 17 objectifs, et exhorte l ’ État partie à reconnaître que les femmes sont la force motrice de son développement durable et à adopter des politiques et des stratégies pertinentes à cet effet.

D.Parlement

8. Le Comité souligne le rôle essentiel du pouvoir législatif s ’ agissant de garantir la mise en œuvre intégrale de la Convention (voir A/65/38 , deuxième partie, annexe VI). Il invite le Parlement à prendre, dans le cadre de son mandat, les mesures nécessaires pour mettre en œuvre les présentes observations finales avant la soumission du prochain rapport périodique, en application de la Convention.

E.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Visibilité de la Convention et de son Protocole facultatif

9.Le Comité félicite l’État partie des efforts fournis pour diffuser la Convention. Il regrette néanmoins que le public de l’État partie ne soit pas plus sensibilisé aux droits consacrés par la Convention, notamment les femmes, tant dans les zones urbaines que rurales, ainsi que les membres du corps judiciaire, les responsables de l’application des lois et le personnel médical.

10. Le Comité invite l ’ État partie à :

a) R edoubler d ’ efforts pour sensibiliser le grand public aux droits consacrés par la Convention et aux procédures prévues par son Protocole facultatif, notamment les femmes, tant dans les zones urbaines que rurales, y compris les migrantes, ainsi que les membres du corps judiciaire, les responsables de l ’ application des lois et le personnel médical ;

b) R enforcer davantage les capacités des juristes , des magistrats et des responsables du maintien de l ’ ordre à l ’ application directe de la Convention ou à l ’ interprétation du droit interne à la lumière de celle-ci dans les procédures judiciaires ;

c)Intégrer dans son cadre juridique les dispositions du Protocole à la Charte africaine des droits de l ’ homme et des peuples, relatif aux droits de la femme en Afrique et en assurer la diffusion auprès du public, notamment les praticiens du droit et la société civile.

Accès à la justice

11.Le Comité constate avec inquiétude l’insuffisance de la formation juridique sur les droits des femmes prévus dans la Convention, la difficulté pour le public d’accéder aux décisions dans les affaires de discrimination fondée sur le genre et l’absence de mécanisme de traitement des plaintes pour signaler les partis pris fondés sur le genre dans l’appareil judiciaire. Le Comité constate également que les données sur les affaires judiciaires collectées par le Conseil supérieur de la magistrature ne sont pas ventilées en fonction des caractéristiques de la victime ou de l’auteur, telles que le genre ou d’autres variables, ce qui fait obstacle à une analyse des cas de discrimination ou de violence fondée sur le genre.

12. Conformément à sa recommandation générale n º 33 (2015) sur l ’ accès des femmes à la justice, le Comité engage l ’ État partie à :

a) P révoir une formation juridique, soutenue et structurée, à l ’ intention des mag i strats , des juristes et des responsables du maintien de l ’ ordre , sur la Convention, l ’ égalité réelle entre les hommes et les femmes, la lutte contre la violence fondée sur le genre et l ’ élimination des stéréotypes de genre ;

b) R endre aisément accessible s les décisions de justice dans les affaires de discrimination fondée sur le genre, en les publiant, par exemple, sur le site Web de la Cour suprême et du Ministère de la justice, en vue de promouvoir la transparence du système judiciaire ;

c) M ettre en place un mécanisme afin de signaler les cas de partis pris fondés sur le genre dans le corps judiciaire et veiller à ce que ces signalements soient suivis d ’ une enquête et d ’ un règlement rapides ;

d) F aire en sorte que le Conseil supérieur de la magistrature collecte des données ventilées par sexe afin de pouvoir analyser les cas de discrimination et de violence fondée s sur le genre ;

e) F aire connaître au grand public, notamment aux femmes et aux filles, la législation interdisant la discrimination à l ’ égard des femmes et les voies de recours ouvertes aux victimes de tels actes.

Mécanisme national de promotion de la femme

13.Le Comité constate que, depuis 2016, c’est au Ministère de la famille et de l’inclusion sociale qu’incombe la responsabilité générale de promouvoir l’égalité des genres dans l’État partie, que 18 municipalités sur 22 se sont vu attribuer un coordonnateur pour les questions d’égalité des genres et que, dans une municipalité, le bureau du maire est responsable de l’égalité des genres. Le Comité se réjouit de l’élaboration, sous la responsabilité de l’Institut pour l’égalité et l’équité entre les sexes au sein du Ministère de la famille et de l’inclusion sociale, du Plan national pour l’égalité des sexes 2015–2018, du Plan national de lutte contre la violence fondée sur le genre et du Plan national pour l’égalité des sexes 2019–2021. Il se félicite, en outre, de la création récente de la Commission interministérielle pour la prise en compte systématique du genre, qui est chargé de suivre cette prise en compte dans les politiques publiques. Le Comité note, cependant, que le Ministère de la famille et de l’inclusion sociale est également le Ministère de l’éducation, ce qui l’incite à penser que la lutte contre la discrimination à l’égard des femmes ne bénéficie peut-être pas de toute l’attention ni des ressources nécessaires. En effet, le portefeuille du Ministère est déjà considérable, puisqu’il couvre des domaines aussi divers que l’éducation, l’enfance, les personnes âgées, des personnes handicapées et la lutte contre la pauvreté. Le Comité s’inquiète également du manque de coordination et de suivi des activités ainsi que des ressources limitées dont disposent les différentes entités constituant le mécanisme national.

14. Le Comité invite l ’ État partie à :

a) É riger la promotion de l ’ égalité des genres en priorité du G ouvernement et, pour ce faire, envisager la création d ’ une entité distincte, pleinement habilitée et suffisamment dotée, afin de coordonner et de suivre la mise en œuvre de la Convention ;

b) F aire en sorte que l ’ ensemble des entités constituant le mécanisme national pour la promotion des femmes, dont l ’ Institut pour l ’ égalité et l ’ équité entre les sexes, la Commission interministérielle pour la prise en compte systématique du genre et les coordonnateurs pour les questions d ’ égalité des sexes au niveau municipal, travaillent ensemble de façon coordonnée et efficace ;

c) S ’ assurer qu ’ un coordonnateur pour les questions d ’ égalité des sexes soit désigné pour chaque municipalité.

Institution nationale de défense des droits de l’homme

15.Le Comité se réjouit de constater que 16 des 30 membres de la Commission nationale des droits de l’homme et de la citoyenneté sont des femmes et que cette Commission a pour mandat explicite de promouvoir les droits des femmes et l’égalité des genres. Le Comité ne peut, toutefois, pas s’empêcher de remarquer que la Commission est placée sous la tutelle du Ministère de la justice et que cette dépendance est contraire aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris)

16. Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre au point et d ’ adopter rapidement le projet de loi sur la Commission nationale des droits de l ’ homme et de la citoyenneté, conformément à tous les Principes de Paris, et de s ’ assurer que cette Commission est dotée des ressources humaines, techniques et financières nécessaires pour protéger et promouvoir efficacement les droits des femmes et l ’ égalité des genres.

Mesures temporaires spéciales

17.Le Comité remarque que l’État partie envisage de mettre en place des mesures temporaires spéciales pour encourager les femmes, y compris les femmes rurales et les femmes handicapées, à participer à la vie politique et économique. Toutefois, le Comité s’inquiète des retards pris dans la mise en pratique lesdites mesures ainsi que de l’absence de mesures temporaires spéciales pour accélérer la réalisation de l’égalité réelle entre les hommes et les femmes dans tous les domaines où les femmes sont défavorisées ou sous-représentées.

18. Le Comité, rappelant sa recommandation générale n º 25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales, engage l ’ État partie à :

a) M ieux inform er les fonctionnaires et les décideurs sur la nature des mesures temporaires spéciales au sens du paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et leur importance pour la réalisation de l ’ égalité réelle entre les femmes et les hommes dans tous les domaines où les femmes sont défavorisées ou sous-représentées ;

b) M ettre en place des mesures temporaires spéciales, telles que les programmes de solidarité ou d ’ assistance, l ’ allocation ou la redistribution de ressources, le traitement préférentiel, les pratiques de recrutement, d ’ embauche et de promotion ciblées et les quotas réglementaires, afin de corriger les déséquilibres dans la participation des hommes et des femmes à la vie politique et publique ;

c) A dopter des mesures temporaires spéciales en faveur des groupes de femmes rurales et défavorisées, y compris les veuves, les femmes chefs de famille, les femmes handicapées et les femmes qui vivent dans la pauvreté et dans les zones exposé e s aux catastrophes ;

d) V eiller à ce que les plans et les programmes nationaux, tels que le Plan d ’ action de sensibilisation sur la parité des sexes, les mesures de réduction de la pauvreté, les initiatives professionnelles et celles en faveur de l ’ entreprenariat, comprennent des cibles mesurables précises.

Stéréotypes et pratiques néfastes

19.Le Comité prend note des mesures juridiques, politiques et institutionnelles que l’État partie a mises en place pour lutter contre les stéréotypes discriminatoires. Il demeure néanmoins préoccupé par la persistance d’attitudes patriarcales traditionnelles et de stéréotypes discriminatoires profondément ancrés : ce sont eux qui sont principalement responsables de la situation d’infériorité dans laquelle les femmes sont maintenues dans l’État partie. Le Comité s’inquiète également du peu de couverture dont bénéficie, dans les médias et notamment à la télévision, la violence fondée sur le genre. Enfin, il est gravement préoccupé par la pratique néfaste des unions de fait précoces, qui sont l’équivalent de mariages d’enfants, dont sont parfois victimes des filles âgées de 12 ans seulement.

20. Le Comité recommande à l ’ État partie de :

a) M ultiplier les programmes pour sensibiliser davantage le public à l ’ effet négatif qu ’ ont l es stéréotypes discriminatoires et l es pratiques néfastes sur l ’ exercice par les femmes des droits que leur garantit la Convention, et plaider la cause de l ’ égalité des genres auprès des garçons et des hommes ;

b) T erminer rapidement la révision des programmes scolaires aux niveaux primaire et secondaire d ’ éducation afin d ’ y intégrer un enseignement obligatoire sur l ’ égalité des genres et continuer de supprimer des manuels scolaires les stéréotypes discriminatoires sur la répartition , entre les femmes et les hommes , des rôles et des responsabilités dans la famille et la société ;

c) E ncourager les médias à traiter de la discrimination et de la violence fondées sur le genre, plus souvent et d ’ une façon sensible aux différences entre les sexes ;

d) M ettre en œuvre des mesures de sensibilisation pour lutter contre la pratique néfaste de l ’ union de fait des filles, qui équivaut à un mariage d ’ enfants ;

e) M ener l ’ étude sur les pratiques culturelles et les relations entre les sexes dans les communautés d ’ immigrants, déjà envisagée dans le deuxième Plan d ’ action sur l ’ immigration et l ’ intégration sociale des immigrés (2018-2020).

Violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre

21.Le Comité se félicite de l’adoption, en 2015, du cadre réglementaire de la Loi relative à la violence fondée sur le genre, du second Plan national de lutte contre la violence fondée sur le genre 2016-2018, et de l’intégration de la problématique de la violence fondée sur le genre dans le Plan national pour l’égalité des sexes 2019-2021. Le Comité accueille avec satisfaction la formation sur la violence fondée sur le genre dispensée aux agents de police, aux membres du corps judiciaire, aux praticiens du droit et aux professionnels de la santé ainsi que la publication, en 2014, d’un manuel de bonnes pratiques dans la lutte contre la violence fondée sur le genre à l’intention des journalistes. Toutefois, le Comité est gravement préoccupé par les faits suivants :

a)Le nombre élevé de plaintes concernant des faits de violence fondée sur le genre déposées, à travers le pays, dans les bureaux du ministère public, à savoir 2 500 plaintes annuelles environ, ainsi que les huit féminicides de 2018, qui ont tous eu lieu dans des situations où les femmes essayaient de quitter leur partenaire ;

b)Le nombre élevé de cas d’abus sexuels concernant des enfants dans l’État partie, 95 % des victimes étant des filles ;

c)L’absence d’officiers de police spécialisés dans la violence fondée sur le genre dans les îles de Brava, Fogo, Maio et Boa Vista, et la réponse judiciaire tardive à Praia et dans l’île de São Vicente, nonobstant la nomination de procureurs spécialisés dans la violence fondée sur le genre ;

d)Le manque de refuges et d’autres mesures immédiates prévues pour protéger les victimes et les survivantes de la violence fondée sur le genre, et ce, malgré l’ouverture récente de deux refuges, l’un à Praia et l’autre sur l’île de Fogo ;

e)L’interruption de la ligne téléphonique d’urgence mise à disposition des victimes de violence fondée sur le genre (8001818), intégrée à celle de la police (132), qui limite les appels à deux minutes.

22. Rappelant sa recommandation générale nº 35 (2017) sur la violence à l ’ égard des femmes fondée sur le genre, portant actualisation de la recommandation générale nº 19, le Comité exhorte l ’ État partie à :

a) A llouer les ressources nécessaires pour l ’ application de la loi de 2011 relative à la violence fondée sur le genre et de son cadre réglementaire de 2015, do nt des allocations budgétaires spécialement destinées à la justice, à la police, à la santé, à l ’ éducation et au fonds d ’ aide aux victimes ;

b) R edoubler d ’ efforts pour sensibiliser les femmes et les hommes, ainsi que les filles et les garçons , au caractère criminel de la violence à l ’ égard des femmes et des filles fondée sur le genre, grâce notamment à des campagnes éducatives et médiatiques, afin de remettre en cause son acceptation sociale ;

c) V eiller à la mise en œuvre intégrale du Programme national de lutte contre la violence sexuelle à l ’ égard des enfants et des adolescents 2017-2019 et la prolong er au-delà de 2019 ;

d) D ûment former le personnel médical afin de faire bénéficier les femmes et les filles victimes de violences sexuelles d ’ une attention et de soins spécialisés, en leur proposant notamment des services essentiels pour la contraception d ’ urgence et l ’ avortement ;

e) C réer des postes d ’ officiers de police spécialisés dans la violence fondée sur le genre dans les îles de Brava, Fogo, Maio et Boa Vista, faire en sorte que tous les signalements de violence à l ’ égard des femmes fondées sur le genre, dont la violence domestique, fassent l ’ objet d ’ une enquête en bonne et due forme et que les victimes puissent bénéficier de services de protection, et renforcer le mandat des procureurs spécialisés dans la violence fondée sur le genre afin de garantir la poursuite et la punition appropriée des auteurs ainsi que des réparations pour les victimes, y compris des indemnisations ;

f) P révoir une formation appropriée sur les droits des femmes et les techniques d ’ enquête et d ’ interrogatoire tenant compte de la différence entre les sexes recommandées dans les affaires de violence à l ’ égard des femmes fond ée sur le genre à destination des membres du corps judiciaire, des procureurs, de s agents de police et des autres responsables de l ’ application des lois ;

g) A llouer des ressources suffisantes afin que les refuges accueillant des femmes victimes d ’ actes de violence fondée sur le genre soient pleinement opérationnels sur l ’ ensemble du territoire de l ’ État partie et veiller à ce que ces femmes puissent accéder facilement à des traitements médicaux, à un appui socio-psychologique, à une aide juridictionnelle et à des ordonnances de protection ;

h) M ettre à disposition le Réseau interinstitutionnel de soutien aux victimes de la violence fondée sur le genre (réseau SOL) et des centres d ’ aide aux victimes dans chacune des 22 municipalités de l ’ État partie, et proposer, en un guichet unique, une aide psychologique, juridique et sociale ;

i) R établir une ligne téléphonique d ’ urgence spécifique où il est possible de joindre des professionnels formés pour apporter les conseils et le soutien nécessaires aux victimes de la violence fondée sur le genre.

Traite des êtres humains et exploitation aux fins de prostitution

23.Le Comité salue les mesures prévoyant de fournir des moyens de subsistance et un traitement médical d’urgence aux victimes de la traite des êtres humains, l’adoption du Plan national de lutte contre la traite des êtres humains pour la période 2018-2021, la création, en 2016, d’un centre de soutien aux femmes qui se prostituent ou risquent de se prostituer ainsi que la criminalisation dans le Code pénal du trafic des êtres humains (art. 271A) et de la prostitution forcée (art. 268A et 268B). Le Comité s’inquiète néanmoins des points suivants :

a)L’absence de protocoles types pour les responsables de l’application des lois et les travailleurs sociaux afin d’identifier les victimes de la traite et l’absence de formation des membres de la police des frontières pour mettre en pratique les procédures écrites existantes pour ce type d’identification ;

b)Les cas de parents encourageant leur fille à se prostituer avec des résidents des États-Unis d’Amérique dans le but d’obtenir un visa pour ce pays ou afin de soutenir financièrement la famille, et les cas de filles âgées parfois de 12 ans seulement qui ont été exploités sexuellement en échange de drogues ;

c)Les cas de prostitution forcée, dont ceux de femmes migrantes en provenance de pays d’Afrique de l’Ouest tels que le Nigéria et le Sénégal, dans les îles de Sal et Boa Vista ;

d)Le faible taux d’enquêtes, de poursuites et de condamnations dans les affaires de traite des êtres humains et d’exploitation de la prostitution, ainsi que le manque de soutien et de réparations fournis aux victimes.

24. À la lumière de la cible 5.2 des objectifs de développement durable, qui consiste à éliminer de la vie publique et de la vie privée toutes les formes de violence faite aux femmes et aux filles, y compris la traite et l ’ exploitation sexuelle et d ’ autres types d ’ exploitation, le Comité recommande à l ’ État partie de :

a) M ettre au point des protocoles types pour l ’ identification, l ’ orientation et l ’ assistance rapides des victimes de la traite des êtres humains, et s ’ assurer que toutes les catégories professionnelles concernées suivent une formation adéquate à ces protocoles ;

b) R edoubler d ’ efforts pour protéger les filles prostituées contre l ’ exploitation et les abus, et élaborer des services et des programmes pour aider celles qui souhaitent sortir de la prostitution ;

c) E nquêter sur les trafiquants, les poursuivre et les punir comme il se doit, et garantir l ’ exemption de toute responsabilité pénale des femmes et des filles, y compris les femmes migrantes, victimes de la traite ainsi qu ’ un accès à des soins de santé, des refuges, des services d ’ appui socio-psychologiques et une compensation, y compris des réparations et une indemnisation ;

d) R esserrer la coopération régionale avec les pays d ’ origine et de destination afin de prévenir la traite des femmes et des filles grâce à l ’ échange d ’ informations et à l ’ harmonisation des procédures afin de faciliter la poursuite des trafiquants.

Participation à la vie politique et publique

25.Le Comité constate que les femmes siègent plus souvent au Parlement et dans les conseils municipaux, et que la proportion des femmes occupant un poste de représentant du pouvoir législatif ou exécutif, d’administrateur et de directeur exécutif s’élève à 43,3 %. Le Comité s’inquiète néanmoins des points suivants :

a)La faible représentation des femmes au Parlement (23 % en 2016) et sa baisse dans les ministères (de 53 % en 2010 à 21 % en 2019) ;

b)La présence limitée des femmes dans la diplomatie, les organisations internationales et le corps judiciaire ;

c)Le retard pris dans l’adoption du projet de loi sur la parité, qui prévoit la parité entre hommes et femmes dans les assemblées élues et aux postes de direction dans l’administration publique ;

d)L’incapacité des procédures de vote à garantir l’égalité du droit de vote ainsi que le principe du secret du vote pour les femmes handicapées ;

e)La participation limitée des femmes aux activités sportives.

26. Rappelant sa recommandation générale nº 23 (1997) sur les femmes dans la vie politique et publique, le Comité recommande à l ’ État partie de :

a) M ener des campagnes de sensibilisation à l ’ intention des politiciens, des notables, des médias et du public sur l ’ importance de la participation des femmes à la vie politique et de leur représentation aux postes de décision ;

b) A ugmenter, de façon durable, la représentation des femmes au gouvernement, aux postes diplomatiques, dans les organisations internationales et dans le corps judiciaire, en particulier aux niveaux où les décisions sont prises ;

c) Adopter rapidement le projet de loi sur la parité sur la représentation des hommes et des femmes dans les assemblées élues et l ’ administration publique, et veiller à ce que cette loi soit appliquée de préférence à la Loi sur les partis politiques et au Code électoral, tant que ceux-ci ne sont pas modifiés ;

d) Modifier le Code électoral afin de garantir des droits de vote égaux et le secret du vote pour les femmes handicapées ;

e) Renforcer les mesures visant à garantir la parité entre hommes et femmes dans les organisations sportives, notamment aux niveaux de prise de décision s , et promouvoir les activités physiques auprès des femmes pour leur santé et leur bien-être physiques et psychologiques.

Nationalité

27. Le Comité se félicite des mesures prises pour trouver une solution aux 220 cas d ’ apatridie identifiés lors du recensement de 2010 et recommande à l ’ État partie de ratifier la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et la Convention de 1961 sur la réduction des cas d ’ apatridie.

Éducation

28.Le Comité salue l’amélioration des taux d’alphabétisme des femmes, en particulier celui des femmes et des filles âgées de 15 à 24 ans, et les mesures prises pour promouvoir l’éducation auprès des filles et des femmes, notamment les adolescentes enceintes et les mères adolescentes, et pour mettre fin à la violence à l’école. Cependant, le comité demeure préoccupé par :

a)Le déséquilibre persistant entre les taux d’alphabétisme des hommes et ceux des femmes ;

b)Le manque d’informations concernant les taux d’échec scolaire des filles, en particulier ceux des adolescentes enceintes et des mères adolescentes ;

c)La sous-représentation des filles dans des filières d’études traditionnellement dominées par les hommes, notamment dans l’enseignement supérieur où les choix d’études restent stéréotypés ;

d)Le fait qu’un nombre important d’élèves estiment que les écoles sont dangereuses et indiquent qu’ils ont déjà été victimes de violences à l’école (dans plus de 50 % des cas, ces victimes étaient des filles).

29. Rappelant sa recommandation générale nº 36 (2017) sur le droit des filles et des femmes à l ’ éducation, ainsi que la cible 4.5 des objectifs de développement durable qui vise à éliminer les inégalités entre les sexes dans le domaine de l ’ éducation, le Comité invite l ’ État partie à :

a) I ntensifier ses campagnes d ’ alphabétisation à l ’ intention des femmes âgées de 24 ans ou plus ainsi que des femmes vivant dans les zones rurales ou éloignées ;

b) C ollecter des données sur les taux d ’ inscription, d ’ absentéisme et d ’ échec scolaire des femmes et des filles, à tous les niveaux d ’ éducation et ventilées par lieu, âge et état de grossesse ;

c) S uperviser la mise en œuvre du décret - loi relatif à l ’ aide sociale pour les mères à l ’ école, encourager les adolescentes enceintes à poursuivre leurs études et faciliter la réinscription des mères adolescentes dans le système scolaire, y compris grâce à une aide financière, en luttant contre la stigmatisation culturelle par des campagnes de sensibilisation et la création de structures d ’ accueil pour enfants d ’ un coût abordable ;

d) I nclure rapidement dans les programmes scolaires, à tous les niveaux, une éducation obligatoire pour les filles et les garçons, adaptée à l ’ âge, fondée sur des données probantes et scientifiquement exacte sur la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation, traitant des comportements sexuels responsables et débarrassée des stéréotypes discriminatoires concernant les genres ;

e) Adopter des mesures temporaires spéciales, y compris des incitations financière s et des bourses d ’ études, pour favoriser l ’ inscription des femmes et des filles dans les domaines de la science, de la technologie, de l ’ ingénierie et des mathématiques, et lutter contre les stéréotypes et les obstacles structurels susceptibles de dissuader les filles et les jeunes femmes de s ’ inscrire dans des disciplines traditionnellement dominées par les hommes ;

f) Veiller à ce que le Programme national de lutte contre la violence sexuelle à l ’ égard des enfants et des adolescents 2017-2019 soit mis en pratique, et élaborer des mesures pour lutter contre les châtiments corporels et toutes les formes de violence fondée sur le genre dans les écoles.

Emploi

30.Le Comité félicite l’État partie des mesures prises pour promouvoir le droit au travail des femmes, dont le Plan d’action pour la prise en compte de la problématique femmes-hommes dans le secteur du tourisme pour la période 2016-2018, la Stratégie nationale de transition du secteur informel au secteur formel de l’économie pour la période 2017-2020, le Plan national pour l’emploi pour la période 2018-2023 et la formation entrepreneuriale proposée par l’Agence pour le développement des entreprises et l’innovation. Toutefois, le Comité note avec préoccupation :

a)La persistance de la ségrégation de genre sur le marché du travail, qui se caractérise par une concentration des femmes dans les emplois domestiques et dans les secteurs de la santé, du commerce, de l’éducation, de l’hôtellerie et de la restauration ;

b)Les stéréotypes durables liés au genre, qui sont l’une des raisons principales pour lesquelles les femmes doivent assumer une part disproportionnée des travaux domestiques non rémunérés, de l’éducation des enfants ou des soins dispensés à des membres de la famille, et l’insuffisance du congé de maternité accordée aux femmes, qui limite leur accès au marché du travail ;

c)Le fait que la plupart des femmes travaillant dans le secteur du tourisme sont employées dans des conditions précaires et qu’elles constituent la majorité des travailleurs du secteur informel ;

d)Le taux élevé de chômage des femmes diplômées de l’enseignement supérieur, même si elles sont 10 % de plus que les hommes à réussir ces études ;

e)L’absence du principe « un salaire égal pour un travail de valeur égale » dans la version modifiée la plus récente du Code du travail ;

f)Le manque d’informations concernant le harcèlement sexuel au travail ainsi que les mécanismes de traitement des plaintes à la disposition des femmes dans ce cas.

31. Le Comité invite l ’ État partie à :

a) A dopter des mesures, y compris des mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention, telles que des activités de sensibilisation, des quotas et des mesures incitatives pour encourager les femmes à choisir des carrières non traditionnelles et lutter contre la ségrégation de genre sur le marché du travail ;

b) A ugmenter la durée du congé de maternité de deux à quatre mois, mettre en place un congé de paternité à prendre dans les deux semaines après la naissance de l ’ enfant et encourager les parents à partager équitablement les responsabilités domestiques et familiales ;

c) Veiller à l ’ application des dispositions du droit du travail dans le secteur du tourisme afin de mettre un terme à l ’ utilisation des contrats précaires et accélérer la transition vers l ’ économie formelle des femmes qui travaillent dans le secteur informel ;

d) Favoriser l ’ accès des femmes diplômées de l ’ enseignement supérieur au marché du travail ;

e) Modifier rapidement le Code du travail pour y intégrer le principe « un salaire égal pour un travail de valeur égale » ;

f) Prendre toutes les dispositions nécessaires pour lutter contre le harcèlement sexuel au travail, encourager les femmes à porter plainte quand elles en sont victimes, et veiller à ce que ces plaintes fassent l ’ objet d ’ une enquête rapide et que les auteurs soient dûment punis ;

g) Ratifier la Convention de 1981 sur les travailleurs ayant des responsabilités familiales (nº 156) et la Convention de 2000 sur la protection de la maternité (nº 183) de l ’ Organisation internationale du Travail (OIT).

Travailleuses domestiques

32.Le Comité salue la création, en 2018, d’une association de travailleuses domestiques. Il remarque que les femmes constituent la majorité des travailleurs domestiques et regrette le retard pris dans l’adoption du cadre réglementaire pour le travail domestique. Il constate avec inquiétude que, malgré l’extension de la protection sociale aux travailleuses ettravailleurs domestiques en vertu du décret–loi nº 49/2009 du 23 novembre 2009, seuls 17,5 % de ceux-ci sont, en 2018, inscrits dans le système national de protection sociale obligatoire.

33. Le Comité engage l ’ État partie à :

a) Adopter rapidement un cadre réglementaire pour le travail domestique ;

b) Mener des inspections du travail également dans les foyers qui emploient des travailleuses et travailleurs domestiques pour vérifier si les normes et réglementations applicables sont bien respectées, notamment celles concernant le salaire minimum, les horaires de travail, les congés, dont le congé de maternité, et sanctionner les employeurs si ce n ’ est pas le cas ;

c) Encourager l ’ inscription des travailleuses et travailleurs domestiques dans le système national de protection sociale obligatoire et encourager le paiement d ’ allocations de chômage à celles et ceux qui sont sans emploi ;

d) Ratifier la Convention de 2011 sur les travailleuses et travailleurs domestiques (nº 189 ) de l ’ OIT.

Santé

34.Le Comité se réjouit que le programme gratuit de prestations de santé de base comprenne des services de santé procréative pour les femmes et que les adolescentes puissent accéder à des installations spéciales de santé procréative dans certains centres de soins. Cependant, le comité demeure préoccupé par :

a)Le taux encore élevé de grossesses précoces, avec 12 % des adolescentes et des jeunes femmes âgées de 15 à 19 ans ayant déjà donné naissance à un enfant au moins en 2018 (même si ce taux s’élevait à 15 % en 2015), le fait que les adolescentes et les jeunes femmes de moins de 19 ans représentent presque un cinquième de l’ensemble des femmes enceintes et que la majorité des centres de soins de l’État partie ne propose pas d’installations spéciales de santé procréative pour les adolescentes ;

b)L’absence de services de soins gratuits pour l’avortement et après l’intervention ;

c)L’impossibilité pour les femmes rurales d’avoir accès à des services de santé sexuelle et procréative, la baisse observée dans l’utilisation des contraceptifs et l’augmentation du nombre de nouveaux cas de VIH et de sida dans l’État partie ;

d)La sous-représentation des femmes au niveau de la prise de décisions dans les mécanismes existants de prévention et de gestion des épidémies à transmission vectorielle.

35. Rappelant sa recommandation générale n º 24 (1999) sur les femmes et la santé, le Comité recommande à l ’ État partie de :

a) V eiller à ce que les adolescentes puissent accéder à des informations exactes sur leur santé et leurs droits en matière de sexualité et de procréation, notamment sur les comportements sexuels responsables ainsi que sur la prévention des grossesses précoces et des maladies sexuellement transmissibles, redoubler d ’ efforts pour lutter contre les grossesses d ’ adolescentes, et mettre à la disposition des adolescentes et des jeunes femmes des installations spéciales de santé procréative dans tous les centres de soins ;

b) R endre gratuits les services de soins pour l ’ avortement et après l ’ intervention, et garantir à toute femme ou fille un accès légal et sûr à l ’ avortement ;

c) P révoir les investissements nécessaires pour garantir la disponibilité des services de santé sexuelle et procréative, en particulier dans les zones rurales, et faire en sorte que toutes les femmes et les filles, y compris celles qui sont handicapées, puissent avoir accès à des moyens de contraception modernes et bon marché sur l ’ ensemble du territoire de l ’ État partie ;

d) R edoubler d ’ efforts pour prévenir les nouveaux cas de VIH et de sida ;

e) A ssurer la représentation et la participation active des femmes au niveau de la prise de décisions dans la prévention et la gestion des urgences sanitaires et des épidémies.

Changements climatiques

36.Le Comité note qu’en tant que petit État insulaire en développement, l’État partie est particulièrement vulnérable aux changements climatiques et le félicite de ses investissements dans les énergies renouvelables, de l’adoption des directives sur l’utilisation systématique de données ventilées par sexe et de la mise en œuvre de stratégies de prise en compte systématique du genre dans le secteur de l’environnement. Il remarque également que, dans la Stratégie nationale pour la réduction des risques de catastrophe pour la période 2017-2030, l’égalité des genres et la durabilité de l’environnement sont définis comme des questions interdisciplinaires. Le Comité s’inquiète toutefois du manque de participation active des femmes dans l’élaboration et la mise en œuvre de ces initiatives.

37. Conformément à sa recommandation générale nº 37 (2018) relative aux aspects liés au genre de la réduction des risques de catastrophe dans le contexte des changements climatiques, le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les femmes soient véritablement associées à l ’ élaboration des textes de loi, politiques nationales et programmes relatifs aux changements climatiques, à l ’ intervention en cas de catastrophe et à la réduction des risques de catastrophe. Il invite également l ’ État partie à trouver des solutions aux problèmes de la faim et à garantir la sécurité alimentaire pour les femmes rurales touchées par les effets des changements climatiques.

Femmes et autonomisation économique

38.Le Comité constate avec inquiétude que les taux de pauvreté dans l’État partie demeurent anormalement élevés parmi les femmes. Qui plus est, les femmes sont les chefs de famille de plus de 60 % des foyers pauvres et très pauvres, en particulier dans les zones urbaines défavorisées.

39. Le Comité engage l ’ État partie à renforcer ses mesures de lutte contre la pauvreté, grâce notamment à la mise en œuvre de la Politique de revenu d ’ inclusion sociale, en accordant une attention particulière aux femmes et aux femmes chefs de famille dans les zones urbaines défavorisées. Il l ’ engage également à prendre des mesures pour garantir la sécurité alimentaire des femmes, grâce, par exemple, au soutien à l ’ activité agricole et à la constitution de stocks alimentaires et de réserve d ’ eau afin d ’ éviter les famines. Le Comité note l ’ importance du tourisme, mais demande à l ’ État partie de prendre également en compte d ’ autres secteurs qui emploient de nombreuses femmes, comme la commercialisation des produits agricoles, la pêche et l ’ agrobusiness.

Femmes rurales

40.Le Comité salue les efforts de l’État partie pour lutter contre la pauvreté dans la population rurale et sa prise en compte des femmes rurales dans la stratégie nationale de réduction de la pauvreté. L’accès en toute sécurité à une eau potable et l’assainissement pour les foyers ruraux ont également été améliorés. Cependant, le comité demeure préoccupé par :

a)Le fait que 25 % de la population rurale utilisent encore des sources d’eau non traitée et que 35 % des habitations en zone rurale ne disposent pas de toilettes ni d’un système d’évacuation des eaux usées ;

b)Les taux élevés d’illettrisme chez les femmes rurales ;

c)Les travaux domestiques non rémunérés, qui continuent de peser de façon disproportionnée sur les femmes rurales par rapport aux hommes ruraux ;

d)Le fait que seuls 8,5 % de femmes travaillant dans l’agriculture ont accès à la propriété foncière et à leur utilisation à des fins agricoles, et que, dans les cas où les biens matrimoniaux communs sont enregistrés au nom d’un seul époux, c’est généralement celui de l’homme qui figure sur le titre de propriété, et ce, même si, en 2015, 49,7 % des personnes employées dans l’agriculture étaient des femmes ;

e)L’accès limité des femmes rurales aux informations, aux activités de renforcement des capacités et aux forums pour prise des décisions en matière d’agriculture, de développement des entreprises et de nouvelles technologies ;

f)L’inclusion limitée des femmes rurales dans la conception et la mise en œuvre des mesures de promotion des énergies renouvelables et de l’exploitation durable de l’océan, connue sous le nom d’« économie bleue ».

41. Le Comité invite l ’ État partie à :

a) I nvesti r davantage dans la distribution d ’ eau, y compris l ’ eau dessalée, et l ’ assainissement dans les zones rurales, et faire en sorte que les femmes soient réellement impliquées dans les Comités municipaux de l ’ environnement, de l ’ eau et de l ’ assainissement, ainsi que dans les divisions de l ’ assainissement ;

b) Multiplier les programmes d ’ alphabétisation à destination des adultes et faciliter l ’ accès à la formation et à l ’ enseignement professionnels pour les femmes vivant dans les zones rurales ;

c) P rendre des dispositions pour reconnaître, réduire et redistribuer les soins et travaux domestiques non rémunérés des femmes rurales en investissant dans les services sociaux et les infrastructures, tels que les structures d ’ accueil pour les e nfants ou les personnes âgées ainsi que les logements et les transports à un coût abordable ;

d) Donner aux femmes accès à la propriété foncière et à l ’ utilisation des terres à des fins agricoles, et mettre en place des mécanismes pour que la propriété foncière possédée en commun, y compris dans les unions de fait, soit enregistrée sous les noms des deux partenaires et que les femmes rurales aient accès à une assistance juridique lorsqu ’ elles souhaitent exercer ces droits de propriété, assistance qui fait désormais partie des services municipaux à la suite de la fermeture des casas do direito (centres d ’ information juridique et d ’ aide aux victimes) ;

e) Mettre en place des mécanismes pour intégrer l ’ analyse des questions de genre et impliquer davantage les femmes dans le secteur agricole et l ’ économie bleue, notamment grâce au Plan stratégique pour le développement durable, faire en sorte que les femmes rurales puissent bénéficier d ’ un appui technique et d ’ une formation en matière d ’ innovation, de nouvelles technologies agricoles et de développement de l ’ agrobusiness, et participer à des petits et microprojets, et faciliter leur accès à des services bancaires, dont des services de banque mobile ;

f) S ’ assurer que les femmes rurales ont accès à l ’ électricité générée par les énergies renouvelables pour la cuisine et leurs autres besoins, comme le prévoient le Plan national pour l ’ énergie renouvelable et le Plan national sur l ’ efficacité énergétique, et qu ’ elles participent activement à l ’ élaboration et à la mise en œuvre de mesures pour l ’ exploitation durable de l ’ océan, appelée « économie bleue ».

Femmes handicapées

42.Le Comité s’inquiète des taux élevés d’illettrisme chez les filles et les femmes handicapées ainsi que de la violence fondée sur le genre (violence physique, psychologique et sexuelle) à laquelle les femmes handicapées sont très souvent exposées et qu’elles hésitent à signaler. Il déplore également les préjugés dont elles sont victimes en ce qui concerne leur santé et leurs droits en matière de sexualité et de procréation, les pressions sociales et familiales qu’elles subissent pour mettre un terme à leur grossesse et leur utilisation peu fréquente des contraceptifs.

43. Le Comité invite l ’ État partie à :

a) Donner aux femmes et filles handicapées accès à une éducation inclusive ainsi qu ’ à des mécanismes de plainte en cas de violation de leurs droits ;

b) Prendre des mesures supplémentaires pour rendre le système de soins de santé plus inclusif et accessible aux femmes handicapées ;

c) Veiller à ce que tous les actes de violence sexuelle et de stérilisation forcée commis contre les femmes et les filles handicapées fassent l ’ objet d ’ enquêtes en bonne et due forme, que leurs auteurs soient poursuivis et punis comme il convient, et que toute procédure médicale soit conduite avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées, conformément aux normes internationales.

Femmes migrantes

44.Le Comité salue les mesures en faveur des femmes prises par la Direction générale de l’immigration. Il ne peut toutefois s’empêcher de déplorer les difficultés que rencontrent les immigrantes lorsqu’elles tentent de régulariser leur situation et d’obtenir l’accès à l’éducation et aux services de santé, dont les services de santé sexuelle et procréative, du fait des coûts, des barrières linguistiques, des horaires de travail excessifs et des attitudes patriarcales de leurs partenaires. Le Comité constate qu’aucun cas de mutilation génitale féminine n’a été signalé, mais demeure inquiet de sa possibilité au sein des communautés de migrants.

45. Le Comité recommande à l ’ État partie de continuer de prêter assistance aux femmes migrantes, d ’ envisager la régularisation de leur situation migratoire et de veiller à ce qu ’ elles puissent avoir accès à l ’ éducation et à des services de santé. Il lui recommande également de lutter contre les comportements patriarcaux, qui portent préjudice aux droits des femmes migrantes et de rester vigilant sur les cas possibles de mutilation génitale féminine.

Mariage et rapports familiaux

46.Le Comité constate la baisse du nombre de cas de polygamie de fait dans l’État partie. Il estime néanmoins que les efforts pour changer les pratiques et les comportements sociaux restent insuffisants et que des filles âgées de moins de 18 ans vivent parfois encore dans des unions de fait, qui équivalent à des mariages d’enfants. Le Comité constate avec inquiétude que le Code civil reconnaît les unions de fait de personnes âgées de 19 ans ou plus qui ont vécu ensemble pendant au moins trois ans, ce qui revient, en pratique, à légitimer ces unions pour des enfants âgés de 16 ans seulement. Le Comité s’inquiète également des difficultés rencontrées par les femmes au moment de la séparation et du divorce, qui les plongent souvent dans des situations socio-économiques précaires. Il s’émeut enfin des huit féminicides qui ont eu lieu en 2018, chaque fois dans des situations où ces femmes quittaient leur partenaire.

47. Le Comité engage l ’ État partie à :

a) Redoubler d ’ efforts pour prévenir la polygamie de fait et mettre fin à cette pratique ;

b) Modifier le Code civil pour interdire les unions de fait de filles âgées de moins de 18 ans, qui équiva len t à des mariages d ’ enfants, et ne reconnaître que les unions de fait qui ont commencé quand les deux partenaires étaient âgés d ’ au moins 18 ans ;

c) S ’ assurer que les biens possédés en commun par les hommes et les femmes dans les unions de fait sont enregistrés, dès le départ, sous les noms des deux partenaires ;

d) Veiller à ce que les femmes en situation de séparation et de divorce puissent accéder à un soutien financier, à des ordonnances de protection et à l ’ aide juridictionnelle, s ’ il y a lieu.

Collecte et analyse de données

48. Le Comité recommande l ’ État partie de recueillir et de publier des données ventilées par sexe, genre, appartenance ethnique, handicap et âge afin d ’ éclairer les politiques et programmes en faveur des femmes et des filles, ainsi que de faciliter le suivi des progrès accomplis dans la réalisation des cibles relatives à l ’ égalité des genres des objectifs de développement durable.

Modification du paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention

49. Le Comité invite l ’ État partie à accepter la modification apportée au paragraphe 1 de l ’ article 20 de la Convention concernant le temps de réunion du Comité.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

50. Le Comité invite l ’ État partie à s ’ appuyer sur la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing et à continuer à évaluer la réalisation des droits consacrés par la Convention dans le contexte de l ’ examen après 25 ans de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d ’ action de Beijing afin de parvenir à l ’ égalité réelle entre les femmes et les hommes.

Diffusion

51. Le Comité demande à l ’ État partie de veiller à diffuser rapidement les présentes observations finales, dans la ou les langue(s) officielle(s) de l ’ État partie, aux institutions publiques compétentes à tous les niveaux (national, régional et local en particulier au Gouvernement, au parlement et au corps judiciaire, afin d ’ en permettre la pleine application.

Assistance technique

52. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ établir un lien entre l ’ application de la Convention et l ’ action qu ’ il mène en faveur du développement, et de faire appel à cette fin à l ’ assistance technique régionale ou internationale.

Ratification d’autres instruments

53. Le Comité souligne que l ’ adhésion de l ’ État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme contribuerait à promouvoir l ’ exercice effectif des droits individuels et libertés fondamentales par les femmes dans tous les aspects de la vie. Il l ’ invite donc à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, à laquelle il n ’ est pas encore partie.

Suite donnée aux observations finales

54. Le Comité regrette que l ’ État partie ne lui ait pas communiqué d ’ informations sur les mesures prises pour appliquer les recommandations appelant spécifiquement une action immédiate formulées dans ses observations finales précédentes et le prie de lui communiquer par écrit, dans un délai de 2 ans, des informations sur les mesures qu ’ il aura prises pour appliquer les recommandations énoncées aux paragraphes 22 a), 26 a), 29 c) et 33 a) ci-dessus.

Établissement du prochain rapport

55. Le Comité invite l ’ État partie à soumettre son dixième rapport périodique en juillet 2023. Le rapport devra être présenté dans les délais et couvrir toute la période écoulée, jusqu ’ à la date à laquelle il sera soumis.

56. Le Comité invite l ’ État partie à se conformer aux directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, dont le document de base commun et les rapports correspondant à chaque instrument ( HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).