8.Le Gabon possède également des ressources naturelles abondantes telles que le pétrole, le bois, le manganèse et l’uranium.
9.Le produit national brut (PNB) par habitant est l’un des plus élevés de l’Afrique subsaharienne (7 550 dollars en 1999). Cependant, les indicateurs sociaux sont comparables ou même inférieurs à ceux de certains pays africains plus pauvres. Le Rapport mondial sur le développement humain de 1999 du Programme des Nations Unies pour le développement montre un écart de 71 places entre le classement du Gabon selon l’indicateur du développement humain (IDH) (124ème rang mondial sur 174 pays) et le classement selon le produit intérieur brut (PIB) par habitant (53ème rang mondial sur 174 pays).
10.Le Gabon est un pays très urbanisé. La dégradation de l’environnement, accompagnée d’une détérioration des conditions d’hygiène et de l’état de santé, est l’une des conséquences directes de l’urbanisation rapide. En dehors des trois grands pôles économiques (Libreville, Port‑Gentil, Franceville‑Moanda), les autres centres urbains, dans bien des cas, ressemblent davantage à de grands villages, caractérisés par l’absence d’infrastructures (eau, électricité, voies d’accès), des services sanitaires et sociaux peu efficaces, et un mode de vie fondé sur l’agriculture.
11.Le paysage rural se distingue au contraire par son «vide» où les collectivités sont séparées par des distances relativement importantes (dans près de la moitié du pays la densité de population n’atteint que 1,4 habitant au kilomètre carré). En outre, on observe une diminution de la population rurale qui connaît un vieillissement sensible et qui est composée en majorité de femmes (52 %) appartenant principalement au groupe d’âge des 20/25 ans (58 %).
B. Population
Tableau 2: Démographie
INDICATEURS |
1960 |
1993 |
1994 |
Population totale (en milliers) Femmes Hommes |
1 014 51,3 %50,1 % |
1 014,9 51 %49 % |
|
Proportion ruraux/urbains |
87/13 |
27/73 |
27/73 |
Nombre de naissances |
25 000 |
25 627 |
|
Nombre de décès avant l’âge de 5 ans |
4 000 |
- |
|
Taux d’accroissement total |
2,5 % |
||
Taux d’accroissement urbain |
6 % |
- |
|
Indice synthétique de fécondité |
5,2 |
- |
|
Nombre de ménages |
195 067 |
- |
|
Taille moyenne des ménages |
5,30 |
- |
|
Proportion par tranche d’âge 0 à 5 ans 6 à 16 ans |
18 %27 % |
||
Nombre de femmes en âge de procréer (15 à 49 ans) |
231 272 |
237 400 |
|
Taux brut de natalité |
36 % |
35,9 % |
|
Taux de mortalité |
30 % |
16 % |
15,7 % |
Espérance de vie à la naissance |
41 |
52,9 |
Sources: Recensement général de la population et de l’habitat (1993) et Annuaire statistique (1994) MSPP.
12.La population du Gabon a plus que doublé au cours des trente dernières années. D’après le recensement général de la population et de l’habitat effectué en 1993, le Gabon compte 1 014 976 habitants. L’accroissement de la population au cours de la période allant de 1960 à 1993, s’est accompagné d’un exode rural et d’une immigration alimentée par les pays limitrophes et par la France.
13.Attirés par l’élasticité du marché du travail gabonais et par la prospérité économique du pays, les immigrés constituent actuellement 15 % de la population. Autre fait marquant, la croissance démographique relativement faible au début de cette période s’est accélérée au cours des vingt dernières années, grâce en partie à une réduction sensible de la prévalence de la stérilité. L’indice de stérilité définitive, relatif aux femmes de 45 à 54 ans, est passé de 32 % en 1960 à 17 % en 1993.
14.La population du Gabon se caractérise par sa jeunesse: 41 % de la population est âgée de moins de 15 ans. L’analyse de la structure par âge et par sexe de la population aux recensements de 1960, 1970 et 1993 met en évidence deux phénomènes: l’incidence de la stérilité et l’impact de l’immigration.
15.Fait rare en Afrique subsaharienne, la population urbaine représente 73 % de la population totale. Mais la répartition géographique est inégale car les principales villes, Libreville, la capitale administrative (419 596 habitants) et Port‑Gentil, la capitale économique du pays (79 225 habitants), regroupent à elles seules 49 % de la population.
16.À Libreville comme à Port‑Gentil, seul un chef de ménage gabonais sur cinq est originaire de la ville, les autres venant de l’intérieur du pays. Près d’un chef de ménage gabonais sur cinq est arrivé dans la capitale âgé de 6 à 15 ans (migration scolaire). À Port‑Gentil, la proportion est d’un sur sept. La migration d’ordre professionnel y est plus élevée qu’à Libreville, en raison de la présence des industries pétrolières. Dans les deux villes, l’immigration intérieure est deux fois plus importante que l’immigration étrangère.
17.Trois provinces ont «profité» de cette croissance urbaine et se présentent comme étant les plus dynamiques: l’Estuaire, l’Ogooué Maritime et le Haut–Ogooué. Cet exode rural pose un véritable défi au développement: le manque de main‑d’œuvre rurale. Parmi les autres villes, Franceville, Moanda et Mounana sont spécialisées dans l’exploitation des ressources minières, mais leur vocation agricole semble s’affirmer progressivement.
18.Cinq provinces comptent plus de ruraux que d’urbains. Il s’agit du Moyen‑Ogooué (18 726 urbains et 40 261 ruraux), de l’Ogooué‑Ivindo (17 775 urbains et 31 087 ruraux), de l’Ogooué‑Lolo (19 379 urbains et 23 536 ruraux) et du Woleu‑Ntem (35 094 urbains et 62 177 ruraux).
19.La population urbaine est nettement plus jeune que la population rurale (47,6 % a moins de 18 ans en ville, contre 42,7 % à la campagne). Les hommes se concentrent dans les villes (99,5 % d’hommes contre 91,3 % de femmes). Il en est de même pour les communautés étrangères (22,8 % des étrangers, parmi les 18 ans et plus, vivent dans les villes, contre 7 % dans le milieu rural). La moitié des habitants de la capitale a moins de 17 ans.
20.Au Gabon, la ville a une considération administrative et politique. Est considérée comme ville toute capitale départementale, indépendamment de son poids démographique. La population des villes varie de 100 à 419 500 habitants pour le cas de Libreville. Dans ces conditions, le Gabon compte 47 villes correspondant aux 45 départements, plus la commune de Mounana, dans le Haut‑Ogooué, et Libreville, la capitale.
21.La population étrangère est d’environ 15,2 %, essentiellement d’autres nationalités africaines, attirée par le boom économique des années 70‑80. Avec la crise économique de 1986, exacerbée par la récente dévaluation du franc CFA, quelque 55 000 étrangers ont été encouragés à rentrer dans leur pays d’origine.
1. Ethnies
22.On dénombre une quarantaine d’ethnies sur le territoire, dont les plus importantes sont: Fang, Nzebi, Kota‑Kele, Mbede‑Teke, Okande‑Tsogho, Shirpunu.
2. Langues
23.La République gabonaise a adopté le français comme langue officielle de travail ou d’administration. Chaque groupe ou sous‑groupe parle sa langue maternelle appelée dialecte. En outre, elle œuvre pour la protection et la promotion des langues nationales (introduction dans les enseignements, à titre expérimental, dans certains établissements secondaires).
3. Religions
24.Jusqu’en 1960, on peut relever la présence des missionnaires catholiques, protestants et de quelques musulmans isolés vivant au Gabon. Aujourd’hui, la population gabonaise est en majorité chrétienne. Les catholiques sont les plus nombreux, suivis des protestants. La proportion de musulmans reste infime.
II. Cadre politique, administratif et socioéconomique
A. Contexte politique
25.Jusqu’en 1990, le régime politique gabonais a été caractérisé par le monocéphalisme et l’hypertrophie du pouvoir exécutif, renforcés par l’instauration du parti unique en 1968. Il faut y ajouter le rôle insignifiant dévolu au Parlement malgré l’introduction de la motion de défiance (motion de censure) en 1981. Mais l’avènement de la démocratie en Afrique, avec l’organisation de la Conférence nationale en mars et avril 1990, a entraîné dans les institutions politiques du pays les changements suivants:
L'abolition du monopartisme et l’instauration du multipartisme;
L'adoption, en 1990, d’une Charte nationale des libertés qui consacre les libertés fondamentales, notamment la liberté d’expression, la liberté d’association et la liberté de la presse;
L'instauration d’un nouveau régime de type semi‑présidentiel, à la suite de l’adoption d’une nouvelle Constitution, le 28 mai 1990, remplacée ensuite par celle du 26 mars 1991 et modifiée le 18 mars 1994;
La création de nouvelles institutions telles que le Conseil national de la communication, la Cour constitutionnelle, la Cour judiciaire, la Cour des comptes, la Cour administrative, le Sénat, et le Conseil national de la démocratie;
La réforme des institutions existantes telles que le Conseil économique et social et l’Assemblée nationale;
Le partage du pouvoir exécutif entre le président de la République, assisté d’un vice‑président, et le premier ministre assisté d’un vice‑premier ministre;
L'équilibre relatif des pouvoirs exécutif et législatif avec des moyens de pression et des possibilités de sanctions réciproques et judiciaires.
B. Organisation administrative
26.Le territoire national est divisé en neuf provinces 50 communes et 45 départements (dirigés par des préfets), en districts, en 146 cantons et en 1 993 villages. La province est la plus grande et la plus importante subdivision administrative. La capitale provinciale s’appelle chef‑lieu de province, et est dirigée par un gouverneur.
27.Les assemblées départementales, créées en décembre 1980, constituent sans doute le niveau le plus actif pour la participation au développement communautaire. Elles remplacent les collectivités rurales et comprennent chacune un conseil dirigé par un président élu. Leur rôle principal est d’assurer la gestion des intérêts locaux. Un projet de loi est en cours pour remettre en œuvre la décentralisation des pouvoirs au niveau des élus locaux.
28.Tous les chefs‑lieux de départements ont été érigés en communes depuis 1996. La commune comprend un conseil municipal dirigé par un maire élu parmi les conseillers municipaux eux‑mêmes élus. Leur nombre varie selon l’importance de la population de la commune. La commune de Libreville est divisée en six arrondissements comprenant chacun un conseil municipal élu et dirigé par un délégué du maire élu.
C. Indicateurs socioéconomiques
29.La politique économique du Gouvernement vise à concilier cinq impératifs:
Relance du secteur hors produits pétroliers en poursuivant la libéralisation et la diversification de l’économie, tout en instaurant un climat de confiance avec les milieux d’affaires par la résorption substantielle de la dette intérieure;
Maîtrise générale des dépenses publiques;
Renforcement des mécanismes de gestion et de contrôle budgétaire;
Allégement de la pression fiscale sur les personnes physiques grâce à une révision du barème des taux d’imposition;
Instauration, au profit des entreprises, d’un crédit d’impôts pour la création d’emplois destiné aux jeunes Gabonais.
Tableau 3: Économie
PNB par habitant |
7 750 US$ |
Part du secteur primaire dans le PIB |
50 % |
Branche pétrolière |
39 % |
Agriculture |
6 % |
Bois |
3 % |
Part du secteur secondaire dans le PIB |
12 % |
Part du secteur tertiaire dans le PIB |
27 % |
Encours de la dette en pourcentage du PIB |
90 % |
Service de la dette en pourcentage du budget |
40 % |
Service de la dette en pourcentage des exportations |
20 % |
1. Évolution du PIB
Tableau 4: Évolution du PIB
1995 |
1996 |
1997 |
|
PIB TOTAL PIB hors produits pétroliers PIB de la branche pétrolière |
2 475,20 1 489,50 985,70 |
2 821,80 1 623,00 1 198,80 |
2 954,20 1 757,00 1 197,20 |
Source: DGE
30.L’évolution du PIB obtenue en 1997 a été en grande partie attribuée à la vigueur du secteur hors produits pétroliers bénéficiant de 1996 à 1997 d’une croissance de 8,3 %, à la croissance de 8,5 % de la demande intérieure et au maintien des ventes des grands produits d’exploitation. En revanche, la faible valorisation de la production pétrolière, suite à la baisse du prix du baril, a entraîné en 1997 une stagnation de la contribution de la branche pétrolière.
31.Les emplois du PIB devraient connaître une évolution notable, en particulier les investissements du secteur non pétrolier dont le taux de croissance devrait augmenter de 20,1 %. Les dépenses en biens et services des administrations devraient donner une impulsion à la consommation totale, augmentant de 7,7 % en 1997, malgré la mise en place tardive du budget.
32.Tous ces efforts ont été malheureusement remis en cause depuis la grave crise financière qui a frappé le Gabon en 1999, due principalement à la chute des prix des matières premières et au fardeau important de la dette.
2. Salaires
33.La masse salariale du secteur privé devrait croître de 8 % en raison des glissements catégoriels, de la croissance, et de l’impact sur l’emploi des mesures arrêtées lors des assises dites «concertation 97». Au cours du premier semestre 1997, les indices des prix à la consommation ont observé une évolution constante. L’indice des prix à la consommation des ménages à haut revenu (155 articles) a enregistré une croissance régulière et faible alors que celui des ménages à bas revenu (125 articles) a évolué en dents‑de‑scie.
3. Mesures structurelles
34.Le Gouvernement s’engage à poursuivre et à consolider les mesures mises en œuvre dans le cadre du programme d’ajustement à moyen terme en cours d’exécution.
L’amélioration du cadre juridique et institutionnel
35.En 1997, des actions concrètes ont été réalisées, dont les plus importantes sont:
La réduction du taux de l’impôt sur les sociétés, ramené de 40 à 35 % pour les exercices ouverts à partir du 1er janvier 1997;
Les droits d’engagement des actes et mutations maintenant assujettis à un taux fixe;
La suppression du versement forfaitaire à la charge de l’employeur de la taxe de formation professionnelle prévue par le Code général des impôts directs et indirects depuis le 1er juillet 1997;
L'abrogation de l’ordonnance, n° 28/87 en date du 2 octobre 1987, soumettant les opérations de dédouanement au paiement des frais de traitements informatiques.
36.En 1998, les efforts de gestion de l’économie se sont notamment poursuivis, dans les domaines suivants:
Dans les rapports État‑entreprises. À cet effet, un changement d’état d’esprit doit être insufflé au sein de l’administration pour que ces rapports, souvent perçus comme antagonistes, deviennent complémentaires et coopératifs.
Sur le plan de la gestion économique. Le Gouvernement, avec le concours des institutions de Bretton Woods, s’attelle, depuis la mise en place du Programme d’ajustement structurel, à assainir le cadre macroéconomique et à maintenir de façon durable les équilibres.
37.Dans sa volonté de s’engager résolument dans une stratégie de développement économique et social basée sur l’épanouissement du secteur privé, le Gouvernement a mis en place la Charte des investissements, en 1998.
38.Les objectifs visés par cette Charte portent sur:
La promotion et le traitement des investissements, sans distinction d’origine;
L’Allégement des formalités administratives pour la création d’entreprises par la mise en place d’un guichet unique et d’une agence de promotion des investissements;
L'adaptation du Code du travail au contexte actuel;
L'adaptation de l’éducation et de la formation professionnelle au marché de l’emploi;
L'adaptation des ressources du secteur financier aux besoins des investisseurs.
III. Cadre juridique général
39.La constitution consacre la séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire.
A. Contexte juridique général
1. La Constitution
40.Dans son préambule, la Constitution affirme l’attachement du peuple gabonais aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales tels qu’énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948, la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples de 1981, et la Charte nationale des libertés de 1990.
41.Le juge est notamment le gardien des libertés individuelles et collectives en ce qu’il est le dernier rempart des citoyens contre l’arbitraire et l’injustice. Il n’est soumis, dans l’exercice de ses fonctions, qu’à l’autorité de la loi.
2. Le pouvoir judiciaire
42.Selon l’article 67 de la loi 1/94 du 18 mars 1994, la justice est rendue au nom du peuple gabonais par la Cour constitutionnelle, la Cour judiciaire, la Cour administrative, la Cour des comptes, les cours d’appel, les tribunaux et la Haute Cour de justice.
43.Selon l’article 69 de cette même loi, le Président de la République est le garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire dans le respect des dispositions de la Constitution, notamment son article 36. Il est assisté du Conseil supérieur de la magistrature et des présidents de la Cour judiciaire, la Cour administrative et la Cour des comptes.
3. La Cour judiciaire
44.Selon l’article 73 de la loi 1/94 du 18 mars 1994, la Cour judiciaire est la plus haute juridiction en matière civile, commerciale, sociale et pénale. Elle est divisée en chambres: civile, commerciale, sociale et pénale.
45.Chaque chambre délibère séparément selon son chef de compétence. La Cour Judiciaire peut siéger toutes chambres réunies dans les conditions prévues par la loi. Les arrêts sont revêtus de l’autorité absolue de la chose jugée.
4. La Cour administrative
46.Selon l’article 74 de la loi précitée, la Cour administrative est la plus haute juridiction de l’État en matière administrative. Ses fonctions sont: contentieuses, consultatives, et administratives.
5. La Cour des comptes
47.Selon l’article 76 de cette même loi, la Cour des comptes est chargée du contrôle des finances publiques. À cet effet:
Elle assure le contrôle de l’exécution des lois de finances et en informe le Parlement et le Gouvernement.
Elle vérifie la régularité des recettes et des dépenses décrites dans les comptabilités publiques et s’assure, à partir de ces dernières, du bon emploi des crédits, fonds et valeurs gérés par les services de l’État ou par les autres personnes morales de droit public.
Elle assure la vérification des comptes et la législation des entreprises publiques et organismes à participation financière publique.
Elle juge les comptes des comptables publics.
Elle déclare et apure les gestions de fait.
Elle sanctionne les fautes de gestion commises à l’égard de l’État, par les collectivités locales et les organismes soumis à son contrôle.
6. La Cour constitutionnelle
48.Selon les articles 83 à 87 de cette même loi, la Cour constitutionnelle est la plus haute juridiction de l’État en matière constitutionnelle. Elle est juge de la constitutionnalité des lois et garantit les droits fondamentaux de la personne humaine et les libertés publiques. Elle est l’organe régulateur du fonctionnement des institutions et de l’activité des pouvoirs publics.
49.La Cour constitutionnelle statue obligatoirement sur:
La constitutionnalité des lois organiques, des lois avant leur promulgation, et des actes réglementaires censés porter atteinte aux droits fondamentaux de la personne humaine et aux libertés publiques;
Les règlements de l’Assemblée nationale, du Sénat, du Conseil national de la Communication et du Conseil économique et social avant leur mise en application quant à leur conformité à la Constitution;
Les conflits d’attributions entre les institutions de l’État;
La régularité des élections présidentielles et parlementaires et des opérations de référendum dont elle proclame les résultats.
50.La Cour constitutionnelle est saisie en cas de contestation sur la validité d’une élection, par tout électeur, tout candidat, tout parti politique ou délégué du gouvernement dans les conditions prévues par la loi organique. Les lois organiques sont soumises par le Premier Ministre à la Cour constitutionnelle avant leur promulgation. Les autres catégories de lois, ainsi que les actes réglementaires, peuvent être déférées devant la Cour constitutionnelle, soit par le Président de la République, soit par le Premier Ministre, soit par les présidents des chambres du Parlement ou par un dixième des membres de chaque chambre, soit par les présidents de la Cour judiciaire, de la Cour administrative ou de la Cour des comptes, soit par tout citoyen ou toute personne morale lésée par l’acte querellé.
51.La Cour constitutionnelle statue selon une procédure contradictoire dont les modalités sont fixées par la loi organique, dans le délai d’un mois. Toutefois, à la demande du gouvernement et en cas d’urgence, ce délai peut être ramené à huit jours. Le recours suspend les délais de promulgation des lois ou l’application de l’acte.
52.Une disposition déclarée inconstitutionnelle ne peut être promulguée ou appliquée. Tout justiciable peut, à l’occasion d’un procès devant un tribunal ordinaire, soulever une exception d’inconstitutionnalité à l’encontre d’une loi ou d’un acte qui méconnaîtrait ses droits fondamentaux. Le juge du siège saisit la Cour constitutionnelle par voie d’exception préjudicielle.
53.La Cour constitutionnelle statue dans le délai d’un mois. Si elle déclare la loi incriminée contraire à la Constitution, cette loi cesse de produire ses effets à compter de la décision. Le Parlement examine, au cours de la session suivante, dans le cadre d’une procédure de renvoi, les conséquences découlant de la décision de non-conformité à la Constitution rendue par la Cour.
54.Les engagements internationaux prévus aux articles 113 à 115 de la Constitution doivent être déférés, avant leur ratification, devant la Cour constitutionnelle, soit par le Président de la République, soit par le Premier Ministre, soit par le Président de l’Assemblée nationale ou par un dixième des députés. La Cour constitutionnelle vérifie, dans un délai d’un mois, si ces engagements comportent une clause contraire à la Constitution. Toutefois, à la demande du gouvernement, et en cas d’urgence, ce délai est ramené à huit jours. Dans l’affirmative, ces engagements ne peuvent être ratifiés.
B. Instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme
55.Selon l’article 47 de la Constitution, les dispositions des divers instruments relatifs aux droits de l’homme peuvent être invoquées devant les instances judiciaires et administratives dès lors qu’ils sont ratifiés, même si elles ne sont pas encore reprises dans le droit interne.
DEUXIÈME PARTIE: MISE EN ŒUVRE DE LA CONVENTION AU GABON
I. Mesures générales
56.Conformément à l’article 4 de la Convention, l’État partie, après la ratification de la Convention, doit tout mettre en œuvre pour assurer l’exercice des droits définis par cet instrument international. Il ne peut se dérober sous prétexte de difficultés économiques, mais prendra des mesures nécessaires dans toutes les limites des ressources dont il dispose, et s’il y a lieu dans le cadre de la coopération internationale.
57.À l’époque de la ratification de la Convention, le Gabon disposait déjà d’un certain nombre de mesures et d’actions favorables à l’application de la Convention. Il y a lieu d’énumérer ces mesures et de présenter celles qui sont mises en place pour donner effet à l’application de la Convention.
A. Mesures existantes en faveur de la mise en œuvre de la Convention
1. Au niveau officiel
58.On trouvera des détails aux paragraphes qui traitent du cadre juridique et administratif du pays.
2. Au niveau privé
59.Plusieurs ONG et associations régies par la loi n° 35/62 du 10 décembre 1962 œuvrent en faveur de la protection de l’enfant, parmi lesquelles:
-l’Association des femmes juristes Gabonaises,
-l’Association pour la défense des droits de la femme et de l’enfant,
-l’Association des droits de l’homme,
-l’Association de l’homme «Plus»,
-légitime défense,
-la Ligue gabonaise des droits de l’homme,
-le Club UNESCO des droits de l’homme,
-SOS Mwana,
-Caritas (arc-en-ciel),
-l’Association des femmes éducatrices du Gabon,
-l’Association des parents et amis d’enfants inadaptés du Gabon,
-l’Association des filles mères (Maternité Responsable),
-l’Association Cose Enfants,
-le Département de la communication (presse, radio, télévision et autres médias).
B. Mesures et mécanismes mis en place pour l’application de la Convention
60.L’article 177 du Code du travail (loi n° 3/94 du 21 novembre 1994) dispose que les enfants ne peuvent être employés dans aucune entreprise avant l’âge de 16 ans, sauf dérogation édictée par décret pris sur proposition conjointe des Ministères du travail, de la santé et de l’éducation nationale, compte tenu de circonstances particulières.
61.Aujourd’hui on observe une augmentation du nombre d’enfants travaillant avant l’âge de 16 ans de manière informelle. Certains enfants travaillent à leur propre compte, et à leur rythme (laveurs de voiture, gardiens sur les parkings), mais d’autres sont malheureusement exploités par des adultes. C’est notamment le cas des enfants victimes de trafic (Bénin, Togo, Nigéria). Le Gouvernement gabonais a mis sur pied un comité composé de plusieurs départements ministériels pour trouver les moyens visant à éradiquer ce fléau qui ne fait pas partie de la culture gabonaise.
62.L’ordonnance n° 001/95, qui porte sur l’orientation de la politique de l’État gabonais en matière de santé, retient comme priorité la protection de la mère et de l’enfant, ainsi que l’hygiène et la prévention.
63.Dans la réalité, il existe un décalage entre certains hôpitaux qui disposent d’équipements de pointe et les centres de santé mal équipés. C’est pourquoi un plan national d’action sanitaire a été élaboré en 1997 en vue de revoir la politique nationale en matière de santé. Un comité national de lutte contre le sida et les MST a été organisé par décret présidentiel. Il se compose des organes suivants:
-un comité mixte de suivi,
-un comité d’éthique,
-un programme national de lutte contre le sida et les maladies sexuellement transmissibles qui est administré par un bureau de coordination.
Il existe également des comités départementaux qui sont des organes d’exécution.
64.Depuis sa ratification en 1994, les dispositions de la Convention peuvent être invoquées devant les instances judiciaires et administratives. Un projet de loi définissant certaines mesures de protection sanitaire de la femme, de la mère et de l’enfant est au parlement pour adoption.
65.Le programme de coopération mis en place avec les institutions spécialisées de l’ONU regroupe plusieurs projets et connaît de nombreuses réalisations.
II. Définition de l’enfant
66.Selon l’article premier de la Convention, il faut entendre par «enfant» tout être humain âgé de moins de 18 ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable.
67.Cependant, ni la Convention, ni la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant, à laquelle le Gabon a adhéré, n’indiquent où commence l’enfance. Est-ce à la conception ou entre celle-ci et la naissance? La Convention ne prend malheureusement pas non plus position sur l’avortement.
68.Néanmoins, pour le Gabon, la protection prévue par la Convention concerne l’enfant dès la conception. On peut féliciter la Charte africaine d’avoir été très précise en fixant l’âge de l’enfant à moins de 18 ans, sans autre modification susceptible de ruiner l’économie du principe énoncé.
69.En effet, qu’adviendra-t-il si une législation fixe cet âge à 10 ou 12 ans? Ou encore, comme nous allons le constater pour le Gabon, pour un pays où l’âge de la majorité civile est fixé à 21 ans? Il y a lieu d’indiquer ici l’âge auquel sont acquis ou perdus certains droits ou protections. La législation gabonaise parle de minorité et de majorité en se référant à un âge différent selon que l’on se trouve dans le champ d’application du droit civil, du droit pénal ou du droit social.
A. En matière civile
70.La législation gabonaise définit l’enfant dans les termes suivants: le mineur ou l’individu de l’un ou de l’autre sexe qui n’a point encore l’âge de 21 ans accomplis (art. 492 du Code civil).
1. Mariage
71.La notion de mariage diffère selon qu’il s’agira de la conception traditionnelle ou de la législation civile. Dans la conception traditionnelle, la protection matrimoniale de l’enfant voulait que le mariage ne soit pas l’affaire du couple proprement dit, mais que ce soient les parents ou la famille qui choisissent des époux pour leurs enfants, quels que soient leurs âges. C’est ainsi que des enfants âgés de 10 ans pouvaient être mariés. La fillette, confiée à la famille du garçon, grandissait avec lui.
72.Sur le plan civil, les hommes ne peuvent pas contracter de mariage avant 18 ans révolus, et les femmes avant d’avoir 15 ans révolus (art. 203 du Code civil). Néanmoins, le Président de la République peut accorder des dispenses d’âge pour des motifs graves. En ce qui concerne les aliénés, ils ne peuvent se marier que dans un intervalle de lucidité, avec l’autorisation du tuteur et après avis favorable d’un psychiatre, ou à défaut, d’un médecin (art. 204).
2. Rapports familiaux
73.L’enfant mineur bénéficie d’une protection spéciale dans les relations matrimoniales et les autres formes de rapports familiaux.
3. Consentement parental
74.Même si les conditions d’âge sont réunies, le jeune homme ou la jeune fille n’ayant pas atteint l’âge de 21 ans révolus ne peuvent contracter de mariage sans le consentement de ses père et mère ou de ses tuteurs (art. 205 du Code civil).
B. En matière pénale
75.Les mesures relatives au jugement des infractions commises par des mineurs varient en fonction de l’âge de l’enfant.
1. En cas d’infraction
76.Un enfant âgé de moins de 13 ans n’est pas responsable pénalement, quelle que soit la gravité des faits commis (art. 56 du Code pénal; art. 145 du Code de procédure pénale qui interdit l’emprisonnement de l’enfant de cet âge).
77.Le mineur âgé de 13 à 18 ans fera l’objet d’un mandat de dépôt, c’est-à-dire qu’il sera placé dans un quartier spécial au sein des établissements pénitentiaires (art. 60 du Code pénal), ou sera confié par le juge à toute personne ou institution de son choix qui en conservera la garde jusqu’à la décision du tribunal (art. 57 du Code pénal). Le mineur peut se faire assister d’un avocat pendant la procédure, jusqu’à son jugement. Les dispositions de la loi n° 9/83 du 31 décembre 1983 relative à la détention préventive sont valables pour le mineur.
2. Consentement sexuel (viol)
78.La Convention recommande aux États de protéger l’enfant contre la violence et l’exploitation sexuelle, y compris la prostitution et la participation à toute production pornographique (art. 34 de la Convention). La sexualité restant un sujet tabou dans les mœurs gabonaises, en règle générale, les jeunes ne discutent pas, ou très peu, avec leurs parents de leurs premières expériences sexuelles ou même de leur sexualité.
79.Dans le cadre du droit pénal, «tout acte sexuel avec un mineur de moins de 15 ans est sanctionné par la loi» (art. 256) et tout détournement de mineur de moins de 16 ans est passible de peines d’emprisonnement avec amende (art. 279).
C. En matière d’emploi et de travail
80.Voir l’article 24 de la Convention relatif au travail des enfants (mesures d’exploitation).
D. Service civique/enrôlement dans l’armée et participation aux hostilités armées
81.L’article 38 de la Convention énonce que les États parties prennent toutes les mesures possibles dans la pratique pour veiller à ce que les personnes n’ayant pas atteint l’âge de 15 ans ne participent pas directement aux hostilités. Lorsqu’ils incorporent des personnes âgées entre 15 et 18 ans, ils s’efforcent d’enrôler en priorité les plus âgées. La législation gabonaise prévoit l’enrôlement dans les forces armées à partir de 20 ans révolus (loi n° 004/98 du 20 février 1998 portant sur l’organisation générale de la défense nationale et de la sécurité publique). Cet enrôlement n’a pas un caractère obligatoire, le pays n’ayant jamais été en conflit armé.
E. En matière de scolarité
82.En conformité avec l’article 40 de la Convention, la législation gabonaise, dans sa loi n° 16/66 du 9 août 1966 portant sur l’organisation générale de l’enseignement, définit les principes fondamentaux qui déterminent le fonctionnement du système éducatif dont, entre autres, la gratuité de l’école, l’obligation d’être scolarisé(e) de 6 à 16 ans et l’égalité des chances entre les enfants des deux sexes.
83.Cependant, force est de constater que malgré ce cadre juridique avantageux pour les enfants, il en est tout autrement dans la pratique. L’école n’est en effet pas véritablement gratuite pour tous les enfants car les dispositions de la politique en matière d’éducation ne sont pas respectées.
III. Principes généraux
84.La Convention est indivisible et ses articles sont interdépendants. Cependant, chaque article définissant les droits de l’enfant doit tenir compte des principes généraux de la Convention qui sont au nombre de quatre, à savoir:
-la non-discrimination (art. 2),
-l’intérêt supérieur de l’enfant (art. 3),
-la vie, la survie et le développement (art. 6),
-la participation de l’enfant et le respect de ses opinions (art. 12).
85.Quatre principes fondamentaux sous-tendent la philosophie qui est à la base de la Convention. Le droit à la vie, à la survie et au développement est indispensable pour l’application des autres droits. L’intérêt supérieur de l’enfant doit également guider les actions impliquant le sort de l’enfant car c’est un être vulnérable dont la personnalité est encore malléable et éducable. Enfin, le droit d’exprimer librement ses opinions et de participer aux décisions qui intéressent l’enfant doit être sauvegardé car, ce dernier n’est pas seulement un objet de droit, c’est également un sujet qu’il faudra progressivement amener à devenir responsable face à ses droits et obligations.
A. La non-discrimination
86.Le droit à la non-discrimination constitue une priorité qui accompagne l’application des autres droits visant à assurer l’égalité de tous dans la jouissance des droits prévus par la Convention. Selon l’article 2, tous les droits s’appliquent à tous les enfants sans exception. L’État a l’obligation de protéger l’enfant contre toute forme de discrimination, et de prendre des mesures positives pour favoriser le respect de ces droits.
87.Le terme «discrimination» utilisé dans la présente Convention s’entend de toute discrimination, exclusion, restriction, préférence fondées notamment sur la race, la couleur, le sexe, la religion, la langue, les opinions politiques, religieuses ou autres, l’origine nationale, ethnique ou sociale, la fortune, la naissance, l’incapacité physique ou mentale et toute autre situation ayant pour effet ou pour but de compromettre ou de détruire la reconnaissance ou l’exercice pour tous, dans des conditions d’égalité, de l’ensemble des droits de l’homme et des libertés fondamentales (Manuel d’application de la Convention relative aux droits de l’enfant, UNICEF, Genève, 1999).
88.Le principe de la non-discrimination ne s’oppose pas à une différenciation (personnalisation) du traitement de chaque enfant. Il existe dans tous les pays du monde diverses catégories d’enfants qui vivent dans des situations défavorables ou de «risque social». Ces enfants, appelés également inadaptés, ont besoin d’une aide spéciale, d’une attention ou de mesures spécifiques en vue de supprimer ou d’atténuer les conditions défavorables qui font que la discrimination se perpétue. Ce principe conditionne donc l’exercice des autres droits prévus par la Convention. C’est pourquoi, l’État a l’obligation de protéger l’enfant contre toute forme de discrimination et de prendre les mesures positives pour valoriser le respect de ses droits.
89.En ce qui concerne le Gabon, l’alinéa 2 de l’article 2 de la Constitution est conforme à l’article 3 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant ainsi qu’au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, car elle stipule l’égalité de tous les citoyens devant la loi, sans discrimination. À titre d’exemples, en matière de reconnaissance de l’enfant, le nouveau Code civil gabonais ne fait plus de discrimination entre les enfants naturels, adultérins et incestueux (art. 671 du Code civil). De même, la loi n° 19/95 du 13 février 1996 se référant à la protection sociale des personnes handicapées renferme des mesures de protection à l’égard des enfants handicapés et détermine, au même titre que les autres enfants, les conditions de traitement qui leur sont propres.
90.Cependant, malgré la conformité de la législation gabonaise avec le droit international en matière de droits de l’enfant, on note, dans la pratique, certaines formes de discrimination. C’est le cas notamment pour l’âge du mariage qui est fixé à 15 ans pour les filles et 18 ans pour les garçons. Il faut également noter qu’une fois mariées, les filles ne bénéficient plus de la protection accordée par la Convention. De plus, au niveau scolaire, malgré un taux brut de scolarité très élevé (142 % dans le primaire), le taux net est très faible (86 %), et cette déperdition touche davantage les filles que les garçons. C’est l’une des raisons qui empêche les femmes d’accéder aux postes de responsabilité.
91.Les conditions économiques défavorables, ainsi que certaines habitudes culturelles, continuent de perpétuer des formes de discrimination. C’est le cas d’enfants «de la rue» et d’enfants handicapés qui, bien que protégés par la loi, continuent de faire l’objet de discrimination sociale et d’être rejetés.
B. Intérêt supérieur de l’enfant
92.La prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale dans toutes les décisions concernant l’enfant. Les autorités judiciaire et administrative, ainsi que les intervenants en matière de protection de l’enfant doivent systématiquement s’en préoccuper.
93.Le concept d’intérêt supérieur de l’enfant prendra toute sa signification chaque fois qu’une disposition spécifique prévue par la Convention ne peut s’appliquer. C’est ainsi qu’en cas de conflit de loi (par exemple entre le droit écrit et le droit coutumier), il est recommandé d’appliquer à l’enfant la loi qui sauvegarde son intérêt supérieur.
94.Dans la législation nationale, la Constitution fait des soins à donner aux enfants et de leur éducation un droit naturel et un devoir que les parents exercent sous la surveillance et avec l’aide de l’État et des collectivités publiques (art. 1er, al. 16). Le Code civil, dans ses articles 273 à 275, précise également que le juge doit tenir compte de l’intérêt de l’enfant lorsqu’il statue sur la garde de celui-ci en cas de séparation de corps ou de divorce des parents.
95.En ce qui concerne les progrès réalisés dans la politique sociale, le Département des affaires sociales mène une politique sociale et une action globale où les enfants occupent une place prépondérante. Cette action prend différentes formes, à savoir:
-l’aide sociale grâce à l’octroi de secours aux familles,
-la préscolarisation des jeunes enfants de 0 à 5 ans,
-la survie et le développement des enfants grâce à l’initiation des mères de famille à des notions de puériculture, d’hygiène et de nutrition,
-la lutte contre les grands fléaux sociaux qui ont une incidence sur la vie des enfants,
-la réinsertion sociale: placement provisoire ou définitif dans des familles d’accueil pour les enfants abandonnés ou maltraités (voir par exemple la décision n° 0052/MASSNCRA/SG/DGAS/DASSASS du 5 mai 1992 créant une commission de placement pour les enfants abandonnés).
96.Pour ce qui est des obstacles rencontrés, et bien qu’il ressorte que dans toutes les législations mentionnées ci-dessus l’intérêt supérieur de l’enfant est vivement affirmé, il faut noter que le manque d’institutions et de structures spécialisées, l’héritage culturel ainsi que des pratiques religieuses rétrogrades constituent des freins à l’application de la politique de l’État en la matière.
C. Vie, survie et développement
97.Dans le préambule de la Déclaration des droits de l’enfant proclamée par l’Assemblée générale de l’ONU le 20 novembre 1959, dans sa résolution 1386 (XIV), il est dit que l’enfant, en raison de manque de maturité physique et intellectuelle, a besoin d’une protection spéciale et des soins spéciaux.
98.La Convention garantit le droit fondamental de l’enfant à la vie et le reconnaît comme un principe universel du droit international humanitaire, de même que le droit à la survie et au développement dans toute la mesure possible est essentiel pour l’application de la Convention tout entière.
99.On ne peut parler de survie et de développement d’une personne que lorsqu’elle vit. Les concepts de survie et de développement ont une signification large qui fait référence à plusieurs autres droits énoncés dans la Convention. Certaines dispositions de la Convention traitent en effet du rôle des parents dans le développement et le bien être de l’enfant et de l’obligation de l’État de les soutenir (art. 18). D’autres articles portent sur la santé, l’éducation, l’exploitation de l’enfant, les violences et les tortures ainsi que sur les mesures de reclassement, le suivi et le contrôle de leur application et définissent en détail la signification du principe «vie, survie et développement».
100.Au Gabon,les droits de l’enfant sont protégés par la Constitution, le Code civil et le Code pénal. Dans la Constitution, les alinéas 1 et 8 de l’article 1er traitent du droit au libre développement de la personnalité et garantissent le droit à la santé et à un environnement naturel préservé.
101.Dans le Code civil, l’article 78 traite du droit à la vie et dispose que la personne humaine est sujette de droit à partir de sa naissance jusqu’à sa mort; l’article 79 note cependant que chaque fois que son intérêt l’exige, l’enfant simplement conçu est sujet de droit, pourvu qu’il naisse vivant et viable.
102.Dans le Code pénal, toute atteinte à la vie de l’enfant est sanctionnée dans les articles 223 à 229, les homicides, les blessures involontaires et la non-assistance à personne en danger sont sanctionnés aux articles 223 à 229 et 246 à 249 et l’article 244 du même Code préserve la vie de l’enfant avec des sanctions contre l’avortement.
103.La contraception est par contre interdite par l’ordonnance n° 64/69 du 4 octobre 1969, sauf pour des raisons thérapeutiques. Cependant, une nouvelle loi libéralisant la contraception est en cours de promulgation afin d’être en conformité avec l’esprit de la Charte nationale des libertés, de 1990.
104.La maltraitance physique et morale est sanctionnée par les articles 271 à 281 du Code pénal. On note aussi une aggravation des peines pour les infractions commises sur la personne d’un enfant de moins de 15 ans. Par exemple, le viol est puni de la réclusion criminelle lorsqu’il est commis sur un enfant de moins de 15 ans (art. 256 du Code pénal).
Progrès réalisés
105.Le Gabon reconnaît le droit à la vie de l’enfant et le protège dès sa conception du fait d’une politique nataliste ambitieuse qui est due à sa faible démographie. Pour garantir la vie de l’enfant et de la mère, l’État envisage un meilleur encadrement juridique qui se traduit par une nouvelle loi en cours de promulgation qui libéralise la contraception, organise le planning familial et crée des mesures de protection spéciales pour les intéressés.
Obstacles rencontrés
106.La répression de l’avortement a eu des conséquences perverses sur les jeunes filles mineures qui se sont traduites par des décès de mères et d’enfants au cours d’avortements clandestins, traditionnels (utilisation de potions magiques) ou modernes (absorption extrapharmaceutique).
D. Respect des opinions de l’enfant (art. 12)
107.Le premier paragraphe de l’article 12 de la Convention demande aux États de garantir que tout enfant capable de discernement ait le droit d’exprimer librement son opinion sur toutes questions le concernant et que les opinions des enfants soient dûment prises en considération eu égard à leur âge et à leur degré de maturité. Le second paragraphe, quant à lui, spécifie qu’il faut donner à l’enfant la possibilité d’être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative l’intéressant.
108.La Convention veut que l’enfant soit considéré comme un sujet de droit actif. Respecter l’opinion de l’enfant ne signifie pas qu’on lui donne le droit à l’autodétermination mais qu’on lui reconnaît le droit de participer à la prise de décisions le concernant. Ainsi l’enfant peut se protéger contre certains abus des autorités (juges, parents, éducateurs …) qui s’occupent de son orientation ou de sa participation.
109.Dans la législation gabonaise, la Constitution garantit cette liberté en l’alinéa 2 de son article 1er relatif à la liberté de conscience, d’opinion, d’expression, de communication. Il en est de même pour le Code civil dans le domaine du mariage, notamment les articles 205 à 212, et pour le Code pénal en matière de protection de l’opinion de l’enfant, lors des procès.
110.Dans la pratique, il y a lieu de signaler qu’en cas de maltraitance ou d’incarcération, ou pour déterminer à quel parent va être accordée la garde de l’enfant en cas de séparation, le tribunal demande au Service social de protection de la jeunesse d’entendre l’enfant pour requérir son opinion.
111.Il existe dans les faits certains obstacles. Les parents ont en effet tendance à dicter aux enfants la conduite à tenir. Ceci est dû à l’influence de la coutume qui proscrit la liberté de pensée et de conscience dans la vie familiale. Notons cependant que le droit à la liberté d’opinion des enfants varie selon l’origine sociale des parents. Dans certaines familles, la possibilité de décider n’est pas reconnue aux enfants. Cette attitude est une mauvaise interprétation de l’alinéa 16 du titre premier de la Constitution gabonaise qui autorise les parents à diriger l’éducation religieuse et morale de l’enfant. Il importe de favoriser, de vulgariser et de souligner l’importance de la pratique de la communication et du dialogue entre parents et enfants afin de bannir les tabous.
IV. Droits civils et libertés
112.Cette rubrique traite des aspects des droits de l’enfant relatifs:
au nom et à la nationalité (art.7 de la Convention),
à la préservation de l’identité (art.8),
à la liberté d’expression (art.13 ),
à la liberté de pensée, de religion et de conscience (art. 14),
à la liberté d’associations et de réunions pacifiques (art.15),
à la protection de la vie privée (art.16),
à l’accès à l’information appropriée (art. 17),
au droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (art.37).
A. Identification de l’enfant
113.Les articles 7 et 8 de la Convention portent sur le droit de l’enfant à un état civil (nom et nationalité) et sur le droit de préserver cette identité et de bénéficier d’une assistance de l’État pour que cette identité soit préservée ou, le cas échéant, établie. Ils portent également sur le droit qu’a l’enfant de connaître ses parents et d’être élevé par eux.
1. Droit au nom
114.Les articles 93 à 111 du Code civil gabonais traitent du nom. Ainsi, tout Gabonais doit avoir un nom auquel s’ajoutera celui de son père et éventuellement un ou plusieurs prénoms (art. 93). Le législateur gabonais s’entoure de toutes les précautions pour que l’enfant, quelles que soient les conditions de sa naissance ou le statut de ses parents, puisse avoir un nom.
115.Si l’enfant est légitime, ou naturel reconnu par son géniteur, il porte le nom de son père si ce nom est héréditaire ou si le père en a décidé ainsi (art. 94, al. a). Dans le cas contraire, l’attribution du nom se fait conformément à la coutume (art. 94b, al. b.). En cas de désavœu, le nom de l’enfant sera choisi par sa mère (art. 94, al. c.). Tout enfant légitime, ou naturel reconnu, né de père étranger devra porter un nom gabonais donné par sa mère, adjoint à celui de son père (art. 94 c.). Si l’enfant n’est pas reconnu par son géniteur, il portera le nom de sa mère (art. 95) dans les conditions fixées à l’article 94. L’adoptant peut, s’il a un intérêt légitime, être autorisé à ajouter son nom à celui de l’adopté (art. 97).
116.Toutefois, si une mineure se marie, elle conserve son nom patronymique et pourra y adjoindre celui de son mari (art. 98). Le ou les prénoms des enfants sont déclarés par les parents à l’officier de l’état civil, ou par ce dernier lorsqu’une filiation n’a pas été établie (art. 99). Il n’y a pas de restriction à la réception par les officiers publics des prénoms même si ceux-ci ne sont pas consacrés par les us et coutumes (art. 102). Le changement de nom d’une personne peut être autorisé par le Président de la République s’il y a juste motif (art. 101). Ce changement s’étend de plein droit, s’il y a lieu, aux enfants mineurs de celui-ci après rectification des actes de l’état civil les concernant (art. 102).
117.Le nom ou le prénom ne s’acquiert ni ne se perd par prescription et toute convention relative au nom est nulle et sans effet, sous réserve des règles relatives aux noms commerciaux, aux enseignes et aux marques de fabrique (art. 104 et 105). La preuve du nom et des prénoms résulte des actes de l’état civil (art. 106). Les articles 108 à 111 précisent que l’usage et le port d’un nom doit être protégé. À ce titre, toute personne peut exiger d’être désignée sous ses noms et prénoms réguliers. De même, le porteur d’un nom peut s’opposer à ce que celui-ci soit utilisé d’une façon abusive ou usurpé par un tiers. En cas d’atteinte à ces droits, le titulaire du nom peut demander au tribunal de faire cesser le trouble et demander des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.
2. Droit à la nationalité
118.L’article premier du Code de la nationalité dispose que la nationalité gabonaise est le lien de droit qui, depuis le 17 août 1960, date de l’accession du Gabon à la souveraineté internationale, rattache les individus à l’État gabonais (par. 1). En conséquence, tous ceux qui ont la nationalité gabonaise l’ont au même titre (par. 3).
119.Toutefois il existe des restrictions légales en matière électorale, notamment pour les personnes d’origine étrangère qui ne peuvent se présenter aux fonctions électives qu’au bout de dix ans (ancien Code, le nouveau Code étant en voie d’adoption).
120.Les dispositions relatives à la nationalité contenues dans les traités ou accords internationaux dûment ratifiés et publiés, prévalent sur la loi portant code de la nationalité et sont applicables alors même qu’elles lui seraient contraires (art. 2, al. 3).
a)Attribution de la nationalité gabonaise à titre de nationalité d’origine
121.L’obtention de la nationalité gabonaise à titre de nationalité d’origine est valable pour toute personne née au Gabon ayant un des parents au moins de souche gabonaise, à l’exception des enfants des agents diplomatiques ou des consuls de nationalité étrangère et pour toute personne dont, au jour de la naissance et quel qu’en soit le lieu, un des parents au moins a la nationalité gabonaise. Cette disposition s’applique aux personnes nées postérieurement au 17 août 1960 (art. 9, al. 1 et 2).
122.A acquis la nationalité gabonaise au 17 août 1960 à titre de nationalité d’originetoute personne qui, à cette date était domiciliée au Gabon ainsi que son conjoint et leurs enfants, (art. 10, al. 1), toute personne, même non domiciliée au Gabon à cette date, qui est née d’un parent au moins de souche gabonaise (art. 10, al. 2), ainsi que l’enfant nouveau-né, trouvé au Gabon qui est présumé, jusqu’à preuve du contraire, être né au Gabon (art. 12).
b)Attribution par voie de reconnaissance
123.Peuvent se faire reconnaître la nationalité gabonaise à titre de nationalité d’origine:
-les personnes nées au Gabon et dont aucun des deux parents n’est de souche gabonaise,
-les personnes nées au Gabon d’agents diplomatiques ou de consuls de carrière de nationalité étrangère,
‑les personnes nées au Gabon ou dont un des parents au moins est de nationalité gabonaise, par application de l’article 10,
‑les personnes nées dans un État ou territoire ayant avec le Gabon une frontière commune ou dans une île située, en mer, à moins de 400 miles du Gabon,
‑les personnes qui n’ont perdu la nationalité gabonaise d’origine que par l’effet d’une renonciation faite en leur nom, durant leur minorité,
‑les personnes qui, ayant été recueillies au Gabon avant l’âge de 15 ans, y ont été élevées soit par l’assistance publique, soit par une personne de nationalité gabonaise, soit par un étranger ayant, au Gabon, sa résidence habituelle (article 14).
c)Acquisition de la nationalité par les faits de l’adoption
124.L’enfant mineur, adopté par une personne de nationalité gabonaise, acquiert cette nationalité lors de l’adoption (art. 19). De même, les enfants mineurs, même adoptés, d’individus réintégrés ou naturalisés dans la nationalité gabonaise, en application des articles 21 et 23 du Code de la nationalité, acquièrent ou retrouvent, s’il y a lieu, la nationalité gabonaise à la date d’effet de cette réintégration ou de cette naturalisation (art. 20).Au regard de ces dispositions du Code de la nationalité, il est ainsi démontré que l’enfant né au Gabon, ou ne fut-ce que d’un parent gabonais, peut jouir de la nationalité gabonaise et de tous les droits qui s’y rattachent.
3. L’état civil de l’enfant
a)La déclaration de naissance
125.Selon l’article 169 du Code civil, la déclaration de naissance est faite à l’officier d’état civil dans les trois jours suivant l’accouchement pour les enfants nés dans les communes et les chefs-lieux de district, et dans le délai d’un mois pour les enfants nés dans les autres localités. Cette déclaration peut être faite, à défaut des pères et mères ou de leurs représentants, par le médecin, ou la sage‑femme ayant assisté à la naissance. Elle précise le sexe, la date, l’heure, le lieu de naissance, les noms et prénoms de l’enfant, de ses parents et du déclarant, ainsi que la profession de ces derniers (art. 167 à 170 du Code civil). Les chefs des agglomérations rurales (chefs de village, de regroupement et de canton) doivent veiller à ce que les naissances survenues dans leurs circonscriptions soient déclarées au centre d’état civil le plus proche, dans les délais prévus par le Code civil ( art. 170, al. 2 ).
126.En cas de naissance survenue dans un navire de la marine gabonaise ou dans un aéronef gabonais, il en est dressé acte par les commandants de ce navire ou de cet aéronef. Les actes doivent être ensuite remis pour transcription à l’officier de l’état civil du premier arrondissement de la capitale (art. 174 du Code civil).
b)Enfant trouvé
127.Toute personne qui aura trouvé un enfant nouveau-né est tenu d’en faire la déclaration à l’officier de l’état civil du lieu de la découverte. Il est dressé un procès verbal détaillé qui, outre les indications prévues à l’article 154 du Code civil, précisera la date, l’heure, le lieu et les circonstances de la découverte, l’âge apparent et le sexe de l’enfant, toute particularité pouvant contribuer à son identification, ainsi que l’autorité ou la personne à laquelle il est confié. Ce procès-verbal daté, est inscrit sur le registre de l’état civil (art. 171, al. 2). C’est à la suite de ces indications que l’officier de l’état civil établit un acte tenant lieu d’acte de naissance.
c)Enfant gabonais né à l’étranger
128.L’acte de naissance concernant un Gabonais né à l’étranger est dressé hors du Gabon par une autorité publique étrangère et transcrite, soit d’office, soit sur la demande des parents de l’enfant, par les agents diplomatiques ou consulaires du Gabon territorialement compétents sur les registres de l’état civil tenus par ces derniers (art. 159, al. 1).
129.Lorsqu’un enfant n’a pas été déclaré dans un délai légal, l’officier d’état civil ne peut le relater qu’en transcrivant un jugement du tribunal civil contenant les énonciations relatives à la déclaration de naissance (jugement supplétif). Le tribunal et l’officier de l’état civil compétents sont ceux du lieu de naissance de l’intéressé (art. 172, al. 1). Si ce lieu est connu, le tribunal compétent est celui du domicile du requérant et ce tribunal décide le lieu où le jugement sera transcrit (art. 172, al. 2). Si la date de naissance est certaine ou présumée, mention du jugement est faite à cette date en marge des registres de l’état civil (art. 172, al. 3).
130.Le jugement ordonnant que l’enfant adopté cesse d’appartenir à sa famille d’origine tient lieu de jugement déclaratif de naissance. Il doit contenir toutes les énonciations relatives aux actes de naissance (art. 173).
131.Cependant, l’application de ces dispositions rencontre plusieurs obstacles, qui sont les suivants:
-le coût du jugement supplétif, qui décourage certains parents de déclarer leur enfant s’ils ne l’ont pas fait dans le délai légal,
-l’éloignement des centres de déclaration des naissances par rapport à la résidence des parents,
-la méconnaissance des délais légaux de déclaration,
-la méconnaissance de l’importance et de l’obligation de la déclaration d’un enfant.
132.Beaucoup d’enfants étrangers n’ont pas de pièces d’identité pour cause d’entrée clandestine au Gabon et de négligence de leurs parents. Il arrive également qu’en cas de séparation des parents, l’un des parents confisque les pièces d’identité de l’enfant.
4. La filiation
133.La filiation est le lien unissant les parents et les enfants. Elle peut être légitime (art. 391 du Code civil), naturelle (art. 414), adultérine et incestueuse (art. 435 et 436). Lorsqu’elle est légitime, elle se prouve par le mariage des pères et mères (art 393 du Code civil), par l’acte de naissance ou par la possession continue de l’état d’enfant légitime (art. 395 du Code civil). Lorsqu’elle est naturelle, adultérine ou incestueuse, elle se prouve par l’acte de naissance ou par la reconnaissance faite par le père et la mère (art. 414, 415 et 435 du Code civil).
134.Il faut noter que tous les enfants nés hors mariage, même incestueux ou adultérins, sont légitimés par le mariage subséquent de leurs père et mère lorsque leur filiation a été légalement établie avant le mariage, ou lorsque leurs père et mère les reconnaissent au moment de la célébration du mariage (art. 438 du Code civil).
135.Tout intéressé peut, par tous moyens de preuves, contester la filiation naturelle résultant d’un acte de naissance, d’une reconnaissance ou d’une possession d’état (art. 434 du Code civil). Les actions en recherche de maternité et de paternité sont ouvertes dans le but de protéger l’enfant qui a droit à une famille. Ainsi, elles s’exercent, lorsque l’enfant est mineur, par les représentants de l’enfant et en son nom (art. 429 du Code civil).
136.Cependant l’action en recherche de paternité n’est pas recevable s’il est établi médicalement, ou par tout autre moyen de preuve, que le père recherché n’en est pas un (art. 428 du Code civil). Elle doit être intentée dans les deux années qui suivent la naissance de l’enfant, ou si la mère et le père prétendu ont vécu en concubinage, ou si le père prétendu a pendant un temps contribué à l’entretien de l’enfant, dans l’année qui suit, soit la fin du concubinage, soit la fin de cette contribution (art. 432). Si l’action n’est pas intentée pendant la minorité de l’enfant, celui-ci ne peut l’intenter que pendant les deux années qui suivent sa majorité, ou pendant les deux années qui suivent le jour où le jugement de désavœu le prive de sa filiation paternelle, ou le jour où sa filiation maternelle est établie (art. 432, al. 2). L’action en recherche de paternité ou de maternité est débattue en Chambre du conseil. Seul le jugement est lu en audience publique (art. 433).
5. Les relations familiales
137.Il ressort des dispositions des articles 9 et 10 de la Convention que l’enfant a le droit de vivre avec ses parents, à moins que cela ne soit jugé incompatible avec son intérêt supérieur. Il a également le droit de maintenir des contacts avec ses deux parents s’il est séparé de l’un d’entre eux, ou des deux.
138.De plus, l’enfant et ses parents ont le droit de quitter tout pays et d’entrer dans le leur aux fins de la réunification de la famille ou du maintien des relations entre les membres de celle-ci. Dans la législation nationale, la Constitution consacre l’importance des relations familiales dans 1’alinéa 14 de l’article premier.
139.Dans le Code civil, les articles 493 et 494 disposent que l’enfant, à tout âge, doit respect et honneur à ses père et mère et autres ascendants, tout comme ces derniers sont tenus de l’entretenir et de l’élever jusqu’à sa majorité ou son émancipation. L’article 501 du même Code précise que l’enfant doit entretenir des relations avec ses père et mère et autres ascendants.
140.Dans le Code pénal, l’article 271 sanctionne l’abandon de famille par les parents, l’abandon d’une femme enceinte ainsi que la non-représentation d’un enfant (art. 280 du Code pénal).
B. La liberté d’expression
141.L’article 13 de la Convention confirme le droit à la liberté d’expression qui a été garantie à chaque individu par la Déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789. L’enfant a aussi le droit de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées sous réserve du respect de l’ordre public.
142.La Constitution gabonaise, en conformité avec cet article de la Convention, dispose dans l’alinéa 2 de son article premier que la liberté de conscience, de pensée, d’opinion, d’expression, de communication, et la libre pratique de la religion sont garanties à tous, sous réserve du respect de l’ordre public.
143.On constate qu’au Gabon l’enfant, de par la tradition, n’a pas souvent droit à la parole. Cette situation tend néanmoins à évoluer. Il y a donc lieu d’organiser et d’augmenter des moyens multimédias qui donnent la parole aux enfants, à l’exemple du Parlement des enfants initié par l’Assemblée nationale.
C. Liberté de pensée, de conscience et de religion
144. Ce droit, énoncé à l’article 14 de la Convention, implique, comme le définit le Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1976, la liberté d’adopter une religion ou d’avoir une conviction de son choix, tant en public qu’en privé, comme par exemple la liberté d’accomplir certaines pratiques et certains rites traditionnels.
145.La Constitution gabonaise, dans les alinéas 2 et 4 de son article premier, garantit ces libertés sous réserve du droit des parents de décider, dans le cadre de l’obligation scolaire, de l’éducation morale et religieuse de l’enfant. La liberté de culte est garantie par la loi n° 35/62 du 10 décembre 1962 sur les associations. Sur le plan pratique les enfants adhèrent aux religions de leurs parents jusqu’à ce qu’ils soient majeurs. On note cependant une évolution au niveau des églises dites «éveillées» auxquelles les enfants adhèrent parfois sans s’en référer à leurs parents. Il y a tout de même lieu de renforcer la réglementation en matière de reconnaissance des associations religieuses.
D. La liberté d’association
146.Ce droit, exercé à l’article 15 de la Convention, souligne la participation active des enfants à la société et fait écho à l’article 12 de la Convention qui porte sur le droit de l’enfant d’exprimer librement ses opinions. Les seules restrictions applicables concernent le respect de l’ordre public et des bonnes mœurs. Dans le cadre des associations et des réunions pacifiques, les enfants peuvent en même temps apprendre à connaître leurs droits et à les promouvoir.
147.Au Gabon, la loi n° 35/62 du 10 décembre 1962 garantit ce droit sous réserve des restrictions prescrites par la loi, dans l’intérêt de la sécurité nationale, de la sûreté publique ou de l’ordre public ou pour protéger la santé ou la moralité publique ainsi que les droits et libertés d’autrui. Sur le plan pratique, il existe des associations de jeunes à connotation laïque, politique ou religieuse, comme par exemple:
-l’Union des jeunes du parti démocratique gabonais,
-la Jeunesse étudiante chrétienne,
-la Jeunesse ouvrière chrétienne,
-le scoutisme,
-les associations de jeunes Chrétiens de lutte contre le Sida,
-l’Association jeunes et santé sur la reproduction.
148.Il serait d’ailleurs souhaitable que les associations de jeunes soient de véritables foyers de sensibilisation sur les fléaux qui minent l’avenir des enfants.
E. Protection de la vie privée
149.Ce droit, énoncé à l’article 16 de la Convention, s’applique sans discrimination. Il respecte la vie privée de l’enfant dans des situations variées telles que la famille, le foyer, les institutions et centres où il peut être placé ainsi que sa correspondance et ses relations et communications avec d’autres personnes, telles que le médecin, le maître d’école ou le pasteur et le contrôle de l’environnement où vit l’enfant ainsi que des dossiers ou registres le concernant.
150.La Constitution ainsi que certaines lois gabonaises particulières garantissent et protègent la vie privée de chaque citoyen. Les alinéas 5 et 12 de l’article premier de la Constitution garantissent par exemple le secret de la correspondance et l’inviolabilité du domicile et des communications postales.
151.Il en est de même de la protection de la vie privée de l’enfant lorsqu’il se trouve en conflit avec la loi. Par exemple, l’examen en Chambre du conseil des affaires concernant les mineurs (art. 147 du Code de procédure pénale) vise à protéger leur vie privée, tout comme la non inscription des condamnations sur l’extrait de casier judiciaire d’un mineur (art. 230, al. e. du même Code) et l’interdiction de la publication dans la presse des comptes rendus des affaires des mineurs, et la condamnation des auteurs en cas de non-observation de cette interdiction (article 147 dudit Code).
152.Cependant, malgré ces textes, la protection de la vie privée de l’enfant n’est pas respectée par les parents à cause de la tradition qui fait de l’enfant un objet de droit et non un sujet de droit. On note à cet égard le contrôle systématique des effets personnels et intimes de l’enfant et le manque d’espace privé où l’enfant peut s’isoler (les enfants sont souvent nombreux dans une même chambre et sont d’âges, de filiations et de sexes différents…).
F. Le droit à l’accès à l’information
153.L’article 17 de la Convention présente le rôle positif des médias, qui, lorsqu’ils diffusent des matériels positifs et bénéfiques pour l’enfant, contribuent à favoriser sa santé physique et mentale et constituent un outil pédagogique pour son éducation. Dans les cas de violation des droits de l’enfant, les médias contribuent à la révélation de ces faits. Cependant, leur rôle nocif apparaît lorsqu’ils sont mal organisés et mal orientés. Ils peuvent alors exercer une influence pernicieuse sur des enfants. Il faut entendre par médias l’ensemble des moyens audio-visuels, la presse, les écrits, les affiches, le théâtre, la musique, etc.
154.Au Gabon, les moyens et les organes mis en place pour l’application de l’article 17 de la Convention sont:
‑le département de la communication,
‑le Conseil national de la communication,
‑la télévision,
‑la radio,
‑la presse écrite,
‑les centres culturels,
‑les services d’Internet Gabon,
‑la bibliothèque nationale,
‑le théâtre de rue,
‑l’émission télévisée Espace jeune qui donne la parole aux jeunes,
‑la danse, la chanson, la musique à travers différentes manifestations culturelles,
‑la fête annuelle de la culture,
‑la fête annuelle de la musique,
‑le jumelage avec des établissements scolaires nationaux et étrangers,
‑la possibilité d’une formation à distance grâce au Centre national d’enseignement à distance,
‑le programme I E C multisectoriel,
‑ les centres de lecture,
‑les cases d’écoute.
155.Le Conseil national de la communication censure d’office, ou à la demande des parents, des programmes néfastes à l’éducation, à la morale des enfants, et aux mœurs d’une manière générale. Il convient de faciliter l’accès à l’information pour tous les enfants en veillant aux tarifs pratiqués dans les lieux d’information, et en diversifiant et multipliant les bibliothèques, les théâtres, les centres de documentation et d’information.
G. Le droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels inhumains ou dégradants
156.L’article 37 stipule que nul enfant ne doit être soumis à la torture, à des peines ou traitements cruels, à l’arrestation ou à la détention illégale. La peine capitale et l’emprisonnement à vie sans possibilité de libération sont interdits pour les infractions commises par des personnes âgées de moins de 18 ans.
157.Tout enfant privé de liberté sera séparé des adultes, à moins que l’on estime préférable de ne pas le faire dans l’intérêt supérieur de celui-ci. Il a droit à une assistance juridique et a le droit d’être visité par sa famille. La Constitution gabonaise consacre ce droit dans son article premier, à l’alinéa 23 du titre préliminaire. Dans son article 272, le Code pénal sanctionne les mauvais traitements infligés aux enfants.
158.Dans la pratique, le Président de la République peut gracier toute personne condamnée à mort. Il faut également noter que dans les maisons d’arrêt, les enfants bénéficient d’un quartier spécial.
159.Il faut cependant noter que les agents de la police judiciaire et de la sécurité pénitentiaire exercent la torture sur les détenus lors des enquêtes préliminaires et lors de la détention des prévenus et des inculpés.
V. Milieu familial et protection de remplacement
160.Ce chapitre porte sur les relations entre les enfants, les parents ou les tuteurs légaux, et l’État. Celui-ci doit tracer le cadre juridique de ces relations, et aider les parents dans l’exercice de leur autorité parentale, conformément au respect des principes généraux de la Convention. On se retrouve ici en présence d’une série d’articles dont le contenu se recoupe.
161.L’article 5 définit la famille dans un sens large, englobant la parenté qui prend également part à l’orientation et à l’éducation de l’enfant d’une manière qui correspond au développement des capacités de ce dernier.
162.L’article 18 traite de la responsabilité commune des parents et de l’aide de l’État. La famille est l’élément naturel et fondamental de la société, elle est le milieu primaire de socialisation pour tout individu et se trouve placée sous la protection de l’État. C’est aux parents qu’incombe au premier chef le devoir d’élever leurs enfants en leur assurant une protection, des soins, une éducation et un niveau de vie suffisants. L’État a l’obligation d’aider les parents à répondre dignement à leurs devoirs envers les enfants. En cas de défaillances de ces derniers, l’État apportera à l’enfant l’aide et l’assistance nécessaires tout en respectant les droits prévus dans les principes généraux de la Convention.
163.L’article 9 affirme le droit de l’enfant de connaître ses parents et de vivre avec eux. S’il doit se séparer d’eux, l’article recommande que les procédures judiciaires et autres soient menées en respectant son intérêt supérieur et, dans la mesure du possible, ses opinions. Les causes qui peuvent être à l’origine de la séparation de l’enfant avec ses parents sont nombreuses. Citons à titre indicatif le décès, le divorce, la situation de guerre, l’emprisonnement, le placement, l’adoption, l’expulsion. Dans tous les cas, l’État veillera à protéger l’enfant, notamment en facilitant et en favorisant les contacts entre les membres de la famille, en procurant à l’enfant un milieu familial de remplacement ou en le plaçant dans une institution publique ou privée. Il veillera également à ce que l’organe de contrôle et de suivi de ces milieux de substitution puisse fonctionner.
164.L’article 10 impose aux États parties d’examiner avec rapidité et humanité les demandes des parents ou des enfants qui veulent quitter un pays, ou y entrer, en vue de la réunification familiale. Cet article porte une attention spéciale sur la situation des personnes déplacées ou réfugiées à cause d’une guerre, et à la situation des émigrés pour raisons économiques. Il fait écho à l’article 22, sur les enfants réfugiés, et à l’article 38 sur les conflits armés.
165.L’article 27 fait, en revanche, plus ou moins référence aux articles 5 à 7 et 18 de la Convention en soulignant la responsabilité commune des parents et l’aide de l’État, qui, en cas de nécessité, fournira à l’enfant un appui matériel financier, moral et spirituel. Il prendra, entre autres, les mesures nécessaires pour le recouvrement de la pension alimentaire et veillera au respect du droit de l’enfant à se développer dans toute la mesure possible et dans la mesure de ses potentialités.
166.L’article 20 introduit la dimension de privation du milieu familial d’une manière temporaire ou permanente, en raison de circonstances diverses indiquées ci-dessus. Il insiste sur une assistance de l’État pour aider l’enfant à retrouver un milieu de remplacement tout en accordant une priorité au placement familial. L’État veillera à ce que dans ces milieux de substitution familiale, l’enfant soit traité avec l’humanité, la dignité et l’honneur dus à sa personne. L’assistance que l’État apporte à certaines familles d’accueil dans le besoin contribue à soutenir la solidarité familiale et sociale qui s’effrite.
167.L’article 21 traite de l’adoption. La convention attire l’attention des États parties sur les cas d’adoption pour intérêt économique et commercial. Il leur fait une obligation de prévoir des conditions d’adoption qui favorisent le maintien des liens entre l’enfant et sa famille d’origine.
168.L’article 11 impose aux États parties de prendre des mesures pour empêcher que des enfants ne soient enlevés sur leur propre territoire, ou retenus illégalement en dehors de leur juridiction et que des enfants enlevés dans un autre État par des personnes autres que leurs parents, ou par un parent introduit illégalement sur le territoire, soient ramenés à l’endroit d’où ils viennent. Cet article encourage les États à adhérer à des accords multilatéraux tels que la Convention de La Haye sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, de 1980.
169.Enfin, les articles 25 et 39 insistent sur le suivi du traitement appliqué à l’enfant qui doit viser sa réinsertion sociale.
A. Orientation parentale
170.Dans la législation gabonaise, les articles 493 et suivants du Code civil disposent que les parents doivent assumer l’éducation de l’enfant jusqu’à sa majorité et même au-delà. Les parents décident des grandes orientations concernant la vie de l’enfant. L’article 501 du Code civil établit la conformité de la législation gabonaise avec la Charte africaine des droits et du bien‑être de l’enfant puisqu’il stipule que le milieu familial est le lieu idéal pour l’éducation et l’épanouissement de l’enfant. Les parents doivent ainsi lui garantir une protection spéciale.
171.La loi sur l’éducation oblige les parents à scolariser leur enfant dès l’âge de 6 ans et ce jusqu’à l’âge de 16 ans. Cependant, ses droits se trouvent limités du fait:
de l’environnement socio-affectif et culturel dans lequel il vit,
des effectifs pléthoriques dans les classes du primaire, en milieu urbain qui entraînent des déperditions scolaires,
de l’initiation de l’enfant à certains rites traditionnels par les parents ascendants, sans le consentement du père ou de la mère.
172.Pour prévenir ces différentes situations néfastes au développement de l’enfant, l’État doit relancer et accentuer la sensibilisation de la communauté qui intervient aussi dans le cadre de l’éducation de l’enfant au sens large du terme.
B. Responsabilité des parents
173.Dans son article 18, la Convention rappelle que la responsabilité d’élever un enfant incombe au premier chef et conjointement aux deux parents, et que l’État doit les aider à exercer cette responsabilité en leur accordant une aide appropriée pour l’élever.
174.Sur le plan coutumier, la responsabilité de la famille sur l’enfant est très étendue, celui‑ci étant la propriété de la communauté tout entière.
175.La Constitution au paragraphe 16 de son article 1er souligne les devoirs des parents envers les enfants, et le Code civil dans ses articles 494 à 501 traite de l’obligation d’entretenir et d’élever l’enfant jusqu’à sa majorité ou son émancipation. L’enfant se trouve sous l’autorité de ses parents, et cette autorité comporte également d’autres droits et obligations, dont la garde, l’éducation, l’administration des biens de l’enfant, le consentement à son mariage, à son adoption et à son émancipation (art. 495).
176.Cette autorité est exercée conjointement par le père et la mère, et la décision prise ou l’acte fait par l’un d’eux est présumé l’avoir été avec l’accord de l’autre (art. 496). Cependant, il existe des cas où les parents perdent cette autorité. La législation retient les cas suivants, dont la liste n’est pas exhaustive:
lorsque les parents sont hors d’état de manifester leur volonté,
lorsqu’ils ont abandonné tout ou partie de leur autorité en confiant la charge de leur enfant à un service public, un établissement ou une association régulièrement habilitée ou autorisée à cet effet,
lorsqu’ils sont déchus ou privés de tout ou partie de leur autorité,
en cas de divorce, de séparation de corps, ou de décès, etc.
177.Au-delà de ces mesures, l’État, dans sa politique d’aide aux parents pour la sauvegarde des droits de l’enfant, a mis en place:
un programme élargi de vaccination,
des services de médecine scolaire,
une assistance publique pour les fonctionnaires,
une Caisse nationale de garantie sociale pour les contractuels et les indigents,
une Caisse nationale de sécurité sociale pour les travailleurs du secteur privé,
un Centre national de nutrition,
le transport scolaire gratuit pour les élèves (mais qui deviendra payant à partir de la rentrée scolaire 2000/2001),
la gratuité des fournitures scolaires «proposition»,
des centres de formation des enseignants.
178.Dans la pratique, l’enfant manque d’affection du fait de la polygamie, de la désunion des familles et de l’augmentation des familles monoparentales. Par exemple, sur 138 cas d’enfants pris en charge en 1998 par la Direction des affaires sociales (Service de la protection de la jeunesse), 69 sont issus de familles désunies et monoparentales, dont 68 sont des foyers où les chefs de famille sont des femmes.
C. Enfant privé de son milieu familial
179.L’alinéa 14 de l’article 1er de la Constitution et les articles 252 et suivants du Code civil protègent la famille gabonaise comme cellule de base de la société et comme milieu par excellence de l’évolution de l’enfant.
180.La loi coutumière prévoit des structures de remplacement, notamment:
en cas de décès d’un des deux parents, la garde est confiée à l’autre parent (art. 527)
en cas d’emprisonnement des parents, le tribunal saisit le service social pour qu’il pourvoie à la garde de l’enfant s’il n’est pas pris en charge par la famille,
en cas de divorce l’alinéa 4 de l’article 273 du Code civil prévoit que le service social de la protection de la jeunesse recherche qui des deux parents offre les meilleures conditions de vie à l’enfant.
181.La législation protège l’enfant dont les parents vivent en concubinage au même titre que ceux qui vivent dans le cadre d’un mariage légal. En général, en cas d’absence des parents, la solidarité familiale s’exprime. La tutelle et l’adoption sont également des mesures de remplacement pour l’enfant privé du milieu familial. L’article 1er (al. 14 du titre préliminaire) de la Constitution place les enfants sous la protection particulière de l’État. L’article 527 du Code civil organise la tutelle des enfants abandonnés et orphelins. Quant aux alinéas 3 et 4 de l’article 445, ils organisent l’adoption, et l’article 56 du Code pénal traite du placement des enfants en conflit avec la loi.
182.Pour ce qui est de l’adoption, la loi organise les conditions d’adoption, qu’il s’agisse de l’adoption simple (c’est‑à‑dire celle qui s’effectue sans rupture de lien avec la famille d’origine), ou de l’adoption plénière (celle qui s’effectue avec rupture du lien familial). Ces conditions portent sur l’âge, l’état civil, les moralités, les moyens de subsistance, etc. (art. 449 et suiv. du Code civil).
183.Cependant, l’adoption est rendue difficile par le législateur, la solidarité familiale s’atténue à cause des difficultés économiques, et certaines tutelles sont faites abusivement.
184.L’État doit donc aider les familles en difficulté, alléger la procédure d’adoption, et veiller à ce que la tutelle soit réelle et effective.
D. Réunification de la famille et enfants déplacés
a)Réunification de la famille
185.L’alinéa 1 de l’article 1er de la Constitution ainsi que l’article 501 du Code civil précisent que l’enfant doit être entretenu par ses parents. Dans la pratique, le tribunal et les services sociaux œuvrent pour la réunification des familles. En 1998 et en 1999, le service social a procédé à 46 essais de conciliation de famille.
b)Enfants déplacés contre leur gré
186.Le Gabon a prévu des lois contre la sortie des enfants mineurs du territoire national et l’article 275 du Code pénal punit les enlèvements d’enfants. Toutefois, on rencontre traditionnellement des cas de kidnapping d’enfants par l’un des deux parents. De plus, le Gabon connaît depuis un certain temps un afflux d’enfants réfugiés, c’est pourquoi il est nécessaire que l’État renforce les textes du Code pénal relatifs à la protection de tous les enfants y compris les enfants expatriés.
187.La Convention de La Haye sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants doit être appliquée, notamment dans le cadre des enfants expatriés qui travaillent au Gabon et qui se trouvent exploités par ceux qui ont procédé à leur déplacement: en 1998, on a recensé 582 enfants expatriés âgés de 7 ans et plus travaillant comme femmes de ménage, baby-sitters, vendeurs (de fruits et légumes, de produits pharmaceutiques, de médicaments traditionnels ou autres) ou comme mécaniciens automobiles.
E. Niveau de vie
188.Le titre préliminaire de la Constitution, en son article 1er, alinéa 16, ainsi que les articles 494 et 481 du Code civil traitent de l’obligation des parents d’entretenir et d’élever leurs enfants, et de l’obligation pour les parents de verser une pension alimentaire.
189.En matière de scolarité, l’État n’aide plus les parents à acquérir, pour eux, une meilleure éducation et un meilleur développement, car dans la pratique les parents éprouvent de grandes difficultés à favoriser le bien-être de l’enfant. Cependant, une loi est en voie de promulgation pour essayer de remédier à cette situation. En effet, le salaire bien qu’élevé par rapport à d’autres pays (le salaire minimum (SMIC) est de 44 000 FCFA), ne suit pas le coût de la vie.
190.Dans la pratique, lorsqu’un enfant est privé de son milieu familial, les actions menées visent à faire jouer la solidarité familiale pour que l’enfant reste de préférence dans son milieu d’origine. Le cas échéant, l’enfant peut être placé dans une famille d’adoption. C’est ainsi que 40 enfants ont été adoptés par des particuliers entre 1980 et 1998 (Source: Direction générale des affaires sociales). En dernier recours, l’enfant est placé dans une institution. Pour la même période, un enfant a été rapatrié dans son pays d’origine, et quatre ont été placés en familles d’accueil. Cependant, on rencontre des cas de tutelles fictives organisées visant à bénéficier des avantages sociaux sans remplir les obligations qui s’y rattachent.
191.La procédure et les conditions d’adoption d’un enfant sont très contraignantes:
un enfant de 15 ans et plus ne peut pas être adopté,
toute personne souhaitant adopter ne doit pas avoir d’enfant légitime,
l’enfant doit être orphelin de père et de mère,
un couple qui souhaite adopter doit être légalement marié.
VI. Santé et bien-être de l’enfant
192.Selon la définition de l’Organisation mondiale de la santé, la santé est un état de complet bien-être physique, mental et social et non pas simplement l’absence de maladie ou d’infirmité. Ainsi, l’article 29 de la Convention fait écho aux articles portant sur les principes généraux de la Convention, à savoir: la non-discrimination, l’intérêt supérieur de l’enfant, la vie, la survie, ainsi que le développement et la participation de l’enfant.
193.Plusieurs programmes et plans d’action internationaux ont été élaborés à l’intention des États Membres de l’Organisation des Nations Unies, à savoir:
le Sommet mondial pour les enfants, tenu en septembre 1990, qui a fixé des objectifs à atteindre en matière de santé et d’éducation d’ici l’an 2000, en particulier dans le domaine de la santé primaire et de la vaccination en Afrique,
la Conférence internationale sur la population et le développement tenue au Caire, en septembre 1994, qui a attiré l’attention de la communauté sur la malnutrition comme cause de la mortalité infantile,
la quatrième Conférence mondiale sur les femmes tenue à Beijing en 1995 qui a mis l’accent sur les droits des adolescents à la santé et à être protégés contre l’exploitation sexuelle à des fins commerciales, sans oublier les droits à l’éducation de la «petite fille»,
la mobilisation internationale face à la pandémie du virus de l’immunodéficience humaine et du syndrome d’immunodéficience acquise VIH/sida.
194.En ce qui concerne le cadre législatif du Gabon, l’ordonnance n° 1/95 du 14 janvier 1995 fixe les orientations de la politique de la République gabonaise en matière de santé. Dans cette ordonnance, une grande place est réservée à la mère et à l’enfant, notamment dans les articles 1er à 38. Ce texte définit la santé comme un état de complet bien-être physique, mental et moral assurant à «l’individu-enfant» une croissance, un développement et une vie sociale harmonieuse (art. 1er). Il pose ensuite les principes généraux, notamment la garantie par l’État, selon ses possibilités, de la protection de la santé de l’enfant. Ce texte associe la protection de la mère et de l’enfant afin de réduire les taux de morbidité et de mortalité maternelle, et de prévenir les maladies infantiles et les grossesses à risque (art. 10). Les articles 1er, 12 et 13 de cette ordonnance précisent les actions prioritaires qui doivent être menées sur le terrain par les centres de santé maternelle et infantile chargés d’assurer la santé de la mère et de l’enfant. Ils en déterminent aussi le personnel: médecins, sages‑femmes, infirmières de santé publique, agents de nutrition, éducateurs sanitaires, travailleurs sociaux travaillant en association avec des agents de santé et des accoucheuses traditionnelles.
195.La législation sanitaire prévoit également des bilans de santé gratuits et obligatoires pour les enfants en âge préscolaire ainsi qu’une prise en charge des frais d’hospitalisation des enfants par les services étatiques compétents.
196.Dans la pratique, des données statistiques permettent d’évaluer les résultats de la politique sanitaire du Gouvernement en matière de promotion de la santé de la mère et de l’enfant. Le taux d’allaitement maternel, à Libreville, est de 17,7 %, les accouchements en présence d’un agent formé s’élèvent à 79,7 %, et les soins prénataux atteignent 86,5 % (Source: Ministère de la santé).
197.La Direction générale de la santé organise les structures de santé primaires dans les grands centres et les zones rurales. Il faut également noter que le Service de l’éducation pour la santé et celui de la vaccination ne forment qu’un seul département.
198.En dépit des structures existantes et du fort taux de consultations pour des soins prénataux (85 %), les taux de mortalité restent toujours très élevés: le taux de mortalité infantile est en effet de 94 ‰, le taux pour les moins de 5 ans est de 154 ‰ et la mortalité maternelle est de 500 ‰.
199.Dans le domaine de la santé de l’enfant, on note l’existence d’une étroite collaboration entre les services nationaux et les organismes et programmes internationaux, tels que l’Organisation mondiale de la santé, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance, le Fonds des Nations Unies pour la population, le Programme des Nations Unies pour le développement, le projet en matière de santé du Fonds européen de développement, les financements accordés au Gabon ainsi que plusieurs programmes d’action dans le domaine de la santé.
200.L’école nationale d’action sanitaire et sociale assure la formation d’un personnel qualifié en matière de santé et d’action sociale.
201.Malgré le nombre de textes législatifs et de projets en la matière, on note néanmoins que les soins de santé sont payants, que le coût des médicaments reste élevé, et que le contenu des textes relatifs à la sécurité sociale n’est pas traduit dans les faits. Au niveau des affaires sociales, il existe cependant un service de suivi médical gratuit dans les crèches et les établissements préscolaires.
202.Les articles 16 à 29 de l’ordonnance de 1995 précitée traitent de l’extension et du contrôle de la couverture vaccinale, de l’obligation et de la gratuité de la vaccination et des bilans de santé pour les enfants en âge préscolaire et de la prise en charge des enfants malades.
203.La couverture de la vaccination, en 1993, était de 51,5 % (en zone urbaine) et de 45,6 % (en zone rurale).
Indicateurs de santé
Couverture vaccinale (Source: MSPP) |
En zone urbaine |
En zone rurale |
BCG (tuberculose) |
98 % |
96 % |
DTCP3 (diphtérie, tétanos, coqueluche et poliomyélite) |
74 % |
56 % |
Rougeole |
67 % |
62 % |
Tous les vaccins |
56 % |
46 % |
Accès à l’eau potable (Source: recensement général de la population et de l’habitat) |
78 % |
40 % |
Allaitement exclusif au sein jusqu’à 4 mois |
14 % |
|
Prévalence d’utilisation des thérapies de réhydratation orale (Source: UNICEF) |
25 % |
|
Prévalence du VIH/population sexuellement active (Source: Programme national de lutte contre le sida, 1997) |
4 % |
|
Pourcentage de la population rurale vivant à plus d’une heure d’un dispensaire (Source: Banque mondiale) |
86 % |
|
Femmes ayant subi au moins un avortement (Source: enquête MSR) |
50 % |
|
Nouveau-nés avec poids de naissance inférieur à 2 500 g |
10 % |
204.Selon une enquête à indicateurs multiples, menée par l’UNICEF en 1995, le taux d’allaitement exclusif au sein se situerait autour de 15 %.
205.Pour optimiser le fonctionnement des institutions et des services chargés de la promotion de la santé de la mère et de l’enfant, l’État doit augmenter les moyens mis en œuvre en la matière, et renforcer son expertise quant à leur utilisation.
206.D’autres mesures sont envisageables, telles que:
la promotion du développement communautaire en matière de santé, en encourageant la prise en charge de la communauté par les populations elles-mêmes, et en privilégiant la prévention, le développement de la collaboration entre toutes les institutions et tous les services étatiques concernés par la santé de la mère et de l’enfant,
l’instauration d’un partenariat avec les organisations non gouvernementales nationales et internationales compétentes,
l’accès aux médicaments (médicaments génériques) et aux soins de santé de qualité,
le développement des programmes de planning familial.
VII. Éducation, loisirs, activités récréatives et culturelles
A. Éducation
207.L’article 28 proclame le droit à l’éducation comme étant une nécessité fondamentale pour chaque enfant. Il souligne que cette éducation doit inclure l’égalité des chances en faisant appel aux principes généraux de la Convention. L’État doit tout mettre en œuvre pour garantir la gratuité de l’éducation primaire et favoriser l’éducation scolaire des filles en vue d’en réduire l’écart avec les garçons. Ce principe a également été énoncé lors du Sommet mondial pour les enfants qui s’est tenu en 1990.
208.Quant aux objectifs de l’éducation, l’article 29 reflète le consensus mondial en la matière selon lequel l’éducation doit développer au mieux les potentialités de l’enfant, le préparer à assumer les responsabilités de la vie dans une société libre et lui inculquer le respect des autres et du milieu naturel. Il fait écho à la liberté quant au choix du type d’éducation, tout en sachant que plusieurs facteurs créent des barrières au libre exercice de ce droit, comme par exemple la pauvreté et l’insuffisance des infrastructures scolaires.
1. Législation gabonaise
209.La Constitution reconnaît les différents principes de la Convention dans son titre premier, article 1er, al. 16, qui fait de l’éducation des enfants un droit naturel pour les parents et un devoir qu’ils exercent sous la surveillance et avec l’aide de l’État et des collectivités publiques. Les parents ont le droit, dans le cadre de l’éducation scolaire, de décider de l’éducation morale et religieuse de leur enfant. L’État doit veiller à ce que le programme d’enseignement soit diversifié et permette le développement physique, intellectuel et moral de l’enfant.
210.Pour traduire ces objectifs, l’État gabonais a mis en place les services publics d’exécution suivants:
le Ministère de l’éducation nationale préscolaire, qui est maintenant rattaché au Ministère de l’éducation nationale,
le Ministère des affaires sociales, au sein duquel existait un service d’éducation,
le Ministère de l’enseignement supérieur,
le Ministère de la santé.
211.Il existe, par ailleurs, des lois et des décrets qui régissent le secteur de l’éducation, tels que:
la loi n° 16 /66 du 9 août 1996, portant organisation générale de l’enseignement au Gabon,
la loi n° 21/84 du 29 décembre 1984, fixant les règles applicables à l’enseignement privé,
la loi n° 20/92 du 8 mars 1993, fixant les statuts particuliers des fonctionnaires du secteur de l’éducation,
le décret n° 16/92 du 9 août 1992, fixant les attributions du Ministère de l’éducation nationale,
l’arrêté n° 0069/MENESRS/SE/HCEN/IGEN/DGEP du 9 août 1990, portant création d’une commission ministérielle d’examen des demandes et des propositions de mise en stage des agents de l’éducation nationale,
l’arrêté n° 0001/PMMIDSM/MENJSCFPPG/MESRE/MFBP du 8 février 1995, portant réorganisation de l’enseignement technique et professionnel,
l’arrêté n° 619/PR du 1er mai 1961, définissant la compétence du Ministre de l’éducation nationale.
212.En dépit de ces objectifs, la fermeture de certaines écoles spécialisées, telles que l’école d’Agondjé, et la ferme école de Mélen, a suscité de grandes interrogations. Il existe également, à l’Université Omar Bongo de Libreville, une faculté de médecine. La nécessité d’avoir du personnel qualifié, au fait des réalités nationales, est un des soucis de l’État. Il existe, en outre, un service de l’alphabétisation au sein du Ministère de la culture qui accueille aussi des enfants en difficultés scolaires.
213.Le Gabon consacre chaque année près du dixième du budget de l’État à l’éducation nationale, et 16,5 % du budget d’investissement y a été consacré en 1998. L’école est gratuite et obligatoire jusqu’à 16 ans.
Tableau 5. Indicateurs d’éducation
Moyenne |
Femmes |
Hommes |
|
Alphabétisation (Source: recencement général de la population et de l’habitat, 1993) |
72 % |
66 % |
79 % |
Taux de scolarisation |
Moyenne |
Filles |
|
Taux brut primaire |
142 % |
140 % |
|
Taux net primaire |
86 % |
86 % |
|
Taux brut secondaire premier cycle |
53 % |
51 % |
|
Taux net secondaire premier cycle |
15 % |
15 % |
|
Taux brut secondaire second cycle |
16 % |
14 % |
|
Taux net secondaire second cycle |
5 % |
4 % |
|
Taux de fréquentation scolaire |
Moyenne |
Filles |
Garçons |
Taux brut 12 à 18 ans |
81 % |
78 % |
85 % |
Taux brut 12 à 15 ans |
90 % |
||
Taux brut 16 à 18 ans |
70 % |
||
Pourcentage d’élèves |
Moyenne |
||
Qui atteignent la classe de CM2 |
60 % |
||
Qui atteignent la classe de sixième |
30 % |
||
Qui passent le diplôme du baccalauréat |
1 % |
||
Qui terminent le cycle primaire sans redoubler |
3 % |
||
Nombre d’élèves par enseignant |
En ville |
Zone rurale |
|
73 |
44 |
Source: Ministère de l’éducation nationale 1995.
2. Constat
214.Les taux de scolarisation sont plus bas pour les filles que pour les garçons, surtout à partir de 12 ans. Plus inquiétants, encore, les chiffres faisant état du redoublement et de l’abandon scolaire sont accablants. Sur 100 élèves qui commencent l’école, moins de 60 atteignent le CM2, moins de 30 accèdent à la sixième, et un seul réussi à passer le baccalauréat.
215.En dépit de la somme que l’État gabonais consacre à l’éducation nationale, le principe de l’école gratuite et obligatoire est difficilement appliqué dans toutes les écoles publiques du pays.
216.Le rendement externe du système n’est pas non plus satisfaisant. Les élèves sont formés dans le seul but de passer au cycle secondaire alors que la majorité ne l’atteindra pourtant pas. Ils sont donc mal préparés à la vie active. Ainsi, les enfants qui ne terminent pas le cycle primaire vont souvent grossir les rangs des chômeurs ou des délinquants et sont généralement condamnés à vivre dans la pauvreté.
217.Ces difficultés s’expliquent par de nombreux facteurs: carences graves dans la gestion du système éducatif, insuffisance dans la planification, mauvaise répartition des revenus et absence de supervision qui a conduit à une pénurie de matériel pédagogique, à une sous‑qualification des enseignants et au surpeuplement des classes. À Libreville il y a effectivement en moyenne 100 élèves par classe, ce qui oblige de nombreux établissements à fonctionner avec deux sections à mi-temps. En zone rurale, le ratio est peu favorable, avec 40 élèves par salle. De plus, les écoles rurales sont souvent construites en matériaux peu durables et manquent de mobilier et de supports pédagogiques. Pour 16 % des élèves, il n’y a qu’un maître pour enseigner les six niveaux du primaire, et dans certaines écoles, il n’y a pas de maître du tout.
218.Par ailleurs, l’échec scolaire peut s’expliquer par le manque de suivi par les parents du travail scolaire de leurs enfants. Parmi les causes d’abandon de l’école, il y a le fait que les parents manquent souvent de moyens pour acheter les fournitures scolaires ou pour assurer les frais de scolarité de leurs enfants dans les établissements privés. Les enfants n’ont pas, en effet, le droit de tripler une classe dans les écoles officielles et doivent donc passer dans le privé s’ils veulent poursuivre leurs études. Enfin, les enfants ont du mal à gérer leur temps libre.
219.L’État gabonais est conscient de ces problèmes et essaie d’y répondre en formant des enseignants et en construisant des écoles. Il faut impérativement améliorer la qualité de l’enseignement dans toutes les écoles du pays et diversifier les programmes en matière de formation professionnelle en y introduisant des cycles de formation dans le secteur de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche à partir du niveau du cours moyen. Ces formations doivent être de courte durée (de 2 à 4 ans) et être adaptées aux enfants qui ne peuvent pas suivre dans les cycles longs ou qui ont été exclus du système pour d’autres raisons, notamment à cause de leur faible capacité de mémorisation.
220.Il faut créer des écoles pour enfants souffrant de handicaps, à l’exemple de l ’école des sourds-muets de Nzeng Ayong et soutenir les structures privées. Il existe également un projet d’ouverture d’un centre de formation pour sourds-muets et d’aveugles à Lébamba. Les organisations non gouvernementales offrent également un début de formation professionnelle pour les enfants qui présentent un handicap mental, physique ou sensoriel.
221.Au-delà de ces mesures et de quelques actions concrètes, il faut un meilleur développement des structures de formation afin de traduire dans les faits l’alinéa 18 du titre premier de la Constitution qui stipule que l’État garantit l’accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation professionnelle et à la culture.
B. Loisirs, activités récréatives et culturelles
222.On note ici des expressions telles que: repos, jeux, loisirs, activités récréatives et culturelles. Le repos est un droit qui s’oppose au tapage nocturne. Pour les loisirs, les États parties organisent des activités sportives, récréatives (cinéma) et culturelles. L’article 31 attire l’attention des États sur le besoin d’une urbanisation qui prévoit des espaces verts pour le repos, les jeux et autres activités récréatives et culturelles.
223.Au Gabon,le Ministère de la jeunesse, de la culture civique, des sports et des loisirs définit la politique de l’État en matière de loisirs et d’activités récréatives et culturelles, comme le stipule la Constitution en ce qui concerne l’égalité d’accès à la culture pour tous les enfants (art. 1er, al. 18). Dans les capitales provinciales, le Ministère est très présent au niveau organisationnel. Ainsi, dans la législation nationale, le décret n° 0951/MJSACSE/DS du 1er octobre 1970, portant création de l’Office gabonais des sports scolaires et universitaires, organise chaque année, sur toute l’étendue du territoire, des manifestations sportives toutes disciplines confondues en vue de découvrir les futurs représentants du Gabon aux différentes compétitions africaines.
224.Il faut également noter le décret n° 602/PR/MJSC17/DS du 30 septembre 1969, portant organisation du sport civil, et le décret n° 44/PR/MJS du 15 avril 1974, portant création de l’Institut national de la jeunesse et des sports, s’occupant de la formation d’un personnel qualifié en matière de sport et d’activités récréatives.
225.En matière de protection des mineurs, il existe l’ordonnance n° 59/76 du 1er octobre 1976, qui interdit aux mineurs de moins de 21 ans de se retrouver dans les lieux publics après 21 heures.
226.À travers la loi 15/96 sur la décentralisation, les collectivités publiques organisent des activités récréatives au niveau local dans le but de faire appliquer la politique de l’État. La loi n° 35/62, du 10 décembre 1962, sur les associations régit les associations des sports et de théâtre. La réglementation autorise aussi l’ouverture de cinémas et autres loisirs, comme les salles de jeux.
227.Dans les faits, la législation nationale est peu suivie. Les structures existantes en matière de loisirs et de sports sont inégalement réparties sur le territoire. Seuls les grands centres urbains en possèdent, et leur accès est souvent difficile. Dans les établissements scolaires, les installations sont souvent vétustes ou inexistantes. On trouve encore des écoles qui manquent d’aires de jeux, et de toutes les disciplines sportives, seul le football est organisé, malgré ses faibles résultats à l’échelle du continent africain.
228.La culture, le sport et les activités récréatives sont à relancer, voire à organiser, au Gabon. Les difficultés économiques sont telles que ce secteur important du développement de l’homme est aujourd’hui oublié. L’État doit tout faire pour restaurer ces activités comme le font déjà quelques structures privées, telles que les sociétés Elf Gabon, Shell‑Gabon, Comilog, et les mouvements, de jeunes tels que: les Scouts et les Guides, les éclaireurs et les éclaireuses du Gabon, les Cœurs Vaillants et les Âmes Vaillantes, ainsi que les associations telles que JEC, JEN, Caritas, SOS Mwana, Cose Enfants CEMEA Horizons Nouveaux, AFEG, ASMARE, Club UNESCO, et AFJG
VIII. Mesures spéciales de protection de l’enfant
229.Ce chapitre porte sur les enfants qui se trouvent en situation d’urgence, tels que les enfants victimes de conflits armés ou d’exploitations, et tous ceux qui ont besoin de mesures de réinsertion sociale. Il concerne également les enfants qui se trouvent en conflit avec la loi.
A. Enfants en situation d’urgence
1. Enfants réfugiés
230.L’énoncé de l’article 22 souligne la nécessité de protéger les droits des enfants réfugiés et de leur accorder une assistance humanitaire appropriée, conformément aux instruments internationaux humanitaires tels que les Conventions de Genève du 12 août 1949 pour la protection des victimes de guerre et les Protocoles additionnels s’y rapportant, ainsi que la Convention relative au statut des réfugiés de 1951, telle qu’amendée en 1967. Les États parties sont appelés à collaborer avec les institutions et organisations humanitaires nationales et internationales, comme par exemple le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, afin de favoriser la réunification familiale et faciliter les procédures d’octroi de l’identité (statut de réfugié, nationalité, rétablissement du nom, etc).
231.Au Gabon, le nombre d’enfants réfugiés est difficile à déterminer car, à l’heure actuelle, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés procède au recensement de toutes les personnes ayant un statut de réfugié au Gabon.
232.Pour la protection des enfants réfugiés, le Gabon a travaillé en collaboration avec le Haut Commissariat et des Organisations non gouvernementales, lorsqu’il a reçu, sur son territoire, un nombre assez important d’enfants réfugiés issus de la guerre du Biafra (Nigéria). Ces enfants qui, selon les instruments internationaux devraient bénéficier des mêmes droits que les autres en matière de protection, d’éducation, de santé et de travail, comme le stipule la Charte africaine dans ses articles relatifs aux réfugiés, rencontrent cependant beaucoup de difficultés dans leur vie quotidienne, à savoir:
l’entrée dans des écoles supérieures spécialisées dites «nationales» n’est pas garantie automatiquement aux enfants réfugiés,
l’inexistence d’une commission nationale chargée d’étudier et d’accorder une pièce qui leur reconnaît le statut de réfugié ainsi que le droit d’asile,
le manque de documents de base permettant aux réfugiés de jouir de leur droit de circulation (titre de voyage, acte de naissance, etc.).
les difficultés rencontrées en matière de réunification familiale par les enfants réfugiés non accompagnés,
le manque de vulgarisation de la Charte africaine effectué auprès des différentes couches de la société gabonaise, en ce qui concerne la protection des réfugiés
le manque de statistiques et de politiques de protection en matière de santé primaire (consultations médicales, achat de médicaments) et d’éducation (les bourses d’études du HCR sont dérisoires et accordées tardivement aux enfants boursiers, ce qui leur vaut très souvent d’être mal préparés à la rentrée scolaire).
2. Protection des enfants dans les conflits armés
233.Il est clair que les dispositions de l’article 38 font obligation aux États parties de respecter les règles du droit international humanitaire qui leur sont applicables en cas de conflits armés. Citons notamment, les Conventions de Genève du 12 août 1949 et les Protocoles additionnels s’y rapportant, la Charte africaine des droits et du bien être de l’enfant et la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. Outre les protections spéciales à accorder aux enfants touchés par les conflits armés, la Convention fait obligation aux États de ne pas enrôler des enfants de moins de 15 ans dans leurs forces armées, ni de les faire participer aux conflits armés.
234.Cette limite d’âge va à l’encontre de l’article premier qui définit l’enfant comme toute personne âgée de moins de 18 ans. C’est ainsi qu’en 1994, la Commission des droits de l’homme, encouragée par le Comité des droits de l’enfant, a créé le Groupe de travail intersessions, à composition non limitée, chargé d’élaborer un projet de protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés qui élèverait, entre autres, l’âge minimum d’enrôlement et de participation aux hostilités à 18 ans. Une étude de Mme Graça Machel sur l’impact des conflits armés sur les enfants révèle les effets nocifs de la guerre sur le plan physique, mental, moral et spirituel des enfants, et particulièrement pour ceux appelés «enfants soldats». Elle révèle aussi les facteurs à l’origine de la participation des enfants aux hostilités armées, à savoir, la pauvreté, le désœuvrement des enfants, et la multiplication des conflits et des tensions politiques, particulièrement en Afrique. Les paragraphes 80 et 81 du présent rapport apportent des précisions en ce qui concerne l’enrôlement des personnes au Gabon.
3. Réadaptation et réinsertion des enfants victimes
235.L’article 39 recommande que des mesures soit prises pour aider les enfants victimes de multiples formes de violence, de négligence, de sévices ou d’exploitations. Son contenu très large fait écho aux dispositions de la Convention portant notamment sur le travail (art. 32), la consommation et le trafic de drogue (art. 33), l’exploitation sexuelle (art. 34), la vente et la traite des enfants (art. 35) et autres formes d’exploitation (art. 36), la torture et autres peines cruelles et dégradantes (art. 37), et le conflit armé (art. 38). Il n’oublie pas non plus les secteurs de la santé et de l’éducation (art. 24 et 28) et attire l’attention sur l’enfant privé de son milieu familial suite, notamment, à des mesures judiciaires (art. 37 et 40). Toutes ces différentes catégories d’enfants victimes ont besoin de mesures de réadaptation et de réinsertion sociale.
236.Au Gabon,le mauvais traitement de l’enfant peut être physique ou moral, et causé par les parents au sens élargi de la tradition. La Constitution dans son article premier aux alinéas 4 et 23 du titre préliminaire consacre ce droit, de même que le Code pénal, dans ces articles 223 et suivants, 230 et suivants, et 256 et suivants et répriment tous les cas de violence sur les enfants.
237.Ces mauvais traitements apparaissent sous forme de maltraitances de toutes sortes. Les brutalités physiques ou mentales peuvent en effet prendre différentes formes, telles que la violence physique, l’abus sexuel, l’abandon, la négligence et l’exploitation.
238.La Direction générale des affaires sociales a enregistré 146 cas d’abandon de 1980 à 1999 et 12 cas de maltraitance en 1998. D’octobre 1997 à mai 1998, 25 cas de viol ont également été enregistrés au parquet du tribunal de Libreville.
239.Au niveau de la Direction générale des affaires sociales, un service de protection de la jeunesse est rattaché au tribunal pour la prise en charge de ces cas. Le personnel de ce service se compose d’assistants sociaux, d’éducateurs spécialisés, d’une sociologue, d’un psychologue, et d’un criminologue. Ils travaillent en étroite collaboration avec la justice afin de prévenir la délinquance juvénile et toutes autres formes de maltraitance. Pour réaliser cette mission, le service effectue:
effectue des enquêtes pour déterminer le problème,
organise la prise en charge psycho‑sociale des personnes concernées, afin de les aider à trouver les solutions à leur problème. Cette prise en charge avoir lieu sous forme d’entretiens individuels et familiaux, de visites à domicile ou en prison, de suivi scolaire, de réinsertion familiale, scolaire et parfois professionnelle grâce à une formation en apprentissage, ou sous forme d’orientation et d’accompagnement dans des structures de sensibilisation, telles qu’Agir pour le Gabon, ou spécialisées, telles que l’hôpital psychiatrique de Melen pour la prise en charge des alcooliques et des drogués.
240.Dans la pratique, la prise en charge des cas de maltraitance est cependant difficile étant donné que:
la censure familiale limite la dénonciation des cas de maltraitance d’enfants,
les structures spécialisées pour le traitement de ces cas n’existent pas,
le personnel qualifié n’est pas assez nombreux,
le partenariat entre les structures privées compétentes et l’État est suffisant car ce dernier ne leur octroie aucune aide.
B. Enfants en situation de conflit avec la loi
241.Les articles 37, 39 et 40 concernent en particulier les enfants qui sont traduits en justice ainsi que le traitement qui leur est réservé.
1. Administration de la justice pour mineurs
242.Les présentes dispositions de la Convention traitent de la façon dont est traité l’enfant dès le moment où il est considéré comme suspect, que ce soit pendant l’arrestation, durant l’enquête ou la procédure, pendant la détention préventive, ou lors du jugement ou de la condamnation. Elles demandent aux États parties d’établir un âge minimal de responsabilité pénale, en suggérant qu’il soit supérieur à 18 ans.
243.En cas d’infraction à la loi pénale elles prient également les États de favoriser le règlement des conflits par des voies non judiciaires et d’accorder une priorité aux mesures non privatives de liberté en favorisant le traitement hors milieu carcéral. Elle leur demande en outre d’interdire la peine capitale et l’emprisonnement à vie pour les personnes âgées de moins de 18 ans (art. 37)et de faire appel à l’Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing) dans l’application de la loi pénale aux enfants (civils comme militaires).
244.Au Gabon,la loi interdit l’exécution capitale des femmes enceintes (art. 10 du Code pénal) et la peine de mort pour les personnes âgées de moins de 18 ans (art. 60 du Code pénal). Pour plus d’informations, il est utile de se référer à la définition de l’enfant en matière pénale (par. 75 à 79 du présent rapport).
2. Traitement réservé aux enfants privés de liberté, réadaptation et réinsertion sociale
245.Les dispositions des articles 37-39 et 40 ont été examinées aux paragraphes 235 à 244 du présent rapport, portant sur la réadaptation et la réinsertion des enfants victimes, et sur l’administration de la justice pour mineurs. Elles se font également l’écho à l’article 25 sur la révision du placement.
246.Au Gabon, lorsqu’un enfant est privé de liberté, il purge sa peine dans une prison centrale, où il est interné dans un quartier spécial. Théoriquement, il est prévu un régime spécial pour ces enfants, mais dans la pratique, aucune structure n’existe pour leur réinsertion.
C. Enfants en situation d’exploitation
247.Les enfants peuvent être exploités par voie économique (travail, vente, traite) par voie d’usage de stupéfiants, d’enlèvements, de violences sexuelles, et autres. Toutes ces formes d’exploitation causent un déséquilibre sur le plan de la santé physique et mentale de l’enfant. Les articles 32 à 35 de la Convention traitent de ce problème.
248.La Convention attire également l’attention des États parties sur les effet nocifs du travail sur des enfants. Elle recommande aux États parties de prendre des dispositions pour réglementer l’âge d’admission à l’emploi, et pour fixer les horaires de travail de l’enfant, la nature de la tâche qu’il peut effectuer, et ses conditions de travail, sans oublier les systèmes de contrôle et les sanctions à appliquer en cas de violation de ces dispositions.
1. Exploitation dans le domaine du travail
249.En Afrique, le travail des enfants dans le secteur économique informel se caractérise par l’insécurité et la précarité de l’emploi et de la rémunération.
250.Au Gabon,le Code du travail (loi n° 3/94 du 21 novembre 1994) dispose, en son article 177, que les enfants ne peuvent être employés dans aucune entreprise avant l’âge de 16 ans, sauf dérogation édictée par décret pris sur proposition conjointe du Ministre chargé du travail, du Ministre chargé de la santé publique et du Ministre de l’éducation nationale, compte tenu des circonstances et des tâches qui peuvent leur être demandées.
251.Les Conventions collectives prévoient des dispositions de même nature, comme par exemple la Convention collective des banques et la Convention collective des travaux publics.
a)Instruments internationaux ratifiés par le Gabon
252.Outre la Convention relative aux droits de l’enfant, le Gabon a ratifié les Conventions n° 5, 10, 33 et 123 de l’Organisation internationale du Travail (OIT), qui fixent l’âge minimum d’admission à l’emploi à 14 ans. Les Conventions concernent les secteurs de l’industrie, de l’agriculture, des travaux non industriels et des travaux souterrains.
253.Par ailleurs, deux autres instruments sont en examen technique au Ministère du travail, en vue de leur ratification. Il s’agit de la Convention n° 138 concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi, de 1973 et de la Convention n° 182 concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, de 1999.
254.Il convient cependant de préciser que le Code du travail précité prévoit des dispositions plus restrictives en fixant par exemple l’âge minimum d’admission à l’emploi à 16 ans contre 14 ans pour la Convention n° 138.
255.Sur le plan régional, le Gabon a signé, le 27 février 1992, la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant de 1990 qui contient, en son article 15, le même dispositif que la Convention et les instruments pertinents de l’OIT sur l’âge minimum d’admission à l’emploi.
256.Le Gabon a également ratifié la Convention n° 06 de l’OIT concernant le travail de nuit des enfants dans l’industrie, en 1999. Les principales dispositions de cet instrument, notamment celles contenues à l’article 2 sont entièrement reprises par l’article 168 du Code du travail. Le Gabon a en outre ratifié les conventions suivantes:
la Convention n° 52 concernant les congés annuels payés,
la Convention n° 87 concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical,
la Convention n° 99 concernant les méthodes de fixation des salaires minima dans l’agriculture,
la Convention n° 100 concernant l’égalité de rémunération entre la main‑d’œuvre masculine et la main‑d’œuvre féminine pour un travail de valeur égale.
Outre la ratification de ces nombreuses Conventions, il y a lieu de signaler que le Gabon, est également signataire de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant qui, à l’article 150, contient les mêmes dispositions que l’article 32 de la Convention.
b)Application de la Convention (art. 32, al. a)
b.1)Secteur formel
257.À la lumière de divers rapports effectués par l’inspection du travail, il ressort qu’aucun enfant en dessous de l’âge minimum légal ne travaille dans le secteur structuré et qu’en outre, les dérogations prévues à l’article 177 du Code du travail ne sont pas sollicitées. Mieux, le décret conjoint fixant les modalités dérogatoires n’a jamais été pris. Il faut ainsi analyser cette attitude comme une volonté délibérée des autorités de ne pas favoriser le recours au travail des enfants.
b.2)Secteur informel
258.Depuis un certain temps, le recours au travail des enfants s’est développé. Il s’agit d’un phénomène complexe qui est principalement dû aux flux migratoires de populations étrangères qui transposent au Gabon les pratiques en cours dans leurs pays d’origine. C’est ainsi que l’écrasante majorité des enfants qui travaillent en dessous de l’âge minimum légal est d’origine étrangère. Ce phénomène commence à toucher les enfants gabonais, et il est surtout visible dans les principales villes et présente quelques caractéristiques qui lui sont propres.
259.À l’inverse des enfants étrangers, les enfants travailleurs nationaux ne sont pas issus de trafic, ni employés par leurs parents. Ils sont le plus souvent en rupture familiale ou scolaire et viennent parfois des couches pauvres de la population. Leur régime est assimilable à celui des travailleurs occasionnels ou indépendants.
b.3)Horaires de travail et conditions d’emploi
260.Le Code du travail gabonais ne détermine pas d’horaire de travail spécifique pour les enfants. Le régime commun fixe, à l’article 165, la durée du travail hebdomadaire légale à 40 heures par semaine. Cependant, en vertu du même article, des dérogations peuvent être édictées par décret sur proposition du Ministre du travail.
261.En revanche, le législateur a codifié le travail de nuit des enfants. C’est ainsi que l’article 167 du Code du Travail exclut le recours au travail de nuit pour les enfants de moins de 18 ans, à l’exception des établissements où tous les employés sont membres d’une même famille. L’article 168 du même Code énumère également d’autres cas dérogeant à l’interdiction visée à l’article 167. D’autres mesures spécifiques sont en outre prévues par le Code du travail, en ce qui concerne:
L’adhésion aux syndicats (art. 274). Bien que cette question ne relève pas des conditions d’emploi, elle mérite d’être soulignée. Les mineurs de plus de 16 ans peuvent adhérer à un syndicat de leur choix sous réserve de l’accord de leurs parents ou tuteurs dans le secteur formel.
Le régime des congés (art. 185) l’enfant de moins de 18 ans bénéficie d’un congé supplémentaire égal à une demi-journée effective de travail, ouvrable par mois.
262.Le Code du travail fixe, pour l’ensemble des travailleurs, un mode de détermination de salaire unique fondé sur la non-discrimination. Ainsi pour définir le salaire d’une personne, il n’est pas tenu compte de son âge, de son sexe ni de son origine. À qualification et rendement égaux, l’employeur verse ainsi le même salaire à tous ses employés.
b.4)Constat:
263.Même si la législation prévoit la possibilité de déroger au régime commun (art. 165 du Code du travail), aucun texte n’a été pris pour ce faire (40 heures de travail par semaine), et bien que le travail de nuit soit réglementé, de nombreux enfants évoluant dans le secteur informel y sont astreints, en particulier les jeunes domestiques.
b.5)Sanctions ou peines visant à assurer l’application de la Convention (art. 32)
264.En vertu de l’article 178 du Code du travail, l’inspecteur du travail peut requérir l’examen médical des enfants pour des travaux présentant des risques pour leur santé, et peut prononcer la résiliation du contrat de travail lorsqu’il juge qu’un enfant effectue un travail au-dessus de ses forces.
265.Les infractions à l’article 177 (âge minimum d’admission à l’emploi) peuvent être sanctionnées par des pénalités prévues à l’article 195 du Code du travail. On y distingue les peines d’amende allant de 30 000 à 300 000 francs CFA et, en cas de récidive, de 60 000 à 600 000 francs, des peines d’emprisonnement allant de deux à six mois.
266.Les infractions aux articles 4, 6, et 8, qui visent respectivement le recours au travail forcé, l’emploi d’un enfant pour l’empêcher de recevoir l’instruction scolaire obligatoire, et toute discrimination fondée sur le sexe, la race, l’âge, la couleur etc., exposent leurs auteurs à des peines plus lourdes (art. 16 du Code du travail) qui vont d’une amende de 300 000 à 600 000 FCFA, ou de 600 000 à 1 200 000 FCFA en cas de récidive, à un emprisonnement de un à six mois.
267.En pratique, il est rare que ces sanctions soient effectivement appliquées. En effet, le champ d’intervention des inspecteurs du travail se limite au secteur structuré qui, par nature, n’a pas recours au travail des enfants en dessous de l’âge légal d’admission à l’emploi.
268.Cependant, pour lutter contre le recours au travail des enfants dans le secteur informel, le Gabon est devenu depuis mars 1998 partenaire du Programme international pour l’abolition du travail des enfants (IPEC). Une commission paritaire Benino-Gabonaise a également été créée en mars 1999 dans le cadre de la coopération bilatérale. Elle est chargée, entre autres, de proposer des mesures concrètes pour lutter contre le trafic et le travail des enfants béninois au Gabon.
269.En ce qui concerne les instruments de l’OIT, le Gabon envisage de ratifier la Convention n° 138 concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi, et la Convention n° 182 concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination.
2. Usage de stupéfiants
270.La Convention attire l’attention des États sur le fait que les substances psychotropes et les stupéfiants sont susceptibles d’engendrer une dépendance chez l’enfant et de lui créer des problèmes sociaux ainsi que des problèmes de santé physique et mentale. Elle leur recommande, à l’article 33, de prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher que des enfants ne soient utilisés pour la production et le trafic illicites de ces substances. Outre les drogues proprement dites, les États prendront également des mesures pour contrôler l’utilisation des boissons alcoolisées, du tabac et d’autres solvants qui, même s’ils ne tombent pas sous le contrôle des instruments internationaux, demeurent nocifs pour l’enfant. La Convention recommande aux États parties de coopérer à la lutte contre la drogue en adhérant aux instruments internationaux en la matière.
271.Pour ce qui est du Gabon, indépendamment de l’article 237 du Code pénal qui sanctionne l’administration de substances nuisibles à la santé, l’article 208 du même Code punit tous ceux qui auront, sans autorisation, cultivé, détenu, offert, cédé, vendu, acquis, acheté ou employé des substances ou des plantes classées comme stupéfiants par voie réglementaire, telles que l’opium et ses dérivés, l’héroïne, la morphine etc. Les peines encourues ont été aggravées par la loi n° 19/93 du 27 août 1993 qui est venue modifier l’article 208 du Code pénal. L’ivresse publique et manifeste est également sanctionnée par l’article 209 bis du Code pénal.
272.Une prise en charge pour la réinsertion sociale, scolaire et professionnelle est assurée par le Service de la protection de la jeunesse de la Direction générale des affaires sociales. Il existe cependant certains obstacles, à savoir que:
l’Office central de lutte contre la drogue connaît des difficultés de fonctionnement,
la Commission interministérielle contre la toxicomanie n’est pas très présente,
les structures adéquates et le personnel qualifié pour la prise en charge des jeunes drogués sont insuffisants.
3. Exploitation et violences sexuelles
273.L’exploitation et les violences sexuelles infligées aux enfants sont une préoccupation importante des États en cette fin de XXesiècle. Elles se présentent sous des formes diverses allant des brutalités physiques aux violences mentales. Elles comprennent la vente des enfants, le rapt, la prostitution, la pornographie, la pédophilie, et le harcèlement sexuel. Des instruments internationaux tels que le Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, et le Congrès mondial contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales, tenu à Stockholm en août 1996, contiennent des recommandations pour protéger l’enfant victime de ces comportements immoraux.
274.Au Gabon,la sexualité reste un sujet tabou. En règle générale, les jeunes ne discutent pas, ou très peu, avec leurs parents de leur sexualité. Au niveau législatif, les articles 260 à 263 du Code pénal répriment la prostitution, le proxénétisme et tout attentat aux bonnes mœurs. L’article 265 du même Code sanctionne toute personne qui aura commis un acte sexuel, ou tenté d’en commettre un, sur la personne d’un enfant âgé de moins de 15 ans.
275.Sur le plan pratique, malgré l’effort de vulgarisation des problèmes relatifs à la sexualité des adolescents qui est mené par les médias, les Organisations non gouvernementales et les structures étatiques, notamment les Ministères de l’éducation nationale, de la famille et de la promotion de la femme, et des affaires sociales, ce sujet reste tabou sur le plan familial. Face à ce constat, ces structures doivent poursuivre et renforcer leur effort de sensibilisation sur les fléaux que constituent les Maladies sexuellement transmissibles et le SIDA chez des jeunes.
4. Vente, traite et enlèvement
276.Les dispositions de l’article 35 de la Convention font écho à l’article 21 sur l’adoption (en ce qui concerne la protection des enfants en cas d’adoption à l’étranger), à l’article 32 sur l’exploitation économique, et à l’article 34 sur l’exploitation sexuelle. Elles s’étendent à des sujets comme le viol et l’attentat à la pudeur. Les paragraphes 102 et 104 du présent rapport traitent des sanctions prévues par le Code pénal pour de tels actes, et les paragraphes 75 et suivants, qui concernent la définition de l’enfant en matière pénale au Gabon, font également mention du sujet.
D. Enfants appartenant à une minorité ou à un groupe autochtone
277.En dépit de toute protection des droits de l’enfant prévue par la Convention, l’article 30 pourrait paraître superflu. Il faut noter que la Convention, dans cet article, veut insister sur le droit de l’enfant de jouir en paix des modes de vie et des croyances qui ne sont pas nuisibles, aussi étranges qu’ils puissent sembler aux autres personnes. Ces dispositions affirment la riche diversité des cultures du monde dans le cadre des droits de l’homme et au regard des principes généraux de la Convention.
278.En ce qui concerne le Gabon, la Constitution assure dans son article 2 l’égalité de tous les citoyens sans discrimination.
279.Sur le plan pratique, il existe 40 ethnies, dont quelques minorités, mais cette situation ne peut priver un autochtone de jouir de sa vie culturelle, de pratiquer sa religion, ou d’employer sa propre langue en commun avec les autres membres de son groupe.
Sur le plan scolaire, les enfants des minorités peuvent continuer à pratiquer leur culture sans entrave, tout en fréquentant les structures de l’éducation publique.
Au niveau de la procédure pénale, l’interprétariat est autorisé.
IX. Respect des normes établies
280.L’article 41 de la Convention recommande aux États-parties de procéder tout d’abord à la refonte de leurs textes juridiques internes et à l’examen critique de leurs pratiques avant de ratifier la Convention. Cet exercice leur permet d’écarter tout ce qui n’est pas conforme à l’esprit de la Convention, ou encore de faire des réserves (art. 51), leur permettant d’évoquer une clause de la Convention contraire à leur système juridique national.
281.À titre d’exemple, le Gabon aurait dû harmoniser les différents seuils d’âge de la minorité de l’enfant qui existent dans sa législation avant de ratifier la Convention. C’est pourquoi le Gabon doit initier une loi fixant la majorité à partir de 18 ans.
X. Application et entrée en vigueur de la Convention
282.En ce qui concerne les articles 42 à 54, on retiendra seulement que le consentement à être lié en bonne et due forme à une Convention donnée par la signature, la ratification ou l’adhésion, lie l’État qui doit l’exécuter de bonne foi. L’autorité qui s’est exécutée l’a fait au nom de l’État. Après la ratification ou l’adhésion, les obligations résultant de la Convention ont une primauté sur le droit interne.
283.Adoptée le 20 novembre 1989 par l’Assemblée générale des Nations Unies, la Convention relative aux droits de l’enfant est entrée en vigueur le trentième jour qui a suivi le dépôt du vingtième instrument de ratification ou d’adhésion. Pour d’autres États Membres il s’agira du trentième jour qui suivra le dépôt de leurs documents de ratification ou d’adhésion auprès du Secrétariat général de l’Organisation des Nations Unies.
284.Au niveau du Comité des droits de l’enfant, les experts siègent à titre personnel, et ne représentent ni leur État, ni aucune organisation. Des avis et considérations sont donnés en toute objectivité et indépendance. L’article 42 de la Convention traite de l’obligation des États parties de faire une large diffusion de cette dernière. En effet, on ne peut prévaloir de ses droits que lorsqu’on les connaît. D’où, l’obligation faite aux États signataires de la Convention d’utiliser tous les moyens nécessaires pour la faire connaître à toutes les couches de la population: enfants comme adultes, civils comme militaires. Les médias, sous toutes leurs formes, les institutions, tant étatiques que privées, les groupements religieux et laïcs (Églises, syndicats) sont invités à y participer. La Convention recommande aussi la traduction de son texte en langue nationale ainsi que son insertion dans le programme scolaire.
285.La mise en place d’un Comité national de l’enfant avec des antennes en province facilitera le suivi de l’application de la Convention et l’élaboration des rapports au Comité des droits de l’enfant auprès de l’Organisation des Nations Unies.
286.Le présent rapport initial du Gabon a été rédigé à la demande du Gouvernement, sous la direction d’une consultante financée par l’UNICEF, en la personne du Professeur Joséphine IDZUMBIUR ASSOP, de nationalité congolaise, qui a reçu la collaboration de:
Mme Sonia MEYO, éducatrice spécialisée, chef du Service de l’assistance sociale spécialisée à la Direction générale des affaires sociales;
Mme Honorine NZET BITEGHE, magistrat, consultante UNICEF;
Mr Petit Lambert OVONO: Président de l’ONG Cose Enfants.
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