Nations Unies

CED/C/ARM/AI/1

Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

Distr. générale

26 mai 2022

Français

Original : anglais

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des disparitions forcées

Vingt-troisième session

12-23 septembre 2022

Examen des renseignements complémentaires soumis par les États parties à la Convention

Renseignements complémentaires soumis par l’Arménie en application de l’article 29 (par. 4) de la Convention *

[Date de réception : 11 avril 2022]

I.Renseignements complémentaires sur la suite donnée aux paragraphes 12 et 13 des observations finales (CED/C/ARM/CO/1)

1.Le 5 mai 2021, le Parlement arménien a adopté le nouveau Code pénal de la République d’Arménie, qui entrera en vigueur en juillet 2022. La disparition forcée y est érigée en infraction. On notera en particulier les dispositions suivantes :

« Article 451 − Disparition forcée :

1.La disparition forcée, à savoir le fait, pour un fonctionnaire, une autre personne ou un groupe de personnes agissant avec l’autorisation, l’appui, le consentement ou la complicité de l’État, de détenir un individu, légalement ou non, et de nier la détention de cet individu ou de dissimuler son statut ou son lieu de détention, soustrayant ainsi la personne disparue à la protection de la loi, est puni d’une peine d’emprisonnement de trois à sept ans.

2.Est passible d’une peine de cinq à dix ans d’emprisonnement l’acte visé au premier paragraphe du présent article, lorsque la victime est :

1)Une femme enceinte ;

2)Un mineur ;

3)Une personne sans défense.

3.Le fait d’entraîner involontairement la mort ou d’autres conséquences graves par suite d’un acte visé au premier ou au second paragraphe du présent article est puni d’une peine de huit à quinze ans d’emprisonnement. ».

2.Parmi les actes constitutifs de crime contre l’humanité et engageant à ce titre la responsabilité pénale figure la disparition forcée. On notera en particulier les dispositions suivantes :

« Article 135 du nouveau Code pénal − Crimes contre l’humanité :

1.La commission d’un des actes visés, y compris la disparition forcée, dans le cadre d’attaques généralisées ou régulières contre des civils est passible d’une peine de douze à vingt ans d’emprisonnement.

Article 137 du nouveau code pénal − Crimes de guerre contre une personne bénéficiant d’une protection internationale :

Les actes suivants, considérés comme constitutifs d’une violation grave des normes du droit international humanitaire ou des lois et coutumes de la guerre lorsqu’ils sont commis contre une personne protégée par le droit international humanitaire ou une autre personne bénéficiant d’une protection internationale dans le cadre d’un conflit armé international ou d’un conflit armé ne présentant pas de caractère international, sont passibles d’une peine de six à douze ans d’emprisonnement : 1) atteinte à la santé de gravité légère ou modérée ; 2) imposition ou exécution d’une peine en l’absence de procès équitable ; 3) humiliation portant atteinte à l’honneur ou à la dignité. Les actes suivants, considérés comme constitutifs d’une violation grave des normes du droit international humanitaire ou des lois et coutumes de la guerre, tels que […] la disparition forcée, lorsqu’ils sont commis contre une personne visée au premier paragraphe du présent article, sont passibles d’une peine de douze à vingt ans d’emprisonnement ou d’une peine de réclusion à perpétuité. ».

II.Renseignements complémentaires sur la suite donnée au paragraphe 17 des observations finales

3.Conformément à l’article 55 de la Constitution, nul ne peut être expulsé ou extradé vers un État étranger où il courrait un risque réel d’être soumis à la peine de mort, à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants, et aucun citoyen arménien ne peut être extradé vers un État étranger, sauf dans les cas prévus par les traités internationaux ratifiés par la République d’Arménie.

4.Il convient de mentionner que la loi sur l’entraide judiciaire internationale est en cours d’élaboration, et qu’il sera envisagé, dans le cadre de ce processus, de faire du risque de disparition forcée un motif de non-extradition.

III.Renseignements complémentaires sur la suite donnée au paragraphe 19 des observations finales

5.Les personnes privées de liberté bénéficient des garanties juridiques fondamentales visant à prévenir la torture et les mauvais traitements inscrites dans la Constitution. En janvier 2018, l’Assemblée nationale a adopté une loi portant modification du Code de procédure pénale, qui dispose qu’avant de recevoir notification du mandat d’arrêt émis contre elle, toute personne placée en garde à vue a le droit d’être informée des fondements de sa privation de liberté, de garder le silence, de recevoir verbalement des précisions sur ses droits, de se voir notifier et expliquer par écrit ses droits et obligations, d’informer la personne de son choix du lieu où elle se trouve, de faire appel à un avocat et de subir un examen médical si elle en fait la demande. Les quatre derniers droits s’exercent à partir du moment où la personne concernée se trouve devant l’organe d’enquête ou l’enquêteur. Immédiatement après l’arrestation, la personne arrêtée est inscrite dans le registre de garde à vue du commissariat ou du poste de police concerné, et par la suite le registre est tenu par des agents de police. En application d’une directive du Président du Comité en date du 28 décembre 2016, les antennes et les sections du Comité lui soumettent, par voie de rapport, les résultats de leurs activités semestrielles et annuelles, dans lesquels elles indiquent, entre autres, le nombre de violations des droits des personnes arrêtées qui ont été commises et donnent un aperçu de la nature de ces violations. Indépendamment de la notification du mandat d’arrêt à la personne arrêtée, celle-ci acquiert, dans un délai de quatre heures après son placement effectif en garde à vue, les droits et responsabilités attachés à la qualité de suspect.

6.En outre, l’article 15 de la loi relative à la détention des personnes en état d’arrestation ou de détention consacre également les garanties minimales susmentionnées : après son arrestation, le suspect a droit à ce que l’organe d’enquête, l’enquêteur ou le ministère public lui notifie et explique ses droits sans délai, par écrit, dans un document qu’il signe et dans une langue qu’il comprend, ainsi que les motifs et les fondements de sa privation de liberté ; il a en outre la possibilité d’informer certaines personnes du lieu où il se trouve, de faire appel à un avocat, de solliciter un examen médical et de prendre rendez-vous avec un avocat. Le suspect peut s’entretenir avec l’avocat en toute liberté, sans limitation du nombre et de la durée des entretiens, les jours ouvrables ou non, à des heures de service ou non et dans des conditions permettant de les voir, mais sans les entendre. La personne en état d’arrestation ou de détention et son avocat ont également le droit de solliciter un examen médico-légal. Le suspect a le droit d’informer, par téléphone ou par tout autre moyen possible, la personne de son choix du lieu de sa garde à vue et des motifs de celle-ci immédiatement après son placement en garde à vue. Les mesures susmentionnées attestent que les personnes privées de liberté bénéficient de toutes les garanties fondamentales.

7.En 2019 a été élaboré un projet de décision tendant à la modification du règlement intérieur des centres de détention relevant de la police (adopté en 2008), qui prévoit de modifier le formulaire d’enregistrement no 1 pour y faire figurer la date et l’heure de l’appréhension (placement effectif en garde à vue), de l’arrestation et de l’entrée dans le centre de détention.

8.Les documents relatifs à la privation de liberté des personnes en général et au transfèrement des personnes détenues en particulier, y compris les personnes condamnées, d’un établissement pénitentiaire à un autre, sont établis à l’aide du formulaire no 1 figurant à l’annexe 5 de l’arrêté no 311-N du 18 décembre 2009 portant approbation des modalités d’exécution des activités des subdivisions structurelles de l’administration pénitentiaire du Ministère de la justice de la République d’Arménie et intégrés dans les dossiers personnels des intéressés.

9.Compte tenu de la nécessité de produire des informations complètes sur les personnes placées dans les établissements pénitentiaires, d’assurer une analyse exhaustive des activités des subdivisions et de mettre en place des mécanismes de contrôle efficaces, un système de gestion électronique du registre d’informations sur les personnes placées en détention provisoire et les condamnés, d’une envergure et doté de capacités techniques sans précédent, a été conçu et mis au point. Ce système présente toutes les informations disponibles sur les différentes tâches accomplies en application de la législation à l’égard des personnes placées en détention provisoire et des condamnés (par exemple, des informations sur les libérations conditionnelles, les modifications apportées aux régimes d’exécution de la peine, les visites, les activités pédagogiques et les travaux réalisés ainsi que d’autres données).

10.Le Gouvernement arménien a alloué les fonds nécessaires à la mise en service du système en 2019. De plus, une révision technique a été effectuée et des formations à la bonne exploitation du système, assorties d’un calendrier, ont été élaborées à l’intention des agents des établissements pénitentiaires en août 2020. Il convient de noter que le lancement (mise en service complète) du système a été reporté pour des raisons objectives (loi martiale et COVID-19) pour une longue durée et que des mesures visant à assurer son bon fonctionnement seront prises, éventuellement à brève échéance.

IV.Renseignements complémentaires sur la suite donnée au paragraphe 21 des observations finales

11.Les activités du Défenseur des droits de l’homme, qui joue le rôle de mécanisme national de prévention, visent à prévenir la torture et les autres traitements cruels, inhumains ou dégradants dans les lieux de privation de liberté (art. 27 de la Loi constitutionnelle de la République d’Arménie relatif au Défenseur des droits de l’homme).

12.En vertu de son rôle de mécanisme national de prévention, le Défenseur des droits de l’homme a le droit :

•De se rendre régulièrement ou ponctuellement dans les lieux de détention afin de prévenir les mauvais traitements, sans devoir informer à l’avance l’établissement concerné de l’heure ni de l’objet de ses visites ;

•De rendre visite aux personnes privées de liberté et de s’entretenir en privé avec elles, étant entendu que nul ne peut surveiller ces entretiens ou s’y immiscer ;

•De faire appel à un interprète s’il le juge nécessaire et d’utiliser des équipements techniques ;

•D’adresser aux autorités et organisations compétentes des recommandations visant à prévenir les mauvais traitements et à améliorer les conditions de détention dans les lieux de privation de liberté ;

•D’obtenir des informations et des éclaircissements sur le traitement et les conditions de détention des personnes dans le lieu de privation de liberté, ainsi que sur toute autre question entrant dans le cadre de ses prérogatives ;

•De prendre connaissance de tous les documents nécessaires à l’exercice de ses prérogatives et d’en recevoir copie ;

•D’adresser aux autorités compétentes des recommandations sur les actes juridiques ou les projets d’actes juridiques ;

•D’exercer d’autres pouvoirs prévus par la loi.

V.Renseignements complémentaires sur la suite donnée au paragraphe 23 des observations finales

13.Les dispositions de la Convention sont régulièrement abordées lors de la formation professionnelle des candidats aux fonctions de juge et de procureur et de la formation annuelle dispensée aux juges, aux candidats aux fonctions de juge et aux procureurs, dans le cadre du cours intitulé « Questions actuelles de droit pénal », et plus particulièrement des thématiques « Questions relatives à la qualification exacte d’actes visés dans la partie spéciale du Code pénal de la République d’Arménie », « Questions concernant la délimitation des éléments matériels constitutifs d’infractions apparentées et mesures prises par les législateurs et les responsables de l’application des lois pour les régler », « Positions juridiques de la Cour européenne des droits de l’homme sur la protection des droits garantis par la Convention européenne des droits de l’homme dans le domaine du droit pénal » et « Teneur des obligations internationales de la République d’Arménie », ainsi que lors du cours intitulé « Questions actuelles de procédure pénale » et notamment du thème « Problèmes liés à l’application des accords internationaux sur l’assistance juridique ».

14.Lors des formations professionnelles du Comité d’enquête de la République d’Arménie pour les personnes inscrites comme candidats à des fonctions autonomes, les dispositions de la Convention sont abordées dans le cadre du cours « Questions actuelles de droit pénal », et plus particulièrement du thème « Teneur des obligations internationales de la République d’Arménie », et pendant la formation des personnes exerçant des fonctions autonomes dans le cadre du cours « Problèmes actuels liés à l’application des positions juridiques de la Cour européenne des droits de l’homme en matière pénale ».

VI.Renseignements complémentaires sur la suite donnée au paragraphe 25 des observations finales

15.Conformément au Code de procédure pénale en vigueur, le terme « victime » s’entend d’une personne ayant subi un préjudice moral, physique ou matériel direct, quels que soient les éléments matériels particuliers de l’infraction.

16.Le nouveau Code de procédure pénale a été adopté le 30 juin 2021 et entrera en vigueur le 1er juillet 2022. Il y est énoncé que le terme « victime » s’entend de toute personne physique ou morale, de toute communauté ou de toute organisation internationale ayant subi un préjudice quelconque découlant d’une infraction présumée ou risquant de subir un préjudice si cette infraction était commise. L’article 50 définit clairement les droits et les responsabilités de la victime.

17.Compte tenu de la définition de la victime donnée dans le nouveau Code de procédure pénale et reproduite plus haut, qui n’établit aucune distinction entre les types de préjudice et recouvre aussi bien les préjudices directs que les préjudices indirects découlant d’une infraction, toute personne disparue ou ayant subi un préjudice résultant directement d’une disparition forcée doit être considérée comme une victime.

VII.Renseignements complémentaires sur la suite donnée au paragraphe 29 des observations finales

18.Comme indiqué dans la réponse au point 12, le nouveau Code pénal prévoit que le fait que la victime d’une disparition forcée soit une femme enceinte ou un mineur est une circonstance aggravante de l’infraction, laquelle, en pareil cas, est punie d’une peine de cinq à dix ans d’emprisonnement.

19.Conformément à l’article 325 du Code pénal en vigueur (fabrication, vente ou utilisation de faux documents, timbres, sceaux, en-têtes de lettre et plaques minéralogiques), la falsification d’un document officiel conférant des droits ou octroyant une exonération de responsabilité, ou de tout autre document officiel dans le but d’utiliser ou de vendre un tel document, ou la fabrication et la vente de faux sceaux, signes, en-têtes de lettre ou plaques minéralogiques dans le même but, ainsi que l’utilisation d’un document manifestement contrefait, est punie d’une amende d’un montant équivalent à 200 à 400 fois le salaire minimum, ou d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à deux ans. Le nouveau Code pénal contient également une disposition à cet effet.

VIII.Police de la République d’Arménie

20.Entre 2015 et 2021, des policiers ont suivi des formations au Centre de formation du Complexe éducatif de la police de la République d’Arménie sur les thèmes suivants : « Décisions de la Cour européenne des droits de l’homme concernant les violations de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme commises par l’Arménie », « Torture et traitements inhumains ou dégradants », « Droit à la vie », « Genre et stéréotypes de la socialisation », « Le genre comme paradigme socioculturel », « Violence de genre », « Violence domestique et violence sexuelle », « Caractéristiques pénales de la traite et de l’exploitation des êtres humains », « Particularités de la lutte contre l’exploitation et la traite des êtres humains » et « Modalités d’organisation de la lutte contre l’exploitation et la traite des êtres humains ».

21.Il est actuellement prévu d’inclure la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées dans le programme d’enseignement du Centre de formation du Complexe éducatif de la police de la République d’Arménie.