Nations Unies

CAT/C/TUR/4

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

26 janvier 2015

Français

Original: anglais

Comité contre la torture

Examen des rapports présentés par les États parties en application de l’article 19de la Conventionconformément à la procédure facultative pour la soumission des rapports

Quatrièmes rapports périodiques des États parties devant être présentés en 2014*

Turquie******

[Date de réception:22 octobre 2014]

Réponses du Gouvernement turc aux questions formulées dans la liste de points soulevés par le Comité contre la torture (CAT/C/TUR/Q/4)

Article 2

Question  1: Compte tenu des préoccupations exprimées par le Comité dans ses précédentes observations finales ( par.  7) au sujet des allégations de torture et de mauvais traitem ents dans des lieux non officiels de détention, veuillez fournir des informations sur toutes les nouvelles mesures prises par l’ État parte, pendant la période considérée, pour prévenir ces pratiques, poursuivre les responsables en justice et les sanctionner. Veuillez également fournir des renseignements sur les enquêtes ouvertes à la suite de plaintes relatives à des brutalités policières commises en dehors des commissariats de police, et indiquer le nombre d’enquêtes ayant abouti à des poursuites et à des condamnations, notamment à des sanctions disciplinaires ou pénales. Donner également des informations sur toutes les enquêtes en cours et sur les poursuites engagées dans l’affaire Ahmet Koca – lequel s’est plaint d’avoir été passé à tabac par plusieurs agents de police, sur la voie publique et à l’intérieur d’une voiture de police, dans le quartier de Fatih, à Istanbul, en  juin  20 12, et dont les allégations ont été partiellement corroborées, semble-t-il, par des films vidéo tournés par des particuliers .

1.Les tableaux figurant à l’annexe 1 fournissent des données sur l’ensemble des enquêtes menées, des affaires traitées, des décisions de non-poursuite et autres décisions de justice prises du début de l’année 2013 au 28 mars 2014 en liaison avec des plaintes relatives à des tortures et mauvais traitements (articles 94 et 95 du Code pénal) et à un usage excessif de la force (article 256) par des agents de police.

2.Au sujet de l’affaire AhmetKoca, une procédure pénale a été engagée par le Procureur de la République auprès de la Deuxième Cour d’assises d’Istanbul, au motif que les officiers de police A.D, M.M.G, A.E, M.K, S.A.A, A.Y, C.A.A, A.G, F.K, M.A et A.Ö avaient commis des actes de violence à l’égard d’AhmetKoca, le 18 juin 2012. Les officiers de police en question ont été accusés de torture en vertu de l’article 94 du Code pénal. L’affaire est en cours de jugement.

3.Au sujet de l’incident, le Conseil de discipline de la Police provinciale d’Istanbul a rendu l’arrêt suivant: la promotion de quatre officiers de police a été suspendue à long terme (16 mois), aucune sanction n’a été prise dans le cas de six autres officiers de police, une réduction de salaire d'un jour a été imposée dans le cas d’un autre officier pour avoir manqué à son obligation de surveillance, et un autre officier de police a été réprimandé.

4.En outre, le dossier de l’un des officiers de police incriminés a été transmis au Haut Conseil de discipline de la Direction générale de la sécurité, afin de pouvoir prononcer une peine disciplinaire plus lourde. Au final, le policier en question a été démis de ses fonctions « pour avoir infligé des tortures à des membres du personnel ou à des personnes de passage dans les locaux de police ou y ayant été amenés ».

Question  2 : Prière d’indiquer si, comme le Comité l’a recommandé dans ses observations finales ( par.  13), l’ État partie a réexaminé les condamnations prononcées, au cours de la période considérée, en vertu de l’ article  265 du Code pénal, relatif au « recours à la violence ou aux menaces contre un agent de l’ État  », de l’ article  125 relatif à la « diffamation de la police », de l’ article  301, relatif au « dénigrement de l’identité turque » et de l’ article  277, relatif aux « tentatives d’influencer le cours de la justice ». Veuillez préciser en particulier si certaines de ces condamnations résultaient de contre-accusations portées contre des personnes qui s’étaient plaintes de brutalités policières ou des membres de la famille de victimes présumées pour les intimider et les dissuader de porter plainte. Prière d’indiquer également si l’une ou l’autre de ces condamnations a été infirmée en raison de l’existence d’actes d’intimidation, et si cela a motivé l’ouverture de nouvelles enquêtes sur les allégations de torture et de brutalités policières. Veuillez indiquer également si des agents de l’ État ont fait l’objet de sanctions disciplinaires ou pénales pour avoir porté des contre-accusations dirigées contre les victimes présumées ou des membres de leur famille au cours de la période considérée. Enfin, veuillez commenter le cas de Fevziye Cengiz, qui aurait été accusée d’« injures et insultes à fonctionnaire », et menacée d’une peine de six ans d’emprisonnement pour avoir accusé des policiers d’Izmir d’avoir abusé d’elle pendant sa détention, en  juillet  20 11.

5.Nous ne disposons pas d’informations précises sur les cas évoqués dans le cadre de la Question 2.Toutefois, il sera utile de noter que l’article 301 du Code pénal a été modifié en 2008, afin de résoudre des difficultés de mise en œuvre. Depuis cet amendement, on a constaté une baisse très importante (à hauteur de 97 %) des affairespoursuivies en justice, dans ce contexte précis.

6.En ce qui concerne les accusations de mauvais traitement de MmeFevziyeCengiz par la police lors de sa détention pour défaut de présentation d’une pièce d’identité:

au niveau judiciaire, l’affaire pénale concernant quatre officiers de police est toujours en cours d’examen devant la 6eCour d’assises d’Izmir;

au niveau disciplinaire, dans l’affaire concernant deux officiers de police jugés coupables, une suspension de toute promotion a été décidée pour une période de 12 mois, en vertu du Statut disciplinaire; mais aucune sanction n’a été prononcée à l’encontre de quatre autres officiers de police. Enfin, une mesure administrative a été prise à l’égard de deux officiers de police: ces derniers ont été mutés en dehors de la province d’Izmir.

7.Toujours dans le cadre de cette affaire, un Rapport d’enquête concernant les commissariats de police d’Izmir a été élaboré par la Commission d’enquête sur les droits de l’homme de la Grande Assemblée nationale de Turquie.Ce rapport se félicite de la rapidité des poursuites et des sanctions disciplinaires; mais ce document juge également insuffisante la sanction disciplinaire prononcée, étant donné la gravité de l’incident; de plus, cette sanction est loin de mettre un terme aux préoccupations des autorités – ce qui indique la nécessité de modifier le statut disciplinaire pour le mettre en conformité avec les droits de l’homme. D’autre part, il a été déclaré que la présence de caméras dans les commissariats de police était un moyen de prévention concret, ainsi qu’un moyen d’identification des auteurs d'infractions.

Question  3 : Prière de fournir des informations sur toutes les affaires survenues depuis le dernier examen, et dans lesquelles des agents des forces de l’ordre auraient fait l’objet de sanctions disciplinaires ou pénales pour usage excessif de la force ou pour brutalités à l’égard de manifestants. À la lumière des précédentes observations finales du Comité ( par.  13), veuillez décrire les mesures prises pour faire en sorte que les lois internes, les règles d’engagement et les procédures applicables au maintien de l’ordre public et à l’action anti-émeutes soient pleinement conformes aux Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois, en particulier la disposition selon laquelle ceux-ci ne doivent recourir à l’usage meurtrier d’armes à feu que si cela est absolument inévitable pour protéger des vies humaines, et pour mettre en place un système de suivi de l’application de la Loi sur les pouvoirs et les devoirs de la police ( Loi No.  2559), et empêcher que la police ne l’utilise de manière arbitraire. Veuillez donner également des renseignements sur la teneur des « Directives à l’intention du personnel chargé de l’action anti-émeutes » publiées en novembre  20 11, et décrire les mesures prises pour vérifier l’application desdites Directives. Décrire également l’état d’avancement des enquêtes éventuelles sur le comportement de la police au cours de la manifestation du 31  mai  20 11, à Hopa, compte tenu des allégations selon lesquelles des agents de police auraient battu des manifestants lors de la dispersion de la manifestation et de la détention de certains manifestants, ainsi qu’au cours d’une manifestation tenue à Ankara pour protester contre les violences commises à Hopa. Enfin, veuillez donner des précisions au sujet des enquêtes menées sur les allégations de « passage à tabac » qu’auraient subi 19 élèves de l’enseignement primaire et secondaire, de la part d’agents de police, à la suite d’une manifestation estudiantine, le 12  octobre  20 11.

8.Les membres des forces de l’ordre utilisent leur droit de recours à la force conformément à l’article 16 de la « Loi sur les pouvoirs et les devoirs de la Police », aux Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation d’armes à feu par les responsables de l’application des lois, et à la Directive sur la procédure et les principes que doivent respecter les agents des forces de l’ordre en cas de trouble à l’ordre public. Dans ce contexte,il convient de souligner que le principal objectif du recours à la force et aux armes est d’assurer l’ordre public, de prévenir tout crime effectif et/ou potentiel,d’arrêter les auteurs de violences, ou encore d’éliminer toute menace à la sécurité collective ou individuelle. Le pouvoir d’utiliser des armes à feu est considéré comme un dernier recours, et le « principe de proportionnalité » - inscrit dans la Constitution en tant que restriction légale des droits – ainsi que celui de « progressivité » sont respectés comme il se doit.

9.Les forces de l’ordre font preuve de tous les scrupules et de la compréhension nécessaires lorsqu’elles interviennent dans la sphère sociale ou sociétale. Elles s’efforcent, avec tout le soin nécessaire, d’intervenir de manière graduelle et proportionnée en cas de violations répétées et délibérément agressives de la loi, et d’envoyer en même temps des signaux clairs à des manifestants ou des contestataires qui enfreignent la loi, portent atteinte à l’ordre public, agressent physiquement des personnes ou un environnement donné, s’en prennent aux libertés et droits fondamentaux des personnes et poursuivent des objectifs contraires à la paix sociale. Les responsables de l’ordre et du respect de la loine décident de recourir à la force que s’ils y sont absolument contraints. La nature et l’ampleur de l’action des forces de l’ordre sont proportionnelles au niveau de résistance auquel les autorités font face, et peuvent être plus importants à mesure que se développe également la résistance ou l’agression vis-à-vis des forces de police. Tous les membres des forces de sécurité reçoivent l’ordre de respecter très strictement la loi dans l’exercice de leurs fonctions.

10.Toute allégation de dysfonctionnement ou de transgression de la loi par des agents des forces de l’ordre fait l’objet d’une enquête approfondie.

11.Les informations fournies par la Direction générale de la sécuritéau sujet de membres des forces de l’ordre visés par une procédure judiciaire ou administrative – en vertu des articles 256, 94 et 95 – figurent ci-après, dans nos réponses à la Question 25.

12.Les chiffres fournis par le Ministère de la justice figurent à l’annexe 1.

13.Examinons à présent les allégations selon lesquelles des agents des forces de l’ordre auraient abusé de leur pouvoir et fait usage de la force de manière disproportionnée lors des incidents de Hopa, dans la province d’Artvin.

14.En ce qui concerne les procédures judiciaires, le Bureau du Gouverneur de la Province d'Artvin a refusé, le 4 octobre 2012, d’accorder l’autorisation d’enquêter sur les 59membres des forces de l’ordre qui auraient « abusé de leurs pouvoirs en ayant recours à la force » et « auraient fait un usage disproportionné et déraisonné de la force et de gaz lacrymogènes ».Cependant, la décision du Gouverneur d’Artvin a été cassée le 29 janvier 2013 par le Tribunal administratif régional de Trabzon, et l’affaire a été transmise au Bureau du Procureur public de Hopa.

15.Le 16 juin 2011, le Ministère de l’intérieur a accordé l’autorisation d’enquêter au sujet de trois fonctionnaires accusés de faute professionnelle. Deux des responsables en question ont fait appel, et le Conseil d’État a cassé cette décision le 26 janvier 2012.Puis, le 15 novembre 2012, l’affaire concernant le troisième fonctionnaire accusé de faute professionnellea été portée au pénal devant la Cour de justice de Hopa. Le procès est en attente.

16.En ce qui concerne les procédures disciplinaires, trois fonctionnaires ont été réprimandés, tandis qu’aucune action n’a été engagée contre l’un des responsables.

17.Afin de prévenir de nouveaux incidents du même type, 214fonctionnaires en poste dans la province d’Artvin ont reçu, depuis 2011, une formationconcernant l’usage de la force et la sécurité des personnes. En outre, lors de toutes les réunions publiques et des manifestations qui ont eu lieu à Artvin, un centre de gestion de la crise a été mis en place dans les locaux de la Direction provinciale de la sécurité – ce centre étant présidé par le Gouverneur adjoint de la province d’Artvin, avec le concours d’un fonctionnaire nommé par le Directeur adjoint de la sécurité au niveau provincial et le Commandant de la Gendarmerie provinciale. Ce centre est chargé du suivi en temps réel des réunions et manifestations publiques, et d’éventuelles interventions.

18.Concernant les incidents survenus à Ankara le 31 mai 2011, un certain nombre de personnes affiliées à divers groupes illégaux se sont rassemblées à Ankara pour protester contre les incidents ayant eu lieu à Hopa, dans la province d’Artvin. Ce groupe de personnes, formé par des organisations terroristes, a été à l’origine des événements: il a défilé en direction du bureau provincial du Parti AK. Ces personnes étaient cagoulées, pour dissimuler leur identité; elles ont eu recours à une violence organisée, ont bloqué les principales voies publiques et lancé des pierres, des morceaux de bois, des bouteilles – entre autres projectiles – vers les forces de l’ordre. Les manifestants voulaient visiblement semer le désordre, s’en prendre à l’autorité et provoquer un mouvement de peur et de panique au sein de la population.

19.Afin de mettre un terme à ces agressions, et en vertu de la Loi relative aux pouvoirs et aux devoirs de la police, ainsi que de la Loi sur les réunions et les manifestations sur la voie publique et du Code de procédure pénale et autres réglementations pertinentes, les mesures qui s’imposaient ont été prises sur ordre des procureurs publics.

20.Lors des manifestations violentes et illégales d’Ankara, des fonctionnaires de la Direction provinciale de la sécurité ont fait en sorte que les annonces, les avertissements, les communications et les négociations nécessaires aient lieu – en vue de prévenir de tels incidents et d’éviter qu’ils se reproduisent, de veiller à l’ordre et à la sécurité publics, d’arrêter les contrevenants et de protéger les droits et libertés de l'ensemble de la population.Les fonctionnaires et responsables en question ont procédé à des interventions proportionnées, dans le respect le plus strict de la loi.

21.Les manifestants placés en détention provisoire pour violation de la Loi sur les réunions et manifestations publiques ont été d’abord transférésdans les bureaux de la Direction de la sécurité d’Ankara.Après une fouille au corps et l’enregistrement des personnes en question, la procédure de garde à vue a pu commencer. Ces personnes ont été ensuite placées en détention, dans le respect des normes fixées par les conventions internationales auxquelles la Turquie est Partie.

22.Les poursuites contre les suspects, formulées par le Bureau du Procureur principal d’Ankara, ont été examinées par le 24eTribunal pénal de première instance d’Ankara, puis les procédures se sont poursuivies devant la 11eCour d’assises d’Ankara. Le 25 février 2014, cette cour d’assises a jugé qu’au sujet de l’accusation de « crimes commis au nom d’organisations illégales sans appartenance à ces dernières », il n’avait pas été possible d’établir la culpabilité des accusés, et ces derniers ont été acquittés, conformément à l’article 223, paragraphe 2-e du Code de procédure pénale.En ce qui concerne l’accusation de « propagande au nom d’une organisation terroriste » - relevant de l’article 7, paragraphe 2 de la Loi sur la lutte contre le terrorisme -, les poursuites ont été suspendues, une décision de défaut de juridiction a été prononcée, et cette affaire a été isolée dans le dossier en question, en vertu de la Loi No. 6352, entrée en vigueur après l’établissement du délit.

23.Suite aux procédures judiciaires concernant les membres des forces de l’ordre interpellés au sujet des incidents d’Ankara, une décision de « non-lieu » a été prononcée par le Bureau du Procureur principal d’Ankara vis-à-vis de l’un des fonctionnaires qui aurait été « coupable de faute professionnelle, d’injures verbales et d’avoir proféré des menaces ».Une autre instruction est en cours, sous l’égide du Procureur général d’Ankara, au sujet d’allégations selon lesquelles « un certain nombre de membres des forces de l’ordre auraient maltraité des individus lors de leur arrestation, les auraient maintenus pendant longtemps à l’intérieur des véhicules de police et différé leur transfert jusqu’aux commissariats de police où ces personnes devaient être mises en garde à vue ». Au niveau disciplinaire, les affaires concernant 16personnes ont été classées, et il a été décidé de ne prendre aucune sanction contre 202 autres membres des forces de l’ordre.

24.À ce jour, on ne dispose d’aucun élément concret susceptible de confirmer les allégations selon lesquelles des personnes placées en garde à vue après les incidents de Hopa et les manifestations d’Ankara contre ces incidents auraient été maltraitées.

25.Les membres de la police anti-émeutes suivent régulièrement une formation – conformément à l’article 41 de la réglementation sur l’Unité des forces mobiles.

26.Concernant les allégations relatives aux incidents de Mardin, une enquête administrative a eu lieu – à la suite de laquelle le fonctionnaire de la Direction de la sécurité de Mardin a été muté à la Direction de la sécurité d’Antalya et sanctionné par une suspension de sa promotion pendant six mois « pour avoir commis des actes contraires au sens de la dignité et à la confiance requis d’un agent de l’État dans l’exercice de ses fonctions ». Le fonctionnaire ainsi sanctionné a fait appel, auprès du Deuxième Tribunal administratif d’Antalya, de la mesure administrative prise à son encontre; mais l’appel a été rejeté par ce tribunal le 18 juillet 2013.

27.Au niveau des procédures judiciaires, une instruction a été ouverte par le Bureau du Procureur général de Nusaybin; la procédure est en cours, et il n’y a donc pas encore eu de décision définitive.

Question  4 : Veuillez fournir des informations actualisées sur les mesures prises par l’ État partie pour prévenir les actes de torture et les mauvais traitements en prison, enquêter sur ces actes, les poursuivre et les punir. Veuillez donner également des renseignements sur l’état d’avancement ou l’issue de toutes les enquêtes qui ont pu être menées sur de tels agissements au cours de la période considérée ; indiquer également si les auteurs ont été poursuivis et condamnés, quels étaient les chefs d’accusation et quelles peines ont été prononcées, ainsi que les réparations accordées aux victimes, y compris le montant des indemnités accordées. Veuillez répondre en particulier aux préoccupations du Comité concernant les points suivants :

a) Les enquêtes sur les allégations de torture et de mauvais traitements, dont des viols et des passages à tabac, subis par au moins 25 mineurs dans la prison de Pozanti - allégations formulées en  20 11 par l’Association des droits de l’homme et la Fondation des droits de l’homme – et les mesures prises pour traduire les responsables en justice ;

b) Les mesures prises pour s’assurer, eu égard aux précédentes observations finales du Comité ( par.  19), que les auteurs de viols, de violences sexuelles et d’autres actes de torture et de mauvais traitements à l’égard de femmes privées de liberté commis par un agent de la fonction publique ou par toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement rendent des comptes ;

c) Les mesures prises pour faire en sorte que tous les responsables officiels de la prison de Kalkandere, à Rize, et de la prison de Tekirdag rendent des comptes au sujet des allégations de mauvais traitement des détenus.

28.Depuis 2005, des amendements relativement importants ont été apportés à la législation sur l’exécution des sanctions pénales.Dans le cadre de l’harmonisation de la législation turque et du droit de l’Union européenne, et conformément à la politique de « tolérance zéro vis-à-vis de la torture », des modifications ont été apportées, comme il se devait, à la législation visant à la prévention de la torture.Des mécanismes de surveillance et judiciaires ont été mis en place. Dans ce contexte, les prisons sont soumises régulièrement à un contrôle – y compris, si besoin est, de la part d’ONG et d’instances parlementaires et internationales.

29.Dans le cadre du suivi administratif, les prisons sont contrôlées par des inspecteurs du Ministère de la justice, des contrôleurs à proprement parler et autres fonctionnaires de la Direction générale des prisons et des centres de détention, ou encore par des procureurs généraux et de la République responsables des établissements pénitentiaires. Tout dysfonctionnement constaté lors de visites de ces responsables dans les prisons est suivi par la Direction générale des prisons et des centres de détention, qui relève du Ministre de la justice.

30.Dans le cadredu suivi judiciaire, le suivi des décisions administratives est assuré par des juges d’application des peines, qui doivent se conformer à la Loi relative aux juges d’application des peines – promulguée le 16 mai 2001. Les personnes placées en détention provisoire et les détenus condamnés sont autorisés à déposer une plainte auprès du juge d’application des peines au sujet des éléments ayant conduit à leur condamnation ou des conditions de détention. Ces détenus peuvent également faire appel des décisions du juge auprès de la cour d’assises compétente. Par conséquent, on peut dire que tous les agissements et activités des établissements pénitentiaires sont soumis au contrôle de la justice.

31.Au total, 136« Conseils de contrôle », mis en place dans le cadre de la Loi relative aux Conseils de contrôle des prisons et des centres de détention, sont chargés de visiter et de surveiller – tous les deux mois, au moins – les établissements dont on leur a confié la charge. Ces conseils de surveillance rédigent des rapportsqu’ils soumettent au Procureur généralconcerné, ainsi qu’au Ministère de la justice, à la Commission d’enquête sur les droits de l’hommede la Grande Assemblée nationale de Turquie et au juge d’application des peines – pour toute plainte relevant de son domaine.

32.En outre, des conseils des droits de l’homme provinciaux et de district, composés de membres d’ONG des provinces ou districts en question, sont également autorisés à visiter les prisons et à y vérifier les conditions de détention.

33.Le Bureau du Médiateur et l’Institution de défense des droits de l’hommeen Turquie peuvent également, sans autorisation préalable, effectuer des visites en prison après avoir reçu des plaintes au sujet des conditions de détention.

34.Dans le cadre du contrôle parlementaire, le président de la Commission d’enquête sur les droits de l’homme et ses membres, ainsi que d’autres commissions d’enquête de la Grande Assemblée nationale peuvent également se rendre dans les prisons et y enquêter ou mener une action de suivi et de contrôle.

35.En outre, les prisons sont visitées et contrôlées par des responsables d’instruments ou d’instances internationaux, tels que le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, le Sous-Comité des Nations Unies pour la prévention de la torture et le Groupe de travail sur la détention arbitraire.

36.Afin de prévenir les mauvais traitements dans les prisons et d’éliminer tout motif de plainte dans ce domaine, les articles 94 (sur la torture), 95 (torture aggravée du fait des conséquences qu’elle entraîne) et 96(sur la persécution) du Code pénal ont été modifiés pour créer des peines privatives de liberté, allant de trois ans d’emprisonnement à une peine de réclusion à perpétuité aggravée – pour ce type de crime.

37.On trouvera à l’annexe 2 un tableau faisant état des procédures judiciaires et administratives en liaison avec des allégations de mauvais traitements en prison dus à des responsables pénitentiaires, pour la période 2009-2014.

38.D’autre part, des amendements de fond ont été apportés à la réglementation disciplinaire de l’armée, afin de prévenir également tout mauvais traitement. Il faut noter, dans ce contexte, que la Loi disciplinaire des Forces armées turques est entrée en vigueur le 16 février 2013.

Aux termes de cette loi:

L’intervention de tribunaux disciplinaires en temps de paix a été interrompue. Désormais, ce sont des « conseils disciplinaires » qui interviennent en temps de paix;

Hormis un certain nombre de cas d’indiscipline pouvant exister sur des navires en dehors des eaux territoriales turques, la pratique du confinement militaire a été abolie;

Les « prisons disciplinaires » seront désormais fermées en temps de paix;

L’article 169 du Code pénal militaire – qui autorisait un officier supérieur de l’armée à ordonner la détention provisoire sans l’aval d’un magistrat – a été supprimé.

39.Aux termes d’un amendement, adopté le 19 juin 2010,à l’article 244 de la Loi sur les procédures de mise en place de tribunaux militaires et de procès de ces mêmes tribunaux, la décision de placer un individu en isolement cellulaire doit être obligatoirement précédée d’une audition du criminel ou détenu, et la défense de ce dernier doit être assurée en présence ou par l’intermédiaire de son avocat. Désormais, le détenu a le droit de faire appel d’une telle décision auprès d’un tribunal militaire supérieur.

40.Conformément à un amendement, adopté le 22 novembre 2010, à l’article 94 de la Réglementation relative à l’administration des prisons et centres de détention militaires et à l’exécution des peines, les dispositions suivantes sont désormais en vigueur:

La réunion du criminel ou détenu placé en isolement cellulaire et de son conjoint, de ses enfants, de sa mère, de son père, de ses frères et sœurs, de sa belle-mère, de son beau-père, de son tuteur légalou exécuteur, d’autorités compétentes et de son avocat ne peut pas être interdite.

Au cours de l’exécution de sa peine d’isolement cellulaire, le détenu doit être autorisé à faire de l’exercice à l’extérieur une heure par jour, à lire des livres et à envoyer du courrier.

L’uniforme des détenus a été supprimé, et toute question relative aux exercices en plein air, à la communication avec le monde extérieur, au droit à l’éducation et à la formation, aux visites en milieu ouvert ou fermé et à l’imposition de peines disciplinaires a été rendue compatible avec les dispositions juridiques régissant les prisons non militaires.

41.Au cours des quatre années écoulées – jusqu’au 12 novembre 2013 -, sur 1477demandes soumises au Conseil d’inspection de l’administration civile du Ministère de l’intérieur, 37 seulement ont été jugées suffisamment sérieuses pour justifier la nomination d’un inspecteur et l’ouverture d’une enquête. Les chiffres concernant les contrôles et les enquêtes préliminaires et disciplinaires effectués ces dernières années sont les suivants:

Résultat des enquêtes disciplinaires en 2009:

42.Trois responsables des forces de l’ordre ont été condamnés à une peine de « suspension de promotion pendant 12 mois »; un responsable des forces de l’ordre a été condamné à une peine de « suspension de promotion pendant quatre mois », et deux autres responsables des forces de l’ordre se sont vu imposer « une retenue sur salaire de trois jours ».

Résultat des enquêtes disciplinaires en 2010:

43.Deux responsables des forces de l’ordre ont été condamnés à une peine de « suspension de promotion pendant six mois »; un responsable des forces de l’ordre a été condamné à une peine de « suspension de promotion pendant 24 mois », un autre responsable a été révoqué; enfin, aucune sanction n’a été requise à l’encontre d’un autre responsable des forces de l’ordre.

Résultat des enquêtes disciplinaires en 2011:

44.Un responsable des forces de l’ordre s’est vu imposer une peine de « suspension de promotion pendant 12 mois », et un autre une peine de « suspension de promotion pendant six mois ».

Résultat des enquêtes disciplinaires en 2012

45.Deux responsables des forces de l’ordre se sont vu imposer une peine de « suspension de promotion pendant 12 mois »; aucune sanction n’a été requise à l’encontre de trois autres membres des forces de l’ordre; des rapports d’enquête ont été rédigés au sujet de huit autres responsables des forces de l’ordre; des rapports disciplinaires ont été élaborés au sujet de huit autres responsables, et, enfin, aucune sanction n’a été requise à l’encontre de neuf autres responsables.

46.En ce qui concerne les événements survenus dans le district d’Uludere, dans la province de Şirnak, un rapport d’examen a été rédigé et pris en considération en tant que rapport confidentiel.

Résultat des enquêtes disciplinaires en 2013

47.Un responsable des forces de l’ordre s’est vu imposer une sanction de « mutation dans une autre unité »; un autre responsable s’est vu imposer une sanction de « suspension de promotion »;8 responsables ont été frappés d’une sanction de « retenue sur salaire », et 12autres ont été réprimandés. Aucune sanction n’a été requise vis-à-vis de 64responsables des forces de l’ordre; des rapports d’enquête ont été rédigés au sujet de sept autres responsables; enfin, une « autorisation d’enquête » a été accordée au sujet d’un officier de gendarmerie et d’autres officiers équivalents.

48.D’après les informations que nous avons obtenues au sujet des quatre années écoulées, il n’y a pas eu d’incident porté devant les tribunaux – excepté le fait qu’un rapport d’examen préliminaire ait été élaboré, et ait accordé « une autorisation d’enquête » au sujet d’un officier de gendarmerie et d’autres officiers équivalents, et que deux rapports d’enquête aient été élaborés au sujet de 15membres des forces de l’ordre.

49.Concernant les incidents présumés à la prison de Pozanti, une enquête judiciaire a eu lieu en vue de déterminer la responsabilité pénale éventuelle du personnel pénitentiaire. Au final, des décisions de non-poursuite ont été prononcées vis-à-vis de 74responsables pénitentiaires, et 34autres responsables sont en attente de procès.

50.En outre, suite à un ensemble d’enquêtes disciplinaires visant à définir la responsabilité administrative éventuelle du personnel, il a été décidé de ne prendre aucune sanction disciplinaire vis-à-vis de 109responsables pénitentiaires, de prononcer un avertissement vis-à-vis de six autres responsables et d’adresser une réprimande à 13autres.

51.Aucune mesure disciplinaire n’a été prise vis-à-vis des mineurs ayant fait l’objet d’une enquête administrative au sujet des allégations concernées.

52.Les procureurs de la République compétents mènent des enquêtes judiciaires et disciplinaires suite à des viols, des violences sexuelles et autres actes de torture et mauvais traitements de détenus par des fonctionnaires, ou avec le consentement effectif ou tacite de ces derniers. Le personnel pénitentiaire peut faire l’objet d’enquêtes directes sans autorisation préalable – comme cela a été le cas d’autres fonctionnaires.De tels agissements ne sont pas tolérés, et les fonctionnaires jugés coupables sont sanctionnés au niveau judiciaire par des tribunaux indépendants, ou, au niveau disciplinaire, par leur administration.

53.Concernant la prison de Tekirdağ, qui a été fermée, une enquête a eu lieu au sujet d’un incident de violence sexuelle survenu en 2009. Une enquête judiciaire a été menée par le Bureau du Procureur général de Tekirdağ au sujet de huit personnes condamnées, et une décision de non-poursuite a été prise vis-à-vis de trois d’entre elles. Le 17 décembre 2009, une affaire pénale était présentée, au sujet de cinq détenus, devant la Deuxième Cour d’assises de Tekirdağ – affaire toujours en cours.

54.Une enquête disciplinaire a été ouverte par l’administration de la prison de Tekirdağ au sujet de cet incident; à la suite de quoi le conseil disciplinaire de la prison a condamné trois détenus à une peine d’isolement cellulaire de cinq jours. Ces peines ont été confirmées le 2 mars 2010 par le juge d’application des peines.

55.En ce qui concerne les événements qui auraient eu lieu à la prison de typeL de Rize (type sécurité maximale) le 5 novembre 2010, des enquêtes administrative et judiciaire ont été ouvertes au sujet de 14membres du personnel pénitentiaire. Au niveau judiciaire, l’un des chefs du quartier pénitentiaire et trois gardiens de prison ont fait l’objet d’une détention provisoire sur la base des mandats d’arrêt délivrés contre eux, à la date du 1er juillet 2011, par le tribunal d’instance de Kalkandere. Puis, le 28 juillet 2011, les détenus ont été libérés sur ordre de la Cour d’assises de Rize.

56.Au terme du procès, le jugement intégral de la Cour d’assises de Rize, daté du 26 décembre 2012, prévoyait une amende à l’encontre de six des accusés, pour avoir infligé des blessures volontaires. Cependant, le prononcé du jugement a été suspendu, et les accusés en question ont été mis en liberté surveillée. Tous les autres accusés ont été acquittés.

57.L’enquête administrative menée dans ce contexte a abouti à la décision du 8 juillet 2011 de la Commission judiciaire de la Première juridiction de Rize, par laquelle le chef du quartier pénitentiaire et les gardiens de prison en question ont été suspendus de leurs fonctions. Aux termes d’une décision prise ultérieurement, le 9 septembre 2011, par cette même commission, la décision de suspension a été levée, et les personnes en question ont pu reprendre leurs fonctions.

58.En outre, l’affaire était également examinée par le Conseil supérieur de discipline du Ministère de la justice, à la suite d’une demande de révocation des personnes incriminées.Le Conseil de discipline a d’abord décidé de ne pas se prononcer au sujet des infractions présumées du 15 avril 2010 du fait que le délai réglementaire avait expiré. Et, en ce qui concerne les infractions présumées du 5 novembre 2010, la demande de révocation a été rejetée faute de preuves suffisantes, et aucune sanction disciplinaire n’a été prononcée vis-à-vis du personnel en question.

Question  5 : Compte tenu des précédentes observations finales du Comité ( par.  11 et 17), veuillez décrire ce qui a été fait pour garantir l’exercice, par tous les détenus, de leur droit à bénéficier des garanties fondamentales énumérées ci-dessous, et pour veiller au respect de ces garanties. Veuillez également fournir des informations sur le nombre d’agents de police, d’agents pénitentiaires et d’agents de sécurité ayant fait l’objet de sanctions, disciplinaires ou autres, notamment pour non-respect de ces garanties, et préciser la nature des sanctions imposées.

a) Garantir le droit de tous les détenus, y compris ceux détenus en application de la loi sur la lutte antiterroriste ( Loi No.  3713), de consulter rapidement un avocat et d’avertir un membre de leur famille dès leur placement en détention. Indiquer en particulier si les nouveaux articles  10 b) et 10 e) de la Loi No.  3713, susceptibles de porter atteinte aux droits de ces détenus, ont été modifiés. L’ État partie ayant déclaré, dans les informations fournies au titre du suivi, que tous les détenus pouvaient bénéficier d’une aide juridictionnelle, veuillez indiquer le nombre de demandes d’aide juridictionnelle présentées et le nombre d'aides accordées, en précisant également le nombre de destinataires de cette aide ayant été accusés d’infractions entraînant une peine d’emprisonnement inférieure à cinq ans ;

b) Faire en sorte que tous les détenus aient le droit d’être examinés par un médecin indépendant dès le placement en détention. À la lumière des précédentes observations finales du Comité ( par.  8), veuillez décrire les mesures prises pour garantir que les responsables officiels examinent tous les rapports médicaux établis par le personnel médical compétent et les médecins légistes – y compris ceux qui n’appartiennent pas à l’Institut de médecine légale du Ministère de la justice . Veuillez fournir des informations supplémentaires sur la manière dont le protocole intitulé « Services médicaux pour les détenus », signé en  août  20 11, permet de garantir le caractère confidentiel des examens médicaux, et indiquer dans combien de cas, depuis la signature de ce protocole, des médecins ont demandé la présence d’agents de police pendant l’examen ;

c) Veiller à ce que tous les détenus soient déférés devant un juge dans les plus brefs délais ;

d) Faire en sorte que toutes les personnes privées de liberté soient rapidement enregistrées, dès leur arrestation, et non pas seulement après l’officialisation de leur arrestation ou de leur mise en examen. Le Comité s’étant dit préoccupé, dans ses précédentes observations finales ( par.  18), par des informations selon lesquelles des agents chargés du maintien de l’ordre se livreraient à des actes de torture et à de mauvais traitements sur des personnes placées en garde à vue sans être officiellement enregistrées, veuillez indiquer si la législation de l’ État partie a été modifiée de façon à préciser dans quel délai l’enregistrement officiel doit avoir lieu après l’arrestation. Veuillez indiquer également si les membres de la famille du détenu ont accès aux registres ;

e) Veuillez préciser également si des caméras de surveillance ont été installées dans tous les postes de police que compte l’ État partie et le nombre exact de postes de police effectivement équipés de caméras.

59.Aux termes de l’article 59 de la Loi sur l’exécution des peines et les mesures de sécurité (Loi No. 5275), l’accès des personnes mises en examen et des détenus à leur avocat ne fait l’objet d’aucune restriction.Les avocats ont toute liberté de rendre visite à leurs clients en prison, conformément aux règles de leur profession.

60.En outre, les personnes placées en détention provisoire sont également libres de rencontrer leur avocat, même s’il n’y a pas eu de mandat délivré à cette fin, conformément à la procédure des « visites ouvertes » - en l’occurrence, la conversation du détenu et de son avocat doit rester confidentielle, bien qu’elle puisse faire l’objet d’un suivi de la part de l’administration pénitentiaire.

61.Les détenus en détention provisoire non représentés par un avocat peuvent bénéficier gratuitement de l’intervention d’un avocat nommé par l’ordre des avocats concerné.

62.Le droit des personnes mises en examen et des détenus à accéder à un avocat est garanti par la loi, et toute restriction à ce droit constitue une infraction.

63.L’article 10 de la Loi sur la lutte contre le terrorisme a été aboli le 6 mars 2014 dans le cadre de la Loi No. 6526.

64.Quelle que soit la durée de leur peine, tous les détenus – y compris ceux placés en détention provisoire – bénéficient de l’assistance d’un avocat. Nous ne disposons pas de chiffres concernant les demandes d’aide juridictionnelle de la part de détenus; toutefois, nous sommes en mesure d’indiquer ci-après le nombre de personnes condamnées et de détenus en attente de jugement à la date du 1er avril 2014, et ce, en fonction de la durée de la peine:

Durée de la peine

Personnes condamnées

Détenus en attente de jugement

Total

0-1 an

6 790

786

7 576

1-2 ans

6 349

52

6 401

2-3 ans

10 559

56

10 615

3-4 ans

9 502

105

9 607

4-5 ans

13 663

476

14 139

5-6 ans

6 192

495

6 687

6-7 ans

7 037

907

7 944

7-8 ans

4 795

873

5 668

8-9 ans

4 566

864

5 430

9-10 ans

4 947

1 135

6 082

10 ans+

34 900

6 391

41 291

Perpétuité

6 429

-

6 429

Total

115 729

12 140

127 869

65.L’article 9 (intitulé « Vérification de l’état de santé ») de la Réglementation relative à l’arrestation, à la garde à vue et au recueil de déclarations prévoit que, pour déterminer l’état de santé d’une personne lors de son arrestation, d’un transfert pour quelque motif que ce soit, ou encore en cas de détérioration de l’état de santé de l’individu en question, de prolongation de la garde à vue, de libération ou de déferrement devant les autorités judiciaires, il sera procédé à un examen médical, à un contrôle de l’état de santé et, éventuellement, à un traitement par des médecins légistes ou appartenant à d’autres établissements de santé reconnus. Les personnes souffrant de maladies chroniques seront examinées par un médecin de leur choix, éventuellement en présence de l’avocat de la défense.

66.Dans ce contexte, les principes suivants ont été adoptés: le médecin et la personne examinée seront seuls dans la salle de consultation; le représentant des forces de l’ordre conduisant l’individu en question jusqu’à la salle de consultation sera une autre personne que le juge d’instruction, et en cas de constatation d’actes de torture (article 94), de torture aggravée par les conséquences de ces actes (article 95) ou de persécution (article 96) définis par le Code pénal, le Procureur de la République sera rapidement informé de la situation.

67.Une femme privée de liberté a le droit de demander à être examinée par une doctoresse.

68.L’article 21 de la Loi sur l’exécution des peines et les mesures de sécurité prévoit un examen médical avant l’admission en prison. En d’autres termes, toute personne condamnée ou détenue sera examinée par un médecin dès le début de son incarcération.Si le détenu le demande lors de son incarcération ou ultérieurement, il ou elle pourra être dirigé(e) vers un hôpital pour obtenir un second avis médical, ou en cas d’impossibilité, accueilli(e) dans un centre hospitalo-universitaire ou à l’Institut de médecine légale.

69.Dans les établissements pénitentiaires, les conditions sanitaires sont déterminées par le médecin attaché à l’établissement.Afin de protéger la santé physique et mentale des détenus et d’établir un diagnostic, un premier examen médical et des services de traitement sont prévus à l’infirmerie de la prison.Les personnes demandant un complément de diagnostic, de traitement ou de réadaptation sont transférées vers un hôpital ou un centre hospitalo-universitaire publics.Le résultat des examens et traitements médicaux est enregistré dans un dossier médical personnel.

70.Le personnel de santé et les détenus sont brièvement formés à l’hygiène des parties communes des locaux concernés, ainsi qu’à l’hygiène personnelle.

71.Aux termes des dispositions juridiques pertinentes, les détenus ayant des problèmes de santé sont transférés vers un hôpital public de la province concernée, ou vers un hôpital d’une autre province, ou encore vers un centre hospitalo-universitaire en cas d’impossibilité de procéder à un traitement sur place.Le transfert vers un hôpital et le traitement des détenus sont la responsabilité intégrale du personnel de santé. En l’occurrence, l’administration pénitentiaire n’est pas habilitée à intervenir.

72.En matière d’accès aux services de santé, il n’est fait aucune distinction entre les détenus et les personnes libres. Tous les détenus ont droit gratuitement aux services de santé fondamentaux, même s’ils ne sont pas couverts par la sécurité sociale. Conformément à une lettre du 15 novembre 2012 adressée aux établissements pénitentiaires par le Ministère de la justice, un certain nombre d’articles médicaux (orthèses, prothèses, lunettes, appareils auditifs, couches pour adultes) et de médicaments autrefois à la charge des patients sont désormais couverts par l’État.

73.Concernant l’examen médical des personnes en détention provisoire et des détenus condamnés, l’article 117, paragraphe 2 des Règles d’administration pénitentiaire, d’exécution des peines et de sécurité stipule: « Sauf demande contraire de la part du médecin de la prison, aucun responsable officiel autre qu’un ou plusieurs membres du personnel médical ne sera présent dans la salle de consultation et lors de la consultation et du traitement médical d’un détenu. Toutefois, l’administration pénitentiaire pourra, pour des raisons de sécurité, prendre les mesures nécessaires, en veillant à ce que les conversations tenues dans les locaux médicaux ne puissent pas être entendues ».

74.L’article 38 du Protocole signé le 19 août 2011 par les Ministères de la justice, de l’Intérieur et de la Santé stipule en l’occurrence:

« 1)Des pièces ou salles de consultation médicale protégées, équipées de dispositifs de retenue pour empêcher toute évasion, doivent être mises en place dans les hôpitaux des régions dotées d’un établissement pénitentiaire.

2)Les détenus en détention provisoire ou déjà condamnés doivent être soumis à un examen médical dans des salles protégées, équipées de dispositifs de retenue pour empêcher toute évasion.Les responsables de la Gendarmerie devront rester à l’extérieur de ces salles ou pièces et prendre toutes les mesures de sécurité nécessaires pendant le déroulement des examens médicaux. Si le médecin l’a demandé par écrit, le représentant de la Gendarmerie pourra être présent dans la salle de consultation.

3)Toute demande d’un détenu non conforme à la loi au sujet de l’examen médical doit être immédiatement signalée au chef de patrouille de la Gendarmerie par le responsable médical.

4)Dans les hôpitaux n’ayant pas encore mis en place de pièces ou salles protégées pour l’examen des détenus,le responsable de la Gendarmerie restera présent à l’intérieur de la pièce, et devra prendre des mesures de protection et de précaution, applicables à une distance suffisante pour éviter que l’entretien entre le médecin et le patient ne soit entendu. »

75.L’examen médical des détenus se fait dans le respect du principe de confidentialité, et des efforts sont déployés en vue d’augmenter le nombre de pièces ou salles protégées.

76.Le paragraphe 5 de l’article 19 de la Constitution, intitulé « Liberté et sécurité des personnes »,stipule:

« La personne arrêtée ou détenue sera déférée devant un juge dans un délai de quarante-huit heures au plus tard, et, dans le cas d’une infraction collective, dans un délai de quatre jours au plus, à l’exclusion du temps requis pour déférer la personne devant le tribunal le plus proche du lieu d’arrestation. Nul ne peut être privé de liberté sans qu’un juge se soit prononcé au terme des périodes susmentionnées. Ces périodes pourront être prolongées en cas d’état d’urgence, dans le cadre de la loi martiale ou en temps de guerre. »

77.Conformément à ces dispositions, une personne ne peut être privée de liberté que dans les conditions définies par la Constitution.Le droit constitutionnel d’être présenté devant un juge est également renforcé par d’autres dispositions de la loi.

78.Dans ce contexte, aux termes de l’article 91 du Code de procédure pénale, intitulé « Garde à vue », la période de garde à vue ne peut dépasser 24heures à partir du moment précis de l’arrestation, à l’exclusion du temps obligatoirement requis pour déférer la personne appréhendée devant le juge ou le tribunal le plus proche du lieu d’arrestation.En cas d’infraction collective, de difficulté à réunir des preuves, ou de nombre important de suspects, le procureur de la République peut donner l’ordre, par écrit, de prolonger la période de garde à vue jusqu’à trois jours – chaque prolongation ne pouvant dépasser un jour à la fois. La personne appréhendée ou son avocat, son représentant légal, son conjoint ou encore un parent au premier ou second degré peuvent faire appel, auprès du magistrat ayant la charge des affaires pénales, de la mesure d’arrestation ou de l’ordre écrit du procureur de placer la personne en garde à vue ou de prolonger la période de garde à vue – le but de cet appel étant d’obtenir la libération immédiate. Toutes ces questions sont examinées par un juge.

79.Concernant les personnes arrêtées ou placées en garde à vue, l’article 6 de la Réglementation relative à l’arrestation, à la garde à vue et au recueil de déclarations stipule:

« Un rapport sera établi lors de toute arrestation. Ce rapport indiquera notamment l’infraction présumée et ses circonstances, le lieu et l’heure de l’arrestation, l’agent ayant procédé à l’arrestation et le représentant des forces de l’ordre ayant identifié le suspect, avec confirmation que les droits du suspect lui ont été clairement rappelés. En outre, un « Formulaire relatif aux droits du suspect/prévenu » doit être rempli, et une copie signée remise au suspect – avec mention du fait que la personne en question a été informée de ses droits par écrit et a bien compris les circonstances de son arrestation. »

80.L’article 12 de cette même Réglementation stipule que le placement en cellule de garde à vue doit être porté sur un registre. Le registre indiquera le lieu, la date et l’heure de l’arrestation, ainsi que la date et l’heure d’entrée dans la cellule. Les pratiques actuelles respectent ces règles.

81.L’article 95 du Code de procédure pénale stipule que, lors de l’arrestation ou du placement en garde à vue, et lorsque la période de garde à vue est prolongée, un parent de la personne appréhendée ou une personne de son choix doit être informé(e) du début de l’instruction.

82.L’article 11 de la Réglementation relative à l’arrestation, à la garde à vue et au recueil de dépositions oblige les autorités à enregistrer chaque début de garde à vue sur un « Registre des personnes placées en garde à vue ». Cette obligation est assortie d’une autre obligation- à savoir celle d’informer les parents et les proches du suspect.

83.Les informations concernant les personnes placées en garde à vue dans une unité de police sont archivées dans le registre précité et également inscrites dans la base de données en ligne du Département de la coordination et des opérations de la Direction générale de la sécurité.Les personnes placées en garde à vue et leurs parents ont le loisir d’accéder aux registres en question, dans le respect des procédures légales. En outre, les procédures de garde à vue sont suivies par les autorités judiciaires.

84.Sur les 1271postes de police que compte le pays, 1082 disposent de pièces spécialement réservées aux interrogatoires, et 936 de ces pièces sont équipées de caméras de surveillance.

85.Les unités de sécurité intérieure attachées à la Direction générale de la gendarmerie gèrent au total 1992cellules de détention provisoire – dont 1076destinées aux suspects de sexe masculin et 916 aux suspects de sexe féminin. L’installation de caméras dans ces locaux est quasiment achevée.

Question  6 : Compte tenu des précédentes observations finales du Comité ( par.  23), veuillez exposer dans le détail les mesures prises pour assurer le respect des garanties juridiques fondamentales des personnes ayant besoin de soins psychiatriques, que ce soit dans des cliniques ou hôpitaux psychiatriques ou dans des établissements pénitentiaires.

86.En ce qui concerne les détenus atteints de troubles mentaux, l’article 18, paragraphe 1 de la Loi relative à l’exécution des peines et aux mesures de sécurité stipule:

« Les condamnés diagnostiqués comme étant atteints de troubles mentaux autres que la folie et dus à l’incarcération ou à d’autres raisons, et dont l’isolement dans un hôpital psychiatrique n’a pas été jugé nécessaire, exécuteront leur peine dans des sections spéciales d’établissements donnés. »

87.Dans ce contexte, la Prison de type R de Meris est entrée en service le 30 mars 2012. Une section des prisons fermées d’Elazig, de Samsun, de Manisa et d’Adana a été conçue en tant que centre de réadaptationdevant accueillir les détenus atteints de troubles mentaux.

88.La Prison de type R de Meris peut accueillir 150détenus; 48 des places disponibles sont réservées aux condamnés diagnostiqués comme étant atteints de troubles mentaux – du type défini à l’article 18 précité. Les 102autres places sont destinées aux détenus ayant besoin de soins spéciaux en raison d’une maladie chronique grave.À la date du 28 novembre 2013, la Prison de Meris comptait 42détenus ayant besoin de soins spéciaux et 47 autres relevant de l’article 18 précité.

89.Les chiffres concernant la capacité des centres de réadaptation des prisons et les détenus qui s’y trouvent sont les suivants:

Centre de réadaptation

Capacité

Nombre de détenus actuel

Prison d’Adana

58

4

Prison d’Elazığ

58

29

Prison de Manisa

52

42

Prison de Samsun

50

13

90.Afin de proposer de manière permanente des services de santé en prison, le Protocole réglementant les services de santé en prison a été signé le 30 avril 2009 par le Ministère de la santé et le Ministère de la justice; il stipule que les besoins des médecins doivent être satisfaits par le Ministère de la santé.

91.Le nombre de médecins généralistes et spécialistes opérant dans les unités de réadaptation des établissements pénitentiaires est le suivant:

Établissement

Psychiatre

Médecin de famille

Généraliste

Physiothérapeute

Psychologue

Prison de Metris

1

1

1+1 urgentiste

1

-

Prison d’Adana

1

1

-

-

-

Prison de Manisa

1

1

-

-

-

Prison de Samsun

1

1

-

-

-

Prison d’Elazığ

1

2

-

-

1

92.Les soins et traitements dispensés aux détenus ayant besoin de soins spéciaux sont assurés en coordination par les responsables médicaux nommés par le Ministère de la santé, ceux au service du Ministère de la justice, et les médecins de famille fournissant des services aux établissements pénitentiaires.

93.Le nombre de responsables de santé opérant dans les unités de réadaptation des établissements pénitentiaires est le suivant:

Établissement

Responsable médical

Prestataires de soins/Infirmiers

Prison de Metris

5

18

Prison d’Adana

4

-

Prison de Manis

7

-

Prison de Samsun

7

1

Prison d’Elazığ

7

-

94.Les centres de réadaptation en question comptent un nombre suffisant de chefs de quartier pénitentiaire et de gardiens de prison. Le nettoyage des pièces et de l’ensemble des locaux concernés est assuré par des détenus, rémunérés à cette fin.

Question  7 : Selon les informations dont dispose le Comité, des détenus continuent d’être gardés en détention provisoire pendant des périodes excessivement longues. Veuillez décrire les mesures prises pour libérer les détenus ou les traduire en justice et empêcher de telles situations de se reproduire.

95.La Loi No. 6520 portant amendement à un certain nombre de lois afin de défendre les droits et libertés fondamentaux a été promulguée le 2 mars 2014. Aux termes de cette loi, les tribunaux spécialement habilités ont été supprimés, et la peine maximale de dix ans d’emprisonnement jusqu’alors appliquée aux crimes qui relevaient de ces juridictions a été réduite à cinq ans. Dès lors, un prévenu en attente de procès ne peut pas être incarcéré pendant plus de cinq ans.

96.Les infractions présumées n’entraînant pas de détention provisoire sont définies à l’article 100, paragraphe 4 du Code de procédure pénale. À l’origine, le plafond concernant ces infractions avait été fixé à un an d’emprisonnement, mais après adoption, le 5 juillet 2012, d’un amendement à la loi (dans le cadre de la Loi No. 6352 portant cet amendement), le plafond a été porté à deux ans. En conséquence, la détention provisoire n’est pas autorisée en ce qui concerne les suspects encourant une peine inférieure à deux ans d’emprisonnement ou le paiement d’une amende.

97.Précédemment, l’article 101, paragraphe 2 exigeait que, dans le cadre d’une décision de détention, de détention prolongée ou de rejet d’une demande de libération, soient mentionnés des motifs juridiques et des raisons concrètes et légitimes.Mais, compte tenu de l’importance de cette question et afin d’en garantir une application plus stricte, cette disposition a été également modifiée aux termes de cette même loi No. 6352.Le nouvel article modifié exige des preuves d’une « forte présomption de culpabilité », « des raisons justifiant la détention » et la « proportionnalité de la mesure de détention », et l’obligation de présenter ces preuves et raisons « de manière claire et justifiée par des faits concrets ».

98.En outre, le contrôle judiciaire, qui n’existait pas avant 2005, a été inscrit dans le système juridique du pays aux termes des articles 109 et suivants du Code de procédure pénale. On a ainsi mis en place la possibilité de recourir à d’autres solutions que la détention.

99.À l’origine, le Code de procédure pénale ne prévoyait la possibilité de contrôle judiciaire que dans les cas où la peine encourue était au plus de trois ans d’emprisonnement. Désormais, aux termes d’un amendement à l’article 109, paragraphe 1, les magistrats peuvent imposer un contrôle judiciaire pour toute infraction. Ce même amendement élargit les possibilités de contrôle judiciaire: on a ainsi introduit l’interdiction de quitter son domicile ou un lieu donné, ou encore des restrictions concernant les déplacements vers certains lieux ou régions. De cette manière, la décision de contrôle judiciaireplutôt que le recours à la détention a été considérablement facilitée.

100.Ainsi, les magistrats disposent désormais d’autres recours par rapport à la détention ou à la libération.Le « principe de proportionnalité » est désormais prioritaire en ce qui concerne les mesures préventives, et le caractère exceptionnel de la décision de détention a été renforcé.

101.En outre, l’amendement précité a également abrogé les articles 250 et suivants du Code de procédure pénale, qui réglementaient l’action des procureurs et des tribunaux chargés d’enquêtes judiciaires sur des activités liées à la criminalité organisée.

102.Le 11 avril 2013,plusieurs amendements ont été apportés au Code de procédure pénale dans le cadre de la Loi No. 6459.Désormais, en vertu de l’article 105 du Code de procédure pénale, les tribunaux et les magistrats sont autorisés à prendre une décision au sujet de demandes de libération présentées lors d’une audience – et ce, sans avoir à recueillir l’avis du procureur de la République.

103.En mettant un terme à l’obligation de consulter le procureur, le nouveau texte garantit l’égalité des moyens. Dans le cadre du même amendement, l’article 108 du Code de procédure pénale a été également révisé: le nouveau texte stipule que l’examen de la mesure de détention au stade de l’instruction doit se faire lors d’une audience, avec la présence obligatoire de l’avocat du prévenu ou de la défense, plus généralement.

104.Un paragraphea été ajouté à l’article 270 du Code de procédure pénale: ce nouveau texte exige qu’en cas d’objection présentée aux termes des articles 101 et 105 du Code de procédure pénale, les observations écrites du procureur de la République soient communiquées au requérant ou à l’avocat de la défense. Cette modification vise à mettre l’article 270 en conformité avec les principes d’égalité des moyens et de procédures adverses, en accordant au demandeur un droit de réponse aux observations du procureur.

105.En outre, un paragraphe a été ajouté à l’article 141 du Code de procédure pénale (intitulé « Compensation en liaison avec les mesures préventives »); ce texte prévoit de nouveaux moyens de compensation en faveur des personnes ayant été dans l’incapacité d’exercer leur droit légalde faire objection à une mesure d’arrestation ou de détention.Qui plus est, avec l’abrogation du paragraphe 1/a de l’article 144, les autorités font en sorte que les personnes dont la période de détention a été réduite en raison d’une autre condamnation soient également éligibles au droit de compensation prévu par l’article 141 du Code deprocédure pénale.

106.À la suite de l’instauration, en septembre 2012, d’un droit de présenter une demande individuelle à la Cour constitutionnelle, les plaintes relatives au droit à la liberté et à la sécurité sont également examinées par la Cour constitutionnelle. Pour prendre un exemple, concernant une demande datée du 21 novembre 2013 (No. 2012/1303), la Cour constitutionnelle a décidé – après avoir jugé recevable la plainte du requérant au sujet de la longueur excessive de la période de détention – que l’article 19 de la Constitution avait été violé, et accordé des dommages et intérêts pour préjudice non pécuniaire (voir également d’autres décisions similaires: No. 2012/239 du 2 juillet 2013 et No. 2012/521 du 2 juillet 2013).

107.Parmi les faits récents, il convient de signaler que l’article 10 de la Loi No. 5235, telle que modifiée le 18 juin 2014, a créé des « bureaux de magistrats pénaux », qui seront chargés de prendre des décisions concernant les mesuresprovisoires de protection. Dès lors, les magistrats en question ne dirigeront plus des procès et seront exclusivement chargés de décider de mesures de protection. Avant la modification de la loi en question et conformément au texte adopté le 26 septembre 2004, l’application des dispositions relatives aux mesures provisoires de protection relevait, entre autres fonctions, des tribunaux d’instance. Mais cette tâche occupait trop de temps dans la mission globale des magistrats.La loi a donc été modifiée dans le but de supprimer les cas où les magistrats s’abstenaient de motiver de manière adéquate afin de ne pas paraître partiaux; la modification de la loi vise également une spécialisation en matière de mesures provisoires de protection; une manière plus efficace de garantir les droits et libertés fondamentaux;la prévention de détentions prolongées; et, enfin, un examen des plaintes plus diligent. La révision de la loi vise également à établir des normes nationales concernant les décisions de mesures provisoires de protection.

108.Les juges et les procureurs sont régulièrement contrôlés par des inspecteurs du Conseil suprême des juges et des procureurs - inspecteurs qui appartiennent également à la magistrature et sont chargés d’élaborer des rapports sur la compétence professionnelle, le travail et les résultats des juges et des procureurs. Sont évaluées dans différentes parties de ces rapports la question de l’importance que les juges et les procureurs attachent aux affaires impliquant des détenus, et, d’autre part, la rapidité des procédures judiciaires.Ces résultats et ces évaluations conditionnent en grande partie les postes à veniret la promotion des juges et procureurs en question.Grâce à ce mécanisme de contrôle, on veille à ce que juges et procureurs mènent avec diligence les procédures concernant des détenus, et en tenant compte de la Convention européenne des droits de l’homme et des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH).

109.Le nombre de personnes en détention provisoire est régulièrement suivi par la Direction générale des prisons et des centres de détention, et le Ministère de la justice en est régulièrement informé, chaque semaine.

Question  8 : Veuillez donner au Comité des informations sur les mesures prises pour procéder à des enquêtes efficaces, transparentes et indépendantes sur tous les cas de disparition non élucidés depuis le conflit de 1974 avec Chypre – lesquelles, comme l’a conclu la Cour européenne des droits de l’homme, constituent une violation continue. Veuillez indiquer également les mesures prises dans le prolongement de ces enquêtes pour identifier et, si besoin est, traduire en justice les responsables de violations de la Convention dirigées contre des membres de ce groupe de victimes. Indiquer en outre si les proches des victimes ont été informés de l’avancement des enquêtes et des poursuites. L’ État partie ayant présenté au Comité un rapport sur le suivi des observations finales, veuillez donner des informations supplémentaires sur toutes les affaires de disparition qu’il a tirées au clair avec le Groupe de travail des Nations Unies sur les disparitions forcées ou involontaires, en indiquant notamment si les responsables ont été poursuivis en justice et l’issue des procès intentés ; décrire également les mesures prises pour résoudre les 60 affaires qui n’étaient pas élucidées en  mars  20 12. Veuillez indiquer en outre quelles dispositions ont été prises pour donner suite aux arrêts prononcés par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), qui ne sont pas encore exécutés, au sujet d’affaires de disparition – notamment les affaires Chypre c. Turquie et Varnava et autres c. Turquie . Indiquer également si l’ État partie envisage de ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

110.La question des personnes disparues à Chypre se pose de part et d’autre, c’est-à-dire du côté chypriote turc comme du côté chypriote grec.En fait, dès 1963, les Chypriotes turcs ont été les premières victimes de cette tragédie humaine, et la situation persiste. Par conséquent, 50ans ont passé depuis les premières disparitions de Chypriotes turcs.Ces personnes sont toujours portées disparues.

111.Le fait que la CEDH ne se soit pas prononcée – pour des motifs de procédure – a empêché le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe d’examiner si la partie chypriote grecque menait effectivement ou non une enquête sur le sort et la localisation éventuelle des Chypriotes turcs portés disparus – et ce, lors des Réunions Droits de l’homme (CM-DH) visant à déterminer l’exécution éventuelle des arrêts de la CEDH. Aucune autre instance internationale n’enquête, auprès de la partie chypriote grecque, sur la disparition de Chypriotes turcs.

112.De son côté, la partie chypriote turque a pris des mesures pour enquêter sur le sort des Chypriotes grecs portés disparus et les localiser éventuellement.La CEDH et les Réunions Droits de l’homme du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe (CM-DH), qui examinent périodiquement la question de ces enquêtes – dans le contexte des arrêts sur les affaires « Chypre c. Turquie »et « Varnava et autres c. Turquie » - considèrent que les enquêtes en cours progressent dans la bonne direction. En décembre 2013, les CM-DH ont pris en compte cette évolution positive et décidé de suspendre pendant un an l'examen de cette question.

113.Les mesures prises par la partie chypriote turque vont dans les directions suivantes: 1)la localisation des personnes portées disparues; 2)leur sort; 3)les circonstances de ces disparitions.Les enquêtes en elles-mêmes visent: 4)à déterminer les causes des décès éventuels; 5)à réunir des preuves et à les évaluer, de manière à déterminer la responsabilité des auteurs d’actes violents ou illégaux; 6)à ne pas limiter les enquêtes à la seule île de Chypre; et 7)à informer les familles.

114.L’action de la partie chypriote turque se fait en deux phases, conformément à l’arrêt sur l’affaire Varnava et autres c. Turquie.La première phase est confiée au Comité des personnes disparues (CMP) opérant sous l’égide des Nations Unies.Lorsque le CMP aura achevé son travail, des enquêtes criminelles seront menées par une unité spécialement créée à cet effet – la MPU (Unité des personnes disparues – et supervisée par une instance indépendante (le Bureau du Procureur général de la RTCN – la République turque de Chypre du Nord).

115.Dans le cadre de sa jurisprudence, la Cour européenne des droits de l’homme s’est déclarée satisfaite de l’action menée par le CMP, puis par l’enquête pénale qui a suivi.

Première phase : le CMP (Comité des personnes disparues)

116.À la date du mois de mars 2014, sur les2001Chypriotes turcs et grecs portés disparus, 1073dépouilles ont été exhumées de divers lieux de sépulture, dans l’ensemble de l’île de Chypre. Le laboratoire anthropologique a analysé les restes de quelque 871individus pour tenter des identifications présumées, avant l’envoi d’échantillons d’os au Laboratoire ADN, aux finsd’identification génétique.Dans le cadre de ce projet du CMP, 125Chypriotes turcs et 364Chypriotes grecs ont pu être identifiés.

117.Le projet du CMP est axé sur les familles. En effet, les familles des personnes portées disparues participent aux travaux du CMP, et, après identification, le CMP informe les familles et leur permet de voir les dépouilles ou restes de leurs parents: cela se fait au Centre de vérification familiale du CMP.

118.Les restes des individus identifiés et les objets ou biens qui les accompagnaient sont ensuite restitués aux parents. Le CMP élabore également deux rapports, qu’il remet aux familles: le Rapport sommaire d’exhumation et le Rapportd’analyse ADN. Lors de la phase de visualisation des dépouilles, les lésions osseuses sont expliquées aux familles – dans la mesure où l’on peut ainsi indiquer la cause du décès. Les obsèques des individus identifiés sont organisées par les familles, avec une aide financière et, éventuellement, pratique du CMP. À la demande de membres de la famille, ou en fonction des besoins, une équipe de psychologues peut leur apporter une aide psychosociale.

119.La partie turque contribue activement aux travaux effectifs du CMP. Ainsi, la partie turque peut fournir au CMP de nouvelles informations, émanant de sources diverses, sur l’emplacement éventuel des sépultures de personnes portées disparues, en permettant au CMP d’accéder aux zones militaires, et en participant financièrement aux frais.

120.En 2013, la Turquie a, en tant qu’État garant à Chypre, contribué la somme de200 000dollars, tandis que le CMP a de nouveau adressé une lettre à l’Ambassade de Turquie à Nicosie pour dire à quel point il appréciait l’intérêt et le soutien de la Turquie vis-à-vis de l’action du CMP.Le Ministère des affaires étrangères de la République turque de Chypre du Nord (RTCN) a également apporté une somme de 50 000dollars au CMP, venue s’ajouter à la contribution annuelle de la RTCN au CMP, qui s’élève à 1 million de dollars.Dans son rapport sur la Force des Nations Unies chargée dumaintien de la paixà Chypre (UNFICYP), daté du 30 décembre 2013, le Conseil de sécurité de l’ONU a souligné le nombre sans précédent d’identifications effectuées par le CMP en 2013; et, dans sa résolution sur l’UNFICYP, en date du 30 janvier 2014, le Conseil de sécurité s’est félicité de tous les efforts déployés pour répondre aux exigences du CMP en matière d’exhumation.

121.Dans le cadre de l’affaire Varnava et autres, le CMP a d’ores et déjà trouvé et identifié la dépouille de M.Hadjipantellis, avant de la restituer à sa famille. Toujours dans le cadre de cette affaire, le CMP poursuit son travail concernant les huit autres personnes portées disparues.

Seconde phase : les enquêtes pénales

122.Cette seconde phase est menée par la Police chypriote turque, sous le contrôle du Procureur général de la RTCN, conformément à la section29 de la Loi sur les Services juridiques (Loi No. 72/1991, telle qu’amendée). L’indépendance des Services juridiques – composés du Procureur général et des Conseillers d’État – est garantie par l’article 158 de la Constitution de la République turque de Chypre du Nord.

123.Ennovembre 2010, une « Unité des personnes disparues » (MPU) a été mise en place au sein de la Police chypriote turque, et chargée exclusivement des enquêtes pénales sur les personnes portées disparues identifiées par le CMP.Cette unité est indépendante et rend directement compte de son action au Chef de la Police de la RTCN.

124.La création de la MPU est issue de la décision du Procureur général d’examiner les cas de décès non résolus, après l’exhumation et l’identification, par le CMP, des dépouilles de Chypriotes grecs portés disparus, et leur restitution aux familles.Le Gouvernement de la République turque de Chypre du Nord (RTCN) a reconnu le besoin des familles de disposer de davantage d’informations sur la mort de leurs proches; si bien qu’après un certain nombre d’entretiens, le Gouvernement de la RTCN a mis des ressources supplémentaires à la disposition du Chef de la Police, afin que la MPU soit chargée exclusivement d’examiner les cas de décès non résolus, survenus en 1963/64 et en 1974.

125.La MPU (l’Unité des personnes disparues) s’engage à aborder les familles avec honnêteté et confiance, et dans le respect du principe de confidentialité.L’approche « axée sur la famille » est au cœur du projet de la MPU. L’équipe en question s’efforce de définir et de traiter, du point de vue des familles, les questions non résolues. La MPU a pour principal but d’étudier, dans la mesure du possible, les questions non résolues que posent les familles.

126.L’examen de chaque cas par la MPU se fait en cinq étapes: collecte, évaluation, examen, enquête ciblée et, enfin, résolution.

127.Le processus de « collecte » consiste à réunir toutes les informations pertinentes. À ce stade, l’action de la MPU consiste principalement à entrer en contact avec les parents/plaignants et/ou leurs représentants juridiques, à localiser puis à interrogerdes témoins dans les secteurs où ont été retrouvées les dépouilles et/ou sur les lieux des disparitions, à procéder à des excavations sur les lieux correspondant aux témoignages, et à réunir des informations balistiques. La MPU peut également contacter d’autres organisations possédant des informations supplémentaires pertinentes – notamment le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), l’UNFICYP et les autorités turques et chypriotes turques.

128.Après évaluation de l’ensemble des informations, le processus d’examen commence: il doit être exhaustif, et consiste notamment dans un réexamen, pour chaque affaire, de tous les documents, pièces à conviction et autres élémentsdisponibles.Il s’agit alors de tirer parti de tout nouvel apport de la science médico-légale, afin d’identifier toute preuve éventuellement apportée par les témoins et d’exploiter toute nouvelle opportunité pouvant être utile au processus d’examen.

129.Si, lors de ce processus, de nouveaux éléments de preuve sont trouvés et qu’ils puissent être utilisés de manière réaliste, une enquête ciblée sur la mort de la ou des personne(s) concernée(s) va commencer, et, en cas de preuves crédibles, un ensemble de documents sera transmis au Bureau du Procureur général aux fins d’examen et, éventuellement, de poursuites judiciaires. En matière de preuves, les normes appliquées sont semblables à celles de la Police.

130.Il faut noter cependant que, dans le cas de nombreux délits ou crimes concernés, une très longue période a pu s’écouler depuis les faits.C’est la raison pour laquelle, il y a en fait très peu de cas pour lesquels on dispose de suffisamment de preuves pour entamer une procédure judiciaire. Il est impossible de recréer les conditions d’enquête qui régnaient il y a 40 ou 50ans (par exemple, les preuves matérielles ont pu disparaître, ainsi que les témoins, etc.).

131.Un « Agent de liaison familiale » a été mis en place: il dispose d’un service d’assistance et de plusieurs autres agents de liaison, qui traitent directement avec les familles. Dès le début du processus d’examen, les familles ont la possibilité de poser des questions ou de dire leurs préoccupations particulières concernant leur cas personnel; et la MPU s’efforcera d’y apporterdes réponses – dans la mesure du possible.

132.Après achèvement de la phase d’examen, le Bureau du Procureur général analyse très précisément tous les aspects révélés par l’examen. Les conclusions formulées sont comparées aux demandes de la famille, afin de s’assurer que l’on a bien répondu à toutes ses questions – toujours dans la mesure du possible. Un rapport d’examen est alors élaboré: il doit, dans la mesure du possible, présenter les conclusions sur tous les aspects de l’affaire, toute information révélée au cours du processus, ainsi que toutes les questions posées par la famille.

133.Après finalisation de ce rapport, des membres de la MPU invitent les familles à les rencontrer; ils leur présentent leurs conclusions et apportent des précisions si les familles le demandent.

134.L’Unité des personnes disparues (MPU) participe d’un processus (impliquant également le Bureau du Procureur général) qui vise, dans la mesure du possible, à une enquête conforme aux exigences de l’article 2 de la Convention.

135.Les premières étapes de l’enquête pénale faisant suite à l’action du CMP ont été abordées par la Cour européenne des droits de l’homme dans le cadre de l’affaire Charalambous et des affaires suivantes. La CEDH a considéré que l’instruction en cours ne traduisait pas un manque de bonne foi ou de bonne volonté de la part des autorités. La CEDH a également considéré qu’il n’y avait pas de signe de volonté d’obstruction ou d’indifférence totale, de la part des autorités judiciaires, vis-à-vis des familles – comme ce serait le cas d’un traitement contraire à l’article 3 de la Convention. Dès lors, l’argumentaire des plaignants, selon lequel les enquêtes auraient été inefficaces au regard des articles 2 et 5 de la Convention, ou leurs allégations liées au respect de l’article 3, ont été rejetés.

Situation actuelle

136.La MPU progresse actuellement sur 294affaires de personnes portées disparues et ensuite identifiées par le CMP. Ce processus prend plus de temps que prévu en raison de la complexité de nombreuses affaires examinées.

137.À l’heure actuelle, on en est à la phase de collecte en ce qui concerne 61affaires, à la phase d’évaluation dans 185autres cas, et à la phase d’enquête ciblée en ce qui concerne 48autres affaires. L’affaire Hadjipanteli, inscrite dans l’arrêt sur l’affaire Varnava, fait partie des cas faisant l’objet d’une enquête ciblée.

138.L’action du CMP et les enquêtes se poursuivent. On suppose que ces procédures seront achevées dans les meilleurs délais.

Question  9 : À la lumière des précédentes observations finales du Comité ( par.  20 ), veuillez fournir des informations, ventilées par âge, origine ethnique, appartenance à une minorité et zone géographique, sur le nombre de plaintes, d’enquêtes, de poursuites et de condamnations, ainsi que sur les peines prononcées dans les cas de violences sexistes, y compris les violences familiales et les « crimes d’honneur », depuis l’examen du dernier rapport de l’ État partie. Fournir également des renseignements sur les actions en justice intentées contre les personnes ayant incité au suicide des femmes qui auraient bafoué « l’honneur de la famille ». Décrire les mesures prises par l’ État partie pour encourager les femmes à signaler aux autorités les actes de violence dont elles sont victimes, et pour inciter les autorités à prendre et appliquer plus souvent des mesures de protection en faveur des femmes. Prière de préciser également si des agents des forces de l’ordre ont fait l’objet de sanctions disciplinaires ou pénales pour avoir ignoré les demandes de protection émanant de femmes se plaignant de violences dans la famille ou de violences sexistes, et décrire en particulier toutes les mesures correctives prises à la suite de la mort de Ferdane Çöl, qui, avant son assassinat en  octobre  20 11, aurait à plusieurs reprises demandé à la police de la protéger de son mari. Veuillez décrire en outre toutes les mesures prises pour accroître le nombre de refuges et de permanences téléphoniques destinés aux victimes, et fournir des informations sur les réparations accordées, depuis le dernier examen, notamment les indemnités et les services de réadaptation, dans les affaires de violence à l'égard de femmes.

139.En vertu de la Loi No. 6284 sur la protection des familles et la prévention de la violence à l’égard des femmes – texte entré en vigueur en mars 2012 -, des mesures sont prises à l’égard de toutes les victimes de violences domestiques et autres formes de violence à l’égard des femmes, indépendamment de toute question de langue, de religion, de race, d’ethnie, d’âge, etc.Depuis la date d’entrée en vigueur de cette loi jusqu’au 9 avril 2014, 29 018injonctions de protection, 183 867injonctions de prévention et 3006mesures coercitives de détention ont été décidées et mises en œuvre en vertu de la Loi précitée. À la date du 9 avril 2014, 18 812victimes de violences ont adressé une demande à des Centres de prévention et de suivi de la violence – lesquels ont été créés aux termes de cette loi et sont opérationnels depuis 2013.

140.Du 1er janvier 2009 au 31 mars 2014, on a dénombré 31 333incidents de violence domestique, et 76 411femmes ont été victimes de ce type de violence dans des secteurs relevant d’une juridiction possédant une gendarmerie.

141.On trouvera à l’annexe 3 des données chiffrées, fournies par le Ministère de la justice, au sujet des enquêtes menées, des affaires répertoriées et des condamnations prononcées pour des infractions de violence domestique (articles 82, paragraphe 1-d et86, paragraphe 3-a) et des crimes d’honneur (article 82, paragraphe 1-k du Code pénal), pour la période 2009-2014.

142.Il a été déterminé qu’entre le 1er janvier 2009 et le 31 mars 2014, dans la zone de responsabilité de la gendarmerie, deux affaires dans lesquelles des femmes ont été encouragées à se suicider parce qu’elles étaient considérées comme ayant violé « l’honneur de la famille » ont été déférées devant la justice.

143.À la date du 10 avril 2014, on comptait, dans les 80provinces de Turquie, 135centres de services sociaux, chargés de fournir ce type de services et d’en assurer le suivi, en identifiant les personnes dans le besoin, et en offrant aux enfants, aux jeunes, aux femmes, aux hommes, aux personnes handicapées, aux personnes âgées et aux familles des services de protection, de prévention, d’aide et d’amélioration de leur sort, mais aussi des services d’orientation et de consultation – et ce, de la manière la plus accessible possible, et, si besoin est, avec le concours d’institutions et d’organismes publics, de pouvoirs locaux, d’universités, d’organisations non gouvernementales et de bénévoles. Les centres de services sociaux sont également chargés de la coordination de l’ensemble des services offerts. Voici quelques-unes des activités menées dans ces centres: évaluation de la situation des femmes ayant fait appel à l’un de ces centres parce qu’elles affirmaient avoir fait l’objet de violences, et/ou de femmes identifiées, au cours de recherches sur le terrain, comme des victimes de violences; application de la Loi No. 6284sur la Protection des familles et la Prévention de la violence à l’égard des femmes; offre aux femmes de services d’orientation leur permettant de prendre les précautions nécessaires et de bénéficier d’un environnement favorable à la réception de ces services; organisation de manifestations éducatives, sociales et artistiques permettant aux femmes de participer davantage à la vie sociale, mais aussi d’améliorer les connaissances et la prise de conscience des individus et des familles. Dans le cadre des événements organisés à l’occasion du 8 mars – « Journée internationale de la Femme », les violences à l’égard des femmes et l’abus sexuel des jeunes filles sont publiquement condamnés – le public en étant informé par les médias.

144.On trouvera à l’annexe 4 des informations sur les projets, programmes et campagnes de sensibilisation à la prévention de la violence à l’égard des femmes.

145.Le 3 août 2011, le « Département de lutte contre la violence domestique » a été mis en place et opère au sein du Département de la paix et de l’ordre de la Direction générale de la sécurité, au Ministère de l’intérieur- dans le but de mettre en œuvre les services de sécurité contre la violence domestique, à l’échelle nationale et de manière coordonnée, et d’appliquer un certain nombre de mesures en collaboration avec les institutions et organisations destinées aux victimes de violences domestiques. Afin d’assurer la coordination avec les directions provinciales de la sécurité, les Bureaux chargés des homicides au sein des Départements de la paix et de l’ordre dans les provinces, et les Bureaux de la paix et de l’ordre ont été désignés en tant que bureaux de liaison.

146.L’un des principes fondamentaux de la Loi No. 6284 sur la protection des familles et la prévention de la violence à l’égard des femmes est de suivre une procédure équitable, efficace et rapide en matière d’aide et de services fournis aux victimes de la violence. À cet effet, l’autorité de décider d’une injonction- qui était, jusqu’alors, exclusivement le fait des magistrats des tribunaux familiaux, en vertu de la Loi No. 4320 sur la Protection des familles, qui a précédé la Loi No. 6284 – a été également accordée, en partie, au Chef de l’administration civile et au Chef du maintien de l’ordre dans tous les cas où il peut être dangereux de différer les décisions – avec approbation ultérieure obligatoire aux fins de précaution. En outre, indépendamment du traitement de la victime, le Ministère de la famille et des politiques sociales peut demander une injonction vis-à-vis d’une personne donnée. Il faut noter également que, lors de la délivrance d’une injonction de protection destinée à accélérer le processus, on ne doit pas rechercher de preuves ou de documents, et les injonctions préventives doivent être prononcées et appliquées sans délai. De même, lors du processus d’application d’une injonction, il n’y aura pas de clauses d’annonce et de notification, et les fonctionnaires qui reçoivent le rapport, auront l’obligation d’agir sans délai et de notifier les autorités quant aux autres précautions à prendre.

147.Dans ce contexte, il faut noter les données suivantes, concernant les juridictions relevant de la Gendarmerie:

En 2012, 6137injonctions de protection/de prévention ont été délivrées (soit 4792injonctions de protection et 1345injonctions de prévention);

En 2013, 5894injonctions de protection/de prévention ont été délivrées;

Du 1er janvierau 31 mars 2014, 1015injonctions de protection/de prévention ont été délivrées.

148.Un« Protocole pilote de mise en œuvre d’une coopération en matière d’utilisation de technologies électroniques dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes », conformément à l’article 12 intitulé « Suivi, au moyen de méthodes techniques, de la Loi No. 6284 », a été signé, le 27 septembre 2012, par le Ministère de la famille et des politiques sociales et le Ministère de l’intérieur. Dans ce contexte, le processus pilote d’utilisation de la « touche de sécurité » a été lancé dans les provinces d’Adana et de Bursa. Un officier de police a été chargé d’assurer la liaison et la communication entre la Direction de la sécuritéet le Centre de prévention et de suivi de la violence, aux heures ouvrables, quotidiennement.

149.C’est le Département de la paix et de l’ordre de la Direction générale de la sécuritéqui fait appliquer les injonctions concernant le changement d’identité et d’autres données et documents prononcées par un juge en vertu de l’article 4/1-ç de la Loi (No. 6284) sur la protection des familles et la prévention de la violence à l’égard des femmes.

150.En Turquie, les services liés aux Centres d’hébergement des femmes (ou « Maisons d’hôtes ») sont gérés par le Ministère de la famille et des politiques sociales, ainsi que par des organisations non gouvernementales et les pouvoirs locaux.À l’heure actuelle, on compte 125de ces maisons d’hôtes pour les femmes, pouvant accueillir 3323personnes.90de ces maisons d’hôte, pouvant accueillir 2508personnes, sont affiliées au Ministère de la famille et des politiques sociales; 32autres (pouvant accueillir 779personnes) relèvent des administrations locales, et les trois dernières (capacité d’accueil de 36personnes) sont liées à des organisations non gouvernementales.Outre ces centres d’hébergement destinés aux femmes, il existe deux centres (capacité d’accueil de 30personnes) réservés aux hommes victimes de violences, et affiliés au Ministère de la famille et des politiques sociales. L’ouverture de nouvelles maisons d’hôtes est prévue.

151.En juin 2011, le pays ne comptait que 48 maisons d’hôtes destinées aux femmes, avec une capacité d’accueil de 1014personnes, sous l’égide du Ministère de la famille et des politiques sociales; en avril 2014, leur nombre était passé à 90, avec une capacité d’accueil de 2508personnes. Le graphique ci-dessous indique l’évolution du nombre de maisons d’hôtes pour les femmes, par année.

Figure 1Nombre de maisons d’hôtes destinées aux femmes, par année

Dépendants d'administrations localesDépendants d'ONG

152.La Ligne téléphonique d’urgence183, réservée aux femmes, aux familles, aux enfants, aux personnes handicapées et offrant des services de conseil social, dans la mesure des capacités du Ministère de la famille et des politiques sociales, reçoit des appels 24heures sur 24 et 7jours sur 7 depuis 2007.

153.Cette ligne téléphonique reçoit les appels de femmes, d’enfants, de personnes handicapées, de parentsdes victimes et de personnes âgées, et toutes ces personnes se voient offrir des services d’orientation et de conseil en fonction de leurs besoins.Les cas de négligence, de mauvais traitements, de violences et les appels concernant des conseils sur les précautions à prendre pour prévenir un « crime d’honneur » sont traités par des équipes chargées d’apporter des réponses en urgence, et/ou par des personneschargées de faire appliquer la loi, dans les régions concernées. Les Équipes de réponse en urgence assurent la coordination avec les unités de sécurité et de gendarmerie, pour permettre des interventions immédiates.

154.En 2011, 12responsables de la Ligne téléphonique d’urgence183 ont reçu 51 046appels. En 2012, le nombre de personnes travaillant pour cette ligne a été augmenté: il est passé à 33personnes, qui ont reçu 123 824 appels.

155.En 2013, le personnel de la Ligne183 a répondu à 107 716appels. En cette année 2013,10 286cas de violence ont été transmis aux équipes provinciales de réponse en urgence.Sur ces 10 000 et quelques cas de violences, 5084 concernaient des violences contre des femmes, 3925 des violences à l’égard d’enfants, 761 des violences à l’égard de personnes handicapées et 516 des violences contre des personnes âgées.

156.En outre, les femmes, les enfants et les membres de familles exposés à des violences ou risquant de l’être, ainsi que les victimes de harcèlements constants, peuvent déposer une plainte par l’intermédiaire de la Ligne d’urgence téléphonique156 de la Gendarmerie, qui offre également des services 24heures sur 24 et 7jours sur 7.

157.Grâce à de nouvelles dispositions de la Loi No. 6284, les dépenses liées aux traitements et aux soins de santé des victimes de violences sont couvertes par l’État à certaines conditions. De plus, s’il est jugé que l’auteur des violences devrait suivre un traitement ou des soins devant l’amener à guérir, les dépenses autres que celles couvertes par le système général de la sécurité sociale sont également couvertes par l’État. Les services fournis aux victimes de violences sont gratuits. D’autre part, une aide financière peut être également accordée, en fonction des besoins de la victime.

158.À la suite de la mort de FerdaneÇöl, sa mère, SunaMaviş, et son père, FikretMaviş ont déposé une demande de réparation pécuniaire et non pécuniaire auprès du troisième Tribunal administratif d’Izmir (affaireNo. 2013/667); l’affaire est toujours en cours.

Question  10 : Suite à la ratification, par l’ État partie, du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, prière d’indiquer si l’ État partie a créé un mécanisme national de prévention. Le Comité ayant pris note des informations soumises par l’ État partie, veuillez lui communiquer des précisions supplémentaires sur le mandat du mécanisme national de prévention, en indiquant si ce mandat sera en conformité avec les principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (« Principes de Paris »), et si ce mécanisme sera indépendant du pouvoir exécutif.

159.Par un Décret gouvernemental en date du 9 décembre 2013, l’Institution turque pour la protection des droits de l’homme a été désignée en tant que « mécanisme national de prévention » chargé d’appliquer les dispositions et de faire usage des pouvoirs prévus par le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.Cette décision a pris effet lors de sa publication au Journal Officiel No. 28896, en date du 28 janvier 2014. Il y a, vis-à-vis de la Loi relative à la création de l’Institution turque pour la protection des droits de l’homme, un travail d’amendement en cours afin de permettre à cette institution de remplir sa mission.

160.L’Institution turque pour la protection des droits de l’homme a été créée en conformité avec les « Principes de Paris »; il s’agit d’un organisme public jouissant d’une autonomie administrative et financière. On trouvera d’autres informations sur cette institution dans les réponses à la Question 37.

Question  11 : Veuillez exposer ce qui est fait pour garantir l’indépendance de l’appareil judiciaire, et, en particulier, celle des juges face aux procureurs, compte tenu des préoccupations exprimées par la Rapporteuse spéciale sur l’indépendance des juges et des avocats.

161.En ce qui concerne l’indépendance des procureurs, à la suite d’amendements législatifs adoptés dans le cadre de l’harmonisation de la législation turque et de l’acquis communautaire (c’est-à-dire de l’Union européenne), le pouvoir du Ministre de la justice et des gouverneurs de délivrer un ordre et de présenter une requête relative à des enquêtes préliminaires a été abrogé. Dans ce contexte, aucune autorité – y compris le Ministre de la justice et les directeurs des administrations civiles – autre que les Procureurs généraux ne peut déposer une requête ou délivrer un ordre aux agents de l’État chargés de faire appliquer la loi en ce qui concerne l’ouverture d’enquêtes préliminaires.

162.Concernant l’indépendance des juges, en vertu des amendements au Code de procédure civile (No. 6100) en date du 12 janvier 2011 et au Code de procédure pénale (No. 5271) en date du 4 décembre 2004, les tribunaux jouissent du droit et de l’autorité d’entretenir une correspondance directe avec tous les organes et institutions de l’État.

163.L’article 28 de la Loi cadastrale (No. 3402), datée du 21 juin 1987, stipule clairement qu’un juge a le droit de demander aux autorités officielles compétentes l’accès aux archives et informations pouvant avoir un effet pour la résolution du différend ou conflit en question. En vertu de dispositions légales autorisant les tribunaux à établir une correspondance directe, conformément à l’article 26 de la Loi No. 5271, les tribunaux ont le pouvoir de présenter directement une demande d’informations et de documents à toute institution ou organisation, en lieu et place des procureurs de la République. À cet égard, les dispositions de la loi qui rendaient les tribunaux dépendants des procureurs ont été abrogées.

164.En vertu de la Circulaire No. 4 relative à la « Réglementation des formulaires de suivi des suspects/accusés et du Mandat d’arrêt par défaut dans le système informatique judiciaire national (UYAP) » et au « Suivi de leur exécution et à l’actualisation de leur statut », et de la Circulaire No. 5 relative au « Processus obligatoire de délivrance d’un mandat », il a été établi que les mandats d’arrêt et l’obligation de délivrance d’un mandat prononcés par les tribunaux devaient être directement adressés, via l’UYAP, à l’unité d’application de la loi compétente, et que ce processus pouvait être également suivi en ligne par les bureaux des procureurs, aux fins d’accélération des procédures.

165.La Circulaire No. 15 sur la « Correspondance officielle » a défini les procédures et principes à prendre en considération dans toute correspondance officielle avec le Conseil suprême des magistrats et des procureurs. En conséquence, cette correspondance doit être signée sur support électronique via l’UYAP. De plus, les chefs des commissions du Conseil sont autorisés à entretenir une correspondance directe – en dehors de toute ingérence des Bureaux des Procureurs de la République.

166.La Circulaire No. 19 sur les « Demandes de cartes et de photographies aériennes » établit que les tribunaux sont autorisés à demander des informations et des documents à toute institution ou organisation – y compris la Direction générale de la cartographie -, qu’un agent d’information cartographique doit être nommé auprès de chaque tribunal, et que toute demande doit être présentée par son intermédiaire sur le site Internet de la Direction générale de la cartographie. Cette circulaire établit également que ce type de transaction doit se faire via l’UYAP, après s’être assuré de l’intégration des services de l’UYAP et de la Direction générale de la cartographie.

167.Par l’application de cette circulaire, le « Bureau des Cartes », situé au sein du Ministère de la justice, a été déplacé, et ont été abrogées les réglementations concernant des questions telles que l’obligation, pour les tribunaux, d’adresser leurs demandes de cartes et de photographies aériennes à l’autorité compétente, par l’intermédiaire du Ministère de la justice, ou encore la désignation, par ce ministère, d’un responsable du paiement des frais et de l’envoi des cartes demandées; en d’autres termes, le principe d’indépendance des tribunaux a été ainsi renforcé.

168.Aux termes de la Circulaire No. 21, relative aux « Questions à prendre en considération en matière de transmission de dossiers à une cour d’appel », les dossiers doivent être soigneusement conservés, l’ensemble des documents concernés doit être intégré à l’UYAP (le Système informatique judiciaire national), les dossiers d’affaires pénales doivent être directement transmis au Bureau du Procureur général de la Cour de cassation, sans passer par les procureurs de la République, chaque dossierdoit être placé dans une enveloppe séparée – l’ensemble des enveloppes pouvant être regroupé dans un même paquet -, les dossiers et leur contenu doivent être transmis au département responsable, les frais d’appel doivent être contrôlés, une notification doit être envisagée, et, si l’acte judiciaire signé sur support électronique est adressé à la Cour de cassation via l’UYAP, il doit être archivé, la demande doit être enregistrée en bonne et due forme et une attestation de gratuité doit être remise au demandeur.

169.Le respect de l’ensemble de ces règles – conformes aux dispositions de la Cour de cassation, du Conseil d’État et du Bureau du Procureur général de la Cour de cassation – vise à l’accélération du processus d’examen par la cour d’appel.

170.La Circulaire No. 25, concernant la « Supervision des secrétariats des tribunaux et des bureaux d’exécution et des procédures de faillite » établit que le personnel devra être inspecté une fois tous les trois mois au moins, dans le cadre de la mission administrative des juges, afin de déterminer si les opérations sont effectuées de manière opportune, conforme et exhaustive, via l’UYAP.

171.Conformément aux avis du Comité d’inspection du Conseil suprême des juges et des procureurs, la Circulaire No. 131 du Ministère de la justice, qui constituait le fondement juridique de l’inspection, par les juges, des comptes monétaires et de trésorerie, a été annulée. Dans ce même contexte, la Circulaire No. 28/1 du Ministère de la justice a établi que l’inspection des comptes monétaires et de trésorerie serait désormais effectuée par les procureurs; de ce fait, les recommandations de l’Union européenne visant à déchargerles juges de leurs tâches administratives ont été en partie mises en œuvre.

Article 3

Question  12 : Eu égard aux observations finales précédentes du Comité ( par.  15 b)), veuillez indiquer si l’ État partie a fait le nécessaire pour que les demandeurs d’asile non européens aient droit à une protection. Indiquer également le nombre de demandeurs d’asile, en ventilant les données par pays d’origine et en précisant s’ils ont été renvoyés dans leur pays, extradés ou expulsés. Préciser également le pays vers lequel un demandeur a été rapatrié et les motifs de rapatriement. Veuillez indiquer également combien de demandeurs d’asile ont fait appel de décisions négatives, quel organe a procédé à l’examen de chacun des recours et quelle en a été l’issue. En ventilant les chiffres par pays d’ origine, veuillez indiquer aussi combien de personnes ont obtenu l’asile ou une protection humanitaire au motif qu’elles risquaient d’être exposées à la torture en cas d’expulsion, de renvoi ou d’extradition. Veuillez préciser également combien de réfugiés syriens ont été accueillis dans des camps situés sur le territoire de l’ État partie, et combien d’entre eux ont régularisé leur statut juridique et reçu des documents les autorisant à rester sur le territoire. Exposer également les mesures prises pour que le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (le HCR) et les organisations indépendantes œuvrant pour la défense des droits de l’homme aient librement accès aux réfugiés, et pour que ces réfugiés puissent utiliser les procédures d’asile.

172.La Turquie a ratifié la Convention relative au statut des réfugiés en précisant qu’elle exerçait, dans ce domaine, un droit accordé aux pays par l’article 42 de cette convention. La Turquie a mis sa législation nationale concernant les réfugiés et l’asile en conformité avec la Convention relative au statut des réfugiés, qui date de 1951, en instaurant une « Réglementation relative aux procédures et principes que les ressortissants étrangers doivent respecter en se réfugiant sur le territoire turc, ou s’ils demandent un permis de séjour en Turquie conformément aux règles du refuge dans un pays étrangersur une base individuelle»; cette Réglementation concerne également les « Ressortissants étrangers arrivant sur le territoire turc pour demander asile à titre collectif et participer éventuellement à des mouvements de population »; cette Réglementation a pris effet le 30 novembre 1994, compte tenu des derniers événements politiques et des violations des droits de l’homme dans la région.

173.La Turquie a adopté la Convention de 1951 sur le statut des réfugiés avec une réserve d’ordre géographique. En effet, les personnes originaires d’Europe sont admises dans le pays en tant que réfugiés, alors que les personnes venant de pays autres qu’européens ont le statut de demandeurs d’asile et sont soumises, par conséquent, aux règles de la protection internationale tant qu’elles n’ont pas été officiellement acceptées dans un pays tiers.

174.Cependant, en dépit de ce distinguo, toutes les demandes de ressortissants étrangers sont traitées conformément à l’article 6 de la Réglementation de 1994 sur l’asile et les réfugiés, ainsi que dans le cadre de la Convention relative au statut des réfugiés de 1951 et de son Protocole de 1967, sans aucune discrimination quant aux procédures d’asile.

175.Les deux groupes – réfugiés et demandeurs d’asile – bénéficient des mêmes droits sociaux et de santé, ainsi que des droits au travail, à un emploi et à l’éducation, sans discrimination aucune.

176.En outre, un « Plan d'action national concernant l’asile et la migration » a été mis en œuvre en Turquie en 2005. L’article 4.13 de ce plan indique que la question de la levée de la « réserve géographique » en question sera examinée dans le détail dans le cadre des négociations sur l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne, et que cette réserve pourra être effectivement levée après la signature d’unaccord sur l’adhésion à part entière de la Turquie à condition que cela n’encourage pas un flux direct de réfugiés dans notre pays. Dès lors, cette question de la suppression des limites au refuge dans le pays sera prise en considération en fonction de l’adoption des modifications législatives et infrastructurelles nécessaires et du type de réaction des États membres de l’UE en matière de partage des charges.

177.De 2005 àmars 2014, 125 213personnes ont demandé asile en Turquie. Les demandes non conformes aux critères définis par la Convention de Genève ont été rejetées; 543personnes ont essuyé un premier refus, et 699 un second refus. À noter en outre que, de 2005 à ce jour, 36 073demandeurs d’asile ont été acceptés dans un autre pays.

178.En cas de décision de rapatriement d’une personne dont la demande d’asile a totalement été rejetée, le rapatriement ou l’expulsion n’ont pas lieu si la peine capitale existe dans le pays d’origine, si la personne est susceptible d’y être exposée à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants, ou encore si un conflit armé international ou interne constitue une menace sérieuse pour sa vie en raison des violences aveugles qui sont commises dans le pays d’origine.

179.Tableau indiquant les décisions prises de 2005 à mars 2014:

Pays d’origine

Demande définitivement rejetée (2 e décision négative)

Attente d’une décision de protection subsidiaire

Décision de protection subsidiaire

Décision de refus (1 e décision négative)

Total

USA

2

2

Afghanistan

89

120

209

Allemagne

1

1

Albanie

1

1

2

Azerbaïdjan

13

3

16

Bangladesh

3

1

4

Bélarus

3

3

Bénin

1

1

Bosnie-Herzégovine

1

1

Brésil

1

1

Bulgarie

3

1

4

Burundi

1

1

Algérie

7

1

8

Chine

21

7

28

Érythrée

11

3

14

Arménie

1

1

Éthiopie

1

3

7

11

Maroc

11

11

22

Côte d’Ivoire

8

8

Philippines

1

1

Palestine

38

29

67

Gambie

2

2

Ghana

2

2

Guatemala

1

1

Géorgie

5

5

10

Inde

2

2

Iraq

50

55

106

Angleterre

1

1

Iran

92

1

40

133

Cameroun

2

5

7

Kazakhstan

8

8

16

Kenya

1

1

Kirghizistan

25

6

31

Congo

5

3

12

Cuba

1

1

Libéria

2

2

Liban

3

3

Malaisie

1

1

Égypte

1

1

2

Mongolie

1

4

5

République de Moldova

9

2

11

Mauritanie

1

2

3

Myanmar

10

3

13

Nigéria

9

2

11

Philippines

1

1

Ouzbékistan

56

5

55

116

Pakistan

4

2

6

Roumanie

2

2

4

Rwanda

3

2

5

Fédération de Russie

39

11

50

Sénégal

3

1

4

Sierra Leone

1

1

Singapour

 1

1

Somalie

42

36

79

Sri Lanka

3

5

8

Soudan

4

8

12

Syrie

24

17

41

Arabie saoudite

1

1

Tadjikistan

3

14

17

Tanzanie

2

2

Tunisie

3

1

4

Turkménistan

67

46

113

Israël

1

1

Ouganda

2

4

Ukraine

2

1

3

Jordanie

1

1

2

Viet Nam

2

2

Apatrides

1

1

Total

699

6

9

544

1 258

180.Dans 188cas, il a été fait appel, auprès de tribunaux administratifs et de la Cour européenne des droits de l’homme, des décisions prises par le Ministère de l’intérieur de la Turquie au sujet de ressortissants étrangers ayant effectué une demande d’asile en Turquie de 1995 à décembre 2013. 82 de ces affaires ont été portées devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH).26affaires ont été écartées par la CEDH. Dans un cas, la demande a été retirée; 41affaires sont en instance. Dans 14affaires, la violation des articles 3, 5, 5/1, 5/2, 5/4, 5/5, 6, 13 et 34 de la Convention européenne des droits de l’homme a été établie. Dix-neuf autres affaires ont été portées à la fois devant des tribunaux turcs et devant la CEDH – sur ces 19affaires, 8 ont été jugées en faveur du Ministère turc de l’intérieur et dans le cas de 8autres, des violations de la loi ont été établies.Enfin, les trois affaires restantes sont en instance. D’autre part, 106affaires ont été portées devant des tribunaux turcs aux fins d’annulation des actes administratifs et des décisions du Ministère de l’intérieur.58affaires se sont conclues en faveur du Ministère de l’intérieur, tandis que des violations ont été établies dans 27autres, et 22affaires sont en instance.

181.La Turquie applique une politique d’« ouverture des frontières » en faveur des Syriens qui fuient les violences commises actuellement dans leur pays; la Turquie applique de manière très stricte le principe de non-refoulement aux frontières, et, conformément aux procédures internationales, notre pays offre aux Syriens une « protection temporaire », sans discrimination aucune. Ce régime de « protection temporaire » est différent du droit d’asile, et, en l’occurrence, les procédures d’asile ne s’appliquent pas.

182.Les Syriens bénéficiant de cette protection temporaire ont été accueillis dans 22centres d’hébergement, dans des villes frontalières turques. Ces ressortissants syriens sont nourris; on leur fournit également des produits autres qu’alimentaires, ainsi que des services de santé et d’éducation, une assistance psychologique et une formation professionnelle; on leur permet également de participer à des activités sociales.

183.À la date du 17 mars 2014, la Turquie a délivré des « permis de séjour temporaires d’un an » à 83 425Syriens arrivés en Turquie avec leur passeport. En outre, il est important d’enregistrer aussi les Syriens qui entrent en Turquie de manière clandestine, qui ne sont pas logés dans des camps et vivent dans l’ensemble du pays par leurs propres moyens: pour les autorités turques, il s’agit d’assurer l’ordre public et de faire bénéficier ces clandestins de certains avantages de manière organisée.

184.Afin d’enregistrer tous les ressortissants syriens entrant en Turquie, nous avons créé un « Système automatique d’empreintes digitales et d’identification », qui nous permet de réunir des informations démographiques et biométriques sur l’ensemble des ressortissants étrangers.

185.Ce processus d’enregistrement a commencé dans 21refuges ayant accueilli des Syriens.Il se poursuit dans 18« centres de coordination », dans les provinces d’Adana, de Gaziantep, de Hatay, de Kahramanmaras, de Kilis, d’Osmaniye, de Mardin et de Şanhurfa.Ce travail biométrique a également commencé dans d’autres provinces et districts ayant accueilli de très nombreux Syriens.

186.À la date du 20 mars 2014, 410 981Syriens ont été enregistrés dans des refuges, des centres de coordination et dans certaines provinces. Parallèlement à ce travail d’enregistrement, nous avons créé une « Carte d’identification des étrangers », notamment pour les Syriens. Ces cartes permettent à leurs détenteurs de bénéficier de services de santé et d’éducation, et facilitent l’aide aux Syriens et le suivi de cette aide.

187.En outre, plus de 500 000ressortissants syriens vivant ailleurs que dans les abris ou refuges bénéficient également du régime de protection. Au total, on compte quelque 800 000Syriens dans le pays – ce qui représente plus de dix fois le nombre de Syriens qui cherchent refuge dans l’ensemble des pays de l’Union européenne.

188.Les procédures et principes régissant les visites de représentants d’organisations internationales, de délégations étrangères, d’organisations non gouvernementales et de la presse sont définis conjointement par le Ministère des affaires étrangères, l’Agence de gestion des catastrophes et des situations d’urgence, attachée au Cabinet du Premier Ministre, et le Ministère de l’intérieur.Le Haut-Commissariat des NationsUnies pour les réfugiés (HCR) bénéficie d’un libre accès à l’ensemble des ressortissants syriens, à l’intérieur comme à l’extérieur des refuges, et participe directement aux procédures de « retour volontaire » en Syrie depuis la Turquie.

Question  13 : À la lumière des précédentes observations finales du Comité ( par.  15), veuillez fournir des précisions sur les mesures suivantes, qui illustrent le respect, par l’ État partie, de l'obligation lui incombant au titre de la Convention de ne pas renvoyer une personne qui risque d’être soumise à la torture :

a) Les mesures visant à garantir l’accès du personnel du HCR à toutes les personnes placées en détention et à vérifier que les dispositions de la circulaire du Ministère de l’intérieur autorisant cet accès sont appliquées ;

b) Les mesures prises pour garantir l’accès de tous les détenus étrangers à la procédure d’asile, y compris l’accès aux services d’un avocat et à l’aide juridictionnelle pour l’ensemble de ces détenus, la possibilité de contester les décisions relatives à leur demande d’asile et la suspension des procédures d’expulsion lors de l’examen des demandes ;

c) Les mesures destinées à garantir l’accès d’organes de contrôle indépendants aux « centres d’accueil pour étrangers » et autres centres de rétention, afin de prévenir les mauvais traitements ;

d) Les mesures prises pour construire de nouveaux centres d’accueil pour étrangers et lieux de rétention offrant des conditions de vie saines et sûres, pour remédier au grave problème de surpeuplement.

189.Les étrangers qui entrent de manière illégale en Turquie et effectuent une demande d’asile ne sont pas soumis à des procédures juridiques spéciales et ne subissent aucune peine pour être entrés illégalement sur le territoire turc. Ils sont soumis aux mêmes procédures que ceux entrés légalement sur le territoire et effectuant une demande d’asile.

190.Les ressortissants étrangers reçoivent toutes les informations nécessaires sur les raisons de leur détention administrative et sur la durée du séjour autorisé dans les centres d’accueil pour étrangers. Ils sont également informés, dans une langue qu’ils connaissent, de leur droit d’accès à un avocat au cours de leur séjour dans l’un de ces centres, ainsi que de leur droit de remettre en cause les décisions de déplacement des personnes et de détention administrative dans les centres en question.En outre, ces étrangers peuvent interpeller la direction du centre d’accueil au sujet des conditions de vie qui y règnent et des actes administratifs qui les visent. Enfin, ils sont autorisés à présenter directement leurs plaintes et leurs demandes aux fonctionnaires qui inspectent régulièrement les centres concernés.

191.Chacun – y compris les immigrés clandestins – a droit à unaccès équitable et conséquent à la procédure d’asile. Les ressortissants étrangers entrés illégalement dans le pays et demandant l’asile, alors qu’ils se trouvent dans un centre d’accueil dans l’attente d’un déplacement, sont libérés (sauf obligation juridique contraire) et accèdent à la procédure d’asile après un bref processus d’évaluation. Ces ressortissants étrangers sont autorisés à rencontrer leurs représentants juridiques, ainsi que des responsables du HCR.Quelque 5383personnes ont demandé l’asile en 2012 et 4021autres en 2013, alors qu’elles se trouvaient dans un centre d’accueil pour étrangers; toutes ces personnes ont été libérées après examen de leur demande d’asile.

192.Aucun demandeur d’asile n’est arrêté ou détenu – excepté si il ou elle est coupable d’une infraction. La Turquie respecte très strictement le principe de non-refoulement.

193.Toute objection à un acte ou une décision administratifs est examinée comme il se doit. Il n’y a aucune restriction en matière de recours aux voies judiciaires existantes – y compris la Cour européenne des droits de l’homme.

194.Lors de sa quatrième réunion, le 8 décembre 2011, la Commission d’enquête sur les droits de l’homme de la Grande Assemblée nationale de Turquie a mis en place une sous-commission, chargée de formuler des observations sur les questions de réfugiés, de demandeurs d’asile et d’immigrés clandestins.

195.Dans ce contexte, la Sous-Commission en question a procédé à des examens, le 10 mai 2012, dans les Centres d’accueil pour étrangers d’Edirne et de KirklareliGazi OsmanPaşa, puis, le 11mai, dans le Centre d’accueil pour étrangers de Kumkapi, à Istanbul.

196.Lors de ces visites de contrôle, les membres de la Sous-Commission ont rencontré des gouverneurs, des maires et autres autorités administratives locales, ainsi que des immigrésen situation illégale logés dans les centres d’accueil en question. Ont également pris part à ces contrôles et apporté d’importantes contributions des membres d’organisations non gouvernementales opérant dans les domaines des réfugiés, des demandeurs d’asile et des immigrés en situation illégale, à savoir Human Rights Research Association (l’Association pour la recherche en matière de droits de l’homme), Refugees Solidarity Association (l’Association pour la solidarité avec les réfugiés), Solidarity Association for Asylum Seekers and Migrants (l’Association pour la solidarité avec les demandeurs d’asile et les migrants), Human Rights Association (l’Association des droits de l’homme), Helsinki Citizens’ Assembly (l’Assemblée des Citoyens d’Helsinki), Solidarity Association for Human Rights and Oppressed Persons (l’Association pour les droits de l’homme et la solidarité avec les personnes opprimées), Human Rights and Freedom and Humanitarian Assistance Foundation (la Fondation pour les droits de l’homme, la liberté et l’aide humanitaire), ainsi qu’Amnesty International.Un rapport a été élaboré à la suite de ces visites, et transmis aux institutions concernées.

197.En outre, les 6 et 7 février 2014, la sous-commission en question a procédé à un contrôle dans des centres d’accueil pour étrangers des provinces d’Izmir et d’Aydm: les membres de la sous-commission y ont examiné les conditions matérielles, et ont rencontré des immigrés qui y avaient été accueillis.

198.Il faut préciser également que des représentants du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants se rendent aussi dans ces centres d’accueil pour étrangers lors de leurs visites périodiques en Turquie.

199.Quelque 26centres d’accueil pour étrangers sont en activité dans 26provinces du pays: ces centres peuvent accueillir 2172personnes. En coordination avec l’Union européenne, 6 centres d’admission, d’hébergement et de suivi sont actuellement en construction dans les provinces d’Erzurum, de Gaziantep, de Van, de Kayseri, de Kirklareli et d’Izmir, et un centre d’accueil destiné aux immigrés en situation irrégulière est également en construction dans la province d’Erzurum. Ces futurs centres respecteront les normes régionales et internationales les plus élevées en matière de droits de l’homme. Quant aux centres déjà existants ayant une faible capacité d’accueil et ne répondant pas totalement aux normes matérielles exigées, nous envisageons de les fermer dès l’ouverture des nouveaux centres précités.

Question  14 : Veuillez indiquer si l’ État partie a entrepris de réviser sa législation relative aux étrangers afin de préciser la durée maximum de l’internement administratif de ressortissants étrangers. Fournir également des précisions sur les mesures prises pour améliorer les conditions de détention dans les « Centres de détention pour étrangers », en particulier celui d’Ağri, et faire en sorte que les détenus aient rapidement accès aux soins de santé, notamment lorsqu’ils sont mineurs.

200.Une nouvelle loi a été adoptée dans ce domaine: la Loi No. 6458 sur les étrangers et la protection internationale, parue au Journal Officiel No. 28615 du 11 avril 2013. Dans le cadre de cette loi, la Direction générale de l’administration des migrations a été créée au sein du Ministère de l’intérieur.

201.La « détention administrative » est réglementée par deux sections différentes de la loi No. 6458 – respectivement « la détention administrative avant déplacement » et « la détention administrative des personnes ayant demandé une protection internationale », ce qui correspond aux articles 57 et 68 de ladite loi.

« Détention administrative et durée de la détention avant déplacement des personnes détenues

ARTICLE 57

Les étrangers relevant de l’article 54 sont appréhendés par les forces de l’ordre et immédiatement signalés aux autorités de la province concernée, afin que celles-ci puissent prendre une décision sur le statut des ressortissants étrangers en question.Si un déplacement des personnes étrangères est jugé nécessaire, cette décision sera officiellement formulée par les autorités de la province. L’évaluation de chaque cas et la décision devront se faire dans un délai maximum de 48heures;

Au sujet des étrangers devant être en principe déplacés, les autorités de la province devront prendre une décision de détention administrative, afin d’éviter qu’ils se soustraient à la justice ou qu’ils disparaissent; cette même décision devra être prise à l’encontre des personnes ayant violé la réglementation sur l’entrée en Turquie et la sortie du pays, à l’encontre de ceux ayant fait usage de faux papiers, de ceux qui n’ont pas quitté la Turquie, sans aucune excuse acceptable, à l’expiration de la période de séjour autorisée, ou encore vis-à-vis de ceux qui constituent une menace pour l’ordre, la sécurité ou la santé publics.Les ressortissants étrangers soumis à une détention administrative doivent être transférés dans des centres de rétention dans un délai de 48 heures après la décision de détention (laquelle aura été prise par l’unité des forces de l’ordre ayant procédé à l’arrestation);

La durée du séjour dans un centre de rétention ne doit pas excéder six mois. Cependant, si la rétention ne peut avoir lieu en raison d’un refus du ressortissant étranger de coopérer ou de fournir des informations ou des documents valables au sujet du pays d’origine, la période de maintien en détention pourra être prolongée de six mois – au plus;

La question du maintien en détention administrative sera examinée régulièrement, tous les mois, par les autorités de la province – si elles le jugent nécessaire. Dès que la détention administrative n’est plus jugée nécessaire, elle devra prendre fin immédiatement. Les ressortissants étrangers peuvent être contraintsde respecter un certain nombre d’obligations administratives – notamment celle de résider dans un lieu désigné et de se signaler régulièrement aux autorités, sous une forme et pendant un laps de temps à définir;

La décision de détention administrative, le prolongement de la période de détention, ainsi que les motifs et les résultats des contrôles mensuels, doivent être notifiés au ressortissant étranger ou à son représentant légal ou son avocat. Si le 'détenu administratif' n’a pas d’avocat, son représentant légal doit être informé des conséquences de la décision de détention, ainsi que de la procédure d’appel et du délai maximumpour un recours en appel;

La personne placée en détention administrative, ou son représentant légal, ou encore son avocat peuvent faire appel de la décision de détention auprès de la Justice de paix pénale.Ce recours ne peut suspendre la détention administrative. Lorsque l’appel est signifié à l’administration, il doit être aussitôt porté à la connaissance de la Justice de paix pénale, et plus spécifiquement, au magistrat compétent.Le Magistrat de la Justice de paix pénale doit finaliser l’évaluation dans un délai de cinq jours.La décision de ce magistrat est définitive. La personne placée endétention, son représentant légal ou son avocat peuvent de nouveau faire appel de la décision auprès de la Justice de paix pénale si les conditions de la détention administrative ne sont plus respectées ou si elles ont été modifiées;

Les personnes ayant fait appel de la décision de détention administrative mais n’ayant pas les moyens de payer les frais d’avocat peuvent obtenir des conseils juridiques, conformément à la Loi sur les pratiquants du droit (Loi No. 1136, en date du 19 mars 1969).

Détention administrative des demandeurs

ARTICLE 68

Les personnes qui demandent l’asile ne font pas l’objet d’une détention administrative si leur seule demande est celle d’une protection internationale;

En l’occurrence, la détention administrative constitue une exception.Les demandeurs n’en font l’objet que dans les cas suivants:

s’il est nécessaire de déterminer l’identité ou la nationalité des personnes en question du fait que l’exactitude des informations qu’elles ont fournies est sérieusement mise en doute;

s’il s’agit d’interdire aux personnes concernées l’entrée sur le territoire turc du fait d’une violation des règles [et des conditions] de passage des frontières;

s’il est impossible de déterminer les motifs de la demande sans avoir préalablement recours à la détention administrative;

si la ou les personnes concernée(s) constitue(nt) une menace sérieuse pour l’ordre ou la sécurité publics.

La requête de détention administrative doit se faire au cas par cas. En ce qui concerne les cas définis au paragraphe 2 ci-dessus, avant toute décision de détention administrative, on déterminera prioritairement – pour évaluer le cas en question – si l’obligation de résidence et de notification de celle-ci, stipulée à l’article 71, est suffisante.Les autorités des provinces peuvent envisager des alternatives à la détention administrative. Mais, si les mesures envisagées ne sont pas suffisantes, la détention administrative sera décidée;

La décision de détention administrative – notamment ses motifs et la durée de la détention – doit être notifiée par écrit aux personnes qui en font l’objet ou à leur représentant légal/leur avocat.Si la personne qui doit être placée en détention administrative n’est pas représentée par un avocat, elle (ou son représentant légal) doit être informée des conséquences d’une telle décision et des procédures d’appel;

Concernant les personnes qui demandent une protection internationale, la durée de la détention administrative ne doit pas dépasser trente jours. Les actions concernant ces personnes doivent être finalisées dans les meilleurs délais.La détention administrative doit prendre fin dès que les conditions à l’origine de cette décision ne s’appliquent plus;

À tous les stades de la détention administrative, celle-ci peut être levée par l’autorité qui l’a décidée, et la personne en détention peut être priée de remplir les obligations définies à l’article 71 ou de respecter toute autre mesure;

La personne placée en détention administrative, son représentant légal ou son avocat peuvent faire appel de la décision de détention auprès du Magistrat de la Justice de paix.Cependant, l’appel n’entraîne pas la suspension de la détention. Si la demande d’appel est présentée à l’administration concernée, elle doit être transmise sans délai au Juge de paix compétent. Le Juge de paix devra finaliser l’évaluation du cas dans un délai de cinq jours, et sa décision sera définitive. La personne placée en détention administrative, son représentant légal ou son avocat peuvent faire de nouveau appel auprès du Juge de paix si les conditions de la détention ne sont plus respectées ou qu’elles sont modifiées;

Conformément au deuxième paragraphe ci-dessus, la personne placée en détention administrative peut recevoir des visiteurs – en vertu de principes et procédures définis dans une Directive. Le 'détenu administratif' doit être autorisé à avoir recours à un représentant légal, un avocat, un notaire public, ou encore à un fonctionnaire du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. »

202.En outre, dans le cadre de la Circulaire No. 2010/67, l’autorité de la province concernée doit approuver séparément l’accueil d’un ressortissant étranger dans un centre de rétention aux fins de déplacement.

203.En ce qui concerne le Centre de rétention dépendant du Département des ressortissants étrangers de la Direction de la sécurité d’Ağri, on a procédé à des travaux d’amélioration des locaux.

204.Les dépenses de logement, d’alimentation, de santé et autres liées aux besoins des ressortissants étrangers lors de leur séjour sans un centre de rétention sont couvertes par l’État. L’État et un certain nombre d’organisations non gouvernementales contribuent à l’amélioration du traitement des étrangers et de l’aide psychologique qu’ils reçoivent.

205.Les enfants non accompagnés placés en détention administrative sont pris en charge par les services sociaux de la province concernée et les organismes de protection de l’enfance avant leur transfert dans un centre de rétention. Les enfants accompagnés disposent d’un certain temps pour se divertir avec leur familleDes projets sont en cours afin d’utiliser plus activement les locaux culturels et de loisirs des centres de rétention.

Question  15 : Veuillez indiquer si l’ État partie a donné des assurances diplomatiques en tant que garanties contre la torture ou leur équivalent ou en a reçu pendant la période examinée, et, si tel est le cas, veuillez préciser combien de fois et dans quelles circonstances l’ État partie a ordonné des assurances diplomatiques. Indiquer enfin quelle est la teneur minimale de ces assurances, et si un suivi est prévu après le retour.

206.En matière d’extradition, la justice doit suivre une procédure très précise, définie dans la Circulaire No. 69/4 du Ministère de la justice.

207.En l’occurrence, le retour des prévenus et des criminels reconnus coupables dans le pays qui demande leur extradition s’inscrit dans le cadre d’accords bilatéraux et multilatéraux contraignants pour la Turquie comme pour le pays concerné. En l’absence de tels accords, les opérations d’extradition s’effectuent conformément au droit international coutumier et au principe de réciprocité.

208.Les cadres juridiques régissant l’extradition sont les suivants: l’article 38 de la Constitution turque; l’article 18 du Code pénal; les accords bilatéraux avec divers États; la Convention européenne d’extradition et son second Protocole additionnel; enfin, un certain nombre de conventions multilatérales élaborées par des instances internationales dans des domaines tels que les stupéfiants, le blanchiment d’argent, la criminalité transnationale organisée, la corruption et la lutte contre le terrorisme – textes qui contiennent tous des dispositions relatives à l’extradition.

209.Si la Turquie est l’État requérant, une requête d’extradition est rédigée par le Procureur général compétent lorsque l’affaire en est au stade de l’instruction ou de l’exécution des sentences, ou par le tribunal compétent pour les affaires qui sont au stade de l’accusation.

210.Si l’État demandant l’extradition est autre que la Turquie, la réquisition et ses annexes soumises au Ministère de la justice sont vérifiées en bonne et due forme, puis transmises au bureau du Procureur général de la juridiction dont dépend le prévenu, aux fins de définition des actions en justice à entamer.

211.Les « assurances » suivantes sont contenues dans toutes les réquisitions présentées par les autorités judiciaires demandant une action à l’encontre d’un suspect, d’un prévenu ou d’un criminel reconnu coupable:

« L’infraction dont le suspect est accusé n’est pas de nature politique ou militaire.

Le suspect doit jouir de tous les droits qui lui sont accordés par la législation de son pays et par les conventions internationales auxquelles la Turquie est Partie.

La Turquie est partie à la Convention européenne des droits de l’homme, et, conformément à l’article 34 de cette convention, une requête peut être présentée par toute personne physique contre la Turquie. Dans ce contexte, le demandeur a le droit de saisir la Cour européenne des droits de l’homme au stade de l’exécution des sentences, afin de remettre en cause le jugement final prononcé sur son affaire.

S’il apparaît de manière évidente et seulement après l’extradition que le prévenu avait été impliqué dans une autre infraction, commise dans le cadre de la juridiction turque avant la date d’extradition, une demande de consentement devra être présentée aux autorités du pays tiers concerné, afin que le coupable puisse être poursuivi pour cette infraction conformément à la 'règle de la spécialité'.

Si les autorités compétentes du pays tiers concerné refusent leur consentement, le coupable ne sera pas poursuivi, pour quelque infraction supplémentaire que ce fût, et ne sera poursuivi qu’au titre des infractions ayant fondé l’extradition. »

212.Dans les affaires exigeant un autre type de traitement, telles que les assurances diplomatiques à donner contre la torture et autres assurances du même type, l’extradition se fera conformément aux accords bilatéraux et multilatéraux contraignants pour la Turquie comme pour l’autre État concerné. En l’absence de tels accords, les opérations d’extradition doivent se faire conformément au droit international coutumier et au principe de réciprocité.

213.Par conséquent, les réquisitions de la justice et leur contenu sont scrupuleusement examinées dans le cas de certains pays, afin de déterminer très précisément si des assurances diplomatiques sont demandées contre la torture et autres traitements similaires.

214.Nous ne disposons pas de chiffres concernant les affaires dans lesquelles des assurances diplomatiques ont été fournies ou demandées au cours de la période2010-2014. Mais nous citons ci-après deux cas qui se sont produits pendant cette période.

215.La Turquie a demandé des assurances à un paysXdans le contexte des affaires d’extradition suivantes:

La justice turque a condamné M.A.A. (nous n’indiquons que les initiales de son nom au motif de respect de la vie privée) à 10ans d’emprisonnement, au paiement d’une amende de 40 000 000 de rials et à 74coups de fouet pour « trafic de stupéfiants ».Les autorités du pays concerné ont présenté une réquisition, en précisant que le condamné s’était évadé de la prison où il était détenu, avant d’être arrêté et de nouveau incarcéré en Turquie. Les assurances suivantes ont été demandées afin que la procédure d’extradition puisse commencer, conformément aux obligations de la Turquie au titre de la Convention européenne des droits de l’homme:

Les poursuites judiciaires ou administratives ne doivent concerner que l’infraction de « trafic de stupéfiants »;

Concernant la personne extradée, il ne sera nullement porté atteinte à son droit à la vie, et il ne doit pas y avoir de torture ou autre mauvais traitement;

La peine de 74coups de fouet – jugée inhumaine – ne sera pas exécutée;

Les missions diplomatiques turques auprès du pays tiers concerné seront autorisées à rendre visite à M.A.A. et à contrôler le respect, par le pays en question, des assurances demandées;

MmeM.Y.F., recherchée dans le paysX pour « détournement de fonds », a été arrêtée en Turquie. Le pays en question ayant demandé son extradition, les assurances suivantes ont été requises par le gouvernement turc:

Les poursuites judiciaires ou administratives ne doivent concerner que l’infraction de « détournement de fonds »;

Concernant la personne extradée, il ne sera nullement porté atteinte à son droit à la vie, et il ne doit pas y avoir de torture ou autre mauvais traitement;

Les missions diplomatiques turques auprès du pays tiers concerné seront autorisées à rendre visite à MmeM.Y.F. et à contrôler le respect, par le pays en question, des assurances demandées;

M.M.V., recherché par les autorités dupaysX pour « passage illégal des frontières » et « homicide volontaire », a été arrêté en Turquie. Les autorités du pays tiers ayant demandé, le 4 mars 2012, l’extradition de M.M.V., le gouvernement turc a demandé les assurances suivantes:

Les poursuites judiciaires ou administratives ne concerneront que les infractions de passage illégal des frontières et d’homicide volontaire;

La peine dite de qisas (représailles) ne sera pas imposée;

Concernant la personne extradée, il ne sera nullement porté atteinte à son droit à la vie, et il ne doit pas y avoir de torture ou autre mauvais traitement;

Les missions diplomatiques turques auprès du pays tiers concerné seront autorisées à rendre visite à M.M.V. et à contrôler le respect, par le pays en question, des assurances demandées;

Le paysX a demandé aux autorités turques les assurances suivantes dans l’affaire décrite ci-après:

Dans le cadre d’une affaire pénale dont a été saisie la deuxième Cour d’assises d’Antalya, M.A.A., ressortissant national du paysZ, était recherché pour homicide volontaire et extorsion. Une Notice rouge d’INTERPOL a été délivrée à son encontre. Lors de l’arrestation de cet homme dans le paysY, le 3 mai 2014, le Bureau du Procureur général compétent a demandé les assurances suivantes aux autorités turques:

Le prévenu ne sera poursuivi en justice et éventuellement condamné qu’au titre des infractions fondant la demande d’extradition, sauf application de la « règle de la spécialité » définie à l’article 14 de la Convention européenne d’extradition;

Le prévenu ne sera pas extradé vers un autre État tiers sans l’accord du pays Y;

Le prévenu ne fera pas l’objet de tortures ou autres mauvais traitements.

Les autorités du paysY ont également demandé des informations telles qu’un descriptif précis de l’infraction, avec la date, l’heure et le lieu des faits.En fait, ces assurances étaient déjà contenues, fondamentalement, dans la réquisition des autorités turques. Cependant, les autorités du paysY ont obtenu l’assurance que la personne extradée ne serait condamnée qu’au titre de l’infraction justifiant l’extradition et serait, lors de sa libération, autorisée à quitter la Turquie conformément à son droit de se déplacer. Après sa libération, l’accusé ne pourra être expulsé ou renvoyé vers un pays tiers qu’après information ou autorisation du paysY.Il a été également rappelé aux autorités du paysY que la Turquie était Partie à la Convention européenne des droits de l’homme et qu’à ce titre, elle garantissait le droit des personnes à saisir la Cour européenne des droits de l’homme.

D.A., accusé « d’avoir aidé l’organisation terroriste du PKK/KONGRA-GEL », et recherché dans le cadre d’une Notice rouge, a fait l’objet d’une demande d’extradition de la part du paysR. Les autorités du paysR ont fait valoir que D.A. avait demandé au tribunal de ne pas l’extrader, formulé un certain nombre d’accusations à l’encontre de la Turquie et affirmé notamment qu’en raison de ses origines kurdes, il risquait de faire l’objet de tortures, de mauvais traitements, de coercition et de persécutions dans les prisons turques – s’il était extradé.

216.En réponse aux autorités du paysR, les explications suivantes leur ont été fournies:

217.Les procédures et les principes régissant l’exécution des peines sont définis par la Loi relative à l’exécution des sentences et aux mesures de sécurité, ainsi que par les statuts, réglementations et circulaires d’application. L’article 2 de ladite loi stipule que:

« 1)Les règles relatives à l’exécution des sentences et aux mesures de sécurité doivent être appliquées sans privilège et sans aucune discrimination fondée sur la race, la langue, la religion, les croyances, la nationalité, la couleur de peau, le genre, la naissance, les convictions philosophiques, l’origine nationale ou sociale, ou encore les idées politiques et autres, ou les convictions, le pouvoir économique ou autre statut social du détenu;

2)Tout traitement cruel, inhumain, dégradant ou humiliant sera interdit dans le cadre de l’exécution des sentences et des mesures de sécurité. »

218.Conformément aux dispositions précitées, aucune différence de traitement et aucun privilège ne seront autorisés, et chaque détenu bénéficiera de l’égalité des droits définie dans le cadre juridique concerné.

219.Dans un certain nombre d’arrêts relatifs au risque de torture, de mauvais traitements et de persécution politique dans des affaires d’extradition, la Cour européenne des droits de l’homme a lancé une mise en garde contre les assurances diplomatiques accordées par un État dans lequel la torture est pratiquée couramment et de manière persistante. C’est la raison pour laquelle on doit déterminer sans délai si des assurances diplomatiques s’imposent contre la torture et autres traitements du même type. Dans ce contexte, la Turquie demande certaines assurances diplomatiques à l’État qui demande l’extradition et où le risque de torture et de mauvais traitements existe – et ce, sur la base des obligations imposées par la Convention européenne des droits de l’homme; de plus, la Turquie mène une action de suivi et de contrôle, y compris après l’obtention des assurances en question.

Article 4

Question  16 : Compte tenu des observations finales précédentes du Comité ( par.  7), veuillez décrire les mesures prises pour que tous les auteurs d’actes de torture soient poursuivis au titre des articles  94 (« Torture ») et 95 (« Torture avec circonstances aggravantes ») du Code pénal. Veuillez indiquer également si l’ État partie a fixé des lignes directrices relatives aux cas où les poursuites pour mauvais traitements doivent être engagées en vertu des articles  256 (« Usage excessif de la force ») et 86 (« Coups et blessures volontaires ») du Code pénal, plutôt que de l’ article  94.

220.Tous les auteurs d’actes de torture sont poursuivis en justice au titre des articles 94 et 95 du Code pénal. En cas de participation d’un agent public à ces actes criminels de torture, les autres participants à ces actes sont sanctionnés de la même manière que le fonctionnaire de l’État en question.

221.Conformément au « Principe de légalité en cas d'infraction et de peine y afférente » défini à l’article 2 du Code pénal, une personne ne peut être sanctionnée ou faire l’objet d’un avertissement pour un acte non reconnu explicitementcomme une infraction par la loi. En outre, aucune peine ou précaution de sécurité n’est autorisée, hormis celles prévues par la loi. Aucune sanction pénale ne peut être imposée sur la base des réglementations administratives. En conséquence, il est impossible de délivrer une circulaire ou de formuler des lignes directrices – procédures strictement administratives – pour déterminer la nature d’une infraction déjà définie dans le Code pénal.

Question  17 : Veuillez fournir des données statistiques concernant le nombre de poursuites engagées contre des agents de l’ État pour torture ou mauvais traitements depuis le dernier examen, en indiquant dans chaque cas le grade du défendeur, l’ article du Code pénal en vertu duquel il a été inculpé, s’il a été condamné et quelle peine a été prononcée. En cas de nouveau procès, fournir également des informations actualisées sur l’état d’avancement de la procédure (compte tenu d’une décision judiciaire datée de  septembre  20 11 et infirmant les condamnations) concernant les 19 personnes jugées coupables, en  20 10, de la mort d’Engin Ceber, survenue en détention en  20 08, à la suite des mauvais traitements que lui auraient infligés des agents de sécurité et des agents pénitentiaires.

222.On trouvera à l’annexe 5 des tableaux indiquant les peines de prison et leur durée prononcées par la justice pénale, entre 2010 et le 16 avril 2014, conformément aux articles 86, 94, 95 et 256 de la Loi No. 5237, contre des personnes ayant le titre d’officier de gendarmerie, d’officier de police, de chef de la police, de commissaire de police ou encore le grade de colonel, d’amiral, de sergent, de général, le statut de simple soldat, le grade d’officier ou de sergent spécialisé. L’un des tableaux contient également des données sur des décisions de non-poursuite et/ou de suspension de jugement concernant 54agents de l’État, entre le 1er janvier 2009 et le 31 mars 2014. Par ailleurs, la procédure est en cours concernant 21autres agents publics.

223.Le Centre d’enquête et d’évaluation sur les droits de l’homme de la Gendarmerie a été créé le 26 avril 2013 en vue d’examiner et d’évaluer les allégations de violation des droits de l’homme, et d’enquêter sur ces faits présumés et ayant pu se produire de la part de membres du personnel de la Gendarmerie dans l’exercice de leurs fonctions; il s’agit également d’établir la véracité des allégations en question, avant d’entamer les procédures légales qui s’imposent. Tout citoyen peut s’adresser directement à ce centre, ou par le biais d’une pétition, d’une lettre, d’un appel téléphonique, d’Internet ou d’un fax – et ce, 7jours sur 7 et 24heures sur 24.

224.Le Centre d’enquête et d’évaluation sur les droits de l'homme de la Gendarmerie a reçu 2926demandes du 26 avril 2003 au 1er avril 2014. Sur l’ensemble de ces demandes, 357seulement relevaient des compétences du Centre (autrement dit, 2569demandes n’entraient pas dans ce cadre). À la suite des enquêtes administratives menées au sujet des demandes relevant du Centre, il a été conclu que, dans le cas de 239demandes, les allégations étaient fausses; en ce qui concernait 110autres demandes, les affaires ont été portées devant la justice; enfin, dans le cas de 8demandes, les fonctionnaires concernés ont été sanctionnés au niveau disciplinaire.

225.Dans l’affaire EnginCeber, des enquêtes judiciaires et administratives ont visé 69personnes pour des faits de torture ayant eu lieu entre le 29 septembre et le 7 octobre 2008 dans les établissements pénitentiaires fermés de type Metris1 et 2T, et ayant abouti au décès du détenu EnginCeber à l’hôpital où il avait été transféré. L’enquête judiciaire a conduit à l’ouverture de poursuites pénales à l’encontre de 43personnes, à une décision de non poursuites dans le cas de 26autres personnes, à la révocation de 19agents publics, à l’arrestation de 6autres personnes, à la démission contrainte de 4autres fonctionnaires, à une demande de démission contrainte concernant 3autres fonctionnaires, et à une décision de suspension de promotion dans le cas de 3autres agents de l’État.

226.Suite à l’enquête administrative, une peine de réprimande a été prononcée concernant 42personnes, une décision de sanction autre que disciplinaire a été prise au sujet de 15autres personnes et une sanction de réduction de salaire a été prononcée contre 2personnes.

227.En outre, la Cour de cassation a annulé les décisions d’acquittement prises dans le cas des défendeurs Ö.B et A.U., ainsi que la décision d’acquittement du défendeur M.I prise par la 4eCour d’assises de Bakirköy.Les décisions relatives aux défendeurs M.Ç et Y.U. ont été maintenues avec quelques modifications. La Cour de cassation a confirmé toutes les décisions concernant les autres défendeurs.

228.Toutes les décisions maintenues (avec ou sans modifications) sont devenues définitives, excepté celle concernant F.K., en raison d’une objection communiquée à la Cour de cassation et entraînant un examen approfondi.

229.Suite à l’annulation des décisions concernant les défendeurs Ö.B., A.U. et M.I., les affaires en question ont été enregistrées sous le No. 2013/378 dans le cadre de la quatrième Cour d'assises de Bakirköy, et le procès se poursuit.

Question  18 : À la lumière des précédentes observations finales du Comité ( par.  8), veuillez décrire les dispositions prises afin qu’une autorisation spéciale ne soit plus nécessaire pour poursuivre les membres de la force publique d’un grade élevé accusés d’actes de torture ou de mauvais traitements, et veuillez indiquer également si le paragraphe  5 de l’ article  161 du Code de procédure pénale a été modifié, et si l’ article  24 de la Loi No.  5353 datée du 25  mai  20 05 a été abrogé.

230.Le paragraphe 5 de l’article 161 du Code de procédure pénale n’a pas été modifié. L’article 24 de la Loi No. 5353 n’a pas été abrogé. Toutefois, il n’est pas requis d’autorisation spéciale pour poursuivre des responsables d’un grade élevé pour actes de torture et mauvais traitements. Pour ce type d’infraction, les dispositions de la Loi No. 4483 sur la poursuite en justice de fonctionnaires et autres agents de la fonction publique sont appliquées et une enquête est menée d’office.

Question  19 : Compte tenu des précédentes observations finales du Comité ( par.  24), veuillez indiquer si le Code pénal a été modifié de façon que les actes de torture soient imprescriptibles.

231.En vertu de l’article 9 de la Loi No. 6459 du 11 avril 2013, l’article 94 du Code pénal a été modifié, et il est désormais établi que les actes de torture ne sont pas susceptibles de prescription.

Article 10

Question  20: À la lumière des précédentes observations finales du Comité ( par.  25), veuillez donner des informations sur les nouveaux programmes éducatifs et de formation mis en place pour faire en sorte que les fonctionnaires aient pleinement connaissance des dispositions de la Convention et sachent qu’aucune violation de ces dispositions ne sera tolérée. Veuillez également indiquer si l’ État partie a mis au point une méthode lui permettant d’évaluer l’efficacité de ces programmes, et, si tel est le cas, veuillez décrire la méthode en question.

232.Les Centres de formation professionnelle de la Police attachés à la Direction générale de la sécuritédispensent des cours relatifs aux conventions régionales et internationales pour la prévention de la torture – notamment la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi qu’à l’infraction que constituent les actes de torture; il s’agit d’un cycle de formation professionnelle de 47heures, destiné aux policiers – conformément à la Loi fondamentale du pays.

233.En outre, dans le cadre de toutes les formations (Éducation fondamentale spécialisée) prévues à l’alinéaa) de l’article 22 de la Réglementation relative à la formation en cours d’emploi, il existe des séances de cours – de deux heures au minimum – concernant les « Droits de l’homme » et la « Formation professionnelle des policiers ». Ces cours sont obligatoires pour tous les agents de la fonction publique, quels que soient leur titre ou leur grade.

234.Dans le cadre des « Activités de formation sur le terrain » concernant les droits de l’homme et organisées du 1er janvier 2009 au 31 mars 2014 au Commandement général de la Gendarmerie, 2217fonctionnaires ont été formés, et des visites d’inspection ont été effectuées dans 549centres de détention.

235.Au sein du Commandement des écoles de Gendarmerie sont dispensés les cours suivants – dans le cadre de la formation et des activités relatives aux droits de l’homme:

Au cours de l’année scolaire 2012-2013, 36heures de cours relatifs aux droits de l’homme ont été dispensées dans le cadre de la Formation fondamentale des officiers et des sous-officiers de Gendarmerie. En outre, 83heures de cours sur le Code pénal, 48heures de cours sur le Code de procédure pénale et 36heures de cours sur les droits de l’homme ont été dispensées à l’École supérieure professionnelle des sous-officiers de Gendarmerie;

Au cours de l’année scolaire 2013-2014, toujours dans le domaine des droits de l’homme, 72heures de cours ont été dispensées dans le cadre de la Formation fondamentale des officiers de Gendarmerie, et 66heures de cours dans le cadre de la Formation fondamentale des sous-officiers de Gendarmerie. En outre, à l’École supérieure professionnelle des sous-officiers de Gendarmerie, 64heures de cours ont été dispensées au sujet du Code pénal, 32heures au sujet du Code de procédure pénale, 45heures sur les droits de l’homme et 15heures sur la « Prévention de la violence domestique à l’égard des femmes »;

Dans le cadre de la formation en cours d’emploi, les Gendarmes suivent un cycle de cours de 2 à20heures au sujet du Centre d’enquête et d’évaluation sur les droits de l’homme de la Gendarmerie, des mesures à prendre en matière de droits de l’homme, ainsi que dans le cadre de la lutte contre la violence à l’égard des femmes et des enfants, des critères de performance des agents de la force publique en matière de droits de l’homme, et au sujet des droits de l’homme en général.

236.Par ailleurs, afin de prévenir les mauvais traitements dans les prisons dépendant du Ministère de la justice, les droits de l’homme sont également enseignés dans le cadre de conférences, de séminaires, de formations préprofessionnelles et en cours d’emploi de tous les fonctionnaires (ou futurs fonctionnaires), quels que soient leur titre ou leur grade. En outre, depuis 2012, les nouveaux gardiens de prison suivent des stages de 5 mois de formation théorique dans les centres d’éducation et les établissements pénitentiaires. Il s’agit d’une formation aux droits de l’homme, à la législation sur l’exécution des peines et d’une formation psychologique; ainsi, les nouveaux gardiens de prison peuvent commencer à exercer leur métier avec toutes les compétences de base.

Question  21 : Veuillez décrire ce qui a été fait depuis le dernier examen pour former à l’utilisation du « Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants » (Protocole d’Istanbul) tous les professionnels s’occupant de détenus et amenés à établir s’il y a eu torture, à enquêter sur les cas de torture et à indiquer les résultats obtenus. Veuillez préciser également si le Protocole d’Istanbul est utilisé dans le cadre des procédures de détermination du statut de réfugié.

237.Le Ministère de la santé a formé des groupes de professionnels au contenu du Protocole d’Istanbul (au total, 4730personnes chargées d’enquêter et d’informer au sujet des cas de torture).

238.Conformément aux articles 4, 5, 6 et 30 de la Réglementation sur les réfugiés et l’asile, nous confions à des personnes informées des droits de l’homme, de la protection internationale et de la législation sur les réfugiés l’examen et la mise en œuvre des demandes d’asile, les entretiens avec les demandeurs, la conduite des opérations et la prise de décisions dans ce domaine.

239.Par conséquent, il s’agit d’un personnel qui a suivi des séminaires pédagogiques, des cours et une formation organisés en collaboration avec des États membres de l’Union européenne, des organisations et institutions internationales.

240.En outre, on peut avoir recours à des psychologues et à des experts des services sociaux pour les entretiens avec les demandeurs d’asile constituant une catégorie « sensible », tels que les mineurs non accompagnés et les femmes célibataires.

241.Pour évaluer le contenu de l’entretien qu’elle a eu avec un demandeur d’asile ou un réfugié, la personne qui a mené l’entretien prend en compte le rapport de l’expert ayant participé à l’entretien. Les ressortissants étrangers concernés sont hébergés dans des foyers dépendant du Ministère de la famille et des politiques sociales.

Article 11

Question  22 : Comme le Comité l’avait demandé dans ses précédentes observations finales ( par.  16), veuillez fournir des informations sur les règlements officiels autorisant expressément les représentants de la société civile, les avocats, le personnel médical et les membres de l’ordre des avocats au niveau local à effectuer des visites indépendantes dans les lieux où des personnes sont privées de liberté – notamment les prisons, les commissariats de police et les établissements et hôpitaux psychiatriques –, en précisant le nombre de visites qui ont eu lieu. Veuillez indiquer également le nombre de visites, programmées et inopinées, qui ont été menées, au cours de la période considérée, par des organisations officielles ayant pour mandat d’inspecter les lieux de détention, et veuillez exposer également toutes les conclusions et recommandations formulées quant au traitement des détenus ou aux conditions de détention pouvant être assimilés à de la torture ou de mauvais traitements, ainsi que les mesures prises pour donner suite à ces situations.

242.Les prisons sont soumises à un contrôle de la part d’organisations ou institutions nationales et internationales. Il est dit explicitement, dans les textes de loi qui régissent les institutions exerçant un contrôle et dans les réglementations relatives à l’exécution des peines, que les institutions en question peuvent effectuer des visites dans les prisons sans autorisation préalable.Dans ce contexte, on peut citer notamment l’article 7 de la Loi No. 4681 sur les Conseils de contrôle des prisons et des centres de détention, qui dit: « Le Conseil de contrôle peut effectuer une visite dans telle ou telle prison ou tel ou tel centre de détention dans tous les cas jugés nécessaires, et au moins tous les deux mois » (à cet égard, les organismes de suivi et de contrôle n’ont pas besoin d’autorisation préalable).

243.La supervision des prisons est effectuée, au niveau national, par des fonctionnaires de la Direction générale des prisons et des centres de détention du Ministère de la justice, ainsi que par des procureurs généraux, des procureurs spécifiquement chargés de contrôler les prisons, par des inspecteurs du Ministère de la justice et par des « Contrôleurs des prisons »; ces visites se font de manière périodique et sans notification préalable; les demandes et plaintes éventuelles sont examinées lors de ces visites, sur place.

244.Les Conseils de contrôle des prisons et des centres de détention, créés dans le cadre de la Loi No. 4681, sont composés de membres de la société civile.Du 1er janvierau 31 décembre 2012, 369prisons ont reçu la visite de 136organes de contrôle – 1366fois au total -, et 507rapports ont été rédigés à la suite de ces visites, avec 1345propositions (dont 964 ont été mises en œuvre). Le taux de réalisation de ce type de proposition est de 71,67 %.

245.Les prisons et centres de détention militaires sont inspectés par des responsables de la justice militaire – qui ont le statut de magistrats militaires, de procureurs militaires, de conseillers juridiques et de commandants; ils sont liés aux prisons et centres de détention militaires, et les conclusions formulées à la suite des inspections sont communiquées aux autorités concernées.

246.Les prisons sont également contrôlées par la Commission d’enquête sur les droits de l’homme de la Grande Assemblée nationale de Turquie, et par l’Institution chargée de la protection des droits de l’homme dans le pays.

247.La Commission d’enquête sur les droits de l’homme mène ses enquêtes par l’intermédiaire de ses sous-commissions. La Sous-Commission des institutions pénales et des centres de détention est une sous-commission permanente qui effectue des enquêtes et communique ensuite ses conclusions et ses propositions, après avoir visité, dans l’ensemble du pays, les prisons civiles et militaires, les centres de détention et les « maisons de redressement » destinées aux jeunes.Ces visites peuvent se faire à la demande des prisons, ou en fonction de cas bien précis dont le public a eu connaissance.

248.Dans ce contexte, la Commission d’enquête sur les droits de l’homme a visité 36prisons au cours de la 23e session parlementaire (du 23 juillet 2007 au 12 juin 2011), et 34prisons depuis le début de la 24e session, le 28 juin 2011 (session toujours en cours). La Commission a signalé un certain nombre de « mauvais traitements » dans les prisons qu’elle a visitées; mais ces cas restent très rares. Parmi les autres conclusions de la Commission, il faut citer la surpopulation; une interprétation très stricte des lois et réglementations; une discipline outrancière; une prudence inutile en ce qui concerne la distribution de périodiques et autres publications aux criminels et aux détenus; l’interdiction du droit de pétition; des demandes de transfert des détenus dans des prisons proches du domicile de leur famille; des erreurs de traitement médical et des problèmes d’hospitalisation; des difficultés à obtenir des produits ou des biens extérieurs; un accès limité à l’eau chaude; de longs délais pour les visites aux détenus; une pratique arbitraire de fouille au corps sur des détenus entièrement nus, etc. Les rapports contenant les conclusions et les propositions de la Commission sont adressés aux instances pertinentes – notamment le Ministère de la justice. Grâce à l’ensemble de ces inspections, on a pu contribuer à l’amélioration des conditions matérielles dans de nombreuses prisons.

249.En ce qui concerne les prisons et les centres de détention militaires, la Commission d’enquête sur les droits de l’homme et la sous-commission de la Grande Assemblée nationale de Turquie ont effectué des enquêtes dans les lieux suivants:

La Prison et la Maison de détention militaires du Commandement des Forces terrestres, à Ankara (le 24 février 2010);

La Prison et la Maison de détention militaires du Premier Commandement des forces aériennes, à Eskişehir (le 26 février 2010);

La Prison et la Maison de détention militaires du Commandement du troisième corps, à Istanbul (le 17 mars 2010);

La Prison et la Maison de détention militaires du Commandement des forces de la mer Égée, à Izmir (le 6 janvier 2011);

La Prison et la Maison de détention militaires du Commandement de la cinquième brigade blindée, à Gaziantep (le 13 janvier 2012).

Les rapports ont porté sur les éléments suivants:

Les conditions matérielles, sanitaires et médicales des prisons et centres de détention militaires; le fait que le nombre de criminels et de détenus y soit inférieur à la capacité des établissements en question; les équipements en matière d’alimentation et d’eau chaude; les normes en matière de communication et l’absence d’allégations sur d’éventuels actes de torture et mauvais traitements ont été appréciées;

La nécessité de modifier la loi au sujet des uniformes des simples soldats et des sous-officiers condamnés et détenus- élément qui a fait l’objet de critiques, de même que la peine d’isolement imposée par les autorités disciplinaires;

La Commission et la sous-commission n’ont trouvé aucun élément indiquant des actes de torture ou de mauvais traitements.

250.Les Conseils des droits de l'homme des provinces et districts peuvent également visiter les prisons des secteurs qu'ils gèrent, afin d'examiner les allégations de violation des droits de l'homme.

251.En outre, on trouvera à l’annexe 6 des informations sur les visites effectuées dans les prisons (en 2011, 2012 et 2013) par des personnes indépendantes, telles que des représentants d’ONG, des avocats, des membres du barreau et du personnel médical.

Question  23 : Compte tenu des précédentes observations finales du Comité (par.17), veuillez décrire les mesures prises pour :

a) Mettre un terme au recours excessif à la détention avant jugement et à la surpopulation des lieux de détention dont il est fait état, notamment en encourageant les autorités judiciaires à envisager des sanctions pénales autres que la privation de liberté. À cet égard, veuillez fournir des données sur le rapport entre la capacité d’accueil des lieux de détention de l’ État partie et le nombre réel de détenus s’y trouvant. Veuillez préciser également le nombre de détenus en détention provisoire ;

b) Remédier à la pénurie de personnel médical dans les établissements pénitentiaires et garantir l’accès des détenus malades aux soins de santé nécessaires, y compris lorsque la condamnation est différée. Veuillez exposer aussi les mesures adoptées pour préserver la santé des détenus qui font la grève de la faim ;

c) Limiter exclusivement à des situations exceptionnelles et bien définies les restrictions aux avantages concernant les activités de groupe des prisonniers en régime d’isolement ;

d) Veiller à ce que les enfants détenus, y compris les filles, soient séparés des adultes.

252.Le 11 avril 2012 est entrée en vigueur la Loi No. 6291 « portant amendement à la Loi sur l’exécution des peines et les mesures de sécurité et à la Loi sur le sursis probatoire, les centres d’aide et le Conseil pour la protection » - et ce, dans le but de résoudre le problème de la surpopulation carcérale et de rendre opérationnelles les mesures alternatives d’exécution des peines. En vertu de cette loi:

a)Les détenus ayant fait preuve d’une bonne conduiteet purgeant continûment les six derniers mois de leur peine dans des prisons ouvertes, ou encore achevant un cinquième de leur peine dans une maison de redressement destinée aux jeunes, peuvent bénéficier d’une libération conditionnelle dans un délai d’un an au plus;

b)Le solde des peines de détenus faisant preuve de bonne conduite, mais ayant été dans l’impossibilité de quitter une prison ouverte pour des raisons indépendantes de leur volonté – alors qu’ils réunissent les conditions de leur libération -, ou ayant été, précisément pour cette raison, transférés de nouveau dans un établissement pénal fermé et devant bénéficier d’une libération conditionnelle dans un délai d’un an au plus, ce solde, donc, peut être effectué sous forme de sursis probatoire.

253.On a fait en sorte que les délinquants mineurs, les femmes détenues ayant des enfants en bas âge (0 à 6ans) et les criminels n’ayant pas les moyens de subvenir à leurs besoins en raison d’une grave maladie, d’une incapacité ou de leur âge avancé puissent bénéficier d’un sursis probatoire au sens large. Dans ce contexte, à la date du 31 mars 2014, on a compté 164 472détenus/criminels qui ont été libérés en bénéficiant ainsi de mesures de probation.

254.En outre, en vertu de la Loi No. 6352 « portant amendement à certaines lois en vue d’améliorer l’efficacité des services judiciaires et de suspendre les peines et les procès liés à des infractions commises par voie de presse » (loi datée du 5 juillet 2012), la limite supérieure des mesures de contrôle judiciaire, définie à l’article 109 du Code de procédure pénale, a été supprimée. Avant cet amendement, les mesures de contrôle judiciaire ne pouvaient s’appliquer qu’aux infractions punies d’une peine de trois ans d’emprisonnement au plus. Depuis l’adoption de la Loi No. 6352, la justice peut décider de placer le suspect ou l’accusé sous contrôle judiciaire – plutôt qu’en détention -, quelle que soit la durée de la peine d’emprisonnement. En outre, on a ajouté aux mesures de contrôle judiciaire existantes des mesures d’« assignation à domicile », d’« assignation à une certaine zone résidentielle » et « d’interdiction de se rendre dans certains lieux ou secteurs ».

255.Grâce à ces amendements à la législation existante, nous avons non seulement développé le champ et amélioré l’efficacité des mesures autres que l’incarcération, mais permis également la sortie de prison d’un grand nombre de détenus et de ne pas incarcérer du tout de nombreux autres contrevenants, grâce aux mesures de contrôle judiciaire mises en place.

256.Dans le contexte du travail actuel visant à réduire le taux d’incarcération, la Turquie étudie aujourd’hui la législation et les meilleures pratiques internationales.

257.En outre, d’ici à 2017, on prévoit l’ouverture de 194nouvelles prisons et la fermeture de 163prisons de district qui ne sont plus conformes au système actuel d’exécution des peines; et, d’ici à la fin de l’année 2017, la capacité d’accueil des établissements pénitentiaires augmentera: les prisons pourront alors accueillir 254 161personnes, et le problème de la surpopulation sera en principe résolu.

À l’heure actuelle, la Turquie compte 366prisons, pouvant accueillir au total 157 063personnes. À la date du 11 avril 2014, il y avait, dans ces établissements, 152 208détenus.

258.Le tableau ci-dessous présente les différents centres de détention et prisons militaires du pays, avec leur capacité d’accueil, ainsi que le nombre de détenus qui s’y trouvaient – à la date du mois de décembre 2013:

Tableau présentant les différents centres de détention et prisons militaires turcs, avec leur capacité d’accueil

No.

Prison et centre de détention militaire

Lieu

Capacıté

Nombre de détenus (déjà condamnés ou non) (décembre  20 13)

1

Prison et centre de détention militaire du Commandement des forces terrestres

Ankara

315

114

2

Prison et centre de détention militaire du Commandement de la Première Armée

Selimiye/İstanbul

50

54

3

Prison et centre de détention militaire du Commandement de la Deuxième Armée

Malatya

83

20

4

Prison et centre de détention militaire du Commandement de la Troisième Armée

Erzincan

54

5

5

Prison et centre de détention militaire du Commandement des Forces de la mer Égée

Şirinyer/Izmir

85

70

6

Prison et centre de détention militaire du Commandement du deuxième Corps d’armée

Çanakkale

132

9

7

Prison et centre de détention militaire du Commandement du troisième Corps d’armée

Hasdal/İstanbul

186

74

8

Prison et centre de détention militaire du Commandement du cinquième Corps d’armée

Çorlu/Tekirdağ

96

19

9

Prison et centre de détention militaire du Commandement de la sixième Division d’infanterie mécanisée

Adana

100

20

10

Prison et centre de détention militaire du Commandement du septième Corps d’armée

Diyarbakır

120

44

11

Prison et centre de détention militaire du Commandement du huitième Corps d’armée

Elazığ

100

8

12

Prison et centre de détention militaire du Commandement du neuvième Corps d’armée

Erzurum

106

13

13

Prison et centre de détention militaire de sécurité publique du Commandement du Corps de Gendarmerie

Van

50

7

14

Prison et centre de détention militaire du Commandement du 23 e Corps de Gendarmerie des frontières

Şırnak

50

0

15

Prison et centre de détention militaire du Commandement de l’ École de commandement et du Centre de formation en montagne

Isparta

50

21

16

Prison et centre de détention militaire du Commandement de la 5 e Brigade blindée

Gaziantep

59

33

17

Prison et centre de détention militaire du Commandement de la 5 e Brigade de formation à l’infanterie

Sivas

61

10

18

Prison et centre de détention militaire du Commandement de la Flotte

Gölcük

52

28

19

Prison et centre de détention militaire du Commandement du Secteur maritime Nord

Kasımpaşa/ İstanbul

54

0

20

Commandement des premières Forces aériennes

Eskişehir

62

25

Total

1 865

574

259.Conformément au « Protocole relatif aux prestations de santé dans les institutions pénales », signé le 30 avril 2009 par les Ministères de la santé et de la justice, des unités de santé liées aux Campus des institutions pénales d’Ankara-Sincan, d’Istanbul-Silivri ve Istanbul-Maltepe fournissent des services, en tant que « polycliniques de district des institutions pénales » attachées aux hôpitaux – services jugés adéquats par le Ministère de la santé. De plus, des médecins sont désignés par les Directions provinciales de la santé pour exercer leur métier dans d’autres prisons du pays – et ce, certains jours de la semaine pendant des périodes définies.

260.Il faut noter encore que, dans le cadre de la médecine familiale et de la désignation de certains médecins, des actes médicaux ont lieu conformément à l’article 5 du Protocole précité, qui stipule: « La médecine familiale fournit des services médicaux à tout établissement pénitentiaire abritant au minimum 1000détenus/criminels jugés.Par ailleurs, trois médecins de famille au plus sont désignés pour aller exercer dans les établissements comptant moins de 1000détenus ou criminels déjà jugés. Le médecin de famille en question fournit des services de santé mobiles. Dans les provinces où la médecine familiale n’existe pas, des soins de santé sont offerts par des médecins, pendant cinq jours pleins par semaine,aux établissements pénitentiaires comptant plus de 1000détenus/criminels condamnés, pendant cinq demi-journées par semaine aux établissements abritant entre 500 et 1000détenus/condamnés, et pendant deux demi-journées par semaine aux établissements comptant moins de 500détenus/criminels ».

261.Le transfert de détenus dans un hôpital est décidéen toute liberté par le médecin – en fonction des besoins médicaux, toutefois. En cas d’urgence et d’absence de médecins, c’est l’autorité administrative de l'établissement pénitentiaire qui procède éventuellement à l’hospitalisation d’un détenu. En dépit de la surcharge de travail des hôpitaux, les détenus et les délinquants déjà condamnés ont la priorité pour des raisons de sécurité – mais, de toute évidence, dans la limite des capacités.

262.En cas d’urgence, le Service d’urgence 112 est rapidement notifié, et l’intervention médicale nécessaire est assurée par les urgentistes attachés à l'établissement pénitentiaire en question; mais, si le personnel médical le juge nécessaire, le détenu/condamné affecté peut être également transporté en ambulance jusqu’à l’hôpital public ou universitaire concerné.

263.On peut dire, par conséquent, que les détenus bénéficient de services médicaux sans aucune discrimination, au même titre que les autres citoyens du pays.

264.Concernant la protection de la santé de détenus et criminels effectuant une grève de la faim, la procédure suivie est conforme à l’article 82 de la Loi relative à l’exécution des sentences et aux mesures de sécurité – article intitulé « Refus, par un détenu, de l’alimentation qui lui est apportée », et disant très précisément ceci:

« 1)Les détenus refusant catégoriquement, pour quelque raison que ce soit, la nourriture et les boissons qui leur sont offertes doivent être informés par le médecin de l'établissement pénitentiaire des conséquences préjudiciables de leur décision et des dommages physiques et mentaux que cela peut entraîner. Le service psychosocial de l’établissement doit également s’efforcer de convaincre ces détenus de renoncer à leur grève de la faim, et, si ces efforts ne donnent aucun résultat, il sera procédé à l’alimentation des personnes en question dans un environnement adéquat, conformément au régime alimentaire défini par le médecin de l’établissement.

2)Concernant les détenus qui refusent toute alimentation et observent une grève de la faim – ou ce que l’on appelle parfois un ' jeûne jusqu’à la mort' -, et dont le médecin de l’établissement considère qu’ils sont dans une phase de 'danger terminal', ou encore si les personnes en question ont perdu conscience en dépit des efforts effectués et des mesures prises (tels que décrits au paragraphe 1)), on doit procéder à des examens médicaux, à un traitement médical, une nutrition et autres mesures d’examen et de diagnostic; ou, s’il est impossible de prendre de telles mesures au sein même de l’établissement pénitentiaire, on devra immédiatement hospitaliser les personnes concernées, y compris contre leur gré – à condition que ces mesures et interventions ne mettent pas en danger leur santé et leur vie. »

265.En outre, en 2012 et 2013, 374nouveaux agents de santé ont été recrutés par le Ministère de la justice afin d’assister le personnel médical en place. Cela a constitué un progrès significatif en termes de dotation des établissements pénitentiaires en agents de santé permanents.

266.La notion d’« isolement cellulaire » ou de « mise au secret » n’existe pas dans la législation turque.C’est l’article 44 de la Loi No. 5275 sur l’exécution des peines et les mesures de sécurité qui régit dans le détail la sanction disciplinaire que constitue l’isolement d’un détenu, ainsi que les motifs d’une telle mesure. Conformément à cet article, cette « sanction disciplinaire » ne peut être imposée pendant plus de20jours. Le détenu ou condamné placé « en isolement » est autorisé à communiquer avec les responsables de l’établissement et des représentants juridiques; en revanche, il lui est interdit de participer à une activité de groupe tant qu’il n’a pas purgé sa peine disciplinaire d’isolement.

267.Le régime qui s’applique aux détenus/condamnés purgeant une peine de réclusion à perpétuité avec circonstances aggravantes est définià l’article 25 de la Loi No. 5275. Cet article prévoit que le détenu sera seul en cellule, qu’il pourra, une heure par jour, marcher et faire de l’exercice à l’extérieur de sa cellule, que cette période d’exercice en plein air pourra être prolongée en fonction des risques et de considérations sécuritaires, ainsi que des efforts du détenu et de sa bonne conduite en ce qui concerne les activités de réhabilitation et de traitement, et que le ou la détenu(e) pourra, avec des limites prédéfinies, entrer en contact avec d’autres détenus ou condamnés incarcérés dans la même unité; cet article prévoit également que le ou la détenu(e) pourra avoir une activité artistique ou professionnelle liée à l’environnement local et jugée adéquate par le conseil d’administration de l’établissement.

268.En outre, à l’alinéaa) de l’article 2 de la Circulaire No. 46/1, intitulé « Activités de formation et d’éducation dans les établissements pénitentiaires de haute sécurité – Principes relatifs aux activités socioculturelles et sportives » (l’ensemble de la Circulaire étant intitulé « Formation et amélioration des condamnés et détenus jeunes et adultes et autres dispositions »), il est dit que « les personnes purgeant une peine d’emprisonnement à perpétuité avec circonstances aggravantes doivent bénéficier en priorité d’une formation/d’une éducation individualisée, et de programmes socioculturels et sportifs. Dans le cadre des programmes ainsi appliqués, en fonction de leurs efforts et de leur éventuelle bonne conduite, et sur décision du conseil d’administration et de surveillance, ces détenus pourront participer à cette formation/éducation et à ces programmes socioculturels et sportifs en compagnie d’autres groupes de détenus incarcérés dans la même unité ».

269.En vertu de la législation nationale et internationale pertinente (articles 11, 15 et111 de la Loi No. 5275, article 37 de la Convention relative aux droits de l’enfant, articles 17 et 29 des Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté (dites « Règles de La Havane »), ainsi que les articles 13 et 26 de l’Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (ou « Règles de Beijing »), il y a obligation de séparer les mineurs des adultes et les détenus des personnes déjà condamnées. En Turquie, les jeunes détenus sont placés séparément, dans des établissements pénitentiaires fermés. Dans les provinces – où le nombre de détenus mineurs est restreint, et où il n’y a pas d’établissements fermés – les jeunes détenus sont placés séparément des adultes, dans des sections spéciales des établissements pénitentiaires réservées aux jeunes. En l’absence de sections spéciales pour les jeunes filles, celles-ci sont placées dans des sections qui leur sont réservées au sein des établissements pénitentiaires fermés pour femmes. Les mineurs condamnés sont placés dans des « maisons de redressement ». D’autre part, de même que les jeunes détenus sont séparés des adultes, les simples détenus en attente de jugement sont séparés des personnes déjà condamnées.

270.La Turquie compte trois établissements pénitentiaires fermés pour mineurs en attente de jugement (établissements situés à Ankara, Istanbul et Izmir) et deux « maisons de redressement » pour mineurs dont la condamnation est définitive (et ce, à Ankara et dans le Centre de formation ouvert pour femmes et enfants de Denizli Bozkurt).

271.Dans le but d’augmenter le nombre d’établissements pénitentiaires pour mineurs, un nouveau Centre de redressement pour mineurs a été construit à Ümraniye, à Istanbul – sa construction s’étant achevée le 16 janvier 2014. Les travaux concernant l’équipement et le mobilier du centre sont en cours, de même que le recrutement de personnel. Parmi les autres prisons pour mineurs non encore inaugurées, citons la Maison de redressement pour mineurs d’Izmir, qui sera en service en 2014, en principe, la Maison de redressement pour mineurs d’Elazığ, qui entrera en service en 2017, la Maison de redressement pour mineurs d’Erzurum, dont l’ouverture est prévue en novembre 2014, l'établissement pénitentiaire fermé pour mineurs de Diyarbakır, qui devrait ouvrir également en 2014, et les établissements pénitentiaires fermés pour mineurs de Hatay, Kayseri, Mersin/Tarsus, Tekirdağ/Çorlu, dont l’ouverture est prévue en 2016, et, enfin, l'établissement pénitentiaire fermé de Konya, prévu pour 2017.

Question  24 : Eu égard aux précédentes observations finales du Comité ( par.  17), veuillez exposer tout examen juridique des articles  15 à 28 de la Loi No.  4982 sur le droit d’accès à l’information, qui pourraient restreindre l’accès aux informations relatives aux établissements de détention, que l’ État partie aurait entrepris pour déterminer la compatibilité de ces articles  avec les dispositions de la Convention.

272.La Loi relative au droit d’accès à l’information ne contient aucune restriction pouvant être incompatible avec les dispositions de la Convention.

Articles 12 et 13

Question  25 : Compte tenu des précédentes observations finales du Comité ( par.  7 et 12), veuillez fournir des données statistiques détaillées sur les plaintes pour torture et mauvais traitements déposées pendant la période couverte par le rapport, et ventilées par organe récepteur de la plainte, origine ethnique, âge et sexe de la victime présumée. Veuillez indiquer le nombre de plaintes ayant donné lieu à des enquêtes, à des poursuites pénales et à des condamnations, et préciser l’autorité qui a supervisé ces enquêtes, ainsi que les sanctions pénales ou disciplinaires prononcées.

273.Les autorités turques n’archivent pas de données statistiques sur l’origine ethnique, l’âge ou le sexe des personnes affirmant avoir fait l’objet de mauvais traitements.

274.Les tableaux ci-après indiquent le nombre d’employés de la Direction générale de la sécuritévisés par des procédures administratives et judiciaires en vertu des articles 256, 94 et 95 du Code pénal turc.

Nombre de fonctionnaires ayant fait l’objet de procédures disciplinaires en vertu de l’ article  256 du Code pénal turc ( article  245 de l’ancien Code pénal) pour abus de recours à la force

D é cision

2011

2012

2013

Total

Aucune peine justifiée

817

315

27

1 159

Affaire classée

122

42

6

170

Suspension de promotion à court terme (4, 6 ou 10  mois )

6

19

1

26

Enquête en cours

7

50

265

322

Suspension de promotion à long terme (12, 16,  20 ou 24  mois )

5

11

0

16

Total à la date du 11/09/2013

957

437

299

1 693

Nombre de fonctionnaires ayant fait l’objet de procédures judiciaires en vertu de l’ article  256 du Code pénal turc ( article  245 de l’ancien Code pénal) pour abus de recours à la force

2011

2012

2013

Total

Acquittement

28

3

1

32

Non-lieu

6

0

0

6

Prononciation du jugement suspendue

9

3

0

12

Décision de non-poursuites

23

8

0

31

Procès en attente

57

65

7

129

Total à la date du 11/09/2013

123

79

8

210

Nombre de fonctionnaires ayant fait l’objet de procédures judiciaires en vertu des articles  94 et 95 du Code pénal turc ( article  243 de l’ancien Code pénal) pour actes de torture

2011

2012

Total

Décision de non-poursuites

4

1

5

Procès en attente

12

23

35

Total à la date du 11.09.2013

16

24

40

Nombre de fonctionnaires ayant fait l’objet de procédures administratives en vertu des articles  94 et 95 du Code pénal turc ( article  243 de l’ancien Code pénal) pour actes de torture

2011

2012

2013

Total

Aucune peine justifiée

16

9

0

25

Affaire classée

73

30

2

105

Révocation du fonctionnaire concerné

0

3

0

3

Enquête en cours

0

3

0

3

Total à la date du 11.09.2013

89

45

2

136

275.On trouvera à l’annexe 2 un tableau concernant le nombre de fonctionnaires de la Direction générale des prisons et des centres de détention qui ont fait l’objet de procédures, notamment administratives, pour avoir été accusés d’actes de torture et de pratique de mauvais traitements.

Question  26 : Veuillez décrire les mesures prises pour faire en sorte que tous les agents de l’ État dont il y a lieu de soupçonner qu’ils ont commis des actes de torture et des mauvais traitements soient suspendus de leurs fonctions ou mutés pendant la durée de l’enquête, et veuillez exposer également les cas où cela s’est produit pendant la période considérée.

276.Du 1er janvier 2009 au 31 mars 2014, quatre agents de l’État ont été suspendus de leurs fonctions au sein du Commandement général de la Gendarmerie pour avoir commis des actes de torture.

Question  27 : À la lumière des précédentes observations finales du Comité ( par.  8), veuillez décrire les mesures prises par l’ État partie pour mettre en place des mécanismes impartiaux et indépendants permettant de faire en sorte que toutes les allégations de torture et de mauvais traitements fassent rapidement l’objet d’enquêtes efficaces et indépendantes. L’ État partie a déclaré, dans les informations communiquées au titre du suivi, qu’en vertu de la Circulaire No.  9 du Ministère de la justice , les enquêtes relatives aux allégations de torture et de mauvais traitements devaient être conduites par le Procureur et non pas par les responsables de l’application des lois ; cependant, compte tenu des préoccupations exprimées par le Comité dans ses précédentes observations finales ( par.  8), à savoir que ces enquêtes sont généralement confiées aux responsables de l’application des lois – en dépit de cette circulaire -, veuillez indiquer le nombre d’enquêtes sur des actes de torture ou des mauvais traitements imputés à des policiers qui ont été menées par le Procureur au cours de la période considérée, et exposer les résultats de ces enquêtes. Veuillez indiquer également le nombre de procureurs et d’officiers de police judiciaire que compte l’ État partie, en ventilant ces données par lieu. Enfin, indiquer également où en est la création d’un mécanisme indépendant de plainte contre la police.

277.De nouveaux mécanismes ont été mis en place au cours de la période étudiée (à savoir l’Institution chargée de la protection des droits de l’homme en Turquie et le Médiateur): ces mécanismes ont pour mandat d’examiner les plaintes et les allégations concernant des violations des droits de l’homme (y compris les plaintes pour actes de torture et autres mauvais traitements) et d’enquêter à ce sujet. Les réponses aux questions10 et 37 contiennent des informations précises sur ces nouveaux mécanismes.

278.D’autre part, la Commission d’enquête sur les droits de l’homme de la Grande Assemblée nationale de Turquie apporte également une aide importante en matière d’enquête sur les cas présumés de mauvais traitements de la part d’officiers de police et d’autres forces de sécurité.

279.Afin d’assurer un contrôle indépendant et civil des forces de sécurité, le « Projet de loi sur la création d’une Commission de suivi de l’application des lois et la modification de certaines lois » a été présenté au Parlement en 2012. Ce projet de loi vise à rétablir la confiance de l’opinion publique et des agents responsables de l’application des lois dans le système permettant de déposer une plainte contre l’appareil d’application des lois, et à mettre en conformité avec les normes de l’UE le cadre juridique actuel d’enregistrement et d’enquête concernant les plaintes visant des responsables de l’application des lois. Ainsi, un système de plaintes plus efficace pourra être mis en place,sans alourdir pour autant les pratiques bureaucratiques dans ce domaine. Le projet de loi en question prévoit la création de la Commission de contrôle de l’application des lois. Cette commission s’acquittera en toute indépendance des tâches prévues par la future loi, dans la limite de ses pouvoirs et de ses responsabilités.

Question  28 : L’ État partie ayant déclaré, dans les informations qu’il a communiquées au titre du suivi, que l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme figurait parmi ses priorités, veuillez indiquer s’il a mené des enquêtes indépendantes et impartiales sur les allégations de torture et de mauvais traitements et engagé des poursuites contre les auteurs de ces actes pour donner suite aux arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, notamment dans les affaires Uzer c . Turquie, Yazgul Yilmaz c . Turquie, Ebcin c. Turquie et Sacilik et autres c. Turquie.

280.En dépit de certains arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme ayant établi que les actes criminels jugés avaient constitué une violation de la Convention, la révision des procès en question n’avait pas été possible précédemment, au niveau national, en raison de la période de prescription prévue par la législation turque.

281.En vertu de l’amendement à l’article 311/2 du Code de procédure pénale turc, le délai limite pour la réouverture des procédures juridiques après décision finale de la Cour européenne des droits de l’homme (concernant tous les arrêts prononcés par la Cour et devant être exécutés par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe à partir du 15 juin 2012) a été annulé. Par conséquent, les demandeurs ont le droit de faire réviser le procès devant un tribunal national dans un délai de trois mois après la date d’entrée en vigueur de l’article en question.

Article 14

Question  29 : Compte tenu des précédentes observations finales du Comité ( par.  14), veuillez fournir des informations sur les réparations obtenues par les victimes d’actes de torture et de mauvais traitements ou leurs héritiers pendant la période considérée. Cela concerne notamment le nombre de demandes de réparation déposées et octroyées et la nature des réparations accordées (y compris le montant des indemnités, et, le cas échéant, le type de réadaptation), ainsi que les réparations véritablement octroyées aux plaignants.

282.Depuis 2010, 31actions ont été engagées contre le Ministère de l’intérieur pour actes de torture et mauvais traitements présumés; concernant les deux affaires déjà jugées, une indemnité de 16 906,12TL(Livres turques) a été versée.

283.D’autre part, une indemnité de près de 422 500TL a été versée aux plaignants à la suite de quatre demandes de compensation de préjudices pécuniaires ou non pécuniaires présentées au Commandement Général de la Gendarmerie entre le 1er janvier 2009 et le 31 mars 2014, pour réparation d’actes de torture et de mauvais traitements.

Question  30 : Compte tenu des précédentes observations finales du Comité ( par.  14) et notamment des recommandations invitant l’ État partie à envisager de mettre en place un programme particulier d’aide aux victimes d’actes de torture et de mauvais traitements, veuillez fournir des informations sur les différents programmes de réadaptation destinés aux victimes de la torture, de mauvais traitements, de la traite d’êtres humains et de violences familiales ou sexuelles, y compris sur le soutien médical et psychologique, et sur les modalités d’accès à ces programmes. Donner également des précisions sur la collaboration qui existe avec les organisations non gouvernementales spécialisées dans ce domaine, et indiquer si l’ État fournit un appui financier et/ou autre à la bonne exécution de ces programmes. Veuillez indiquer enfin le nombre de personnes ayant bénéficié de ces programmes au cours de la période considérée.

284.Dans le cadre de la lutte contre la traite des êtres humains, un soutien psychologique et des programmes de réadaptation sont proposés aux victimes reconnues comme telles.

285.Par le biais de circulaires adressées aux différents gouvernorats, les autorités ont reçu l’ordre d’identifier les victimes de la traite des êtres humains, et de leur fournir tous les soins médicaux possibles et un soutien psychologique en vue de leur réadaptation. Les victimes identifiées dans ce contexte ne doivent pas être immédiatement expulsées; on doit les autoriser à résider temporairement en Turquie (pendant un mois), si elles le souhaitent.

286.Par ailleurs, le « Manuel de lutte contre la traite des êtres humains », qui indique notamment la manière de procéder vis-à-vis de femmes victimes, a été distribué à toutes les unités compétentes de la Direction générale de la sécurité.

287.Voici quelques-unes des procédures à suivre vis-à-vis de femmes victimes de la traite:

On doit faire appel à un personnel féminin portant des vêtements civils;

En cas de confrontation, d’identification de suspects ou d’enquête sur les lieux où se sont déroulés les faits, des dispositions techniques indispensables doivent être prises pour éviter aux victimes de partager le même espace que les trafiquants et autres personnes concernées: il s’agit, par exemple, de prévoir une pièce dotée d’une glace sans tain, ou encore un dispositif vidéo et des véhicules hermétiquement fermés;

En cas d’identification de victimes mineures, des précautions particulières seront prises afin de protéger les intérêts des mineures tout au long de la procédure;

Toujours en cas d’identification de victimes mineures, les victimes doivent être d’abord placées sous la protection des Directions provinciales de la sécurité concernées avant d’être mises entre les mains des responsables des services sociaux et de l’Agence de protection de l’enfance, et un tuteur devra être désigné pour s’occuper des victimes en question.

288.Dans le cadre des pratiques et recommandations internationales concernant le traitement et la réadaptation des victimes, et, dans le cadre, également, des poursuites contre les accusés et de l’octroi de permis de séjour aux victimes, de nouvelles mesures sont prises:

Des permis de séjour temporaires (pouvant aller jusqu’à six mois) sont accordés aux ressortissants étrangers identifiés en tant que victimes de la traite des êtres humains, afin de sécuriser leurs témoignages, d’assurer la coopération avec la police, de traiter le traumatisme des victimes et d’apporter à celles-ci un soutien médical et psychologique (qui peut englober des possibilités d’emploi);

Le procès des accusés et le traitement des victimes sont suivis parallèlement, et, le cas échéant, les permis de séjour peuvent être prolongés en fonction des procédures judiciaires et de traitement des victimes.

289.Lorsque les victimes sont rapatriées, avec leur accord et en toute sécurité (qu’il s’agisse d’un rapatriement dans leurs pays d’origine ou d’un transfert vers une autre province, pendant la durée de l’enquête), les mesures suivantes sont prises:

Des précautions sont prises pour éviter l’identification et le dévoilement des victimes par des tiers;

Lors d’un éventuel rapatriement dans le pays d’origine, des procédures de sortie du territoire turc et d’identification doivent être suivies aux frontières, sans pour autant faire passer les personnes en question par des cabines de contrôle des passeports;

En cas de découverte de l’identité des victimes par des tierces personnes, il se peut que les victimes – sujettes à des pressions et à une coercition – refusent d’apporter leur témoignage et de fournir des informations, de peur que les trafiquants ne les retrouvent et ne leur portent préjudice; cela va rendre difficile des enquêtes en toute sécurité, ainsi que l’identification des criminels. Dès lors, des mesures sont prises pour prévenir le dévoilement des victimes au cours des procédures d’enquête et autres ayant lieu pendant leur séjour en Turquie.

290.En ce qui concerne les victimes d’une traite d’êtres humains ayant conservé un état psychologique satisfaisant et souhaitant retourner dans leur pays, la procédure de sortie du territoire turc n’entraîne pour elles aucun frais et aucune amende, de même qu’aucune interdiction d’entrée temporaire ne leur est imposée.

291.En ce qui concerne la coopération avec les ONG, la Direction générale de la sécuritéa signé des « Protocoles de coopération bilatérale » avec des ONG turques luttant contre la violence à l’égard des femmes, contre la transmission de maladies contagieuses et contre la traite des êtres humains. Ce type de protocole a été signé notamment avec la Fondation pour le développement des ressources humaines (IKGV – en 2003) et avec la Fondation pour la solidarité avec les femmes (KDV – en 2005).

292.Un centre d’hébergement des victimes de traites d’êtres humains a été ouvert le 23 août 2004, avec le concours de l’IKGV et de la Municipalité métropolitaine d’Istanbul, mais aussi de Ministères pertinents, de diverses institutions et de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Actuellement, ce centre est géré par l’IKGV. Des mesures de coordination et d’application ont été mises en œuvre afin de préserver le caractère confidentiel du centre, et de faire en sorte que le transfert des victimes se fasse de manière coordonnée, sûre et rapide – pour éviter l’identification, par des tiers, des victimes ainsi hébergées.

293.De même, suite à la signature du Protocole de coopération en 2005, un centre d’hébergement des victimes de traites d’êtres humains a été ouvert à Ankara, avec le concours de la Fondation pour la solidarité avec les femmes et de la Municipalité métropolitaine d’Ankara. Ce centre est en service depuis le 1er novembre 2005.

294.En collaboration avec l’Association des conseillers familiaux d’Antalya – laquelle participe à l’identification des victimes et à des activités de prévention -, une maison d’hébergement pilote a été ouverte à Antalya.

295.Depuis 2004, le centre d’hébergement ouvert grâce à la Fondation pour le développement des ressources humaines a offert un certain nombre de services à 502victimes de la traite des êtres humains; depuis 2005, le centre ouvert grâce à la Fondation pour la solidarité avec les femmes a porté secours à 229victimes de ce type de trafic, et, à ce jour, le centre ouvert par l’Association des conseillers familiaux d’Antalya a aidé 6 de ces victimes.

Question  31 : Veuillez préciser si le droit des victimes d’actes de torture et de mauvais traitements à obtenir des réparations est subordonné à la condamnation au pénal de l’auteur des actes en question. Si tel n’est pas le cas, veuillez indiquer le nombre de victimes qui ont eu droit à des réparations alors que l’auteur des actes de torture et des mauvais traitements n’avait pas été condamné par la justice, et communiquer d’autres informations pertinentes sur ces affaires. Veuillez indiquer également si une victime d’actes de torture et de mauvais traitements peut être indemnisée lorsque l’auteur de ces actes a fait l’objet de mesures disciplinaires et non pas de sanctions pénales.

296.En vertu de l’article 129/5 de la Constitution turque, les demandes de réparation relatives à des fautes commises par des fonctionnaires ou autres agents de l’État dans l’exercice de leurs fonctions ne peuvent viser l’administration concernée qu’en accord avec les procédures et conditions prévues par la loi et qu’avec la possibilité de recours des fonctionnaires et employés en question.

297.Les actions en réparation engagées par des victimes d’actes de torture et de mauvais traitements à l’encontre de l’administration concernée sont portées devant les tribunaux administratifs.

298.Les autorités administratives et autres instances judiciaires sont liées par les décisions d’acquittement et/ou les condamnations prononcées par les cours pénales sur la base de critères de fond; les décisions d’acquittement dues à l’absence de preuves et celles de non-poursuite prises par les services du Procureur général n’ont pas de caractère contraignant. Dans de tels cas, une juridiction administrative doit vérifier si l’administration est juridiquement responsable, en prenant en considération le dossier de l’affaire ainsi que les principes et procédures du droit administratif.

299.En vertu de l’article 13 du Code de procédure administrative No. 2577, les personnes dont les droits ont été violés dans le cadre d’une action administrative doivent s’adresser à l’administration pertinente aux fins de réparation dans un délai d’un an après la date de la notification officielle ou d’une autre voie d’information des faits, et, en tout état de cause, dans un délai de cinq ans au plus après les faits en question, pour pouvoir engager des poursuites judiciaires. Une action en justice peut être engagée dans les délais prévus à partir de la date de notification de la décision du tribunal si la demande de réparation a été jugée totalement ou partiellement irrecevable, et après une période soixante jours si la justice n’a pas répondu dans ce délai. Les tribunaux administratifs évaluent la demande du plaignant et examinent chaque cas individuellement pour déterminer si l’administration concernée a manqué à son devoir du fait de la négligence de ses agents ou d’un manquement à leurs fonctions.

300.À cet égard, on peut citer l’exemple du jugement en date du 28 septembre 2010 (No. 2007/5028) de la 10eChambre du Conseil d’État, qui a établi que les victimes d’actes de torture pouvaient avoir droit à une indemnisation si la Cour de cassation a infirmé la décision de culpabilité de l’auteur présumé de ces actes au motif que l’administration avait manqué à son devoir en raison d’une faute grave de la part de ses agents, et d’un manquement à leurs fonctions.

301.Autre cas similaire: par son arrêt en date du 6 février 2009 (No. 2006/1212), la 10eChambre du Conseil d’État a confirmé la décision d’un tribunal administratif turc stipulant que l’administration devait accorder des dommages pour avoir, d’une part, manqué à son devoir de protection de la vie des personnes et des biens des citoyens et, d’autre part, pour ne pas avoir rempli son service public en ne contrôlant pas l’action de ses agents comme elle aurait dû le faire.

Article 16

Question  32 : Compte tenu des précédentes observations finales du Comité ( par.  10), veuillez décrire les mesures prises pour procéder rapidement à des enquêtes approfondies et indépendantes sur tous les cas allégués d’exécution extrajudiciaire imputés à des agents de sécurité et de la force publique au cours de la période considérée et pour faire en sorte que les auteurs de ces actes soient traduits en justice et condamnés à des peines appropriées. Veuillez indiquer également, pour chacune des affaires ayant fait l’objet d’une enquête, quelle autorité était chargée de l’enquête, et si l’enquête a abouti à des poursuites, puis à une condamnation, et préciser les sanctions. Veuillez fournir notamment des informations sur :

Les circonstances dans lesquelles 34 civils ont été tués par un avion militaire près d’Uludere, en  décembre  20 01 ;

Des exécutions extrajudiciaires que des agents de sécurité auraient commises à Kiziltepe et Şemdinli, en  20 04 et  20 05.

302.Le Bureau du Procureur général d’Uludere a ouvert une enquête le 19 janvier 2012, et, ce dernier ayant déclaré que l’affaire ne relevait pas de sa compétence, le dossier a été transféré aux services du Procureur général de Diyarbakir.

303.Le 11 juin 2013, le Bureau du Procureur général de Diyarbakir a à son tour déclaré que cette affaire ne relevait pas de sa juridiction; dès lors, l’affaire a été portée devant le Bureau du Procureur de l'état-major militaire. Suite à son enquête, le Bureau du Procureur de l'état-major militaire a prononcé une décision de non-poursuite le 6 janvier 2014. Mais cette décision a été contestée par des représentants juridiques de certaines victimes. Leurs objections vont être examinées par le Tribunal militaire compétent.

304.Le 9 janvier 2012, la Commission d’enquête sur les droits de l’homme de la Grande Assemblée nationale de Turquie a créé une sous-commission et l’a chargée d’enquêter sur les incidents mortels provoqués par une opération aérienne effectuée à la frontière irakienne, dans le district d’Uludere, à Şirnak.

305.Les 5 et 6 février 2012, la sous-commission en question a effectué des recherches à Şirnak, au moyen d’hélicoptères, sur les lieux des incidents; les membres de la sous-commission ont interrogé des témoins des événements, ainsi que des parents de ceux qui ont trouvé la mort à cette occasion, le Gouverneur de Şirnak, le Gouverneur du District d’Uludere et d’autres autorités locales et militaires concernées. Des informations et des documents ont été fournis par l'état-major général, par le Ministère de l’intérieur, par le Département du Conseil de surveillance civil, par la Présidence des télécommunications, par le Bureau du Gouverneur de Şirnak, par le Ministère de la justice, par le Bureau du Procureur général de Diyarbakir, par l’Office des renseignements nationaux, par le Commandement de la Deuxième Armée, par le Commandement de la 23eDivision frontalière et par le Commandement de la 22eBrigade frontalière de la Gendarmerie; d’autre part, les images captées par des véhicules aériens non habités (ou « drones ») ont été examinées, et des rapports techniques ont été fournis par les experts.

306.Dans son rapport, la sous-commission d’enquête sur les droits de l’homme est parvenue à la conclusion que rien ne prouvait que les incidents en question aient été provoqués volontairement, mais qu’il fallait noter, cependant, une absence de communication entre les unités de renseignement, le centre des forces armées et ses unités locales. Étant donné cette absence de preuves, il n’a pas été possible d’identifier des individus éventuellement responsables de ces incidents, et il a été précisé que les personnes responsables devaient être identifiées par les autorités judiciaires. Chacun peut consulter le rapport de la sous-commission sur le site Internet de la Commission d’enquête sur les droits de l’homme de la Grande Assemblée nationale de Turquie.

307.En ce qui concerne l’incident de Şemdinli, le Bureau du Procureur général de cette ville a ouvert une enquête, le 9 novembre 2005, au sujet de l’attaque à la grenade de la Librairie d’Umut, à Şemdinli.Le 22 décembre 2005, un compte rendu des procédures a été adressé au Bureau du Procureur général de Van et un dossier pénal a été présenté à la 3eCour d’assises de Van, qui avait prononcé une peine d’emprisonnement pour les trois suspects – A.K., V.A. et Ö.I – pour appartenance à une organisation à vocation criminelle, et ce, conformément à l’article 220 du Code pénal turc. Les plaignants avaient fait appel de cette décision, et leurs représentants ont porté l’affaire devant le Procureur général de la Cour de cassation.

308.En ce qui concerne l’incident de Kizitelpe, à la suite de l’opération menée, le20 novembre 2004, dans le district de Mardin, à Kizitelpe, et visant les membres de l’organisation terroriste PKK/KONGRA-GEL, Ahmet et UğurKAYMAZ ont été retrouvés morts, et une action en justice a été engagée contre quatre responsables publics, accusés d’avoir « tué des personnes non identifiées en dépassant les limites de la légitime défense telle qu’elle est acceptée ». Suite au procès en question, les suspects ont été acquittés, le 18 avril 2007, par la Cour d’assises d’Eskişehir, qui a jugé qu’il n’y avait aucun motif d’inculpation.

Question  33 : Veuillez exposer les mesures prises par l’ État partie pour faire en sorte que tous les défenseurs des droits de l’homme, y compris les membres d’organisations œuvrant pour les droits de l’homme, les journalistes, les syndicalistes et les militants du « mouvement lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres » (LGBT), soient protégés contre les mesures de harcèlement et d’intimidation et les violences que les agents de l’ État en particulier pourraient leur infliger en raison de leurs activités. Veuillez également donner des précisions sur toute loi reconnaissant les défenseurs des droits de l’homme ou sur les dispositions prises pour modifier les lois qui auraient été utilisées pour harceler ces derniers – notamment la loi antiterroriste.

Commenter en particulier :

L'arrestation et l'incarcération de nombreux journalistes en Turquie et, en particulier, l'utilisation de la loi antiterroriste contre des journalistes. Veuillez indiquer le nombre de journalistes en détention provisoire, en instance de jugement ou purgeant une peine de prison, ainsi que les motifs pour lesquels ils sont privés de liberté. Veuillez également formuler des observations sur les cas d'Ahmet Sik et Nedim Sener, qui auraient été accusés d'infractions en relation avec leurs investigations sur des abus commis par des agents de l’État. Exposez également les mesures prises en réponse aux menaces de mort proférées contre les journalistes Baskin Oran et Eyen Mahcupyan ;

L'arrestation, en octobre  20 11, de Keymal Eydin, Selahatin Tekin, Cemal Bektas et Nahide Ormani, qui enquêtaient sur des disparitions et des exécutions extrajudiciaires sur lesquelles les Présidents-Rapporteurs du Groupe de travail sur la détention arbitraire et du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires et le Rapporteur spécial sur la situation des défenseurs des droits de l'homme avaient appelé l'attention de l' État partie ;

L'arrestation, en  juin  20 12, du syndicaliste et défenseur des droits de l'homme Osman Işçi et de plus de 50 autres syndicalistes pour « appartenance à une organisation illégale » et des infractions connexes ;

Les allégations d'actes de harcèlement contre les membres du personnel des organisations LGBT, notamment la condamnation pour résistance à arrestation, entre autres chefs d'accusation, de trois défenseurs des droits de l'homme transgenres du groupe Pembe Hayat, en octobre  20 11 – lesquels affirment avoir été détenus arbitrairement parce qu'ils étaient transgenres. Veuillez décrire les mesures prises, pendant la période considérée, pour enquêter sur les violences visant les personnes LGBT et poursuivre les auteurs de ces violences, ainsi que toute mesure visant à mettre fin à la reconnaissance, par les juges, de la « provocation injustifiée » en tant que circonstance atténuante dans les affaires de violences à l'égard de personnes LGBT ;

Les investigations qui auraient été menées après la condamnation, en  20 11, des meurtriers directs du journaliste Hrant Dink, en  20 07, pour établir si des agents de l’État étaient impliqués dans cet assassinat.

309.AhmetŞik et NedimŞener ont été placés en garde à vue le 3 mars 2011, dans le cadre de l'enquête No. 2011/1657.Le 5 mars 2011, ces deux hommes ont été placés en détention provisoire à la suite de leur témoignage dans le Bureau du Procureur général: une sanction a été alors exigée à leur encontre, en vertu de l'article 314/2 du Code pénal turc, de l'article 5 de la Loi antiterroriste, ainsi que des articles 53 et 58/9. Le 12 mars 2012, AhmetŞik et NedimŞener ont été libérés par décision de la 16eCour d'assises d'Istanbul.

310.BaskinOran a reçu des menaces de mort le 2 juin 2011 et le 11 mars 2012.EtyenMahcupyan a reçu des menaces de mort le 2 juin 2011. Dans les deux cas, les auteurs de ces menaces ont été identifiés, puis, suite à leurs témoignages (témoignage entendu, dans un cas, dans le Bureau du Procureur général, et, dans l'autre cas, par la Direction de la sécurité), ces deux hommes ont été libérés. Il n'y a pas eu de décision de protection de ces personnes.

311.Les personnes qualifiées de « journalistes emprisonnés »ont été accusées de crimes graves – notamment l'appartenance à une organisation terroriste illégale ou armée, ou le soutien à ce type d'organisation, et les poursuites judiciaires engagées contre elles ne sont nullement liées à leur travail de journaliste ou au service de médias.

312.Voici les faits concernant la liste des « 24 journalistes incarcérés » publiée, le 9 juin 2014, par la « Plate-forme de solidarité avec les journalistes incarcérés »:

Les procédures contre 17 de ces personnes ont été menées à terme, et une condamnation a été prononcée dans l'ensemble de ces cas;

2 personnes ont été placées en détention dans l'attente de leur procès;

5 personnes ont été libérées à des dates diverses.

313.Les infractions pour lesquelles ces personnes ont été accusées/condamnées sont les suivantes:

Possession et transport illégaux de matières dangereuses; jets de cocktails Molotov;faux; tentative de porter atteinte à l'ordre constitutionnel; action visant à accueillir des mineurs au sein d'une organisation terroriste;achat, port ou possession d'armes à feu autorisées et de munitions appropriées;

Appartenance à une organisation terroriste armée;

Élaboration et diffusion de propagande au sujet d'une organisation terroriste armée illégale;

Action visant à modifier l'ordre constitutionnel par la force;

Activités d'espionnage.

314.Les deux personnes placées en détention dans l'attente d'un procès ne possèdent pas de « carte de presse ».

315.Aucune de ces deux personnes n'a été poursuivie en liaison avec des activités journalistiques.

316.Dans le cadre d'une opération engagée, le 4 octobre 2011, par la Direction de la sécurité d'Istanbul, à l'encontre de l'organisation terroriste PKK/KCK,CemalBektaş a été placé en garde à vue le 11 octobre 2011, puis en détention – par les autorités judiciaires. Cette personne a été libérée le 7 juin 2013, par décision de la 15eCour d'assises. Toujours dans le cadre de cette opération, SalahattinTekin et KemalAydin ont été placés en garde à vue le 4 octobre 2011, puis en détention, le même jour – par les autorités judiciaires. SalahattinTekin a été libéré le 21 décembre 2012 par décision de la 15eCour d'assises.

317.Nos archives ne contiennent aucune information concernant NahideOrmani (ou Orman).On pense que cette personne pourrait s'appeler en réalité NahideEren (Ormanli). On trouve sa trace à l'état-civil du village de Derebaşi, dans le district de Silopi et la province de Şirnak.NahideEren (Ormani ou Ormanli) est née en 1963 et est la fille de Esat-Vesile. Nous revenons ci-dessous sur son cas et son identité.

318.Le 15 mai 2011, un groupe de200personnes protestant contre l'affrontement armé, le 12 mai 2011, entre les Forces armées turques et des membres d'une organisation terroriste, dans le district d'Uludere et la province de Şirnak, a attaqué les forces de sécurité et leurs véhicules. Après avertissement, ce groupe violent a été dispersé au moyen de canons à eau sous pression.Grâce à des photographies et des enregistrements caméra effectués par les forces de l'ordre, NahideEren a pu être identifiée au sein du groupe de contestataires ayant attaqué les forces de sécurité.

319.Cela s'est passé dans le cadre d'opérations menées contre l'organisation terroriste PKK/KONGRA-GEL et à la suite d'une opération planifiée menée dans le district de Silopi contre les participants à ces manifestations interdites et aux attaques contre les forces de sécurité par jets de pierres et de cocktails Molotov,

320.NahideEren a été interceptée à son domicile le 11 octobre 2011; un mandat d'arrêt avait été lancé contre elle par le Procureur général de Silopi en date du 10 octobre 2011; NahideEren a été ensuite placée en garde à vue. SelahattinOrmanli – parent de NahideEren – a été informé de ces événements, et NahideEren a été autorisée à rencontrer son représentant lors de sa garde à vue.

321.NahideEren a été ensuite officiellement arrêtée – le 12 octobre 2011 -, par décision du Tribunal d'instance de Silopi; au titre de cette arrestation, NahideEren a été présentée devant ce tribunal, conformément aux articles 314/2 et 265/1 du Code pénal turc, et, le même jour, elle a été incarcérée à l'établissement pénitentiaire fermé (TypeE) de Mandin.

322.Le 25 juin 2012, OsmanIşçi a été mis en garde à vue dans le cadre d'une opération menée par la Direction de la sécurité d'Ankara contre 53personnes au motif de participation à la « Structuration d'un espace social de l'organisation terroriste PKK/KCK ».OsmanIşçi et 28autres personnes ont été arrêtés; puis, sur ces 29personnes, 25 ont été libérées par les autorités judiciaires.OsmanIşçi a été libéré le 10 avril 2013 par décision de la 13eCour d'assises d'Ankara.

323.Dans le cadre général du principe de non-discrimination, inscrit dans la législation turque, les droits des « LGBT » (lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres) sont protégés et garantis par la loi. Les auteurs de toute infraction – et notamment celle d'incitation à la haine – sont, comme dans tout État démocratique régi par l'état de droit, traduits en justice. Comme tout autre citoyen, les personnes dites « LGBT » ont le droit de porter plainte contre des officiers ou agents de police, qu'elles peuvent accuser de harcèlement en raison de leur orientation ou de leur identité sexuelle.Concernant l'allégation dont ont fait l'objet trois membres du mouvement « PembeHayat » (ce qui signifie « la vie en rose »), ces personnes n'ont subi aucune discrimination eu égard au motif de l'accusation portée contre elles au pénal. Le 19 juin 2010, les trois personnes en question ont été dénoncées à la police – dénonciation consistant à dire que ces personnes avaient été vues accueillir dans leur voiture d'autres individus aux fins de prostitution.La police s'est alors rendue sur les lieux de l'incident présumé, afin d'engager une procédure aux termes de la Loi sur la répression des infractions.Les trois personnes concernées ont refusé d'être conduites au commissariat de police, y ont opposé une résistance physique et ont insulté la police; un agent de police a été blessé, et un appareil sans fil de la police a été brisé. Les poursuites judiciaires engagées contre les trois personnes en question ne concernaient nullement leur orientation ou leur identité sexuelle; elles ont été motivées par la résistance opposée à l'agent de police dans l'exercice de son métier, et par les dommages causés à des biens publics.

324.En ce qui concerne l'assassinat du journaliste HrantDink, voici les éléments à noter:

Une enquête judiciaire est en cours; elle a été ouverte par le Bureau du Procureur général d'Istanbul, sur décision du Procureur général;

Le dossier concernant les suspects- à savoir M.Z., des responsables de la Direction de la sécurité de Trabzon et des membres du Commandement de la Gendarmerie de Trabzon – a été adressé au Bureau du Procureur général de Trabzon, et l'affaire a été portée au pénal, devant le 2eTribunal d'instance de Trabzon; il a été ensuite décidé de sanctionner les suspects A.Ö., M.Y., V.Ș, O.Ș, H.Y. et H.Ö.Ü au motif de manquement à leur devoir, et d'acquitter G.G. etÖ.A. considérés comme non coupables des infractions présumées;

Une décision de non-poursuite a été prise à l'égard des suspects C.C., A.I.G., B.K., I.P., I. Ș.E. V.A., B.T et Ö.Ö. (décision du Bureau du Procureur général de Fatih, intitulé « Bureau des infractions commises par des Agents de l'État »), conformément à la décision déjà prise par le Tribunal administratif du District et à la décision No. 2008/9680 datée du 22 octobre 2008M;

L'enquête a été prolongée sur la base des pétitions présentées par le plaignant et le représentant juridique des victimes – la décision de la 9eChambre pénale de la Cour suprême ayant été annulée par celle de la 14eCour d'assises d'Istanbul, et également infirmée par les preuves, les déclarations des témoins et les rapports HTS réunis par le Bureau du Procureur général;

Les premières déclarations recueillies dans le cadre de l'enquête ont été réévaluées; des éléments de preuve sont réunis et de nouvelles déclarations entendues au sujet des informations manquantes; des lettres sont échangées dans ce contexte; et de nouveaux rapports HTS sont demandés.

325.Dans l'intervalle, la Cour constitutionnelle a examiné la demande personnelle de la famille de HrantDink, et établi que l'enquête menée au sujet de l'assassinat du journaliste n'avait pas respecté le principe d'efficacité de toute investigation.

Question  34: Veuillez indiquer le nombre de personnes emprisonnées ou en instance de jugement pour avoir refusé de faire leur service militaire, et décrire les mesures que prend l’État partie pour instaurer un service civil de substitution, compte tenu des conclusions de la Cour européenne des droits de l'homme dans les affaires Salil c. Turquie et Savada c. Turquie .

326.L'article 72 de la Constitution turque, intitulé « Service national », stipule: « Le service national est un droit et un devoir pour chaque citoyen turc. Le mode d'accomplissement de ce service national, ou la manière de considérer qu'il a été accompli – que ce soit dans les forces armées ou dans un organisme public – sont régis par la loi ». Dans ce contexte, un service militaire obligatoire a été instauré pour les citoyens turcs de sexe masculin, aux termes de l'article V de la Loi No. 1111, qui dit: « Tout citoyen turc de sexe masculin a l'obligation d'accomplir son service militaire en vertu de la présente loi ».

327.La législation turque ne contient pas de disposition particulière vis-à-vis des personnes qui ne s'acquittent pas d'une ou de plusieurs obligations liées au service militaire dans l'intention délibérée de se soustraire à ce dernier (par exemple, le fait de se soustraire à l'appel nominal, de ne pas rejoindre son unité, ou encore le refus du port de l'uniforme ou du recrutement en soi).

328.Il n'existe pas, à l'heure actuelle, de projet civil de substitution au service militaire.

Question  35 : Compte tenu des précédentes observations finales du Comité ( par.  25), veuillez fournir des informations sur les mesures prises pour enquêter efficacement sur les cas signalés de mauvais traitements d'appelés du contingent par d'autres soldats, au cours de la période considérée. Si une enquête a été ouverte au sujet de la mort d'un appelé, survenue à Ugur Kantar en octobre  20 11, veuillez formuler vos observations à ce sujet. Veuillez fournir également des informations sur les décès de soldats en dehors des combats, au cours de la période considérée, et sur les causes de ces décès.

329.En ce qui concerne la mort d'un appelé à UgurKantar, une action a été engagée au pénal à l'encontre des suspects – à savoir le fantassinA.A. et le Sergent d'infanterieF.K. -, accusés d'actes de torture aggravée et de coups et blessures volontaires; le même type d'action a été engagé vis-à-vis du fantassinR.T., accusé de coups et blessures volontaires, des fantassins S.Ö. Ö.B.,et A.Y., accusés de mauvaise conduite, et contre un autre suspect – le Sergent-chef A. Ș, servant dans les chars et accusé de mauvaise conduite par négligence.

330.Le suspect R.T. est en attente de procès; son affaire est traitée par la 1eCour d'assises de Silifke, tandis quele fantassin A.A. et le Sergent d'infanterie F.K.sont en détention provisoire à l'établissement pénitentiaire fermé (de typeM) de Silifke. Le procès des autres suspects est également en attente.

331.À la suite du procès qui s'est tenu le 21 mars 2014, les détenus suspectés A.A. et F.K. ont été libérés; cependant, après objection, le Tribunal militaire du Commandementde la 6eDivision d'infanterie mécanisée a décidé – le 11 avril 2014 – le maintien en détention des deux suspects en question et la délivrance d'un mandat d'arrêt à leur encontre. L'affaire est en suspens.

Autres questions

Question  36 : Veuillez fournir des informations sur ce que l’État partie a fait pour que toutes les mesures prises en réaction à des menaces d'actes terroristes soient conformes à ses obligations au titre de la Convention. À cet égard, veuillez analyser les dispositions prises pour donner suite aux recommandations du Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste et du Rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression – notamment les recommandations invitant l’État partie à modifier, dans un sens moins large, la définition du terrorisme dans la loi antiterroriste.

332.La « Loi portant amendement au Code pénal turc et à certaines lois relatives aux droits de l'homme, à la liberté d'expression et aux médias », également intitulée « Quatrième ensemble de réformes judiciaires », a été adoptée par le Parlement le 11 avril 2013.

333.L'un des éléments importants de cette loi est le fait d'intégrer au Code pénal turc l'essentiel de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme.

334.Dans ce cadre, le champ du délit de propagande en faveur d'organisations terroristes est désormais limité à la propagande en faveur des méthodes terroristes, telles que la coercition, la violence ou les menaces de violence consistant à légitimer ou à encourager l'utilisation de telles méthodes, ou encore à en faire l'éloge. De même, le champ du délit d'impression et de publication des déclarations et communiqués d'organisations terroristes se limite désormais au fait d'imprimer et de publier les déclarations et communiqués d'organisations terroristes constituant des actes de coercition, de violence ou des menaces de violence qui légitiment ou encouragent le recours à ces méthodes, ou encore qui en font l'éloge. De plus, la peine maximale encourue par les rédacteurs en chef n'ayant pas directement participé à l'accomplissement des délits ou crimes en question a été réduite de moitié.

335.De cette manière, la distinction entre la « promotion » ou la « propagande » en faveur d'une organisation terroriste et l'« appartenance à une organisation terroriste », et la distinction entre l'« incitation à la violence » et l'« expression d'idées non violentes » sont garanties par la loi, en totale conformité avec les normes internationales.

Informations d'ordre général sur la situation des droits de l'homme dans le pays, y compris sur les nouvelles mesures et les faits nouveaux concernant la mise en œuvre de la Convention

Question  37 : Veuillez fournir des informations détaillées sur les faits nouveaux survenus depuis le précédent rapport périodique en ce qui concerne le cadre juridique et institutionnel de la promotion et de la protection des droits de l'homme au niveau national, y compris toute décision de justice en rapport avec ces questions.

336.Au cours de la période considérée pour le nouveau rapport, la Turquie a fait des progrès significatifs en ce qui concerne l'institutionnalisation du domaine de la promotion et de la protection des droits de l'homme, et des institutions importantes ont été créées afin d'instaurer des garanties institutionnelles dans ce domaine. Un processus de consultation globale a été mené, avec le concours des parties concernées, en vue de l'élaboration des textes de loi portant création desdites institutions.

337.La « Loi sur la création d'une Institution de protection des droits de l'homme en Turquie » est entrée en vigueur le 30 juin 2012, et le processus de mise en place de cette institution – conformément aux « Principes de Paris » - a été lancé.L'élection des membres du Conseil des droits de l'homme – organe décisionnaire de la nouvelle institution – était terminée à la fin dumois deseptembre 2012.La loi en question stipule que la nouvelle institution de protection des droits de l'homme sera indépendante dans l'exercice de ses fonctions. Cette institution doit protéger et renforcer les droits de l'homme, et, dans ce cadre, elle doit procéder à des enquêtes et des recherches, à l'élaboration de rapports, à la présentation d'avis et de recommandations, ainsi qu'à des activités d'information, de sensibilisation, de formation et d'enquête au sujet des allégations de violation des droits de l'homme.

338.L'Institution de protection des droits de l'homme en Turquie est une entité juridique publique, jouissant d'une autonomie administrative et financière.Elle est indépendante dans ses attributions et ses fonctions; elle ne peut recevoir d'ordres, d'instructions, de recommandations ou d'avis sur la manière d'exercer ses fonctions. Grâce à son autonomie administrative et financière, l'Institution de protection des droits de l'homme dispose de son propre budget, de son propre personnel et de ses biens, et est autorisée à prendre ses propres dispositions administratives dans les domaines relevant de ses compétences.

339.L'Institution de protection des droits de l'homme en Turquie dispose d'un large mandat en matière de protection et de promotion des droits de l'homme. Elle a été également désignée en tant que mécanisme national de prévention, chargé de remplir le mandat et d'exercer les pouvoirs définis dans le Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

340.La Loi relative à la création de l'« Institution du Médiateur » est entrée en vigueur le 29 juin 2012.Cette institution a été mise en place sous l'égide du Parlement, en tant qu'entité juridique publique dotée d'un budget propre. Le Médiateur a pour mandat d'examiner les plaintes concernant le fonctionnement de l'administration et d'enquêter à ce sujet – c'est-à-dire au sujet de tout acte, de toute opération et de tout comportement de l'administration, afin de vérifier le respect de l'état de droit et le caractère équitable de ces actions et comportements, dans une perspective de justice et de respect des droits de l'homme. Le Médiateur est également chargé d'adresser des recommandations à l'administration.Eu égard au principe d'indépendance, le Médiateur en chef et ses collaborateurs ne doivent pas recevoir d'ordres ou d'instructions de la part de quelque autorité, de quelque organe, de quelque bureau et de quelque personne que ce soit.

341.Le dépôt de plaintes concernant l'administration auprès de l'Institution du Médiateur a commencé le 29 mars 2013. Le dépôt d'une plainte est gratuit; il peut se faire aussi bien sur support électronique que par l'intermédiaire des gouvernorats, au niveau des provinces et des districts.

342.La mise en place, en Turquie, de ce système de médiation est l'un des éléments majeurs de la responsabilité, de l'équité et de la transparence de la fonction publique. Cette institution va permettre d'améliorer la qualité et l'efficacité des services publics – notamment en permettant à chaque citoyen de déposer une plainte rapidement, équitablement et gratuitement (au sujet du fonctionnement de l'administration, et pour vérifier le respect de la loi par les agents de l'État). Les enquêtes sur les allégations relatives à l'administration et à ses fonctionnaires, à tous les niveaux, relèvent du mandat du Médiateur.

343.Les amendements constitutionnels adoptés en 2010 ont instauré le droit de chacun de s'adresser à la Cour constitutionnelle – laquelle peut recevoir des plaintes individuelles depuis le 23 septembre 2012. L'article 148 de la Constitution turque stipule que toute personne peut s'adresser à la Cour constitutionnelle pour signaler une éventuelle violation, par un service public, de droitset de libertés fondamentaux garantis par la Constitution et inscrits dans la Convention européenne des droits de l'homme. Avant de recourir à la Cour constitutionnelle, tous les autres recours et voies juridiques nationaux doivent avoir été épuisés.

344.La Cour constitutionnelle prononce le jugement final quant à la réalité ou non de la violation de droits fondamentaux du plaignant; si elle établit une violation effective, la Cour constitutionnelle établira officiellement ce qui devra être fait pour remédier à la violation et aux effets qu'elle a pu avoir – y compris une éventuelle indemnisation.

345.Par son arrêt du 14 mai 2013, la Cour européenne des droits de l'homme a établi que la plainte individuelle – à savoir le droit de tout citoyen de s'adresser à la Cour constitutionnelle – était « un recours national, qui doit avoir été épuisé avant d'envisager le recours à la Cour européenne des droits de l'homme » (affaire Hasan Uzun c. Turquie, No. 10755/13).

Question  38 : Veuillez donner des informations détaillées sur les nouvelles mesures d'ordre politique, administratif et autre prises depuis la soumission du précédent rapport périodique, afin de promouvoir et de protéger les droits de l'homme au niveau national – notamment au sujet des plans ou programmes nationaux adoptés en matière de droits de l'homme, en précisant les ressources qui leur ont été allouées, ainsi que les moyens mis à disposition pour leur mise en œuvre, leurs objectifs et leurs résultats.

346.Le Plan d'action visant à la prévention de toute violation de la Convention européenne des droits de l'homme a été adopté par décision du Conseil des ministres – publiée au Journal Officiel du 1er mars 2014.Une conférence et un atelier de haut niveau sur « la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme au sujet de la Turquie – Problèmes et propositions de solutions » ont été organisés par le Ministère de la justice, du 15 au 17 novembre 2011, à Ankara; y participaient les représentants de toutes les institutions, ainsi que les experts de la Cour européenne des droits de l'homme et du Conseil de l'Europe.Dans le cadre de l'atelier, on a débattu des problèmes intrinsèquement liés à la mise en œuvre de la Convention et pouvant déboucher sur des violations des droits de l'homme, et envisagé des propositions de solutions. Le Plan d'action de la Turquie, qui a pris en compte les résultats de cet atelier, a été élaboré dans le but de résoudre tous les problèmes ayant conduit la Cour européenne des droits de l'homme à prononcer des jugements de violation des droits de l'homme.

347.Le Plan d'action en question définit les mesures à prendre, ainsi que les activités et les dispositions à mettre en œuvre sur la base d'un calendrier également défini; ce plan désigne également les institutions chargées de prendre ces mesures et de mener les actions en question. Suite à l'élaboration du Projet de Plan d'action, les avis et recommandations de l'ensemble des institutions concernées ont été reçus et dûment examinés – ce qui a permis la finalisation du Plan d'action.

348.Le Plan d'action de la Turquie comporte 14grandes orientations et 46objectifs s'inscrivant dans ces buts généraux. Les actions à mener sont exposées dans le détail pour chaque objectif visé. En outre, les buts à atteindre s'échelonnent sur du court terme, du moyen terme et du long terme – afin d'en garantir la réalisation.

349.Le processus de suivi des actions à mener conformément au calendrier fixé sera assuré par le Ministère de la justice. Au cours de ce processus, les institutions responsables présenteront des rapports au Ministère de la justice – et ce, tous les six mois. Un rapport annuel, précisant la mise en œuvre du Plan d'action, sera soumis au Premier ministre.

350.Ce Plan d'action a été conçu avec le plus large consensus des institutions concernées, afin d'éviter que la Cour européenne des droits de l'homme établisse de nouveau des violations de la Turquie dans ce domaine; le Plan d'action indique les mesures à prendre et les étapes à suivre pour résoudre les problèmes de manière intégrée. Ainsi, en centralisant le processus et en prenant toutes les précautions nécessaires avec le Ministère de la justice, nous pourrons garantir une action efficace et axée sur des résultats.

351.Le renforcement de la protection et de la promotion des droits de l'homme au niveau national est l'un des objectifs stratégiques du Plan stratégique 2014-2018 de la Direction générale de la sécurité. Ce planest en voie d'adoption. L'action à mener va s'échelonner sur une période de cinq ans, avec un calendrier précis pour chaque objectif. Le plan stratégique fixe également un budget très précis. Les objectifs à atteindre feront l'objet d'un suivi dans les rapports d'activité et le « programme de performance » élaborés chaque année.

352.Dans le cadre du protocole signé en 2007 par le Ministère de la défense nationale et le Ministère de la justice au sujet de la formation du personnel pénitentiaire (des prisons et des centres de détention militaires), une formation professionnelle appliquée a été dispensée au personnel des prisons et des centres de détention relevant du Ministère de la justice, à Ankara; de 2007 à 2013, 406personnes employées dans les prisons et les centres de détention militaires ont suivi cette formation.

Question  39 : Veuillez apporter toute autre information sur les nouvelles mesures et initiatives prises pour assurer la mise en œuvre de la Convention et donner suite aux recommandations du Comité depuis l'examen, en  20 10, du précédent rapport périodique – y compris les statistiques utiles -, ainsi que sur tout fait qui a pu survenir dans l’État partie et qui revêt un intérêt au titre de la Convention.

353.En ce qui concerne l'amélioration des infrastructures techniques de la Direction générale de la sécurité, des systèmes d'images et de sons numériques ont été mis en place, à partir de 2007, dans les sections de lutte antiterroriste des directions de la sécurité au niveau provincial.

354.Dans le cadre de ce projet, 80systèmes ont été mis en place au total – en 2010, 2011 et 2012: 37 de ces systèmes ont été installés dans des salles de détention, et 43autres dans des pièces où se déroulent les interrogatoires (le tout, dans 30sections de lutte antiterroriste des directions provinciales de la sécurité).

355.Environ 28autres systèmes d'images et de sons numériques sont encore prévus – 18pour des salles de détention, et 10autres dans des salles ou pièces destinées aux interrogatoires (le tout, dans 10sections de lutte antiterroriste des directions provinciales de la sécurité).