NATIONS UNIES

CERD

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/FIN/CO/1913 mars 2009

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATIONDE LA DISCRIMINATION RACIALESoixante‑quatorzième session16 février‑6 mars 2009

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L ’ ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité pour l ’ élimination de la discrimination raciale

FINLANDE

1.Le Comité a examiné les dix‑septième, dix‑huitième et dix‑neuvième rapports périodiques de la Finlande (CERD/C/FIN/19), soumis en un seul document, à ses 1918e et 1919e séances (CERD/C/SR.1918 et 1919), tenues les 25 et 26 février 2009. À sa 1929e séance (CERD/C/SR.1929), tenue le 5 mars 2009, il a adopté les observations finales ci‑après.

A. Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’État partie, présenté en temps voulu et élaboré conformément aux directives concernant l’établissement des rapports, ses réponses écrites exhaustives à la liste des points à traiter, ainsi que l’exposé oral présenté et les plus amples précisions données en réponse aux questions que le Comité a posées par oral, qui attestent de nouveaux progrès dans la mise en œuvre de la Convention. Il loue les efforts déployés par l’État partie pour régler les problèmes mis en lumière dans ses précédentes observations finales (CERD/C/63/CO/5).

3.Le Comité se félicite du dialogue franc et ouvert qu’elle a eu avec la délégation conduite par le Directeur du Ministère des affaires étrangères, qui était composée d’experts de différents ministères et d’un membre du Parlement, et salue le fait que l’État partie ait reconnu en toute franchise l’existence de la discrimination raciale dans certains segments de la société finlandaise.

4.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a collaboré étroitement avec la société civile à l’élaboration du rapport.

B. Aspects positifs

5.Le Comité accueille avec intérêt l’adoption de la loi sur la non‑discrimination de 2004 qui a pour objectif de préserver l’égalité et de renforcer la protection accordée par la loi aux victimes de discrimination.

6.Le Comité se félicite de l’établissement du tribunal national de lutte contre la discrimination, organe indépendant et permanent s’attachant à promouvoir la protection juridique, ainsi que du renforcement de l’institution du médiateur des minorités, ces deux institutions étant chargées de surveiller le respect des dispositions de la loi sur la non‑discrimination de 2004 du point de vue de l’origine ethnique. Il se félicite également que le médiateur des minorités et le tribunal national de lutte contre la discrimination aient été transférés sous la responsabilité du Ministère de l’intérieur en tant qu’autorités indépendantes au 1er janvier 2008.

7.Le Comité se félicite de l’adoption par le Parlement, ainsi que la délégation l’a indiqué oralement, d’un amendement à la loi sur les étrangers qui permet aux titulaires d’un permis de séjour temporaire (dit permis B) de se voir accorder un permis de travail.

8.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a adhéré à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie et qu’il a ratifié le Protocole no 12 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

9.Le Comité note avec satisfaction qu’en 2003 le Code pénal a été complété d’une disposition qui incrimine la participation aux activités d’une organisation criminelle qui vise à fomenter une agitation ethnique contre un groupe de population donné, ainsi que d’une disposition prévoyant la prise en compte des motifs racistes comme circonstance aggravante qui autorise une sanction plus sévère.

10.Le Comité félicite l’État partie d’avoir élaboré un programme d’intervention pour la prévention des brutalités à l’école (dont sont souvent victimes les enfants issus de minorités et de l’immigration), qui sera adopté dans toutes les écoles polyvalentes pendant la période 2009‑2011.

11.Le Comité se félicite de l’adoption, en mai 2008, du Programme de sécurité intérieure, dont l’objet est d’améliorer la sécurité des immigrants et des minorités ethniques, de réduire la violence, de combattre la criminalité organisée et de prévenir la cybercriminalité et les risques associés à Internet.

C. Préoccupations et recommandations

12.Le Comité prend note des informations concernant certains groupes ethniques et des explications données par la délégation au sujet des dispositions législatives empêchant l’État partie d’identifier les groupes ethniques dans le cadre d’un recensement ou d’établir une distinction entre les citoyens sur une base ethnique, linguistique ou religieuse, mais il fait part de sa préoccupation quant à l’absence, dans le rapport de l’État partie, de données statistiques concernant la composition ethnique de sa population.

Conformément aux paragraphes 10 à 12 des directives révisées concernant l ’ établissement de rapports (CERD/C/2007/1), le Comité recommande à l ’ État partie de fournir des renseignements sur la composition de sa population, l ’ utilisation de langues maternelles, les langues communément parlées et d ’ autres indicateurs de la diversité ethnique, ainsi que toute autre information émanant d ’ études sociales ciblées menées à titre volontaire, dans le plein respect de la vie privée et de l ’ anonymat des personnes concernées, afin de pouvoir évaluer la situation de sa population sur le plan économique, social et culturel. En outre, l ’ État partie devrait donner au Comité des informations sur la composition ethnique de la population carcérale.

13.Le Comité prend note des explications données aux paragraphes 74 et 75 du rapport de l’État partie et de ses réponses aux listes de points à traiter (p. 10 des réponses écrites), selon lesquelles un amendement à la loi sur le Parlement sami n’est pas justifié actuellement; en outre, d’après ces explications, le Parlement sami estime qu’il faudrait examiner la définition du peuple «sami» au niveau du Conseil nordique afin de trouver une définition commune. Il réitère toutefois son point de vue selon lequel l’approche de l’État partie s’agissant de la définition des personnes susceptibles d’être considérées comme Samis et pouvant donc tomber sous le coup de la législation pertinente en faveur des Samis, tels que définis par la loi sur le Parlement sami et par l’interprétation spécifique de la Cour suprême administrative à cet égard, est trop restrictive.

Le Comité réitère sa recommandation selon laquelle l ’ État partie doit faire davantage de place à l ’ identification fondée sur la manière dont s’identifie lui-même l’individu concerné , comme indiqué dans la recommandation générale n o 8 du Comité (1990).

14.Le Comité se félicite que l’État partie reconnaisse que l’incertitude juridique entourant la question des droits fonciers des Samis est susceptible de porter préjudice aux relations interethniques dans les régions concernées, mais note une nouvelle fois avec préoccupation que le règlement des problèmes liés aux droits des Samis a peu progressé et que l’État partie n’a pas adhéré à la Convention no 169 de l’Organisation internationale du Travail concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants (art. 5 d) v), 5 e) vi) et 6).

Le Comité appelle de nouveau l ’ attention de l ’ État partie sur la recommandation générale n o 23 (1997) concernant les droits des populations autochtones qui, entre autres , exhorte les États parties à reconnaître et à protéger les droits des peuples autochtones de posséder, de mettre en valeur, de contrôler et d ’ utiliser leurs terres, territoires et ressources communaux. Le Comité engage de nouveau l ’ État partie à trouver un règlement convenable au litige foncier avec le peuple sami et lui réitère sa recommandation d ’ adhérer à la Convention n o 169 de l ’ OIT dans les plus brefs délais. En outre, il recommande à l ’ État partie de prendre les mesures voulues pour veiller à ce que l ’ étude sur les droits fonciers en Haute Laponie débouche sur des mesures concrètes, notamment l ’ adoption d ’ une nouvelle législation, en consultation avec les communautés touchées. L ’ État partie est par ailleurs invité à poursuivre les négociations avec les ministères compétents et le Parlement sami en ce qui concerne la création d ’ un nouvel organe préparatoire chargé de trouver une solution à la question du droit d ’ utilisation des sols sur le territoire sami.

15.Le Comité prend note des mesures adoptées par l’État partie afin de lutter contre les comportements racistes et xénophobes parmi les jeunes, notamment en accordant des subventions à des projets visant à promouvoir le multiculturalisme et les activités de lutte contre le racisme, ainsi que des mesures de sensibilisation ciblant à la fois les enseignants et les élèves de l’enseignement primaire et secondaire. Il note par ailleurs que les programmes spécifiques aux écoles prévoient la prévention des brutalités. Il reste toutefois préoccupé par la persistance de comportements racistes et xénophobes dans de nombreux secteurs de la population.

Le Comité encourage l ’ État partie à poursuivre ses efforts pour surveiller toutes les tendances susceptibles d ’ entraîner des comportements racistes et xénophobes et lutter contre les conséquences néfastes de ces tendances. Il recommande également à l ’ État partie de continuer à promouvoir, à tous les niveaux de l ’ enseignement, des mesures de sensibilisation générale à la diversité et au multiculturalisme, et à développer ses programmes visant à prévenir les brutalités dont pâtissent de manière disproportionnée les élèves issus de l ’ immigration et qui entrav e nt leur intégration dans la société. En outre, il encourage l ’ État partie à faire en sorte que ses stratégies de lutte contre les comportements racistes et xénophobes ciblent les adultes finlandais.

16.Le Comité prend acte des actions entreprises par l’État partie pour lutter contre la propagande raciste et la diffusion de documents racistes et xénophobes sur Internet. Il prend notamment note à cet égard de la réforme, en 2004, de la législation sur la liberté d’expression, qui permet la communication d’informations permettant d’identifier l’expéditeur si le message est susceptible à première vue de constituer une infraction, de l’adoption, en mai 2008, du programme de sécurité intérieure, et de la mise en place d’un mécanisme de signalement des infractions commises en ligne. Le Comité demeure toutefois préoccupé par la persistance de ce problème.

Le Comité encourage l ’ État partie à poursuivre ses efforts aux niveaux national et international pour lutter contre les manifestations contemporaines de discrimination raciale, telles que la propagande raciste sur Internet, et de trouver des moyens d ’empêcher l ’ utilisation d ’ Internet à des fins racistes. Il demande instamment à l ’ État partie de poursuivre le processus de ratification du Protocole additionnel à la Convention européenne sur la cybercriminalité, relatif à l ’ incrimination d ’ actes de nature raciste et xénophobe commis par le biais de systèmes informatiques, évoqué dans ses dix ‑septième, dix ‑huitième et dix ‑neuvième rapports périodiques.

17.Le Comité se dit préoccupé par la ségrégation de fait en matière de logement dont sont victimes tant les immigrants que les Roms (art. 3).

Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller au respect de la loi relative à la lutte contre la discrimination dans l ’ octroi de logements et de fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations sur les mesures prises pour lutte contre cette ségrégation .

18.Le Comité se félicite des mesures prises par l’État partie pour éliminer la discrimination à l’égard des Roms, telles que la nomination de personnes chargées des Roms dans les agences locales pour l’emploi et la formation du personnel de ces agences à la culture rom et à l’égalité ethnique, mais demeure préoccupé par le fait que des membres de la communauté rom ont une jouissance limitée des droits consacrés par la Convention, en particulier du droit à l’éducation, à l’emploi, au logement et à l’accès aux lieux publics. Le Comité s’inquiète tout particulièrement du taux de chômage élevé des Roms, qui s’explique par le fait qu’ils n’ont pas l’instruction de base requise (art. 2, 5 et 6).

À la lumière de sa recommandation générale n o 27 (2000) concernant la discrimination à l ’ égard des Roms, le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour relever le niveau d ’ instruction des membres de la communauté rom , notamment en faisant davantage savoir que les enfants roms peuvent recevoir une instruction dans leur langue maternelle et en encourageant le recrutement d ’ enseignants roms. Il encourage également l ’ État partie à accroître les possibilités d ’ emploi pour les Roms, notamment en dispensant une formation à des Roms sans emploi afin de leur permettre d ’ accéder au marché du travail, ainsi qu ’ en veillant à ce qu ’ ils bénéficient de l ’ égalité d ’ accès au logement et aux lieux publics. L ’ État partie devrait également renforcer son action pour lutter , en particulier parmi les employeurs, contre les comportements négatifs vis-à-vis des Roms et les stéréotypes les concernant .

19.Le Comité prend note de l’engagement continu de l’État partie à intégrer les personnes d’origine étrangère. Il reste néanmoins préoccupé par le fait que, en dépit de ces efforts, la discrimination de facto à l’égard de ces personnes, notamment des Somaliens, persiste dans plusieurs domaines. Il s’inquiète en particulier du taux d’emploi plus faible parmi les personnes issues de l’immigration, en particulier les femmes, et des difficultés auxquelles les personnes issues de l’immigration et les étrangers continuent de se heurter lorsqu’elles essaient d’accéder à des lieux de services, tels que bars et restaurants. Le Comité prend acte avec satisfaction de la publication d’instructions visant à assurer un traitement égal dans les services à la clientèle, mais reste préoccupé par les obstacles auxquels se heurtent les immigrants qui souhaitent souscrire à des services contractuels tels que les polices d’assurance et les services de téléphonie mobile (art. 5 e) et f)).

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intensifier ses efforts pour lutter contre la discrimination à l ’ égard des personnes d ’ origine étrangère. En particulier, l ’ État partie devrait renforcer l ’ efficacité de sa législation et de ses politiques visant à supprimer la discrimination sur le marché du travail et à améliorer les possibilités d ’ emploi pour les personnes issues de l ’ immigration. L ’ État partie est invité à fournir de plus amples renseignements, dans son prochain rapport périodique, sur le processus de révision de la loi d ’ intégration, qui vise à offrir un plan d ’ intégration adapté aux besoins des personnes susceptibles de rester en Finlande pendant plus d ’ un an.

20.Le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

21.Le Comité recommande à l’État partie de tenir compte des passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 à la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée (A/CONF.189/12, chap. I), lorsqu’il transpose les dispositions de la Convention dans son ordre juridique interne, et en particulier les articles 2 à 7. Il demande aussi instamment à l’État partie à faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations spécifiques sur les plans d’action et les autres mesures prises pour appliquer la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national. Le Comité encourage également l’État partie à participer activement aux travaux du Comité préparatoire de la Conférence d’examen de Durban, ainsi qu’à la Conférence proprement dite en 2009.

22.Le Comité recommande que les rapports de l’État partie soient rapidement mis à la disposition du public dès leur présentation et que ses observations finales sur ces rapports soient également diffusées dans les langues officielles et nationales.

23.Le Comité recommande à l’État partie de continuer à tenir des consultations et d’approfondir son dialogue avec les organisations de la société civile œuvrant dans le domaine de la protection des droits de l’homme, en particulier avec celles qui s’emploient à lutter contre la discrimination raciale, en vue de l’élaboration de son prochain rapport périodique.

24.Le Comité invite l’État partie à mettre à jour son document de base conformément aux directives harmonisées concernant la présentation des rapports en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier celles qui se rapportent au document de base commun, adoptées par la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu des traités relatifs aux droits de l’homme qui s’est tenue en juin 2006 (HRI/GEN/2/Rev.4).

25.Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur modifié, le Comité demande à l’État partie de fournir, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des informations sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations contenues dans les paragraphes 14, 16 et 19 ci‑dessus.

26.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses vingtième, vingt et unième et vingt‑deuxième rapports périodiques en un seul document, attendu le 13 août 2011, qui tiendra compte des directives concernant l’élaboration des documents propres au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1), et traitera tous les points soulevés dans les présentes observations finales.

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