NATIONS

UNIES

CRC  

Convention relative

aux droits de l’enfant

Distr.

GÉNÉRALE

CRC/C/41/Add.12

23 décembre 2002

FRANÇAIS

Original: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES

EN VERTU DE L’ARTICLE 44 DE LA CONVENTION

Rapports initiaux des États parties devant être remis en 1996

Addendum

ÉRYTHRÉE

[27 Juillet 2001]

GE.02-46423 (EXT)

TABLE DES MATIÈRES

ParagraphesPage

Acronymes/abbréviations 6

Introduction 1 - 317

I.MESURES GÉNÉRALES DE MISE EN ŒUVRE 32 - 6314

A.Mesures prises pour mettre les lois et la politique de l’Érythrée

en harmonie avec la Convention 32 - 4214

B.Mécanisme existants ou envisagés pour coordonner les

politiques et surveiller l’application de la Convention 43 - 4918

C.Mesures prises pour faire connaître la Convention au public 50 - 6320

II.DÉFINITION DE L’ENFANT 64 - 9226

A.Considérations générales 64 - 6726

B.Emploi 6827

C.Âge de nubilité 69 - 7127

D.Déposition devant un tribunal 72 - 7328

E.Responsabilité pénale 74 - 7828

F.Privation de liberté 7930

G.Emprisonnement 8031

H.Consommation et vente d’alcool et de drogues 81 - 8231

I.Droits civils et politiques, et exercice des droits légaux83 - 8531

J.Éducation obligatoire 86 - 8732

K.Service militaire et forces armées 8832

L.Consentement à des relations sexuelles 89 - 9232

TABLE DES MATIÈRES (suite)

ParagraphesPage

III.PRINCIPES GÉNÉRAUX 93 –10533

A.Non-discrimination 93 - 9533

B.L’intérêt supérieur de l’enfant 96 - 9733

C.Droit à la vie, à la survie et au développement 98 - 10134

D.Respect des opinions de l’enfant 102 - 10534

IV.DROITS ET LIBERTÉS CIVILS 106 - 13535

A.Considérations générales 106 - 10835

B.Paternité 109 - 11236

C.Tutelle 113 - 11637

D.Nom et nationalité 117 - 12137

E.Préservation de l’identité 122 - 12438

F.Liberté d’expression 125 - 12739

G.Accès à une information appropriée12839

H.Liberté de pensée, de conscience et de religion 129 - 13039

I.Liberté d’association et de réunion pacifique 13139

J.Protection de la vie privée 132 - 13340

K.Droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines

ou traitements cruels, inhumains ou dégradants 134 - 13540

V.MILIEU FAMILIAL ET PROTECTION DE REMPLACEMENT 136 - 18341

A.Introduction 136 - 13841

B.Orientation et responsabilités parentales et familiales 139 - 14541

C.Séparation d’avec les parents 146 - 15043

TABLE DES MATIÈRES (suite)

ParagraphesPage

D.Recouvrement de la pension alimentaire pour l’enfant 151 - 15444

E.Enfants non accompagnés et enfants privés de leur milieu

familial 155 - 17645

F.Déplacement et non-retour illicites 17749

G.Mauvais traitements et négligence 178 - 17949

H.Examen périodique du placement 180 - 18349

VI.SANTÉ ET BIEN-ÊTRE 184 - 29550

A.Survie et développement 184 - 23050

B.Enfants handicapés 231 - 25161

C.Santé et services sanitaires 252 - 27667

D.Sécurité sociale et services de garde d’enfant 277 - 28873

E.Niveau de vie 289 - 29576

VII.ÉDUCATION, LOISIRS ET CULTURE 296 - 37378

A.Buts de l’éducation 296 - 30378

B.Facteurs influant sur l’éducation 304 - 30982

C.Éducation préscolaire 310 - 31583

D.Instruction élémentaire publique 316 - 33685

E.L’éducation des filles 337 - 34390

Disparités entre les zones urbaines et les zones rurales et

entre les régions34492

G.Enseignement privé 345 - 34792

TABLE DES MATIÈRES (suite)

ParagraphesPage

H.Formation technique et professionnelle 348 - 35393

I.Éducation spéciale 354 - 36194

J.Loisirs et activités culturelles 362 - 37396

VIII.MESURES SPÉCIALES DE PROTECTION DE L’ENFANCE 374 - 45499

A.Les enfants en situation d’urgence 374 - 39399

B.Les enfants en situation de conflit avec la loi 394 - 421103

C.Les enfants en situation d’exploitation 422 - 451109

D.Les enfants appartenant à une minorité ou à un groupe

autochtone 452 - 454115

IX.CONCLUSIONS 455 - 467116

Acronymes/Abréviations

CCTE

Code civil transitoire de l’Érythrée

CPTE

Code pénal transitoire de l’Érythrée

EDSE

Enquête démographique et sanitaire de l’Érythrée

EFTP

Enseignement et formation techniques et professionnels

EPS

Éducation et promotion en matière de santé

FPLE

Front populaire de libération de l’Érythrée

IRA

Infections respiratoires aiguës

MGF

Mutilations génitales féminines

MTPS

Ministère du travail et de la protection sociale

OIT

Organisation internationale du travail

ONG

Organisation non gouvernementale

OUA

Organisation de l’unité africaine

PIB

Produit intérieur brut

PNA

Programme national d’action

PNUD

Programme des Nations Unies pour le développement

SIDA

Syndrome immunodéficitaire acquis

TCI

Troubles dus à une carence en iode

UNFE

Union nationale des femmes érythréennes

UNICEF

Fonds des Nations Unies pour l’enfance

UNJEE

Union nationale de la jeunesse et des étudiants érythréens

VIH

Virus de l’immunodéficience humaine

Introduction

L’Érythrée a été exposée aux guerres pendant une bonne partie des quarante dernières années, d’abord pendant la lutte pour la libération (1961-1991), puis, plus récemment, au cours de la guerre de frontière avec l’Éthiopie (1998-2000). À cela, sont venues’ajouter des sécheresses et des famines très graves dans les années 1970 et 1980 (1973-1984, 1984-1985), suivies d’autres sécheresses et famines de moindre importance qui se poursuivent encore. Ces guerres, ces catastrophes écologiques et ces années pendant lesquelles il a fallu recourir à l’aide internationale ont eu un impact profond sur les populations rurales et urbaines, et ont appauvri une partie de la société.

Du 23 au 25 avril 1993, les Érythréens (résidant dans le pays et hors du pays) ont pris part à un référendum sous contrôle international. Les votants se sont prononcés, dans la proportion écrasante de 99,8 %, en faveur de l’indépendance, laquelle a été formellement proclamée le 24 mai 1993. L’Érythrée est devenue membre des Nations Unies le 28 mai 1993 et de l’OUA (Organisation de l’unité africaine) quelques jours plus tard; en septembre 1993, elle a signé la Convention relative aux droits de l’enfant et l’a ratifiée en août 1994.

Le présent rapport a été préparé conformément à l’article 44 de la Convention et sur la base des “Directives unifiées concernant la première partie des rapports des États parties” figurant dans le document HRI/1991/1.

Ce rapport est le produit d’une collaboration de tous les ministères et de toutes les ONG concernés. L’entité publique qui a la responsabilité des enfants en Érythrée est le Ministère du travail et de la protection sociale (MTPS). Il lui revient spécifiquement d’encourager, de faire respecter, de mettre en œuvre, de surveiller l’application de la Convention et de préparer des rapports à ce sujet. Outre la protection des enfants prévue par les lois et les autres instruments juridiques du pays, le MTPS a élaboré divers textes législatifs visant à généraliser à tous les enfants les droits qui leur sont accordés. Les pouvoirs publics de l’Érythrée se sont donnés comme objectif d’assurer la qualité des garderies d’enfants, concernant les soins de santé, l’éducation, les loisirs et la nutrition.

Des politiques ont été mises au point et des programmes préparés, en conséquence, afin de permettre d’atteindre les objectifs de la Convention, et les travaux nécessaires relatifs à sa mise en application ont commencé.

La guerre de 1998-2000 avec l’Éthiopie a obligé le Département des affaires sociales/ Division de la protection sociale de l’enfance et de la famille à opérer d’importants changements dans ses plans de travail afin de faire face à la grave situation provoquée par les expulsions massives d’Éthiopie, le déplacement d’un million et demie de personnes et les bouleversements inhérents à cet état de choses. Un grand nombre d’enfants ont souffert des perturbations causées par la guerre.

Comme il a été dit plus haut, le MTPS, et plus particulièrement la Division de la protection sociale de l’enfance et de la famille, a la responsabilité de la mise en application de la Convention. Il y a encore beaucoup à faire pour qu’elle soit complète ; néanmoins, le Programme national d’action en faveur de l’enfance constitue un cadre dans lequel elle peut être réalisée. Conformément à l’esprit de la Convention, une Unité de protection de l’enfant a été instituée au sein de la Division de la protection sociale de l’enfance et de la famille pour surveiller les activités du Ministère en ce domaine. Les actions menées jusqu’à présent comportent : la préparation de la loi sur l’enfance; la traduction de la Convention dans les diverses langues locales, sa distribution et sa diffusion par la radio; la préparation et la distribution de brochures, d’affiches, de cartes postales et de T-shirts destinées à la faire connaître; l’organisation d’ateliers nationaux et régionaux – avec la participation active des enfants – pour sensibiliser le public ; la formation en ce domaine des directeurs d’établissements scolaires, des enseignants, du personnel des organes chargés de faire respecter la loi, des jeunes, des membres de l’administration locale et des chefs religieux ; la constitution d’un Comité national de la Convention relative aux droits de l’enfant ; une campagne nationale intitulée “Dites oui aux enfants”; la publication annuelle et la distribution à titre gratuit, lors de la Journée de l’enfance (le 8 décembre), d’un magazine pour les enfants. Le plus important est le lancement, en 2001, du projet intégré pour le développement et la protection de la petite enfance. L’objet de ce projet est de dispenser des services pour répondre aux besoins fondamentaux des jeunes enfants en matière de soins de santé, de nutrition, de protection sociale et de stimulation psychosociale précoce pour les aider à tirer pleinement parti leur potentiel. Il s’agit d’un projet multisectoriel, impliquant six ministères (l’éducation, la santé, l’agriculture, la pêche, le travail et la protection sociale), des ONG et l’Université d’Asmara.

Le principal obstacle à la mise en application de la Convention est la situation socio-économique du pays et le défaut de mécanismes adéquats efficaces ; par exemple, le MTPS manque cruellement et, dans certains cas totalement, de ressources financières et humaines (s’agissant de personnel qualifié), ce qui l’empêche de faire toujours face à ses obligations, même quand existent les politiques et les directives appropriées qu’il doit suivre.

Dans les années 1950, l’Érythrée était économiquement avancée, comparée aux pays de l’Afrique subsaharienne. Trente années de guerre avant la libération de 1991, de négligence et de sous-développement dus au régime éthiopien Dergueont ravagé l’infrastructure économique et sociale du pays. Des décennies de possibilités de croissance gâchées ont fait de l’Erythrée l’un des pays les plus pauvres du monde.

De même, la guerre de 1998-2000 a affecté tous les aspects de la vie sociale et économique et a annulé tous les progrès réalisés depuis l’indépendance. Des centaines de milliers de personnes ont été déplacées dans la région, 75 000 ont été expulsées d’Éthiopie et une grande partie de l’infrastructure des zones touchées par la guerre a été détruite ou vandalisée par l’armée éthiopienne.

Les problèmes auxquels doivent faire face les enfants font partie des nombreux dilemmes relatifs au redressement économique, à la reconstruction et au développement qu’affronte l’Érythrée, mais les pouvoirs publics sont tout à fait conscients du fait que, de tous les citoyens, ce sont les enfants qui souffrent le plus de la guerre et de la famine. Tout cela a créé un environnement dans lequel les enfants, en particulier ceux qui sont en difficulté, sont considérés comme une priorité nationale.

Depuis qu’elle a officiellement gagné son indépendance, l’Erythrée construit ses structures législatives, judiciaires et administratives pratiquement à partir de zéro. Cependant, l’expérience acquise par le Front populaire de libération de l’Érythrée (FPLE) pendant la guerre a permis d’établir des structures juridiques dans les zones libérées qui, associées aux lois coutumières et aux pratiques démocratiques traditionnelles – par exemple le droit coutumier (Hegi Indaba) et les conseils de village (Baitos) de chaque communauté – se sont révélés utiles pour mettre en place une justice bien établie. La première phase de ce processus a été la rédaction d’une nouvelle Constitution érythréenne. La préparation du projet a impliqué un investissement public considérable, avec des débats dans tous les secteurs de la société. Afin qu’il fût tenu compte de toutes les opinions, ce processus a été lent. Le projet de Constitution, terminé en juillet 1996, après avoir fait l’objet d’un débat public, a été ratifié le 23 mai 1997, le jour du sixième anniversaire de l’indépendance.

La Constitution souligne les objectifs et les principes directeurs, les droits et devoirs fondamentaux ainsi que les libertés fondamentales auxquels tient la nation, et assure le fondement du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif électifs. Elle établit également un cadre pour la mise en place de l’administration de la justice et des principaux services publics. C’est un document relativement court, destiné à protéger tous les citoyens, qui ne détaille les droits d’aucun groupe particulier, y compris les enfants. Elle insiste sur l’égalité, l’unité, la paix et la stabilité, et garantit le droit de tous les citoyens de participer au pouvoir de décision pour tout ce qui concerne leur vie quotidienne. Quant aux filles, l’égalité stipulée par la loi et la disposition condamnant la discrimination permettent d’éliminer tous les partis pris à leur égard.

À la suite de la ratification de la Constitution de l’Érythrée, de nouvelles lois ont vu le jour et les codes anciens ont été revus et réformés. Les lois actuellement en vigueur en Érythrée sont essentiellement des lois éthiopiennes quelque peu amendées. Ces amendements comportent des articles de la Charte du FPLE concernant les droits fondamentaux de l’homme et les libertés fondamentales, dont beaucoup sont pertinents dans le cadre du présent rapport. La dernière main a été mise aux projets de Code pénal, de Code de procédure pénale, de Code civil, de Code de procédure civile et de Code de commerce qui attendent d’être approuvés par l’Assemblée nationale. La protection juridique de l’enfance telle qu’elle est prévue par les lois et les autres instruments juridiques du pays est, d’une manière générale, compatible avec les dispositions de la Constitution.

Les pouvoirs publicsde l’Érythrée doivent relever bien d’autres défis en matière de développement résultant des occupations coloniales du passé, des 30 années de guerre d’indépendance et de la guerre de frontière de 1998-2000. Lorsque le FPLE a pris les rênes du pays, l’infrastructure était pratiquement anéantie ; les transports étaient inutilisables, les sources d’énergie inexistantes, les moyens de communication limités et en très mauvais état, et les services sociaux – comme les établissements scolaires et les équipements sanitaires – totalement inadéquats. Les biens publics et ceux des personnes étaient détruits, de sorte que les particuliers devaient reconstruire leurs maisons et l’État ses établissements publics. Après l’indépendance, entre 1992 et 1997, le nouveau gouvernement de l’Érythrée a mis en place des politiques, des stratégies et effectué des investissements destinés à favoriser une croissance économique rapide bénéficiant à tous, conduite par le secteur privé. Il a élaboré une politique efficace d’investissement dans les industries d’infrastructure et les industries stratégiques. Il a adopté des politiques permettant de rétablir, d’améliorer et de développer les transports, les communications, l’accès à l’énergie et l’approvisionnement en eau, d’améliorer la capacité et la qualité du système de protection sanitaire, de l’enseignement et des services financiers, et de rétablir la productivité de l’économie, en particulier dans les domaines de l’agriculture, de la pêche, du tourisme, de la construction, des mines et des industries manufacturières. Pendant les années qui ont suivi l’indépendance et jusqu’à ce qu’éclate la guerre de frontière en 1998, l’Érythrée avait un taux de croissance annuel de 7 %, soit l’un des plus élevés d’Afrique (estimations du gouvernement de l’Érythrée et du Fonds monétaire international/Banque mondiale).

La guerre a ravagé les structures matérielles, mais les dommages causés à la vie individuelle et collective des habitants sont peut-être pires. Pendant la guerre d’indépendance, des dizaines de milliers d’Érythréens sont morts des conséquences directes ou indirectes des affrontements, et environ 1 million (soit un sur trois) sont devenus réfugiés, fuyant vers les pays voisins et même jusqu’au Moyen-Orient, en Europe ou aux Etats-Unis. La guerre de frontière de 1998-2000 avec l’Éthiopie et la sécheresse ont provoqué des déplacements massifs de population; au plus fort de cette guerre, en mai 2000, environ 1,5 million de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays et 1,75 million relevaient de l’aide internationale (80 % étant des femmes et des enfants). Ceux qui étaient restés dans les zones occupées par l’armée éthiopienne étaient persécutés et terrorisés, en particulier les femmes et les enfants. Beaucoup de ces derniers ont vu leur mère violée et l’ont été eux-mêmes. Parmi les 75 000 Érythréens et Éthiopiens d’origine érythréenne expulsés d’Éthiopie entre 1998 et 2001, il y avait un grand nombre d’enfants. Les personnes expulsées ont fait l’objet de séparations familiales cruelles et inhumaines, certains membres de la famille étant expulsés et d’autres obligés de rester. Les maris étaient séparés de leur femme, les femmes de leur mari, et les enfants de l’un de leurs parents ou des deux. Les parents étaient expulsés, mais les enfants restaient. Ainsi, de nombreux parents ignorent où se trouvent les enfants qu’ils ont laissés derrière eux, en Éthiopie, et des enfants non accompagnés ignorent ce qui est arrivé à leurs parents. Entre mai 1998 et novembre 2000, 450 enfants mineurs ont été expulsés vers l’Érythrée sans leurs parents; dans le même temps, 2 600 enfants ont été abandonnés en Éthiopie sans qu’aucun adulte s’occupe d’eux, car leurs deux parents avaient été expulsés. La peur, le déplacement, la mort et la séparation d’avec leurs parents ont fait se réouvrir les blessures causées par la guerre, qui avaient mis si longtemps à se cicatriser.

Il faut également relever des défis en matière de développement, non seulement afin de reconstruire les infrastructures détruites, mais encore afin de former les travailleurs qualifiés nécessaires pour soutenir ces efforts. Alors que l’Érythrée avait historiquement de bonnes relations avec beaucoup de ses voisins, les récents événements ont fait ressortir combien il est difficile de maintenir avec tous des rapports constructifs et harmonieux. L’environnement pose aussi un défi quand il faut créer un développement durable dans un pays dont les terres font l’objet d’une dégradation importante, de sécheresses répétées et qui (même dans les bonnes années) souffre d’un sérieux déficit alimentaire. C’est dans ce contexte économique bien médiocre que l’Érythrée doit relever les défis de la reconstruction, de la réorganisation et de l’objectif à long terme qu’est l’établissement d’un équilibre économique durable.

Le développement économique et la réduction de la pauvreté sont les objectifs centraux du programme national de développement depuis l’indépendance. En outre, les droits aux services sociaux comme ceux qui concernent les soins de santé de base et l’éducation sont reconnus comme étant des droits inaliénables de l’enfant. Dans le cadre des ressources et des capacités de l’État, la Constitution érythréenne, ratifiée en 1997, donne les garanties suivantes :

a)L’État s’efforce d’assurer un développement équilibré et durable dans tout le pays et met en œuvre tous les moyens disponibles pour permettre à tous les citoyens d’améliorer leurs conditions de vie de manière durable grâce à leur participation (art. 8, par. 2) ;

b)Tout citoyen a droit à l’égalité d’accès aux services sociaux financés par l’État. Ce dernier s’efforce, dans les limites de ses ressources, de mettre à la disposition de tous les citoyens des services de santé, d’éducation, des services culturels et d’autres services (art. 21, par. 2) ;

c)L’État assure, dans les limites des moyens disponibles, la protection sociale de tous les citoyens et, en particulier, de ceux qui sont défavorisés (art. 21, par. 2);

Le gouvernement a conçu une image de l’Érythrée nouvelle qui est initialement apparue dans le Document de macro-politique de 1994, et, plus récemment, dans le Cadre national et le programme national de politique économique présentés en 1998. Cette stratégie présente certains des éléments suivants : a) amélioration des compétences et du bien-être des individus grâce à des investissements dans les domaines de l’éducation, de la nutrition, des soins de santé, de l’approvisionnement en eau et des installations sanitaires; b) lutte contre la pauvreté rurale grâce à des investissements dans l’infrastructure rurale, l’agriculture, la gestion du bétail et des pâturages et grâce au développement du secteur de la pêche, en élaborant une stratégie de rattrapage après plus de 30 ans de guerre, de sécheresses récurrentes et de possibilités de croissance socioéconomique gâchées.

Le principal objectif de développement national consiste à mettre sur pied une économie moderne, technologiquement avancée et compétitive au plan international dans les 20 années à venir, comme il est indiqué plus bas. Les efforts de développement national, par conséquent, tendront :

a)À intensifier la production agricole grâce au développement des cultures irriguées et à une amélioration de la productivité des agriculteurs, des pasteurs et des agro-pasteurs ;

b)À développer des industries et des services d’équipement, de matière grise et des industries et des services orientés vers l’exportation ;

c)À améliorer, en particulier au plan technologique, le secteur non structuré ;

d)À développer le secteur du tourisme et à créer des centres de conférences et de conventions de grande qualité ;

e)À créer un centre financier international compétitif;

f)À mettre en place un système national de protection sanitaire développé et bien organisé;

g)À organiser un enseignement d’envergure avec une large diffusion des compétences et des connaissances linguistiques et une formation étendue du capital humain;

h)À mettre en place un système de protection sociale et de sécurité sociale efficace ;

i)À instaurer un système politique décentralisé et démocratique;

j)À faire de l’Érythrée une nation pacifique et stable à l’intérieur, et vivant en harmonie avec ses voisins; et

k)À en faire aussi un État libre où les droits de l’homme soient respectés.

Des cadres stratégiques plus détaillés ont été établis dans des domaines spécifiques.

Dans le domaine de la santé, les services sanitaires de base sont en cours d’extension à l’ensemble du pays, conformément aux principes de la politique des soins de santé primaires, comme l’égalité, l’accessibilité, la solvabilité des bénéficiaires et la participation des collectivités aux services dispensés de manière intégrée. D’autres sujets importants de préoccupation seront la décentralisation et la collaboration intersectorielle. Le Ministère de la santé a déjà mis au point une politique relative aux services sanitaires des collectivités selon laquelle ces dernières devront choisir leurs propres agents dans les villages, qui seront responsables devant elles. L’État participera à la formation des agents des collectivités et à la fourniture initiale des articles essentiels, les collectivités devant progressivement assumer la responsabilité de la mise en œuvre durable de ces services. Depuis l’indépendance, les services publics ont beaucoup progressé ; en 1999, environ 70 % des citoyens vivaient à moins de dix kilomètres d’un service de santé, contre 10 % au moment de l’indépendance, en 1991. Le nombre des membres (professionnels) des professions sanitaires a augmenté de près de 70 %, passant de 2 550 en 1993 à 4 240 en 1999, et celui des médecins a augmenté de 150 %, passant de 58 à 145.

Dans le domaine de l’instruction élémentaire, les déclarations de macro-politique et les directives stratégiques du Ministère de l’éducation engagent l’État à organiser l’instruction élémentaire obligatoire, y compris dans la langue maternelle, et à assurer, in fine, l’accès de toutes les personnes à cet enseignement. La politique gouvernementale prévoit également un enseignement non scolaire destiné à la majorité de la population qui, actuellement, échappe au système. La politique nationale de développement des ressources humaines a établi un cadre de développement pour l’éducation. Les principaux objectifs de l’éducation et de la formation en Érythrée sont les suivants : a) former une population dotée des compétences, des connaissances et de la culture nécessaires pour participer à une économie autonome et moderne; b) sensibiliser la population pour qu’elle se motive afin de lutter contre la pauvreté, la maladie et toutes les causes d’arriération mentale et d’ignorance qu’elles entraînent ; et c) mettre l’instruction élémentaire à la portée de tous. Pour les atteindre, les pouvoirs publics ont adopté un ensemble de politiques d’enseignement et de formation (dont le détail figure, ci-dessous, dans la section consacrée à l’éducation).

Afin d’améliorer l’accès à l’éducation, le gouvernement a accru les dépenses budgétaires relatives à l’enseignement , qui sont passées de 4 % en 1993 à plus de 9 % en 2001. La priorité absolue en matière d’éducation est d’améliorer sa qualité et d’accroître le nombre des inscriptions dans l’enseignement primaire (classes de niveaux 1 à 5). Dans l’état actuel des choses, 70 % des ressources de l’éducation vont à l’enseignement primaire, et près de 78 % des écoles primaires sont situées dans des zones rurales. Il en est résulté que le nombre des inscriptions dans les écoles primaires et les collèges est passé d’environ 178 800 en 1991/92 à 370 000 en 2000. Dans le même temps, le nombre des inscriptions dans les établissements secondaires est passé de 27 600 à 60 000, tandis que celui des étudiants, dans les universités, s’est élevé de 2 940 à 4 100. Toutefois, 60 % des enfants âgés de 7 à 11 ans ne sont pas scolarisés.

Entre 1998 et 2001, le nombre des hommes et des femmes bénéficiant de programmes d’enseignement aux adultes est monté en flèche pour atteindre 90 000, dont 90 % étaient des femmes.

Le gouvernement envisage d’accroître régulièrement la proportion des dépenses d’éducation entre 2001 et 2005, pour qu’elles atteignent 14 % des dépenses publiques en 2005.

Dans le domaine des affaires sociales, la politique gouvernementale consiste à promouvoir la protection juridique des enfants et des jeunes contre toutes les formes d’exploitation, économique, sexuelle et autres. Elle encourage également à renforcer les programmes de sécurité sociale traditionnelle et d’auto assistance et à défendre les droits des enfants, des handicapés et des autres groupes vulnérables grâce à une participation et à une collaboration actives des collectivités et des organisations gouvernementales et non gouvernementales concernées.

C’est grâce à ces objectifs stratégiques que les pouvoirs publics visent à surmonter les obstacles considérables auxquels le pays doit faire face aujourd’hui. L’Érythrée est actuellement l’un des pays les plus pauvres du monde, avec un PIB estimé à environ 200 dollars EU par personne. Le gouvernement n’a pas hérité d’une dette, mais en raison des ravages causés à l’économie du pays, avec une proportion relativement importante de citoyens au-dessous du seuil de pauvreté, il lui est très difficile de lever des fonds. La guerre récente, associée à la sécheresse, a fait chuter la production agricole, rendant la quasi-totalité de la population rurale dépendante de l’aide alimentaire. La guerre a pris fin en 2000, mais une sécheresse d’une gravité et d’une durée exceptionnelles se poursuit en 2002, mettant en danger la survie des personnes et des animaux.

Situation démographique. Selon les estimations, l’Érythrée compte 3,7 millions d’habitants sur son territoire, 700 000 à 1 million d’Érythréens vivant à l’étranger. Ces chiffres sont basés sur des estimations faites au niveau des villages, car aucun recensement formel n’a été organisé. Environ 50 % sont des enfants âgés de moins de 18 ans, dont 18 % ont moins de 5 ans. Le taux de croissance annuel est estimé à 2,7 %. L’espérance de vie est d’environ 51 ans, légèrement supérieure à la moyenne subsaharienne (qui est de 47 ans), mais bien inférieure à celle des autres pays à faible revenu qui est de 59 ans. Neuf groupes ethniques se partagent le pays, dont les plus importants sont celui les Tigrinya (50 %) et les Tigre (31 %). Des résultats probants ont été atteints malgré les problèmes auxquels le pays doit faire face. Le taux de mortalité infantile est passé de 72 pour 1 000 naissances vivantes en 1992 à 48 en 2002, et celui des enfants âgés de moins de 5 ans de 140 pour 1 000 naissances vivantes en 1992 à 93 en 2002 (ce qui en fait l’un des plus bas d’Afrique). Le taux de mortalité lié à la maternité est d’environ 985 décès pour 100 000 naissances vivantes, c’est-à-dire l’un des plus élevés en Afrique subsaharienne. Quelque 89 % des filles âgées de 7 ans ont subi une mutilation génitale. Il est très difficile d’avoir accès à des services de santé génésique de qualité, en particulier ouverts aux jeunes; en fait, les services de soins prénatals ont été réduits, passant de 49 à 40 % entre 1995 et 1999.

L’Érythrée fait partie des pays à faible taux d’infection par le VIH, à savoir environ 3 % en 2000 ; néanmoins, le Ministère de la santé estime que ce taux double tous les 18 mois, ce qui veut dire que, si rien n’est fait, il atteindra 12 % d’ici à 2006. Les orphelins du SIDA s’ajoutent déjà aux orphelins de guerre qui étaient presque 80 000 en 1999, ce nombre n’incluant pas ceux de la guerre de frontière de 1998 à 2000. En 2002, on avait enregistré 552 orphelins du SIDA qui recevaient une aide du MTPS. Le taux d’alphabétisation des adultes est d’environ 30 %. Le taux brut d’inscriptions dans l’enseignement primaire est d’environ 52 %. Le taux d’accès à l’eau potable et à des installations sanitaires adéquates est très bas, 22 % et 18 % respectivement, selon les estimations ; l’insuffisance du réseau d’approvisionnement en eau potable a été aggravée par la destruction des installations pendant la guerre et par la sécheresse. Malgré une évolution encourageante, il reste encore beaucoup à faire pour améliorer l’hygiène et le bien-être général des femmes et des enfants.

Certaines statistiques fournies par l’Enquête démographique et sanitaire de l’Érythrée (EDSE) de 2002 ont été mentionnées dans le présent rapport, mais celles qui sont données dans de nombreuses sections sont encore celles de l’Enquête de 1995; le rapport final de la nouvelle EDSE ainsi qu’une étude nationale sur les handicapés devraient être terminés d’ici à la fin de 2002. Depuis l’indépendance, les pouvoirs publics et l’UNICEF ont procédé à trois analyses de la situation des femmes et des enfants, dont la première en 1994; une mise à jour de la situation a été faite en 1996 au vu des nouvelles données de l’EDSE de 1995 ; une troisième analyse a eu lieu en 2001. Bien que cette dernière appelle une mise à jour lorsque les résultats de l’EDSE de 2002 seront disponibles, elle demeure l’étude la plus récente couvrant tous les aspects de la situation des femmes et des enfants en Érythrée. En outre, le MTPS a effectué diverses études et évaluations de la situation des enfants en Érythrée, dont : Évaluation du programme de réintégration des orphelins dans leur famille élargie et des foyers d’hébergement ; Évaluation des besoins psychosociaux des enfants touchés par la guerre ; une évaluation de la situation des enfants séparés de leurs parents dans les camps de personnes déplacées à l’intérieur du territoire et diverses analyses de la situation des enfants vulnérables. Il est cependant évident que le manque de données de base sur les indicateurs sociaux et économiques importants constitue un obstacle à l’élaboration, à la surveillance et à l’évaluation des programmes à tous les niveaux. Au fur et à mesure que les divers organismes gouvernementaux et non gouvernementaux qui élaborent et mettent en œuvre les projets renforceront leurs capacités, les données de base seront collectées et incorporées aux processus de planification, de mise en œuvre et d’évaluation.

i. MESURES GÉNÉRALES DE MISE EN ŒUVRE

A. Mesures prises pour harmoniser le droit et la politique érythréens

avec les dispositions de la Convention

En tant que pays récemment libéré, l’Érythrée a, devant elle, une formidable tâche à accomplir afin de donner aux droits de l’enfant une véritable assise dans ses structures législatives, judiciaires, administratives et institutionnelles. En raison du colonialisme et de la longue histoire d’oppression qui est celle de l’Érythrée, en raison de la guerre récente, des atteintes massives aux droits de l’homme et de l’extrême dénuement, dont la famine est un des aspects, la transition de ce pays vers une nation dont la population soit attachée aux droits de l’enfant représente un vrai défi.

Pendant la guerre, le FPLE a prôné et défendu les droits fondamentaux de l’homme, et la plus grande partie de la population accepte l’idée qu’il est nécessaire, non seulement que ces droits figurent dans la loi, mais encore que la société se dote de structures solides, formelles et informelles, qui en garantissent le respect.

Les pouvoirs publics de l’Érythrée comprennent l’urgence qu’il y a à collecter des données de base, à élaborer des politiques et des directives détaillées et à mettre en œuvre des programmes permettant de répondre aux besoins fondamentaux des enfants ; le MTPS en a fait une priorité. Par ailleurs, la priorité absolue, pour le gouvernement, est le renforcement des capacités des ministères et le développement des ressources humaines d’une manière plus générale. Le développement de la législation relative aux droits de l’enfant et l’établissement d’un cycle budgétaire, dans le cadre de la mise en œuvre de la Constitution, ont été deux autres priorités. Le MTPS est en train de terminer de mettre au point diverses politiques sociales, comme la Politique nationale de protection sociale de l’enfance et de la famille et une politique concernant la prostitution. On s’est beaucoup attaché à sensibiliser le public à la Constitution et à l’importance qu’ont l’éducation et la protection des enfants d’une manière générale.

Pendant l’élaboration de la Constitution, l’Érythrée a procédé à un examen de ses lois pour voir dans quelle mesure elles correspondaient aux dispositions des diverses conventions et déclarations internationales auxquelles elle avait souscrit. Dans l’ensemble, la rédaction de la Constitution a été l’aboutissement d’un processus qui est parti de la base, la population ayant fait l’objet de vastes consultations dans l’ensemble du pays. Les délibérations se sont déroulées dans le contexte ci-après.

La famille est l’institution la plus fondamentale de la société érythréenne pour ce qui est de l’éducation des enfants, et elle peut utilement contribuer à faire d’eux des citoyens productifs et compétents. L’article 22 de la nouvelle Constitution, qui traite de la famille, répond à certains critères imposés par la Convention : l’homme et la femme doivent être âgés de plus de 18 ans pour se marier et exprimer, tous deux, leur plein accord pour cela et pour fonder une famille. Il garantit également l’égalité des conjoints dans le mariage et dans le divorce.

Selon la Constitution, la famille est la cellule de base naturelle de la société et a droit à la protection et à la sollicitude particulière de l’État et de la société, ce qui s’étend également aux enfants. Il est ajouté, dans le même article, que les parents, eux aussi, ont l’obligation et le droit d’élever les enfants avec tout le soin nécessaire et en leur assurant la protection qui s’impose. Bien que, traditionnellement, les enfants soient un objet d’amour pour leurs parents et pour la société en général, il est courant qu’ils soient engagés dans des activités économiques (production de denrées et services), au domicile familial et hors du domicile, en tant qu’employés ou apprentis.

Le gouvernement de l’Érythrée a signé et ratifié la Convention relative aux droits de l’enfant, et cela va aider à assurer la protection des droits, des libertés et de la dignité des enfants. Avant la mise en œuvre de la Déclaration universelle des droits de l’homme et des autres pactes, les droits fondamentaux des enfants n’étaient reconnus ni au plan national, ni au plan international. Il est devenu clair, récemment, que les enfants sont victimes de violations de leurs droits et des conséquences des problèmes sociaux : violence, conflits militaires, exploitation, pauvreté, handicaps, etc. Cette situation a donc motivé une initiative qui se poursuit afin d’assurer leur sécurité. Comme il apparaît dans la Convention, l’intérêt supérieur de l’enfant doit passer avant tout.

L’article 22 de la nouvelle Constitution prévoit que les enfants doivent faire l’objet de soins appropriés, mais les parents, la société et l’État ont envers eux, et pour cela, une responsabilité collective. La plupart des instruments internationaux et régionaux relatifs aux droits de l’homme prévoient, entre autres :

a)Le droit d’avoir un nom dès la naissance et celui d’avoir une nationalité;

b)Le droit à la sécurité, à une alimentation adéquate et aux services sanitaires et sociaux de base;

c)Le droit à ne pas être privé d’un milieu familial et à la protection contre les mauvais traitements;

d)Le droit de l’enfant à être protégé contre l’exploitation dans le milieu du travail. Il est interdit d’imposer à un enfant des travaux dangereux , ou des travaux ou un emploi susceptibles de nuire à son éducation, à sa santé ou à son développement ;

e)Que les jeunes délinquants doivent faire l’objet d’un traitement qui tienne compte de leur âge et de leurs possibilités de développement.

Il faut concevoir une définition appropriée de l’enfant en Érythrée. Selon les normes de nombreuses constitutions, l’enfant atteint l’âge de la majorité à 18 ans révolus. Concernant les autres droits et obligations inscrits dans la Convention, la Commission chargée de la Constitution a soulevé les point ci-après pour qu’ils fassent l’objet de débats publics :

Nom. Le droit d’avoir un nom est un droit universel. Le nom fait partie intégrante de l’identité d’une personne. En tant qu’obligation inhérente à ce droit de l’homme, l’enfant reçoit, lors de la déclaration de naissance, un acte de naissance.

Nationalité. L’enfant a le droit d’acquérir une nationalité immédiatement après la naissance. Le but en est de protéger ainsi son droit à la citoyenneté. Cela permet aux enfants de jouir de leur droit à la citoyenneté et des autres droits prévus par la Constitution de leur pays.

Orientation parentale. La loi doit reconnaître le droit des parents à protéger leurs enfants contre toute intervention arbitraire de tout organe administratif. Le problème se pose du rôle que doit jouer l’État si l’enfant est orphelin ou si ses parents sont inaptes à l’élever. Dans ces circonstances, il a droit à des conditions de remplacement. Aux termes de l’article pertinent de la Convention, l’État est tenu d’établir des institutions de garde d’enfants.

Nutrition et services de santé de base. Nous avons là un exemple concret de droit socio-économique, et les pouvoirs publics ont les moyens de lever les obstacles à l’application de ce droit. Il vise d’abord à la protection des enfants contre les mauvais traitements, la négligence, la faim et les abus. Il est possible à l’État de fournir un minimum de denrées alimentaires et de services de santé même dans les zones les plus défavorisées. Cela doit être l’une de ses obligations fondamentales, mais qui ne peut être remplie qu’en fonction du niveau de développement du pays.

Négligence et abus. Les enfants ont droit à être protégés contre la négligence et les abus. Selon cet article de la Convention, les pouvoirs publics sont tenus de prendre les mesures appropriées en cas de violation de ce droit. Toutefois, le rôle spécifique de l’État n’est pas clairement défini concernant la protection des enfants contre les abus et la négligence dans le cadre familial et dans celui des relations privées, non plus que les limites dans lesquelles il peut intervenir.

Travail des enfants. Des textes législatifs doivent régir le nombre d’heures de travail pouvant être accomplies par les enfants (il doit s’agir d’un travail léger effectué après le temps scolaire), et le type de travail qu’il est interdit de leur imposer doit être le même dans le cadre familial et hors de ce cadre.

Détention. Il faut prévoir une disposition particulière pour les jeunes délinquants, qui doivent être détenus séparément des adultes. L’enfant doit avoir le droit de garder le contact avec sa famille et le droit aux informations relatives à l’éducation.

Reconnaissance de paternité. Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels interdit toute discrimination fondée sur la naissance. La définition de l’enfant, dans la Constitution, concerne à la fois ceux qui sont légitimes et ceux qui sont nés hors mariage. La loi ne doit permettre aucune discrimination en matière d’héritage.

La Constitution de l’Érythrée a été ratifiée le 23 mai 1997 par une assemblée constituante représentant tous les Érythréens, ceux qui résident dans le pays comme les autres. Les élections législatives seront organisées conformément à la Constitution et le peuple de l’Érythrée élira une nouvelle Assemblée nationale qui, une fois installée, aura aussi la responsabilité de décréter les lois, d’en surveiller l’application et d’approuver les comptes prévisionnels de la nation. D’ici là, une Assemblée nationale de 150 membres est en place. La législation relative aux droits de l’enfant a été élaborée à la suite de la ratification de la Constitution et, actuellement, est en cours d’examen.

Le Comité chargé de la législation relative à l’enfance a été institué par le MTPS. Il procède à l’examen des rapports entre les dispositions de la Convention, la nouvelle Constitution, les lois transitoires et le droit coutumier de l’Érythrée. Il est composé de représentants de tous les ministères concernés et de quelques ONG qui se consacrent à la défense des droits de l’enfant. Le Comité a publié, en 1996, un document de synthèse sur les divergences constatées entre les diverses lois et les principes sur lesquels elles sont fondées.Une partie du présent rapport repose sur l’examen de ce document. Au terme d’une recherche participative menée dans l’ensemble du pays sur les pratiques en matière d’éducation des enfants et d’une étude du droit coutumier, le Comité chargé de la législation relative à l’enfance a élaboré des projets de loi qui tiennent compte de tous les aspects de la Convention. Ces projets sont actuellement en cours d’examen au Ministère de la justice.

B. Mécanismes existants ou envisagés pour coordonner les politiques

et surveiller l’application de la Convention

La responsabilité de promouvoir, de faire appliquer et de mettre en œuvre la Convention, de surveiller l’exécution des mesures prises à cet effet, de procéder à des inspections et d’établir des rapports à ce sujet incombe au premier chef au MTPS.

Le MTPS a créé une Division de la protection sociale de l’enfance et de la famille qui a pour objectifs :

de promouvoir, d’une manière générale, les intérêts des enfants ;

b)d’élaborer des politiques, des procédures et des directives relatives à des programmes et à des projets concernant les enfants ;

c)d’entreprendre des enquêtes et d’établir des dossiers sur les enfants ayant besoin de mesures de protection ;

d)de définir et de mettre en œuvre les mesures de protection et les services nécessaires aux enfants en situation particulièrement difficile ;

e)d’allouer de manière équitable des ressources aux services sociaux qui s’occupent des enfants.

Pour s’acquitter de cette responsabilité, le MTPS a créé, au sein de la Division de la protection sociale de l’enfance et de la famille, une Unité chargée des droits de l’enfant dont les responsabilités, en rapport avec Convention, sont les suivantes :

a)Protéger et préserver les droits de l’enfant;

b)Sensibiliser pleinement le public à la Convention;

c)Coordonner les activités, comme les séminaires et les ateliers, pour faire appliquer la Convention et contrôler cette application ;

d)Préparer des rapports relatifs à la Convention;

e)Effectuer des recherches concernant les besoins des enfants, en particulier ceux qui ont des besoins spéciaux;

f)Publier et distribuer des opuscules, des affiches, des dessins et des brochures enrichies de photographies ;

g)Organiser la publicité dans l’ensemble du pays et diffuser les informations relatives à la Convention par l’intermédiaire des médias.

Le Projet intégré de développement de l’Érythrée concernant la petite enfance a été lancé en 2001. Il a été conçu pour répondre aux besoins fondamentaux des jeunes enfants en matière de soins de santé, de nutrition, de protection sociale et de stimulation psychosociale précoce afin de les aider à tirer plein parti de leur potentiel.

Le MTPS travaille également en collaboration avec les organismes des Nations Unies, en particulier l’UNICEF, et les ONG nationales et internationales pour promouvoir la Convention. À la suite de la guerre de frontière de 1998 avec l’Éthiopie, un groupe de travail pour la protection de l’enfance a été créé par le MTPS et l’UNICEF, représentant tous les organismes des Nations Unies ainsi que les ONG locales et internationales travaillant pour les enfants. Le MTPS a élaboré et mis en œuvre des programmes destinés aux enfants ayant besoin d’une protection spéciale. Diverses études et évaluations ont été effectuées. Ces programmes, qui ont été mis au point et sont en cours d’exécution, sont axés sur :

La réintégration des orphelins dans leur famille élargie et l’appui aux familles qui s’occupent d’eux ;

Le placement des orphelins en établissement ;

Le placement familial, l’adoption et les foyers d’hébergement pour les orphelins et les enfants non accompagnés;

La réadaptation communautaire des enfants handicapés ;

Les ateliers orthopédiques fabriquant du matériel pour les enfants handicapés;

La réinsertion des enfants des rues et des enfants qui travaillent ;

Les services pour les jeunes délinquants ;

La formation professionnelle ;

L’exploitation sexuelle des enfants ;

Les enfants touchés par la guerre : les enfants déplacés et les enfants expulsés..

En 1996, a été établi le Comité chargé de la Convention relative aux droits de l’enfant. Il est composé de représentants des ministères du travail et de la protection sociale, de l’intérieur, de la santé, de la justice, de l’information et de l’éducation, ainsi que de la Commission de la Constitution. Y sont également représentées deux ONG locales, l’Union nationale des femmes érythréennes (UNFE) et l’Union nationale de la jeunesse et des étudiants érythréens (UNJEE). Le Comité est placé sous l’autorité du MTPS qui fournit le service de secrétariat. Ses principales fonctions sont la coordination des activités intersectorielles et la mise en commun des informations. Depuis la guerre de 1998 avec l’Éthiopie, le Comité participe aux efforts déployés pour aider les enfants affectés par la guerre. En 1999, il a pris part à l’organisation d’une exposition sur les droits de l’enfant et, en 2001, il a contribué à la campagne “Dites oui pour les enfants”. Enfin, il a participé à la mise à jour du présent rapport.

Le Programme national d’action 1996-2000 et le nouveau programme pour 2002-2006, tiennent compte de la plupart des points soulevés par la Convention. Ces différents aspects seront présentés en détail dans les chapitres sectoriels ci-après.

C. Mesures prises pour faire connaître la Convention au public

Pour sensibiliser le public aux principes de la Convention, une version en tigrinya (la langue locale) a été publiée et diffusée auprès des membres des administrations, des représentants des organismes des Nations Unies, des ONG et des représentants des collectivités lors de la cérémonie organisée à l’occasion de la signature de la Convention en 1993. Au moment de sa ratification, en août 1994, s’est fait sentir le besoin d’organiser un atelier national permettant de débattre de la Convention et de la manière de l’appliquer. L’organisme en charge des affaires sociales à ce moment (aujourd’hui le Département des affaires sociales, au MTPS), avec l’appui de l’UNICEF, a invité des représentants des institutions et des organisations qui s’occupent des enfants, des lois et de la recherche, et a proposé que soit instituée une commission chargée de la préparation de cet atelier.

L’Atelier national qui s’est réuni à Asmara les 7 et 8 décembre 1994 visait :

a)À sensibiliser les personnalités influentes de divers milieux, dont le monde politique, aux principales dispositions de la Convention ;

b)À sensibiliser le public aux conditions dans lesquelles les enfants vivent en Érythrée et à l’amener à rapprocher ces conditions des dispositions de la Convention ;

c)À faire pression pour que les éléments de la Convention soient intégrés à la législation et à la politique de l’Érythrée ;

d)À concevoir (et créer) des organes chargés de sensibiliser le public à la Convention, d’en faire des études, d’en assurer la mise en œuvre, de surveiller cette mise en œuvre, de procéder à des évaluations et d’établir des rapports à ce sujet.

Environ 300 personnes, dont un grand nombre d’enfants, ont participé à la totalité de cet atelier. Il y avait des fonctionnaires, des administrateurs, des représentants des ONG, des chefs spirituels et des chefs des communautés traditionnelles. Des enfants âgés de 11 à 14 ans avaient été invités de toutes les régions du pays pour représenter les enfants, y compris les handicapés, des neuf groupes ethniques. Ils ont activement participé à toutes les séances. Les préoccupations qu’ils ont exprimées et les recommandations présentées ont porté sur les châtiments corporels, le droit à l’école, la question du mariage précoce, la définition de l’enfant, le problème des pratiques traditionnelles nocives, la discrimination à l’égard des filles et des enfants handicapés.

L’atelier a reconnu le bien-fondé des aspects fondamentaux de la Convention relative aux droits de l’enfant et insisté sur le droit à la survie, le droit au développement, le droit à la protection et le droit à la participation. Il a reconnu aussi les principales difficultés auxquelles l’Érythrée devait faire face – les effets à long terme de la guerre et des catastrophes auxquelles la population a été exposée, les compétences économiques et techniques limitées, l’absence d’attention portée par la population à la Convention et les traditions nocives qui restent vivaces – toutes choses propres à ralentir la mise en œuvre de la Convention.

L’atelier a recommandé :

a)Que le texte de la Constitution prenne sérieusement en compte le fait que la Convention relative aux droits de l’enfant fait maintenant partie de la législation de l’Érythrée;

b)Qu’une structure (à savoir une organisation/un organe) soit créée, et même, de préférence deux, l’une chargée de la responsabilité d’appliquer les droits de l’enfant, l’autre pour en assurer la surveillance et établir des rapports ;

c)Que cette organisation ou ces organisations soient créées par l’Assemblée nationale et responsables devant elle, et qu’elles soient composées de représentants des ministères et des ONG concernés, ainsi que des diverses composantes de la société. Car l’application de la Convention ne doit pas être confiée aux seuls pouvoirs publics, divers éléments de la société devant faire partie de l’organe qui en est responsable;

d)Qu’une étude soit effectuée dans l’ensemble du pays pour aider la population à comprendre dans quelle situation se trouvent actuellement ses enfants, et qu’elle serve de base au processus de mise en œuvre de la Convention ;

e)Que la Convention relative aux droits de l’enfant soit publiée dans toutes les langues de l’Érythrée;

f)Que les programmes relatifs aux enfants soient publiés ou diffusés par les médias;

g)Que les droits de l’enfant soient intégrés dans les programmes scolaires et les programmes de formation;

h)Qu’aux droits de l’enfant fassent pendant les devoirs de l’enfant;

i)Que les pratiques traditionnelles nocives soient interdites par la loi;

j)Que les groupes vulnérables – orphelins, handicapés, enfants des rues, enfants qui travaillent (en particulier dans les industries) et enfants ayant abandonné l’école – fassent l’objet d’une attention particulière en vue de leur réinsertion ;

k)Que les jeunes délinquants fassent l’objet d’une orientation et d’une attention spéciales;

l)Que l’apport des services sociaux (écoles, services médicaux, etc.) soit réparti équitablement entre tous les enfants ;

m)Que des internats soient créés pour les enfants défavorisés;

n)Que des ateliers concernant la Convention relative aux droits de l’enfant soient organisés aux niveaux des régions, des districts et des villages.

À la suite de ces recommandations, des ateliers régionaux ont été mis sur pied dans toute l’Érythrée. Des hauts fonctionnaires, des représentants des élus, des chefs spirituels, des partenaires internationaux, des ONG et des enfants y ont participé. Quelque 1 200 personnes, en provenance des six régions du pays, ont pris part aux différents ateliers de mars à mai 1996.

Ces ateliers ont reconnu le bien-fondé des éléments fondamentaux de la Convention relative aux droits de l’enfant, ont insisté sur le droit à la survie, le droit au développement, le droit à la protection et le droit à la participation. Voici un résumé de leurs recommandations :

a)Les pratiques traditionnelles nocives devraient être interdites par la loi;

b)Les familles sont les unités de base de la société, et elles devraient élever et éduquer correctement leurs enfants;

c)Des programmes de sensibilisation devraient être lancés pour faire changer l’attitude négative de la collectivité à l’égard des enfants handicapés. Il faut également faire des efforts pour intégrer les enfants handicapés dans les établissements scolaires ordinaires et les établissements d’enseignement professionnel;

d)Les droits des enfants naturels devraient être garantis par la loi;

e)Les parents et les pourvoyeurs de soins devraient prendre garde lorsqu’ils punissent les enfants, et ces châtiments ne devraient pas causer de dommages physiques ou psychologiques ;

f)Il faudrait créer des établissements de redressement pour les jeunes délinquants;

g)Des ateliers sur les droits de l’enfant devraient être organisés aux niveaux des sous-régions et des villages;

h)Les droits de l’enfant devraient faire l’objet d’une diffusion par les médias;

i)L’ensemble de la collectivité, et , en particulier les chefs spirituels et les dirigeants civils devraient jouer chacun leur rôle pour que soient garantis les droits des enfants ;

j)Les espaces récréatifs pour les enfants devraient être multipliés ;

k)Il faudrait augmenter le nombre des jardins d’enfants et l’ensemble de la population devrait y participer activement;

l)Tous les enfants devraient bénéficier équitablement des services sociaux, comme les services de santé et les services éducatifs ;

m)Un comité devrait être créé pour mettre en œuvre la Convention et surveiller son application.

Ces recommandations sont utilisées pour l’élaboration de programmes et de projets. Elles ont servi à la préparation du Programme national d’action. Les recommandations relatives aux problèmes culturels seront plus longues à mettre en pratique, mais beaucoup l’ont déjà été depuis 1996, comme celles qui sont énumérées ci-après :

a)Des ateliers ont été organisés;

b)Le programme de développement relatif à la petite enfance tient compte de beaucoup de ces suggestions ;

c)L’article 836/1 du Code civil transitoire de l’Érythrée (CCTE) dispose que les enfants naturels doivent être considérés comme héritiers des défunts au même titre que les enfants légitimes. Dans le texte du projet du nouveau Code, il est fait référence à ces enfants comme enfants nés hors mariage ;

d)Les services de santé et les services éducatifs ont été étendus aux zones les plus marginales, le taux national de mortalité infantile est tombé de 72 décès pour 1 000 naissances vivantes en 1997 à 48 décès pour 1 000 naissances vivantes en 2002 ;

e)Les enfants handicapés ont été intégrés dans les établissements scolaires ordinaires.

Depuis la libération (avant la ratification de la Convention), la Division de la protection sociale de l’enfance et de la famille a organisé des manifestations qui ont attiré l’attention sur les droits de l’enfant. Pour célébrer la Journée internationale de l’enfance, des affiches et des brochures sont distribuées chaque année sur tout le territoire de l’Érythrée. En 1993, un magazine publié en tigrinya et en arabe, deux des langues les plus utilisées en Érythrée, a été distribué au public. La Journée de l’enfance africaine (16 juin), programmée par l’Organisation de l’unité africaine, est célébrée depuis 1993. Shiden, un magazine traitant surtout des droits de l’enfant, a été publié et distribué tous les trois mois de 1992 à 1994, et il l’est une fois par an depuis cette date.

Depuis l’atelier de 1994, de nombreux ateliers ont été organisés aux fins de sensibilisation à la Convention et aux questions qu’elle soulève, et d’autres ateliers aussi sur des problèmes particuliers comme le VIH/SIDA, les professionnel[le]s du sexe, “Dites oui pour les enfants”, l’Éducation pour tous.

Avec des moyens très limités en fait d’infrastructure et de ressources pour surveiller l’application de ces conventions et établir des rapports à ce sujet, et avec un personnel compétent mais manquant d’expérience en ce domaine, l’Érythrée a lutté afin de faire honneur à ses obligations envers la Convention. L’atelier a été un point de départ important du processus crucial qui a permis aux participants de bien comprendre tout ce que signifie, pour l’Érythrée, la signature et la ratification de ce document. Les activités ci-dessous ont été entreprises entre 1994 et 2002 :

a)La Convention a été traduite en tigrinya (20 000 exemplaires), en arabe (15 000 exemplaires), en tigre, en afar, en saho et en kunama (10 000 exemplaires de chacune des traductions) et distribuée dans toutes les régions;

b)Pour aider le public en général et les enfants en particulier, une version plus facilement compréhensible de la Convention a été préparée sous forme de bande dessinée ;

c)Un atelier national et six ateliers régionaux ont été organisés afin de sensibiliser le public à la Convention ;

d)Une brochure a été traduite en six langues locales et distribuée au public;

e)Tous les articles de la Convention ont été diffusés sur les antennes de la radio nationale (Dimtsi Hafash) en six langues;

f)Le rapport initial sur l’application de la Convention a été établi en 1997 ;

g)Un certain nombre de programmes de formation ont été organisés à l’intention du personnel chargé de l’application des lois, des enseignants, des jeunes, des membres de l’administration locale et des chefs spirituels ;

h)Près de 1 000 enseignants d’écoles primaires et de collèges de toutes les régions ont reçu une formation relative à l’application de la Convention ;

i)Un résumé de la Convention a été traduit en tigrinya et en arabe et distribué aux membres des administrations travaillant à tous les niveaux (plus de 5 000 sorties imprimées) ;

j)Un comité national a été formé pour coordonner les activités relatives au Mouvement mondial en faveur des enfants et à la campagne nationale “Dites oui pour les enfants” ;

k)“Dites oui pour les enfants” a connu une très forte participation de personnes venant de tous les milieux, qui se sont engagées à sauvegarder les droits des enfants. Les priorités suivantes ont été tenues pour essentielles parmi les 10 actions importantes menées par le Mouvement mondial en faveur des enfants : a) l’éducation pour tous les enfants (62 %); b) la lutte contre le VIH/SIDA (58 %); c) s’occuper de tous les enfants (43 %) ;

l)Des efforts sont actuellement déployés pour faire en sorte que les jeunes participent activement, en tant que membres à part entière des organes de discussion, aux processus de paix et à la mise au point de la politique relative aux jeunes, grâce à l’éducation, à la formation professionnelle et à la création de réseaux de jeunes ;

m)Un magazine pour les enfants est publié et distribué gratuitement une fois par an depuis 1992 ;

n)Plus de 135 000 exemplaires de différentes publications – brochures, affiches et cartes postales – ont été distribuées au public à l’occasion de la Journée internationale de l’enfance ;

o)Dans le matériel de promotion, il y a également 20 000 T-shirts portant des impressions relatives aux principes de la Convention, qui ont été distribués aux enfants et à leurs parents ou tuteurs aux fins de sensibilisation du public ;

p)Des études approfondies ont été effectuées concernant la viabilité des différents types de placement des orphelins .

Les autres plans concernant la promotion des droits de l’enfant et la mobilisation sociale en leur faveur sont les suivants :

a)Prévention et réinsertion, pour les groupes défavorisés : enfants des rues, professionnels du sexe/enfants victime d’une exploitation sexuelle, jeunes délinquants;

b)Promotion de l’épanouissement des jeunes : construction de centres récréatifs et de centres de formation pour les jeunes;

c)Réunion des orphelins à leur famille élargie : enquêtes et études sur les familles d’accueil, recherche de ces familles et évaluation de leurs besoins; organisation d’ateliers régionaux de mise en œuvre ; assistance génératrice de revenus pour les pourvoyeurs de services et renforcement de leurs capacités psychosociales, de la surveillance effectuée par les collectivités et de l’évaluation des besoins des enfants relevant de mesures de protection spéciale ;

d)Soins aux enfants et protection des enfants, assistance aux orphelins du SIDA; création de nouveaux foyers d’hébergement au niveau des collectivités; mise au point de politiques et de lois relatives aux enfants et à la protection sociale; sensibilisation de la collectivité aux droits de l’enfant ; réintégration des enfants déplacés, rapatriés et expulsés (intervention d’urgence) ; renforcement des capacités aux fins de promotion des soins aux enfants et de la protection des enfants ;

e)Services destinés aux jeunes délinquants : éducation du public concernant la prévention de la délinquance ; service de probation et service d’intérêt collectif pour les jeunes délinquants ;

f)Assurer la sécurité, la protection sanitaire et des conditions de travail décentes aux travailleurs mineurs : mettre au jour les conditions de travail de ce groupe particulier; former des inspecteurs; établir des comités de sécurité au niveau des établissements;

g)Effectuer des études qui sont essentielles pour la mise au point de la politique relative aux enfants et pour les interventions appropriées qu’ils nécessitent;

h)Développement des ressources humaines;

i)Créer et faire fonctionner des clubs de théâtre;

j)Organiser une série de conférences sur la Convention diffusées par la radio et la télévision ; et

k)Organiser un concours général portant sur la connaissance de la Convention parmi les différents groupes d’écoliers.

L’un des principaux objectifs de la politique du Ministère de l’information est de diffuser des programmes éducatifs et récréatifs propres à développer et à féconder la capacité de réflexion des personnes grâce aux médias. Les interventions en matière de communication faites avec l’appui de l’UNICEF entre 1996 et 2000 (programme en collaboration avec l’État de l’Érythrée) dégagent trois stratégies principales pour promouvoir l’application des droits de l’enfant : a) augmentation des ressources et engagement des responsables à atteindre les objectifs du développement ; b) mobilisation sociale en faveur d’un accroissement de la participation et du sens de la propriété ; et c) programmes enrichissant les connaissances des participants et les poussant à modifier leurs attitudes et leurs pratiques. Le droit à l’information fait l’objet de l’article 19 de la Constitution, selon lequel “toute personne a droit à la liberté de parole et d’expression , y compris la liberté de la presse.”

Le Ministère de l’information diffuse des programmes destinés aux enfants par le biais des médias, en collaboration avec le Ministère de l’éducation et l’UNJEE; une émission radiophonique est programmée trois jours par semaine sur les soins de santé de la mère et de l’enfant, assortie d’émissions récréatives. Il existe, en particulier, une émission hebdomadaire sollicitant la participation des enfants qui rendent compte de leurs problèmes et de leurs besoins en jouant des rôles et en participant à des séquences récréatives. Eri-TV présente aussi un programmes de dessins animés et de films documentaires. D’autres recherches ont été menées, qui ont débouché sur la mise au point d’un programme relatif au développement et à l’amélioration de la participation des enfants et des parents aux activités familiales et au processus de reconstruction du pays, en les rendant plus conscients de leurs devoirs et de leurs responsabilités. Des concours portant sur les connaissances générales sont également organisés pour encourager les enfants à se cultiver et à partager leurs expériences. Il faut ajouter à tout cela des émissions sportives pour les enfants. En outre, il existe un magazine trimestriel à eux destiné, Kolahta, publié par le Ministère de l’éducation, qui fait beaucoup pour développer l’aptitude des enfants au raisonnement.

II. DÉFINITION DE L’ENFANT

A. Considérations général es

Un citoyen est défini comme étant toute personne née d’un père ou d’une mère érythréen, ou tout étranger ayant acquis la citoyenneté érythréenne (art. 3 de la Constitution).

Le Code civil transitoire (art. 198) définit le “mineur” comme étant une personne de sexe masculin ou féminin âgée de moins de 18 ans révolus (l’âge de la majorité). Bien que cela signifie que l’âge de la majorité (auquel on cesse d’être un “mineur”) est 18 ans d’une manière générale, tout enfant peut, selon la loi, devenir majeur avant cet âge si, par exemple, il se marie avant sa dix-huitième année (art. 329), ou bien il peut être émancipé dès l’âge de 15 ans révolus si le conseil de famille en décide ainsi (art. 330). Cette loi est reconduite dans l’article 330 du projet de Code civil de l’Érythrée. La plupart des Érythréens, surtout dans les zones rurales, ont très peu affaire aux lois, car leurs droits et responsabilités économiques et sociaux sont régis par la coutume.

Selon certaines lois coutumières du pays (dans le groupe ethnique bilen), le passage de l’enfance à l’âge adulte est marqué (surtout pour les garçons) par une cérémonie “de majorité ”. À titre d’exemple, pour ceux qui adhèrent au droit coutumier Fithi Mehari Woadotat, il n’y a pas d’âge précis pour qu’un garçon devienne majeur; cela arrive lorsque la communauté considère qu’il a atteint la maturité nécessaire, soit entre 13 et 20 ans. La cérémonie de la majorité, appelée shinglat, peut durer 40 jours, pendant lesquels le garçon qui est devenu majeur reçoit des cadeaux de la part des membres de sa famille, à la suite de quoi il est considéré comme adulte et peut participer aux activités sociales de la communauté. Il peut témoigner, prendre part au conseil, être armé, il doit payer des impôts et d’autres contributions, et la viande des animaux qu’il tue peut être mangée.

Un aperçu des autres lois qui fixent l’âge donnant droit à tel ou tel droit ou pouvoir ou à telle ou telle protection , en Érythrée, figure ci-après. Nous nous sommes efforcés, quand c’était possible, d’indiquer comment les enfants sont considérés selon le droit coutumier en Érythrée. Ce dernier varie beaucoup d’un groupe ethnique à l’autre et d’une région à l’autre. Nous n’avons pas l’intention d’être exhaustif dans le présent rapport, mais de donner un petit nombre d’exemples pour montrer comment ces lois peuvent être en harmonie ou en contradiction avec les lois officielles.

B. Emplo i

Selon l’article 68/1 de la déclaration N° 118/2001 relative au travail, il est interdit d’employer une personne âgée de moins de 14 ans. Un contrat d’emploi ne peut pas être opposable à une personne âgée de moins de 18 ans s’il est considéré comme étant préjudiciable à ses intérêts (art. 9/2). En outre, l’article 69 de cette déclaration prévoit que le ministre peut, par voie de règlement, imposer une liste d’activités interdites aux jeunes employés (âgés de 14 à 18 ans), à savoir :

Les travaux concernant le transport routier, ferroviaire, aérien et maritime des passagers et des marchandises, tout travail dans les docks et les entrepôts obligeant à soulever, tirer ou pousser des charges lourdes et tout travail du même type ;

Les travaux en rapport avec des produits chimiques toxiques, des machines dangereuses, les centrales électriques, les transformateurs ou le transport de force ;

Les travaux souterrains, dans les mines, les carrières et les exploitations du même type ; et

Les travaux dans les égouts et ceux qui sont relatifs au creusage des tunnels.

Il est interdit d’obliger un jeune employé à travailler après 18 heures ou avant 6 heures (art. 68 2)) et pendant plus de sept heures par jour (art. 68 3)).

C. Âge de nubilité

En vertu de l’article 46 de la déclaration N° 1, 1991 du Code civil transitoire, le mariage ne repose que sur l’accord volontaire des deux intéressés. D’une manière générale, il faut que les personnes aient atteint l’âge de 18 ans pour pouvoir se marier. Nonobstant cela, il est question, dans de nombreux articles du Code, de mariage entre mineurs. Mais, pour qu’un mineur puisse se marier, il faut qu’il donne volontairement son accord et obtienne celui de ses parents (art. 309/1 du Code pénal transitoire de l’Érythrée). Selon l’article 329 dudit Code, une fois qu’un mineur est marié, il est considéré comme étant adulte et a droit à tous les avantages de cet état. Concernant l’âge de nubilité, le projet de Code civil de l’Érythrée dispose que l’âge de nubilité est de 18 ans, mais cela ne s’applique pas dans le cas où, l’homme et la femme étant tous deux âgés de 16 ans révolus, la femme présente à l’autorité devant célébrer le mariage une attestation d’un médecin indiquant qu’elle est enceinte ou qu’elle a déjà donné naissance à un enfant (art. 581/2 du projet de Code civil).

Dans de nombreuses régions du pays, c’est l’homme le plus âgé de la famille élargie qui organise tous les mariages - habituellement au nom d’impératifs religieux, ethniques et linguistiques. Les jeunes filles sont souvent fiancées alors qu’elles sont âgées de 8 à 14 ans, le mariage étant conclu alors qu’elles ont entre 13 et 15 ans. Souvent, ce ne sont pas elles qui choisissent leur mari. Toutefois, dans certains groupes ethniques, comme les Nara, le mariage n’est pas acceptable si la femme est âgée moins de 18 ans et l’homme de moins de 20 ans.

La loi antérieure du FPLE sur le mariage va clairement contre l’inégalité des sexes en matière de mariage, et cette conception aura du mal à s’imposer dans l’Érythrée d’après l’indépendance, lorsque les anciens membres du FPLE n’échapperont plus à la pression de la culture traditionnelle. La nouvelle Constitution de l’Érythrée va dans le même sens, puisqu’elle dispose que les hommes et les femmes majeurs ont le droit, en donnant leur accord, de se marier et de fonder une famille librement, sans aucune discrimination, et que cette égalité des droits et des devoirs s’étend à tous les aspects de la vie familiale (art. 22/2 de la Constitution).

D. Déposition devant un tribunal

La déposition d’un mineur devant un tribunal est régie par la pratique judiciaire. Un mineur peut témoigner en justice sous serment ou sans prêter serment, cela étant laissé à la discrétion du juge.

Le droit coutumier relatif aux témoignages varie. Par exemple, selon le Fitihi Mehari Woadotat, seuls les adultes (c’est-à-dire les personnes majeures) peuvent témoigner, alors que selon le droit coutumier du Higy Adgena-Tegeleba, toute personne n’étant pas en situation de conflit d’intérêt dans une affaire peut témoigner à condition d’être âgée d’au moins 7 ans.

E. Responsabilité pénale

Concernant la responsabilité pénale des mineurs, le Code pénal transitoire de l’Érythrée (CPTE) définit trois catégories d’enfants :

a)Les enfants âgés de moins de 12 ans : selon l’article 52, le droit pénal ne s’applique pas à eux. C’est-à-dire que les enfants de cette catégorie ne sont pas responsables de leurs actes. S’ils commettent un délit, ce sont les parents, l’école ou le tuteur qui encourent la peine ;

b)Les enfants âgés de 12 à15 ans : les délinquants âgés de 12 à 15 ans sont punissables conformément aux lois énoncées dans les articles 161-173 du CPTE. La loi précise, en outre, que les enfants ne peuvent être condamnés à la peine capitale ni à la réclusion criminelle à perpétuité. Ils ne doivent pas, non plus, être incarcérés avec des adultes;

c)Lorsqu’il statue ou prononce une condamnation, le tribunal doit tenir compte du niveau de développement mental et physique du jeune délinquant. De plus, l’objectif fondamental de la décision doit être le redressement de l’enfant. Ces articles permettent également au tribunal de modifier sa décision concernant ce redressement. L’article 55 du Code pénal transitoire autorise le tribunal à prendre conseil auprès des professionnels, des représentants des établissements scolaires et des tuteurs concernant le bien-être de l’enfant. Le tribunal a également le droit d’ordonner le placement du jeune délinquant dans un établissement médical ou tout autre établissement approprié ;

d)Les mineurs âgés de 15 à 18 ans : l’article 56/1 du CPTE dispose que, si un mineur âgé de 15 à 18 ans commet un délit, il doit être jugé selon les dispositions ordinaires du Code pénal. Le même article, toutefois, permet au tribunal, lors de l’évaluation de la sentence, d’atténuer les peines ou d’infliger des peines spéciales prévues pour les jeunes délinquants. Pour ce faire, le tribunal doit tenir compte de l’âge du délinquant, de son comportement et des faits de la cause.

Il est spécifiquement interdit de condamner à la peine capitale les enfants âgés de moins de 18 ans, les mères de jeunes enfants et les femmes enceintes (art. 56, 118, 173, et 181 du CPTE).

Concernant la responsabilité pénale des enfants, le projet de Code pénal définit deux catégories (art. 76 et 77) : les enfants délinquants et les jeunes délinquants.

Les “enfants délinquants” doivent être âgés de 9 à 12 ans au moment de l’infraction présumée. Ils ne sont pas passibles des peines prévues dans le Code pénal, mais le tribunal peut prendre les mesures ci-dessous si l’infraction commise est punissable en vertu du Code pénal :

a)Admonestation ou avertissement;

b)Placement du délinquant à la garde de ses parents ou d’un tuteur approprié;

c)Placement de l’enfant dans un foyer adéquat pour enfants;

d)Placement de l’enfant délinquant sous la responsabilité d’un professionnel compétent pour prescrire un traitement si l’enfant a besoin d’un traitement médical, psychologique ou mental; ou

e)D’autres mesures relatives à la vie quotidienne ou à l’éducation de l’enfant délinquant propres à l’aider à changer de conduite.

Le tribunal revoit périodiquement toutes ces mesures et toute mesure qui n’est pas parvenue à son terme est automatiquement levée lorsque l’intéressé atteint l’âge de 18 ans.

Un “jeune délinquant” est âgé de 12 à 18 ans au moment de l’infraction présumée. Le tribunal peut lui imposer les mêmes mesures qu’aux enfants délinquants s’il estime, en fonction de son caractère et du milieu d’où ils est issu, qu’il n’est pas nécessaire de lui infliger une peine privative de liberté pour le dissuader de commettre de nouvelles infractions ou l’inciter à changer de conduite (art. 78). Si, cependant, le tribunal estime qu’une telle peine s’impose pour le dissuader de commettre de nouvelles infractions, il peut le condamner conformément aux dispositions dudit Code. Néanmoins :

a)Un jeune délinquant ne peut pas être condamné à la peine capitale ni à la réclusion criminelle à perpétuité;

b)La peine maximale ou les peines confondues autorisées sont ramenées à 10 ans;

c)Tout jeune délinquant pourra être remis en liberté conditionnelle après avoir exécuté six mois de peine d’emprisonnement, quelle qu’elle soit ;

d)Tout jeune délinquant doit exécuter sa peine d’emprisonnement, quelle qu’elle soit, dans un établissement correctionnel et dans des conditions lui permettant de s’amender et de s’éduquer ; et

Tout jeune délinquant peut être autorisé à accomplir des travaux d’utilité publique, à raison de trois heures par jour au maximum, sous la surveillance d’un agent de probation ; les travaux d’utilité publique peuvent se substituer à la scolarisation.

F. Privation de libert é

Dans un certain nombre de cas, les enfants âgés de 12 à 15 ans peuvent être privés de liberté :

a)Les tribunaux érythréens sont obligés d’envoyer les jeunes délinquants dans des “établissements de soins curatifs” s’ils souffrent d’incapacités mentales ou physiques ou s’ils sont malades (art. 162, Code pénal provisoire de l’Érythrée/CPTE). Comme il sera expliqué plus loin dans le présent rapport, il s’agit là d’une mesure extrêmement limitée ;

b)La privation de liberté peut être imposée à l’école ou au domicile dans le cas d’une infraction “peu grave” (art. 165 du CPTE);

c)Admission dans un établissement de redressement ou de rééducation (art. 167 du CPTE). En vertu de cet article, ce type de privation de liberté ne doit pas dépasser cinq ans ou être inférieur à un an. Le délinquant placé dans un établissement de redressement doit recevoir un enseignement de caractère général, moral et professionnel. Toutefois, il n’existe pas, actuellement, de tels centres pour les adolescents en Érythrée;

d)Éducation surveillée lorsque l’enfant a été “moralement laissé à lui-même, ou est exposé, ou risque fort d’être exposé à un danger de corruption” (art. 163/1 du CPTE). Les possibilités qu’a l’État d’organiser une “éducation surveillée” sont, elles aussi, très limitées; et

e)Si le jeune délinquant est insoumis, le tribunal peut ordonner un châtiment corporel dans le cas où il considère que c’est le meilleur moyen de lui permettre de s’amender (art. 172 du CPTE). Dans le projet de Code pénal, toutefois, les châtiments corporels sont abolis.

G. Emprisonnement

La privation de liberté ne peut être imposée à des enfants âgés de moins de 18 ans qu’en dernier recours, et seulement dans le cas où, si elle avait été commise par un adulte, l’infraction serait passible d’une peine d’au moins 10 ans de réclusion criminelle, ou de la peine capitale. Les enfants ne peuvent être condamnés qu’à une peine de 3 à 10 ans d’emprisonnement simple. La loi dispose que les jeunes délinquants âgés de 12 à 15 ans doivent être détenus séparément des délinquants adultes (art. 173 du CPTE), bien que, comme il a été dit plus haut, cela soit difficile à appliquer. En cas de condamnations répétées, le tribunal peut ordonner que l’enfant soit placé soit dans un établissement de redressement où des mesures spéciales de sécurité, d’isolement ou de discipline peuvent lui être appliquées dans l’intérêt général, soit dans un établissement pénitentiaire s’il est incorrigible et risque d’être cause de troubles, d’insécurité ou de corruption pour les autres (art. 173/1 du CPTE). Le tribunal fixe le temps de détention en fonction de la gravité de l’acte commis et de l’âge de l’enfant (art. 173/2 du CPTE).

H. Consommation et vente d’alcool et de drogues

Il est interdit de vendre des boissons alcoolisées à des mineurs âgés de moins de 18 ans. Selon l’article 514 du Code pénal transitoire, “quiconque met en danger la santé d’autrui, intentionnellement et sans aucun scrupule, en administrant ou en servant, ou bien en faisant administrer ou servir à des mineurs […] des boissons alcoolisées ou des spiritueux de nature et en quantité telles qu’elles auront à coup sûr ou très probablement un effet nuisible […] est passible d’une peine d’emprisonnement simple”. En outre, toute personne qui vend, offre, sert ou permet que soit servi, dans un lieu public, de l’alcool à des enfants ou à des jeunes est passible d’une amende ou d’une peine de détention d’un mois au maximum (art. 773 du CPTE).

De même, l’article 510/3/b du CPTE interdit la vente de drogues. Le tribunal peut condamner à une peine de 5 ans de réclusion criminelle et à une amende maximale de 30 000 nakfa(chiffre qui ne tient pas compte de l’inflation) toute personne qui fournit, par cupidité ou pour tout autre motif répréhensible, une substance toxique interdite à un enfant ou à un jeune.

I. Droits civils et politiques, et actes créateurs de droits

L’enregistrement des naissances est possible en Érythrée et est assuré par les municipalités et les institutions religieuses. Néanmoins, peu de citoyens exercent leur droit de déclarer une naissance.

La loi porte interdiction à tous les mineurs d’entreprendre des actes créateurs de droits(art. 199 du CCTE). Elle prévoit un régime d’exception pour les enfants âgés d’au moins 15 ans, par exemple celui d’intenter des poursuites. À titre d’exemple, aux termes de l’article 304/1 du CCTE, l’enfant a le droit d’être consulté au sujet de toute décision le concernant. Cet article ne permet pas au tuteur d’échapper à cette responsabilité.

Le tuteur, compte tenu de sa situation financière, peut autoriser le mineur à entreprendre certaines activités au jour le jour (art. 305/1 du CCTE). Cette autorisation peut être donnée de manière explicite (art. 305/2 du CCTE). Selon l’article 308 du CCTE, tout enfant peut rédiger un testament à partir de l’âge de 15 ans.

J. Éducation obligatoire

Traditionnellement, de nombreuses communautés prennent en charge l’éducation de leurs enfants. Par exemple, selon le droit coutumier Logo-Chwa, toutes les amendes administratives pour des infractions à l’ordre public servent à alimenter un fonds pour l’éducation, ce qui oblige tous les villages à construire une école, engager un enseignant et pourvoir à l’éducation de leurs enfants, sans aucune discrimination fondée sur le sexe.

Le gouvernement s’est engagé à rendre l’éducation gratuite et obligatoire. Il envisage de permettre à au moins 80 % des enfants d’avoir accès à l’instruction élémentaire au cours des dix années à venir. Il fera en sorte que tous les enfants y participent afin de permettre à tous les citoyens à la fois de bénéficier du développement et d’y prendre part.

K. Service militaire et forces armées

Il est interdit, en Érythrée, de recruter dans les forces armées des enfants âgés de moins de 18 ans (déclaration N° 11/1991). Le service national est obligatoire pour les hommes et pour les femmes âgés de 18 à 40 ans qui n’étaient pas membres du FPLE pendant la guerre de libération.

L. Consentement à des relations sexuelles

Aux termes du CPTE, les mineurs (âgés de moins de 18 ans) sont considérés comme étant dans l’impossibilité de donner leur consentement en matière de relations sexuelles. Quiconque a des relations sexuelles avec un mineur âgé de 15 à 18 ans est passible d’une peine d’emprisonnement simple (art. 595/1). “Si le mineur est l’enfant adoptif du délinquant, l’enfant de son conjoint, un enfant qui est sous sa tutelle, son élève ou son apprenti, un élève interne ou un domestique, si la garde de cet enfant lui a été confiée légalement ou s’il est placé, de quelque manière que ce soit, sous sa dépendance ou sous son autorité, la peine encourue est un maximum de cinq ans de réclusion criminelle ou au moins trois mois d’emprisonnement simple.”

En vertu de l’article 594/1a, le fait d’inciter un enfant ou un adolescent âgé de moins de 15 ans à avoir des relations sexuelles ou à accomplir un acte correspondant à un acte sexuel est passible d’une peine de réclusion criminelle de cinq ans ou moins.

Il n’y a pas que l’atteinte sexuelle qui soit punissable en vertu de la loi : toute autre forme d’attentat à la pudeur sur la personne d’un enfant ou d’un adolescent, le fait de l’inciter à accomplir un tel acte ou d’accomplir cet acte en présence de l’enfant est passible, selon les circonstances, d’une peine de réclusion criminelle de cinq ans ou moins ou d’un minimum de trois mois d’emprisonnement simple (art. 594/2). Si la victime est l’élève, l’apprenti, un élève interne ou un domestique du délinquant, ou si elle est placée, de quelque manière que ce soit, sous sa dépendance ou sous son autorité, ou s’il s’agit de son enfant adoptif, de l’enfant de son conjoint, d’un enfant placé sous sa tutelle ou confié à sa charge, la peine, plus sévère, est de huit ans au plus de réclusion criminelle (art. 594/3 du CPTE).

La séduction est également un délit, et le fait de profiter indûment de l’inexpérience ou de la confiance d’une mineure âgée de 15 à 18 ans, de l’inciter à accepter des relations sexuelles en lui promettant le mariage, ou en la trompant ou de toute autre manière, est passible d’une peine d’emprisonnement simple(art. 596 du CPTE). Les enfants ou les adolescentsqui ont été séduits ou dévoyés sont néanmoins protégés par la loi, en conséquence de quoi, dans tous les cas d’attentats à la pudeur, l’enfant ou l’adolescent accusé ou la jeune personne séduite ou victime de l’acte d’un adulte n’est pas punissable (art. 597/1 du CPTE). Une politique relative aux professionnel[le]s du sexe a été mise au point en 2002 et se trouve actuellement en cours de révision.

III. PRINCIPES GÉNÉRAUX

A. Non-discrimination

La nouvelle Constitution de l’Érythrée précise quelles sont les libertés fondamentales, ainsi que les droits et devoirs fondamentaux des enfants. Elle dispose que nul ne doit être victime de discrimination en raison de sa race, de son origine ethnique, de sa langue, de sa couleur, de son sexe, de sa religion, de son handicap, de son âge, de ses convictions ou de ses opinions politiques, de sa situation sociale, de sa situation économique ou de toute autre circonstance. Le Code civil transitoire et le Code pénal transitoire sont également fondés sur ce principe.

Bien qu’elles soient considérées comme délictueuses en vertu de la loi, certaines formes de discrimination sont courantes dans la société érythréenne. Par exemple, la quasi totalité des groupes ethniques, en Érythrée, sont fortement patriarcaux et patrilinéaires en matière d’héritage (sauf un groupe matrilinéaire, les Kunama) et pratiquent donc une discrimination à l’égard des femmes et des jeunes filles. Les jeunes filles, les enfants handicapés et les enfants nés hors mariage font partie des victimes de discrimination dans certaines circonstances.

Les autorités érythréennes sont convaincues que la discrimination disparaîtra effectivement que lorsque le pays se développera au plan économique et que l’éducation et la prise de conscience du public commenceront à faire changer les attitudes au sein de la société. Il faut très longtemps pour que les mentalités finissent par évoluer, mais c’est un processus nécessaire afin que la discrimination disparaisse.

B. L’intérêt supérieur de l’enfant

Il y a, dans le Code civil transitoire, un certain nombre de dispositions d’où émerge le principe de “l’intérêt supérieur de l’enfant”. Il en est spécifiquement question concernant la nomination des tuteurs, le fait de confier l’enfant à la garde de l’un des parents en cas de dissolution du mariage, le choix du type d’éducation, les conditions d’approbation de l’adoption et d’autres questions similaires relatives au bien-être de l’enfant. À titre d’exemple, selon l’article 681/1 du CCTE, “la garde et l’entretien des enfants nés hors mariage, ou sans que les parents soient mariés, sont régis en fonction du seul intérêt de ces enfants.”

De nombreuses autres lois et déclarations comportent des articles qui font référence à l’intérêt supérieur de l’enfant. Par exemple, selon la déclaration sur la presse N° 90/1996 [partie V/12(5)], “tout ce qui va à l’encontre des bonnes moeurs, [ou] porte atteinte à la dignité des mineurs” est interdit par la loi.

C. Droit à la vie, à la survie et au développement

La Constitution de l’Érythrée garantit le droit de toutes les personnes à la vie et à la liberté. Bien que ce ne soit pas spécifié, cela inclut le droit de tout enfant à la vie (article 15 de la Constitution). Le droit de l’enfant à naître est également protégé par la loi. L’avortement est illégal en Érythrée, sauf si la vie de la mère est menacée (art. 528 du CPTE).

En ce qui concerne le droit à la survie et au développement, la Macro-politique du gouvernement définit plusieurs objectifs destinés à améliorer les conditions de vie de tous les Érythréens, ledit gouvernement s’engageant à s’efforcer de faire en sorte que la population puisse être saine et productive. La mise en œuvre de diverses politiques concernant la santé, l’éducation et la protection sociale est prévue à long terme.

Traditionnellement, les enfants sont un objet d’amour pour leurs parents et pour la société en général, cependant on ne peut dire que leur protection juridique ait été pleinement assurée. Ils sont employés à des activités économiques au domicile de leurs parents et hors de ce domicile, par exemple comme bergers, en particulier dans les zones pastorales. La répartition du travail à la maison représente un fardeau indu pour les jeunes filles, avec de fréquentes répercussions sur leur santé et leur éducation, et les empêchant de tirer plein profit de leur potentiel. Les pratiques traditionnelles (mutilations génitales, mariage et maternité précoces et éducation discriminatoire à l’égard des filles) ont un impact particulièrement négatif et nocif sur les filles. La protection juridique des enfants, prévue par le Code transitoire, est compatible avec la Convention relative aux droits de l’enfant; mais le droit coutumier (qui régit la vie de la plus grande partie de la population) n’accorde aux enfants ni l’égalité ni la protection. En dépit des efforts qui ont été déployés, les principaux problèmes faisant obstacle à l’application de la Convention restent la mauvaise situation socio-économique et le manque de mécanismes efficaces adéquats.

Des effort suivis s’imposent, ainsi qu’une mobilisation continue des collectivités rurales en particulier pour que puissent être assurés les soins et l’assistance nécessaires à la survie des enfants. Les parents et la société doivent commencer par admettre les droits de l’enfant, à la suite de quoi il faudra mettre en place les mécanismes appropriés pour permettre que ces droits soient respectés.

D. Respect des opinions de l’enfant

L’article 14 du Code civil transitoire dispose explicitement que toute personne est libre d’avoir ses opinions et de les exprimer. Cela s’applique aussi à l’enfant. Selon l’article 304, en particulier, si un mineur est capable de discernement, à partir de l’âge de 15 ans, il doit être, autant que possible, consulté sur tous les actes importants qui le concernent. Le tribunal sollicite aussi l’avis de l’enfant en cas d’adoption. L’article 804/2 prévoit que le tribunal, avant de prendre sa décision, doit entendre l’enfant adopté s’il est âgé de plus de 10 ans.

Les autorités reconnaissent que, pour certaines questions concernant les enfants, la réalité est souvent en contradiction avec la loi : c’est ce qui se passe, typiquement, en ce qui concerne le respect des opinions de l’enfant. Alors que la loi dispose qu’il doit en être tenu compte, cette dernière, en pratique, est rarement comprise. Certaines communautés ne considèrent pas, en général, qu’il soit important que l’enfant intervienne dans les prises de décisions relatives aux affaires familiales. Pour essayer de résoudre partiellement ce problème de manière générale, l’Union nationale de la jeunesse et des étudiants érythréens (UNJEE), la principale ONG locale qui s’occupe des enfants et des jeunes en Érythrée, organise des discussions en groupes entre parents et enfants depuis un certain nombre d’années. Ce programme vise à provoquer un échange d’idées et d’opinions entre des parents et des enfants qui, culturellement et traditionnellement, sont incapables d’en débattre à la maison. Les discussions, dans ces groupes, portent sur les opinions des parents concernant l’éducation des enfants, ainsi que sur les habitudes et les soucis des enfants. Les médias ont joué un rôle important en diffusant ces discussions auprès d’un vaste public. Tout cela est conforme aux articles 12, 13 et 15 de la Convention, aux droits d’exprimer ses opinions, à la liberté d’expression et à la liberté d’association. C’est également conforme à la Convention N° 87 (1948) de l’OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical que l’Érythrée a ratifiée en 1999.

Un autre projet conjoint de l’UNJEE et de Redd Barna (Sauvez les enfants Norvège) en 1997, visait à définir les besoins des enfants grâce à une série d’ateliers participatifs sur tout le territoire national dans lesquels les enfants peuvent exprimer leurs opinions et leurs conceptions en utilisant leurs mots à eux. Les groupes cibles étaient divisés en deux catégories, les enfants âgés de moins de 12 ans et ceux âgés de 12 à 18 ans. Les garçons et les filles étaient en nombre égal. Ces informations données “avec les mots des enfants eux-mêmes” devraient être précieuses, non seulement pour les ONG concernées, mais également pour les départements ministériels chargés de répondre aux besoins des enfants. Les enfants ont aussi participé à la campagne de l’UNICEF “Dites oui pour les enfants”.

Conformément aux articles 12 et 13 de la Convention, l’Évaluation participative de la pauvreté envisagée pour 2002-03 se fera avec la participation directe des enfants, la Convention relative aux droits de l’enfant étant utilisée comme cadre de base pour la mise au point de critères d’évaluation concernant les questions qui les touchent directement.

IV. DROITS ET LIBERTÉS CIVILS

A. Considérations générales

À la base, le Code civil transitoire de l’Érythrée a été rédigé de manière à permettre à tous les êtres humains d’exercer leurs droits, sans distinction d’âge. L’enfant est donc protégé par le Code civil dont il bénéficie de tous les avantages. Dans ses neuf premiers articles, définissant les droits fondamentaux et les libertés fondamentales de la personne, le code indique que “à partir du jour de sa conception et jusqu’après sa mort, toute personne jouit des droits et libertés précisés dans le Code” (arts. 1 et 2 du CCTE).

L’article 8/1 du CCTE indique que les droits fondamentaux et les libertés fondamentales sont ceux qui sont énumérés dans la Constitution. L’article 8 précise que tous les droits doivent être appliqués de manière égale et sans distinction ou discrimination fondée sur la race, la couleur, la religion ou le sexe. La loi n’autorise aucune renonciation à ces droits, sauf pour des motifs légitimes et seulement à des fins en rapport avec la vie sociale.

L’article 45 du code civil du FPLE constitue une importante addition au CCTE; il spécifie que le droit familial doit être fondé sur la protection juridique des conjoints, aucune distinction fondée sur le sexe n’étant autorisée. En outre, le code insiste sur les droits des femmes et des enfants. Ce Code établit clairement que le contrat de mariage ne doit pas déroger à ces principes.

B. Paternité

La question de la paternité ne se pose que dans deux situations. Qu’il existe ou non un contrat de mariage entre un homme et la mère de l’enfant, le CCTE résout le problème de la manière suivante :

a)Maternité : le seul fait de donner naissance établit la relation de maternité (art. 739 du CCTE);

b)Paternité : S’il existe une relation conjugale entre un homme et la mère de l’enfant, l’homme est présumé être le père de l’enfant (art. 741 du CCTE), cette présomption étant fondée dans la société. Cette relation conjugale est reconnue en vertu de la loi. Et aux termes de l’article 699 du CCTE, en dépit du fait qu’il n’existe aucun contrat de mariage entre l’homme et la mère de l’enfant, s’ils se considèrent comme étant conjoints et que ce soit accepté par l’ensemble de la famille et par la société en général, la preuve faite de cette relation suffit à établir la présomption de paternité. Par ailleurs, l’article 700 du CCTE donne le droit de faire appel à des témoins qui peuvent attester l’existence ou la non existence de la relation conjugale.

Si la paternité ne peut pas être établie en apportant la preuve de l’existence d’un contrat de mariage ou par la présomption, il est possible de recourir aux moyens ci-après pour la faire reconnaître :

a)si l’homme reconnaît l’enfant comme étant le sien (arts. 764, 765/1, 275 et 752 du CCTE);

b)si la mère de l’enfant déclare qui est le père, dans le cas où il y a présomption que cet homme est le père (art. 60 de la déclaration No. 1, 1991 du CCTE);

c)si la mère a été enlevée ou violée, la paternité de l’enfant peut être établie par décision du tribunal (art. 740/3 et 758 du CCTE).

Bien que les articles ci-dessus suffisent à établir la paternité, le code va plus loin et comporte d’autres dispositions qui peuvent être utilisées à cette fin. Par exemple, l’article 772 donne à l’enfant le droit de saisir le tribunal pour faire établir la paternité. En outre, l’article 775 du CCTE donne le même droit aux tuteurs et aux héritiers de l’enfant.

Les enfants abandonnés sont couverts par l’article 103 et l’article 2/3 de la déclaration sur la nationalité. Par ailleurs, l’article 556 du CCTE confère le droit d’adoption. L’adoption est régie par l’article 796-706 du CCTE. Grâce au droit d’être adopté, l’enfant a la possibilité d’avoir une famille.

C. Tutelle

Toute personne âgée de moins de 18 ans est un mineur (art. 198 du CCTE). En vertu de l’article 199 du CCTE, c’est un mandataire spécial ou un tuteur qui s’occupe de toutes les affaires juridiques et financières du mineur. Mais le mineur est également autorisé par la loi à avoir certaines activités financières. Conformément à l’article 204 du CCTE, les deux parents ont l’autorité parentale conjointe sur leur enfant mineur. Si l’un des parents meurt ou est indigne,c’est l’autre qui les exerce(art. 205/1 du Code civil).

Aux termes de l’article 207/1 du CCTE, les parents, de leur vivant, ont le droit de désigner un tuteur pour leurs enfants en cas de décès.

L’article 207/2 du CCTE limite les pouvoirs du tuteur; par ailleurs, il régit l’exercice de ces pouvoirs et donne le droit de poser des conditions à l’adresse du tuteur. En outre, l’article 207/3 précise qu’il est possible de limiter le nombre des tuteurs. Le conseil de famille, en vertu de l’article 241-242 du CCTE, peut nommer des tuteurs en cas de divorce des conjoints (art. 206/1 du CCTE). Si aucun proche parent n’est apte à exercer cette fonction, le tribunal peut nommer n’importe quelle autre personne (art. 212).

Les responsabilités du tuteur sont définies dans les articles 265-269 du CCTE. Pour en citer quelques unes, l’article 265 mentionne le logement et la résidence, l’article 266 la santé de l’enfant, l’article 269 son éducation et sa formation. Le tuteur doit s’acquitter de ces devoirs et de ces responsabilités en fonction des possibilités et de la situation économique de la famille et de la nation.

D. Nom et nationalité

Conformément à l’article 4 de la déclaration N° 1, 1991 du CCTE, toute personne physique a droit à un nom à sa naissance, l’ensemble de ce nom devant inclure celui de son père et de son grand-père. Selon le projet du nouveau Code civil de l’Érythrée, si la paternité de l’enfant n’est pas établie légalement, ce dernier doit avoir un prénom, le nom de son grand-père maternel et celui de son arrière-grand-père maternel (art. 33). Une fois qu’un nom a été donné à une personne, il ne peut être changé qu’avec l’autorisation du tribunal. Pour ce qui est des enfants abandonnés, il existe un rapport direct et particulier entre la question de la paternité et celle du nom. En vertu de l’article 103 du CCTE, les enfants abandonnés ont, eux aussi, le droit d’avoir un nom. Les enfants adoptés peuvent prendre le nom de leur père adoptif (art. 41/1).

En ce qui concerne la nationalité, tous les enfants nés de parents érythréens sont érythréens de naissance. Tout enfant a droit à la nationalité érythréenne si l’un ou l’autre de ses parents est érythréen (art. 2/1 de la déclaration nationale N° 21/1992). Si l’un des parents a acquis la nationalité érythréenne par autorisation du tribunal, tous les enfants nés de ce parent ont droit à la nationalité érythréenne (art. 4/6 de la déclaration nationale N° 21/1992).

Tout enfant adopté par une famille érythréenne acquiert de facto la nationalité érythréenne (déclaration nationale N° 21/1992). Les enfants abandonnés ont automatiquement la nationalité érythréenne.

L’enregistrement des naissances n’est pas une pratique généralisée. Les municipalités et les institutions religieuses jouent un rôle en ce domaine. Pendant la lutte armée, le FPLE a essayé de faire instituer cette démarche par le conseil du peuple (une espèce d’organe de décision local élu). Comme de nombreuses familles ne déclarent pas la naissance de leurs enfants, il est souvent difficile de connaître leur âge exact, ce qui entraîne des problèmes, par exemple pour l’admission à l’école et, ce qui est plus grave, en matière d’administration de la justice pour mineurs.

Bien que l’article 7 de la Convention impose l’enregistrement immédiat de la naissance, les enfants non déclarés ne se sont pas vu refuser le droit de vote à l’âge de la majorité, ni leurs droits de l’enfant, comme le droit aux soins de santé ou à l’éducation. D’autres institutions, comme les institutions religieuses et les municipalités, s’occupent de cet enregistrement. Il n’y a aucune disposition, dans le Code civil transitoire, concernant le droit de l’enfant à connaître ses parents. Il est cependant prévu par le projet de code, dans l’article 806 a). Conformément à cette disposition, tout organe ou institution privé ou public doit être documenté sur la filiation biologique de chaque enfant. Le dossier doit comporter tous les renseignements concernant les coordonnées des parents et les raisons pour lesquelles ils ne peuvent s’occuper de l’enfant. Le projet de code prévoit, par ailleurs, le droit de ce dernier à connaître l’identité de son père biologique dans le cas où il a été conçu par insémination artificielle (article 806 du projet de Code civil et article 8 de la Convention relative aux droits de l’enfant).

E. Préservation de l’identité

Le nom est un moyen d’identification de la personne (article 4 de la déclaration No. 1, 1999 du CCTE). Le Code civil transitoire prévoit que toute personne doit recevoir un nom à sa naissance. Il est interdit de donner à un enfant le prénom de son père, de sa mère ou de l’un de ses frères ou sœurs vivants (art. 38/1). La raison en est qu’il convient de le différencier des autres membres de la famille. En vertu de l’article 4/3 de la déclaration N° 1, 1999 du CCTE, il est interdit à toute personne de changer son prénom sans l’autorisation d’un tribunal. Ces dispositions indiquent que le nom est lié à l’identité et doit être préservé. Chaque enfant reçoit un nom dans la société traditionnelle. Les noms ont un sens et beaucoup de ceux qui sont donnés expriment des souhaits de bonheur ou bien ont un caractère religieux. Les différents groupes ethniques préservent l’identité de manière différente ; à titre d’exemple, les membres du groupe Hedarib donnent aux enfants les nombreux noms de leurs ancêtres. Tous les groupes ethniques ont certaines formes de célébrations ou de rituels lorsque qu’un enfant naît, afin de lui assurer une place dans la société.

De nombreux enfants naturels doivent faire face à des problèmes d’identité. Dans certains groupes ethniques, les enfants nés hors mariage n’ont pas droit à une cérémonie de naissance, et ils sont en butte à des privations sociales et économiques (y compris concernant l’héritage, auquel ils n’ont pas droit).

À la suite de la guerre, on compte relativement peu d’enfants non accompagnés dépourvus d’identité véritable; cela est dû au fait que la communauté et les familles élargies ont pris les enfants en charge. L’État a essayé de retrouver les familles des enfants non accompagnés, et d’offrir des possibilités de placement à ceux qui lui permettent de retrouver ses origines familiales. Cela n’a pas toujours été possible, surtout si l’enfant non accompagné est trop jeune pour se souvenir de ses parents ou des personnes qui s’occupaient de lui.

F. Liberté d’expression

Aux termes des articles 14-15 du CCTE et de l’article 19/2 de la nouvelle Constitution de l’Érythrée, toutes les personnes ont droit à la liberté de parole et d’expression, ce qui inclut la liberté de la presse et des autres médias.

La déclaration N° 90/1996 relative à la presse assure également la liberté de la presse et interdit la censure, la suspension ou la mise à l’index des produits de la presse, sauf avec l’accord du tribunal compétent (Partie II, 4 1) a) et b)).

La liberté d’expression est garantie par l’essentiel du droit coutumier en Érythrée. Néanmoins, de nombreuses lois portent interdiction d’insulter directement ou indirectement autrui. Certaines lois disposent que les personnes sont libres de s’exprimer comme elles l’entendent, mais qu’elles peuvent être poursuivies si elles ne peuvent prouver la véracité de leurs dires.

G. Accès à une information appropriée

La Constitution garantit le droit d’accès à l’information (art. 19/3). Il est reconnu que certains enfant n’ont pas actuellement accès aux informations adéquates, et, à longue échéance, le gouvernement s’est engagé à changer cette situation (grâce à l’éducation, à des activités organisées ou aux médias). Il a lancé une nouvelle intiative destinée à permettre d’établir des bibliothèques publiques de collectivités sur tout le territoire national.

H. Liberté de pensée, de conscience et de religion

Les articles 14-15 du CCTE et l’article 19/1 de la Constitution de l’Érythrée garantissent à tous les Érythréens le droit à la liberté de pensée, de conscience et de croyance, qui inclut la liberté de pratiquer n’importe quelle religion et de la professer (art. 19/4). L’article 14 du CCTE dispose que toutes les personnes sont libres de leurs opinions et libres de les exprimer. Les seules restrictions à cette liberté sont celles qu’impose le respect des droits d’autrui, des bonnes mœurs et des lois. La loi interdit toute intervention dans l’exercice des rites d’aucune religion ou croyance, pourvu que ces rites ne servent pas à des fins politiques et ne portent pas atteinte à l’ordre et à la moralité publics (art. 15).

Un certain nombre de proverbes érythréens (dont beaucoup font référence à des aspects du droit coutumier et servent d’aide-mémoire afin que la population en grande partie analphabète puisse apprendre ces lois très tôt dans la vie) signifient que la religion et la conscience relèvent officiellement du libre arbitre. Un proverbe érythréen dit, par exemple, “la nation est à tout le monde, mais la religion est personnelle”, ce qui veut dire que la religion ne fait pas partie des responsabilités et des contraintes sociales de la personne, mais est purement une question de choix personnel.

I. Liberté d’association et de réunion pacifique

Bien qu’ils n’exercent pas largement ce droit, les enfants sont bien libres de se réunir et de constituer des associations. La Constitution de l’Érythrée dispose que toutes les personnes ont le droit de se réunir et de manifester pacifiquement avec d’autres (art. 19/5) et que tout citoyen a le droit de constituer des organisations à des fins politiques, sociales, économiques et culturelles. Par ailleurs, les jeunes employés peuvent constituer des associations en vertu de l’article 86 de la déclaration de l’Érythrée N° 118 de 2001 relative au travail et des Conventions de l’OIT N° 87 (1948) et 98 (1949) que l’Érythrée a ratifiées en 1999.

J. Protection de la vie privée

Conformément à la Constitution de l’Érythrée, toutes les personnes ont droit au respect de la vie privée (art. 18/1). Nul ne peut être soumis à une fouille illicite, qu’il s’agisse de son domicile ou de tout autre bien ; son domicile ne peut être violé et ses biens personnels ne peuvent faire l’objet d’une saisie illicite ; le caractère privé de la correspondance, des communications et de tout autre objet personnel doit être respecté de la même manière (art. 18/2). Le Code civil transitoire assure également la protection du caractère privé du domicile. L’article 13 du CCTE dispose que le domicile de toute personne physique est inviolable, que nul ne peut pénétrer dans le domicile d’autrui contre la volonté de l’occupant, et que toute perquisition est interdite, sauf dans les cas prévus par la loi. La violation de domicile, le non-respect de la vie privée, l’interception ou l’appropriation de la correspondance ou des envois sont punissables en vertu de la loi (art. 571 et 573 du CCTE).

Les enfants et les mineurs accusé ou victimes de délits sont également protégés par la déclaration N° 90/1996 relative à la presse, qui stipule qu’il est interdit à un journaliste de révéler l’identité des enfants ou des mineurs coupables ou victimes de délits.

K. Droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Il est interdit de porter atteinte à la dignité de quiconque, selon la Constitution de l’Érythrée (art. 16). Cet article précise que nul ne peut être soumis à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. En outre, nul ne peut être tenu en esclavage ou forcé à faire un travail interdit par la loi. Aux termes de la déclaration N° 118 de 2001 relative au travail, tout travail accompli par un enfant et allant à l’encontre des dispositions de la déclaration, considéré comme étant un travail forcé, est illégal. L’Érythrée est également signataire des Conventions de l’OIT N° 29, sur le travail forcé, et 105, sur l’abolition du travail forcé.

La torture est aussi considérée comme un délit grave par le CPTE. En vertu de l’article 417 du CPTE, tout fonctionnaire qui traite des personnes de façon contraire à l’esprit de la loi ou avec brutalité, ou d’une manière incompatible avec la dignité humaine, en particulier en recourant à des voies de fait, à la cruauté ou à la torture physique ou mentale afin d’obtenir une déclaration ou une confession, ou à toute fin similaire, est passible d’une amende ou d’une peine d’emprisonnement simple de 10 jours à 3 ans. Si les actes sont très graves, la peine peut être très sévère.

V. MILIEU FAMILIAL ET PROTECTION DE REMPLACEMENT

A. Introduction

Au terme d’une longue guerre de libération assortie de sécheresses, beaucoup de familles érythréennes, sinon la plupart d’entre elles, ont perdu une partie de leurs membres, ont été séparées, ont tout perdu ou sont devenues réfugiées, ou ont souffert de toute autre manière. Peu de familles s’en sont tirées sans que la structure familiale traditionnelle soit affectée. Les enfants ont souffert non seulement d’atteintes physiques du fait des violences engendrées par les deux guerres avec l’Éthiopie, mais aussi socialement, affectivement, psychologiquement, pour ne rien dire de leur épanouissement, à cause des conditions souvent épouvantables dans lesquelles ils étaient obligés de vivre sous le régime colonial éthiopien. Pendant ces guerres, les familles étaient souvent dans l’impossibilité de répondre de manière adéquate aux besoins d’enfants nécessitant des mesures de protection spéciale. Même maintenant que la guerre est terminée, de nombreuses familles ont subi des préjudices tels qu’elles ne peuvent plus remplir leurs obligations et répondre aux besoins économiques, sociaux ou psychologiques de leurs enfants.

L’appui au renforcement des structures familiales et de leur capacité à produire des revenus, et l’extension du rôle auxiliaire des collectivités locales pour assurer cet appui sont considérés par le MTPS comme des priorités absolues. Pendant toute la durée de la guerre d’indépendance, le Front populaire de libération de l’Érythrée (FPLP) s’est efforcé d’aider les familles et leurs collectivités, et quand c’était impossible, prenait la responsabilité de mettre les enfants eux-mêmes à l’abri et de s’en occuper. Des orphelinats, des garderies, des internats et de nombreux autres services ont été créés dans les zones libérées de l’Érythrée par le FPLE. À titre d’exemple, il s’est occupé de milliers d’orphelins et d’enfants non accompagnés dans un grand orphelinat du Sahel. Lorsqu’il est apparu clairement que ceux-ci ne se développaient pas bien, en dépit de tous les efforts du personnel, le FPLE, au plus fort de la guerre de libération, a pris l’avis d’experts et a littéralement transformé la manière de les traiter (voir le rapport établi par M. Peter Wolf). Les recherches effectuées plus tard à titre indépendant ont montré que la sociabilité et l’état affectif des enfants se sont considérablement améliorés après la mise en œuvre de ces réformes.

Le FPLE qui, depuis, a formé le gouvernement, s’est toujours attaché à protéger les enfants érythréens et à s’occuper d’eux, et il a maintenant beaucoup d’expérience dans ce domaine. Il est fermement convaincu que c’est dans leurs propres familles, quand elles fonctionnent bien, qu’ils sont le mieux. La priorité absolue du gouvernement est donc d’aider les familles à mettre au point les mécanismes qui leur permettent de faire face à la situation, d’où les nombreux programmes économiques, sociaux et d’infrastructure qui constituent la base de sa macro-politique. C’est seulement lorsque les familles sont manifestement incapables d’apporter aux enfants les soins adéquats que l’Etat intervient pour se substituer à elles.

B. Orientation et responsabilités parentales et familiales

Selon la Constitution de l’Érythrée, la famille, qui est la cellule de base naturelle de la société, a droit à la protection et à la sollicitude de l’État et de la société (art. 22/1). Le gouvernement s’est, à ce titre, engagé à la soutenir, dans les limites de ses moyens, mais, en raison de la pauvreté générale et du manque de ressources appropriées (à la fois en personnel et en matériel), de la guerre, des déplacements et des sécheresses, sa capacité, actuellement, est extrêmement limitée.

La Constitution dispose également que les parents ont le droit et le devoir d’élever leurs enfants en leur assurant les soins et la protection adéquats et, qu’en retour, les enfants ont le droit et le devoir de respecter leurs parents et d’assurer leur entretien pendant leur vieillesse (art. 22/2 et 22/3). Cette définition des droits et devoirs réciproques des parents et des enfants est considérée comme fondamentale dans la culture du peuple érythréen : tandis que les parents ont la responsabilité d’élever leurs enfants en leur apportant tous leurs soins, les enfants ont celle de respecter ceux qui s’occupent d’eux. La Constitution ajoute que les deux parents sont égaux en droits et en devoirs pour tout ce qui concerne la famille, y compris les enfants. Cette affirmation de l’égalité des hommes et des femmes dans le mariage est une importante mesure d’encouragement en direction de l’égalité des sexes dans la société en général.

Il a été question plus haut, dans la partie consacrée à la tutelle, des responsabilités du tuteur selon le Code civil transitoire de l’Érythrée. Il s’agit pour lui d’assurer à l’enfant le logement, les soins de santé, l’éducation et la formation. Il doit s’acquitter de ces responsabilités selon les possibilités et la situation économique de la famille et de la nation.

C’est une norme acceptée par les parents et les familles élargies que d’élever les enfants, même dans des conditions difficiles. Si les parents ne peuvent y parvenir, la famille nucléaire est généralement soumise à des contrôles sociaux stricts et des sanctions sévères de la part de la communauté. C’est la mère qui joue, de loin, le rôle le plus important à la maison pour développer le sens social de l’enfant, et c’est donc elle qui est le plus à même d’être condamnée par la collectivité si l’enfant ne satisfait pas aux normes de la société. Lorsque l’enfant grandit, la famille élargie, les institutions religieuses et la communauté d’une manière générale participent à cette éducation sociale de l’enfant.

Tandis que l’État et la loi respectent les droits des parents, ces derniers étant tenus d’élever leurs enfants de manière responsable, il est reconnu qu’il existe un certain nombre de pratiques à caractère culturel qui ne sont pas nécessairement conformes à l’intérêt supérieur de l’enfant, comme les mutilations génitales féminines et le mariage précoce. Elles ne peuvent changer qu’à long terme grâce à l’éducation des populations qui les amènera à être plus sensibles à l’amélioration des méthodes d’éducation des enfants.

La naissance d’un enfant est un heureux événement grâce auquel la famille, renforcée, se sent progresser. L’enfant n’est pas considéré comme étant un fardeau économique mais un élément de sécurité future : “Celui qui a un enfant n’est pas pressé de mourir.” Un enfant est considéré comme un appui, au plan affectif comme au plan économique. Les jeunes enfants tendent souvent à être mieux soignés et à faire l’objet d’une attention plus grande de la part des parents et des familles élargies que ceux qui sont plus âgés. La société incline à accepter le fait que les enfants plus jeunes requièrent une attention constante; le fait de parler aux enfants, de jouer avec eux, de leur raconter des histoires et, d’une manière générale, de les stimuler, sont autant d’aspects positifs de l’interaction de l’entourage et des jeunes enfants. Dans certaines régions du pays, cependant, au fur et à mesure que les enfants grandissent, les chances diminuent de les voir autorisés à exprimer leurs opinions et à participer aux prises de décision et aux activités des adultes. Il y a beaucoup de différences entre les divers groupes ethniques concernant la manière d’élever les enfants. Les communautés de plaines, en particulier les Hidareb et les Tigre, par exemple, les font participer très tôt aux prises de décision, et il est accepté qu’ils prennent part à toutes les activités, des affaires de famille à la vente du bétail et jusqu’aux affaires plus importantes concernant la communauté.

Le processus d’éducation sociale, parmi certains groupes ethniques d’Érythrée, est essentiellement autoritaire, ces groupes croyant fermement qu’il convient de discipliner les enfants dès leur plus jeune âge, et discipline va habituellement de pair avec châtiment. Alors que, dans certains groupes ethniques, les parents qui frappent leurs enfants sont sévèrement sanctionnés, dans d’autres, les châtiments corporels sont acceptés. Pour commencer, ces derniers sont interdits dans les établissements publics, comme les écoles, et, bien qu’ils soient encore pratiqués, lorsque le personnel découvrira que le dialogue et la discussion donnent de meilleurs résultats, ces méthodes seront mieux comprises et seront adoptées par les parents et par l’ensemble de la collectivité. Les traditions d’éducation disciplinaire des combattants qui ont recours à des stimulations positives à l’égard des enfants constituent un bon exemple pour le reste de la collectivité, mais il est admis que ces pratiques ne se transformeront que progressivement en habitudes généralisées.

C. Séparation d’avec les parents

La société érythréenne considère que le cadre familial est le milieu le plus approprié pour les enfants (la plupart des orphelins, par exemple, vivent avec des membres de leur famille), et la séparation et le divorce des parents pose un problème très important pour ce qui est du bien-être de l’enfant. Le Code civil transitoire admet que toutes les décisions relatives à la séparation, au divorce et à la garde des enfants dans ces circonstances relèvent de la responsabilité du conseil de famille. Ce dernier n’est pas un tribunal en tant que tel, mais un conseil constitué de membres de la famille, qui se réunit en cas de dispute familiale. En général, il est formé du père et de la mère ou de deux autres parents de chacun des conjoints, plus un autre membre.

En cas de divorce, le Code civil transitoire prévoit que la garde et l’entretien des enfants nés du mariage doivent être régis dans le seul intérêt de ces derniers (art. 681/1), étant explicitement entendu que les enfants âgés de moins de 5 ans doivent rester avec leur mère (art. 681/2). L’article 206 du Code civil précise qu’il incombe au conseil de famille de désigner un répondant ou un tuteur pour assurer la protection de remplacement de l’enfant en cas de divorce de ses parents. Il s’agit, en général, d’un proche parent. Toutefois, s’il n’existe pas de proches parents, le tribunal a le pouvoir de nommer toute personne qui lui paraît apte à exercer cette fonction (art. 212). Dans ce cas, le Code civil énumère également les responsabilités du tuteur, qui consistent à assurer le logement, les soins de santé et l’éducation de l’enfant selon les conditions économiques de la famille (art. 265-269).

Dans la société érythréenne traditionnelle, le contrat de mariage prévoit la situation des enfants en cas de divorce. Les deux parents ont des droits sur les enfants, mais les enfants doivent succéder au père (sauf chez les Kumana qui sont de tradition matrilinéaire). Chez les Chrétiens des hautes terres, ce sont les enfants qui décident, à partir d’un certain âge, avec lequel de leurs parents ils veulent vivre. Lorsque les parents se séparent ou divorcent, les plus jeunes enfants restent avec la mère et les aînés vivent avec le père. Cependant, en vertu du droit coutumier de certaines ethnies, l’aîné des garçons doit rester avec la mère (afin de pouvoir accomplir les tâches dévolues, traditionnellement, aux seuls hommes, comme le labourage), et l’aînée des filles doit vivre avec le père pour s’occuper du ménage. Par exemple, la loi des Adgena-Tegeleba stipule que, pendant le divorce, le fils aîné reste avec la mère, la fille aînée avec le père, et que la garde des autres enfants est répartie à parts égales entre les deux parents par tirage au sort, l’enfant gardant tout de même le dernier mot quant à son désir de vivre avec l’un ou avec l’autre (art. 80). Si les parents n’ont qu’un fils, il vit alternativement un mois chez son père et un mois chez sa mère et choisit, à l’âge de sept ans, avec lequel de ses parents il désire vivre.

Dans certaines ethnies, le droit coutumier stipule, inversement, que, si le père revendique la garde de ses enfants après le divorce, il peut les garder avec lui. Ce n’est possible, toutefois, que si cela est conforme au choix des enfants concernés.

Chez les Kunama, groupe ethnique matrilinéaire, la coutume, par exemple, ne donne aucun droit au père sur ses enfants après le divorce. Si c’est la femme qui demande le divorce ou qui a les torts, elle perd tous ses droits sur les biens et ne garde que les enfants. D’autre part, si c’est l’homme qui demande le divorce ou qui a les torts, il perd, lui aussi, ses droits sur les biens.

D. Recouvrement de la pension alimentaire pour l’enfant

Tout enfant a droit au recouvrement de la pension alimentaire de la part de ses parents et, en leur absence, de sa famille par voie de consanguinité ou d’affinité en ligne directe (art. 808/1 du CCTE). En l’absence de ses parents et des membres susmentionnés de la famille, ses frères et sœurs nés des mêmes parents ou du même père ou de la même mère sont tenus d’assurer l’entretien de l’enfant (art. 808/2 du CCTE). Les personnes en question n’ont l’obligation de subvenir aux besoins des enfants que s’ils en ont les moyens (art. 812 du CCTE). Il découle de tout cela que les parents ont une responsabilité égale concernant l’entretien des enfants. Toutefois, si l’un des parents ne peut pas s’en acquitter, il incombe à l’autre de le prendre en charge. Les personnes auxquelles est dévolue l’obligation d’entretien doivent nourrir, loger, habiller et soigner correctement l’enfant, compte tenu de leur situation sociale et des coutumes locales (art. 807). Tout enfant adopté peut revendiquer la créance alimentaire de la part de sa famille adoptive et non de sa famille d’origine si sa famille adoptive a les moyens de l’assurer. Outre le Code civil transitoire, la Constitution de l’Érythrée prévoit, elle aussi, que les hommes et les femmes ont des droits et des devoirs égaux concernant toutes les affaires familiales (art. 22/2).

Le droit coutumier relatif à l’entretien des enfants varie d’une ethnie à l’autre. Par exemple, dans certains groupes ethniques, un arrangement permet aux parents de couvrir à égalité les dépenses relatives à l’enfant, selon un système d’alternance mensuelle. Le droit des Adgena-Tegeleba stipule que, pendant le divorce, la mère et le père sont tenus tous deux de participer aux frais d’entretien de l’enfant à égalité (art. 51). Dans d’autres groupes, seul le parent qui en a la garde doit subvenir aux besoins de l’enfant.

La question de l’héritage et des droits fonciers est également d’importance dans la société traditionnelle de l’Érythrée. Les femmes, dans ce pays, ont plus sûrement accès aux terres et aux moyens de production qu’il n’est habituel dans les pays en voie de développement. Chez les Tigrinya des hautes terres, le droit coutumier ne permet pas de déshériter les enfants, surtout concernant le risti (jouissance des terres par voie de filiation) ou la diesa (jouissance des terres par voie de distribution périodique), les terres étant considérées comme étant des biens appartenant à la lignée et aux descendants, et non aux individus. Le parent qui décède peut faire de petits cadeaux aux membres de la famille ou aux étrangers à la famille, mais ne peut avantager un héritier par rapport à un autre. Ceci s’applique à tous les enfants, légitimes ou naturels.

Selon le droit coutumier matrilinéaire des Kunama, une femme n’a aucun droit sur les terres de son ex-mari. En cas de décès de son mari, toutes ses terres et ses biens vont aux neveux de celui-ci (les fils de la sœur dudit mari).

E. Enfants non-accompagnés et enfants privés de leur milieu familial

L’orphelinage est l’un des principaux problèmes sociaux causés par des années de guerre, de sécheresse et de désorganisation. Une enquête nationale effectuée en 1992-1993 a permis d’identifier environ 90 000 orphelins en Érythrée, dont 48 % de filles, la majorité (61 %) ayant perdu leur père. Une étude menée en 1999-2000 sur les enfants les plus vulnérables a permis d’identifier 51 000 orphelins ayant besoin d’une aide d’urgence. Une autre étude est en cours pour dénombrer les orphelins du SIDA ; il y en a actuellement 552 qui sont enregistrés et qui reçoivent l’aide du MTPS. Un orphelin est défini comme étant “un enfant qui a perdu l’un des ses parents ou ses deux parents, ou qui a été abandonné”.

La politique de l’État concernant les orphelins et les enfants non accompagnés va à l’encontre de la prolifération des orphelinats et du placement en institution, fondée qu’elle est sur l’intérêt supérieur de l’enfant. Elle vise à renforcer les mesures de protection sociale traditionnelles que les diverses communautés du pays appliquent depuis des générations.

Le MTPS, auquel est dévolue la responsabilité des affaires relatives aux enfants, a mis au point les stratégies et les programmes suivants concernant les orphelins et les enfants non accompagnés :

a)La réintégrationdes orphelins dans leur famille proche, comme étant la meilleure solution pour assurer leur intégration psychologique et répondre aux besoins de leur développement ;

b)Le placement nourricier permettant de réintégrer les orphelins dans leur famille proche en tant que mesure stratégique et solution de remplacement ;

c)L’adoption des enfants abandonnés, en vertu de la Déclaration nationale, en plus du Code civil transitoire de l’Érythrée autorisant l’adoption;

d)La prise en charge en groupe des enfants dans des foyers communautaires, considérée comme étant dans l’intérêt supérieur de l’enfant parce qu’elle peut atténuer les effets psychologiques négatifs du placement en établissement ; et

e)Le placement en établissement, qui est considéré comme un dernier recours et seulement quand toutes les autres options ont été épuisées.

1. Programme de réintégration/réadaptation familiale des orphelins

Le MTPS a accordé une forte priorité à la réunion des orphelins avec leur famille élargie ; ce programme, en harmonie avec les pratiques traditionnelles, est économique en même temps. La réintégration familiale a été pratiquée de 1992 à 1994. Un programme national de réunification familiale, entre 1994 et 1997, a appuyé l’intégration de près de 14 000 orphelins dans près de 7 000 familles dans l’ensemble du pays (pour un coût de 4 millions de dollars EU). Quelque 60 % des jeunes bénéficiaires étaient âgés de moins de 9 ans. Depuis lors, trois orphelinats nationaux ont été fermés. Le programme de réintégration/réadaptation familiale des orphelins était axé à la fois sur le placement des enfants dans des familles et sur le renforcement des ressources économiques de ces familles. Le nombre des orphelins réintégrés dans leur famille, dans le cadre du programme, entre 1994 et 2002, est de 25 547, un appui économique ayant été apporté à 13 966 familles d’accueil. Un autre programme est envisagé, qui doit permettre de venir en aide à 40 000 orphelins de plus. Il concerne les catégories suivantes : orphelins du SIDA, enfants non accompagnés, déplacés et expulsés, la priorité étant donnée à ceux qui sont les plus vulnérables.

La présence des orphelins au foyer des familles d’accueil est considérée comme étant un fardeau supplémentaire, d’où le fait que le renforcement de leurs capacités socio-économiques est une des composantes essentielles du processus de réunification. Les familles vulnérables ont été identifiées et sont aidées. L’aide économique a été apportée en espèces de 1992 à 1994. Au total, 20 millions de nakfa (3,2 millions de dollars EU) ont été distribués aux familles d’accueil. Cette pratique a été revue en 1994 et remplacée par des moyens de production de revenus. Globalement, l’aide se monte maintenant à 12 800 000 dollars EU. Le MTPS et l’UNICEF ont formé 52 travailleurs sociaux de plus à la protection des enfants en les familiarisant avec la Convention relative aux droits de l’enfant ; ces agents auront la responsabilité particulière de surveiller les enfants réintégrés et la mise en œuvre du programme communautaire de réadaptation.

2. Éléments nouveaux concernant le placement familial

Le placement familial des orphelins est une mesure stratégique qui est expérimentée depuis 1992, en tant que solution de remplacement de la réintégration des orphelins dans leur famille proche. Si cette dernière est introuvable ou si elle ne peut pas prendre l’enfant en charge pour une raison ou pour une autre, celui-ci est placé dans une autre famille désireuse et capable de s’occuper de lui comme il convient. Une grande importance a été accordée à la capacité de la famille d’apporter à l’enfant, à la fois l’aide économique et aussi le confort affectif et l’amour dont il a besoin.

Les procédures à suivre pour assurer un placement approprié de l’enfant sont les suivantes :

a)Il est demandé aux familles qui sont intéressées de se faire connaître au MTPS et de remplir une demande ;

b)Une visite du domicile desdites familles est effectuée pour permettre d’évaluer leur situation et leur capacité à élever un enfant, leurs moyens financiers, et les moyens d’accès qu’elles offrent aux services sociaux (écoles, établissements de soins de santé) ;

c)Des modalités claires sont mises au point avec la famille concernant le placement ;

d)Des visites régulières sont effectuées par un travailleur social du MTPS pour évaluer le développement de l’enfant. Si les résultats ne sont pas probants et que l’enfant ne s’épanouit pas, on envisage un placement de remplacement.

Sur les 50 familles candidates à l’adoption en 1992, 8 seulement ont été acceptées à l’essai. Huit orphelins ont été placés dans ces familles et un suivi a été effectué après trois mois, qui a permis de constater des résultats satisfaisants. Une évaluation approfondie ultérieure, cependant, a révélé que l’intégration psychologique des enfants dans leur famille d’accueil ne s’était pas vraiment faite. Les familles s’occupaient généralement des enfants placés, mais ils ne recevaient pas l’appui psychologique adéquat et il était évident que leurs propres enfants bénéficiaient d’un traitement de faveur.

Pour permettre de remédier un tant soit peu à ces problèmes, les familles ont bénéficié régulièrement de consultations et de conseils, mais, en dépit de ces efforts, le niveau des soins accordés aux enfants n’a cessé de baisser. Un défaut de compréhension a été relevé de la part des parents nourriciers à l’égard des attitudes jugées inacceptables des enfants, cela entraînant des châtiments corporels. Même les familles qui avaient les connaissances nécessaires concernant les soins appropriés à apporter aux enfants et la discipline à leur imposer ne mettaient pas ces connaissances en pratique. Certains de ces enfants ont été retirés à leur famille d’accueil et renvoyés dans les orphelinats.

Le placement familial a été rejeté par les communautés comme étant un principe étranger à leur civilisation ; pour cette raison, les pouvoirs publics ne considèrent pas que ce programme soit un succès et n’a pas l’intention de l’étendre.

3. Adoption

L’adoption, en Érythrée, implique la reconnaissance juridique du fait qu’un enfant fait partie d’une famille adoptive. Elle crée artificiellement un lien de filiation grâce à un contrat d’adoption entre l’adopteur et l’enfant adopté (art. 796/1 du CCTE). Un mineur ne peut pas être une partie contractante (art. 797/1 du même Code), et le père et la mère de l’enfant doivent donner tous deux leur accord (art. 803/1 dudit Code). L’accord de l’enfant est également nécessaire s’il est âgé de plus de 10 ans. Le contrat d’adoption est sans effet s’il n’a pas été approuvé par le tribunal (art. 804/1 du CCTE).

Un lien de consanguinité ou d’affinité ayant été créé, l’enfant adopté peut réclamer une créance alimentaire à la famille adoptive (art. 823/1 du CCTE). De plus, il peut aussi revendiquer une part d’héritage en tant que membre de ladite famille.

L’enfant abandonné est couvert par les articles 103 et 2/3 de la déclaration relative à la nationalité. Par ailleurs, l’article 556 du Code civil transitoire accorde le droit à l’adoption, laquelle est régie par les articles 796 et 806 dudit Code.

L’adoption, en Érythrée, implique donc la reconnaissance juridique du fait que l’enfant fait partie de la famille adoptive. Cette dernière doit, tout d’abord, répondre à l’exigence imposée par le MTPS de s’occuper de l’enfant de manière adéquate, ensuite une décision doit être prise par un tribunal, après quoi la famille signe un document juridique par lequel elle accepte de s’occuper de l’enfant. L’adoption ne peut avoir lieu en l’absence d’une bonne raison et offre à l’enfant d’importants avantages. Si celui-ci est assez âgé pour prendre une décision en connaissance de cause, il doit donner son accord pour l’adoption.

Il y a un nombre relativement important de familles qui souhaitent adopter des enfants. Néanmoins peu d’entre elles sont élues, car la priorité est donnée à celles qui sont sans enfants ou qui n’en n’ont qu’un. L’adoption n’est autorisée que pour les nourrissons abandonnés ; il y en a en moyenne six ou sept par an. Depuis l’indépendance, il n’a eu que 50 adoptions en Érythrée.

Les familles adoptantes sont tenues d’envoyer des rapports trimestriels sur l’enfant pendant la première année, puis des rapports annuels jusqu’à ce qu’il atteigne l’âge de 18 ans.

4. Foyers communautaires pour enfants (hébergement de groupe)

Pour les enfants qui n’ont pas pu être réintégrés dans leur famille proche ou qui n’ont pu faire l’objet d’une adoption ou d’un placement familial, on considère que leur intérêt supérieur commande leur placement dans un foyer communautaire. Cette option peut atténuer les effets à caractère social et psychologique de la vie en établissement. Elle consiste à placer les enfants dans des foyers d’hébergement communautaires qui leur offrent un environnement social relativement naturel. Dans la mesure du possible, le nombre des résidants est limité pour rester raisonnable et permettre de répondre de manière appropriée aux besoins sociaux, psychologiques, affectifs et éducatifs de chacun.

Il y a, aujourd’hui, 12 foyers d’hébergement qui fonctionnent dans les plus grandes villes des régions et 6 autres sont en construction. Dans chaque foyer sont logés 10 à 12 enfants et deux mères nourricières. En 2002, 132 orphelins étaient placés dans des foyers d’hébergement. Les enfants issus de milieux similaires sont regroupés de sorte que leur identité ethnique et culturelle est préservée. Les enfants qui sont choisis pour être placés dans ces foyers sont ceux qui ont perdu leurs deux parents, dont les coordonnées des parents sont inconnues, qui n’ont pu bénéficier des programmes de réunification et qui sont âgés de 1 à 12 ans. Les frères et sœurs sont regroupés dans le même foyer et filles et garçons sont admis à participer au programme. Dans toute la mesure du possible, les enfants sont maintenus dans la région d’où ils sont originaires. Les foyers d’hébergement ont été évalués par le MTPSen 1998 et, plus récemment, en 2002. Il en est ressorti qu’ils fonctionnent bien et assurent aux enfants un milieu sûr dans lequel ils sont bien soignés.

5. Placement en établissement

Le premier orphelinat fonctionnant sous l’égide du FPLE a été fondé en 1978 à Solomuna, dans le Sahel, et assurait aux enfants l’alimentation de base, l’eau, l’abri, les vêtements, l’éducation et les soins médicaux. Lors de l’indépendance, plus de la moitié de ces enfants ont donné leur accord pour être réintégrés dans leur famille.

La politique de l’État va à l’encontre du placement des orphelins en établissement, qui est considéré comme étant l’option la moins désirable et à retenir en dernier ressort. Grâce au programme efficace de réunification, un certain nombre d’orphelins ont été réintégrés dans leur famille élargie. En conséquence, tous les orphelinats nationaux, sauf un, ont été fermés.

Il y a actuellement 10 orphelinats privés qui fonctionnent en Érythrée, dont beaucoup sont administrés par des organisations religieuses. Les enfants y sont admis depuis la naissance jusqu’à l’âge de 11 ans. La surveillance en est assurée par le MTPS. Les directives concernant la gestion de ces orphelinats sont établies par accord entre le MTPSet les directeurs des établissements. Selon une étude dudit Ministère, le nombre total des enfants placés dans ces établissements a été estimé à 1 500.

À longue échéance, la politique du gouvernement prévoit le retrait progressif des enfants de ces orphelinats privés, selon un processus similaire à celui qui a été appliqué pour les enfants placés dans les établissements publics.

F. Déplacement et non-retour illicites

Il n’a pas été porté à la connaissance des autorités la moindre preuve matérielle pouvant suggérer que des enfants sont transférés illégalement hors du pays aux fins d’adoption ou qu’il se pratique d’autres formes de déplacement illicite. Bien qu’aucune étude n’ait été effectuée à ce sujet, il paraît extrêmement improbable que cela soit un problème important en Érythrée.

G. Mauvais traitements et négligence

Concernant les infractions punissables, il est interdit à tout parent ou tuteur de traiter un enfant avec négligence, de lui imposer des tâches trop importantes, de le frapper de telle manière que son développement mental ou physique puisse en être affecté, de l’abandonner dans des conditions ou dans des lieux dangereux. Si l’enfant n’a pas accès aux produits de première nécessité, le tribunal peut condamner les parents ou le tuteur, ou même restreindre leurs droits (art. 548 et 626 du CPTE).

Selon le droit coutumier, la société traditionnelle érythréenne tend à traiter comme il convient les familles qui maltraitent leurs enfants et à leur imposer de sévères sanctions. Nous ne disposons pas de statistiques adéquates sur les abus sexuels et la négligence au sein de la famille. Le Programme national 2002-2006 de l’État d’Érythrée et de l’UNICEF prévoit une étude sur l’abus et la négligence de l’enfant. (Les questions relatives aux abus sexuels et à l’exploitation, ainsi qu’aux enfants des rues et aux enfants qui travaillent sont abordées dans la suite du présent rapport, au chapitre VII, Mesures spéciales de protection.)

H. Examen périodique du placement

Comme il a été indiqué dans la section ci-dessus, tous les placements d’enfants dans le cadre de programmes de réunification des familles ou de placement familial sont soumis à des contrôles réguliers de la part des travailleurs sociaux du MTPS. Si les enfants ne sont pas soignés comme il convient, le travailleur social est tenu de donner son avis et de conseiller la famille concernée, puis de trouver un placement de remplacement si la situation ne s’améliore pas. Ainsi qu’il a été exposé dans la section consacrée au placement nourricier, le MTPS est très attentif à ce que les enfants fassent l’objet de soins adéquats et n’hésite pas à les retirer des familles d’accueil si c’est nécessaire. Des évaluations internes et externes des programmes sont effectuées périodiquement, leurs conclusions ont été très satisfaisantes et il a été recommandé de poursuivre et d’étendre le programme.

L’adoption est une affaire un peu plus délicate, parce que, bien sûr, l’enfant devient juridiquement un membre de la famille adoptive et que cette mesure ne peut pas être annulée sans une bonne raison. Cependant, un contrôle de base est opéré régulièrement, qui inclut des rapports adressés périodiquement par les familles adoptives au MTPS et des visites sont effectuées par les travailleurs sociaux au domicile de ces familles toutes les fois qu’il est nécessaire.

Il est reconnu qu’il faut mettre au point des directives à ce sujet à l’intention des travailleurs sociaux, en particulier concernant la manière de traiter les affaires impliquant des enfants. La formation professionnelle a posé un problème très important, car peu de travailleurs sociaux en avaient une. Le MTPS, en collaboration avec l’UNICEF, a fait de gros efforts pour améliorer leurs compétences en matière d’approche psychosociale des orphelins et des autres enfants vulnérables. Des stages de courte durée ont également été organisés et la formation du personnel du MTPS, de la Commission de police et du Ministère de la justice a été améliorée en ce qui concerne les compétences de base qui font l’objet des stages.

Le MTPS, en collaboration avec l’Université d’Asmara et d’autres institutions, a pris des mesures destinées à renforcer ses capacités en ressources humaines. Certains des programmes de formation suivants ont été développés : service social, droit, sciences de l’environnement, sociologie et anthropologie, sciences économiques, finances/gestion/communication, justice pour mineurs et probation. En outre, divers stages d’orientation concernant les soins aux enfants, la protection et la Convention relative aux droits de l’enfant ont été ouverts au personnel du MTPS.

VI. SANTÉ ET BIEN-ÊTRE

A. Survie et développement

Le taux national de mortalité infantile est de 48 décès pour 1 000 naissances vivantes (Enquête démographique et sanitaire de l’Érythrée, (EDSE), 2002) et le taux de mortalité des moins de 5 ans est de 93 pour 1 000 naissances vivantes (EDSE, 2002). Aucun cas de polio ni de diphtérie n’a été relevé depuis 1997 et toutes les maladies pouvant être prévenues par la vaccination sont en recul.

L’EDSE de 2002 révèle que 40 % des enfants âgés de moins de 5 ans présentent une insuffisance pondérale, et 12 % une insuffisance pondérale grave, ces chiffres étant respectivement de 39 % et 13 % concernant les moins de 3 ans. Cela montre que, dans l’ensemble, l’état nutritionnel des enfants s’améliore et que les taux de malnutrition ont considérablement baissé depuis l’EDSE de 1995.

La définition du taux de mortalité liée à la maternité, qui indique le nombre de femmes qui décèdent de causes en rapport avec la grossesse, est une mesure importante qui témoigne à la fois de l’efficacité des soins de santé dans leur ensemble et de la priorité accordée à la santé des femmes. Ce taux, en Érythrée, est de 998 décès pour 100 000 grossesses ; environ 1 000 femmes meurent chaque année et beaucoup d’autres souffrent à vie de complications et de handicaps. Le risque, à la naissance, pour une femme érythréenne, de mourir de causes liées à la grossesse ou à l’accouchement est de 1 pour 14, contre 1 pour 100 000 dans les pays développés. Il faut, cependant, considérer ces chiffres avec prudence, parce que ce sont ceux de l’EDSE de 1995, et comme les taux de mortalité avaient été évalués de 5 à 10 ans auparavant, ils rendent compte du fonctionnement des systèmes de soins de santé tels qu’ils étaient avant l’indépendance. Les autorités reconnaissent que ce taux de mortalité est inacceptable et s’efforcent d’y remédier de différentes manières. La première, et la plus fondamentale, consiste à faire en sorte que toutes les femmes aient accès aux soins de santé de base pendant leur grossesse et soient informées de manière adéquate sur leur santé et sur la prévention de la mortalité liée à la maternité.

En plus du Programme de maternité sans danger, deux études ont déjà été effectuées par le Ministère de la santé, qui ont permis d’obtenir des données sur a) la disponibilité et la qualité des services sanitaires en matière de maternité, et b) les facteurs culturels propres à favoriser une maternité sans danger. Les résultats de ces études ont été discutés dans un atelier consacré à la maternité sans danger.

Certaines pratiques culturelles positives ont été relevées, qui vont dans le sens d’une maternité sans danger, comme l’allaitement maternel de longue durée (jusqu’à deux ans), le tish (fumigation) qui aide la future mère à se purifier et à se détendre (le Ministère de la santé, néanmoins, ne soutient pas cette pratique dans ses consignes d’éducation sanitaire, parce qu’elle peut entraîner une déshydratation de la femme), l’apport de liquides nutritifs pendant le travail et le fait de resserrer les liens entre la mère et le nouveau-né dès la naissance. Toutefois, le taux élevé de mortalité liée à la maternité n’est pas sans rapport avec un certain nombre de pratiques culturelles pernicieuses, dont :

la pratique très répandue des mutilations génitales féminines (MGF) ;

les tabous alimentaires pendant la grossesse ;

la charge de travail très lourde qui incombe en général à la femme ;

le mariage précoce;

la croyance que la grossesse est un phénomène naturel qui n’appelle pas des soins médicaux particuliers; et

la situation économique et sociale des femmes qui est mauvaise dans l’ensemble.

L’enquête réalisée en 1994 par le Ministère de la santé sur les carences en micronutriments, à savoir les carences en vitamine A, les troubles dus à une carence en iode (TCI) et l’anémie nutritionnelle, montre qu’elles sont toutes cause de graves préoccupations concernant la santé des enfants en Érythrée. Cette enquête a révélé que 6,7 % des moins d’1 an présentaient des carences en vitamine A, que 6,7 % présentaient un risque important et 21,7 % un risque modéré de se trouver dans ce cas. Ces taux relativement bas sont peut-être dus à l’allaitement maternel, qui est très répandu, car le lait maternel apporte assez de vitamines A à l’enfant pendant les six premiers mois de sa vie. La carence en vitamine A est probablement beaucoup plus importante chez les enfants âgés de plus d’un an. Le Ministère de la santé a lancé une distribution de compléments de vitamine A dans le cadre des Journées nationales de vaccination pour l’éradication de la polio, en 1996, dont 94 % des moins de 5 ans bénéficiaient en 2000. Grâce à ces campagnes, le taux de carence en vitamine A devrait baisser à courte échéance, ainsi que devrait le confirmer une enquête nationale prévue pour 2002.

L’enquête sur les micronutriments a également révélé que 23 % des écoliers âgés de 9 à 11 ans présentent le signe le plus visible de carence en iode, un gonflement de la glande thyroïde, ou goitre, à raison de 26 % chez les filles et 19 % chez les garçons. Une étude complémentaire sur le taux d’iode dans l’urine des enfants a montré que 82 % d’entre eux présentaient une carence en iode (grave pour 36 %, modérée pour 25 % et faible pour 21 %). Toutefois, des tests similaires effectués en 1996 ont révélé que la prévalence de TCI, telle qu’elle apparaît dans les mesures du taux d’iode dans l’urine, a chuté, passant de 82 à 25 % et que 97 % des foyers qui ont fait l’objet de l’enquête utilisent du sel iodé. La diminution des TCI est attribuée à l’apparition de l’iodation du sel en Érythrée au début de 1996, date à laquelle le pays était en mesure d’ioder 80 à 85 % de son sel. Selon les estimations, l’Érythrée voit naître, chaque année, 510 handicapés mentaux et 50 960 enfants avec des lésions cérébrales (perte de QI). On estime également que quelque 637 000 enfants âgés de 0 à 17 ans souffrent de lésions cérébrales. Les pouvoirs publics ont mis au point un programme destiné à éliminer les carences en iode et en vitamine A et à faire baisser les carences en fer de 33 % d’ici à 2004. Le projet de loi relatif à l’iodation du sel a été préparé et se trouve actuellement en cours d’examen.

Maladies contagieuses

Selon les données disponibles de 1999 établies par le Système de gestion des informations relatives à la santé de l’État d’Érythrée, les quatre causes principales de maladie des consultants externes des hôpitaux âgés de moins de 5 ans sont : des affections respiratoires aiguës (39 % des admissions d’enfants), la diarrhée (22 % des admissions), la malaria (10 % des admissions) et la malnutrition (2 % des admissions). Bien que la diarrhée entraîne moins d’hospitalisations que la malaria ou les affections respiratoires aiguës, son taux de mortalité est beaucoup plus élevé, et elle tue presque autant d’enfants. Les affections respiratoires aiguës sont cause d’environ 44 % des hospitalisations d’enfants, mais ne sont fatales qu’à 3 % d’entre eux. La malaria est responsable d’environ 20 % des hospitalisations d’enfants, mais est mortelle dans 7 % des cas. Par contre, il n’y a qu’environ 11 % des enfants qui sont hospitalisés pour des maladies diarrhéïques, mais près de 13 % d’entre eux ne ressortiront pas vivants, bien que, dans la plupart des cas, l’affection qui a entraîné cette hospitalisation puisse être traitée facilement et complètement.

L’une des nouvelles causes de décès les plus frappantes est le VIH/SIDA, qui ne venait qu’en 10ème position en 1996, mais est montée à la première place en 1999 et à la deuxième en 2000, chez les enfants âgés de cinq ans et plus. Par ailleurs, l’hypertension et les maladies du foie gagnent également du terrain. Par contre, la diarrhée devient moins souvent fatale chez les enfants âgés d’au moins cinq ans (Ministère de la santé, 2000).

Modernisation de la vaccination

L’objectif du programme érythréen de vaccination est d’améliorer la survie juvénile en réduisant le taux de morbidité, de mortalité et d’incapacités attribué aux sept maladies infantiles pouvant être prévenues par la vaccination et les principaux but à atteindre d’ici à la fin de 2005 sont les suivants :

Atteindre une couverture vaccinale d’au moins 90 % de tous les antigènes ;

Faire diminuer le taux de mortalité de la rougeole de 95 %, et son taux de morbidité de 90 % d’ici à 2004;

Éliminer le tétanos néonatal d’ici à 2004; et

Éradiquer la poliomyélite d’ici à 2005.

Le tableau ci-dessous fait apparaître l’amélioration du taux de la couverture vaccinale entre 1991, l’année de la libération, et décembre 2000.

Tableau 1

Couverture vaccinale (en pourcentage)

Antigène

1991

1993

1996

2000

BCG

13

37

53

61

DPT3/POL3

9

28

46

52

Rougeole

9

23

39

50

TT2+

1

5

23

25

En 2000, les journées nationales de vaccination pour l’éradication de la poliomyélite ont permis d’atteindre un couverture vaccinale de 94 % parmi les moins de 5 ans.

Les taux de morbidité et de mortalité avaient fortement baissé à la fin de 2000 en raison du lancement du programme étendu de vaccination. Avec le VIH/SIDA qui émergeait, la tuberculose était la principale cause de morbidité et de mortalité due aux maladies pouvant être prévenues par la vaccination à la fin de 2000. La tuberculose mise à part, le taux de morbidité chez les consultants externes et les malades hospitalisés, en 2000, n’était que de 0,3 %, mais il était de 1,3 % avec la tuberculose. Le taux de mortalité sans la tuberculose était de 0,2 %, et, avec la tuberculose, de 6,5 %. Il n’a été fait état d’aucun cas de diphtérie ni de polio.

VIH/SIDA et maladies sexuellement transmissibles

Les premiers cas de SIDA ont été relevés en Érythrée en 1988 ; le nombre total de cas signalés est passé de 8 en 1988 à 13 500 en 2001, dont 2 462 pour la seule année 2001 (sans compter les militaires). Selon les estimations faites dans le cadre du programme national de contrôle du SIDA, environ 60 000 à 70 000 Érythréens ont été contaminés par le VIH. Une analyse du Ministère de la santé indique que le nombre de cas de SIDA double à peu près tous les 18 mois. Au milieu de 2001, la prévalence du VIH/SIDA était estimée par ledit Ministère à 3 % de la population. Sur les 1999 cas signalés, 70 % concernaient des personnes âgées de 20 à 39 ans, 5 % des enfants âgés de moins de 15 ans, et 60 % des hommes. Plus de 98 % des cas se trouvent dans des zones urbaines, essentiellement dans les plus grandes villes : Asmara, Massawa et Assab. Les fourchettes d’âges les plus touchées sont les groupes 20-24 ans pour les femmes et 25-29 ans pour les hommes. Une étude réalisée en 1997 a montré que plus de 2 % des femmes enceintes fréquentant les dispensaires prénatals en Érythrée étaient séropositives et que la prévalence du VIH chez les professionnel[le]s du sexe était de 35 %. Une politique d’ensemble concernant le VIH/SIDA et les maladies sexuellement transmissibles a été mise sur pied en 1998. Elle fait ressortir le besoin de communautés qui soient concernées et de coopération intersectorielle pour faire respecter les droits des personnes atteintes par le SIDA).

En 2000, l’État a lancé, avec l’appui de la Banque mondiale, son programme de surveillance du VIH/SIDA, de la malaria, des maladies sexuellement transmissibles et de la tuberculose (HAMSET). Ce projet/programme vise à améliorer l’efficacité des politiques et des interventions destinées à limiter l’extension des maladies susmentionnées, à améliorer l’accès aux services de soins de santé primaires et la qualité de ces services, et à définir un mode d’évaluation à caractère communautaire et des actions permettant de faire reculer ces maladies. Un effort conjoint de l’État et du groupe thématique Onusien sur le VIH/SIDA en Érythrée est prévu en pour lui permettre d’élaborer son premier plan intégré en 2002.

En 2000, il a été fait état de 3 790 cas de maladies sexuellement transmissibles (0,49 %) dans les hôpitaux, dont 0,6 % étaient des enfants âgés de moins de 5 ans. Ce nombre était inférieur à celui de 1999 (4 526). Il n’existe pas d’étude sur la prévalence des maladies sexuellement transmissibles en Érythrée et les statistiques y afférentes sont limitées. Le nombre des cas signalés est inférieur au nombre réel de cas, car beaucoup de malades peuvent recourir à l’automédication dans les drugstores et autres dispensaires. Néanmoins, le priorité du Programme national de surveillance du SIDA est de prévenir et de contrôler les maladies sexuellement transmissibles (MST) qui facilitent la propagation du HIV/SIDA. Les MST les plus répandues en Érythrée sont la gonorrhée et la syphilis.

Les stratégies utilisées visent :

a)À réduire la propagation du VIH/SIDA et des MST;

b)À diminuer l’impact social et économique du VIH/SIDA;

c)À mobiliser les ressources locales et externes pour lutter contre l’épidémie de SIDA; et

d)À prendre soins des orphelins du SIDA.

On note une augmentation sensible du nombre de cas de SIDA signalés dans le groupe d’âges 15-19 et un accroissement de celui des nouveaux cas chez les femmes. L’écart entre les hommes et les femmes s’amenuise, le rapport étant tombé de 2,3:1 (hommes par rapport aux femmes) en 1995 à 1,9:1 en 1997 et 1,6:1 en 1999. Les causes de la vulnérabilité des femmes sont les suivantes :

a)Un taux d’alphabétisation plus bas que chez les hommes, ce qui leur rend l’information moins accessible;

b)Leur vulnérabilité biologique;

c)Le manque de contrôle des ressources économiques, et une situation sociale inférieure à celle des hommes ; et

d)La plupart des MST sont asymptomatiques chez les femmes, ce qui rend impossible un traitement précoce.

Lorsqu’un nombre accru de femmes sont contaminées par le VIH/SIDA et les maladies sexuellement transmissibles, l’impact est grave. Les femmes étant les pourvoyeuses de soins de la famille, cela va accroître le nombre des enfants contaminés (de mère à enfant) et un nombre accru d’orphelins vont se retrouver démunis.

a)Adolescents

En plus des services apportés à l’ensemble de la population par le Ministère de la santé, l’UNJEE est l’une des ONG qui offrent un programme intégré de santé génésique et sexuelle aux adolescents; elle a établi des dispensaires où les jeunes sont bien accueillis, un système d’enseignement mutuel, et des séminaires d’orientation décentralisés ; les activités, qui concernent les parents, les décideurs et la collectivité dans son ensemble, comportent des ateliers de sensibilisation (par exemplesur les mutilations génitales féminines, sur l’utilisation des préservatifs). Les séminaires d’orientation décentralisés s’adressent surtout aux établissements d’enseignement secondaire, aux jeunes filles en dehors de l’école, aux animateurs de groupes de jeunes et aux professionnel[le]s du sexe. La santé génésique dans le cas de rapports sexuels sans protection, les MST, les affections sexuellement transmissibles et le VIH/SIDA font partie des questions traitées.

b)Les enfants

Le MTPS et l’UNICEF entreprennent actuellement une étude sur les orphelins du SIDA de Gash Barka. Il n’existe aucune donnée fiable qui explique le nombre d’enfants contaminés par le VIH/SIDA ou celui des sidaïques. En 2002, 552 orphelins du SIDA étaient enregistrés auprès Ministère de la santé qui leur apportait une aide.

En 2000, le SIDA a été la deuxième cause de mortalité parmi les patients âgés de 5 ans et plus. Les efforts s’intensifient pour permettre de conseiller les femmes séropositives sur les risques qu’elles courent et sur leur choix. Les mesures visant à prévenir la transmission du virus de la mère à l’enfant sont les suivantes : une extension des consultations privées et des services de tests dans tous les dispensaires prénatals. Un programme expérimental de surveillance lancé par le Ministère de la santé dans quatre régions témoigne de cet engagement :

a)À intensifier la sensibilisation et les consultations à l’intention des femmes, des jeunes filles et des hommes vulnérables. Alors qu’en 1998, environ 28 % des patients séropositifs inscrits bénéficiaient des consultations, cette proportion a atteint 75 % en 2000 selon le Ministère de la santé ;

b)À informer le public sur les orphelins du SIDA pour le sensibiliser ;

c)À dispenser conseils et éducation concernant les méthodes contraceptives aux mères à risque ou à celles qui sont connues pour être séropositives ; et

d)À aider les orphelins du SIDA.

Des mesures ont été prises pour prévenir et combattre les comportements discriminatoires à l’égard des enfants et des orphelins contaminés grâce à des services de consultation et à une aide financière. Les enfants contaminés ne sont pas ciblés, pour ne pas compromettre leur droit aux services de base.

Eau et assainissement

L’Érythrée est victime de sécheresses récurrentes qui entraînent de graves pénuries d’eau pour les personnes, les récoltes et le bétail, problème qui a été aggravé par la destruction d’installations du réseau d’approvisionnement en eau pendant la guerre de 1998-2000. Le manque d’eau saine a des répercussions sur la qualité de l’hygiène et de l’assainissement. La plupart des cours d’eau érythréens sont périodiquement à sec, mais beaucoup d’Érythréens sont tributaires de la nappe phréatique. Il y a des villages qui possèdent des barrages et utilisent l’eau de ces barrages sans la filtrer ni la traiter.

Le rapport de 2001-2002 sur la croissance économique transitoire et la lutte contre la pauvreté indique que 10 % seulement des populations rurales et 63 % des populations urbaines ont accès à de l’eau saine.

Au terme d’une enquête sur les ressources en eau effectuée en 1994, il a été estimé que la moyenne des Erythréens utilisent moins de 3 litres d’eau salubre par jour, ce qui est inférieur au quart de la norme minimale de l’OMS. L’EDSE révèle que la moitié, environ, des foyers ruraux utilisent l’eau de provenances non protégées, comme les sources, les rivières ou les fleuves, l’autre moitié étant essentiellement tributaire des puits publics – trous creusés à la main ou forés, de divers types (41 % publics, 8 % privés). Dans l’ensemble du pays, environ 22 % des foyers ont l’eau courante chez eux ou y ont accès à un robinet communautaire, 9 % sont tributaires de réservoirs, 32 % des puits communautaires et 36 % d’eau de provenances non protégées (sources, rivières et barrages). Dans les villes, les Érythréens ont accès à l’eau courante, mais les réseaux sont vieux et près de la moitié de l’eau se perd par suite de fuites ou de ruptures. Dans les zones rurales, ils vont chercher l’eau aux sources, aux rivières et aux fleuves, aux réservoirs ou aux puits, quelquefois très loin; dans les plaines arides, par exemple, le transport quotidien de l’eau est une épreuve décourageante, et, en conséquence, l’hygiène est mauvaise. Les puits permettent d’avoir un accès assez sûr à l’eau, mais les forages sont difficiles et il n’y en a que trois sur cinq qui réussissent. Dans les puits existants, environ quatre pompes sur cinq fonctionnent, la plupart étant des pompes à main “India mark II”. Les puits ont 60 mètres de profondeur. Les pompes se détériorent rapidement par suite d’une utilisation excessive ou mauvaise. Les hommes et les animaux boivent à la même source. L’entretien est médiocre. Quel que soit le type de maintenance, les représentants de la direction régionale sont censés faire le déplacement et le personnel d’entretien se heurte à maints problèmes de financement et de transport pour pouvoir faire les réparations sans retard.

Nécessité d’améliorer l’assainissement

Selon l’EDSE de 1995, 1 % de la population rurale et 12 % de la population urbaine (soit 18 % de la population totale) ont accès à des installations d’assainissement adéquates. La plupart des gens ne connaissent pas les règles d’hygiène. L’EDSE confirme que 99 % des foyers ruraux n’ont pas de moyens d’évacuation des excrétas et leurs habitants vont déféquer dans la brousse. Dans les zones urbaines, cependant, 30 % des habitants utilisent des WC à chasse d’eau, 15 % partagent un WC à chasse d’eau et 18 % des latrines traditionnelles à fosse. Mais, même dans les zones urbaines, un peu plus d’un tiers des ménages ne disposent pas d’installations d’assainissement.

Les zones urbaines, comme Asmara, Keren, Massawa, Mendefera, Agordat, Adi Keyih et Assab ont un réseau d’égouts. Environ 40 % des maisons d’Asmara sont reliées à Mai Bella par le réseau d’assainissement mais ce dernier est en mauvais état. Quelque 20 % des maisons d’Asmara ont une fosse septique ou des latrines à fosse ; les 40 % restants n’ont aucun système d’assainissement. Des latrines publiques sont construites dans les endroits où les ménages sont trop pauvres ou n’ont aucun espace à y consacrer.

Un effort d’importance déployé en 1997 a permis de former le personnel de l’administration publique à l’évaluation des manières de voir et des pratiques relatives à l’hygiène, afin de les améliorer. Un premier programme de formation de formateurs a été mis en œuvre à l’intention de 35 hauts fonctionnaires du Ministère de la santé et du département des ressources en eau. Ces fonctionnaires assurent maintenant une formation similaire dans le cadre de la Promotion de l’éducation sanitaire, avec des exercices d’application pratique aux niveaux régional et sous-régional. Une formation en matière d’hygiène participative et de transformation de l’assainissement est dorénavant assurée dans toutes les zones.

Le manque d’approvisionnement en eau salubre est une des premières causes de maladies en Érythrée. Néanmoins la mauvaise qualité de l’assainissement et de l’hygiène est encore plus préoccupante. Un projet lancé par le Département des ressources en eau avec l’appui du PNUD et de l’UNICEF vise à remédier à l’état déplorable du réseau et de l’assainissement. Le Programme érythréen relatif à l’approvisionnement en eau des zones rurales et à l’assainissement de l’environnement permettra de restaurer et d’étendre le réseau, de forer des puits dans les zones rurales, de fournir l’équipement et les pièces de rechange essentiels, de former le personnel, d’assurer l’appui technique et de mettre au point une base de données permettant de procéder à la planification et à des échanges d’expérience avec les autres pays de la région. De plus, au Département des ressources en eau, on comprend la nécessité d’appuyer les initiatives au niveau local, d’encourager la participation de la collectivité, de rendre plus important le rôle des femmes et de recourir aux initiatives para-scolaires.

Pratiques traditionnelles nuisibles à la santé de l’enfant

Les pratiques traditionnelles nuisibles à la santé de l’enfant sont encore très répandues en Érythrée. Il semble que la plupart d’entre elles soient exercées pour des raisons non pas religieuses, mais culturelles, et, par conséquent, varient d’une ethnie à une autre. Le FPLE a rassemblé une documentation sur les pratiques culturelles dans le pays, y compris les pratiques traditionnelles nocives, pendant la guerre. Il faut effectuer d’autres études. Comme toutes les pratiques traditionnelles nocives, elles sont difficiles à éradiquer car ceux qui s’y livrent ignorent souvent les conséquences de ces coutumes.

a)Mutilations génitales féminines (MGF)

Selon les estimations (EDSE, 2002), 89 % des jeunes filles érythréennes ont subi une forme de mutilation génitale (en 1995, elles étaient 95 %). Celles qui sont élevées sous l’égide du FPLE font exception à cette coutume. Dans les basses terres, c’est l’infibulation qui est pratiquée en général, là où la population est à dominante musulmane. Dans les hautes terres à dominante chrétienne, on a largement recours à l’excision et à la clitoridectomie. L’âge auquel sont pratiquées les MGF varie, de quelques jours après la naissance jusqu’aux environs de la douzième année. Ces variations dépendent essentiellement de l’ethnie concernée. Comme le soulignent un certain nombre de publications sur les pratiques traditionnelles nocives en Érythrée, les femmes qui n’ont pas subi une forme de circoncision sont regardées comme “impures”, étant en proie à des pulsions sexuelles incontrôlables qui les poussent à des déviations et à la prostitution et les rendent souvent “immariables”. Les mutilations génitales sont également considérées comme un rite social de passage qu’on ne peut éviter qu’au prix de l’ostracisme. Pour cette raison, les pouvoirs publics reconnaissent que se borner à interdire cette pratique ne la fera pas disparaître. Le seul moyen efficace de faire changer les choses est d’éduquer la collectivité, ce qui prendra longtemps.

Pour mener une campagne d’éducation efficace contre les MGF, il faut comprendre le raisonnement sur lequel se fondent les attitudes des communautés à leur égard. Parmi les programmes d’éducation communautaire actuellement mis en œuvre en Érythrée il y en a un qui émane de l’UNJEE. La Campagne relative aux mutilations génitales féminine vise à permettre de repérer les contextes sociaux, politiques, environnementaux et économiques qui donnent lieu aux pratiques traditionnelles nocives comme les MGF. Ce programme dure depuis 1994, avec des débats et des films sur les MGF. En 1996, l’UNJEE l’a étendu à la “Formation des personnes impliquées dans la campagne”, avec des participants venus de toutes les régions. Ces derniers reçoivent une formation dans un ensemble de domaines concernés par la campagne, dont les MGF, les moyens d’éviter les maladies sexuellement transmissibles, l’importance de la vaccination, le planning familial et les droits des enfants.

Par ailleurs, du 24 au 27 septembre 1997, l’Érythrée a organisé une consultation régionale sur l’élimination des MGF au cours de laquelle les pouvoirs publics ont renouvelé leur engagement à parvenir. Les pays représentés à cette réunion étaient l’Érythrée, l’Éthiopie, le Kenya, la Tanzanie et Djibouti. Le FPLE , l’UNFE et l’UNJEE y ont échangé leur expérience (acquise depuis l’indépendance pour les deux dernières) de la lutte contre les MGF, les opinions d’importants chefs spirituels y ont été présentées et ont fait l’objet d’un débat. Le Ministère de la justice a recommandé de mettre au point un plan d’action intégrant les secteurs clés comme le Ministère de l’éducation, le Ministère de la santé et les ONG locales, le Ministère de la santé s’étant engagé à coordonner cette entreprise.

D’autres programmes d’éducation communautaire encourageant l’élimination des MGF comportent des sous-programmes généraux relatifs aux femmes gérés par l’UNFE. Cette dernière fait campagne, entre autres, pour la prévention des pratiques traditionnelles nuisibles aux femmes et aux enfants.

La première stratégie destinée éliminer les mutilations génitales féminines a été mise au point au cours d’un atelier qui s’est tenu à Asmara du 11 au 15 octobre 1999. Il avait réuni 50 participants représentant les ministères érythréens, les accoucheuses traditionnelles, les groupes religieux, les associations de jeunes et de femmes (l’UNJEE et l’UNFE), les organismes des Nations Unies, les donateurs bilatéraux et l’Université d’Asmara. L’objectif de cette stratégie est de mettre en œuvre des activités de communication permettant d’éduquer et de motiver les partenaires clés et de cibler des groupes afin de prendre des mesures destinées à éliminer les MGF.

b)Autres pratiques traditionnelles

L’excision de la luette est largement répandue pour prévenir le vomissement et garantir la prise de nourriture. Elle s’accompagne souvent d’une administration de beurre au nouveau-né, qui est censée adoucir le tube digestif de l’enfant mais provoque des infections, des vomissements et de la diarrhée. Lorsque l’enfant met les dents et que ses gencives sont irritées, le point blanc où la dent sort est brûlé avec la pointe d’une aiguille utilisée pour tresser les cheveux. Hormis la douleur, cela cause habituellement des infections et des abcès. Certaines pratiques consistent à faire disparaître l’enflure quand l’enfant souffre d’une infection  des coupures sont fréquemment faites au-dessus des sourcils si l’enfant présente une infection oculaire; on procède à l’ablation des amygdales avec l’extrémité d’un doigt plongé dans la gorge; et la scarification des joues et du front est également censée guérir les maladies.

c)L’alimentation des nourrissons et des enfants

L’EDSE a permis de collecter des données sur l’alimentation de tous les enfants nés au cours des trois ans qui l’ont précédée, et de découvrir que près de 98 % d’entre eux étaient nourris au sein pendant 22 mois en moyenne. Environ 65 % des nourrissons âgés de moins de 4 mois sont nourris exclusivement au sein et moins de 1 % sont complètement sevrés à l’âge de 4 mois. Le Ministère de la santé envisage d’encourager cette pratique positive et de s’opposer à l’introduction dans le pays de substituts du lait maternel. Ces derniers sont tout simplement inabordables pour la quasi-totalité des familles; toutefois, quand elles auront plus de moyens, il faudra lutter contre l’inévitable tendance à se tourner vers des solutions de remplacement de l’allaitement maternel par le biais de règlements du gouvernement et de conseils dispensés par les professionnels des soins de santé expliquant la nécessité de l’allaitement maternel.

Les enfants souffrent d’une mauvaise nutrition. Environ 38 % des enfants érythréens ont une croissance retardée, 15 % sont affaiblis et 44 % présentent une insuffisance pondérale. Près de 50 % souffrent d’anémie (source : le rapport sur la croissance économique transitoire et la lutte contre la pauvreté, 2001-2002).

Selon l’Enquête relative à la santé et à la nutrition, les pratiques concernant le sevrage en Érythrée peuvent avoir, parfois, des effets dommageables pour l’enfant, et expliquer en partie pourquoi la malnutrition culmine au cours de la deuxième année de la vie de l’enfant érythréen. Le sevrage commence manifestement trop tard en Érythrée. L’enquête sur la santé et la nutrition a montré qu’environ 30 % des enfants devaient se passer d’alimentation d’appoint jusqu’à l’âge de 18 mois et au-delà, c’est-à-dire pendant beaucoup plus longtemps que les 4 à 6 mois au-delà desquels il est recommandé de commencer le sevrage. En outre, la plupart des enfants érythréens prennent leur repas avec leur famille, les trois repas typiques par jour (au lieu de 5 ou 6 petits repas, comme il est recommandé), et mangent habituellement la même nourriture que les adultes (au lieu que soient mêlées aux aliments de petites quantités de légumes riches en protéines et que soient ajoutées également de petites quantités de matière grasse et d’huile). L’enquête sur la santé et la nutrition a aussi permis de découvrir que dans 28 % des ménages érythréens, le père de famille mange le premier, enlevant aux femmes et aux enfants les aliments les plus nutritifs. Les femmes et donc les enfants, qui mangent dans la même assiette, n’avalent souvent que du injera (un pain fermenté) et du sel.

Reconnaissant la prévalence de différentes formes de malnutrition ainsi que leurs conséquences, les pouvoirs publics ont mis au point un certain nombre de politiques et de stratégies pour résoudre ces problèmes, et, parmi elles, la Politique nationale relative à l’allaitement maternel et aux pratiques de sevrage adoptée en juillet 1995 et la loi sur la commercialisation des produits alimentaires pour les nourrissons et les enfants, qui est encore à l’état de projet prêt à être adopté (les autres, qui concernent les principaux micronutriments, les troubles dus à la carence en iode et la carence en vitamine A sont présentées ci-après)

Reconnaissant également que l’allaitement maternel est l’une des stratégies les plus importantes pour la survie et la protection de l’enfant, tout en contribuant au bien-être de la mère, le Ministère de la santé a lancé un programme baptisé Initiative relative aux hôpitaux accueillants pour les nouveau-nés sur la lancée de son engagement à encourager l’allaitement maternel et à réglementer l’utilisation des succédanés du lait maternel dans les maternités et dans les collectivités d’une manière générale. À la suite de cela, le Ministère de la santé a redoublé d’efforts, ce qui a entraîné une amélioration concluante des pratiques en matière d’alimentation des nourrissons dans 46 maternités (hôpitaux et dispensaires). Dans ces établissements, les enfants et les femmes sont à l’abri de la publicité et des actions de promotion de préparations pour nourrissons et de biberons. La politique d’allaitement maternel fait également en sorte que les mères et les nourrissons restent ensemble tout le temps et que ces dernières sont libres de commencer l’allaitement dès la naissance et de le poursuivre de manière exclusive, à la demande du nouveau-né pendant leur séjour à l’hôpital ou au dispensaire et, plus tard, à la maison.

Les revenus des ménages ne sont habituellement pas assez élevés pour leur permettre d’acheter des denrées alimentaires nutritives. Les pouvoirs publics constatent qu’il ne peut être remédié à la malnutrition due à des habitudes alimentaires aussi inadéquates que par des politiques à long terme visant à améliorer la situation économique d’ensemble, qui est mauvaise, et à lutter contre la pauvreté des ménages grâce à la mise en œuvre de programmes appropriés générateurs de revenus.

Selon le Ministère de l’agriculture, entre 1992 et 1999 l’apport calorique par adulte et par jour n’était que de 1 500 calories environ, ce qui représente à peu près 56 % des besoins d’un individu.

d)Mariage des enfants

En vertu du projet de Code civil de l’Érythrée, l’âge nubile est de 18 ans. Cela, toutefois, ne s’applique pas si les intéressés sont tous deux âgés de 16 ans révolus et que la femme présente à l’autorité qui doit célébrer le mariage une attestation d’un médecin certifiant qu’elle est enceinte ou qu’elle a déjà donné naissance à un enfant (art. 581 2) du projet de Code civil).

Bien que le mariage des enfants soit interdit par la loi, cette pratique est très répandue dans les zones rurales, où l’on estime que l’âge moyen de nubilité est de 12 à 14 ans. Les jeunes filles âgée de 18 à 20 ans qui ne sont pas encore mariées sont souvent frappées d’opprobre. Le fait que les filles se marient souvent très tôt et sont ainsi enceintes avant l’âge de 20 ans est l’une des nombreuses causes du taux élevé de mortalité liée à la maternité. Cela, associé aux complications résultant des MGF et au manque des soins anténatals adéquats, fait que les très jeunes mères ont toutes les chances de figurer en grand nombre parmi les femmes qui meurent en couches.

e)Mesures préventives

Les autres pratiques nocives pour la santé des enfants ne peuvent être arrêtées qu’à la suite de changements dans l’attitude de la collectivité à l’égard de l’éducation des enfants. En plus des programmes d’éducation communautaire mis en œuvre par l’UNJEE et l’UNFE évoqués plus haut, le Ministère de la santé essaie d’améliorer son service d’information, d’éducation et de communication pour prévenir ces problèmes.

B. Enfants handicapés

C’est le MTPS qui s’occupe des handicapés en Érythrée. L’approche choisie est un programme de réinsertion sociale. Cette approche utilise au maximum les ressources de la communauté et il a été constaté qu’il est plus efficace pour lutter contre les effets pernicieux du handicap, comme l’opprobre, le rejet, etc ; la réinsertion sociale est mise en œuvre grâce aux efforts conjoints des handicapés eux-mêmes, de leurs familles et des collectivités. Les informations divergent concernant l’attitude du public à l’égard des enfants handicapés. D’une part, ils sont objets d’opprobre, surtout les handicapés visuels, auditifs et mentaux, mais, en même temps, ils attirent une forte sympathie de la part de l’ensemble de la population. Cela est dû en partie au fait que la société accepte les nombreux mutilés de guerre en Érythrée, mais cette tolérance ne s’étend pas encore aux autres. La collectivité rend hommage aux mutilés de guerre car ce sont des héros, mais les autres se voient encore “reprocher” leur handicap. Les choses commencent seulement à changer tout doucement, comme l’a souligné un orateur à la première Conférence nationale érythréenne de 1995 sur la réinsertion des handicapés :

Quelque chose de nouveau est en train de se passer en Érythrée. Les réalités de la guerre et le nombre des handicapés – hommes, femmes et enfants – dont elle est responsable ont forcé la collectivité à prendre une conscience aiguë de leur présence parmi nous. Nous considérons que cet héritage fait partie du lourd tribut que nous continuons de payer pour l’indépendance. Avec lui nous est venu le sens de la responsabilité qui nous incombe de résoudre ce problème. Mais quelle considération avons-nous pour les handicaps qui ne sont pas dus à la guerre ? Traditionnellement, tout handicap est regardé avec crainte et avec la conviction qu’il s’agit d’un châtiment divin ou de l’œuvre du démon. Nous ne pouvons pas ne pas nous interroger profondément et collectivement sur notre attitude à l’égard des handicapés, parce que cette attitude est un élément du milieu dans lequel les handicapés sont obligés de vivre.

Une grande partie de l’opprobre qui frappe les enfants handicapés en Érythrée est dû à une absence de compréhension du fondement médical du handicap (on croit, par exemple, couramment, en Érythrée, que l’épilepsie est une manifestation de “la volonté de Dieu” et ne peut pas être traitée par la médecine moderne, en vertu de quoi les familles des enfants épileptiques n’y ont pas recours). De nombreuses familles vont consulter un guérisseur traditionnel pour leur enfant handicapé, plutôt qu’un médecin. Bien que, dans certains cas, la famille puisse y trouver quelque réconfort (et, sans doute, quelques conseils précieux en rapport avec l’état du patient), les guérisseurs traditionnels ne sont, en général, pas susceptibles de donner le moindre avis médical, et encouragent rarement les familles à chercher de l’aide ailleurs.

L’opprobre pousse souvent les parents à surprotéger les enfants handicapés. À la première Conférence nationale de 1995 sur la réinsertion des handicapés en Érythrée, cette situation a été bien décrite par un participant non-voyant qui a déclaré : “Toutes les fois que je demandais à mes parents la permission d’aller jouer dehors, la réponse était non d’un ton de colère et d’insulte. Ils me disaient aussi que c’était la volonté de Dieu. Et Dieu n’aurait pas fait de moi un handicapé s’Il avait voulu que je joue avec les autres. Cette expression m’atteignait profondément et mon moral était très bas.”

La Conférence a constaté l’existence des problèmes dus à l’incompréhension à l’égard des handicapés, au sein de la société, les parents n’encourageant pas les enfants handicapés à participer aux routines quotidiennes, et limitant ou interdisant même complètement les contacts avec le monde extérieur. Cela vient en partie de ce que beaucoup ont l’impression que c’est une honte d’être handicapé, non seulement pour l’individu, mais aussi pour l’ensemble de la famille, parce que cela réduit les perspectives de mariage des frères et sœurs, etc.

Une étude complète sur les handicapés en Érythrée a été effectuée en 2002 par le MTPS qui compte la terminer d’ici à la fin de l’année; d’après les premières constatations, il y en a environ 80 000 dans 4 régions, cette statistique n’incluant pas les régions du nord et du sud de la Mer Rouge.

L’enquête de 2002 révèle que le nombre total de handicapés dans les seules régions de Debug et de Maker était de 34 704, dont 20 292 hommes et 14 412 femmes, le nombre d’enfants étant de 7 253. Les tableaux suivants font apparaître les handicaps par âges et par types dans deux régions :

Tableau 2

Enfants handicapés dans les régions de Maker et de Debug

Région

Répartition par âge

0-9

10-18

19-35

36-55

56-76

76>

Total

Maker

452

1 266

1 910

2 273

1 956

847

8 704

Debug

2 026

3 509

5 355

7 015

5 885

2 210

26 000

Total

2 478

4 775

7 265

9 288

7 841

3 057

34 704

Tableau 3

Types de handicap dans les régions de Maker et de Debug

Région

Type de handicap

Cécité

Surdité

Handicap mental

Handicap physique

Handicap multiple

Difficulté d’apprentissage

Lèpre

Epilepsie

Non indiqué

Total

Maker

2 598

1 296

838

3 298

-

121

21

322

210

8 704

Debug

3 182

3 182

2 324

10 277

1 626

498

390

1 036

1 701

26 000

Total

7 564

4 478

3 162

13 575

1 626

619

411

1 358

1 911

34 704

Étant donné les chiffres indiqués plus haut dans le présent rapport, et concernant les troubles dus à la carence en iode et leur effet connu sur le développement mental de l’enfant, il est invraisemblable qu’il n’y ait pas un groupe “caché” important d’enfants souffrant soit de troubles de l’apprentissage, soit, au pire, de débilité mentale.

Plus de 35 000 handicapés bénéficient du Programme de réinsertion sociale. Entre 1996 et 2000, 3 763 handicapés ont profité directement des mesures de réadaptation du Ministère du travail et de la prévoyance sociale, et 4 338 ont été appareillés.

En 1996 a été lancé le programme de iodation générale du sel dans le cadre duquel l’Érythrée a été en mesure de ioder 80 à 85 pour de son sel. Une enquête effectuée en 1998 a montré qu’environ 97 % des ménages interrogés consomment du sel iodé. Aujourd’hui, tout le sel produit par les salines nationales, soit de 70 à 80 % de la production totale de l’Érythrée, est iodé. L’État a déployé des efforts considérables pour aider les producteurs à le ioder. Tout l’équipement nécessaire pour l’iodation obligatoire et le contrôle de la qualité, ainsi que d’autres matériels, sont déjà fournis aux producteurs de sel privés des alentours d’Assab et de Massawa. La législation visant à interdire la production et l’importation de sel non iodé pour la consommation des hommes et des animaux devrait entrer en vigueur en 2003. Lorsque tout le sel produit en Érythrée sera iodé, l’Érythrée ne se contentera pas de lutter pour éliminer de son territoire les troubles dus à la carence en iode, mais également pour aider les autres pays africains à faire de même.

La complémentation en vitamine A a démarré en décembre 1997 dans le cadre de la deuxième Journée nationale de vaccination pour l’éradication de la polio et a concerné 94 % des moins de 5 ans (UNICEF, 2001).

Le nombre d’enfants handicapés dans les établissements scolaires en 2002, ainsi que les types de handicap, sont présentés dans le tableau ci-dessous.

Tableau 4

Enfants handicapés dans les écoles en 2002

Type de handicap

Garderie

Enseignement primaire

Total général

Garçons

Filles

Total

Garçons

Filles

Total

Cécité

320

240

560

420

610

1 030

1 590

Surdité

400

290

690

850

1 060

1 910

2 600

Handicap mental

90

120

210

160

190

350

560

Handicap physique

568

152

720

402

774

1 176

1 896

Handicap multiple

38

28

66

38

34

72

138

Total

1 416

830

2 246

1 870

2 668

4 538

6 784

Source : MTPS, 2002.

Certains handicaps physiques dont souffrent les enfants sont la conséquence directe de la guerre, alors que, comme le reste de la population, ils étaient exposés à des tirs aveugles, aux bombardements aériens, aux mines terrestres, et même aux viols et aux tortures en prison. Les enfants ont été l’objet de traumatismes psychologiques à la vue de leurs parents tués par les soldats de l’armée d’invasion éthiopienne, des villages rasés et de maints autres actes de violence atroces. Certains enfants ont vu violer leur mère, leurs sœurs, ainsi que d’autres femmes et d’autres filles de leur communauté; d’autres ont été violés eux-mêmes. Tout cela a dû contribuer à accroître le nombre des handicaps psychologiques chez les enfants érythréens. À la fin de la première année de guerre de frontière, en 1999, le MTPS et l’UNICEF ont procédé à une évaluation des besoins psychosociaux des enfants affectés par la guerre (les résultats figurent ci-après dans la section consacrée aux enfants en situation d’urgence, par. 474-393).

Il existe un petit nombre de services pour les handicapés, gérés par l’État et les ONG, en Érythrée. Ils concernent en général tous les groupes d’âge.

Tableau 5

Services destinés aux handicapés (enfants et adultes)

Institution

Lieu

Service

École Abraha Batha pour les non-voyants

Asmara

Internat pour130 élèves. Enseignement général aux enfants non-voyants en braille.

École pour malentendants

Asmara

Enseignement de jour pour environ 70 enfants.

École pour malentendants

Keren

Enseignement en internat pour environ 80 enfants malentendants

Hansenians Eritrean Welfare Organization

Asmara

Soins aux lépreux.

Cheshire Clinic

Asmara

Assistance aux enfants âgés de moins de 15 ans handicapés physiques, y compris polio, difformités congénitales et victimes de brûlures.

Hôpital neuro-psychiatrique St Mary

Asmara

Capacité : 240 lits occupés par des enfants et des adultes dans divers services.

École professionnelle Mai Habar

Mai Habar

Formation professionnelle pour enfants et adultes handicapés physiques en tôlerie et charpenterie.

Ateliers orthopédiques

Asmara : 2 Keren : 1 Assab : 1

Appareillage des patients. Projets d’ouverture d’autres ateliers dans d’autres centres régionaux.

La Cheshire Clinic d’Asmara est le seul dispensaire traitant spécifiquement les enfants frappés de handicaps physiques. Elle est gérée par une organisation non gouvernementale et ne traite que des enfants âgés de moins de 15 ans. Elle couvre la totalité du pays et a récemment fait construire des dortoirs où peuvent dormir les patients qui viennent d’ailleurs que d’Asmara pendant le temps que dure leur traitement; il s’agit, à 75 %, de cas de poliomyélite, à 20 % d’enfants ayant un pied bot, les autres étant atteints de troubles musculaires, de paralysie cérébrale et de traumatismes physiques divers. Ce dispensaire fournit des chaussures orthopédiques, corrige les défauts de constriction avec des attelles plâtrées et des armatures orthopédiques et a un service de physiothérapie. Il traite environ 3 000 cas par an.

Aucune enquête nationale complète n’a été effectuée à ce jour sur les atteintes corporelles provoquées par les mines terrestres et les munitions explosives non explosées en Érythrée. En 1994, environ 50 types différents de mines antipersonnel provenant de 14 pays différents ont été identifiés en Érythrée. Selon les informations communiquées, à la fin de la guerre de frontière avec l’Éthiopie en 2000, par le Projet humanitaire érythréen de déminage, entre 500 000 et 1 million de mines et 3 millions de munitions non explosées se trouvent sur le territoire érythréen. On estime que plus de 5 % de celui-ci pourraient être minés. Environ 40 % des victimes de mines terrestres sont des enfants. L’Érythrée a signé la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction (Traité d’Ottawa) le 27 août 2001. Elle a voté en faveur de toutes les résolutions relatives à cette interdiction, y compris celle de l’Assemblée générale N° 54/54B du 1er décembre 1999. En octobre 2000, l’UNICEF et le Projet humanitaire érythréen de déminage ont lancé un programme de sensibilisation au danger des mines qui vise à réduire et, en fin de compte, à éliminer les décès et les blessures causés par les mines terrestres et les munitions non explosées dans les groupes vulnérables des régions de Gash et de Debug, qui sont les plus affectées. Il apparaît que les blessures causées par les mines antipersonnel sont courantes. Un autre dispensaire pour les adultes et les enfants mutilés de guerre, à la Cheshire Clinic, équipe les patients de membres artificiels. Un certain nombre d’enfants s’y présentent chaque mois. Il y aurait encore beaucoup plus de blessures causées par les mines terrestres sans les campagnes de déminage entreprises par les pouvoirs publics et l’interdiction de pénétrer dans de nombreuses zones à forte densité de mines. Les médias locaux ont également lancé des campagnes de sensibilisation au danger des mines.

Il n’existe aucun établissement spécial pour les enfants présentant des troubles psychologiques. Ceux qui ne peuvent pas être soignés de manière adéquate chez eux sont admis à l’hôpital psychiatrique d’Asmara, où ils sont mêlés aux patients adultes.

La santé mentale est l’un des principaux problèmes auxquels le pays doit faire face, et les enfants et les adolescents sont ceux dont on s’occupe le moins. Il existe peu de possibilités d’accueillir en milieu hospitalier ceux qui ne peuvent être soignés efficacement chez eux. Il n’y a pas de spécialistes de psychiatrie de l’enfant en Érythrée. La plupart des cas relevant de cette spécialité sont traités par le seul médecin psychiatre et les sept infirmières du secteur psychiatrique du seul établissement de ce type du pays, l’Hôpital neuropsychiatrique Ste Mary d’Asmara. Quelques patients sont également soignés, dans l’unité de pédiatrie de l’Hôpital Hiwot de Mekane, par deux pédiatres. Il y a deux psychiatres à l’Université d’Asmara, qui font surtout de l’enseignement, mais peuvent intervenir si l’on le leur demande spécialement ou si l’on leur envoie quelqu’un. La plupart des problèmes psychologiques et psychiatriques de l’enfant constatés dans cet hôpital sont liés à des attaques d’apoplexie associée ou non à des troubles du comportement et d’autres anomalies neurologiques congénitales, des difficultés d’apprentissage (débilité mentale) assorties ou non d’autres problèmes psychiatriques ; très peu d’enfants y présentent des problèmes psychologiques liés à l’enfance. Le fait que les services de santé accueillent un nombre très limité d’enfants ayant des troubles psychologiques ne veut pas dire que cela n’existe pas. Beaucoup de jeunes enfants et d’adolescents qui sont dans ce cas passent dans les services sanitaires sans être repérés en raison du manque de connaissances appropriées et de compétences du personnel. Un autre aspect des choses est la quasi-incapacité de la collectivité à reconnaître les problèmes psychologiques liés à l’enfance. Les enfants et les adolescents qui en souffrent sont considérés comme mauvais, ou bien la cause en est imputée aux démons ou à d’autres agents des croyances traditionnelles. Tout cela est objet d’opprobre, et il en résulte que les patients sont cachés ou bien qu’il est fait appel à des méthodes de traitement traditionnelles.

Dans les pays en développement comme l’Érythrée, les principales causes d’apoplexie et de difficultés d’apprentissage (débilité mentale) peuvent être prévenues grâce à des soins anténatals appropriés et à une amélioration des pratiques d’accouchement. L’iodation du sel et l’utilisation qu’en feront les femmes enceintes contribueront de manière importante à la prévention de la débilité mentale liée à l’hypothyroïdie. La formation des parents en matière d’éducation des enfants et une amélioration de la communication entre parents et enfants ou adolescents peuvent également permettre d’éviter beaucoup d’autres problèmes psychologiques.

En 1999, une commission composée de représentants d’organisations gouvernementales et non gouvernementales a élaboré un projet de politique nationale en faveur des handicapés en Érythrée. Elle présentait des recommandations et des stratégies pour la mise en œuvre et la surveillance de programmes relatifs aux handicapés.

Les objectifs du projet de Politique nationale en faveur des handicapés en Érythrée sont les suivants :

Lutter contre les tendances liées aux attitudes et aux coutumes traditionnelles arriérées qui empêchent les handicapés de participer activement à la vie sociale;

Créer les conditions nécessaires au respect des droits de l’homme et au développement de la confiance en soi des handicapés de manière à ce qu’il puissent participer activement à toutes les initiatives de développement ;

Faire en sorte que les handicapés aient un rôle à jouer dans le domaine socioculturel en améliorant leur potentiel physique, psychologique, éducatif et affectif ou leur image dans la société;

Mettre en place des mécanismes de coordination pour la prévention des maladies et des accidents qui sont causes de handicaps ; et

Faire en sorte que les handicapés bénéficient de l’égalité des chances en matière d’éducation et de formation.

Il est traité de l’éducation des enfants handicapés dans une autre partie du présent rapport (voir par. 354-361 ci-dessous).

C. Santé et services médicaux

Services de santé

Depuis l’indépendance, le Ministère de la santé a beaucoup restauré et beaucoup développé les services de santé. Voici les progrès qui ont été réalisés en matière de services publics : en 1999, environ 70 % des citoyens vivaient à moins de 10 kilomètres d’un service de santé, contre 10 % au moment de l’indépendance, en 1991. Le nombre des professionnels de la santé a augmenté de près de 70 %, passant de 2 550 en 1993 à 4 240 en 1999, et celui des médecins a plus que doublé, passant de 58 à 145 (2001).

Afin d’atteindre l’objectif consistant à dispenser des soins de santé primaires dans les zones rurales, le Ministère de la santé s’est consacré en priorité à établir des services de soins de santé primaires dans les zones où il était impossible d’y avoir accès auparavant. En 2000, il y avait 23 hôpitaux, 52 centres de santé, 170 postes sanitaires et 55 cliniques (dont 26 établissements privées).

Depuis la libération, le Ministère de la santé a fait construire 7 nouveaux hôpitaux, 48 centres de santé et 98 postes sanitaires, ce qui représente une augmentation totale de 44 %, 1 200 % et 136 %, respectivement, par rapport au nombre de services de santé qui existaient avant l’indépendance. Cependant, de nombreux services manquent de personnel formé, d’électricité, d’eau et de mobilier, ce qui fait obstacle à un apport adéquat des soins de santé.

Le développement des ressources humaines est l’une des priorités du Ministère de la santé parce qu’il est impossible d’envisager des services de santé de qualité sans un personnel qualifié.

256.Il existe une formation avant l’emploi, au niveau du service de base, au niveau supérieur, une formation à court terme, à long terme et une formation continue pour les diverses catégories de personnel de santé. Entre 1992 et 2000, 1 672 professionnels de la santé ont terminé leurs études et obtenu un diplôme ou un certificat de l’École de technologie des soins infirmiers et de la santé et de l’Université d’Asmara. ; il y a eu 542 inscriptions de plus à la fin de 2000. Les programmes de formation du Ministère de la santé comprennent celle des infirmières, des assistants sanitaires, des techniciens de laboratoire, des kinésithérapeutes assistants, des techniciens en pharmacie, des techniciens de radiographie et des dentistes.

257.En 2000, on comptait un médecin pour 13 000 personnes, une infirmière pour 2 800 personnes et une infirmière adjointe pour 1 700 personnes. Le plan décennal relatif au secteur de la santé vise à ce qu’il y ait, en 2005 : un médecin pour 10 000 personnes, un dentiste pour 100 000 personnes, une infirmière pour 2 000 personnes et un assistant sanitaire pour 1 500 personnes.

258.Le nombre des services de santé devrait être, en 2005, de 42 hôpitaux, 100 centres de santé, 400 postes sanitaires. En conséquence, l’étendue desdits services devrait passer de 70 % en 2001 à 80 % en 2005. Cela suppose la construction d’établissements de soins de santé primaires, d’hôpitaux, le développement de dispensaires itinérants et de services de santé communautaires avec, comme personnel, des agents de santé communautaires.

Directives en matière de politique de santé

Politique sectorielle

259.Le but de la politique de santé, en Érythrée, est d’améliorer la santé et le bien-être de tous les Érythréens, en particulier de ceux qui sont le plus à risque, et d’encourager le système de santé à répondre mieux aux besoins du public. Les objectifs spécifiques de la politique de santé sont les suivants :

Faire baisser le taux de mortalité infantile ;

Accroître l’espérance de vie ;

Assurer l’accès aux services de santé ;

En assurer l’autonomie en matière de personnel grâce au développement des ressources humaines; et

Sensibiliser les pouvoirs publics et les collectivités aux problèmes de la santé.

260.Dans son exposé de macro-politique (1994), le gouvernement a esquissé les objectifs généraux suivants :

-Réduire et finir par éliminer la mortalité due aux maladies facilement contrôlables ; et

-Sensibiliser la population aux règles d’une bonne hygiène afin d’améliorer la productivité des actifs.

261.La politique de santé de l’Érythrée s’attachera  :

-À rendre accessibles les services de santé de base aux populations rurales comme aux populations urbaines ;

-À donner la priorité aux programmes de soins de santé primaires et de vaccination;

-À prêter une attention particulière aux principaux risques pour la santé afin de les limiter ;

-À faire en sorte que le secteur privé participe activement aux soins de santé selon les règles, les règlements et les modalités opérationnelles définis par les pouvoirs publics ;

-À encourager les collectivités et les bénéficiaires à participer au financement des services de santé ; et

-À mettre en place des systèmes nationaux d’assurance maladie et à promouvoir la diffusion de l’information relative aux règles d’hygiène.

Éducation et promotion en matière de santé (EPS)

262.Le Ministère de la santé considère l’éducation et la promotion en matière de santé (EPS) comme un outil stratégique important pour son programme de soins de santé primaires. Les services de santé sont mal équipés et doivent faire face à un grave manque de personnel qualifié. En outre, de nombreux établissements sanitaires ont été détruits et les installations pillées par les soldats de l’armée d’invasion éthiopienne pendant la guerre de 1998-2000, en conséquence de quoi la population souffre d’un certain nombre de problèmes de santé qui pourraient être prévenus. L’état de santé des femmes et des enfants est particulièrement critique. Cependant, beaucoup des maladies qui contribuent à faire monter les taux de mortalité et de morbidité peuvent être prévenues.

263.La prévention et la promotion sanitaires auprès des groupes les plus vulnérables – les enfants et les femmes - sont les éléments fondamentaux des stratégies relatives aux soins de santé primaires.

264.Priorité est donnée aux principaux problèmes sanitaires du pays, comme la malaria, la diarrhée, l’infection respiratoire aiguë (IRA), la tuberculose, le VIH/SIDA, les situations d’urgence en matière d’obstétrique, les maladies pouvant être prévenues par la vaccination et la malnutrition. Ces problèmes sont considérés comme prioritaires parce qu’ils contribuent de manière importante à la morbidité et à la mortalité et parce que l’éducation sanitaire peut jouer, pour y remédier, un rôle central.

265.Au niveau national, les objectifs et les stratégies de la politique d’EPS ont été clairement établis. Ses buts essentiels sont de définir le rôle de l’EPS dans le plan national de santé, de prévoir des directives pour le choix des priorités d’EPS, de traiter les problèmes liés à la langue, à la décentralisation, à l’intégration des services de santé et à la coordination avec les autres donateurs.

266.L’importance de la participation des notables de la communauté, des organes d’administration locale, des associations féminines, des associations de jeunes et d’étudiants aux campagnes d’EPS est dûment reconnue.

267.L’activité d’EPS au niveau des familles est limitée en matière de programmes anténatals et postnatals, sauf en ce qui concerne la promotion de l’allaitement maternel. Les groupes d’appui communautaires jouent un rôle important pour la promotion de l’Initiative en faveur d’un hôpital accueillant pour les nourrissons dans l’ensemble du pays. Les problèmes fréquemment évoqués par les hôpitaux, les centres de santé et les postes sanitaires sont le manque de matériel pédagogique et les problèmes de langue qui rendent difficile la communication avec les locaux.

268.Récemment, quelques équipes régionales de gestion du Ministère de la santé ont été créées pour mettre au point des matériels d’EPS après avoir reçu une formation à cette fin et en matière de recherche didactique.

269.Afin de promouvoir la santé pour tous, les stratégies suivantes seront poursuivies, dans le cadre du programme d’EPS, concernant les activités futures :

a)Traitement des problèmes de santé prioritaires;

b)Mettre l’accent sur le changement des comportements;

c)Utilisation de différentes stratégies pour faire passer les messages afin d’appuyer les services intégrés ;

d)Décentralisation de l’EPS;

e)Participation des collectivités; et

f)Toucher différents groupes linguistiques et culturels.

Directives concernant la politique relative à la santé de l’enfant

270.L’approche de la gestion de la santé de l’enfant en Érythrée consiste à s’intéresser aux principales causes de mortalité et de morbidité infantiles et juvéniles. Afin de réduire la mortalité, le programme insiste sur une approche intégrée de la gestion des nourrissons et des enfants, orientée vers la prévention, à la fois, de toutes les causes les plus importantes de mortalité et de morbidité.

271.Le programme relatif à la santé de l’enfant permet d’affronter les problèmes particuliers des enfants handicapés, des enfants d’âge scolaire et des adolescents.

272.Les objectifs des directives en ce domaine tiennent compte des priorités ci-après :

a)Le programme relatif à la santé de l’enfant sera axé sur la réduction de la morbidité des moins de 5 ans concernant les infections respiratoires aiguës (IRA), la malaria, la diarrhée, la rougeole et la malnutrition ;

b)Un comité de coordination des soins de santé primaires mettra au point une approche de la prévention et de la gestion des maladies infantiles. Les membres des professions sanitaires, à tous les niveaux, recevront une formation leur permettant de faire face aux principales causes à la fois de morbidité et de mortalité des moins de 5 ans. Les stratégies de prévention, elles aussi, devront concerner simultanément toutes les causes principales;

c)Un programme intégré relatif à la santé de l’enfant sera mis au point et coordonné avec la participation de toutes les divisions concernées du Ministère de la santé;

d)Le programme relatif à la santé de l’enfant devra répondre aux besoins des enfants handicapés ;

e)Le programme relatif à la santé de l’enfant devra répondre aux besoins des enfants d’âge scolaire et des adolescents ;

f)Le programme relatif à la santé de l’enfant visera à optimiser les mesures ci-dessous destinées à améliorer les prestations des hôpitaux et des collectivités :

Accroissement de la proportion du personnel ayant reçu une formation en matière de gestion intégrée des enfants;

Accroissement de la proportion du personnel faisant l’objet d’une surveillance intégrée régulière relative à la santé de l’enfant;

Accroissement de la proportion des membres des professions médicales capables d’effectuer des diagnostics et de traiter les enfants malades correctement ;

Accroissement de la proportion de pourvoyeurs de soins et de membres des familles capables d’administrer correctement, par voie orale, une solution recommandée préparée à la maison pour lutter contre la déshydratation à un enfant souffrant de diarrhée ;

Accroissement de la proportion de pourvoyeurs de soins et de membres des familles sachant soigner correctement un enfant malade à la maison;

Accroissement de la proportion de pourvoyeurs de soins et de membres des familles sachant reconnaître les signes d’une affection qui commande le recours à des soins extérieurs quand l’enfant est malade ;

Accroissement de la proportion de pourvoyeurs de soins et de membres des familles comprenant les comportements simples à avoir, et les faisant leurs, pour prévenir les maladies de l’enfant et lui assurer une bonne santé ; et

Accroissement de la proportion de pourvoyeurs de soins et de membres des familles ayant un enfant handicapé et possédant une connaissance des soins de santé primaires de base.

273.Le programme relatif à la santé de l’enfant est coordonné par l’Unité chargée de la santé de la famille et de la communauté, de la Division des soins de santé primaires. L’élaboration et la mise en œuvre d’un tel programme supposent une collaboration étroite entre les divisions du Ministère de la santé et une participation conjointe à toutes les activités de développement et de formation, en insistant particulièrement sur l’amélioration des services au niveau de la collectivité. Le développement et la gestion des programmes se font selon une approche participative de coopération.

La gestion de toutes les causes principales de la mortalité infantile et juvénile est effectuée selon une approche type par groupe de maladies. Les directives relatives à la gestion intégrée par groupe de maladies des IRA, de la malaria, de la diarrhée, de la rougeole et de la malnutrition seront mises au point et testées dans le cadre du programme relatif à la santé de l’enfant. L’approche de cette gestion par groupe de maladies reposera sur les principes suivants :

a)L’utilisation d’algorithmes cliniques types pour évaluer, classer, traiter et suivre les nourrissons et les enfants, et pour conseiller les personnes qui s’occupent d’eux sur la manière dont il convient de s’y prendre à la maison;

b)L’utilisation d’algorithmes cliniques types pour gérer et traiter les nourrissons et les enfants dans les services de santé de base. La confirmation des diagnostics par les laboratoires ne sera exigée que là où elle sera possible et financièrement abordable ; et

c)Tous les enfants malades répondant à des critères cliniques définis seront envoyés pour traitement au niveau supérieur du système de protection médico-sanitaire. Le Ministère de la santé s’engagera à assurer le transfert des enfants malades ne pouvant pas être pris en charge de manière adéquate au premier niveau.

Le Projet de développement de la petite enfance comporte les objectifs suivants relatifs à la santé de la mère et de l’enfant, sous l’égide du Ministère de la santé :

Améliorer, grâce à l’éducation, la qualité des soins dispensés aux enfants âgés de moins de 5 ans dans les services de santé et à la maison ;

Renforcer le système de santé de manière à pouvoir pratiquer une gestion intégrée des maladies infantiles;

Permettre, grâce à la formation et à la participation, aux collectivités et aux familles d’avoir recours à des pratiques améliorées concernant la santé et le développement de l’enfant ; et

Sensibiliser le public grâce à des campagnes d’information, d’éducation et de communication, afin d’améliorer les réactions des parents, des pourvoyeurs de soins et des collectivités.

Le Programme relatif à la nutrition de la mère et de l’enfant et à la sécurité alimentaire, placé sous la responsabilité des ministères de la santé, de l’agriculture et de la pêche, vise :

À donner aux collectivités et aux familles ciblées les moyens de répondre aux besoins de l’enfant grâce à une formation appropriée ;

À réduire le carence micro et macro-nutritionnelle chez les moins de 5 ans en permettant aux membres des professions médicales d’acquérir les compétences nécessaires;

À améliorer la sécurité alimentaire, surtout pour les enfants des populations ciblées, grâce au développement de l’agriculture; et

À renforcer la capacité des ministères à gérer les programmes relatifs à la nutrition.

D. La sécurité sociale et les services de garde d’enfants

La sécurité sociale

Il n’existe pas de système complet de sécurité sociale en Érythrée, mais un certain nombre de prestations sont assurées, visant à soulager les difficultés des personnes les plus nécessiteuses. Cet appui concerne les familles et permet ainsi de venir directement en aide aux enfants, quand il y en a, dans le cadre de la structure familiale. Il y a, en Érythrée, des plans à long terme pour mettre en place un système de sécurité sociale. À cette fin, le MTPS effectue une étude, en collaboration avec les autorités concernées, qui devrait donner lieu à un rapport final au début de 2003. Cette étude est basée sur la déclaration relative au travail N° 1/18/2001, aux termes de laquelle le Ministère a le pouvoir d’émettre des règlements concernant la sécurité

sociale (article 84). La macro-politique du gouvernement (1994) a un objectif : celui de mettre en place, étape par étape, un régime de sécurité sociale au rythme du développement économique du pays. Les politiques conçues pour arriver à cette fin prévoient les mesures suivantes :

a)Des stratégies de développement visant à répondre aux besoins de base de la population seront élaborées et mises en œuvre ;

Les régimes traditionnels de sécurité sociale et les régimes communautaires fondés sur l’effort collectif seront encouragés ;

c)Des politiques monétaires appropriées seront mises en place pour stimuler l’épargne privée ;

d)Des mesures de protection de l’emploi seront appliquées grâce à des programmes de travaux publics à coefficient élevé de main-d’œuvre dans des zones et à des périodes où sévit une crise économique très grave ;

e)Les chômeurs et les personnes en sous-emploi auront accès aux ressources de production (terre, eau, bétail, crédit etc.) ;

f)Des régimes de retraite seront institués pour les salariés du secteur public;

g)Les victimes de la guerre et les groupes vulnérables bénéficieront des soins et de l’attention qui conviennent ;

h)Les enfants, les jeunes, les personnes âgées et les femmes bénéficieront d’une protection juridique contre l’exploitation économique, sexuelle et toutes les autres formes d’exploitation; et

i)La capacité nationale de prévention des catastrophes naturelles et de planification préalable sera progressivement développée et renforcée.

Éducation familiale et garde d’enfants

Dans le cadre de la macro-politique du gouvernement (1994), et à propos de la problématique de l’égalité des sexes, un certain nombre d’aspects sont évoqués en rapport avec les services de garde d’enfants, qui font prévoir :

que des techniques appropriées faisant gagner du temps seront introduites pour alléger les besognes ménagères des femmes et les autres activités qui leur incombent (eau, bois de chauffage, centres de garde d’enfants, etc.) ; et

que les services de garde d’enfants seront améliorés et développés.

L’enseignement préscolaire, qui vise à préparer les enfants à l’enseignement formel, est traité dans le chapitre VII du présent rapport, sous le titre “Éducation préscolaire”. Les questions connexes de l’éducation familiale et de la garde d’enfant sont traitées ici, mais ces deux chapitres doivent être considérés comme étant complémentaires.

Les plans à moyen et à long terme concernant la garde d’enfant et les services aux familles en Érythrée sont d’envergure. La garde d’enfant ne sera pas traitée comme une simple surveillance pour aider les femmes des zones urbaines qui travaillent. Les pouvoirs publics considèrent cela comme un aspect important de l’ensemble de l’éducation de la famille et de la petite enfance. Les services de garde d’enfants viseront avant tout à dispenser une éducation familiale de type communautaire ; c’est-à-dire à sensibiliser les parents et l’ensemble de la communauté aux besoins des jeunes enfants en matière de santé, de nutrition, de développement et d’éducation. Dans un pays où il existe une quasi-inconscience inacceptable des rapports entre, par exemple, la santé et les pratiques d’hygiène et d’assainissement, l’éducation des familles prend une importance vitale. L’objectif n’est pas seulement de pourvoir à la garde et à l’éducation des enfants, mais aussi d’éduquer des familles entières par l’intermédiaire de leurs enfants. Le Ministère de la santé sensibilise le public à ces questions.

Le Ministère de l’éducation vise à créer plus de centres de documentation relatifs à l’éducation de la petite enfance (décrits en détail dans la section ci-dessous consacrée à l’éducation de la petite enfance, par. 310-315).

Un certain nombre d’autres ministères dispensent une forme d’éducation familiale. Le Ministère de l’agriculture apporte une éducation familiale de base dans le cadre de son programme d’économie domestique, qui vise à améliorer les conditions de vie des familles d’agriculteurs. Les femmes peuvent assister à des cours, donnés dans les villages de toutes les régions, sur l’alimentation et la nutrition, et sur la protection maternelle et infantile. Des spécialistes sont nommés pour les assurer dans toutes les zones rurales, et, en 2002, 45 d’entre eux ont organisé des cours d’introduction à l’intention des femmes dans des zones reculées du pays. Des cours supplémentaires ont également été organisés sur les sujets suivants :

a)Hygiène et assainissement de l’environnement;

b)Amélioration et gestion du foyer;

c)Vêtements et textiles;

d)Production horticole,

production de volailles,

apiculture, et

artisanat.

Tous les cours ont lieu avec la participation des femmes, et beaucoup comportent des projets pratiques dont profitent la collectivité, comme la construction et l’utilisation des fourneaux solaires.

Un défi de plus auquel doit faire face l’Érythrée est celui de savoir comment parvenir au mieux à pourvoir à une éducation familiale appropriée (et peut-être à la garde des enfants) de sa population nomade, et – chose encore plus pressante – de ses enfants réfugiés. Il faut mettre au point un système d’enseignement familial et préscolaire qui convienne à la situation de ces deux groupes.

Au point où nous en sommes, il n’existe pratiquement aucun établissement spécialisé de garde d’enfants à caractère non éducatif en Érythrée. Au moment où l’on insiste de plus en plus sur la participation des femmes à des programmes de formation, en particulier à des activités génératrices de revenus, le besoin de services et d’établissements de garde d’enfants devient patent. Dans la société traditionnelle, cela était bien assuré par les membres de la famille élargie, mais cela devient de plus en plus difficile, surtout pour les mères célibataires qui vivent dans les zones urbaines.

C’est peut-être l’UNFE qui est l’organisation la plus active en matière de services de garde d’enfants. Au nom de ses membres, en particulier des anciennes combattantes, elle pousse à la création de centres de puériculture. Cette organisation dispense des services de garde d’enfants en conjonction avec d’autres programmes pour que les femmes puisse être libres de profiter des programmes éducatifs ou des programmes générateurs de revenus qui leur sont offerts. Des garderies ont été créées en quatre endroits en conjonction avec des programmes ruraux de crédit destinés aux femmes, et l’UNFE s’efforce de faire en sorte que la garde d’enfants soit assurée dans tous les secteurs où elle met en œuvre des programmes d’alphabétisation pour les femmes, pour permettre aux femmes d’y participer activement et pleinement.

Le Ministère de l’éducation pourvoit, de manière limitée, à la garde simple d’enfants dans le cadre de son Projet d’alphabétisation des femmes. L’efficacité de ce dernier est actuellement en cours d’évaluation, et la garde d’enfant est un aspect dont cette évaluation doit tenir compte pour voir dans quelle mesure la participation des femmes en dépend.

Il n’existe pratiquement aucun service de garde d’enfants sur le lieu de travail en Érythrée, pour le moment, mis à part ceux qui fonctionnent dans le cadre des programmes ruraux de crédit pour les femmes. L’UNFE mettra vraisemblablement sur pied des services de ce type dans le cadre d’autres projets à venir, comme les opérations relatives aux moulins à farine.

E. Niveau de vie

Afin d’élever le niveau de vie de l’enfant érythréen moyen, il ne faut pas s’axer sur des programmes d’aide alimentaire à court terme, lesquels ont caractérisé, inévitablement, une bonne partie du début de la période qui a suivi la libération. Le développement économique et la réduction de la pauvreté font partie des objectifs centraux du programme national de développement depuis l’indépendance. Ces objectifs figurent dans trois dispositions clés de la Constitution :

L’État doit s’efforcer d’opérer un développement équilibré et durable dans l’ensemble du pays et de mettre en œuvre tous les moyens disponibles pour permettre à tous les citoyens d’améliorer leurs moyens de subsistance de manière durable, grâce à leur participation (art. 8, par. 2);

Tout citoyen a droit à l’égalité d’accès aux services sociaux financés par le secteur public. L’État doit s’efforcer, dans les limites de ses ressources, de permettre à tous les citoyens d’avoir accès aux services sanitaires, éducatifs, culturels et aux autres services sociaux (art. 21, par. 2) ; et

L’État assure, dans les limites des moyens disponibles, la protection sociale de tous les citoyens, et en particulier de ceux qui sont défavorisés (art. 21, par. 2).

Le gouvernement poursuit son effort de développement économique et sa lutte contre la pauvreté dans le cadre d’une stratégie qui s’inscrivait initialement dans sa macro-politique et puis, plus récemment, dans le Cadre et le programme national de politique économique, présenté en 1998. Depuis la mise au point de la macro-politique en 1994, une série d’initiatives à caractère économique et structurel ont été prises, par exemple :

Un régime foncier a été instauré, aux termes duquel l’État est propriétaire des terres et donne à tous les citoyens le droit d’y accéder;

Les lois fiscales du régime précédent ont été revues et le contrôle des prix a été aboli de manière à encourager la concurrence et à créer un cadre fiscal favorable aux investissements locaux et internationaux ;

Les logements et les biens qui avaient été nationalisés ont été rendus à leurs propriétaires; et

La privatisation des industries nationalisées a commencé.

Le gouvernement s’efforce d’élever le niveau des revenus grâce à un certain nombre d’initiatives et à sa politique économique générale. Il constate que le potentiel de production rapide de revenus est limité, cependant, un certain nombre d’initiatives comme le développement rural, les programmes générateurs de revenus modestes et les programmes d’alphabétisation visent toutes à faire en sorte que la communauté acquière son autonomie économique.

Pour une bonne partie de la population, toutefois, les initiatives à long terme viendront trop tard. Les Érythréens souffrent d’un manque de sécurité alimentaire pour les ménages qui entraîne la faim et la malnutrition généralisées. Environ 80 % de la population sont actuellement dépendants de l’agriculture comme moyen de subsistance, mais la productivité est très faible. L’Érythrée est très loin d’être autonome en matière de production alimentaire. Même les bonnes années, le pays ne peut répondre qu’à environ 70 %, seulement, de ses besoins en denrées alimentaires. Les mauvaises années, cette proportion peut être plus proche de 15 %. Les principaux obstacles à la sécurité alimentaire en Érythrée sont les pluies faibles et irrégulières, la dégradation de l’environnement, avec l’érosion et la fertilité réduite du sol, le manque de main-d’œuvre qualifiée, les faibles investissements en capital, l’infrastructure agricole insuffisante et la guerre.

Les programmes, qui réduisent les besoins immédiats d’aide au revenu, seront donc nécessaires pendant quelque temps. Avant le conflit avec l’Éthiopie, d’importants progrès avaient été réalisés en matière de croissance et d’amélioration de l’accès aux services, ainsi que de possibilités de profiter des chances qui s’offraient. Bien que ces progrès aient été interrompus, le gouvernement reste fidèle à son engagement concernant sa stratégie de développement.

Étant donné les divers obstacles de fond, l’amélioration de la sécurité alimentaire des ménages, du niveau des revenus et, par conséquent, du niveau de vie des enfants, sera lente et prendra longtemps. Le niveau de vie dépend, bien entendu, de beaucoup d’autres facteurs. Le gouvernement souhaite, en particulier, concentrer ses efforts sur l’amélioration de la condition de la femme. De nombreuses femmes ont fait partie du FPLE pendant la lutte, au point qu’elles représentaient 30 % de ses effectifs. Dans un certain nombre de domaines, y compris celui des programmes de formation, le FPLE a pris fait et cause pour elles. Comme il a été dit ailleurs, il a également mis en œuvre de nombreuses réformes au profit des femmes dans les zones libérées. Toutefois, les pratiques culturelles, qui vont dans le sens de l’inégalité des sexes, sont bien ancrées. Il se révèle difficile de faire admettre le principe de l’égalité des femmes par la plus grande partie de la collectivité, qui n’était pas combattante. Les pouvoirs publics concentrent leurs efforts sur des programmes visant à l’éducation des femmes, à leur permettre d’avoir accès à des soins de santé et de générer leurs propres revenus en leur offrant, par ailleurs, des possibilités de trouver des emplois mieux rémunérés. Le gouvernement s’efforce de donner l’exemple : il y a 22 femmes à l’Assemblée nationale et trois femmes ministres d’État. Selon la loi, il devra y avoir 30 % de femmes dans l’assemblée législative.

Il sera question de l’éducation plus bas (voir chap. VIII), néanmoins, cela vaut la peine de mentionner l’alphabétisation des femmes en rapport avec le niveau de vie. Il y a tellement de raisons de constater que le bien-être des enfants est lié au niveau d’éducation de la mère que l’alphabétisation revêt une importance capitale. Comme il est indiqué dans l’EDSE, environ 40 % des jeunes filles âgées de 15 à 19 ans n’ont reçu aucune éducation, cette proportion étant de 85 % en ce qui concerne les femmes âgées de 40 à 44 ans, et plus de 97 % celles qui ont entre 60 et 64 ans. Dans l’ensemble, le taux d’alphabétisation des femmes âgée de plus de 15 ans est d’environ 10 %. L’alphabétisation des femmes est donc devenue une priorité. L’État et les ONG locales organisent des cours et les médias apportent leur contribution à l’éducation de base par le biais de la station “radio éducation”. Les programmes diffusés par les médias subissent un handicap dû au fait que la plupart des gens n’y ont guère accès, quel qu’en soit le type. L’EDSE a montré que 37 %, seulement, des femmes rurales avaient accès à la radio, 1,7 % à la télévision et que 6 % étaient en mesure de lire un journal une fois par semaine.

VII. LES LOISIRS, LES ACTIVITÉS ÉDUCATIVES ET CULTURELLES

A. Les buts de l’éducation

La stratégie de développement national du gouvernement, telle qu’elle est présentée dans son document de macro-politique de 1994, prévoit que le nouvel État d’Érythrée se dote des structures institutionnelles nécessaires et de la main d’œuvre qualifiée pour pouvoir fonctionner bien et efficacement. L’éducation est reconnue comme étant un droit inaliénable de l’enfant :  “Tout citoyen a droit à l’égalité d’accès aux services sociaux financés par le secteur public. L’État doit s’efforcer, dans les limites de ses ressources, de permettre à tous les citoyens d’avoir accès aux services sanitaires, éducatifs, culturels et aux autres services sociaux” (art. 21/1 de la Constitution de l’Érythrée).

La politique de l’éducation a comme objectif d’établir l’égalité des chances pour tous les enfants d’âge scolaire concernant l’accès, dans l’équité, à l’éducation adéquate et la possibilité de poursuivre cette éducation. Elle donne la priorité à la plupart des groupes et des régions vulnérables et envisage les conséquences intellectuelles, physiques, sociales et affectives.

Les objectifs spécifiques de la politique d’éducation sont les suivants :

Faire passer le pourcentage d’accès des enfants à l’école primaire de 36 % en 1991 à 65 % en 2006; améliorer la qualité et l’efficacité à tous les niveaux ;

Appuyer les initiatives relatives à l’éducation préscolaire; améliorer l’accès aux programmes

Faire baisser le taux d’analphabétisme de 40 % d’ici à 2003; et

Améliorer la capacité du Ministère à analyser les options, à mettre au point des plans stratégiques et des systèmes d’information, et améliorer aussi la gestion sectorielle à tous les niveaux.

Le gouvernement envisage de mettre au point et d’exécuter son Plan d’action concernant l’éducation pour tous en 2001. Il envisage aussi de continuer à décentraliser les responsabilités en matière d’administration scolaire au niveau régional, pour permettre au Ministère de l’éducation de se consacrer à la planification et à la coordination, à l’établissement des normes nationales, à l’examen et à la fourniture des manuels, au contrôle et à l’évaluation de la qualité, et à la mise en place de normes pour les enseignants. Il faudra, pour cela, renforcer les structures institutionnelles au niveau régional pour ce qui est de la planification et de la gestion.

Les objectifs généraux du système d’enseignement, tels qu’ils apparaissent dans l’exposé de macro-politique du gouvernement, sont donc les suivants :

a)Produire une population ayant les compétences, les connaissances et la culture nécessaires dans le cadre d’une économie autonome et moderne;

b)Donner à la population le sens de ses responsabilités envers elle-même et la motiver pour lutter contre la pauvreté, la maladie et toutes les causes connexes d’arriération et d’ignorance ; et

c)Mettre l’instruction élémentaire à la disposition de tous.

Ces objectifs sont compatibles avec l’article 29 du Pacte et ils visent à créer une nation unie, pacifique et démocratique en produisant des femmes et des hommes :

qui ont les diverses qualifications requises et la ferme volonté de travailler ensemble pour reconstruire les structures économiques, environnementales et sociales ;

qui aiment et qui respectent la nation et toutes les personnes qui la constituent, indépendamment du sexe, de l’ethnie, de l’âge, de la religion et de la profession. Il s’agit, en l’occurrence, de produire des citoyens totalement alphabètes dans leur langue maternelle, sachant et désirant préserver les meilleurs aspects de leur culture tout en en modifiant les aspects négatifs, et mettant tout en œuvre pour instaurer l’égalité des sexes et des ethnies ;

qui respectent les institutions démocratiques et qui participent pleinement et efficacement au processus démocratique, développant et défendant les droits fondamentaux des enfants, des femmes et des hommes ;

qui adhèrent aux principes éthiques les plus élevés et se laissent guider par eux ;

qui ont une profonde connaissance et un respect non moins profond de l’environnement, et qui comprennent la nécessité de le restaurer et de le protéger ;

qui sont capables d’utiliser avec sagesse les procédés scientifiques et les progrès de la science afin de tendre vers l’autosuffisance alimentaire et le développement d’un secteur des services et d’un secteur industriel modernes, fondés sur les principes de la durabilité de l’environnement ; et

qui ont la possibilité de développer pleinement tous les aspects de leur potentiel de créativité.

Étant donné la nécessité de modifier très considérablement l’ensemble du système d’enseignement à la suite de la libération, il a fallu mettre au point des politiques pour chaque sous-secteur. Bien que cette mise au point se poursuive dans un ou deux secteurs, les grandes décisions ont été prises dans l’ensemble. Il faut néanmoins souligner le fait que, comme le système d’enseignement de l’Érythrée est nouveau et dynamique, cette politique, dans les principaux secteurs, doit être soumise à un contrôle continu et, si nécessaire, modifiée. Voici les principales stratégies mises en œuvre depuis 1991 :

L’instruction élémentaire pour tous d’une durée allant jusqu’à sept ans sera rendue progressivement accessible à tous les enfants. Tous les enfants auront accès à un enseignement primaire de qualité et pourront aller jusqu’au bout, afin que, d’ici à 2015 l’enseignement scolaire de base soit assuré à tous, 80 % des participants complétant leur cycle d’études primaires traditionnelles. L’investissement global dans l’enseignement scolaire de base sera axé essentiellement sur les filles et les enfants nomades défavorisés (objectifs de l’Éducation pour tous, 2001);

Il pourra être répondu aux besoins en main-d’œuvre qualifiée du secteur public comme du secteur privé grâce à l’accroissement régulier du nombre des inscriptions dans les établissements secondaires, techniques et professionnels ;

L’éducation permanente dans des filières scolaires et extrascolaires sera encouragée pour permettre d’atteindre des taux d’alphabétisation plus élevés et d’élever également le niveau des qualifications;

L’enseignement du troisième degré sera étendu de manière sélective afin de pouvoir répondre aux besoins en main-d’œuvre du pays qui se dessinent selon les prévisions ;

L’accent sera mis, en ce qui concerne la formation technique et professionnelle, sur l’acquisition de qualifications polyvalentes facilitant l’adaptabilité professionnelle des élèves et optimisant le potentiel de recyclage ;

L’État, la collectivité et les bénéficiaires eux-mêmes participeront diversement au financement de l’enseignement;

Il ne sera délivré d’attestation officielle et /ou d’accréditation professionnelle des qualifications et du niveau d’études aux intéressés que s’ils satisfont aux procédures diplômantes établies par les pouvoirs publics ; et

L’enseignement dispensé par le secteur privé ne fera l’objet d’aucune restriction, à la condition que les établissements s’en tiennent au programme national.

Comme il est reconnu que les négligences du passé ont empêché une partie importante de la population d’avoir accès à l’enseignement et que les politiques du passé ont beaucoup nuit à la qualité de l’enseignement national, des stratégies sont mises en œuvre pour l’enseignement en termes de qualité comme de quantité, d’une part, et, d’autre part, pour assurer l’équité en la matière. Les principales stratégies comportent les mesures suivantes :

L’ouverture de nouvelles écoles primaires dans l’ensemble du pays, et l’adoption de mesures spéciales en faveur des filles et des groupes minoritaires, comme les pasteurs, afin que le droit à l’instruction élémentaire puisse être exercé sur tout le territoire ;

L’amélioration de la qualité de l’enseignement grâce à une plus grande efficacité générale, à des modification du programme, à une amélioration de la formation des maîtres et à la mise au point de divers systèmes d’appui ;

La promotion de la participation populaire et du contrôle démocratique de l’instruction élémentaire grâce à la gestion collective ;

L’encouragement des organisations non gouvernementales à ouvrir des établissements scolaires à tous les nivaux ;

L’ouverture de nouvelles facultés dans les universités, y compris une faculté de sciences de l’éducation ;

L’ouverture de nouveaux établissements secondaires bien équipés, avec un programme adéquat;

La mise au point d’un système souple d’enseignement technique à trois étages ;

La garantie de la durabilité du financement, afin d’assurer une autonomie dans le cadre du partenariat avec les organes internationaux pour aider à financer les programmes; et

La priorité donnée à la formation du personnel nouveau et du personnel existant.

B. Facteurs influant sur l’éducation

L’analphabétisme des adultes est estimé à 75 % de la population, alors que le nombre des enfants en âge de scolarité primaire non scolarisés, en 2000-2001 était de 323 240, dont 165 785 filles. La proportion des enfants âgés de 7 à 11 ans non scolarisés est de 61 % selon les estimations.

Plusieurs problèmes très importants entravent les progrès de l’éducation en Érythrée. Les plus considérables sont la pauvreté générale du pays et le manque de ressources financières de l’État. Les progrès en matière d’éducation sont étroitement liés aux progrès de l’économie dans son ensemble. Comme il a été indiqué dans l’introduction du présent rapport, l’économie de l’Érythrée est actuellement une économie sinistrée, ce qui rend extrêmement difficile de prévoir et de mettre en œuvre des plans permettant d’améliorer l’accès à l’éducation et la qualité de cette éducation à tous les niveaux.

La pénurie de professionnels qualifiés et/ou dûment formés à tous les niveaux du système d’enseignement est un handicap très lourd; il y a aujourd’hui, dans l’enseignement, 2 967 enseignants dépourvus de formation. L’Institut de formation des maîtres d’Asmara ne suffit pas à répondre à la demande croissante d’enseignants qualifiés, et les formateurs ont un faible niveau. On constate un défaut de programme de formation avant l’emploi moderne et respectueux de la différence entre les sexes. Il manque aussi d’enseignants de la langue et de la culture maternelle dans les neuf groupes ethniques. Enfin, il manque, dans le système éducatif, un programme de perfectionnement du personnel permettant de faire face de manière dynamique aux problèmes de l’enseignement et de l’apprentissage, auxquels s’ajoute l’apparition d’urgences silencieuses comme l’épidémie de VIH/SIDA.

D’autres entraves sont dues aux mentalités; par exemple, de nombreuses personnes considèrent encore qu’il est inacceptable ou indésirable que les filles soient éduquées. Il faudra longtemps pour faire changer ce genre d’attitude. De plus, le mauvais état de la santé est responsable des taux élevés de mortalité infantile, de l’absentéisme et des piètres résultats scolaires, tandis qu’en raison de la guerre et de la pauvreté on compte un grand nombre d’enfants ayant des besoins spéciaux. La dégradation de l’environnement a créé des problèmes qui ont une incidence directe sur l’école (comme la pénurie d’eau aux endroits où se trouvent les établissements scolaires) et une incidence indirecte sur la participation des enfants à l’éducation.

Tous les pays en développement sont confrontés à des problèmes quand il s’agit d’allouer des ressources suffisantes pour étendre leurs services sociaux. Ils sont encore beaucoup plus graves ici, car l’Érythrée essaie de reconstruire, à tous les niveaux en même temps, un système éducatif en ruine. Cela exige d’énormes moyens financiers et des ressources humaines considérables. Il y a donc actuellement un gouffre entre les besoins de la nation en matière d’éducation et les possibilités qu’ont l’État et le peuple d’y répondre avec leurs propres moyens. Afin d’améliorer l’accès à l’enseignement, le gouvernement a augmenté le budget de l’éducation de plus de 9 % entre 1993 et 2001, les dépenses relatives à l’instruction élémentaire ayant augmenté plus vite que celles relatives aux autres niveaux. Actuellement, près de 70 % des ressources de l’éducation vont à l’enseignement primaire, et 78 % des écoles primaires sont situées dans des zones rurales.

Nonobstant l’engagement du gouvernement envers l’éducation et son désir de créer une économie moderne, tournée vers l’avenir, et de répondre aux besoins de la population, il est confronté à des obstacles divers. À la fin de la guerre de libération de 30 ans, l’Érythrée s’est retrouvée avec une infrastructure en ruines et un secteur de l’éducation délaissé. En dépit des progrès réalisés en sept ans, depuis la libération, la guerre de 1998 a provoqué des reculs considérables et une surcharge du système éducatif. Il faut dire que les défis que l’Érythrée doit relever, en ce début de siècle, en matière d’éducation, sont encore écrasants.

C. L’éducation préscolaire

Le rôle du Ministère de l’éducation dans le domaine de l’enseignement préscolaire s’est limité à la définition d’un programme sectoriel d’action, à la formation des maîtres et à la surveillance. La politique en matière d’enseignement préscolaire repose sur les principes suivants :

a)Les pouvoirs publics de l’Érythrée visent à ce que les enfants soient soignés comme il convient en assurant leur développement physique, intellectuel, social et affectif pendant leurs premières années, ceci étant fondamental pour que se développe une société érythréenne moderne et de progrès;

b)Les pouvoirs publics constatent que les enfants ont besoin de participer aux loisirs. Il s’agit, en l’occurrence, de la liberté de jouer et de pratiquer, en toute autonomie, des activités à caractère artistique et culturel entre autres. Tout sera fait pour leur donner cette possibilité;

c)Il sera pris soin d’étendre le milieu d’apprentissage au domicile et à la collectivité, et les connaissances qui sont le fruit de l’expérience de la vie seront considérées comme un aspect important de leur développement d’ensemble ;

d)Les parents et les collectivités sont tenus d’assurer et d’améliorer l’éducation, la santé et l’alimentation des enfants. L’État assume la responsabilité de surveiller la condition des enfants et prendra les mesures nécessaires pour leur garantir un bon état sanitaire et nutritionnel; et

e)Pour assurer leur droit à l’éducation, le gouvernement s’efforcera de mettre au point un système d’enseignement national qui sera garanti par la loi et par la politique éducative du pays.

En 2001, il n’y avait que 90 écoles maternelles dans tout le pays, dont 69 étaient situées dans les zones urbaines, la plupart se trouvant à Asmara. Quatre d’entre elles, seulement (4,4 %), sont des écoles publiques. En 1995, la municipalité d’Asmara a cédé la responsabilité de toutes les maternelles qui dépendaient d’elles à la collectivité. La gestion et le financement de presque toutes les maternelles ont été laissés à l’initiative d’organismes non gouvernementaux. Le taux brut de scolarisation des années scolaires 1991/92, 1995/96 et 2000/01 n’a été, respectivement, que de 3,4 %, 3,9 % et 5,2 %. Ces chiffres sont à l’évidence très faibles. Les pouvoirs publics reconnaissent que l’éducation préscolaire est extrêmement importante en ce qu’elle établit les bases de toute l’expérience éducative de l’enfant.

Le Ministère de l’éducation a créé un comité des maternelles dont la tâche est d’assurer et d’appuyer le bon fonctionnement de ces établissements, et qui inclut la surveillance et la supervision des maternelles existantes et la formation des nouveaux enseignants et des autres. Pendant l’année scolaire 2000/01, l’Érythrée ne comptait que 326 enseignants de maternelle, dont 211 (64,7 %) avaient une formation professionnelle.

L’État a récemment lancé un programme intégré multisectoriel, Les crèches et le développement, sous l’égide du Ministère de l’administration locale. Ce programme concerne le droit à l’éducation et au développement des tout jeunes enfants, selon une approche intégrée et multisectorielle, en particulier dans les zones rurales. Il a pour objectif l’extension des programmes sociaux intégrés de qualité à faible coût relatifs au développement de la petite enfance de manière à ce que plus de 80 % des enfants puissent en bénéficier d’ici à 2015 dans le cadre de l’enseignement traditionnel et dans le cadre extrascolaire.

Parmi les grandes composantes du projet de développement relatif à la petite enfance, il y a le programme concernant la garde et l’éducation des tout jeunes enfants placé sous l’égide du Ministère de l’éducation et qui vise :

à encourager le développement social, physique et intellectuel des enfants ;

à améliorer la qualité de vie des enfants et de la collectivité ;

à mettre au point un système qui permette à la collectivité d’y participer ;

à sauvegarder les droits fondamentaux des enfants; et

à garantir des profits à long terme en matière de développement des ressources humaines et de croissance économique en fabriquant des adultes productifs.

Aujourd’hui, les activités qui ont été entreprises sont les suivantes :

La formation des pourvoyeurs de soins communautaires;

La mise au point de matériels pédagogiques à faible coût pour les enseignants de maternelle ;

L’organisation, tous les deux mois, d’ateliers à l’intention des enseignants et des pourvoyeurs de soins ;

L’élaboration d’un manuel d’aide aux parents par des parents, des travailleurs sociaux, des aides à domicile, l’UNFE, l’UNJEE ; et

Afin de pouvoir continuer à avancer, une évaluation des besoins en matière d’éducation et de garde des tout jeunes enfants en Érythrée, effectuée par le Ministère de l’éducation en avril 2002. Un atelier est prévu pour octobre 2002.

D. Instruction élémentaire publique

L’Érythrée compte 759 886 enfants âgés de 0 à 5 ans et 904 499 âgés de 6 à 14 ans (Ministère de l’éducation, 2000/01). (Les statistiques relatives à cette section figurent dans l’annexe statistique.)

Tableau 6

Population d’âge scolaire par niveau scolaire

(Ministère de l’éducation 2000/01)

Groupes d’âge

Population

Pourcentage estimé de la population totale

5-6

240 981

6,67

7-11

529 071

14,64

12-13

176 487

4,88

14-17

289 587

8

Total

1 236 125

34,2

La planification au niveau national a commencé en 1991 et se poursuit. Le Ministère de l’éducation est passé d’une planification par projets à une planification à plus long terme par programmes. Par ailleurs, des objectifs à 5, 10 et 15 ans ont été définis pour les indicateurs clés. Les tendances du taux de scolarisation brut (TSB) et du taux de scolarisation net (TSN) des cinq dernières années apparaissent dans le tableau ci-dessous .

Tableau 7

Taux de scolarisation brut (TSB) et taux de scolarisation net (TSN)

de 1996/97 à 2000/01

Année

Niveau

TSB national

TSB par sexe

TSN national

TSN par sexe

Garçons

Filles

Garçons

Filles

1996/97

Primaire

50,6

54,8

46,3

28,8

29,9

27,7

Intermédiaire

29,9

32,4

27,2

7,9

8,4

7,5

Secondaire

15,7

18,2

13

10

10,4

9,6

1997/98

Primaire

50,6

54,7

46,5

30,9

32,4

29,3

Intermédiaire

35,1

38,9

30,9

9,1

9,5

8,6

Secondaire

15,7

18,4

12,7

10,3

10,8

9,7

1998/99

Primaire

52,2

56,4

47,9

35,2

35,2

31,3

Intermédiaire

40,1

43,3

36,5

9,5

9,6

9,3

Secondaire

17,4

21,2

13,4

11,4

12,6

10

1999/00

Primaire

57,5

62,3

52,4

37,9

40,1

35,6

Intermédiaire

43,2

45,9

40,4

10,5

10,7

10,6

Secondaire

21,3

26

16,2

14

15,8

12,1

2000/01

Primaire

56,6

61,2

51,5

38,9

41,4

36,4

Intermédiaire

43,4

45,1

41,5

11,6

11,6

11,6

Secondaire

22,2

27,2

16,9

13,3

15,2

11,3

Actuellement, cinq ans d’enseignement primaire et deux ans d’enseignement secondaire de premier cycle (le cycle de base) sont suivis de quatre ans d’enseignement secondaire de deuxième cycle. L’enseignement, au niveau élémentaire, est dispensé dans la langue maternelle, mais les communautés ont le droit de choisir une autre langue si elles le désirent ; au niveau post-primaire, la langue d’enseignement est l’anglais. L’âge officiel de scolarisation est de 7 ans, mais, en raison des difficultés d’accès à l’enseignement, dans le passé, la majorité des élèves, à tous les niveaux, sont plus âgés que ne le prévoient les normes. Le programme préscolaire est de deux ans, à partir de l’âge de 5 ans, mais il y a très peu de maternelles, le taux de pré scolarisation brut n’étant que de 5,2 pour en 2002 ; les maternelles sont presque toutes concentrées dans les zones urbaines, et surtout à Asmara.

Pour ce qui est du financement public, c’est le Ministère des finances qui est responsable de la répartition globale du budget de l’État. Le Ministère de l’éducation prépare son budget annuel basé sur le nombre d’inscriptions, le nombre d’enseignants et d’autres membres du personnel, et le programme de construction. Afin d’améliorer l’accès à l’enseignement, le gouvernement a augmenté les dépenses d’éducation, qui sont passées de 4 % en 1993 à plus de 9 % en 2001. Les dépenses d’éducation à caractère strictement public, pour les années 1992/93, 1995/96 et 2001/02, se sont élevées respectivement à 34,7 millions, 91 millions et près de 253 millions de nakfa (source : Ministère des finances et du développement et Ministère de l’éducation). Près de 70 % des ressources de l’éducation vont à l’enseignement primaire, et 78 % des écoles primaires sont situées dans les zones rurales. (Une partie importante de ces fonds, toutefois, couvre des dépenses ordinaires, en particulier le salaire des enseignants (100 634 081 nakfa sur un budget de 252 450 668 nakfa: Ministère de l’éducation, Indicateurs essentiels de l’éducation 2000/01).)

Les dépenses ordinaires ont beaucoup augmenté en raison d’un certain nombre de facteurs, dont l’augmentation du nombre des enseignants et celle des dépenses en fournitures due à l’accroissement du nombre d’écoles. La plus grande partie des dépenses d’investissement est actuellement financée par des organisations non gouvernementales, ce qui rend difficile la planification à long terme. Certaines d’entre elles, cependant, sont couvertes par l’État, par l’intermédiaire du Fonds de développement communautaire.

Le programme scolaire national a été établi pendant la guerre de libération, et il a fait l’objet de modifications et d’évaluations périodiques au cours des 10 dernières années. Le Ministère de l’éducation a mis au point un nouveau programme scolaire national; de grands efforts ont été déployés pour que les nouvelles moutures de programmes nationaux (2001-2002) tiennent compte de la nouvelle situation socio-économique du pays. De nouveaux documents pédagogiques seront mis au point et utilisés à titre de documents pilotesdans les établissements scolaires dès que la révision sera terminée. L’enseignement technique, la formation professionnelle, la formation des maîtres et les programmes d’alphabétisation ont conçu leur propre programme indépendamment.

Pendant ce temps, certains changements ont déjà été effectués dans les programmes existants de l’enseignement primaire, intermédiaire et secondaire. Les manuels de l’enseignement primaire relatifs aux langues des minorités ont été revus, de nouveaux livres d’anglais ont été préparés pour de nombreuses classes; des livres de premier cycle de l’enseignement secondaire ont été conçus dans un certain nombre de matières et il a également été procédé à la révision de manuels de l’enseignement secondaire de second cycle. Des mesures ont aussi été prises pour que les programmes scolaires soient normalisés dans l’ensemble du pays.

Le rapport élèves-enseignants dans les écoles primaires était de 45 pour 1 en 2000/01, contre 37 pour 1 en 1992/93. Ce rapport était de 56 pour 1 et 54 pour 1 dans l’enseignement intermédiaire et l’enseignement secondaire en 2001/01, contre 33 pour 1 et 35 pour 1 en 1992/93. Bien qu’il y ait encore des disparités entre les régions, les taux d’inscriptions et d’encadrement sont en progression. Les raisons pour lesquelles les taux d’encadrement des élèves sont mauvais en certains endroits sont le nombre insuffisant d’établissements scolaires, d’enseignants et de places dans les écoles. Les raisons de l’accroissement de la demande concernant ces dernières tiennent à la réduction de la mortalité infantile, à la conscience accrue de la valeur de l’éducation, au fait que les parents, petit à petit, s’impliquent plus (mais toujours pas assez), à l’expulsion d’Éthiopie des enfants (plus de 31 000 personnes, dont 44 % d’enfants, ont été expulsées entre 1998 et 2001), et aux rapatriés du Soudan (entre 1995 et 2002, le nombre des enfants rapatriés s’est élevé à plus de 110 000).

Le nombre d’enseignants qualifiés a augmenté au cours de ces dernières années. Dans l’enseignement primaire, il est passé de 48 % en 1994/95 à 71 % en 2000/01, dans l’enseignement secondaire, de 47 % en 1994/95 à 73 % en 200/01. Dans l’enseignement intermédiaire, toutefois, seulement 35,3 % des enseignants ont les qualifications nécessaires en 2000/01, contre 70 % en 1994/95. Le manque d’enseignants et leur piètre qualité est la cause profonde des mauvais résultats des élèves. Les femmes représentent 40,6 % du personnel enseignant en 2000/01, ce qui représente une augmentation de 5 % par rapport à 1994/95. Cette proportion est encore relativement faible si l’on veut faire porter l’effort sur l’éducation des filles. Depuis 1998, la cause principale de la mauvaise qualité de l’enseignement est l’impact de la guerre de frontière. L’accroissement des besoins en services sociaux en matière de santé, de nutrition, d’approvisionnement en eau et d’assainissement pour les personnes déplacées en raison de la guerre a relégué l’éducation au second plan, derrière les besoins essentiels, avec une faible allocation de ressources.

Pour que la qualité de l’enseignement soit évaluée et améliorée, il faut qu’il soit supervisé par des agents professionnels. Le Ministère de l’éducation s’efforce de renforcer le système de supervision dans les régions de façon à ce que les inspecteurs travaillent dans un groupe d’établissements, conformément à la stratégie de contrôle de la qualité de l’enseignement et de la formation locale. Des plans ont été établis pour que soit mis en place un nouveau système de rapports réguliers qui seront envoyés des régions. Le perfectionnement des inspecteurs en poste et la formation de nouveaux inspecteurs sont considérés comme une priorité absolue en raison du manque de personnel qualifié.

Concernant l’efficacité du fonctionnement du système, les abandons scolaires sont en régression régulière depuis 1991, surtout chez les filles. Les taux d’abandons, de redoublements et de passages en classe supérieure en 2000/01 figurent dans le tableau ci-dessous :

Tableau 8

Comportement scolaire des filles (2000/01)

(en pourcentage)

Niveau

Abandons

Redoublement

Passage en classe supérieure

Primaire

6,3

22,9

70,8

Intermédiaire

10,1

23,3

66

Secondaire

10,1

29,2

61,1

Ces chiffres globaux marquent, en fait, d’importantes différences d’une zone à l’autre. À titre d’exemple, le taux d’abandon scolaire dans les écoles primaires de Zoba Maker (région centrale), en 2000/01 (avec un système éducatif relativement bien pourvu en termes de bâtiments et de personnel) n’a été que de 4,3 %, celui des redoublements de 20,3 % et celui des passages en classe supérieure de 75,4 %. À Zoba Gash-Barka, la même année, le taux d’abandon scolaire a atteint 7,44 %, alors que 26,1 % des élèves ont redoublé et que 66,4 % sont passés en classe supérieure. Ces taux sont tous plus défavorables pour les filles, surtout dans les provinces des plaines.

Bien que la pénurie de manuels et d’équipement soit habituelle dans les pays en développement, il n’est pas normal qu’un grand nombre de bâtiments scolaires soient inutilisables en raison des dommages de guerre, ou parce qu’ils servent de caserne, mais c’est exactement ce à quoi le Ministère de l’éducation a été confronté après la guerre. Étant donné le manque de ressources adéquates, humaines et financières, attribuées à l’éducation, cela a été un défi considérable que de restaurer correctement les établissements scolaires endommagés, d’en construire de nouveaux et de les approvisionner correctement en livres et en matériel. Le Ministère de l’éducation sait bien que des locaux corrects et un équipement adéquat influent considérablement sur la qualité de l’enseignement, et s’efforce sérieusement de remédier aux manques dans ce domaine. Depuis l’indépendance, l’État a fait construire de nouvelles écoles là où il n’en existait pas auparavant, et il fait actuellement restaurer celles qui ont été détruites ou endommagées pendant la guerre.

Conformément à la politique du gouvernement en matière d’éducation, l’instruction élémentaire (classes 1 à 7) est gratuite et obligatoire pour tous les citoyens. Les enfants d’âge scolaire (classes 1 à 5) ont le droit de suivre l’enseignement dans leur langue maternelle. Actuellement, huit langues d’ethnies sont utilisées comme langue d’enseignement dans les écoles primaires, l’anglais étant une matière comme les autres. Dans l’enseignement secondaire de premier et de deuxième cycle (classes 6 à11), la langue d’enseignement est l’anglais. En 1996, selon les estimations, le rapport entre le nombre de manuels fournis et le nombre des élèves était de 1 pour 60 ; il est passé à 1 pour 2 en 2002.

Le Ministère de l’éducation a pour objectif de faire passer la proportion d’enfants en âge d’aller à l’école primaire ayant accès à l’enseignement de 56,6 % (en 2000/01) à 80 % (d’ici à 2015). Depuis 1991/92, 270 établissements scolaires ont été construits et 315 restaurés. Au cours de la seule année 1996/97, 77 écoles ont été construites et 60 restaurées, ce qui fait que le nombre total des établissements scolaires en Érythrée se montait à 686 en 1996/97, dont 549 écoles primaires, 99 établissements secondaires de premier cycle et 38 établissements de deuxième cycle. Selon les statistiques et les prévisions pour 1999-2003 du Ministère de l’éducation, 1 502 nouvelles salles de classes sont nécessaires dans l’enseignement primaire, dont un tiers (500) seront ouvertes dans des écoles existantes et le reste (1 002) dans de nouvelles écoles. Le Ministère de l’enseignement compte également faire construire 105 salles de démonstration et 105 salles de lecture (bibliothèques) dans les établissements secondaires de premier cycle et 128 centres de documentation (pour des groupes d’écoles) pendant la même période.

Les bâtiments scolaires sont utilisés de manière intensive. Un système de double roulement a été institué dans 57 % des écoles en raison du manque de salles de classe. Dans les zones urbaines, la plupart des établissements secondaires de premier et de deuxième cycle ont un système de triple roulement, le troisième roulement concernant des classes du soir pour les adultes (qui peuvent, en fait, recevoir des enfants âgés de moins de 18 ans).

Il existe actuellement des internats en cinq endroits, deux sont en construction et des études ont été effectuées pour savoir où il convenait d’en construire d’autres. Ce type d’établissement est considéré comme un moyen extrêmement important de faciliter l’accès à l’enseignement des filles et des groupes minoritaires des zones défavorisées.

Il y a, dans la province de Barka, 24 écoles rurales qui sont également des centres de distribution d’aliments sous forme de collation de mi-journée composée de lait, de mélange protéique et de biscuits énergétiques. Il y a un tout petit nombre de centres de ce genre en Érythrée.

Il existe un système de cars de ramassage scolaire dans certaines régions. La plupart des enfants vont à l’école à pied ou en bicyclette, la distance moyenne à parcourir étant de 2,2 kilomètres dans la capitale Asmara à 8 kilomètres dans trois des provinces. Certains enfants ont quatre à cinq heures de marche par jour pour aller à l’école et en revenir. Selon les estimations officielles, 98 % des utilisateurs de bicyclettes sont des garçons ou des hommes ; cela signifie que la quasi totalité des filles se rendent à l’école à pied, ce qui allonge, par conséquent le temps du trajet scolaire. L’agence érythréenne pour l’environnement a commencé à distribuer des bicyclettes d’occasion fournies par des donateurs d’outre-mer, dont beaucoup sont remises à des filles qui ont de longues distances à parcourir pour se rendre à l’école. Il y a, toutefois, une difficulté d’ordre culturel à surmonter : pour beaucoup de familles, il n’est pas acceptable que les femmes fassent de la bicyclette. Dans certains cas, l’homme qui est le chef de famille ne permet à une fille d’accepter le don d’une bicyclette que pour la récupérer pour son propre usage. Dans les zones urbaines, néanmoins, il est de mieux en mieux accepté que les filles roulent à bicyclette, mais il faudra encore vraisemblablement longtemps pour que cela devienne banal!

Les enfants ont entre 30 (classes 1 et 2) et 35 (classes 3 à 11) séances de classe par semaine (la séance dure environ 40 minutes). L’année scolaire est de 200 jours environ, divisés en deux semestres. Dans les régions des basses terres, la semaine scolaire est de six jours, pour que l’année scolaire se termine avant les grandes chaleurs. Il est envisagé d’allonger l’année scolaire pour qu’elle soit conforme à la moyenne sub-saharienne, et d’augmenter le service des enseignants.

Le taux d’inscriptions brut est passé de 36 % en 1991/92 à 60,2 % en 2000/01.

E. L’éducation des filles

En dépit de la disposition de la Constitution qui prévoit l’égalité des sexes et des expériences concluantes en la matière pendant la guerre d’indépendance, les pratiques discriminatoires à l’égard des femmes se poursuivent en Érythrée. Il y des facteurs culturels profondément enracinés qui expliquent le peu d’importance attachée par de nombreuses communautés à l’éducation des filles. Beaucoup de parents considèrent que l’éducation de leurs filles n’aurait pas de sens ou que ce serait un obstacle qui pourrait les empêcher d’atteindre les buts ou de réaliser les aspirations qu’ils nourrissent à leur égard, à savoir qu’elles se marient et qu’elles perpétuent les traditions culturelles.

L’inscription des filles dans le système éducatif, leur participation à ce système et le fait qu’elles puissent aller jusqu’au bout de leurs études sont considérés par les pouvoirs publics comme des données primordiales aux fins du développement global.

Depuis l’indépendance, diverses études d’ensemble ont été effectuées sur l’éducation des filles afin d’évaluer les facteurs qui influent sur l’inscription de celles-ci dans l’enseignement primaire, leur participation à cet enseignement et leur persistance, dans les cinq régions et de pouvoir recommander la mise en œuvre de mesures appropriées pour améliorer la situation. Des différences ont été relevées d’une région à l’autre, concernant l’attitudes des filles à l’égard de l’éducation. Les communautés chrétiennes ou les communautés religieuses mixtes, ainsi que les communautés ethniques mixtes, ont paru plus réceptives à l’éducation en général, tout comme les habitants des zones urbaines et semi-urbaines. C’est dans les communautés nomades et semi-nomades et dans celles qui sont dépourvues, ou à peu près, de traditions en matière d’éducation scolaire, que les plus grandes résistances ont été décelées. En certains endroits, particulièrement là où, par tradition, les femmes sont très cloîtrées, elles n’ont jamais entendu parler de scolarisation pour les filles.

Les solutions permettant de faire progresser l’éducation des filles passent par l’augmentation du nombre d’enseignantes et la réduction des distances séparant le domicile de l’école primaire ainsi que des établissements scolaires de filles. Diverses stratégies ont été mises au point par le Ministère de l’éducation pour favoriser l’éducation des filles, dont :

-Des écoles de décharge : l’une des stratégies principales consiste à rapprocher les services d’éducation de la population. Aujourd’hui (en 2001), 25 écoles de décharge sont terminées et 14 autres sont en cours de construction;

-La construction de foyers pour les jeunes filles afin de les encourager à s’inscrire dans les établissements secondaires de premier cycle. Deux d’entre eux sont en construction, l’un à Massawa et l’autre à Agorda. Les directives relatives à leur gestion sont déjà prêtes ;

-Des enseignantes : il faut accroître le nombre des enseignantes pour calmer les craintes des parents concernant la sécurité des filles et créer des modèles. La formation des enseignantes dans les instituts de formation des maîtres en 1997. Par ailleurs, le Ministère de l’éducation projette d’apporter une assistance consécutive à la formation des enseignantes ;

-Pour encourager les filles à s’inscrire et à persister dans leurs études, un plan de motivation a été mis au point et lancé en 2000, dans les quatre régions les plus défavorisées ( mais il ne s’agit pas d’un programme très vaste) ; et

-Promotion et mobilisation sociale : des programmes de sensibilisation du public et des campagnes de mobilisation font parties des priorités du Ministère de l’éducation ; l’étude d’ensemble sur l’éducation des filles effectuée en 1996 a été traduite dans les diverses langues locales et a fait l’objet de débats aux niveaux sous-régional et régional.

La formation et le déploiement des enseignantes ont pris un bon départ, ainsi que le perfectionnement des enseignantes et la réduction de la distance entre le domicile et l’école primaire grâce aux écoles de décharge. Le prochain défi, maintenant, est de répondre aux attentes concernant la poursuite de l’enseignement au-delà des premières années.

Les actions consacrées spécifiquement à l’éducation des filles sont les suivantes :

Réduction des distances entre le domicile et l’école primaire;

Construction d’écoles de décharge et de deux internats de filles;

Programmes de sensibilisation du public;

Formation des enseignantes et sensibilisation aux spécificités des hommes et des femmes chez les enseignants ;

Éducation/alphabétisation des adultes, salles de lectures/bibliothèques en zones rurales;

Préparation, traduction et diffusion de brochures;

Fourniture de postes de radio dans les centres d’alphabétisation pour permettre aux intéressés d’avoir accès au programme radiophonique d’alphabétisation ;

Centre de formation pour les auxiliaires juridiques ;

Formation en cours d’emploi et instruction théorique en droit dispensées à 35 femmes; et

Les associations parents-enseignants recevront des informations et une aide financière pour leur permettre de mener des campagnes de promotion de l’éducation des filles dans leurs communautés.

Malgré les campagnes nationales, surtout depuis 1996/97, pour promouvoir l’éducation des filles, le préjugé contre les femmes continue de s’accentuer. L’une des faiblesses principales du système a été le défaut de mécanismes d’ensemble de surveillance et d’évaluation. De nouveaux systèmes sont actuellement en train d’être mis en place pour permettre de résoudre ces problèmes et de mieux suivre les progrès réalisés en matière d’éducation des filles. Lorsqu’ils seront complètement mis en œuvre, il sera possible d’évaluer l’efficacité des stratégies.

F. Disparités entre les zones urbaines et les zones rurales

et entre les régions

La demande relative à l’éducation est plus importante dans certaines régions d’Érythrée, surtout dans les régions de montagne (Maker 77,2 % et Debug 73,8 %), alors qu’elle est faible ou nulle dans d’autres régions, surtout en ce qui concerne les communautés nomades (Debubawi Keyih Bahri 9,8 %, Semienawi Keyih Bahri 28,9 % et Gash Barka 49,8 %).

Tableau 9

Chiffres bruts des inscriptions par région et pas sexe – Écoles publiques 2000/01

Zone

Groupes d’âges 7-11

Chiffres bruts des inscriptions

Total

Garçons

Filles

Anseba

78 444

45 249

25 404

19 845

Debubawi Keyih Bahri

37 109

3 626

2 543

1 083

Debug

137 479

101 438

54 842

46 596

Gash Barka

100 896

50 295

29 262

21 033

Maker

98 299

75 858

38 531

37 327

Semienawi Keyih Bahri

76 843

22 225

13 941

8 284

Total

529 071

298 691

164 523

134 168

G. Enseignement privé

Dans le système éducatif du FPLE il n’y avait pas de secteur privé. Un petit nombre d’écoles de missions pouvaient continuer à fonctionner dans les zones occupées de l’Érythrée. Cependant, dans l’ensemble, le secteur privé ne joue qu’un rôle mineur depuis le début des années 70. Espérons que cela soit appelé à changer, car l’État érythréen s’est engagé à favoriser la croissance de ce secteur, afin que les groupes défavorisés et les autres puissent avoir de meilleures chances d’accès à l’enseignement grâce à l’ouverture de nouvelles écoles, que la collectivité participe davantage à la création et à la gestion des écoles, et afin de contribuer à améliorer la qualité de l’enseignement. Les différentes organisations non gouvernementales sont les collectivités et les organisations religieuses et étrangères.

Le nombre des inscriptions dans les écoles privées, en pourcentage du nombre total des inscriptions, a baissé au niveau de l’instruction élémentaire et de l’enseignement secondaire de premier cycle, car le nombre des écoles publiques, à ces niveaux, a crû plus vite que celui des écoles privées. De 1991/92 à 2000/01, il est tombé de 22 % à 10,3 % (sur les 27 860 élèves, en 2000/01, 13 355 étaient des filles) au niveau primaire, et de 17,2 % à 7,38 % (sur les 5 598 élèves, 2 787 étant des filles) au niveau intermédiaire. Dans l’enseignement secondaire, toutefois, le secteur privé s’est relativement plus développé, les inscriptions y passant de 2,7 % à 4,04 % (sur les 2 591 élèves, 1 234 étant des filles) de l’ensemble des inscriptions. En 2000/01 l’Érythrée comptait les établissements scolaires privés suivants : 88 écoles primaires, 22 établissements secondaires de premier cycle, 6 établissements secondaires de deuxième cycle et 3 établissements d’enseignement technique.

Les pouvoirs publics reconnaissent que ces établissements privés ne sont pas riches et ont besoin d’aide pour être créés et pour fonctionner efficacement. Leurs enseignants ont pu participer gratuitement aux stages de formation en cours d’emploi organisés par le Ministère de l’éducation et, jusqu’à une date récente, les manuels leur étaient fournis gratuitement.

H. Formation technique et professionnelle

La destruction de l’économie de l’Érythrée pendant la guerre, avec la perte d’une génération entière de travailleurs qualifiés et semi-qualifiés, signifie qu’il y a une tâche énorme de reconstruction des capacités en termes de matériel comme en termes d’hommes à mener à bien. La reconstruction de l’enseignement technique et professionnel est absolument vitale pour que les secteurs de l’agriculture, de l’industrie et des services puissent être redressés et développés. Le gouvernement accorde donc une priorité absolue à cette affaire, le Ministère de l’éducation y jouant le premier rôle. Des plans d’ensemble ont été mis au point pour la restructuration de l’enseignement technique et professionnel, fondés sur les besoins actuels de la nation. Le système à deux étages actuellement en vigueur est en train d’être remplacé par un système à trois étages, conçu pour apporter différents niveaux et différents types de qualifications dont on a besoin. Cette formation sera dispensée :

a)Par les centres de développement des compétences : ils sont actuellement au nombre de sept, d’autres étant en construction de manière à ce qu’il y en ait deux par zone. Ils dispensent une formation de 6 à 12 mois dans des spécialités de base comme la plomberie, le bâtiment et la mécanique;

b)Par les établissements d’enseignement technique : il y a huit établissements intermédiaires et deux établissements d’études techniques avancées ; les établissements d’enseignement technique offrent un cycle de trois ans de cours aux diplômés issus de la classe 10 (de l’enseignement secondaire) dans les domaines du bâtiment, de l’électricité, du travail des métaux, etc. Il y a deux établissements d’enseignement technique, et plusieurs en projet ; et

c)Formation des maîtres de l’enseignement technique : Il y aura un institut de formation technique d’où sortiront des formateurs de formateurs. Il servira aussi d’institut polytechnique.

Les pouvoirs publics de l’Érythrée savent que le pays a besoin que fonctionnent bien l’enseignement et la formation professionnels et techniques. Pour atteindre les objectifs de la politique nationale relative aux ressources humaines, le Ministère de l’éducation a mis au point un Cadre stratégique national pour l’enseignement et la formation techniques et professionnels (EFTP).

Une commission a déjà été mise sur pied pour revoir ce cadre stratégique qui propose une structure à trois niveaux pour l’EFTP : élémentaire, intermédiaire et avancé. La formation sera organisée selon un système double, dans lequel les élèves feront des stages de quatre mois dans des industries ou des entreprises, dans leur domaine de compétence, afin de mettre à l’épreuve leurs connaissances théoriques.

Il faudra être âgé d’au moins 15 ans pour pouvoir être admis à l’EFTP, et avoir au moins complété ses études secondaires de premier et de deuxième cycle (5 + 2 = 7 années), l’enseignement au niveau élémentaire durant un an. Le niveau intermédiaire comprendra un cycle de deux ans de cours théoriques, conçu pour des élèves ayant complété neuf ans d’études. Le niveau le plus avancé de la formation technique et professionnelle sera destiné aux élèves ayant terminé leurs études secondaires de deuxième cycle, et son programme sera étalé sur trois ans. Les élèves auront accès au niveau supérieur dès qu’ils auront satisfait aux exigences d’un niveau donné.

Les centres de formation professionnelle des différentes régions s’adressent essentiellement à des jeunes ayant abandonné leurs études, à des combattants démobilisés, à des rapatriés et à des personnes expulsées. Au cours de la période 2000-2001, le nombre de stagiaires au niveau intermédiaire a été de 1 434, dont 337 femmes (soit près de 24 %); au niveau avancé il y avait 359 élèves dont 110 femmes (plus de 30 %).

L’École de commerce d’Asmara, créée en 1996, propose aux jeunes ayant achevé leur scolarité des cours d’informatique, de gestion, de comptabilité, etc. Actuellement, ce programme manque d’envergure, n’accueillant que 60 élèves. Il commencera cependant à remédier à la pénurie de personnel qualifié dans les secteurs du commerce et des services. Un établissement d’enseignement relatif aux métiers d’art et deux petites écoles de beaux-arts et de musique propose des programmes de cycles court et moyen.

I. Education spéciale

Dans les zones libérées, pendant la guerre, l’École zéro du Sahel (baptisée plus tard École de la révolution) accueillait un grand nombre d’orphelins, dont beaucoup avaient été témoins d’abominables atrocités dont avaient été victimes leurs parents, d’autres membres de leur famille ou leurs amis. Durant les hostilités, certains étaient souvent exposés à la terreur des bombardements et, s’ils n’avaient pas été tués, ils restaient psychologiquement marqués. Beaucoup d’entre eux avaient des handicaps physiques provoqués par des blessures de guerre ou des maladies. À différentes reprises, pendant la guerre, le FPLE a dû s’occuper de très grands nombres de réfugiés déplacés à l’intérieur de leur propre pays, dont des enfants. Le FPLE était tout à fait conscient des traumatismes subis par des derniers dans ces circonstances et dans d’autres aussi, et avait fait son possible pour leur accorder, avec sollicitude, les soins et l’attention dont ils avaient besoin, des gardiens de la Révolution, par exemple, leur servant de parents nourriciers. Néanmoins, le FPLE n’avait aucune expérience lui permettant de déceler les besoins des enfants, ni de leur apporter tous les soins relevant de compétences professionnelles. Ainsi, à cause de la guerre, de la pauvreté et des maladies, il y a beaucoup d’enfants, dans le système éducatif et hors de ce système, qui ont des besoins spéciaux et dont on ne s’occupe pas comme il le faudrait.

En raison de cette situation, une petite section spéciale a été créée, en 1994, au sein du Département de psychologie pour permettre de répondre aux besoins spéciaux en matière d’enseignement. Parmi les catégories d’enfants ayant des besoins spéciaux on trouve ceux qui ont des difficultés d’apprentissage et des troubles du comportement, les enfants handicapés, les enfants souffrant de traumatismes, les orphelins, les réfugiés et les enfants surdoués ou ayant des dons particuliers.

On ne dispose que de quelques données préliminaires sur le nombre d’enfants ayant des besoins spéciaux en matière d’éducation ou handicapés. Les enfants ayant des besoins spéciaux en matière d’éducation sont souvent exclus du système d’enseignement général parce que leurs parents ne pensent pas qu’ils ont besoin d’éducation. Un petit nombre d’enfants sourds et aveugles ont été intégrés dans les établissements secondaires de Keren et d’Asmara, et un nombre inconnu d’autres enfants le sont dans des écoles primaires sur tout le territoire national. Ces derniers ne bénéficient d’aucune assistance particulière. La plupart des enfants et des jeunes handicapés ou ayant des besoins spéciaux (surtout dans les zones rurales) ne suivent pas l’enseignement scolaire. La politique nationale consiste, dans toute la mesure du possible, à intégrer ces derniers au système d’enseignement général. Cela suppose que tous les enseignants aient reçu une formation spécifique relative aux apprenants ayant des besoins spéciaux, ce qui n’est pas encore le cas. L’éducation intégratrice sur laquelle les pouvoirs publics font porter l’accent, toutefois, n’exclut pas l’existence des écoles spéciales ni des centres de formation spéciale.

Il y a actuellement trois écoles spéciales créées depuis longtemps en Érythrée, deux pour les malentendants et une pour les non-voyants. Elles sont toutes situées dans des zones urbaines et toutes manquent de personnel spécialisé et de moyens matériels et financiers. En 2000/01, 203 enfants seulement (dont 97 filles) y sont entrés. La plupart des enfants ayant des besoins spéciaux peuvent et doivent être inscrits dans les établissement d’enseignement général, mais il faut, à ceux qui ont des handicaps graves et complexes, des programmes d’un autre type, comme ceux que leur offrent les écoles spéciales ou les centres de formation spéciale, ou encore les filières spéciales des établissements d’enseignement général existants. Il est donc nécessaire de considérer attentivement ces écoles et ces centres. Il est prévu que le nouveau programme scolaire national tiendra compte des besoins spéciaux en matière d’éducation, mais les suggestions actuelles ont encore un caractère très général. Des efforts sont également nécessaires pour faire changer les mentalités à l’égard des handicaps et à l’égard de ce que l’éducation peut apporter aux enfants ayant des besoins spéciaux. L’école pour non-voyants a un effectif de 60 élèves pour 10 enseignants dont 2 seulement ont bénéficié d’une formation spécialisée.

Les écoles de Tigrinya pour malentendants ont mis au point l’enseignement du langage des signes. Elles n’accueillent qu’un très faible pourcentage d’enfants ayant des besoins spéciaux, et il est nécessaire de les agrandir pour accroître le nombre des enfants ayant accès à ce type d’enseignement. Dans le cadre de ce programme d’extension, les autorités sont à la recherche de moyens de financement afin de moderniser l’école pour non-voyants, de lui permettre de fonctionner à pleine capacité et de dispenser un enseignement répondant mieux aux besoins. Le programme d’extension vise également à mettre sur pied, dans l’école, un centre de documentation qui pourra être utilisé par tous les établissements d’enseignement spécial et les enfants intégrés à l’enseignement général.

Tous les établissements d’enseignement spécial en Érythrée manquent de l’expertise nécessaire pour adapter le programmes nationaux d’enseignement à leurs conditions particulières. En 1995, le Ministère de l’éducation a créé la première école pour les enfants victimes de handicaps intellectuels modérés à graves. Elle accueille un très petit nombre d’élèves, mais son ouverture, symbolique, est destinée à manifester la reconnaissance du fait que tous les enfants ont besoin d’éducation.

Mis à part les enfants sourds et aveugles et ceux qui sont victimes de handicaps intellectuels modérés ou graves, l’objectif des autorités est de faire en sorte que tous les autres enfants soient inscrits dans le système d’enseignement général, à savoir ceux qui ne sont pas scolarisés actuellement comme ceux qui le sont déjà. L’une des grandes priorités est de former les enseignants de manière à ce qu’ils soient capables de repérer les besoins de ces enfants et d’y répondre. Cela suppose l’introduction d’un module concernant l’enseignement aux enfants ayant des difficultés d’apprentissage dans le programme de formation des enseignants avant l’emploi. Mais, tout d’abord, les recherches viennent d’être terminées pour évaluer le nombre des enfants en proie aux différents types de difficultés d’apprentissage. Bien qu’il y ait beaucoup à faire, la mise sur pied du Comité d’éducation spécialeest considérée comme une avancée de grande portée pour répondre aux besoins de ce groupe important de la société érythréenne.

Les handicaps et certains troubles pathologiques font l’objet de maintes interprétations à caractère mythique et totalement erronées dans la population érythréenne (ceci étant exposé de manière plus détaillée dans la section consacrée aux enfants handicapés, par. 231-251). Ces croyances donnent lieu à des attitudes négatives à l’égard des handicaps. Afin de les inverser, les autorités essaient de trouver des fonds pour financer une campagne de sensibilisation du public aux handicaps et à tout ce que l’éducation peut apporter aux enfants ayant des besoins spéciaux. Cette campagne, à l’échelle nationale, durera trois ans.

J. Loisirs et activités culturelles

L’Érythrée, étant un pays extrêmement sous-développé, doit avoir des priorités : il faut loger, nourrir et éduquer la population avant de financer des activités moins vitales. Cependant, l’État reconnaît que, afin de faire de ce pays une nation unie, stable et prospère, il est nécessaire que les différents groupes (population urbaine/population rurale, groupes ethniques et religieux, jeunes et vieux, etc.) se comprennent et célèbrent non seulement leurs similarités, mais aussi leurs différences. Il convient de ne pas sous-estimer le rôle que peuvent jouer les loisirs et les activités culturelles pour le développement de cette compréhension mutuelle.

Un certain nombre de ministères et l’ONG locale qui produit des programmes pour les jeunes et les enfants, l’UNJEEE, ont mis au point un ensemble de programmes dans lesquels le sport et les activités de plein air, par exemple, sont utilisés pour promouvoir l’entente culturelle et la solidarité dans l’action.

C’est une chose admise que les études et les activités culturelles, en Érythrée, doivent avoir un caractère pragmatique et pratique, et doivent aider à faire changer les mentalités dans le bon sens. Ceci est particulièrement important, étant donné la destruction du système éducatif et ses conséquences directes, à savoir la corruption préméditée, la perte de culture et d’identité de nombreux jeunes pendant l’occupation sous le régime précédent. Une initiative importante en ce domaine est la Campagne pour le travail d’été à l’adresse des élèves de l’enseignement secondaire. Elle a démarré, en tant que projet pilote, en 1994 et a été étendue à presque tous les élèves des classes 8 à 10. Les élèves travaillent pendant 50 jours durant les vacances d’été, les groupes de garçons et de filles étant assignés à différentes zones. Ils ont droit à une petite allocation, aux repas et au logement gratuits. Ils accomplissent des activités relatives au développement dans 95 sites, plus 72 sites dans le cadre d’une campagne d’alphabétisation. Ces activités concernent : le reboisement, le terrassement, la construction de barrages, de canaux et de routes, des travaux agricoles, des récoltes, dont celle du coton, des campagnes de nettoyage, une campagne d’alphabétisation, du travail de bureau dans 13 bureaux de l’administration publique, des recherches concernant les constructions scolaires et la collecte de données pour le recensement d’Asmara.

De l’avis général, le sport et l’exercice physique sont très importants pour le développement d’une nouvelle génération saine. Le sport est appelé à devenir un atout pour le pays, encourageant une large participation de la collectivité à l’organisation et à la pratique des activités, et donnant l’occasion d’organiser des financements de grande envergure. On assiste à une renaissance du sport en Érythrée, grâce, en partie, à sa réintroduction dans les écoles. Un Office des sports a été institué au sein du Ministère de l’éducation, dont le personnel est composé en partie de professeurs d’éducation physique des établissements scolaires. Son premier souci a été de remettre sur pied des équipes de football scolaires et d’organiser à nouveau des compétitions. Le volley-ball et le cyclisme sont également populaires. Il y a maintenant 422 équipes de football regroupées par catégories d’âge. On en compte 216 à Asmara, les autres se trouvant dans les neuf ex-capitales de provinces hors d’Asmara. De plus, 300 équipes de football ont été montées à la fin de 1996, dont 48 équipes de filles. Divers programmes de formation ont été organisés à l’intention des professeurs d’éducation physique avec l’aide d’experts étrangers au milieu et d’anciennes personnalités du monde sportif érythréen. Au cours des années à venir, l’accent sera mis sur l’organisation de compétitions scolaires dans d’autres sports.

Au cours des deux ou trois dernières années, les associations sportives nationales de l’Érythrée se sont imposées auprès des fédérations internationales et des clubs qui comptent. L’Érythrée est maintenant membre de la Fédération internationale de cyclisme, ainsi que des fédérations de volley-ball, de basket-ball et d’athlétisme (en particulier pour le marathon). Les jeunes Érythréens participent régulièrement, depuis 1994, aux compétitions organisées par les pays nordiques et obtiennent des résultats extrêmement satisfaisants. Ces équipes sont formées d’enfants âgés de 12 à 14 ans venant de toute l’Érythrée. Les activités sportives féminines sont fortement encouragées en Érythrée, comme en témoigne la participation des femmes dans presque tous les domaines.

Grâce à ses centres de loisirs et de santé dans sept des plus grandes villes, l’UNJEE a également joué un rôle capital dans l’organisation des équipes et des activités sportives pour les garçons et pour les filles de 8 à 20 ans. Les enfants âgés de moins de 18 ans sont regroupés dans des équipes pratiquant le football, l’athlétisme, le volley-ball, le basket-ball, les courses de VTT, etc. On compte près de 10 000 enfants qui appartiennent à 510 équipes sportives de l’UNJEE dans l’ensemble du pays. L’Union gère aussi un gymnase à Asmara, auquel les adultes ont accès moyennant un abonnement mensuel qui permet de consentir des tarifs préférentiels aux enfants et aux étudiants.

En 1993, Circus Eritrea a été fondé et financé par la Fédération des sports, mais l’UNJEE en a repris la responsabilité en 1997. Le but de Circus Eritrea est d’encourager la créativité des enfants et des jeunes et de leur inculquer les valeurs de la coopération, du travail d’équipe, de la compétence et de l’adoption d’un mode de vie sain. Une centaine de jeunes, grâce à l’entraînement auquel ils ont été soumis, ont atteint un niveau de compétence leur permettant de mettre en oeuvre un moyen créatif et original de sensibiliser les jeunes et les enfants érythréens aux problèmes importants du vingt-et-unième siècle. Les messages à caractère éducatif des représentations sont axés sur les traditions et la culture locales, le VIH/SIDA, la santé, l’environnement et les droits de l’enfant. Ces activités ont considérablement aidé les enfants et les jeunes dans les camps de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays et les camps de réinstallation de rapatriés, les étudiants et le public en général.

Jusqu’à présent, ce domaine a beaucoup souffert d’un manque de savoir-faire. Les plans relatifs à la construction d’un établissementd’enseignement artistique et le développement de la littérature grâce à celui, continu, de toutes les langues locales seront prioritaires parmi les activités culturelles. Ces dernières, telles qu’elles sont organisées pour les enfants par l’UNJEE comportent des concours de connaissances générales, des conférences contradictoires, des concours de poésie et des clubs d’enfants. Les bureaux sous-régionaux de l’Union organisent régulièrement des concours. Des clubs culturels et des groupes de musique ou de théâtre sont fondés par l’UNJEE pour les enfants âgés de 10 à 18 ans. Ces clubs et ces groupes proposent des activités de loisir comme la peinture, le théâtre, la musique et la littérature, et participent à l’éducation sanitaire des écoliers ainsi qu’à leur information sur les risques des mines terrestres.

En 1999, l’Union nationale de la jeunesse et des étudiants érythréens a organisé une formation pour 27 marionnettistes débutants concernant les marionnettes à gaine et pour 15 formateurs de marionnettistes, concernant les marionnettes à gaine et les marionnettes géantes, l’écriture des scénarios et la narration. Les formateurs ont immédiatement entrepris de former 97 marionnettistes débutants dans l’ensemble du pays. Des clubs de marionnettes ont été fondés dans trois sous-régions, qui participent à la sensibilisation du public aux problèmes sanitaires et éducatifs (à savoir, l’amélioration de l’éducation des filles, les violences sexuelles contre les femmes, les mutilations génitales féminines, l’avortement et la grossesse non désirée).

Par ailleurs, une association baptisée Le théâtre des enfants de Sewit a été fondé en novembre 1994, avec 18 enfants et 5 coordinateurs ayant 10 à 15 ans d’expérience artistique, à savoir, des dramaturges, des poètes et des musiciens dont l’objectif principal a été de distraire les enfants et, en même temps, de diffuser, auprès des adultes, des informations relatives aux droits de l’enfant.

L’éventail des activités pour les jeunes enfants est moindre que pour les enfants plus âgés et les jeunes. Elles se limitent virtuellement au cadre familial et les enfants n’ont pratiquement aucune possibilité de participer à des activités organisées. Dans les zones rurales, les enfants ont un certain choix de jeux, bien que ceux-ci donnent rarement lieu à des activités structurées ou à des compétitions. Les enfants utilisent presque toujours les ressources du milieu pour leurs jeux, encore que, dans les zones urbaines, les bicyclettes et les ballons de football soient souvent achetées et offertes par les familles et les organisations.

Un centre de production de jouets pour les jardins d’enfants et de matériel récréatif fonctionne depuis 1995, étant donné qu’on ne trouve pratiquement pas de jouets éducatifs bon marché en Érythrée. Ce centre produit et vend des jouets à un prix raisonnable aux jardins d’enfants, aux magasins et aux individus. Plus récemment, l’Association érythréenne des combattants mutilés de guerre a également commencé à fabriquer des jouets à Massawa.

VIII. MESURES SPÉCIALES DE PROTECTION DE L’ENFANCE

A. Les enfants en situation d’urgence

Les enfants réfugiés et les autres enfants déplacés

Il a été question ailleurs, dans le présent rapport, et en particulier dans la partie sur la réunification familiale, des enfants déplacés qui ont été séparés de leurs parents ou qui sont devenus orphelins à cause de la guerre et pour d’autres raisons. Nous allons traiter ici du problème spécifique des enfants en situation de conflit armé et des enfants appartenant à des familles réfugiées.

En raison de la longue guerre d’indépendance, il y a un grand nombre de réfugiés, de personnes déplacées et d’enfants non accompagnés. Selon les estimations, 750 000 Érythréens vivaient hors d’Érythrée, dont environ 400 000 s’étaient installées au Soudan. Depuis l’indépendance, en mai 1991, de très nombreux réfugiés sont revenus en Érythrée de partout dans le monde. Un programme de rapatriement et de réintégration des réfugiés (Programme de la réintégration des réfugiés et de la réhabilitation des zones de réinstallation en Érythrée) a été lancé en 1993. Ce programme pilote a été mis en œuvre à partir de 1994-1995 et a aidé au rapatriement d’environ 25 000 personnes (quelque 4 970 familles) en provenance du Soudan.

Entre 1998 et 2001, plus de 8 770 de ces réfugiés sont rentrés spontanément (c’est-à dire pas dans le cadre des programmes patronnés par l’État), dont 3 861 étaient âgés de 1 à 18 ans, la proportion des filles, dans ce groupe, étant de 50 %. Entre le 12 mai 2001 et le 8 juillet 2002, 51 694 personnes (26 839 femmes et 24 855 hommes) sont revenues en Érythrée dans le cadre d’un programme patronné par l’État, près de la moitié (25 154) étant des enfants âgés de moins de 17 ans.

C’est la Commission érythréenne pour les réfugiés et les secours qui la responsabilité d’ensemble du rapatriement et de la réintégration des réfugiés. Concernant les enfants rapatriés, aucun programme spécifique n’a été offert par le Programme de la réintégration des réfugiés et de la réhabilitation des zones de réinstallation en Érythrée, mais un grand nombre de services sociaux de portée générale, comme les écoles, la santé, l’eau et l’infrastructure, relèvent de la responsabilité des différents ministères de tutelle qui les gèrent dans le cadre de la mise en œuvre normale de la planification régionale. Les services en matière de logement, de fourniture de denrées alimentaires et d’intrants agricoles sont fournis individuellement aux ménages de rapatriés.

C’est un fait reconnu que les enfants qui sont devenus des réfugiés, avec ou sans leur famille, ont probablement beaucoup souffert. Il faut aussi reconnaître que l’ensemble de la population a également enduré des conditions extrêmes pendant la guerre. Ainsi, un grand nombre de réfugiés, bien qu’ils fussent loin de leur patrie, ont échappé à l’horreur qu’ont connue ceux qui étaient obligés de rester dans les zones occupées.

Le problème des enfants séparés de leur famille, en Érythrée, à la suite de plus de deux ans de guerre de frontière (1998-2001), n’a jamais pris une dimension importante en raison des liens familiaux très forts ainsi que du sens des responsabilités et de la solidarité dans les communautés érythréennes. Beaucoup d’enfants séparés de leur famille ont gardé des liens avec leur communauté. En outre, pendant la guerre de libération, un système efficace a été mis au point pour faire face à la situation des enfants vulnérables, orphelins, pour la plupart, et enfants non accompagnés, qui a constitué une base solide pour les travailleurs sociaux capables et bien informés des organisations les plus actives dans le domaine de la protection de l’enfance en Érythrée, à savoir le MTPS et la Commission érythréenne pour les réfugiés et les secours.

Selon une étude concernant les enfants séparés de leur famille dans les camps de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays (septembre 2000), le système de la famille élargie ainsi que l’engagement de la société envers les enfants et l’unité familiale restent très forts en dépit des obstacles énormes créés par la récente guerre de frontière. Les parents n’abandonnent pas et ne délèguent pas facilement à d’autres leurs responsabilités envers leurs enfants, même dans les pires conditions.

Enfants touchés par des conflits armés, avec indication, notamment, des mesures de réadaptation physique et psychologique et de réinsertion sociale prises

L’exposé de macro-politique du gouvernement (1994) comporte une partie relative à la réadaptation des victimes de la guerre et des autres membres vulnérables et défavorisés de la société :

-Les victimes de la guerre verront leurs moyens d’action renforcés de manière nécessaire et suffisante, ainsi que les personnes défavorisées, comme les combattants démobilisés, les réfugiés, les personnes déplacées et d’autres groupes, afin qu’ils puissent devenir des membres productifs de la société ; et

-Des programmes continus de sensibilisation seront mis en œuvre pour améliorer et promouvoir, au sein de la société, la participation à la protection de ces groupes.

Bien que les enfants ne soient pas spécifiquement mentionnés, il est évident que les enfants touchés par la guerre, qui doivent être soignés et réadaptés, font partie des “groupes vulnérables”. Les pouvoirs publics sont conscients du fait que les enfants sont souvent victimes de la guerre et participent rarement ou jamais aux décisions les concernant en tant que tels.

Les pouvoirs publics ont acquis une longue expérience des soins à apporter aux enfants pendant les conflits armés. Ils se sont efforcés de répondre aux besoins les plus urgents des enfants dont ils avaient la responsabilité. Même pendant les pires périodes, les plus nécessiteux d’entre eux ont eu accès aux orphelinats et aux écoles. Les enfants ont pu bénéficier des services d’éducation et de santé, des programmes de nutrition et des équipements de loisirs dans les zones libérées, conformément à la philosophie du FPLE.

Pendant la récente guerre de frontière avec l’Éthiopie (1998-2001), la population frontalière a fui les zones de combats et celles qui étaient occupées par les Éthiopiens à l’intérieur du pays. Au plus fort des hostilités, en mai 2000, lorsque l’Éthiopie a lancé une offensive massive sur plusieurs fronts, le nombre total des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays s’est élevé à près d’un million (1,5 million de personnes ont pâti de la guerre directement ou indirectement). Comme la plupart des hommes jeunes s’étaient engagés dans l’armée, les personnes déplacées étaient essentiellement des femmes (25 %) et des enfants (70 %).

Par ailleurs, entre juin 1998 et la fin de 2001, l’Éthiopie a expulsé de son territoire plus de 75 000 Érythréens et Éthiopiens d’origine érythréenne. Sur les 70 715 personnes enregistrées par la Commission érythréenne pour les réfugiés et les secours, près de 10 % étaient des enfants âgés de moins de 5 ans, et plus de 17 % des enfants âgés de 6 à 12 ans, tandis que 17 % étaient âgés de 13 à 19 ans. En 1999, près de 2 600 enfants (érythréens et éthiopiens d’origine érythréenne) restaient en Éthiopie alors que leurs deux parents avaient été expulsés, et près de 500 enfants avaient été expulsés sans être accompagnés.

Les biens des personnes expulsées avaient été confisqués par l’État éthiopien et elles étaient arrivées en Érythrée avec seulement les affaires qu’elles pouvaient porter. Ces expulsions ont eu lieu en violation des lois nationales et internationales. L’Éthiopie a expulsé un certain nombre de personnes considérées comme “érythréennes”, parmi lesquelles il y avait même des enfants de mariages mixtes (éthio-érythréens), des enfants dont les parents et les grands-parents étaient nés en Éthiopie. Les familles ont été séparées, l’un des parents ou les deux ayant été expulsés sans leurs enfants et sans pouvoir les contacter. Les parents ne savent souvent pas où se trouvent leurs enfants, ni s’ils sont en sécurité. Inversement, les enfants non accompagnés ignorent où sont leurs parents. À la fin de 1999, il restait en Éthiopie 2 600 enfants séparés de leurs parents. Selon l’article 9, paragraphe 1 de la Convention relative aux droits de l’enfant, “les États parties veillent à ce que l’enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré.” La séparation forcée est en contradiction avec la Convention et avec le droit humanitaire. Sur un total de 70 715 personnes expulsées qui ont été enregistrées jusqu’en 2001 par la Commission pour les réfugiés et les secours, 41 238 membres de leur famille ont été portés restant en Éthiopie (19 415 hommes, soit 47 %, et 21 823 femmes, soit 53 %).

Le traumatisme psychologique et social subi par les enfants pendant la guerre est un phénomène très répandu. Le constatant, le Ministère du travail et de la prévoyance sociale a effectué en 1999, en collaboration avec l’UNICEF, une évaluation d’ensemble des besoins psycho-sociaux des enfants d’Érythrée touchés par la guerre. L’équipe qui a procédé à l’évaluation a interrogé plus de 2 000 enfants et leurs parents, voici quelques unes de ses conclusions :

-Les familles urbaines expulsées d’Éthiopie ont perdu tout leur argent et tous leurs biens. Les familles rurales expulsées ont perdu toutes leurs terres et leurs animaux domestiques. Ces groupes sont donc dans le dénuement, complètement dépendants de l’aide de l’État, et sans aucun moyen de pourvoir aux besoins de leurs enfants à l’avenir ;

-Les enfants expulsés d’Éthiopie ont vu des personnes qu’ils connaissaient tourner leurs fusils contre eux et contre leur famille. Les enfants ont vu leurs parents emprisonnés et certains ont été emprisonnés eux-mêmes; et

-Les deux groupes, les personnes déplacées et les expulsés, souffrent de cauchemars, de terreurs nocturnes et de “flashbacks”. Les nourrissons dont la mère a été témoin de violences ont des difficultés d’alimentation, et même dépérissent. Les enfants ont des maux de tête et des maux d’estomac.

L’évaluation a également permis de découvrir :

-que les enfants expulsés d’Éthiopie savaient qu’ils étaient de retour dans leur patrie et, tout indigents qu’ils sont, ils sont en sécurité et ils sont les bienvenus. C’est un grand réconfort pour eux ;

-que les structures communautaires qui ont protégé les personnes de la violence et des crimes tenaient bon et que, à Asmara ou dans les camps des zones rurales pour personnes déplacées, on ne constatait aucune crainte de criminalité, quelle qu’elle soit. Il n’y a pratiquement pas de viols, qui sont l’une des pires conséquences de la guerre, ni dans les campagnes, ni dans les villes. Le tissu social est resté intact. Comme il apparaîtra plus bas, les études faites ultérieurement révèlent que, en mai 1999, lorsque l’Éthiopie occupait certaines parties de l’Érythrée, de nombreuses violences sexuelles ont été commises contre les femmes et les jeunes filles par les soldats d’occupation éthiopiens. L’évaluation relative aux besoins psychosociaux a été effectuée avant cette période et ne rend pas compte de l’impact psychosocial de ces atrocités.

Le MTPS a lancé diverses actions pour faire face aux problèmes causés par le stress et les traumatismes de la guerre, les séparations familiales, les violences, les migrations et leurs effets préjudiciables sur le développement physique et psychologique des enfants. Avec l’UNICEF, il a organisé une formation à l’intention de 32 conseillers qui travaillent auprès des enfants à risque dans des camps de personnes déplacées. Toujours avec l’UNICEF, il a mis sur pied des services de consultation psychosociale pour 23 000 enfants (selon les estimations) dans quatre camps de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays dans la région de Gash Barka, pour les aider à retrouver une vie normale et prévenir d’autres problèmes psychologiques à longue échéance. De plus, du matériel récréatif et des jouets ont été fournis à ces enfants. Le MTPS et l’UNICEF, en collaboration avec le Ministère de l’éducation et l’UNJEE (une ONG locale), appuient les activités récréatives organisées pour les enfants déplacés. En plus des services de consultation psychosociale pour les enfants et les femmes affectés par la guerre, le Ministère du travail et l’UNICEF ont créé des centres d’accueil adaptés aux enfants pour 1 710 élèves de l’enseignement secondaire de premier et de deuxième cycle dans les zones de sécurité temporaire.

Par ailleurs, un groupe de travail inter organisations pour la protection de l’enfance a été constitué d’urgence en mai 2000 afin d’améliorer les échanges d’informations et la coordination des efforts entre les différents organismes concernés de manière à apporter un soutien efficace aux enfants affectés par la guerre. Sont représentés dans ce groupe de travail le MTPS, l’UNICEF, le HCR, la Croix Rouge érythréenne, le CICR, Save the Children-UK, et certaines ONG locales (l’UNJEE, Les citoyens favorables à la paix en Érythrée et l’UNFE). Ce groupe a fait procéder, en septembre 2000, à une évaluation des enfants séparés de leurs parents dans des camps et a suivi les recommandations auxquelles elle a donné lieu. Des réunions continuent de se tenir régulièrement pour échanger des informations sur les divers problèmes relatifs à la protection.

Dans le cadre du programme de réintégration des orphelins dans leur famille élargie, 22 travailleurs sociaux ont été recyclés en 2001 pour effectuer des interventions et apporter des conseils à court et à long terme à caractère psychosocial et culturellement appropriés aux enfants vulnérables. En outre, 163 administrateurs de villages ont suivi une formation pour améliorer la gestion des filets de sécurité traditionnels, tendant à introduire des systèmes communautaires de surveillance et d’évaluation pour le suivi des enfants touchés par les conflits armés, y compris les orphelins de guerre, aux niveaux du village et de la communauté.

Le récent conflit avec l’Éthiopie a eu d’autres conséquences sociales préjudiciables. Comme de nombreux hommes adultes ont participé à la défense nationale, le nombre des foyers avec une femme comme chef de famille s’est accru. Les séparations des familles en raison de la conscription ont également eu des effets négatifs sur le développement des enfants.

Parmi les projets relatifs aux enfants touchés par la guerre, il y a celui qui concerne la zone récréative sécurisée, visant à établir une zone récréative accueillante pour les enfants affectés par la guerre à Senafe, où ils trouveront une stimulation physique, affective et intellectuelle grâce à un environnement qui s’y prête (déminé) afin de les aider à retrouver un mode de vie normal pour des enfants. De plus, cette zone récréative donne une bonne possibilité d’encourager la collaboration intersectorielle (santé, éducation, sensibilisation à la Convention) en vue de mettre sur pied un centre communautaire durable dans le cadre duquel pourront se développer les initiatives relatives à la réadaptation, à la réintégration, à la résolution des conflits et à la consolidation de la paix. Des projets sont en cours d’élaboration pour l’organisation d’une journée consacrée au sport. Ils sont conformes aux articles 31 et 39 de la Convention.

B. Les enfants en situation de conflit avec la loi

Administration de la justice pour mineurs

La nouvelle Constitution a intégré les principes de base de l’administration de la justice pénale, indépendamment de l’âge des accusés. Les droits, les libertés et les devoirs fondamentaux y sont inclus, comme la non-discrimination, la non-rétroactivité, le droit à être entendu par un tribunal au plus tard 48 heures après l’arrestation et le droit d’appel.

Les articles 171-180 du Code pénal provisoire de l’Erythrée définissent également les droits fondamentaux et substantiels, comme celui d’avoir un avocat, le droit de non bis in idem et le droit à la non-rétroactivité de la loi, la présomption d’innocence, le droit à ne pas témoigner contre soi-même et l’égalité devant la loi. Le Code pénal provisoire prévoit aussi diverses mesures de réadaptation et de redressement selon l’âge de l’enfant. Ceux qui n’ont pas encore atteint l’âge de 12 ans ne sont pas considérés comme responsables de leurs actes. Le Code pénal précise que, dans le cas d’un enfant âgé de moins de 12 ans, il revient à la famille, à l’établissement scolaire ou au pouvoir de tutelle de prendre les mesures appropriées (art. 52). Il prévoit également les mesures spéciales et les peines à imposer aux enfants âgés de 12 à 15 ans. Pour ce qui est des enfants âgés de plus de 15 ans, bien qu’ils soient jugés dans le cadre des dispositions générales, le tribunal a le droit, lorsqu’il évalue la sentence, d’adoucir les peines ou d’imposer des peines particulières aux jeunes délinquants. Il est interdit de condamner à la peine capitale des enfants âgés de moins de 18 ans (art. 56 du Code pénal).

En résumé, bien que le droit écrit soit généralement conforme à la Convention relative aux droits de l’enfant, le manque d’établissements adéquats et de ressources humaines fait obstacle à son application.

Une commission ministérielle a été établie après l’indépendance, dont la tâche est de repérer les problèmes et de préparer des propositions permettant de résoudre les problèmes posés par les jeunes délinquants. Elle a effectué, en 1996, une étude à cette fin, sur la base de laquelle a été créé un bureau national pour le traitement des jeunes délinquants. En 1998, ce bureau a établi les directives de travail intitulées “L’administration et le traitement des jeunes délinquants”. Un centre de réadaptation des jeunes délinquants a été construit a Nafka, selon les recommandations des directives. Un seul centre de détention séparé a été mis en place à Asmara. Le MTPS a organisé une formation à l’intention du personnel chargé de faire respecter les droits de l’enfant. Ces stages de formation devraient se poursuivre.

Selon un rapport préparé par le Ministère de la justice, les tribunaux et le ministère public, “le seul moyen adéquat de résoudre les problèmes actuels est de procéder à un examen de chacune des mesures qui existent et à leur apporter sans arrêt des améliorations et des amendements.” Ce rapport établit un “programme” relatif au futur système de justice pour mineurs d’Érythrée, qui prévoit :

a)L’ouverture d’établissements de réadaptation pour jeunes délinquants de préférence à d’autres options relatives au redressement ;

b)L’ouverture d’établissements carcéraux dans les villes et les gros villages pour les jeunes délinquants en attente de jugement ;

c)Que des mesures primaires soient prises afin de mettre en place des tribunaux spéciaux pour les jeunes délinquants. Pour commencer, toutefois, les tribunaux peuvent fixer des jours réservés spécifiquement aux affaires impliquant des jeunes ;

d)Que, compte tenu de la charge de travail qui est la leur, les tribunaux procèdent à une réorganisation des horaires et des journées pour connaître des affaires concernant les jeunes délinquants ;

e)Que tous les articles du Code pénal provisoire de l’Érythrée relatifs aux jeunes délinquants soient regroupés et publiés dans un petit “Code pénal pour les jeunes délinquants”; et

f)Que soit pris en compte le degré de gravité et de complexité des affaires dans lesquelles sont impliqués les jeunes délinquants et que soient établies des règles concernant la manière de les traiter. Ces règlements devraient, à tout le moins, être distribués au ministère public, aux juges et aux responsables de la police.

En rapport avec le “programme” ci-dessus, le MTPS, en collaboration avec les ministères de la justice, de l’intérieur, de l’information, de l’éducation, de la santé et des collectivités locales, a entrepris :

a)De mettre en place un service de probation qui s’efforce de conseiller les jeunes délinquants au sein de leur communauté afin de les aider à s’intégrer dans le milieu social et le milieu scolaire;

b)De construire un centre de redressement et de formation pouvant accueillir un petit nombre d’enfants, cette institution étant destinée à des mineurs ayant commis de graves délits ;

c)De mettre en place des services postcure pour les mineurs qui ont terminé leur temps de probation, d’éducation surveillée ou leur formation , et pour les jeunes délinquants ;

d)De pourvoir à la formation du personnel chargé de l’éducation surveillée ;

e)D’encourager l’amélioration des centres de garde et de détention où les enfants sont gardés en attendant d’être jugés, ou si leurs parents sont introuvables; et

f)D’organiser, en 2001, une formation relative à la justice pour mineurs et à la mise à l’épreuve à l’intention de 53 participants, dont 21 fonctionnaires du MTPS, 19 policiers, et 13 fonctionnaires du Ministère de la justice.

Par ailleurs, les pouvoirs publics de l’Érythrée sont décidés à prendre les mesures nécessaires pour dissuader les enfants et les adolescents de commettre des infractions. Cette “étape de dissuasion” est considérée comme relevant d’abord de la responsabilité de la famille, mais avec le soutien de la société et de l’État si la famille n’est pas capable de faire face de manière adéquate, auquel cas certaines des mesures suivantes s’appliquent, sinon toutes : scolarité gratuite, placement dans un internat public, services prévus pour les orphelins et les enfants des rues.

Les autorités sont tout à fait conscientes du fait que les enfants et les adolescents n’ont pas à leur disposition les activités récréatives dont ils ont besoin et de l’impact de ce manque sur le taux de petite délinquance. Il est question, dans une autre section du présent rapport, des activités récréatives et, en particulier, sportives.

Traitement réservé aux enfants privés de liberté

Selon le Code pénal (art. 53), les jeunes délinquants âgés de 12 à 15 ans reconnus coupables d’une infraction ne doivent pas être incarcérés en compagnie des délinquants adultes. Comme un certain nombre d’autres articles du Code pénal, cette disposition n’est souvent pas appliquée. Les prisons sont fréquemment surpeuplées et les quelques établissements qui existent sont totalement inadéquats. Il n’est simplement pas possible, dans de nombreux cas, sinon dans la plupart des cas, de séparer les enfants des adultes.

En raison du manque d’établissements pénitentiaires et sanitaires adéquats pour mineurs, les enfants, dans le passé, ont dû exécuter leurs peines de prison en compagnie des détenus adultes. Cela est contraire à la sécurité de l’enfant qui, dans ces circonstances, ne peut se développer et mûrir comme la société le souhaite. La construction programmée d’une unité de redressement pour mineurs devrait permettre de résoudre ce problème.

Bien que ce sujet ne soit pas très pertinent en l’occurrence, voici quelques brèves considérations sur la situation des enfants nés de mères incarcérées. Les enfants âgés de moins de 2 ans restent avec leur mère en prison. Si la mère est encore incarcérée au moment où l’enfant a 2 ans révolus, ce dernier est transféré dans un foyer pour enfants où sa mère a le droit de lui rendre visite régulièrement. Il y a toujours très peu d’enfants dans les prisons de femmes (on compte habituellement moins de 100 femmes incarcérées dans l’ensemble de l’Érythrée), cependant, les autorités essaient de leur fournir le nécessaire pour favoriser leur développement naturel.

Peines prononcées à l’égard des mineurs

En ce qui concerne l’application des peines et des mesures de traitement médical, le tribunal, en Érythrée, est tenu d’ordonner le placement du jeune délinquant dans un établissement médical s’il est victime de troubles mentaux, de problèmes de santé ou de handicaps physiques (art. 162 du Code pénal). Ces mesures cessent d’être appliquées si l’autorité responsable constate que leur but a été atteint (art. 167 du Code pénal).

Si l’enfant est victime d’un “abandon moral”, s’il a besoin de soins et de protection, s’il est exposé au danger de corruption ou s’il a été corrompu, le tribunal est tenu d’ordonner des mesures d’éducation surveillée en le confiant à des parents (tuteur ou protecteur) ou à une organisation, selon ce qui convient le mieux au cas. Une autorité de tutelle locale, telle que définie par les dispositions pertinentes du Code pénal, est responsable du contrôle de ces mesures. Des conditions particulières peuvent être imposées, comme la fréquentation régulière d’un établissement scolaire, l’obligation de suivre un apprentissage professionnel, l’interdiction de fréquenter certaines personnes ou certains lieux, ou l’obligation de se présenter devant l’autorité de tutelle à certaines dates (art. 163). La durée de ces mesures est la même que celle qui est mentionnée dans l’article 167.

Le tribunal peut donner une admonestation au jeune délinquant si la chose lui paraît suffire, en tenant compte de la capacité de l’enfant à la comprendre, et si l’infraction n’est pas jugée grave (art. 164). Si l’affaire n’est pas grave et si l’enfant paraît susceptible de se corriger, le tribunal peut ordonner qu’il soit maintenu à l’école ou à son domicile pendant ses heures libres pour y accomplir certaines tâches sous surveillance (art. 165). Le tribunal peut aussi décider de n’ordonner aucune peine s’il s’est écoulé plus de six mois depuis la perpétration de l’infraction et que, dans l’intervalle, des mesures appropriées ont été prises par la famille ou l’autorité responsable (art. 74).

Le tribunal peut ordonner qu’un jeune délinquant soit placé pendant cinq ans au plus dans un établissement de redressement ou de rééducation pour y recevoir un enseignement moral et professionnel, s’il considère que toute autre mesure serait inadéquate pour dissuader l’enfant de commettre d’autres infractions (art. 166). Il peut, en outre, ordonner la mise en liberté conditionnelle assortie d’une mise à l’épreuve et d’une obligation de respecter les règles de conduite établies dans le Code pénal (art. 167). Le tribunal peut moduler sa sentence en fonction des recommandations de la direction de l’institution à laquelle le jeune délinquant est confié (art. 168).

Avant d’imposer l’une des mesures ci-dessus, le tribunal peut demander l’avis d’experts concernant l’état physique et mental de l’enfant ou de l’adolescent et se renseigner pour savoir quelles mesures seraient le mieux adaptées (art. 55). Par ailleurs, le jeune délinquant faisant l’objet des mesures ci-dessus n’est pas considéré comme étant sous le coup d’une condamnation en justice (art. 169).

Une amende ou une peine d’emprisonnement ne peuvent être infligées que dans le cas où les mesures ci-dessus sont inopérantes (art. 170). Une amende ne peut être ordonnée que dans des condition exceptionnelles, et si le délinquant est en mesure de bien en comprendre les raisons. Il faut ajouter qu’elle n’exclut pas des peines complémentaires (art. 171). Une peine d’emprisonnement n’est imposée qu’en dernier ressort, et seulement dans le cas où, si l’infraction avait été commise par un adulte, elle aurait été passible d’au moins 10 ans de réclusion criminelle ou de la peine capitale. La peine d’emprisonnement n’est pas obligatoire, le tribunal étant libre d’imposer une sentence moins sévère. La peine infligée est de trois à cinq ans d’emprisonnement simple, ce qui est beaucoup moins lourd que pour les adultes. Aux termes de la loi, les jeunes délinquants doivent être incarcérés séparément des détenus adultes (art. 173). De grands efforts sont actuellement déployés pour que cette obligation soit respectée, mais ce n’est pas complètement le cas en raison du manque de locaux.

Le délai de prescription applicable aux jeunes délinquants est calculé pour être réduit de moitié par rapport au délai de prescription normal pour un adulte (art. 175). La période de mise à l’épreuve ne peut pas être supérieure à trois ans, ce qui est également considérablement moins sévère que pour les adultes (art. 176).

La loi interdit de publier un jugement relatif à un jeune délinquant, et tous les fichiers de police concernant l’affaire en question sont destinés aux seules fins de l’enquête et ne doivent pas être montrés à des tiers (art. 179 du Code pénal). Les dossiers individuels du jeune délinquant relatifs aux mesures et aux peines imposées peuvent également être détruits à sa demande (art. 178 du Code pénal).

Il y a, dans le Code de procédure pénale, des dispositions qui font en sorte que les enfants soient assurés d’avoir droit à un jugement rapide et équitable (art. 171-180). Pour ce faire, l’article 172 oblige la police, le plaignant, le ministère public ou le tuteur à prendre les mesures nécessaires pour que l’enfant comparaisse immédiatement devant le tribunal de sous-région le plus proche (tribunal de première instance). Le tribunal enregistre la plainte et charge la police de procéder à l’enquête, ce qui ne peut être fait avant que l’enfant ait comparu devant le tribunal. C’est seulement en cas d’infraction grave que le tribunal ordonne au ministère public de dresser un acte d’accusation formel ; autrement, il se passe de cette formalité dans les affaires impliquant des enfants ou des adolescents.

Si l’affaire est renvoyée ou si elle est en attente d’être transférée devant une instance supérieure, il est précisé dans l’article 172 du Code de procédure pénale que l’enfant ou l’adolescent doit être confié à la garde de ses parents, de son tuteur, d’un membre de sa famille ou d’une personne digne de confiance. Le tribunal est obligé de convoquer le père ou la mère ou le tuteur si cette personne n’est pas présente au moment où l’intéressé est amené pour comparaître. Dans le cas où l’infraction supposée est grave, le tribunal doit désigner un avocat si l’enfant ou l’adolescent n’est pas représenté par son père, sa mère ou une personne in loca parentis.

Au sujet de la police des audiences, le Code de procédure pénale prévoit que celles qui concernent les mineurs doivent se dérouler de manière confidentielle et informelle, et en présence des seules personnes requises et/ou ayant intérêt. Quand l’affaire est jugée par la Haute Cour, la présence du ministère public est obligatoire (art. 176 du Code de procédure pénale). Ces audiences ont lieu à huis clos et, si les témoignages ou les commentaires à venir sont susceptibles de ne pas être de nature à être entendus par l’enfant ou l’adolescent, il est demandé à ce dernier de sortir du prétoire.

Si un enfant ou un adolescent, de son plein gré et en toute connaissance de cause, plaide coupable, un verdict de culpabilité sera immédiatement rendu. S’il ne plaide pas coupable, il a le droit de faire convoquer des témoins, de les interroger et de les contre-interroger (art. 176 du Code de procédure pénale). Après avoir recueilli les témoignages, le tribunal peut consulter toute personne qui lui paraît appropriée concernant la personnalité du jeune prévenu. Au moment de l’évaluation de la sentence, le tribunal doit tenir compte de l’âge, de la personnalité, du niveau de développement mental et moral de ce dernier, et des effets que peuvent avoir les mesures susceptibles d’être imposées quant à son redressement (art. 54 du Code pénal et art. 177 du Code de procédure pénale).

Les mesures imposées par un jugement doivent être modulées et modifiées selon l’intérêt supérieur de l’enfant : soit par le tribunal lui-même, soit à la demande de l’intéressé ou de son représentant (art. 8 du Code de procédure pénale).

Les rapports de police indiquent que, entre 1991 et 1997, 1 126 enfants âgés de 12 à 15 ans ont commis des infractions, la plupart étant de menus larcins et des voies de fait liées à des bagarres. Bien que les enfants âgés de moins de 15 ans ne puissent pas être incarcérés, sauf circonstances exceptionnelles, une enquête menée en 1996 par le MTPS a dénombré 28 enfants qui l’étaient, en attente de jugement. Certains d’entre eux avaient commis des infractions répétées, alors que beaucoup étaient emprisonnés parce que leurs parents ou leur famille étaient introuvables. Pendant les trois années de guerre, de 1998 à 2000, le nombre des enfants auteurs d’infractions a été de 5 406, soit en augmentation importante par rapport aux années précédentes, ce qu’expliquent très bien les difficultés socio-économiques auxquelles beaucoup de ménages ont dû faire face.

Les autres enfants auteurs d’infractions ont été confiés à leurs parents en attendant d’être jugés. Dans la plupart des cas, les parents sont également rendus responsables des actions de leurs enfants après le jugement.

Réadaptation physique et psychologique et réinsertion sociale

Beaucoup des enfants qui se trouvent en état de conflit avec la loi ont déjà beaucoup souffert dans la vie à cause de l’éclatement de leur famille, de la mort de membres de cette famille, de difficultés économiques ou, le plus communément, de malnutrition et de maladies. Ils sont souvent sous-alimentés et vivent peut-être dans la rue. Le fait de tenter une réunification familiale et de faire en sorte que cette famille assume la responsabilité régulière de l’enfant est une mesure importante qui contribuera à le faire accepter par la société.

Néanmoins, ce n’est pas toujours facile et de nombreux enfants souffrent en silence. Ceux qui ont beaucoup souffert avant de commettre une infraction sont punis, mais leur situation et les raisons qui les ont poussés à le faire ne sont souvent pas comprises.

C. Les enfants en situation d’exploitation

Exploitation économique, notamment travail des enfants

Le Département du travail du MTPS est responsable de l’application de la législation relative à l’emploi dont relèvent les enfants âgés de 14 à 18 ans. Il est officiellement interdit d’employer un enfant âgé de moins de 14 ans; la déclaration antérieure N° 8/1991 relative au travail ne concernait ceux qui travaillent pour des “membres de la famille” et dans certains secteurs de l’emploi comme le travail domestique et l’emploi autonome. Il en résultait que le travail des enfants, concernant un certain nombre d’emplois, échappait à la compétence de ce département. La nouvelle déclaration N° 118/2001 relative au travail, à la différence de la précédente, couvre le travail domestique. Elle définit l’employé de maison comme étant “une personne employée essentiellement pour effectuer les tâches ménagères, s’occuper de l’entretien de la maison, répondre aux besoins des membres du ménage et assurer leur confort ; le personnel de maison comporte les domestiques, les jardiniers, les gardiens et les chauffeurs.” Le Ministre peut publier des règlements concernant les dispositions de la déclaration qui s’appliquent aux employés de maison (art. 39 et 40 de la déclaration relative au travail).

Il n’a pas été mené d’enquête véritable sur l’exploitation économique des enfants. Cependant, la situation d’ensemble de ceux qui travaillent est claire. Le travail des enfants au sein de la famille est chose courante en Érythrée, où ils y sont tenus depuis leur plus jeune âge. Il y a des justifications économiques à cela; sans le travail des enfants, de nombreuses familles ne pourraient pas survivre. C’est également considéré comme étant utile au plan social ; les enfants doivent apprendre très jeunes à être des membres productifs de la famille, de manière à pouvoir s’assumer et prendre soin d’autres membres de la famille en cas de besoin. Dans les zones rurales, les enfants, à partir de l’âge de 5 ans, gardent le bétail et - surtout les garçons - doivent travailler dans les champs. D’une manière générale, les filles aident aux tâches ménagères, ce qui signifie qu’elles vont chercher l’eau et le bois de chauffe, souvent très loin. Comme les femmes, les jeunes filles font souvent les frais de la dégradation de l’environnement : étant donné la pénurie de bois de feu et la rareté des sources accessibles, elles doivent parcourir de longues distances à pied en portant de lourdes charges.

Le Ministère de l’agriculture a déclaré que le meilleur moyen de résoudre le problème des enfants qui travaillent dans les zones rurales n’est pas d’interdire cela, mais de proposer des alternatives, de sorte que les parents n’obligeront plus leurs enfants à travailler de manière excessive, tout en leur permettant d’aller à l’école. Cette approche est une manière de reconnaître que c’est le système dans lequel ils sont pris qui oblige les parents à faire accomplir par leurs enfants des tâches qui peuvent présenter des dangers.

Le Ministère de l’agriculture met actuellement en œuvre un grand nombre de programmes relatifs aux travaux des habitants des villages, et qui visent à améliorer les pratiques existantes, à lutter contre la dégradation des terres et à préserver le sol et l’eau. Les travailleurs agricoles sont généralement rémunérés en espèce (et non plus selon le principe “vivres contre travail”). L’exécution de ces programmes est surveillée de près, et les adultes sont employés de préférence aux enfants. Malheureusement, ce n’est pas toujours possible, mais le fait que les villageois soient mis en garde contre l’emploi des enfants dans le cadre de ces programmes est une bonne indication que le travail des enfants n’est pas acceptable pour l’État.

Employés de maison et travailleurs ruraux

Dans les villes, de nombreux enfants sont employés comme apprentis dans des boutiques, dans des ateliers, comme ceux où l’on travaille les métaux, ou les garages, et d’autres sont employés de maison. Néanmoins, les inspecteurs ne sont pas assez nombreux pour couvrir tous les secteurs. Ils se consacrent surtout à ceux où ils considèrent qu’il y a le plus de risques pour les enfants. En ce cas, ils prennent immédiatement des mesures leur interdisant de continuer à travailler.

Aucune recherche n’a encore été menée sur les enfants employés de maison. Selon un rapport datant de 1994, les informations à ce sujet sont contradictoires, certains informateurs considérant que ce n’est pas un problème majeur, d’autres estimant qu’un grand nombre de jeunes filles âgées de 10 à 16 ans exercent ces fonctions. Une ONG locale, l’UNFE, indique que les enfants sont souvent envoyés dans des familles en ville par des parents qui vivent à la campagne ou que des enfants travaillent en ville dans des familles auxquelles ils n’appartiennent pas. Ils font apparemment de longues journées pour un salaire dérisoire et vont rarement à l’école. Selon d’autres sources, ces enfants sont mieux lotis que beaucoup d’autres, parce qu’ils sont en général bien traités par la famille dans laquelle ils travaillent et ont la possibilité d’aller à l’école. La déclaration relative au travail ne concerne pas, actuellement, ce groupe d’enfants parce qu’il ne s’agit pas d’un emploi agréé. Officiellement, les employés de maison peuvent porter plainte devant le tribunal civil, mais il est peu probable que la plupart d’entre eux le sachent, et ce droit n’est certainement pas exercé régulièrement.

Les enfants employés dans le secteur rural, à garder les troupeaux ou à aider aux travaux des champs, sont souvent dans la même situation que ceux qui sont employés de maison. Il sera difficile d’en connaître vraiment le nombre et les conditions dans lesquelles ils travaillent; il est souvent difficile de savoir si un enfant appartient ou non à une famille, s’il est vraiment “employé” et s’il reçoit une rémunération.

Petits commerçants, vendeurs des rues et “enfants des rues”

En 1992, les municipalités d’Érythrée ont lancé une campagne pour décourager les vendeurs des rues non autorisés. Depuis lors, tous les commerçants et les vendeurs doivent avoir une autorisation. Le résultat immédiat de cette campagne a été la disparition de tous les enfants qui travaillaient dans les rues. Jusqu’en 1998, on en voyait très peu vendant dans les rues, mais, à la suite de la guerre de frontière, en 1998, leur nombre a considérablement augmenté.

En 1992, une enquête a été réalisée sur les enfants des rues en Érythrée; en dépit de l’application des recommandations, ce problème persiste. Le MTPS a effectué une analyse de leur situation en 1999. Cette étude, qui a été menée dans 65 grandes villes et villes moyennes, a donné lieu a des entretiens avec 3 002 enfants, 278 parents et 146 enquêtés clés. Les enfants étaient âgés de 6 à 17 ans, l’âge de la majorité se situant entre 9 et 14 ans; 74 % étaient des garçons et 26 % des filles.

Ce qui pousse les enfants à aller dans les rues, c’est la nécessité de survivre et de trouver des ressources pour eux-mêmes et pour leur famille. On pense qu’ils s’y livrent à un petit commerce, comme la vente de chewing gum et de cigarettes, sont cireurs de chaussures ou sont devenus mendiants. La majorité d’entre eux, 87 %, travaillent dans les rues pendant la journée et rentrent chez eux le soir; juste un peu plus de 8 % travaillent et vivent dans les rues et 4 % dorment tantôt dans les rues et tantôt chez eux. Leur nombre, dans les grandes villes et les villes moyennes, est estimé à 7 000. Cette étude a révélé que les deux tiers des enfants des rues poursuivent leur scolarité, travaillent comme revendeurs et vivent avec leurs parents, la plupart étant alphabètes. Depuis la guerre de 1998, il est extrêmement probable que le nombre des enfants des rues a beaucoup augmenté eu égard au nombre de personnes expulsées d’Éthiopie et de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays qui gagnent les centres urbains.

En 2002, le MTPS a organisé la formation de 21 travailleurs sociaux dont la responsabilité particulière est de mettre en œuvre les programmes relatifs aux enfants des rues. Le tableau ci-dessous montre une partie de l’aide qui a été apportée, entre 1993 et 2002, à ces enfants et à ceux qui travaillent.

Tableau 9

Aide aux enfants des rues et aux enfants qui travaillent, 1993-2002

Année

Scolarisation

Études secondaires

Université

Enseignement technique

Formation professionnelle

Appui familial

Séminaire

1993

100     

-

-

-

20       

100  

-

1994

540     

-

-

-

30       

540  

-

1995

747     

-

-

-

48       

747  

-

1996

761     

57     

-

-

70       

761  

-

1997

770    

81     

-

-

75       

770  

-

1998

769     

95     

2

-

84       

854  

-

1999

783     

124     

2

2

85       

783  

-

2000

812     

136     

3

-

88       

60  

1 700  

2001

2 020     

113     

1

1

158       

64  

2 005  

2002 a

1 887     

-

-

-

161       

280  

300  

Total

9 189     

610     

8

3

819       

4 959  

4 005  

a Les chiffres de 2002 sont incomplets.

Les raisons pour lesquelles les enfants aboutissent dans la rue en Érythrée sont essentiellement d’ordre économique et social. Ce sont les suivantes :

Les familles sont dans la détresse, familles divorcées, familles sans revenus et familles sans gestion véritable ;

Les parents de ces enfants sont handicapés ou les enfants sont handicapés eux-mêmes;

Les catastrophes naturelles ou les catastrophes causées par l’homme;

L’orphelinage; et

Certains enfants des zones rurales sont envoyés chercher du travail en ville.

Bien que le nombre d’enfants des rues, pourrait-on dire, est relativement faible à la campagne, les pouvoirs publics sont décidés à faire en sorte que la situation n’empire pas pour devenir semblable à celle de beaucoup d’autres pays. Le MTPS gère un programme de réadaptation des enfants des rues destiné à encourager ceux-ci à réintégrer leur famille ou, si cela n’est pas possible, à trouver un autre moyen de les arracher à ce milieu et de leur permettre de reprendre leurs études ou un emploi.

Les mesures mises en place par le Programme de réadaptation des enfants des rues sont les suivantes :

Intégration de 697 enfants dans l’enseignement scolaire en leur apportant, par l’intermédiaire de leur famille, une aide mensuelle sous forme d’uniformes scolaires, de matériel scolaire et d’espèces pour leurs frais quotidiens de subsistance ;

Formation professionnelle permettant aux enfants d’acquérir des compétences les mettant en mesure de subvenir à leurs propres besoins. En 2001, 300 enfants ont été diplômés au terme de divers stages de formation professionnelle, comme la fabrication de chaussures et la formation dans le domaine de la mécanique et de l’électricité. Le Programme de réadaptation des enfants des rues offre à ceux qui suivent une formation professionnelle une ration alimentaire quotidienne, des vêtements et des chaussures ;

En 1994 a démarré, en collaboration avec le Ministère de l’information, un programme consistant à utiliser les bénéfices réalisés par la vente de journaux au profit des enfants des rues. Ces derniers ont la responsabilité, soit de livrer les journaux à bicyclette, soit de les vendre dans la rue. Dans un certain nombre de villes, les journaux sont vendus dans des boutiques privées, mais la moitié des bénéfices va aux enfants des rues; et

En 2001, 1,500 familles d’enfants des rues ont reçu une aide économique sous forme d’activités rémunératrices qui leur ont permis de mieux soutenir leurs enfants.

Afin de rendre plus efficace le Programme de réadaptation des enfants des rues et d’améliorer, d’une manière générale, la compétence du personnel du MTPS, 23 “éducateurs des rues” ont suivi un stage de formation de six mois jusqu’en mai 2002.

De nombreux enfants ne peuvent aller à l’école en raison de la situation économique de leur famille. Le programme d’appui éducatif apporte aux enfants des rues un soutien financier et en nature pour les aider à retourner à l’école. Au cours de l’année scolaire 2002/02, 3 000 d’entre eux ont reçu cet appui qui a fait l’objet d’une collaboration entre le MTPS et le Ministère de l’éducation. C’est ainsi que les cahiers, les stylos et les crayons ont été achetés et distribués aux bénéficiaires.

En conclusion de l’étude de 1999, il a été recommandé de traiter les problèmes relatifs aux enfants des rues à trois niveaux, en insistant particulièrement sur les activités ci-dessous :

a)Adoption de mesures concrètes visant en priorité à lutter contre la pauvreté, qui est à la base de cette situation, et de diverses mesures législatives de protection des enfants ;

b)Prévention grâce à la sensibilisation des parents et des enfants, à la participation, de la collectivité, à la recherche et à des programmes d’intervention précoce, en particulier dans les zones les plus pauvres ;

c)Réinsertion grâce à la réunification familiale, si possible, participation active de la collectivité et des parents ; il faut répondre au besoin de l’ensemble de la famille; les enfants qui ne peuvent pas être réintégrés dans leur famille seront placés dans des foyers d’hébergement ou dans des familles d’accueil ; promotion et défense de la cause et pression organisée ; et

d)L’étude indique que 5 % des enfants ont déclaré que leurs parents étaient décédés, et 8 % qu’ils étaient obligés d’aider leur famille, mais le VIH/SIDA ou la possible contamination des enfants n’y apparaissent pas comme des raisons pour lesquelles ces derniers sont dans les rues. Comme cela a été vu dans d’autres pays, il y a souvent un rapport étroit entre la vie dans la rue et le VIH/SIDA à cause de la vulnérabilité des enfants des rues à la contamination par le virus. Les programmes à venir doivent tenir compte de cela.

Le secteur non structuré et les usines

Il n’est pas rare de placer les enfants chez des artisans et dans des usines. On considère en général qu’ils y sont bien traités, quoique cela n’ait pas fait l’objet d’une enquête adéquate.

Usage de stupéfiants

Une enquête de 1996 sur la délinquance juvénile a révélé qu’un nombre relativement faible, mais non négligeable, d’enfants usaient de certaines substances qui étaient dommageables pour leur santé. Sur un échantillon de 305 d’entre eux, environ 10 % ont reconnu qu’ils fumaient des cigarettes, 3 % qu’ils buvaient de l’alcool et 3 % ont admis l’abus d’autres substances, reconnaissant qu’ils “sniffaient” du benzène ou qu’ils mâchonnaient du chat (deux moyens de faire passer la faim). L’article 510/3/b du CPTE interdit la vente de drogues. Le tribunal peut prononcer une peine de réclusion criminelle de cinq ans au plus et infliger une amende de 30 000 nakfa au maximum à toute personne ayant fourni, par cupidité ou pour tout autre motif répréhensible, une substance toxique interdite à un enfant ou à un adolescent.

Exploitation sexuelle et violence sexuelle

La loi prévoit qu’une lourde peine doit être infligée à toute personne qui se rend coupable de l’exploitation sexuelle d’un enfant. Les articles 594-599 du Code pénal disposent qu’il est interdit d’accomplir un acte sexuel sur la personne d’un enfant ou devant un enfant, ou d’encourager un enfant à accomplir un acte sexuel sur la personne d’autrui ou avec d’autres personnes. Si la victime est un ou une élève de l’auteur de cet acte, ou est confié aux soins de ce dernier, y compris comme stagiaire ou interne, ou bien si elle travaille pour lui, il y a matière à alourdir la peine. Bien que la loi condamne aussi sévèrement l’exploitation sexuelle des enfants, il est rare que ceux-ci, ou leurs tuteurs, exercent leur droit de porter plainte.

Ceci est dû en partie au fait qu’on sait très peu de choses sur la prostitution des mineurs ou sur la violence sexuelle contre les enfants en Érythrée. L’enquête nationale la plus récente sur les professionnel[le]s du sexe réalisée par le MTPS en 1999 a révélé que, sur les 4 579 professionnel[le]s du sexe identifié[e]s, 225, soit 5 %, étaient des enfants âgés de 14 à 17 ans, et que 20 % entraient dans la profession entre l’âge de 14 et de17 ans, après avoir commencé comme enfant des rues ou serveuse de bar. La première raison invoquée pour expliquer leur choix est la volonté d’essayer d’échapper à la pauvreté. Il a également été constaté que le fait d’avoir été séparé[e] de ses parents très jeune en est un des facteurs. Les raisons de cette séparation sont le désir de trouver un meilleur emploi ou d’éviter un mariage précoce, le divorce des parents, la violence familiale et le rejet de la part des parents si la fille est enceinte, et la pression du groupe. Étant donné ces informations, il est probable que les mineures continuent à entrer dans la prostitution. Les jeunes professionnelles du sexe forment un groupe potentiellement vulnérable parce qu’elles sont souvent “invisibles” au public. Les filles ont un statut d’infériorité dans la société érythréenne, elles ont un accès limité ou inadéquat à l’éducation, subissent la prévalence de pratiques traditionnelles nocives, comme les mariages précoces et les mutilations génitales féminines.

Toutes les professionnelles du sexe connues, y compris celles qui sont âgées de moins de 18 ans, sont tenues d’être enregistrées par la municipalité locale. Elles doivent passer un examen médical mensuel et celles qui ne se plient pas à cette obligation sont punies. Pourtant, l’enquête de 1999 a permis de constater que leur vulnérabilité aux maladies sexuellement transmissibles, dont le VIH/SIDA, s’est accrue par le fait que seules un tiers des enquêtées utilisaient régulièrement des préservatifs et que 6 % n’utilisaient jamais aucune forme de protection. La stigmatisation sociale affecte leur santé affective et limite leur potentiel de développement. Beaucoup de celles qui ont été interrogées ont déclaré qu’elles étaient victimes de violence et d’abus fondés sur le sexe.

Depuis la guerre de frontière de 1998 et les expulsions d’Éthiopie des personnes d’origine érythréenne qui ont suivi, les déplacements internes, le grand nombre de jeunes hommes et de jeunes femmes (chefs de famille) qui accomplissent le service militaire, la présence d’un important personnel de maintien de la paix des Nations Unies ont fait que le nombre des professionnelles du sexe a considérablement augmenté. Il y a là un nouveau groupe de jeunes filles qui, souvent, ne sont pas connues de la municipalité et qu’il n’est donc pas facile d’identifier et d’aider.

Le MTPS considère que l’une de ses priorités est de faire respecter la loi dans ce domaine ; il a, à cette fin, préparé le projet de loi sur les enfants érythréens et de plan national d’action en vue de la réinsertion des professionnel[le]s du sexe, qui est actuellement à l’examen au Ministère de la justice. Une fois adopté, ce texte sera un outil efficace pourdétourner les enfants du commerce du sexe.

Le MTPS et l’UNICEF travaillent en collaboration étroite à la réinsertion des jeunes professionnelles du sexe en leur donnant accès aux services sanitaires et psychosociaux et en s’occupant de leur formation professionnelle et de leur placement. En 2001-2002, le MTPS a également organisé des séminaires de sensibilisation qui ont compté 4 015 participants : notables, professionnel[le]s du sexe, représentants des ONG et des ministères concernés.

On dit souvent que la violence sexuelle familiale est inconnue en Érythrée, cependant, comme aucune recherche n’a été effectuée à ce sujet, il est difficile de conclure qu’elle n’existe pas.

Il n’en demeure pas moins que diverses lois coutumières traitent de l’inceste et prévoient des châtiments sévères à l’égard des coupables. À titre d’exemple, la loi Adkeme Mlgae dispose qu’un homme convaincu d’inceste perd son droit à la terre (c’est-à-dire à gagner sa vie) et à occuper un emploi public.

Il semblerait que, parfois, les enseignants se rendent coupables d’abus sexuels sur la personne de leurs élèves en échange d’un passage en classe supérieure ; des abus sexuels auraient également lieu dans d’autres institutions, comme les orphelinats. Dans la mesure où aucune enquête n’a été réalisée à ce sujet, il est difficile de vérifier cela, et il est possible que ce ne soient que des rumeurs. Les employées de maison apparaissent également comme pouvant fort bien faire l’objet d’abus sexuels ; nous ne possédons, cependant, aucune information sur une possible exploitation sexuelle d’employées de maison mineures.

Beaucoup de jeunes filles ont été violées par les soldats éthiopiens pendant la guerre de frontière. Le viol était un crime courant dans les territoires occupés entre mai 1999 et 2000. On ne traite pas ouvertement des viols dans la société érythréenne : en général, les familles des jeunes filles qui ont été violées les protègent, et les incidents sont gardés secrets en raison de la honte qui frappe les proches de celle qui en est victime. Dans la plupart des familles érythréennes, la virginité est une condition préalable au mariage, et, par conséquent, le viol est considéré comme déshonorant pour l’intéressée et sa famille. La victime ne peut souvent plus se marier et devient un “fardeau” pour les siens. Une enquête a été menée par une ONG locale (Les citoyens pour la paix) et le Ministère de l’intérieur sur la fréquence des viols pendant la guerre de frontière, mais aucune recherche systématique n’a été effectuée sur les traumatismes subis par ces jeunes filles et leurs conséquences. Aucune mesure importante n’a été envisagée à ce sujet, car les priorités, pour les autorités, sont le logement, l’alimentation, la réunification familiale et l’éducation dans les zones affectées par la guerre.

Vente, traite et enlèvement d’enfants

Il n’existe aucune preuve matérielle de l’existence de la vente, de la traite ou de l’enlèvement d’enfants; ce n’est pas un problème grave en Érythrée.

D. Les enfants appartenant à une minorité ou à un groupe autochtone

L’égalité de tous les Érythréens, des groupes ethniques ou des nationalités, y compris les enfants, est un des principes de base au nom desquels le FPLE a gagné la guerre de libération. Il est admis que tous les Érythréens, quels que soient l’ethnie, la religion ou le type de groupe autre auxquels ils appartiennent, ont droit au respect et à la pleine réalisation de leur potentiel humain.

La population érythréenne est culturellement et linguistiquement hétérogène, composée de neuf ethnies principales. Les deux plus importantes sont les Tigrinya, qui vivent dans les régions montagneuses du centre, et les Tigre, qui vivent principalement au nord. Les sept autres groupes ethniques sont plus petits; il s’agit des Saho, des Afar, des Hedarib, des Bilen, des Kunama, des Nara et des Rashaida. La répartition de ces ethnies, dont chacune a sa langue propre, apparaît dans le tableau ci-dessous :

Tableau 10

Répartition par ethnies

Ethnie

Pourcentage

Tigrigna

50

Tigre

31

Saho

5

Afar

5

Hedareb

2,5

Bilen

2,1

Kunama

2

Nara

1,5

Rashaida

0,5

La préservation de la langue est peut-être la première mesure et la plus importante pour que soit assurée l’égalité de toutes les ethnies. Selon la nouvelle Constitution de l’Érythrée, “l’égalité de toutes les langues érythréennes est garantie.” Pour les groupes linguistiques minoritaires d’Érythrée, il s’agit là d’une affirmation importante. Tous les enfants ont actuellement la possibilité de recevoir un enseignement de base dans leur langue maternelle, encore que les communautés puissent effectivement choisir une autre langue, pour l’instruction élémentaire, si elles le désirent.

IX CONCLUSIONS

L’Érythrée doit faire face à des obstacles très importants en ce qui concerne le bien-être des enfants, car 30 ans de guerre d’indépendance et la récente guerre de frontière, les sécheresses et les famines ont aggravé des conditions déjà difficiles.

Les recherches effectuées pour l’élaboration du présent rapport font apparaître que d’importants progrès ont été réalisés depuis l’indépendance, dont la baisse du taux de mortalité infantile de 72 pour 1 000 naissances vivantes en 1992 à 48 en 2002, et du taux de mortalité des moins de 5 ans de 140 pour 1 000 naissances vivantes en 1992 à 93 en 2002 (l’un des plus bas d’Afrique). Il faut tout-de-même noter que d’autres indicateurs de base sont toujours parmi les pires du monde : le taux de mortalité lié à la maternité est encore de 985 décès pour 100 000 naissances vivantes, soit l’un des plus élevés de l’Afrique subsaharienne, 89 % des filles âgées de 7 ans ont subi des mutilations génitales féminines (MGF) ; les niveaux d’alphabétisation, l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, et les niveaux de revenus sont très insuffisants.

En outre, la guerre, les expulsions, la sécheresse et les famines qui en sont la conséquence, ainsi que le faible développement, ont indubitablement entraîné une augmentation du nombre d’enfants ayant besoin de mesures de protection spéciale. La guerre de 1998-2000 et la sécheresse ont provoqué une crise humanitaire très importante; elles ont également perturbé les plans et les programmes nationaux, y compris ceux qui étaient relatifs aux enfants vulnérables. Non seulement il faut répondre aux besoins essentiels de la population, mais il faut également faire face aux problèmes causés par les séparations familiales : traumatismes de guerre, blessures de guerre et handicaps. En raison de la destruction et du minage des villes et des villages, la reconstruction des bâtiments et le retour des familles seront lents et onéreux alors que les ressources financières et humaines sont plus que jamais sollicitées et loin de suffire.

La rédaction d’une nouvelle Constitution a été l’une des premières et des plus importantes tâches du gouvernement. Il a fallu longtemps pour y parvenir parce que toute la population a été invitée à participer aux débats, aux discussions et à faire des suggestions.

La nouvelle Constitution et les politiques sur lesquelles les pouvoirs publics fondent leurs programmes actuels sont fermement enracinés dans les principes de justice sociale et de démocratie.

Le rapport qui existe entre la situation sociale et économique des femmes et le bien-être des enfants est bien compris. Il en découle que les programmes comme ceux qui concernent l’alphabétisation des femmes ou les activités rémunératrices ont des conséquences directes importantes sur les enfants. Bien que les femmes du FPLE fussent tout près de faire sauter les barrières de la discrimination fondée sur le sexe, la situation n’est plus la même en temps de paix. Il faudra longtemps pour améliorer la situation des femmes dans l’ensemble de la population érythréenne. Les enfants vivants dans les foyers érythréens tireront des bénéfices de la participation accrue des femmes et de l’amélioration de leur protection juridique

Il faut ajouter que la guerre a alourdi les tâches qui pèsent sur les femmes et les jeunes filles, surtout dans les zones rurales, concernant à la fois la reproduction et la production; il y a de plus en plus de ménages ayant de facto et de jure une femme à leur tête, et les femmes et les enfants, particulièrement les petites filles, ont eu à supporter ou continuent à supporter, dans ces domaines, des fardeaux extrêmement lourds.

En ce qui concerne les pratiques traditionnelles nocives et le parti pris sexiste, l’inertie de la tradition est souvent extrêmement forte et résistante au changement; néanmoins les pouvoirs publics déploient beaucoup d’efforts pour lutter contre cela.

La mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant suit son cours; un certain nombre de groupes travaillent pour l’appuyer, dont le Comité de la Convention relative aux droits de l’enfant, le Projet de développement de la petite enfance, le Groupe de travail relatif à la protection de l’enfance, l’UNJEE et l’UNFE.

De nombreux programmes concernant les enfants recouvrent un certain nombre de ministères ou de niveaux au sein de l’État, et cette approche transsectorielle est considérée comme importante dans de nombreux cas; cependant, il est également reconnu qu’il y a eu des problèmes quand la responsabilité de programmes donnés n’était pas clairement définie. La restructuration effectuée par le gouvernement devrait permettre de remédier à cela et de décentraliser de manière importante les structures de l’État. Les organismes régionaux devraient se voir confier beaucoup plus de responsabilités à l’avenir, et il est prévu qu’il en émergera un système bien mieux à même de répondre aux besoins locaux.

La restructuration et la nouvelle définition des responsabilités auxquelles les pouvoirs publics doivent se livrer établiront les bases d’une économie et d’une société plus fortes. Les problèmes relatifs aux enfants, en particulier concernant la santé, l’éducation et la protection sociale, sont traités autant que possible en priorité, et la situation des enfants ne peut que s’améliorer dans une nation compétente et autonome.

Lorsque le projet de loi sur l’enfance sera adopté, la base de la protection juridique de l’enfant sera en place. C’est une condition préalable très importante à la mise en œuvre complète de la Convention. Bien entendu, les garanties juridiques en soi ne sont pas suffisantes et il est nécessaire de comprendre ces objectifs optimaux et de les adapter à la capacité réelle d’action et aux ressources humaines disponibles; or, l’Érythrée souffre actuellement d’un déficit de ressources. On constate l’existence d’une foi puissante et raisonnable dans la tâche de reconstruction et de développement de la nation à laquelle se consacrent les responsables, qui permet de surmonter beaucoup d’obstacles. Mais il y a des limites qu’il convient d’admettre avec réalisme.

Comme il a été expliqué en détail dans le présent rapport, une grande partie des progrès réalisés concernent les enfants érythréens touchés par la guerre. L’engagement de l’Érythrée envers sa jeune génération s’est révélé fort, et il ne peut sortir de tout cela que des enfants plus sains, mieux éduqués et plus heureux, aptes à relever avec confiance les défis de l’âge adulte.

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