Communication présentée par :

K. B. (non représentée par un conseil)

Au nom de :

L’auteure

État partie :

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord

Date de la communication :

17 octobre 2016 (date de la lettre initiale)

Références :

Communiquée à l’État partie le 4 novembre 2016 (non publiée sous forme de document)

Date de la décision  :

4 novembre 2019

Renseignements d’ordre général

L’auteure de la communication est Mme K. B, de nationalité allemande, née en 1960. Elle affirme que le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord a violé les droits que lui confèrent les articles 1, 2, 5, 9, 11, 15 et 16 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour le Royaume-Uni le 17 décembre 2004.

Rappel des faits présentés par l’auteure

L’auteure est arrivée au Royaume-Uni en 1997 et y a rencontré son futur mari, de nationalité britannique, en 1999. Ils se sont mariés en octobre 2002 et elle a donné naissance à leur premier enfant. En 2005, elle a donné naissance à leur deuxième enfant. Des complications sont apparues lors de l’accouchement et elle a reçu un traitement en Allemagne, mais elle n’a pas convenablement guéri. En 2008, elle a décidé de tenter un nouveau traitement en Allemagne et y a emmené les deux enfants à cette occasion. Le mari s’est rendu en Allemagne et est rentré avec les enfants au Royaume-Uni pendant l’hospitalisation de l’auteure. Alors qu’il était censé les ramener en Allemagne après la sortie de l’auteure de l’hôpital, il l’a informée qu’il n’avait pas l’intention de le faire. Il lui a également conseillé de ne pas retourner au Royaume-Uni et l’a informée qu’il avait demandé le divorce.

Peu après, l’auteure s’est rendue au Royaume-Uni. Elle a découvert qu’entre-temps, la mère de son ex-mari et le nouveau mari de la mère avaient emménagé dans sa maison familiale et y vivaient avec son ex-mari. Ce dernier a refusé de la laisser entrer dans la maison. Une connaissance présente sur les lieux a appelé la police, mais a été informée que l’auteure devait résoudre « cette affaire familiale » avec l’aide d’un solicitor (conseil juridique).

L’auteure a demandé au tribunal du comté de Chester l’autorisation de se rendre en Allemagne avec ses enfants. La première audience a eu lieu deux semaines plus tard. Le mari de l’auteure a formé une requête tendant à l’obtention d’une ordonnance d’occupation (c’est-à-dire en vue de priver l’auteure de son droit d’occuper la maison familiale). Le tribunal a rejeté cette requête et a autorisé l’auteure à retourner au domicile familial. L’auteure est restée dans la maison, avec ses effets personnels dans des sacs poubelles, pendant près d’un an. Entre-temps, le mari lui a rendu la vie difficile. Il a essayé de la faire tomber de l’escalier, lui a jeté des objets, a coincé son bras dans la porte et la laissait souvent dehors. Les actes de naissance des enfants et les documents personnels de l’auteure ont disparu. L’auteure a été empêchée d’utiliser son ordinateur et son véhicule.

L’ambassade d’Allemagne à Londres a apporté un soutien financier à l’auteure, mais n’a pas pris en charge les frais de justice. L’auteure a reçu une aide juridictionnelle, mais les crédits affectés au système d’aide juridictionnelle du Royaume-Uni ont été considérablement réduits entre-temps et elle n’avait pas les moyens de payer les services d’un avocat.

En juin 2009, une audience s’est tenue sur la requête de l’auteure tendant à obtenir l’autorisation de déménager en Allemagne avec les enfants. D’après l’auteure, le juge était partial, car il était un des grands amis de son ex-mari. En conséquence, il n’a pas retenu les griefs formulés par l’auteure contre le mari et l’a plutôt accusée de ne pas être coopérative. L’auteure était obligée de quitter le domicile familial une semaine sur deux.

En juin 2009, l’auteure a été autorisée à se rendre en Allemagne avec ses enfants. Son fils cadet a contracté de fortes douleurs abdominales et elle en a informé son mari et les avocats de ce dernier. L’auteure affirme que le juge a tenu une audience sur l’affaire sans l’en informer et n’en a pas non plus informé ses avocats et l’International Child Abduction and Contact Unit a été saisie de l’affaire. Le juge a ordonné le retour immédiat des enfants, mais a annulé par la suite son ordonnance lorsqu’il a été informé que l’auteure avait en fait pris contact avec son ex-mari et les avocats de l’intéressé à ce sujet. L’ex-mari s’est plaint à l’employeur de l’auteure et elle a perdu son emploi en conséquence.

En juin 2010, le juge a statué sur la requête déposée par l’auteure en 2008 aux fins d’obtenir l’autorisation de déménager avec les enfants en Allemagne. Le juge a rejeté la requête, au motif qu’il était crucial pour les enfants d’avoir des contacts avec leur père et important qu’ils maintiennent leurs compétences linguistiques en anglais. Le juge a fondé sa décision, d’après l’auteure, sur un rapport très controversé établi par un travailleur social du Children and Family Court Advisory and Support Service (CAFCASS), le service consultatif et de soutien auprès des tribunaux pour les questions concernant les enfants et leurs familles. En même temps, les contacts entre les enfants et leur mère ont été considérés comme non importants et la nécessité de maintenir leurs compétences en allemand n’a jamais été reconnue.

L’auteure affirme qu’en 2010, le juge a également ordonné la vente du domicile familial pour permettre au mari de payer ses avocats. Le divorce de l’auteure a été prononcé en 2010. Le juge a ordonné un système de garde qui obligeait les enfants à passer une semaine avec leur mère et la semaine suivante avec leur père. Il a averti l’auteure qu’au cas où elle ferait objection à cette formule, il accorderait la garde exclusive au père. L’auteure fait état de difficultés rencontrées à cet égard telles que le refus du père de suivre les instructions médicales concernant le traitement des enfants et de les amener à des visites médicales. Il ressort d’un rapport établi par le CAFCASS en octobre 2010 que les enfants n’étaient pas d’accord avec le système de garde.

Or ce rapport n’a pas été pris en compte lors de l’examen de la demande déposée par l’auteure devant le tribunal en 2011 aux fins de modification du système de garde pour laisser les enfants vivre au domicile principal avec elle et accorder au père le droit de visite. L’examen de la demande a été initialement confié au même juge en avril 2011. L’avocat de l’auteure a demandé au juge de se récuser, en raison des observations que ce dernier avait faites sur l’affaire et du fait que de toute évidence il n’avait pas lu la requête. En conséquence, le juge a renvoyé l’affaire devant un juge de Liverpool.

Le nouveau juge a examiné toutes les allégations de l’auteure faisant état de mauvais traitements infligés par son mari à elle et aux enfants. Il a informé l’auteure que l’évaluation des faits pourrait prendre jusqu’à deux ans. Entre-temps, le CAFCASS a jugé qu’il convenait que les enfants restent auprès des services sociaux. L’auteure a décidé de retirer la plainte qu’elle avait déposée pour mauvais traitements, afin de protéger les enfants. Sa requête en réexamen des modalités du système de garde a été rejetée et il lui a été interdit de former de nouvelles requêtes devant les tribunaux anglais. L’auteure a tenté en vain d’interjeter appel de cette décision.

En 2011, l’ex-mari de l’auteure a continué de la menacer et de la martyriser à chaque occasion. De plus, en juin 2012, époque où son plus jeune enfant avait des difficultés à aller aux toilettes, ce dernier l’a informée que son père mettait toujours un doigt dans ses fesses quand il allait aux toilettes et que c’était douloureux. En juillet 2012, l’auteure a amené ses enfants en Allemagne. Elle a commencé à travailler dans une école privée à Francfort et ses enfants y ont été inscrits et étaient très heureux, selon les informations reçues de leurs professeurs.

En mars 2013, un tribunal allemand a ordonné le retour des enfants au Royaume-Uni sans leur donner la possibilité de s’entretenir avec un juge, bien que les services allemands de protection de l’enfance aient parlé aux enfants et consigné leur souhait de rester en Allemagne et leurs déclarations concernant les sévices qu’ils avaient subis. Le retour forcé des enfants leur a causé un traumatisme supplémentaire. Les allégations de mauvais traitements portées par les enfants n’ont pas fait l’objet d’enquête en Allemagne, les autorités allemandes ayant conclu que les enquêtes devaient être menées par les autorités du Royaume-Uni. L’auteure a été informée par le bureau des services à l’enfance de Chester qu’il ne mènerait pas d’enquête, au motif que les autorités allemandes avaient probablement déjà enquêté sur l’affaire et conclu que les allégations étaient sans fondement, sinon les enfants n’auraient pas été renvoyés au Royaume-Uni.

Dans l’intervalle, l’auteure a été empêchée, par décision d’un juge, de voir ses enfants. Le juge a également ordonné qu’elle subisse une évaluation psychologique visant à déterminer s’il était opportun de lui donner accès aux enfants.

L’auteure explique qu’à son retour en Angleterre, elle a demandé au tribunal d’ordonner que ses enfants lui soient rendus, mais le juge n’a pas essayé de connaître les souhaits des enfants ni ne leur a présenté l’option de vivre en Allemagne avec leur mère. Le tribunal a conclu plutôt que « les enfants appartenaient au nord-ouest de l’Angleterre ».

L’auteure explique que les enfants vivent maintenant en Angleterre et ont un certain nombre de problèmes concernant leur bien-être. En juin 2014, le juge a tenu l’audience finale relative à sa requête tendant à faire accorder aux enfants l’autorisation de vivre en Allemagne. Le juge a interdit à l’auteure de participer à l’audience. Il a rejeté sa requête, l’a condamnée aux dépens et lui a interdit de déposer de nouvelles plaintes. L’auteure a essayé d’interjeter appel de ce refus, mais l’appel a été rejeté.

En juin 2014, le médecin des enfants (un médecin généraliste) a refusé d’informer l’auteure de leur situation, le père lui ayant dit que l’auteure n’avait plus de droits parentaux sur eux. En juin 2015, un juge a décidé de ne pas autoriser l’auteure à avoir accès aux copies des bulletins scolaires des enfants. Il n’y a pas eu d’audience et l’auteure n’a pas été autorisée à exprimer ses souhaits devant le juge, bien que la question fût importante.

L’auteure dit avoir été victime d’un profond racisme en Angleterre, non seulement de la part de son ancienne famille, mais aussi dans sa vie quotidienne, car des voisins lui ont expliqué devant les enfants que son problème était sa nationalité allemande et que l’on n’y aimait pas les Allemands.

L’auteure affirme qu’elle était continuellement menacée comme si elle n’avait pas de droits au Royaume-Uni, alors que les mauvais traitements que son mari infligeait à elle et aux enfants étaient méconnus. Les trois requêtes qu’elle a formées de 2008 à 2013 ont été rejetées, alors même qu’elles répondaient à l’intérêt supérieur des enfants. Le juge était manifestement « raciste et partial » et a fait de fausses déclarations contre l’auteure, a porté atteinte à ses droits parentaux, a soutenu activement son ex-mari et a tenté d’éloigner les enfants d’elle. Les contacts quotidiens avec la langue anglaise et son maintien étaient de la plus haute importance en 2008, mais le juge a estimé que les contacts avec la mère étaient inutiles, de même que le maintien de l’allemand.

L’auteure affirme que toutes les requêtes formées au nom de son ex-mari ont été accueillies, alors même qu’elles ne répondaient pas à l’intérêt des enfants. Par ailleurs, l’auteure a été exclue d’audiences, des audiences se sont tenues à son insu, elle n’a pas reçu copie de la requête de la partie adverse et elle n’a été informée des arguments de celle-ci qu’au début des audiences. Le juge l’a systématiquement condamnée aux dépens. L’auteure n’avait pas les moyens de payer les services d’un avocat et a perdu sa maison, son ex-mari ayant utilisé l’argent qu’il avait reçu lors de la vente de la maison pour payer ses propres avocats. Ses droits parentaux ont été restreints sans raison et elle n’a pas été mise en mesure de se défendre. Les juges ont aidé son ex-mari sans autre raison que le racisme et les préjugés pour détruire sa vie et rendre celle de ses enfants misérable, pour les séparer et pour encourager le comportement violent de son ex-mari.

L’auteure ajoute que ses enfants n’ont jamais eu la possibilité de se faire entendre et que le juge n’a pas tenu compte de leur bien-être. Les enfants ont été traumatisés et obligés de rester en Angleterre dans une situation qui ne répondait pas à leur intérêt supérieur.

L’auteure dit avoir saisi la Cour européenne des droits de l’homme, mais sa requête a été rejetée comme irrecevable sans justification.

Teneur de la plainte

L’auteure affirme en termes généraux que les faits tels qu’ils sont présentés constituent une violation des droits que lui confèrent les articles 1, 2, 5, 9, 11, 15 et 16 de la Convention.

Observations de l’État partie sur la recevabilité

Dans une note verbale datée du 16 janvier 2017, l’État partie a contesté la communication au motif qu’elle devait être déclarée irrecevable pour défaut de fondement et non-épuisement des recours internes.

L’État partie rappelle les faits de la cause, mais conteste la version de l’auteure.

L’État partie ajoute que l’auteure est retournée au Royaume-Uni après son opération chirurgicale contre l’avis du médecin et qu’elle n’a pas été autorisée à entrer au domicile familial dont elle était copropriétaire avec son mari.

L’auteure a déposé une requête en divorce en juillet 2008. Le tribunal a demandé aux deux parents de l’informer des dispositions qu’ils avaient prises pour les enfants. Un jugement provisoire de divorce a été rendu en 2009 et le divorce est devenu définitif en 2010.

Dans l’intervalle, en 2008, l’auteure a saisi le tribunal du comté de Chester d’une requête tendant à obtenir une ordonnance de résidence et l’autorisation d’emmener les enfants en Allemagne pour cause de violence familiale.

En 2009, le juge a fait la déclaration suivante :

Sur le plan pratique, il est indispensable pour les enfants que le niveau d’animosité soit réduit immédiatement ; pour ce faire, deux mesures doivent être prises. Premièrement, il faut faire comprendre aux deux parties qu’il y a lieu de mettre un terme à leurs actions en revendication, faute de quoi leurs enfants subiront de graves préjudices. Deuxièmement, il faut mettre un terme à leur cohabitation. Étant donné l’isolement, la mère sera soumise à cette décision si possible, sans également perdre sa maison.

En conséquence, l’auteure et son ex-mari quittaient à tour de rôle le domicile familial et y revenaient une semaine sur deux afin de partager la propriété et de s’occuper des enfants.

En juin 2009, l’auteure s’est rendue en Allemagne avec les enfants, mais le plus jeune garçon est tombé malade.

Selon l’auteure, son ex-mari a alerté l’International Child Abduction and Contact Unit à la suite d’une décision de justice ordonnant le retour immédiat des enfants au Royaume-Uni. Le juge a annulé la décision lorsqu’il lui a été expliqué que c’est la maladie d’un des enfants qui avait empêché de les ramener au domicile familial à temps.

En 2010, la requête de l’auteure tendant à obtenir l’autorisation de déménager en Allemagne avec les enfants a été rejetée. Le juge a ordonné un système de garde alternée sur un pied d’égalité dans lequel les enfants restaient avec la mère pendant un certain temps, puis avec le père pendant une période de même durée ; selon l’auteure, cette formule a eu une incidence négative sur les enfants.

En 2011, l’auteure a saisi le tribunal du comté de Chester d’une deuxième requête en réexamen du système de garde des enfants. En avril 2011, cette requête a été renvoyée devant un juge de Liverpool, lequel a engagé un processus d’enquête sur les allégations de violence familiale et l’incidence de celle-ci sur les enfants. L’auteure affirme qu’elle a été informée que la procédure durerait plus de deux ans et qu’elle a retiré ses griefs en conséquence.

Une décision de justice rendue en décembre 2011 a maintenu le mode de résidence mis en place et a souligné que l’auteure ne pouvait saisir le tribunal qu’avec son autorisation. Un recours formé contre cette décision a été rejeté par un juge en avril 2012.

En juillet 2012, l’auteure s’est rendue en Allemagne avec les enfants, avec l’autorisation du tribunal. Elle affirme que pour n’avoir pas été autorisée à former un recours en justice, elle n’a pas pu obtenir l’autorisation nécessaire pour que les enfants restent en Allemagne. L’État partie relève à cet égard que l’auteure avait besoin de l’autorisation préalable du tribunal pour former un recours, mais qu’il ne lui était pas interdit de former un recours.

L’auteure a commencé à travailler à Francfort dans une école où les enfants étaient inscrits et y a travaillé jusqu’à ce qu’un tribunal allemand ordonne le retour des enfants au Royaume-Uni en mars 2013. Les enfants sont rentrés au Royaume-Uni et l’auteure est restée en Allemagne.

En juin 2014, le juge a tenu l’audience finale relative à la deuxième requête de l’auteure tendant à obtenir l’autorisation de déménager en Allemagne avec les enfants. La requête a été rejetée. L’auteure a demandé l’autorisation d’interjeter appel de cette décision, mais sa demande a été rejetée.

L’auteure a formé un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme en février 2016. Sa requête a été déclarée irrecevable en juin 2016.

L’État partie estime tout d’abord que la communication de l’auteure doit être déclarée irrecevable comme manifestement mal fondée et insuffisamment motivée. L’auteure n’a pas expliqué pourquoi ni en quoi elle considère que les droits que lui confère la Convention ont été violés. Dans sa communication, elle ne satisfait pas au critère énoncé dans l’affaire Mukhina c. Italie, car elle n’indique pas la discrimination dont elle aurait été victime à raison des actes du Royaume-Uni ni n’explique pourquoi et en quoi elle considère que les droits que lui confère la Convention ont été violés.

L’État partie relève que l’auteure ne fait état d’aucune distinction, exclusion ou restriction qu’elle aurait subie en raison de son sexe en matière d’exercice de ses droits et libertés fondamentales. Elle s’est déclarée insatisfaite de la procédure judiciaire qui aurait pu lui permettre de demander réparation par les voies de droit internes en place. L’auteure ne fait état d’aucune discrimination directe ou indirecte fondée sur le sexe qu’elle aurait subie ni n’indique en quoi l’État partie a violé l’article 1 de la Convention.

En ce qui concerne l’article 2, l’État partie fait observer qu’il a adopté une loi de 2010 sur l’égalité qui constitue la loi principale portant criminalisation de la discrimination à l’égard de certaines caractéristiques protégées, notamment la discrimination fondée sur le sexe. La discrimination illicite est interdite dans diverses circonstances, notamment en matière de prestation de services et dans les situations d’emploi. Tout requérant peut porter plainte auprès du tribunal du travail ou de la Commission pour l’égalité et les droits de l’homme, à laquelle la loi de 2006 sur l’égalité confère de larges pouvoirs pour veiller au respect des obligations prévues par la loi de 2010 sur l’égalité. Il n’est pas établi que l’auteure a déposé une requête devant la Commission pour l’égalité et les droits de l’homme. En outre, aucune violation de l’article 2 de la Convention n’a été mise en évidence.

En ce qui concerne la prétention que l’auteure tire de l’article 5, l’État partie relève que la communication ne fait état d’aucun préjudice subi par l’auteure à raison d’une action ou d’une omission de l’État tombant sous le coup des dispositions de la Convention. Aux termes de la loi de 1989 sur les enfants, le bien-être de l’enfant est l’élément principal que le tribunal prend en considération pour rendre toute décision concernant son éducation. La partie de la communication concernée semble aussi manifestement mal fondée.

En ce qui concerne la prétention que l’auteure tire de l’article 9, l’État partie relève que l’auteure ne fait état d’aucune violation de la Convention qu’il aurait commise sur l’obligation d’accorder aux hommes et aux femmes les mêmes droits en matière de nationalité. Il n’est pas établi que l’auteure a été injustement traitée en raison de sa nationalité. De plus, elle n’a pas indiqué en quoi elle avait été traitée différemment en raison de son sexe.

En ce qui concerne la prétention que l’auteure tire de l’article 11, l’État partie relève que l’auteure n’a pas expliqué en quoi elle avait été traitée d’une manière contraire à la loi en raison de son sexe dans le domaine de l’emploi. L’auteure a pu trouver du travail. S’il y avait eu discrimination, elle aurait pu porter plainte contre son employeur ou son employeuse. L’État partie dispose d’une législation étendue régissant les droits relatifs à l’emploi, la sécurité sociale et les droits à la santé et à la sécurité. En conséquence, la partie de la communication concernée est manifestement mal fondée.

En ce qui concerne la prétention que l’auteure tire des articles 15 et 16 de la Convention, l’État partie relève que l’auteure n’a pas indiqué en quoi ces dispositions avaient été violées dans son cas. L’auteure n’a pas indiqué en quoi tel ou tel traitement qu’elle aurait subi tout au long de la procédure judiciaire était fondé sur son sexe ; elle n’a pas non plus indiqué le moindre traitement portant à croire qu’elle avait été victime de discrimination en raison de son sexe dans le cadre de son mariage ou de la dissolution de celui-ci. En outre, la législation anglaise relative au mariage s’applique indifféremment aux deux sexes. En conséquence, la partie de la communication concernée est manifestement mal fondée.

En ce qui concerne l’épuisement des recours internes, l’État partie relève que l’auteure n’a exposé aucune discrimination visée par les articles de la Convention qu’elle aurait subie ni n’a indiqué en quoi il avait violé ces dispositions. Elle n’a pas porté d’allégations de discrimination durant la longue procédure qui a eu lieu en Angleterre et au Pays de Galles et il est clair qu’elle aurait pu le faire, notamment en engageant une procédure de contrôle juridictionnel. Elle pouvait intenter une action en vertu du paragraphe 1 de l’article 6 de la loi de 1998 relative aux droits de la personne qui est libellé comme suit : « Il est illégal pour une autorité publique d’agir d’une manière incompatible avec un droit garanti par la Convention ». L’expression « autorité publique » inclut les cours et les tribunaux (art. 6, par. 3) et l’expression « droit garanti par la Convention » inclut les droits prévus par l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’homme (interdiction de la discrimination).

Si l’auteure avait estimé qu’elle était victime de discrimination, elle aurait dû faire valoir que tel ou tel traitement qu’elle avait subi était contraire aux articles 2, 3 et 8, lus en parallèle avec l’article 14, de la Convention européenne des droits de l’homme, car il existait un risque réel que les droits que lui confère cette convention soient violés dans le cadre de la procédure engagée au sujet de ses fils devant le tribunal des affaires familiales. Or rien n’indique qu’elle a invoqué l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’homme au cours de la procédure judiciaire interne et elle n’a pas non plus engagé une procédure de contrôle juridictionnel.

Il s’ensuit que l’auteure n’a pas épuisé les recours internes disponibles, en violation du paragraphe 1 de l’article 4 du Protocole facultatif.

Commentaires de l’auteure sur les observations de l’État partie concernant la recevabilité

L’auteure a soumis ses commentaires le 17 février 2017. S’agissant de la nécessité d’indiquer les articles violés dans son cas, elle signale qu’en tant que femme, elle devait faire face au système juridique anglais et à un juge qui interprétait toujours la loi d’une manière qui lui était défavorable. En mai 2009, le juge a décidé que le père était la personne la plus importante. Il a méconnu l’importance de l’auteure en tant que mère et personne s’occupant des enfants et a fait preuve de discrimination à son égard en raison de sa qualité de ressortissante étrangère. Le juge n’a pas non plus sanctionné la violence familiale « évidente et avérée » dont l’auteure était victime. Il disposait d’éléments de preuve comprenant des déclarations de témoin, des documents et des photos, mais n’a pas tenu compte du fait que l’auteure avait été illicitement expulsée de son domicile et qu’elle n’était pas autorisée à voir ses enfants ni à remplir ses devoirs de mère.

L’auteure dit avoir été privée du droit à une enquête sur la violence familiale pratiquée par son ex-mari, du fait que l’on lui brandissait la menace de placer les enfants dans un établissement public.

L’auteure affirme que le juge a aussi clairement indiqué qu’il ne considérait pas ses fonctions maternelles comme importantes et les a violées en déclarant que le père violent était de la plus haute importance. Elle ajoute qu’il a refusé toute preuve de violence familiale et a fait peu de cas de tout document indiquant les souhaits des enfants. Le juge a refusé de parler aux enfants pour déterminer leurs souhaits. Il n’a jamais tenu compte de la situation difficile que connaissait l’auteure en tant que mère étrangère et femme, mère à temps plein et principale personne s’occupant des enfants.

L’auteure fait grief à l’État partie de n’avoir pas protégé sa fonction de mère en ce qui concerne l’éducation de ses enfants, ni enquêté sur les questions relatives au bien-être des enfants, ni veillé à ce que l’intérêt supérieur de l’enfant reçoive une attention primordiale.

L’auteure affirme en outre que le juge a rendu une ordonnance de résidence alternée sur un pied d’égalité avec les enfants qui a causé du stress tant à elle qu’aux enfants en ce que l’ordonnance a permis à son ex-mari de poursuivre la violence.

Selon l’auteure, le tribunal de Liverpool a fait preuve de discrimination à son égard en tant que mère étrangère en ce qu’il a refusé de lui accorder un soutien financier et a confirmé qu’elle n’avait pas le droit de résider au Royaume-Uni.

L’auteure fait grief à l’État partie de n’avoir pas protégé ses droits relatifs à l’emploi en autorisant l’ordonnance de résidence alternée.

L’auteure explique que lorsque son mariage s’est brisé, le juge ne lui a pas accordé les mêmes droits qu’à son ex-mari et elle réaffirme avoir perdu sa maison pour que son ex-mari puisse payer ses avocats.

Observations complémentaires de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond

L’État partie a soumis ses observations complémentaires sur la recevabilité et le fond le 6 octobre 2017. Il évoque la requête formée par l’auteure le 10 juillet 2008 devant le tribunal du comté de Chester aux fins d’obtenir une ordonnance de résidence et l’autorisation de vivre avec les enfants en Allemagne, dans laquelle l’auteure porte des allégations de violence familiale (la première demande). Par la suite, elle a saisi le tribunal de plusieurs requêtes concernant ses enfants.

En prévision des débats, le juge de district H. a ordonné que le CAFCASS élabore un rapport lors d’une audience préliminaire tenue le 29 juillet 2008. Ce rapport, daté du 10 décembre 2008, relève que « d’après les informations figurant dans le dossier », « les deux parents jouent un rôle important dans la vie de leurs enfants ». Si le tribunal n’accordait pas à l’auteure « l’autorisation de retirer les enfants du pays », elle resterait en Angleterre. Il s’ensuit que « l’intérêt supérieur des enfants sera respecté s’ils restent en Angleterre, car cela leur permettra d’être à proximité immédiate de leurs deux parents et de conserver ainsi leurs liens importants avec chacun d’eux ». En conséquence, le CAFCASS a recommandé que le tribunal rejette la requête de l’auteure tendant au retrait des enfants et délivre plutôt une ordonnance de résidence conjointe aux deux parents.

La première requête de l’auteure a été examinée les 21 et 22 mai 2009. Dans un jugement rendu le 22 mai, le juge H. a rejeté la requête. Le juge a relevé que l’auteure était

la principale personne qui s’occupe des enfants. Elle présume dès lors qu’elle est par essence le parent qui doit avoir la garde des enfants... Il est clair que la requête est véritablement motivée, bien pensée et fondée sur une connaissance et une compréhension approfondies des facilités disponibles pour elle-même et les enfants. Elle ajoute que si elle n’est pas autorisée à emmener les enfants, elle ne partira pas. Elle continuera de vivre au Royaume-Uni où elle travaille à temps partiel sous contrat temporaire avec le conseil du comté... La thèse de M. B est qu’il n’y a pas de parent résident établi en l’espèce et qu’il est aussi capable [que l’auteure] d’être le parent résident. Jusqu’à présent, ils ont tous les deux partagé la garde des enfants.

L’État partie relève en outre que le juge a fait observer que

une particularité de grande importance en l’espèce est que les parties sont très hostiles l’une envers l’autre. Les deux parties sont fautives ; certains des actes posés par M. B lors de la rupture de la relation étaient indélicats et irréfléchis au point de dénoter une stupidité grossière. Certains cas de non-coopération [de l’auteure] avec les personnes qui auraient pu contribuer à améliorer la situation dénotent un certain degré d’incapacité à faire la distinction entre ses propres sentiments et le bien-être des enfants.

Le juge a également relevé que le rapport du CAFCASS était d’une importance capitale pour l’affaire. Le CAFCASS a signalé que la séparation des enfants du père leur causerait un préjudice moral important.

Le juge a relevé que le refus d’autoriser l’auteure à emmener ses enfants en Allemagne serait préjudiciable à ces derniers, mais qu’il n’y avait pas de « parent résident » établi dans l’affaire et que le préjudice moral que la séparation des enfants d’avec leur père entraînerait était considéré comme le principal élément dans l’affaire. En conséquence, il a accepté les recommandations du CAFCASS. Il a ajouté qu’il était indispensable pour les enfants que le niveau d’animosité soit réduit immédiatement. À cette fin, deux mesures devaient être prises : premièrement, les deux parties devaient se rendre compte que leurs actions en revendication devaient cesser pour éviter de causer de graves préjudices à leurs enfants ; deuxièmement, il fallait mettre un terme à leur cohabitation, mais sans que la mère non plus ne perde sa maison. Cela étant, le juge a rendu une ordonnance de résidence conjointe. L’ordonnance visait à faire en sorte qu’à court terme, les parties résident à tour de rôle au domicile conjugal pour s’occuper des enfants. Le juge estimait qu’à long terme, le père pourrait trouver un autre logement, la mère conserverait la maison et les enfants vivraient en alternance avec eux.

L’État partie soutient à nouveau que la communication est irrecevable pour non-épuisement des recours internes et en ce qu’elle est manifestement mal fondée et insuffisamment motivée. L’auteure devait exploiter toutes les voies de recours judiciaires. Elle aurait dû évoquer devant les autorités nationales le fond de sa plainte qu’elle soulève devant le Comité. À cet égard, l’État partie relève qu’une partie importante de la thèse de l’auteure porte sur la décision de justice rendue en mai 2009 et ses conséquences. L’auteure aurait pu interjeter appel de cette décision, mais elle a choisi de ne pas le faire. Elle n’a donc pas épuisé les recours internes à cet égard. Une autre partie importante de la communication porte sur la prétendue partialité du juge H. Là encore, l’auteure n’a pas demandé au juge de se récuser.

L’État partie relève que dans ses observations concernant la recevabilité, l’auteure affirme avoir été victime de discrimination fondée sur le sexe. Elle aurait pu soulever cette allégation dans le cadre de la procédure interne de plusieurs manières, notamment en s’appuyant sur la loi de 1998 sur les droits de la personne : elle aurait pu faire valoir que tel ou tel traitement qu’elle avait subi était contraire à l’article 8, lu en parallèle avec l’article 14, de la Convention européenne des droits de l’homme. Il n’est pas établi qu’elle a invoqué l’article 14 ou fait état de la discrimination fondée sur le sexe dans les actions qu’elle a intentées devant le tribunal des affaires familiales. Elle n’a pas non plus engagé une procédure de contrôle juridictionnel. Il s’ensuit qu’elle n’a pas épuisé les recours internes sur l’ensemble des allégations de discrimination sexuelle soumises au Comité.

L’État partie fait en outre observer que la communication doit être déclarée irrecevable comme manifestement mal fondée. L’auteure n’a pas expliqué pourquoi et en quoi elle considère que les droits qui lui sont conférés par la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes ont été violés.

L’auteure n’indique pas la discrimination sexuelle qu’elle aurait subie à raison des actes de l’État partie. En outre, elle ne précise dûment aucune « distinction, exclusion ou restriction » qu’elle aurait subie en raison de son sexe en matière d’exercice de ses droits et libertés fondamentales. Elle s’est déclarée insatisfaite de la procédure judiciaire, mais ne fait état d’aucune discrimination directe ou indirecte fondée sur le sexe qu’elle aurait subie ni n’indique en quoi le Royaume-Uni a violé l’article 1 de la Convention.

L’État partie réitère ses arguments (exposés aux paragraphes 4.19, 4.20 et 4.22 ci-dessus) concernant l’irrecevabilité de la prétention tirée par l’auteure des articles 2 et 5 de la Convention et le caractère manifestement mal fondé de sa prétention tirée de l’article 11.

En ce qui concerne l’article 15 de la Convention, l’État partie relève que la communication ne fait état d’aucune discrimination sexuelle concernant la capacité juridique ou la liberté de circulation. En conséquence, il considère que la partie de la communication concernée est manifestement mal fondée.

En ce qui concerne l’article 16 de la Convention, l’État partie relève que l’auteure n’a indiqué aucun traitement constitutif de discrimination qu’elle aurait subi en raison de son sexe dans le cadre de ses droits parentaux. En conséquence, la partie de la communication concernée est manifestement mal fondée.

L’État partie fait observer en outre que l’auteure n’a pas fourni suffisamment d’éléments à l’appui de ses allégations de violation de ses droits garantis par la Convention.

En ce qui concerne le fond, l’État partie relève que l’auteure relate une série de faits survenus entre 1997 et 2015. Elle dit, par exemple, qu’elle a été victime de racisme en Angleterre et qu’en raison de sa nationalité allemande, le juge était partial à son égard. L’État partie relève qu’elle parle de racisme, mais ne fait état d’aucune discrimination fondée sur le sexe. Elle se borne à énumérer les articles 1, 2, 5, 9, 11, 15 et 16 de la Convention et à affirmer qu’ils ont été violés dans son cas.

Ce n’est qu’à la suite des observations de l’État partie sur la recevabilité que l’auteure a fourni des commentaires sur la recevabilité. Selon ses dires, le juge n’a pas tenu compte de sa déclaration détaillée lorsqu’elle a déposé sa première requête. L’État partie n’a aucune preuve de cette affirmation, mais le juge a examiné ladite requête en mai 2009. En ce qui concerne le jugement de mai 2009, l’auteure affirme que le juge n’a accordé aucune importance à sa qualité de mère ni n’a tenu compte du fait qu’elle était la principale personne qui s’occupait des enfants. L’État partie estime que c’est inexact. Le juge a tenu compte de la position de l’auteure, mais n’a pas admis l’idée qu’elle était la « principale personne qui s’occupait des enfants ». Si l’auteur avait estimé que les conclusions de fait dégagées par le juge étaient injustifiées ou ne cadraient pas avec les éléments de preuve pertinents produits à cet égard, elle aurait pu interjeter appel du jugement de mai 2009 devant la cour d’appel. Or elle ne l’a pas fait.

Selon l’auteure, le jugement de mai 2009 a été discriminatoire à son égard, les Anglais ayant des préjugés contre les Allemands. Elle n’allègue nullement que le juge a fait preuve de discrimination à son égard en raison de son sexe. L’État partie relève que si l’auteure avait accordé de l’intérêt à l’impartialité et à l’indépendance du juge, elle aurait pu lui demander de se récuser ou interjeter appel du jugement pour partialité. Or elle ne l’a pas fait.

En ce qui concerne l’affirmation de l’auteure selon laquelle elle a dû payer pour la défense de son ex-mari sans raison, l’État partie relève que cela est inexact. Au Royaume-Uni, il est généralement demandé à la partie perdante de payer les frais de justice de la partie gagnante. Ayant été déboutée de ses trois requêtes principales, l’auteure a été condamnée à payer des dépens.

L’État partie appelle également l’attention du Comité sur le fait que l’auteure avait consenti au jugement d’expédient rendu en avril 2010 et que rien ne porte à croire que son avocat avait obtenu son consentement par la contrainte. L’auteure ne doit pas être autorisée à alléguer que les autorités et les tribunaux du Royaume-Uni n’ont pas dûment examiné la question de la violence familiale alors qu’elle a retiré sans réserve toutes les allégations de cette nature en 2011.

En ce qui concerne les prétentions tirées par l’auteure de l’article 1 de la Convention, l’État partie relève que cette disposition ne confère pas de protection matérielle et que les prétentions de l’auteure sont sans fondement. L’auteure a affirmé qu’en mai 2009, le juge avait fait preuve de discrimination à son égard en tant qu’Allemande et mère et qu’il avait ordonné la vente du domicile familial en sachant qu’elle allait devenir sans-abri.

À cet égard, l’État partie fait observer que le juge a pris sa décision sur la base des éléments de preuve dont il avait été saisi. Rien ne permet de conclure qu’il a fait preuve de discrimination à l’égard de l’auteure. Là encore, l’auteure aurait pu interjeter appel de la décision ou demander au juge de se récuser, mais elle a choisi de ne pas le faire.

L’État partie fait valoir que les prétentions de l’auteure concernant l’article 2 de la Convention sont sans fondement et qu’à supposer même que les allégations de l’auteure soient retenues au titre de cette disposition, elles ne sont pas fondées. L’État partie apporte un certain nombre d’éclaircissements sur les diverses prétentions de l’auteure. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle le juge n’a pas sanctionné la violence familiale et a refusé d’ordonner la tenue d’une audience tendant à l’établissement des faits, l’État partie précise que l’affirmation de l’auteure est trompeuse, celle-ci ayant retiré sa prétention. L’auteur affirme qu’elle ne remplissait pas les conditions requises pour bénéficier du revenu minimum d’insertion en ce qu’elle ne résidait pas au Royaume-Uni, mais elle n’explique pas en quoi cela constituait de la discrimination fondée sur le sexe. Elle a également déclaré à tort que le juge l’avait empêchée d’obtenir les bulletins scolaires des enfants. Son allégation selon laquelle le juge a ordonné un rapport psychologique pour elle mais pas pour son ex-mari est également trompeuse : le compte rendu du juge concerne des informations antérieures fournies par les psychologues sur les deux parents et signale tout simplement qu’au cas où l’auteure le souhaiterait, elle pourrait produire un additif au rapport, sinon le tribunal fonderait sa décision sur la teneur du rapport existant. Enfin, la présence de l’auteure à l’audience finale où le juge a rendu publique sa décision n’était pas nécessaire.

L’État partie fait valoir en outre que les prétentions tirées par l’auteure de l’article 5 de la Convention sont sans fondement. La majorité des prétentions de l’auteure portent sur les conclusions dégagées par le juge H. en mai 2009 et juin 2014 pour refuser d’autoriser les enfants à résider en Allemagne. L’État partie relève que les conclusions du juge étaient fondées sur des éléments de preuve, dûment motivées et non discriminatoires. L’auteure n’a pas interjeté appel de la décision de mai 2009. Elle a interjeté appel de la décision de 2014 et chacun de ses moyens d’appel (pris de la violence, de la partialité, etc.) a été entièrement et dûment examiné par le juge. L’État partie en conclut que les allégations de l’auteure sont dénuées de fondement et qu’aucune d’elles ne montre que l’auteure a été victime de discrimination fondée sur le sexe.

L’État partie fait valoir également que les prétentions tirées par l’auteure de l’article 11 de la Convention sont sans fondement. À cet égard, il considère que les allégations de l’auteure sont sans fondement lorsqu’elle affirme que le juge n’a pas tenu compte du fait qu’il lui serait difficile de trouver un nouvel emploi et qu’elle a été contrainte de rester à Chester en raison de la décision du juge qui lui ordonnait de partager équitablement la garde des enfants avec leur père. L’État partie relève qu’au moment où le juge examinait l’affaire en mai 2009, l’auteure a expressément affirmé qu’elle resterait au Royaume-Uni au cas où elle ne serait pas autorisée à déménager avec les enfants en Allemagne. Le juge n’a imposé aucune contrainte géographique à l’auteure dans le jugement de mai 2009 ni dans celui de juin 2014. L’auteure n’a pas interjeté appel du jugement de 2009 ni n’a fait état de tel ou tel préjudice qu’elle aurait subi en matière d’emploi dans son recours contre le jugement de juin 2014.

De même, l’État partie considère que les prétentions tirées par l’auteure de l’article 15 sont sans fondement. L’auteure a évoqué la situation difficile qu’elle avait connue en tant que mère étrangère et femme, mère à temps plein et principale personne s’occupant des enfants. L’État partie relève qu’aucune de ses observations ne porte sur l’inégalité de capacité juridique.

L’État partie considère que les allégations portées par l’auteure au titre de l’article 16 de la Convention sont dénuées de fondement : les tribunaux et les institutions ont pris grand soin de veiller à ce que l’intérêt des enfants occupe la première place. En outre, l’auteure s’est vu attribuer les mêmes droits parentaux et les mêmes responsabilités parentales que son ex-mari, sans aucune discrimination.

Compte tenu de ce qui précède, l’État partie considère que la communication est irrecevable en application du paragraphe 1 ou du paragraphe 2 c) de l’article 4 du Protocole facultatif ou doit être rejetée sur le fond, l’État partie n’ayant pas violé les droits conférés à l’auteure par la Convention.

Commentaires de l’auteure sur les observations complémentaires de l’État partie

Le 18 janvier 2018, l’auteure a soumis ses commentaires sur les observations complémentaires de l’État partie concernant la recevabilité et le fond. Elle estime avoir motivé ses prétentions et épuisé les recours internes disponibles que « la cour d’appel devait sanctionner le 20 novembre 2014 ». L’auteure réitère abondamment ses allégations concernant les fautes que le juge H. aurait commises dans l’examen de l’affaire.

L’auteure dit avoir à maintes reprises fait état de la discrimination dont elle était victime en tant que mère – et donc en tant que femme – dans ses requêtes et dans ses plaintes auprès du Bureau des enquêtes sur la conduite des juges. En ce qui concerne l’argument tiré par l’État partie de ce qu’elle n’a pas demandé la récusation du juge, elle relève que son avocat l’a demandée oralement le 24 mars 2011 et que le juge a déclaré avec colère qu’il renverrait l’affaire devant un juge de Liverpool qui serait « pire » que lui.

L’auteure fait également des observations détaillées sur plusieurs éléments de l’argumentation de l’État partie qui, selon elle, sont inexacts et dénaturent les faits.

Elle affirme que l’intérêt supérieur de ses enfants n’ayant jamais été pris en considération, ils sont restés malheureux en Angleterre.

En ce qui concerne ses prétentions tirées de l’article 2 de la Convention, elle prend acte de l’argument de l’État partie selon lequel elle aurait pu former un recours devant la Commission pour l’égalité et les droits de l’homme. Elle dit que cela ne lui avait jamais été expliqué.

En ce qui concerne l’article 5 de la Convention, l’auteure se demande pourquoi le juge n’a pas reconnu sa qualité de mère à temps plein et de principale personne s’occupant des enfants, a méconnu les actes de violence familiale commis par le père et son comportement délictueux, a fait d’elle et de ses enfants des sans-abri, n’a pas veillé à ce que les enfants soient entendus et n’a pas non plus pris en considération leurs conditions de vie, leur stabilité psychologique, leurs besoins sanitaires, leur éducation et leur langue, ainsi que leurs souhaits personnels.

En ce qui concerne sa prétention tirée de l’article 11, l’auteure affirme que l’État partie n’a pas compris ses explications sur la manière dont cette disposition avait été violée. Les ordonnances d’interdiction auxquelles elle était soumise ne lui permettaient de chercher du travail que dans un rayon de 3 milles autour de la petite ville de Chester pour pouvoir être avec ses enfants. Son ex-mari pouvait dès lors continuer de la martyriser, par de simples chicanes, par des menaces et par des actes de manipulation dans son dos et elle a perdu son emploi en conséquence.

S’étant présentée comme la mère des enfants dans chaque plainte, l’auteure considère que toute discrimination à son égard était fondée sur le sexe.

Comme elle se battait pour ses enfants, elle ne pouvait pas attaquer le juge siégeant sur son dossier, l’intéressé détenant tout le pouvoir. Elle se devait d’être très prudente. D’après l’auteure, le juge partial ne recherchait que des motifs permettant de statuer contre elle. Elle était seule, était une mère étrangère dans un pays étranger et utilisait une langue étrangère.

Le fait que le juge n’ait pas admis qu’elle était mère à temps plein et la principale personne s’occupant des enfants a montré qu’il n’était intéressé ni par les faits de la cause ni par sa situation. La décision de 2009 était confidentielle et insusceptible de recours. De plus, l’auteure ne pouvait pas s’en prendre au juge, car elle risquait de tout perdre. Ses déclarations n’avaient pas d’importance pour le juge, lequel ne tenait compte que de la position de son ex-mari.

Selon l’auteure, si une personne demande sans succès à un juge de se récuser et saisit la cour d’appel de la question, l’affaire est renvoyée devant le juge en question. Lorsque l’avocat de l’auteure a demandé au juge de se récuser en 2011, l’affaire a été renvoyée devant un juge de Liverpool.

L’auteure ajoute que rien n’indiquait que la décision interdisant aux enfants de se rendre en Allemagne répondait à leur intérêt supérieur. Selon elle, rien n’indiquait que le fait de rester au Royaume-Uni répondait à l’intérêt supérieur de ses enfants.

Selon l’auteure, elle n’aurait pas dû être condamnée aux dépens. En fait, elle a perdu sa maison pour que les avocats de son ex-mari puissent être payés.

L’auteur affirme avoir épuisé les recours internes, comme « l’a attesté la cour d’appel ». D’après elle, il n’y avait rien d’autre qu’elle pouvait faire pour obtenir une réparation effective sur la discrimination dont elle avait été victime.

Au dire de l’auteure, elle a voulu interjeter appel d’une des décisions du juge, mais ses avocats lui ont conseillé de ne pas le faire. Par la suite, le médiateur juridique a confirmé la « médiocrité des prestations de services » de son conseil juridique. En conséquence, le cabinet d’avocats a versé à l’auteure une indemnisation d’un montant de 75 livres sterling et au médiateur juridique des frais de dossier d’un montant de 400 livres sterling.

L’auteure affirme n’avoir pas pu trouver un avocat pour interjeter appel.

L’auteure relève en outre que le juge a clairement ordonné un examen psychologique pour elle, mais pas pour son ex-mari. Le psychologue choisi était proche du CAFCASS. Le rapport n’a été ordonné que parce que le juge avait l’intention de l’exploiter.

En ce qui concerne le refus du juge d’autoriser sa présence à l’audience finale, l’auteure relève que ce refus a permis au juge de la condamner beaucoup plus facilement à des dépens exorbitants. Le fait que le juge ait pris des dispositions pour qu’elle ne soit pas présente à la dernière audience montre qu’elle a été victime de discrimination.

Rien n’indiquait que l’intérêt supérieur des enfants commandait qu’ils restent avec leur père au Royaume-Uni. Le fait que les conditions de vie en Allemagne auraient été meilleures pour les enfants, lesquels auraient disposé d’une chambre à eux et auraient bénéficié d’une meilleure assurance médicale privée ainsi que de meilleures conditions d’études, montre que l’intérêt supérieur des enfants commandait qu’ils vivent en Allemagne. Que le juge n’ait pas tenu compte de cela montre que l’auteure a été victime de discrimination.

Étant donné que le juge n’a pas tenu compte du rôle que l’auteure jouait en tant que principale personne s’occupant des enfants et mère à temps plein, qu’il a ordonné qu’elle et le père résident à tour de rôle au domicile conjugal pour s’occuper des enfants et qu’il a finalement rendu en avril 2010 une ordonnance de résidence alternée sur un pied d’égalité qui comprenait une « disposition édictant des mesures interdites », l’auteure se serait exposée à la prison si elle avait trouvé un emploi ailleurs en Angleterre pour y vivre avec les enfants. Selon elle, la limitation à Chester s’expliquait par le fait que le père y vivait et exploitait son entreprise, ce qui constitue un acte de discrimination contraire à l’article 11 de la Convention.

L’auteure relève qu’une mère à temps plein se trouve dans une situation beaucoup plus délicate qu’un père qui travaille et peut dès lors payer les services de meilleurs avocats, surtout lorsqu’il n’existe pas de système d’aide juridictionnelle. En outre, le juge a menacé de donner la garde au père si elle continuait à demander l’autorisation de déménager avec les enfants en Allemagne. Ces faits mettent en évidence l’existence d’une violation de l’article 15 de la Convention.

Selon l’auteure, l’article 16 a été violé en ce qu’elle a été informée en réponse à ses allégations que les juges bénéficiaient d’une immunité et avaient toute latitude de faire ce qu’ils voulaient. Il s’ensuit que l’État partie n’a même pas tenté de réparer la discrimination dont elle était victime en tant que mère étrangère et d’assurer l’intérêt supérieur de ses enfants. D’après l’auteure, les institutions anglaises sont impuissantes, sous-financées et n’interviennent pas dans « le système judiciaire corrompu du pays, où une personne non démocratiquement choisie siégeant en qualité de juge peut inventer la jurisprudence et ne jamais subir de conséquences même si elle ne respecte pas la législation, notamment la loi relative aux droits de la personne, la loi relative aux enfants et la convention sur les droits de la personne ».

Le 12 mars 2018, l’auteure a fourni des informations complémentaires, en particulier sur les difficultés qu’elle avait à voir ses enfants au Royaume-Uni. Elle relève qu’en octobre 2013, son ex-mari a refusé sans raison de la laisser prendre contact avec les enfants. Vers la fin de l’année, il a également refusé de la laisser prendre contact avec eux pendant la période de Noël, au motif qu’ils avaient déjà d’autres projets. En 2014, l’ex-mari a menacé l’amie chez qui elle vivait en Angleterre. En avril 2014, à Pâques, on l’a empêchée de conduire les enfants dans sa voiture.

En 2015, l’ex-mari a réservé leurs vacances pour le mois d’août, alors que l’auteure lui avait dit que c’était la seule période où elle serait en mesure de passer du temps avec les enfants.

L’auteure explique également qu’elle a eu des difficultés à organiser un voyage pour ses enfants en Allemagne en 2016. Pendant le voyage, le père envoyait tous les jours des courriels aux enfants, ce qui mettait beaucoup de pression sur eux.

En 2017, l’auteure a demandé à un juge d’autoriser ses enfants à passer du temps avec elle en octobre et à Noël, mais sa demande a été rejetée.

En 2018, lorsque le plus jeune enfant a été renvoyé de l’école, l’auteure a voulu se rendre en Angleterre pour le voir, mais le père l’a refusé.

Délibérations du Comité concernant la recevabilité

Conformément à l’article 64 de son règlement intérieur, le Comité doit décider si la communication est recevable en vertu du Protocole facultatif à la Convention. Aux termes de l’article 66, le Comité peut décider d’examiner séparément la question de la recevabilité d’une communication et la communication elle-même quant au fond.

Conformément au paragraphe 2 de l’article 4 du Protocole facultatif, le Comité s’est assuré que la question n’avait pas déjà fait l’objet ou ne faisait pas l’objet d’un examen dans le cadre d’une autre procédure d’enquête ou de règlement international.

Le Comité prend acte de l’observation de l’État partie selon laquelle l’auteure n’a soulevé aucune allégation de discrimination fondée sur le genre devant les autorités et les juridictions nationales avant de saisir le Comité de sa plainte, n’a pas interjeté appel de la décision de justice rendue en 2009 et n’a pas non plus formé de recours devant la Commission pour l’égalité et les droits de l’homme en vertu de la loi de 1998 relative aux droits de la personne. En réponse, l’auteure a relevé que tout au long de la procédure judiciaire, elle s’était présentée comme la mère de ses enfants et que ses allégations fondées sur le genre étaient dès lors présentes dans toutes ses prétentions.

Le Comité rappelle qu’aux termes du paragraphe 1 de l’article 4 du Protocole facultatif, l’auteur d’une communication doit avoir exercé tous les recours internes qui lui sont ouverts dans le système juridique du pays concerné. Il rappelle également sa jurisprudence selon laquelle l’auteur d’une communication doit avoir soulevé sur le fond, au niveau national, les griefs qu’il ou elle souhaite soumettre au Comité, de sorte que les autorités ou les juridictions internes aient eu la possibilité de se pencher sur sa demande.

En l’espèce, l’auteure n’a pas interjeté appel de la décision de justice rendue en 2009, alors même que plusieurs des allégations qu’elle porte en l’occurrence intéressent le comportement et les décisions du juge saisi de l’affaire à l’époque. Elle n’a pas non plus formé de recours devant la Commission pour l’égalité et les droits de l’homme, qui dispose de ressources considérables pour examiner les plaintes relatives aux droits de la personne et à la discrimination.

Dans les circonstances actuelles, le Comité considère que les autorités de l’État partie n’ont manifestement pas été mises en mesure d’examiner les allégations de l’auteure fondées sur le genre – qui sont au cœur de sa communication dont le Comité est saisi – et ont donc été privées de la possibilité d’évaluer ces allégations. En conséquence, le Comité déclare ladite communication irrecevable en vertu du paragraphe 1 de l’article 4 du Protocole facultatif.

Ayant conclu à l’irrecevabilité de la communication en vertu du paragraphe 1 de l’article 4 du Protocole facultatif, le Comité décide de ne pas examiner les autres motifs d’irrecevabilité.

Cela étant, le Comité décide ce qui suit :

a)La communication est irrecevable en vertu du paragraphe 1 de l’article 4 du Protocole facultatif ;

b)La présente décision sera communiquée à l’État partie et à l’auteure.