Nations Unies

CCPR/C/BEL/CO/5/Add.2

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

13 novembre 2012

Original: français

Anglais et français seulement

Comité des droits de l’homme

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 40 du Pacte

Observations finales du Comité des droits de l’homme

Belgique*

Additif

Informations complémentaires reçues de la Belgique sur la suite donnée aux observations finales du Comité des droits de l’homme (CCPR/C/BEL/CO/5)

[20 juillet 2012]

1.Le Comité des droits de l’homme a examiné, en mars 2012, les informations apportées par l’État belge sur le suivi de trois de ses observations finales (CCPR/C/BEL/CO/5) dans le cadre du 5ème rapport périodique de la Belgique (CCPR/C/BEL/5). Par courrier du 29 avril 2012 (annexe 1), la Rapporteuse spéciale chargée du suivi des observations finales du Comité a sollicité de l’État belge des informations complémentaires. Le présent document a, donc, pour objet de répondre à cette demande.

Informations complémentaires concernant le paragraphe 14 des observations finales (CCPR/BEL/CO/5)

2.Il importe de souligner que les Principes de base des Nations Unies sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois (1990) se retrouvent quasi intégralement et tels quels dans la législation belge. En effet, tout le cadre juridique au sens large (lois, arrêtés royaux, arrêtés ministériels, circulaires, etc.) applicable aux services de police et à l’exercice de leurs missions prévoit les mêmes règles d’usage de la force (principes d’opportunité, proportionnalité et subsidiarité, avertissement préalable, délai d’action, rapport circonstancié, formation approfondie et continue des membres des services de police utilisant les armes, existence d’un éventail diversifié d’armes à feu ou autres pour répondre de manière appropriée aux situations, etc.). On peut citer, notamment, le Code pénal, la loi sur la fonction de police (articles 37 et suivants et article 141), la loi sur les armes, l’arrêté royal « armes » du 26 juin 2002 ainsi que l’arrêté royal sur l’armement des services de police du 3 juin 2007, etc. Les principes qui se trouvent dans ces textes ont déjà été développés dans les rapports précédents (principes et procédures concrètes d’utilisation de la contrainte et des armes à feu par la police).

3.Ces principes sont évidemment diffusés au sein de toute la police puisque la contrainte est un de ses moyens d’action majeur et que la police est, dès lors, susceptible de l’utiliser dans toutes ses tâches essentielles. La forme de la diffusion est multiple mais se fait surtout par la formation : tout policier doit être recruté, formé et « recyclé » tout au long de sa carrière tant au niveau de la théorie, c’est-à-dire le cadre légal et les principes de recours à la force, que de la pratique, c’est-à-dire l’utilisation concrète des différents types d’armes, les munitions, les techniques de maîtrise de la violence, etc. Les moniteurs et les programmes de formation sont agréés. Cela est réglé très strictement par les arrêtés et les circulaires.

4.Il faut rappeler que les principes du recours à la force sont également repris dans le Code de déontologie, les valeurs de la police, les notes internes développant le cadre légal, le Guide d’intervention terrain (il s’agit de la « bible » de la police qui comporte des fiches compilées et très pratiques, emportées partout sur le terrain par les policiers qui doivent intervenir), les « bonnes pratiques », les manuels, les rapports d’études et les journées d’études en Belgique ou à l’étranger, etc., qui sont disponibles pour tout le personnel sur le site web de la police.

5.Les principes des Nations Unies en la matière sont donc intégrés, depuis plusieurs années, dans toute la réglementation belge et ils sont appliqués au quotidien sur le terrain. Selon le Comité, les éléments de réponses fournis par la Belgique, en novembre 2011, seraient trop anciens mais, en réalité, ceci logique puisque l’État belge a décrit les mécanismes et garde-fous permettant de baliser le recours à la force, en bref des éléments théoriques. Or, ils n’ont pas vocation à être modifiés ; la réglementation demeure et est mise en application lorsque cela est nécessaire. Ainsi, les « nouvelles » mesures consistent surtout en la poursuite des efforts en matière de formation et le traitement des incidents, selon les principes existants.

6.Il importe de souligner que les formations sont élaborées suivant des critères bien précis et font l’objet d’un agrément et d’un processus continu d’évaluation qui impose de prendre en compte, dans les programmes, les évolutions légales (internationales et belges) et autres qui surviendraient en matière d’emploi de la force et d’usage de l’arme à feu.

7.En ce qui concerne les sanctions appliquées aux policiers, l’État belge souhaite compléter les chiffres mis précédemment à la disposition du Comité. Il s’agit de statistiques détaillées, recueillies dans le cadre de la préparation du troisième rapport belge sur la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (annexe 2). Le premier tableau reprend les plaintes alléguant d’actes de torture ou mauvais traitements par des agents des forces de l’ordre, introduites directement auprès du Comité P pour la période 2005 - 2011. Il importe de souligner qu’ont été incluses, sous ce couvert, les plaintes alléguant des faits de violence policière introduites directement auprès du Comité P. Ces chiffres visent tant les allégations de violence policière contre des biens que contre des personnes. Le deuxième tableau renseigne sur les enquêtes judicaires menées par le service d’enquêtes du Comité P pour le même type d’allégations et pour la même période. Enfin, le troisième tableau reprend les condamnations pénales de policiers pour des actes de torture ou de mauvais traitements, pour la période 2009 - 2011, telles que communiquées au Comité P par les autorités judiciaires, en exécution de l’alinéa 1er de l’article 14 de la loi du 18 juillet 1991 du contrôle des services de police et de renseignements et de l’Organe de coordination pour l’analyse de la menace. La dernière mise à jour des données date du 15 mars 2012. Il importe de souligner que toutes les autorités judicaires ne se plient pas à leur obligation de transmettre au Comité P toutes les condamnations en la matière. Les chiffres ne sont donc pas exhaustifs. Enfin, l’État belge joint également six exemples concrets de condamnations prononcées en 2011 (annexe 3). Il s’agit surtout de cas de violences illégitimes (coups et blessures) exercées contre des personnes maîtrisées ne présentant plus de danger particulier.

8.En vertu de l’alinéa 1er de l’article 14 bis, de la loi précitée du 18 juillet 1991, il est prévu que : « Le commissaire général de la police fédérale, l’inspection générale de la police fédérale et de la police locale et les chefs de corps de la police locale transmettent d’office au Comité permanent P une copie des plaintes et des dénonciations qu’ils ont reçues concernant les services de police, ainsi qu’un bref résumé des résultats de l’enquête lors de la clôture de celle-ci ». Ce système permet au Comité P d’avoir une vue d’ensemble sur les plaintes et les dénonciations et sur l’issue du traitement qui leur est réservé en interne. En vertu du 3ème alinéa du même article, ces informations peuvent être traitées par le Comité P pour les besoins de ses missions légales de contrôle des services de police, en vue d’analyser leur fonctionnement général et global et/ou le comportement des membres de police individuels, ainsi que pour formuler des propositions aux autorités pour améliorer le fonctionnement des services de police. C’est ainsi, par exemple, que le Comité P a effectué pour la période 2004-2006 une enquête de contrôle relative au fonctionnement des services de contrôle interne, comportant notamment un volet sur le traitement des plaintes. Cette enquête a été réactivée en 2009 en ce qui concerne 30 zones de police locale. À ce jour, le Comité P ne dispose toutefois pas d’une évaluation globale du système de traitement des plaintes à l’encontre de membres des services de police. Enfin, il existe une circulaire CP3 du 29 mars 2011 (M.B., 21 avril 2011, http://www.ejustice.just.fgov.be/loi/loi.htm) relative au système de contrôle interne dans la police intégrée/structurée à deux niveaux qui donne, notamment, un cadre de référence pour la gestion des plaintes. L’annexe 2 de la circulaire prévoit, en effet, une procédure (minimale) pour traiter les enquêtes administratives (non judiciaires et non disciplinaires). La mise en œuvre de cette circulaire pourrait satisfaire, en de nombreux points, les recommandations formulées dans le passé par le Comité P sur le traitement interne des plaintes (Rapport annuel 2010, p. 120,http://www.comitep.be/2010/Fr/rapport/2010FR.pdf). Dans le cadre de son enquête précitée s’agissant de 30 zones locales de police, le Comité P ne manquera pas de vérifier comment les services de contrôle interne appliquent la nouvelle circulaire CP3 dans la pratique.

Informations complémentaires concernant le paragraphe 17 des observations finales

9.La mise en œuvre de la loi du 13 août 2011 modifiant le Code d’instruction criminelle et la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive afin de conférer des droits, dont celui de consulter un avocat et d’être assistée par lui, à toute personne auditionnée et à toute personne privée de liberté (M.B., 5 septembre 2011, entrée en vigueur le 1er janvier 2012) est accompagnée d’une évaluation scientifique permanente faite par le Service de politique criminelle du SPF Justice. Depuis l’entrée en vigueur de la loi, le Service a déjà rendu trois rapports (http://www.dsb-spc.be/doc/pdf/Salduz_rapport_intermédiaire_januari_mars_juni.pdf) et il rendra, fin janvier 2013, un rapport final. Il importe de noter qu’il convient de traiter avec prudence les résultats d’évaluation d’une période aussi brève. En outre, la nouvelle façon de travail imposée à de nombreux acteurs par la nouvelle loi va continuer à se développer sur le terrain et d’autres mesures s’imposent encore pour soutenir sa mise en œuvre. Entre autres, une réflexion importante sur le système d’aide juridique gratuite est effectuée.

10.Pour plus d’informations concernant la loi, l’État belge joint en annexe un texte explicatif (annexe 4) préparé à l’occasion du troisième rapport de la Belgique sur la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il importe de signaler que la nouvelle loi ne s’applique pas à la privation administrative de liberté d’étrangers en séjour irrégulier, sous le coup d’un éloignement du territoire. De ce fait, l’État belge ne comprend pas l’observation formulée (entre crochets) par le Comité des droits de l’homme selon laquelle il« estime nécessaire que des informations supplémentaires soient transmises sur les mesures prises [pour assurer que les contrôles des opérations d’expulsion des étrangers soient réalisés de façon indépendante et objective] » et pense qu’une confusion s’est créée entre ses observations portant sur le paragraphe 17 et le paragraphe 21.

Informations complémentaires concernant le paragraphe 21 des observations finales

11.Le formulaire de demande pour la prolongation des subsides du Fonds européen pour les retours couvrant la période allant du 1er janvier 2013 au 30 juin 2015 est en voie d’être complété et sera transmis via l’Office des étrangers afin que celui-ci l’introduise à la Commission européenne le 31 octobre 2012. La reconduction du protocole ne devrait pas poser de difficultés majeures. Il est acquis que le renouvellement des deux fonctionnaires de police détachés à cette fin couvrira la même période que le financement européen.

12.Il importe de souligner que, dans le cadre de la transposition de la Directive 2008/115 du 16 décembre 2008 sur les normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier, l’Inspection générale de la police fédérale et de la police locale (AIG) a été confirmée dans son rôle d’organe de contrôle des retours forcés (loi du 19 janvier 2012, M.B., 17 février 2012 et arrêté royal du 19 juin 2012, M.B., 2 juillet 2012), vu son caractère indépendant par rapport aux autorités décidant des éloignements (Office des étrangers) et aux services de police chargés de leur exécution (LPA-BRUNAT). En outre, la compétence organique de l’AIG sera sans doute bientôt élargie pour pouvoir contrôler l’ensemble du processus des retours forcés à l’égard de tous les acteurs impliqués et non seulement vis-à-vis des policiers.

13.Quant au nombre de contrôles opérés par l’AIG, ceux-ci ont continué à augmenter : ainsi, il y a eu 54 contrôles en 2011, alors que 45 d’entre eux ont déjà été réalisés au cours du premier trimestre de 2012. Au sujet des plaintes déposées, le chiffre est assez constant. On compte toujours, depuis 2006 jusqu’à présent, 6 plaintes enregistrées au niveau de l’AIG. Quant au Comité P, il a reçu 6 plaintes en 2010 et 4 plaintes en 2011 (pour rappel, 4 plaintes en 2007, 2 plaintes en 2008 et 5 plaintes en 2009) et pour la période 2010-2011, un seul cas a été confié au Comité P par les autorités judiciaires. Enfin, on peut rappeler qu’en application de l’article 14 bis de la loi du 18 juillet 1991 du contrôle des services de police et de renseignements et de l’Organe de coordination pour l’analyse de la menace, le Comité P enquête sur les activités ainsi que les méthodes de l’AIG et, à ce titre, effectue donc un contrôle marginal sur la manière dont l’AIG assure sa mission de contrôle des éloignements.