Nations Unies

CAT/C/MAR/4

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

5 novembre 2009

Français

Original: arabe

Comité contre la torture

Examen des rapports présentés par les États parties en application de l’article 19 de la Convention

Quatrièmes rapports périodiques des États parties devant être soumis en 2006

Maroc*, **

[27 avril 2009]

Table des matières

Paragraphes Page

Partie I.Introduction1−134

Partie II.Informations relatives aux articles de la Convention14−1636

Article premier. Définition de la torture14−226

Article 2.Mesures législatives, judiciaires et administratives pourl’interdiction des actes de tortures23−347

Article 3.Interdiction d’expulser ou de refouler un étranger vers unÉtat où il risque d’être soumis à la torture35−479

Article 4.Les actes de torture en tant qu’infractions pénales48−5812

Article 5.Compétence pour connaître des infractions relevant de la torture59−6214

Article 6.Conditions particulières régissant la détention des personnesimpliquées dans des actes de torture63−6614

Article 7.Poursuite des personnes impliquées dans des actes de torture67−7215

Article 8.Extradition des personnes impliquées dans des actesde torture73−7817

Article 9.Entraide judiciaire internationale dans les affaires de torture79−8317

Article 10.Formation et information concernant l’interdiction de la torture84−9518

Article 11.Mesures d’interdiction de la torture dans les lieux de détention96−10420

Article 12.Enquêtes en cas d’actes de torture105−11521

Article 13.Droit des victimes de déposer plainte auprès des autoritéscompétentes116‑12023

Article 14.Droit des victimes d’actes de torture à une indemnisation121−14124

Article 15.Impossibilité d’invoquer les déclarations obtenues par la torture142−14926

Article 16.Interdiction des traitements cruels, inhumains et dégradants150−16328

Partie 3.Principales mesures prises en réponse aux préoccupations du Comité etcomme suite à ses recommandations concernant le troisième rapport périodiquedu Maroc164−17730

Annexes

1.a)Accord d’entraide judiciaire en matière pénale et en matièred’extradition des délinquants entre le Gouvernement marocainet le Gouvernement égyptien33

b)Accord entre le Gouvernement marocain et le Gouvernement belgeen matière d’extradition des délinquants33

2.Mesures prises pour faire réprimer les actes de violence commis pardes agents de police et autres détenteurs d’autorités34

3.Visites effectuées dans les établissements pénitentiairesen 2006, 2007 et 200835

4.Statistiques relatives aux conditions d’incarcérations, 2007 et 200838

5.Statistiques des personnes ayant fait l’objet d’examens médicaux conformémentaux articles 73, 74, et 134 du Cote de procédure pénale de 200839

6.Informations sur l’application des recommandations de l’Instance équitéet réconciliation45

7.Liste des dernières mesures prises concernant les décès dans les postes de policeet de gendarmerie47

I.Introduction

1.Le Royaume du Maroc a l’honneur de soumettre aux membres du Comité contre la torture son quatrième rapport périodique au titre de l’article 19 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ratifiée par le Maroc le 14 juin 1993, qui présente les efforts déployés par le Maroc depuis l’examen de son précédent rapport, ainsi que les progrès accomplis en matière de lutte contre toutes les formes de torture. En soumettant son rapport au Comité, le Maroc affirme son attachement aux valeurs des droits de l’homme et à la collaboration avec les organes des Nations Unies et autres organes internationaux chargés de la protection des droits de l’homme.

2.Le présent rapport met en avant les efforts permanents déployés par le Royaume afin de mettre en œuvre les dispositions de la Convention contre la torture. Il a été établi en collaboration avec les organes gouvernementaux représentant les différents secteurs ministériels et les institutions nationales actives dans le domaine des droits de l’homme.

3.Le présent rapport a fait l’objet d’une réunion tenue avec les représentants de plusieurs associations actives dans le domaine juridique. Ces derniers ont été informés des principaux éléments du rapport et ont eu l’occasion de formuler, dans la mesure du possible, des observations, des critiques et des propositions orales et écrites sur ces questions. Ils ont notamment souligné la nécessité de tenir compte des observations du Comité et de veiller à consolider la collaboration avec le Ministère de la justice ainsi que le rôle des mécanismes de surveillance, y compris celui du parquet et du juge d’instruction.

4.La coopération de toutes ces entités a permis de renforcer leur collaboration et d’établir le présent rapport que le Maroc soumet au Comité contre la torture, conformément aux directives et observations que celui-ci a formulées à l’occasion de l’examen du précédent rapport du pays. En outre, le présent rapport met en avant les progrès majeurs en matière de lutte contre toutes les formes de torture accomplis sur la base d’un scénario réaliste et dans la limite de ce qui est réalisable. Il expose également les domaines dans lesquels il est nécessaire de poursuivre les efforts.

5.Fidèle aux principes des droits de l’homme qu’il reconnaît dans leur acception universelle, le Maroc n’a cessé de prendre toutes les mesures juridiques et institutionnelles nécessaires dans le but de consolider la culture des droits de l’homme et de lutter contre toutes les formes de torture. Le Maroc concrétise son engagement en diffusant la culture des droits de l’homme et en prenant les mesures propres à renforcer cette culture, de la promouvoir et de la protéger sur l’ensemble du territoire marocain. Les efforts du Royaume se sont traduits par son initiative relative à l’autonomie de la région du Sahara, qualifiée par les forums mondiaux de solution juste et réaliste favorisant le règlement pacifique et équitable du conflit relatif au Sahara, dans le respect de la souveraineté du Royaume, de son intégrité territoriale et de son unité nationale.

6.Dans ce contexte, le Maroc a entrepris de mettre en place une méthode de vérification permettant d’évaluer les conditions dans lesquelles sont exercés les droits de l’homme, de déceler les imperfections et de déterminer la méthode à suivre pour y remédier. À cet effet, le pays a lancé un processus d’identification des violations graves des droits de l’homme commises par le passé en instituant l’Instance Équité et Réconciliation. Celle-ci a été chargée de recevoir les plaintes des victimes, de mener les enquêtes nécessaires et d’organiser des auditions publiques au cours desquelles les victimes étaient invitées à décrire les violations qu’elles avaient subies par le passé. L’Instance est ainsi parvenue à examiner les violations graves des droits de l’homme commises dans le passé, à en déterminer les victimes et à évaluer les indemnisations qui devraient leur être versées. Elle a établi un rapport contenant plusieurs recommandations et propositions visant à instituer des mécanismes législatifs et pratiques pouvant garantir que ces violations ne se reproduisent pas et que les principes des droits de l’homme soient inculqués aux générations suivantes.

7.Cette instance a poursuivi l’action engagée par la Commission d’arbitrage indépendante en vue d’indemniser les victimes de disparition et d’enlèvement, survenus entre 1956 et 1999. Elle a, pour ce faire, adopté une démarche spécifique fondée sur le dialogue avec les victimes et leurs ayants droit. Elle a ainsi écouté leurs déclarations, s’est enquise du sort qui a été réservé à un certain nombre de victimes et a versé des indemnisations importantes à ces personnes ou à leurs familles. Elle a également lancé des programmes, actuellement mis en œuvre, visant à entretenir la mémoire collective et à offrir aux victimes une réparation financière et psychologique, individuelle et collective.

8.Dans ce contexte et pour donner suite à la recommandation de l’Instance Équité et Réconciliation encourageant l’élaboration d’une stratégie nationale pour lutter contre l’impunité, un projet de loi qualifiant de crimes les disparitions forcées a été adopté. De plus, la loi no 43-04 faisant de la torture un crime est entrée en application et des dispositions prévoyant l’abolition de la peine de mort ont été introduites dans le projet de code pénal, conformément aux recommandations formulées lors du séminaire de Meknès sur la politique pénale au Maroc.

9.Parallèlement à ces réformes, le Maroc a adopté une stratégie en vue d’aligner la législation nationale sur les dispositions des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Il a ainsi pris les mesures suivantes:

Révision du Code de procédure pénale dans le but de renforcer les mécanismes de protection des droits de l’homme par la consolidation du principe de la présomption d’innocence, de l’équité des procès et de la primauté des traités internationaux sur la législation interne;

Suppression de la Cour spéciale de justice;

Révision du Code des libertés publiques et de la loi sur la presse et la publication;

Organisation d’ateliers pour la révision du Code pénal dans le but d’asseoir les principes de légitimité et d’égalité et de renforcer la portée des instruments internationaux en introduisant dans le projet de code pénal un ensemble de principes cités dans les traités internationaux et en érigeant en infraction pénale des actes tels que le génocide et les crimes contre l’humanité. La révision du Code a également pour but de consolider le plus possible les droits des individus face aux pouvoirs publics en général, tout en tenant compte du fait qu’une telle révision va de pair avec la réforme du Code de procédure pénale.

10.Le Maroc a retiré plusieurs réserves concernant certaines dispositions contenues dans un certain nombre de conventions internationales qu’il a ratifiées. Il a ainsi retiré ses réserves à l’article 14 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, ainsi qu’à l’article 22 de la Convention contre la torture et à l’article 14 de la Convention relative aux droits de l’enfant, mais également aux dispositions de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Sa Majesté le Roi avait ainsi déclaré, à l’occasion du soixantième anniversaire de la Journée internationale des droits de l’homme, le retrait des réserves qui ne sont plus valables depuis l’adoption de législations nationales avancées.

11.Le Maroc a également organisé plusieurs réunions consultatives afin de retirer les réserves restantes aux traités internationaux. La procédure de retrait des réserves est conduite conformément aux mesures prévues par la loi. Il convient de noter que ces mesures s’inscrivent dans le cadre du processus d’harmonisation de la législation nationale avec les instruments internationaux et dans celui de l’élaboration d’une stratégie nationale pour la promotion de la démocratie et des droits de l’homme.

12.Le Maroc reste attaché à poursuivre le processus d’adhésion aux instruments internationaux relatifs à la protection des droits de l’homme et à la lutte contre toutes les formes de torture. Il affirme sa détermination à continuer de coopérer avec le Comité contre la torture et de donner suite à ses recommandations de façon efficace, sachant que le pays a effectivement répondu aux observations formulées par le Comité à l’occasion de l’examen du troisième rapport périodique (CAT/C/CR/31/2/Add.1) ainsi qu’à la lettre du Rapporteur spécial sur la question de la torture.

13.Le présent rapport apporte des réponses aux recommandations du Comité en suivant l’ordre des articles de la Convention. La troisième partie est consacrée aux principaux efforts déployés par le Maroc pour remédier aux problèmes qui préoccupent le Comité et mettre en œuvre ses recommandations issues de l’examen du troisième rapport périodique.

II.Informations relatives aux articles de la Convention

Article premierDéfinition de la torture

14.Le Maroc, qui est profondément attaché aux principes des droits de l’homme et de la préservation de la dignité humaine, continue d’affirmer sa volonté résolue de lutter contre la torture et d’en combattre toutes les formes, et réaffirme son attachement aux différents instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier à l’article 5 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et à l’article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui soulignent l’interdiction de soumettre quiconque à la torture ou à un traitement cruel, inhumain ou dégradant.

15.Conformément à la politique marocaine de lutte contre la torture et pour son interdiction et en réponse aux observations finales du Comité contre la torture concernant le troisième rapport périodique (CAT/C/CR/31/2), auxquelles le Maroc a donné suite dans un premier temps (CAT/C/CR/31/2/Add.1), le législateur national a entrepris, dans un deuxième temps, la tenue d’ateliers pour la révision du Code pénal et l’adoption d’une définition explicite de la torture qui reprend la définition formulée à l’article premier de la Convention internationale contre la torture.

16.L’article 231-1 du Code pénal modifié par la loi no 43.04 du 14 février 2006 répond désormais à la recommandation du Comité contre la torture formulée au paragraphe 6 a) (CAT/C/CR/31/2), en définissant la torture comme suit: «Tout fait qui cause une douleur ou une souffrance aiguë physique ou mentale, commis intentionnellement par un fonctionnaire public ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite, infligé à une personne aux fins de l’intimider ou de faire pression sur elle ou de faire pression sur une tierce personne, pour obtenir des renseignements ou des indications ou des aveux, pour la punir pour un acte qu’elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir commis ou lorsqu’une telle douleur ou souffrance est infligée pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu’elle soit.».

17.La définition figurant à l’article 231-1 du Code pénal marocain reflète les efforts déployés par le Maroc en vue d’aligner le texte de son code sur celui de la Convention en y introduisant tous les facteurs, humains, physiques ou psychologiques, constitutif de l’acte de torture.

18.Il convient de noter que le nouveau projet de code pénal élargit la définition de la torture en y incluant les actes de torture commis non seulement par les agents de la fonction publique, mais également par tout individu quel qu’il soit.

19.Dans un acte de torture, le facteur humain est l’individu qui commet l’acte ou l’infraction. La Convention internationale contre la torture dispose qu’un tel acte doit être commis par un agent de la fonction publique ou à son instigation ou par toute autre personne agissant dans l’exercice de ses fonctions. Cet élément est repris par la législation marocaine qui élargit la notion de fonctionnaire public responsable d’actes de torture à tout individu agissant de la sorte dans l’exercice de ses fonctions.

20.L’élément physique compris dans la définition marocaine de la torture correspond largement à la définition figurant dans la Convention internationale contre la torture, que ce soit au niveau de la nature de l’acte ou du motif pour lequel il est commis. La définition marocaine qualifie de torture tout acte qui cause une douleur ou une souffrance aiguë, qu’il s’agisse d’un acte violent infligé directement et physiquement à la victime, tel que des brûlures ou des chocs électriques, ou d’actes qui sont infligés indirectement à la victime, qui est négligée, privée des conditions fondamentales garantissant la dignité humaine ou soumise à une pression psychologique visant à la terroriser ou à lui inspirer de la crainte.

21.Pour être responsable d’un acte de torture, il suffit d’infliger une souffrance psychologique ou une douleur physique à la personne concernée directement, ou à une tierce personne, dans le but de lui soutirer des informations, des renseignements ou des aveux afin de la punir pour les actes qu’elle a commis ou qu’elle est soupçonnée d’avoir commis.

22.Outre les dispositions évoquées ci-dessus qui érigent la torture en infraction pénale à part entière, le Code pénal contient des dispositions générales prévoyant une protection plus large des individus contre les actes de torture et des sanctions contre les agents de la fonction publique chargés d’appliquer la loi si ceux-ci abusent des pouvoirs qui leur sont conférés, ont recours à la violence ou donnent l’ordre de recourir à la violence sans fondement juridique ou s’ils procèdent à des détentions arbitraires. Le Code pénal leur interdit de transgresser les pouvoirs dont ils sont investis ou de donner l’ordre d’employer la force sans motif juridique valable, sous peine de sanctions pénales sévères et de mesures disciplinaires, dans le but de protéger la sécurité physique des individus.

Article 2Mesures législatives, judiciaires et administratives pour l’interdiction des actes de torture

23.Conformément aux dispositions de l’article 2 de la Convention contre la torture concernant l’adoption de mesures efficaces pour interdire la torture et en réponse aux préoccupations exprimées par le Comité à la suite de l’examen du troisième rapport périodique du Maroc (CAT/C/CR/31/2), et en particulier à l’observation formulée au paragraphe 5 a), la législation marocaine prévoit une série de mesures juridiques, administratives et judiciaires assurant l’interdiction de la torture sur le territoire marocain. Elle garantit notamment les droits reconnus par la Constitution selon lesquels nul ne peut être détenu ou puni que dans les cas et les formes prévus par la loi.

24.La législation marocaine ne prévoit aucune circonstance atténuante pour les actes de torture. La torture étant qualifiée de crime par la loi, elle n’est autorisée sous aucun prétexte, même lorsqu’il s’agit d’exécuter un ordre émanant de responsables de haut rang ou d’une autorité publique. Outre les sanctions pénales, des mesures disciplinaires peuvent être prises contre les responsables de haut rang ayant manqué à leurs obligations. Ceux-ci peuvent être temporairement suspendus de leurs fonctions ou limogés.

25.Le législateur marocain ne prévoit aucune disposition, que ce soit dans le Code pénal ou le droit pénal spécial, permettant d’invoquer des circonstances exceptionnelles pour justifier un acte de torture. Le Code pénal est de portée générale et s’applique à l’ensemble du territoire marocain sans aucune limitation dans le temps ou l’espace.

26.La législation marocaine interdit à quiconque d’invoquer un ordre de ses supérieurs ou des circonstances exceptionnelles, telles qu’un état de guerre ou une menace de guerre, une menace contre la sécurité nationale, l’instabilité politique intérieure ou tout autre état d’exception pour justifier la torture ou d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ce qui répond aux préoccupations formulées par le Comité à ce sujet au paragraphe 5 a) (CAT/C/CR/31/2).

27.Une série de mesures est prévue par la législation marocaine pour donner suite aux dispositions du paragraphe 1 de l’article 2 de la Convention contre la torture préconisant le renforcement de la protection judiciaire contre la torture. Dans ce contexte, le corps judiciaire assure le suivi des actions de la police judiciaire, fait en sorte que des visites hebdomadaires soient effectuées par le ministère public dans les postes de police pour vérifier que les détentions et les conditions de détention sont conformes à la loi, et que des visites soient effectuées périodiquement par les juges chargés de suivre la situation des personnes détenues.

28.Pour renforcer la protection judiciaire contre la torture, la législation marocaine prévoit également une série de mesures pratiques de nature à garantir la sécurité physique des individus. Il est ainsi possible de demander au tribunal de désigner un expert chargé de vérifier l’absence de traces de violence ou de torture sur le corps de l’accusé. Cette mesure est actuellement appliquée, comme en témoigne l’affaire no N321/2006 portée devant la cour d’appel de Casablanca, dans le cadre de laquelle un citoyen marocain avait porté plainte contre des agents de la police de sécurité de Fida’ pour violence et acte de torture et le plaignant, à la demande du ministère public, a été soumis à un examen médical. Une décision similaire a été prise par le ministère public dans plusieurs autres affaires, dont l’affaire no 139/05 devant la Cour d’appel de Marrakech.

29.Le Procureur du Roi est également habilité à faire examiner les accusés par un expert s’il existe des traces pouvant justifier sa décision. Les avocats de la défense sont autorisés à communiquer avec leur client pendant la phase préliminaire de l’enquête, en particulier durant la prolongation de la garde à vue. Ces mesures permettent de mieux surveiller le comportement des agents de la police judiciaire vis-à-vis des personnes placées en garde à vue. Par ailleurs, les agents de la police judiciaire sont tenus d’avertir la famille de la personne placée en garde à vue, sous la supervision du ministère public. Un registre spécial a été mis en place par la police judiciaire à cet effet, en réponse aux recommandations du Comité (CAT/C/CR/31/2, par. 6 c)).

30.Pour s’assurer de la légalité de la détention, les membres des forces de l’ordre sont tenus de vérifier que le mandat d’arrestation est conforme aux conditions prévues par le Code de procédure pénale. Ils ont également l’obligation d’informer les détenus, dès leur placement en garde à vue, de leur droit de communiquer le nom et l’adresse de la personne ou des personnes à avertir.

31.En ce qui concerne le règlement, conforme aux normes internationales, régissant les cas de délinquance juvénile, les directeurs des institutions accueillant des délinquants mineurs ont l’obligation d’enregistrer le nom, l’adresse et le numéro de téléphone des parents, du gardien ou du tuteur du mineur. Les juges des mineurs sont habilités à effectuer au moins une fois par mois des visites périodiques dans les institutions accueillant des mineurs délinquants, des mineurs vivant dans des situations difficiles ou des mineurs victimes d’infractions pénales.

32.Pour renforcer davantage les mesures législatives et judiciaires visant à protéger les individus contre la torture, le Maroc a pris d’autres mesures administratives propres à garantir la sécurité physique des individus. Parmi ces mesures protégeant les détenus contre les mauvais traitements et la torture, la législation marocaine a prévu la constitution de comités administratifs locaux, présidés par le maire, chargés d’effectuer des visites périodiques dans les centres de détention pour surveiller la situation des détenus, prendre les mesures nécessaires pour assurer leur sécurité, leur fournir des services de santé et de la nourriture et faire rapport aux autorités compétentes.

33.En tant que mécanisme national de justice transitionnelle, l’instance Équité et Réconciliation est le produit des efforts progressifs déployés par le Maroc en vue de régler les questions et les affaires relatives aux violations graves des droits de l’homme commises dans le passé et de faire en sorte que les victimes soient dédommagées du préjudice individuel et collectif. Cet organe est également le résultat de débats et de dialogues entre les représentants politiques et les acteurs dynamiques de la société civile. Son objectif est de trouver les meilleurs moyens de régler impartialement et équitablement les affaires de violations graves des droits de l’homme commises dans le passé.

34.L’instance Équité et Réconciliation a entrepris une évaluation globale du processus relatif au règlement des affaires de disparitions forcées et de détentions arbitraires, en collaboration avec le Gouvernement, les autorités publiques, les administrations compétentes, les organisations juridiques, ainsi que les victimes, leur famille et leurs représentants, et ce dans le cadre d’une coopération entre ces différents acteurs, qui a permis de connaître le sort de 742 personnes portées disparues ou dont on était sans nouvelles. Les ayants droit de ces personnes ont été dédommagés dans le cadre du processus de réparation. En outre, les autorités marocaines sont parvenues à résoudre 190 affaires de disparition sur les 248 qui leur avaient été signalées par le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires. Leurs efforts ont été qualifiés d’action exemplaire par le Groupe de travail.

Article 3Interdiction d’expulser ou de refouler un étranger vers un État où il risque d’être soumis à la torture

35.Le Royaume du Maroc, en manifestant son respect pour les droits de l’homme et pour la dignité humaine, ne fait pas de distinction entre les personnes en se fondant sur leur nationalité. Au contraire, il s’engage à respecter les droits de l’homme dans leur universalité et tel que stipulés dans l’article 2 de la Déclaration. Eu égard à ces exigences, en 1993, le Maroc a ratifié la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Tout en travaillant au projet d’une nouvelle loi sur l’asile, le Maroc a entrepris de mettre sa législation nationale en conformité avec les dispositions de la convention précitée en promulguant la loi no 02-03 de 2003 relative à l’entrée et au séjour des étrangers au Royaume du Maroc et à l’immigration irrégulière. Cette loi est compatible avec les obligations internationales en matière de protection des immigrants contre les violences, le dénuement et les expulsions arbitraires. Elle interdit également la discrimination à l’encontre des étrangers au Maroc, quelle que soit leur situation au regard de la loi, et reconnaît leur droit à l’égalité devant la loi en tant que principe constitutionnel (article 5 de la Constitution).

36.L’alinéa c de l’article 29 de ladite loi, en conformité avec l’esprit de la Convention contre la torture, énonce que: «aucune femme étrangère enceinte et aucun étranger mineur ne peuvent être expulsés. De même, aucun étranger ne peut être éloigné à destination d’un pays s’il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu’il y serait exposé à des traitements inhumains, cruels ou dégradants».

37.Même si elle ne mentionne pas la torture, la loi no 02-03 énonce expressément la non-application de tout traitement à l’encontre de l’étranger, que ce soit l’expulsion, le refoulement ou l’extradition vers un pays, où sa vie et sa liberté pourraient être menacées et où il pourrait subir des traitements inhumains, cruels ou dégradants, la menace à la vie constituant une forme de torture telle qu’énoncée par la Convention.

38.Même si l’extradition est, en principe, possible pour tous les délits ordinaires, s’il apparaît aux autorités marocaines qu’une demande d’extradition est dépourvue de raisons objectives et qu’elle est motivée par des considérations relatives à la personne elle-même, son origine ethnique, sa race, sa nationalité ou ses convictions religieuses ou politiques, et que ces considérations mettraient sa vie ou sa liberté en danger ou pourraient conduire à des actes de torture, l’extradition est refusée (article 721 du Code de procédure pénale). Plusieurs accords bilatéraux conclus entre le Maroc et des États européens et arabes tiennent compte de ces considérations, comme, par exemple, l’accord conclu avec la République arabe d’Égypte (chapitre 22) et l’accord conclu avec le Royaume de Belgique (chapitre 3) (voir annexe 1).

39.La loi no 02-03 garantit les droits fondamentaux des immigrants résidant sur le territoire marocain. Son article 26 interdit l’expulsion de femmes étrangères enceintes ou d’étrangers mineurs. De même, les autorités administratives doivent motiver leur décision de refuser à quelqu’un l’entrée du territoire marocain, ainsi que la décision de reconduire quelqu’un à la frontière. La même loi confère aux immigrants le droit de faire appel de ces décisions administratives. D’autres catégories de personnes ne pouvant faire l’objet d’une décision d’expulsion incluent:

L’étranger qui justifie par tous moyens qu’il réside au Maroc habituellement au moins depuis qu’il a atteint l’âge de 6 ans;

L’étranger qui justifie par tous moyens qu’il réside habituellement au Maroc;

L’étranger marié depuis au moins un an, avec un conjoint marocain;

L’étranger qui est père ou mère d’un enfant résidant au Maroc, qui a obtenu la nationalité marocaine, à condition qu’il exerce la tutelle légale sur cet enfant et qu’il subvienne effectivement à ses besoins;

L’étranger résidant régulièrement au Maroc sous couvert de l’un des titres de séjour prévus par la présente loi ou les conventions internationales, qui n’a pas été condamné définitivement à une peine au moins égale à un an d’emprisonnement sans sursis;

La femme étrangère enceinte;

L’étranger mineur.

40.Exceptionnellement, les étrangers peuvent être expulsés si leur présence constitue une menace pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sécurité de l’État ainsi que le prévoient les instruments internationaux, notamment l’article 13 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et l’article 32 de la Convention relative au statut des réfugiés.

41.Il est à noter que si une personne sous le coup d’une décision d’expulsion se trouve dans l’incapacité de quitter le Maroc immédiatement, elle peut être détenue dans un lieu ne dépendant pas de l’administration pénitentiaire jusqu’à ce qu’elle soit en mesure de quitter le pays s’il y a une nécessité impérieuse à cela et conformément à une décision écrite motivée de l’administration susceptible de recours. En pareil cas, l’exécution de l’arrêté d’expulsion est suspendue jusqu’à ce qu’une décision finale soit prise. Il est interdit d’expulser un étranger, s’il est reconnu comme réfugié ou si sa demande d’asile est toujours en cours d’examen.

42.Dans le cadre de la protection accordée aux demandeurs d’asile, suite à la conclusion d’un accord portant création au Maroc d’un Bureau du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR), en juillet 2007, le Maroc s’est engagé dans un programme de coopération avec le HCR en vue d’étudier la situation des réfugiés et de déterminer la meilleure façon de leur fournir une protection conforme aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en général, et aux droits des réfugiés en particulier. Ceci a amené le Ministère de la justice à créer un comité qui, dans le cadre du suivi de ce programme, a organisé plusieurs sessions de sensibilisation et de formation à l’intention des juges. Ce Comité opère en coordination avec un comité mixte gouvernemental, établi par le Ministère des affaires étrangères et de la coopération. Cette coordination vise à traiter ou à éviter tout dysfonctionnement ou toute confusion dans les affaires relatives aux réfugiés. Ce processus vise également à déterminer les causes d’une telle confusion, notamment le besoin de sensibilisation ou de formation, ou la nécessité d’une révision de la législation. Un autre comité comprenant divers secteurs gouvernementaux a organisé des rencontres avec un certain nombre de réfugiés en vue de résoudre la question de leur statut.

43.Lors de la rédaction du projet de loi relative à l’entrée et au séjour des étrangers au Maroc, et à l’immigration irrégulière, le statut des réfugiés n’a pas été négligé. La loi prévoit l’attribution d’une carte de résidence aux étrangers ayant obtenu le statut de réfugié (art. 17). Les étrangers qui se voient refuser le statut de réfugié ont le droit de faire appel de la décision devant le Président du tribunal administratif en sa qualité de juge des référés (art. 20).

44.Un étranger ayant obtenu un permis de résidence conformément à la loi ne peut être expulsé que s’il a fait l’objet d’une condamnation à une peine d’emprisonnement d’une année au minimum sans sursis (art. 26). Un étranger en possession d’un document officiel attestant qu’il est réfugié ou que son dossier est en cours d’examen par le HCR ne peut être expulsé, comme en témoigne ce cas d’un ressortissant iraquien qui a tenté de quitter le Maroc en utilisant un faux passeport. À la suite de son arrestation, il a été jugé et condamné à une peine d’emprisonnement de un mois avec sursis, à la suite de quoi l’administration a ordonné son expulsion vers son pays d’origine. Il a alors déclaré qu’il avait déposé une demande d’asile auprès du HCR. L’autorité administrative a annulé l’arrêté d’expulsion et la personne a été remise en liberté conformément aux articles 31, 32 et 33 de la Convention relative au statut des réfugiés.

45.Compte tenu de l’importance particulière accordée à la situation des travailleurs immigrés, une direction spéciale de l’immigration est créée au sein du Ministère de l’intérieur, ainsi qu’un observatoire national chargé de mettre au point une stratégie nationale sur l’immigration. Le Maroc continue de veiller à ce que les immigrés jouissent de tous leurs droits, notamment leur droit à un procès équitable, à la présence d’un avocat de la défense à toutes les étapes du procès, au recours à un interprète durant l’interrogatoire et au respect des heures légales d’intervention pour leur arrestation.

46.La situation géographique du Maroc en fait un point de départ pour un grand nombre d’émigrants des pays voisins. Pour remédier à cette situation, le Maroc a signé un Mémorandum d’accord avec les autorités italiennes. En outre, dans le cadre d’accords conclus avec d’autres pays d’Afrique, le Maroc fournit une assistance pour aider ces derniers à mettre en œuvre des projets économiques, sociaux et culturels dans les secteurs de la santé et de l’agriculture visant à endiguer la vague d’immigration venue de la région subsaharienne.

47.En raison de l’ampleur prise par les migrations irrégulières et l’immigration clandestine, l’adoption de mesures économiques et sociales dans les pays hôtes est devenue une nécessité impérative. De même, les gouvernements et les organisations internationales doivent renforcer leur coopération s’ils veulent régler le problème de l’immigration clandestine.

Article 4Les actes de torture en tant qu’infractions pénales

48.Au titre de la loi marocaine, les actes de torture sont considérés comme une infraction à part entière et sont traités en vertu de dispositions différentes de celles régissant les agressions ou les violences commises par les agents chargés de l’application des lois.

49.Les sanctions prévues pour les actes de torture varient en durée et en nature en fonction de la forme et de la gravité de l’acte commis. Un fonctionnaire qui torture une autre personne est puni par une peine allant de cinq à quinze ans d’emprisonnement et d’une amende comprise entre 10 000 et 30 000 dirhams (1 euro = 10 dirhams).

50.Dans les cas d’actes de torture commis par un groupe de personnes − auteurs ou complices − ou d’actes de torture commis en faisant usage d’armes ou en menaçant d’en faire usage, la sanction peut atteindre vingt ans d’emprisonnement et une amende comprise entre 20 000 et 50 000 dirhams. La même sanction peut également être imposée si cette infraction est commise contre un témoin, une victime ou une partie civile parce que l’intéressé a fait une déclaration, porté plainte, engagé une action en justice, ou pour l’empêcher de ce faire.

51.Afin de protéger des groupes vulnérables tels que les mineurs, les personnes ayant des besoins spéciaux, les personnes âgées et les femmes enceintes contre des actes de torture commis par des agents publics, la sanction est aggravée et prévoit l’emprisonnement à vie.

52.Tenant en compte les conséquences des formes graves de torture, la législation marocaine impose des sanctions plus sévères pour les actes de torture ayant occasionné des lésions corporelles graves à la victime. La sanction peut aller jusqu’à vingt ans d’emprisonnement pour les actes ayant causé la perte ou l’amputation d’un membre, la cécité partielle ou totale ou un handicap permanent. La sanction peut aller jusqu’à vingt ou trente ans de prison si la préméditation est établie ou si des armes ont été utilisées.

53.La législation marocaine prend en compte un certain nombre de principes de base visant à rendre sa dignité à la victime. Elle a également étendu le champ de la responsabilité de tous ces individus impliqués directement ou indirectement dans des actes de torture. En vertu de la loi marocaine, les tribunaux sanctionnant un fonctionnaire pour avoir commis un acte de torture sont tenus de publier le jugement prononcé à son encontre dans un ou plusieurs journaux ou de le faire placarder en certains endroits pour alerter l’opinion sur les actes de torture et sur la sévérité de la sanction prévue pour leurs auteurs.

54.Conformément à l’article 4 de la Convention contre la torture, la législation marocaine a étendu la responsabilité au complice, qui devient passible de la même sanction que l’auteur. Toute personne aidant en toute connaissance de cause l’auteur d’un acte de torture de quelque manière que ce soit est considéré comme complice et est sanctionné de la même peine que l’auteur de l’acte. Un fonctionnaire qui a connaissance d’un acte de torture et feint d’ignorer sa commission est considéré comme auteur de l’acte. La multiplicité des auteurs est considérée comme une circonstance aggravante portant la peine jusqu’à vingt ans d’emprisonnement.

55.Afin de garantir qu’il n’existe pas d’impunité pour les auteurs d’actes de torture, la législation nationale, en conformité avec l’article 4 de la Convention, considère la tentative de pratiquer la torture de la même manière que l’acte de torture avéré. L’acte de torture est en effet considéré en tous les cas comme une infraction pénale, à partir du moment où l’auteur a initié l’acte.

56.Les actes de torture sont soumis aux mêmes règles générales concernant le délai de prescription prévu par le Code pénal et le Code de procédure pénale, à savoir vingt ans. C’est un délai considéré suffisant pour prévenir l’impunité. En réponse aux préoccupations du Comité exprimées à l’alinéa f du paragraphe 5 du document CAT/C/CR/31/2, cette disposition des règles générales peut être invoquée par toutes les parties. S’agissant des recommandations faites par l’Instance équité et Réconciliation en matière d’indemnisation, le Maroc n’a pas encore pris la décision d’accorder une amnistie générale.

57.En réponse à la recommandation du Comité figurant à l’alinéa e du paragraphe 6 du document CAT/C/CR/31/2, et dans le contexte du renforcement de la protection juridique des personnes contre toute mesure arbitraire prise par les agents publics dans l’exercice de leurs fonctions, la justice marocaine a entamé des actions en justice à l’encontre d’un certain nombre de fonctionnaires. En 2003 et 2004, on a dénombré 14 semblables actions en justice. En 2005, 20 actions ont été engagées, contre 17 cas en 2006 et 17 autres cas en 2007.

58.Les tribunaux marocains ont prononcé diverses condamnations pour agression à l’encontre de plusieurs fonctionnaires (voir annexe 2). Dans une affaire examinée par la cour d’appel d’Al-Ayoun, deux fonctionnaires, l’un, officier des forces de sécurité et l’autre, lieutenant-colonel des forces de police, accusés de coups et blessures avec usage d’une arme ayant entrainé la mort sans intention de la donner, ont été condamnés à dix ans de prison ferme (affaire en appel no 7/165). Dans une autre affaire, six gardes au pénitencier agricole de Meknes ont été accusés d’avoir commis des actes de torture, des attentats à la pudeur et des violences (affaire no 2006/248). Le tableau ci-après indique le nombre de procédures engagées à l’encontre de fonctionnaires de police pour la période 2007-2008.

Année

Catégorie

Nombre d ’ affaires

2003

Fonctionnaire de police

14

Autre personne investie d’une autorité

20

2004

Fonctionnaire de police

6

Autre personne investie d’une autorité

8

2005

Fonctionnaire de police

8

Autre personne investie d’une autorité

12

2006

Fonctionnaire de police

10

Autre personne investie d’une autorité

7

2007

Fonctionnaire de police

3

Autre personne investie d’une autorité

3

2008

Fonctionnaire de police

4

Autre personne investie d’une autorité

3

Article 5Compétence pour connaître des infractions relevant de la torture

59.Au titre de l’article 5 de la Convention contre la torture, chaque État partie est tenu d’adopter les mesures nécessaires pour établir sa compétence sur les infractions relevant de la torture. À cette fin, la loi marocaine a énoncé plusieurs dispositions fondant la compétence de l’État en matière des poursuites à l’encontre des auteurs d’actes de torture. Le chapitre 10 du Code pénal stipule que la législation pénale marocaine s’applique à tous les ressortissants marocains, étrangers et apatrides résidant sur le territoire marocain, en tenant compte des exceptions prévues par le droit public interne et le droit international. La législation pénale marocaine s’applique également aux infractions commises en dehors du Maroc, si elles relèvent de la compétence des tribunaux pénaux marocains.

60.Le territoire national ne se limite pas à la terre, à l’espace aérien et aux eaux territoriales du Maroc. Il inclut les navires et les avions battant pavillon marocain, qu’ils soient ou non propriété du Maroc. L’article 704 du Code de procédure pénale énonce que les tribunaux marocains sont compétents pour entendre les cas d’infractions commises sur le territoire marocain, quelle que soit la nationalité de l’auteur des faits. Cet article stipule également que la compétence des tribunaux marocains s’étend à toute infraction dont un des éléments a été commis au Maroc. Cette compétence s’applique également aux actes de complicité, même si l’infraction principale est commise à l’extérieur du Maroc par des étrangers.

61.Les dispositions du Code de procédure pénale s’appliquent à tous les détenteurs de la nationalité marocaine même s’ils commettent une infraction à l’extérieur du pays. Le même principe s’applique aux ressortissants étrangers qui commettent une infraction à l’encontre d’un citoyen marocain sur le territoire d’un autre État.

62.Toutes les dispositions juridiques énoncées par le droit marocain visent à garantir que les auteurs des crimes de torture répondent de leurs actes grâce à l’extension de la compétence à toutes les infractions portant atteinte à la sécurité des personnes.

Article 6Conditions particulières régissant la détention des personnes impliquées dans des actes de torture

63.Le Code de procédure pénale, en conformité avec l’article 6 de la Convention contre la torture, offre aux personnes arrêtées un certain nombre de garanties compatibles avec les principes fondamentaux reconnus internationalement en matière de procès équitable. Elles comprennent, en vertu de la loi marocaine, la notification immédiate par la police judiciaire de la famille de la personne placée en garde à vue. Cette notification peut se faire par téléphone, oralement ou par écrit, par un membre des forces de police. Les registres doivent mentionner le nom de la personne notifiée et la méthode, le lieu et l’heure de la notification.

64.Selon la loi, une personne dont la garde à vue a été prolongée a le droit de demander à ce qu’un officier de la police judiciaire contacte un avocat. L’avocat ayant accepté de représenter la personne détenue a le droit de demander au ministère public de voir son client dès la première heure de prolongation de la détention. La première entrevue entre un avocat et son client est limitée à trente minutes sous la supervision d’un officier de police judiciaire dans des conditions qui garantissent la confidentialité de cette supervision. S’il s’avère difficile pour l’avocat, notamment en raison de la distance ou pour toute autre raison, d’obtenir l’autorisation requise pour voir son client, l’officier doit, à titre exceptionnel, autoriser l’avocat à contacter la personne détenue et immédiatement présenter un rapport à ce sujet au ministère public.

65.L’avocat nommé peut, au cours de la période de prolongation de la garde à vue, présenter des documents et des observations écrites à la police judiciaire ou au ministère public pour qu’ils soient inclus dans le dossier de l’affaire en échange d’un récépissé, qui répond aux préoccupations soulevées par le Comité sur ce point à l’alinéa c du paragraphe 5 du document CAT/C/CR/31/2. Le Procureur du Roi, ou un de ses adjoints, peut ordonner l’arrestation de l’étranger impliqué dans l’affaire quand une demande d’extradition de personnes soupçonnées d’être impliquées dans des actes de torture est délivrée. Il doit immédiatement en informer le Ministre de la justice et le Procureur du Roi auprès du Conseil suprême, puis interroger le détenu dans les vingt-quatre heures suivant l’arrestation pour établir son identité et pour l’informer des charges pesant sur lui.

66.Les personnes arrêtées pour avoir commis un acte de torture sont placées en détention provisoire dans une des prisons de l’État. Un détenu peut recevoir la visite des membres de sa famille et de l’avocat chargé de son dossier. Dans ce dernier cas, la visite est privée et sa durée n’est pas limitée. Si le détenu est un étranger, il a accès à un représentant du service consulaire ou de la mission diplomatique du pays dont il est le ressortissant. Le Maroc respecte les dispositions de la Convention de Vienne sur les relations consulaires de 1963. Un étranger détenu a également le droit de contacter la représentation diplomatique du pays dont il est ressortissant ou du pays de la compétence duquel il ressort. En vertu de cette disposition, les autorités judiciaires du Maroc ont procédé en 2008 à 748 notifications d’actions en justice engagées contre des ressortissants étrangers aux missions diplomatiques étrangères.

Article 7 Poursuite des personnes impliquées dans des actes de torture

67.En conformité avec les articles 6 à 9 de la Convention contre la torture, le Royaume du Maroc a adopté un certain nombre de mesures législatives, institutionnelles et pratiques visant à renforcer les garanties accordées aux personnes soupçonnées d’avoir commis les actes visés à l’article 4 de la Convention. Ces garanties sont accordées à toutes les personnes soupçonnées de contrevenir aux dispositions du Code pénal.

68.Le nouveau Code de procédure pénale de 2003 a introduit plusieurs conditions venant renforcer les garanties précitées. Le principe de la présomption d’innocence a été énoncé expressément pour la première fois dans la législation pénale marocaine consacrant ainsi les droits garantis au titre du chapitre 10 de la Constitution. Le Code de procédure pénale détaille la procédure de détention et la période pendant laquelle il est possible de placer un suspect en détention provisoire ou en garde à vue. Le Code énonce également les procédures d’enquête préliminaire soumises au contrôle du ministère public, à qui la loi confère de larges pouvoirs s’agissant de superviser le travail de la police judiciaire, d’inspecter les lieux de détention et d’ordonner l’examen médical d’un suspect pour vérifier s’il a été victime de torture. La demande d’examen médical peut être faite par le suspect lui-même, le ministère public ou le juge d’instruction si ses soupçons sont éveillés par des marques sur le corps du suspect.

69.Afin de renforcer les garanties juridiques prévues par la législation pour assurer l’intégrité physique des personnes contre toute torture ou violence, l’article 446 du Code pénal a été modifié pour délier les médecins et leurs assistants du secret médical et leur permettre de signaler tout cas de violence ou de maltraitance à l’égard des enfants ou des femmes au sein du domicile conjugal ou à l’extérieur. Les expertises médicales sont utilisées comme preuves dans les affaires criminelles, en particulier lorsqu’elles sont corroborées par des déclarations de témoins et autres éléments à charge ayant un lien avec l’affaire.

70.Les tribunaux utilisent ces expertises pour identifier les auteurs des actes de violence et de torture. Un exemple d’une telle procédure est fourni par la décision no 20.82 de la cour d’appel de Tanger dans l’affaire no 13/99/369. Les faits peuvent se résumer à l’arrestation d’une personne et à la fouille de son véhicule. La fouille n’a révélé aucun élément incriminant, cependant le propriétaire du véhicule a été torturé jusqu’à en perdre connaissance. Il a été transporté à l’hôpital où son décès a été constaté. Selon la version des faits donnée par les fonctionnaires de police impliqués dans l’incident, l’état de santé de la victime s’est détérioré suite à sa prise de comprimés hallucinogènes. Toutefois, les organes judiciaires ont décidé d’élargir le champ de leurs investigations: ils ont recueilli les déclarations de témoins et ont ordonné une autopsie pour déterminer si la victime était sous l’influence de drogues. Le déroulement des événements a été résumé dans la décision de la cour d’appel de Tanger de la manière suivante: «Le témoignage d’un témoin oculaire, celui d’autres témoins qui ont reconnu avoir entendu les cris du défunt avant son transfert à l’hôpital et l’autopsie pratiquée par le centre antipoison qui a confirmé que la victime n’avait absorbé aucune substance psychotrope ou toxique ainsi que le rapport d’un médecin selon lequel le défunt a subi des violences avant le décès et a reçu des coups qui sont la cause directe du décès, sans parler du fait que les accusés ont caché l’identité de la victime et se sont rendus à l’hôpital à deux reprises pour s’assurer qu’elle était décédée, sont autant d’éléments de preuve décisifs qui établissent que les accusés ont eu recours à la violence contre le défunt et causé sa mort sans intention de la donner. Du fait que, comme l’indique le rapport d’autopsie, la mort a été causée par les violences exercées par les accusés sur la victime, le tribunal pénal prononce les accusés coupables d’usage de la violence ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Les accusés sont par conséquent condamnés à une peine de dix ans d’emprisonnement.».

71.Un autre cas est l’affaire no 98/192 examinée par le tribunal pénal de la chambre d’appel de Taza. Cinq fonctionnaires de police ont été accusés de coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner. L’incident s’est produit lors d’une intervention de la police contre un groupe de personnes se livrant au trafic d’alcool au cours de laquelle une personne a été arrêtée et détenue dans un commissariat. Le détenu était sous l’influence de l’alcool et a été transféré à l’hôpital où son décès a été constaté. Durant son examen de l’affaire, le tribunal a examiné les éléments de preuve, notamment les déclarations de témoins et le résultat de l’autopsie, et a confirmé les accusations de coups et blessures causées par une arme. Les accusés ont été déclarés coupables et condamnés à un an de prison ferme. Tous ces faits illustrent la suite donnée par le Maroc à la recommandation du Comité figurant à l’alinéa k du paragraphe 6 du document CAT/C/CR/31/2.

72.Après le prononcé du jugement, le condamné exécute sa peine privative de liberté sous la supervision d’un juge de l’application des peines, institution créée par le nouveau Code de procédure pénale pour soutenir le rôle des services du Procureur général dans le contrôle de l’exécution des peines privatives de liberté d’une manière qui garantisse les droits des détenus. Le juge de l’application des peines contribue à préparer la réinsertion sociale des détenus. La législation lui confère de larges pouvoirs de supervision des établissements pénitentiaires conformément aux articles 596 et 616 du Code de procédure pénale qui prévoient que ce juge effectue des inspections mensuelles dans les prisons ressortant de sa juridiction, qu’il veille à ce que les droits des prisonniers soient respectés comme stipulé dans les articles de la loi régissant les lieux de détention, qu’il veille à la légalité de la détention et supervise la mise en œuvre des procédures disciplinaires. Il est également tenu de faire rapport sur ses inspections au Ministre de la justice et au ministère public après avoir vérifié le registre de la prison et contrôlé les conditions des détenus en utilisant des fiches spéciales (voir l’annexe 3).

Article 8Extradition des personnes impliquées dans des actes de torture

73.En conformité avec l’article 8 de la Convention contre la torture, la loi marocaine contient une série de dispositions juridiques relatives aux modalités de la coopération judiciaire internationale en matière d’extradition dans les affaires de torture ou de tentative de pratiquer la torture.

74.Les dispositions de la loi marocaine régissant l’extradition des délinquants ne font certes pas spécifiquement référence à la torture, parce que le Code de procédure pénale n’énumère pas en détail les infractions pouvant donner lieu à une extradition, mais le Code reconnaît à ce titre les infractions et autres actes qui, dans le droit de l’État demandeur, sont passibles de sanctions pénales ou correctionnelles privatives de liberté pour une durée minimale d’un an.

75.Par conséquent, les auteurs d’actes de torture, en vertu de la loi marocaine, sont susceptibles d’être extradés, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention.

76.Le même principe s’applique aux accords bilatéraux que le Maroc a conclus avec d’autres États. La loi marocaine n’exclut pas les auteurs d’actes de torture du champ d’application des accords d’extradition, lorsqu’un pays avec lequel le Maroc a conclu un accord bilatéral en fait la demande. Seules les infractions à caractère politique, militaire et douanier peuvent faire exception à cette règle.

77.Le Maroc a reçu un certain nombre de demandes d’extradition émanant de divers pays et dont plusieurs étaient relatives à des actes d’agression et des violences, et a répondu à ces demandes. Un exemple en est la demande faite par les autorités judiciaires françaises en 2008 à la justice marocaine de leur remettre un ressortissant néerlandais accusé d’avoir commis des violences et des agressions. La requête a été satisfaite.

78.En vertu des accords d’extradition bilatéraux, il n’existe pas d’empêchement à ce que les auteurs d’actes de torture soient extradés, à condition toutefois de respecter les dispositions des conventions internationales. Le droit marocain donne la précédence aux instruments internationaux sur le droit interne en matière de coopération judiciaire internationale, après s’être assuré que les personnes extradées ne seront pas soumises à la torture dans le pays demandeur. Ceci reflète la détermination du Maroc à coopérer dans le domaine judiciaire afin de lutter contre la délinquance, en particulier les actes de torture susceptibles d’être commis par des agents de l’État chargés de faire appliquer les lois.

Article 9Entraide judiciaire internationale dans les affaires de torture

79.Le Maroc, au titre de ses obligations internationales, s’engage à fournir l’assistance adéquate aux autres États en ce qui concerne les infractions visées par la Convention. À cette fin, la législation nationale a prévu des dispositions dans le droit interne visant à faciliter l’entraide judiciaire internationale. De même, plusieurs accords internationaux, bilatéraux et multilatéraux ont été conclus dans le but de lutter contre toutes les formes de criminalité, notamment la torture, et de faciliter l’entraide judiciaire entre les États.

80.Les dispositions du nouveau Code de procédure pénale réglementent les relations judiciaires avec les autorités étrangères (art. 713 et suiv.). Elles donnent priorité à l’application des conventions internationales sur les lois nationales en matière de coopération judiciaire internationale. Les commissions rogatoires internationales peuvent inclure la collecte d’éléments de preuve ayant trait à un acte de torture tels que l’audition de témoins, l’inspection de sites ou la confiscation de matériel lié à une infraction. Les commissions rogatoires sont généralement transmises par la voie diplomatique. Mais, dans les cas urgents, elles peuvent être adressées directement aux juges compétents.

81.La loi marocaine prévoit la saisie, sur la demande d’un autre État, de tous les articles susceptibles d’avoir été utilisés pour la commission d’actes de torture ou de tous les instruments qui peuvent servir de pièce à conviction, qu’ils aient été trouvés en la possession de la personne dont l’extradition est demandée ou à un stade ultérieur. Il est également permis de remettre ces pièces à l’État demandeur même lorsque la personne elle-même n’est pas extradée pour des raisons telles que le décès ou la fuite.

82.Le Maroc accepte également les citations à comparaître de témoins vivant sur son territoire délivrées par d’autres États dans des affaires criminelles. Il est également permis de transférer temporairement le témoin, s’il est détenu dans un établissement pénitentiaire marocain, pour qu’il témoigne ou soit interrogé en personne, à condition qu’il soit rendu à la garde du Maroc dans le délai imparti par les autorités marocaines et que des garanties sur la sécurité du témoin, notamment sa protection contre toute agression physique, soient offertes. Le Maroc accepte également les plaintes officielles présentées par d’autres États contre des ressortissants marocains responsables d’actes de torture ou d’autres infractions, que ce soit au Maroc ou à l’étranger. Le prévenu est poursuivi et jugé au Maroc en conformité avec la législation nationale.

83.Le Royaume du Maroc est lié par plusieurs accords bilatéraux et multilatéraux relatifs à l’entraide judiciaire internationale dans ce domaine. Il faut y voir une indication de la détermination du Maroc à coopérer de façon positive avec les autres États dans la lutte contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Ces accords sont énumérés dans les rapports précédents du Maroc publiés sous les cotes CAT/C/66/Add.1 (p. 12) et CAT/C/24/Add.2 (p. 13) respectivement.

Article 10Formation et information concernant l’interdiction de la torture

84.Conformément à l’article 10 de la Convention contre la torture et aux directives générales concernant la forme et le contenu des rapports que les États parties doivent présenter (CAT/C/4/Rev.3), le Maroc a pris un certain nombre de mesures destinées à diffuser la culture des droits de l’homme en tant qu’ensemble de principes universels applicables à tout être humain. Cela s’est manifesté par l’initiative prise par le Royaume, en coopération avec la Confédération helvétique, appelant le Conseil des droits de l’homme à adopter une déclaration universelle pour l’éducation et la formation dans le domaine des droits de l’homme. Cette volonté découle de la ferme conviction qu’une telle éducation est importante pour les professionnels chargés de faire appliquer la loi.

85.Sur le territoire national, le Maroc met en œuvre un programme national d’éducation aux droits de l’homme dont l’objectif est l’intégration des principes des droits de l’homme dans les programmes des établissements d’enseignement primaire et secondaire et des universités. Le principal objectif en est d’ancrer la culture des droits de l’homme chez les jeunes, d’un bout à l’autre du système éducatif. Ce programme a été lancé en 1995 pour coïncider avec la Décennie des Nations Unies pour l’éducation dans le domaine des droits de l’homme (1995-2004) et s’est poursuivi dans le cadre du programme universel ouvert de 2005-2007 et des années suivantes.

86.Pour assurer une diffusion aussi large que possible de l’éducation dans le domaine des droits de l’homme, en particulier auprès de ceux qui travaillent quotidiennement à la mise en œuvre et l’application des lois, l’éducation aux droits de l’homme a été incluse en tant que matière à part entière dans les programmes de formation destinés à la police, à la gendarmerie et aux autres personnes investies d’une autorité. Une évaluation des autres programmes de formation, sous l’angle des droits de l’homme, a par ailleurs été entreprise dans le cadre d’un accord de partenariat conclu entre le Ministère de l’intérieur et le Conseil consultatif, avec le même objectif.

87.Dès le début des années 90, l’éducation aux droits de l’homme a été intégrée dans les programmes de formation des juges à l’Institut supérieur de la magistrature. Des actions similaires ont été entreprises sur le terrain en faveur des agents de l’administration pénitentiaire afin de les aider à comprendre comment intégrer les droits de l’homme dans leur pratique à l’égard des personnes dont ils ont la charge. Parallèlement, une campagne informationnelle et culturelle a été lancée pour sensibiliser à l’importance du respect des droits de l’homme et d’autres valeurs telles que la tolérance, la justice, l’égalité et la dignité. Le Centre de formation des cadres pénitentiaires d’Ifrane, qui relève de l’administration pénitentiaire, a pour sa part organisé plusieurs stages de formation consacrés aux droits de l’homme, suivis par 2 700 directeurs de prison et autres membres du personnel pénitentiaire.

88.Dans le cadre d’une initiative plus vaste associant différentes composantes de la société, notamment le Gouvernement, les institutions nationales, les organisations de la société civile et les militants de la scène juridique, divers séminaires et stages de formation destinés aux responsables de l’application des lois ont été organisés par le Ministère de la justice en collaboration avec l’Association internationale pour la prévention de la torture. Deux stages de formation ont ainsi été suivis par des magistrats du parquet, des juges d’instruction, des policiers, des membres de la Gendarmerie royale, des directeurs de prison et des membres d’autres services d’appui. Ces stages se sont déroulés en décembre 2007 et en décembre 2008 sur le thème «Le cadre légal et l’interprétation judiciaire de la torture en tant qu’infraction pénale». Le Conseil consultatif des droits de l’homme a organisé en coopération avec l’Association une journée d’étude consacrée au Protocole facultatif à la Convention. La Présidente du Groupe de travail des Nations Unies chargé du Protocole facultatif, divers experts internationaux et locaux ainsi qu’un certain nombre de représentants des pouvoirs publics, d’entreprises, de l’Institut international des droits de l’homme de Strasbourg et du Centre pour les droits de l’homme de Genève étaient présents à cet événement.

89.Ces ateliers avaient pour principal objectif de sensibiliser les professionnels responsables de l’application des lois. Il va sans dire que cette sensibilisation, la mise en avant du respect des droits de l’homme et le rejet de tout traitement inhumain ne pouvaient qu’avoir un impact positif sur l’attitude de ces professionnels en termes de protection des libertés et de la dignité des individus.

90.Dans le souci de renforcer encore les garanties juridiques encadrant le travail policier, l’organisme de supervision des forces de police a défini des méthodes scientifiques tendant à prévenir toute pratique susceptible de porter atteinte aux libertés et aux droits des suspects. De même, un code de conduite du policier arabe a été rédigé, qui met l’accent sur les droits de l’homme et l’interdiction de la torture.

91.Pour prévenir toute violation qui risquerait d’être commise par les services de la sûreté lorsqu’ils dispersent des manifestations ou doivent faire face à des «sit-ins» ou des émeutes, ces unités ont adopté des méthodes et techniques d’intervention compatibles avec les normes internationales. La formation théorique et pratique dispensée à ces forces tient compte du respect des instruments internationaux, dans la droite ligne de ce qui se pratique dans plusieurs pays européens. De plus, le Gouvernement marocain s’est engagé à rédiger une loi relative au droit de manifester.

92.En ce qui concerne le respect de la dignité des détenus, la loi marocaine sur les prisons prévoit un certain nombre d’obligations auxquelles le personnel pénitentiaire doit se conformer, sous peine de sanction. Est notamment prévue l’interdiction d’user de la violence ou de tenir des propos obscènes contre les détenus, ainsi que de les menotter ou les enchaîner.

93.Dans le même ordre d’idées, des campagnes de sensibilisation à l’intention du personnel pénitentiaire traitent des thèmes du respect des détenus et de la dignité humaine. Les directeurs et agents pénitentiaires participent à des cours et à des séminaires abordant l’interdiction de la torture et le respect des droits de l’homme. Ce programme a été lancé il y a plusieurs années et continue à être mis en œuvre.

94.Dans le cadre des efforts déployés par le Royaume pour soutenir la culture des droits de l’homme et l’éducation dans ce domaine, un projet conjoint associant institutions nationales, pouvoirs publics, organisations et organes de la société civile et juristes a été lancé en avril 2006. Ce projet a débouché sur un plan de travail national pour la promotion de la culture des droits de l’homme, «Le rôle des citoyens dans la promotion des droits de l’homme», qui vise à inciter la société à développer des valeurs communes, au centre desquelles se trouvent les principes de dignité, de liberté, de solidarité égalitaire, de tolérance et d’acceptation de la diversité, dans la vie privée et dans la vie publique, comme aussi dans la conduite des institutions publiques envers les individus. Sur une période de cinq ans, ce plan de travail se concentre sur trois grands domaines liés: l’éducation, la sensibilisation et la formation des professionnels. Il s’agit dans chacun de ces trois domaines de tenter d’injecter du dynamisme dans la société pour permettre à ses composantes − individus, groupes et institutions − d’acquérir les valeurs et la culture des droits de l’homme.

95.En coopération avec l’Union européenne et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), le Maroc a aussi adopté un plan national pour la démocratie et les droits de l’homme, s’appuyant sur la participation conjointe de tous les secteurs. Ce plan a été lancé sous la supervision d’un comité représentant divers pouvoirs publics, institutions nationales et organisations de la société civile.

Article 11Mesures d’interdiction de la torture dans les lieux de détention

96.Le Maroc est fermement convaincu de la nécessité de disposer de mesures adéquates pour interdire la torture dans les lieux de détention. Conformément à l’article 11 de la Convention contre la torture, la loi marocaine énonce une série de procédures et de mesures concernant les règles et méthodes d’interrogatoire ainsi que les modalités de détention et le traitement des personnes placées en garde à vue, en détention ou incarcérées.

97.En droit marocain, diverses garanties juridiques et judiciaires sont données, en particulier s’agissant de la possibilité de contacter immédiatement un avocat, un médecin et un membre de la famille. Ces garanties ont vocation à assurer aux personnes détenues un traitement humain et une protection contre tout dommage corporel, quel que soit leur lieu de détention.

98.Le droit marocain habilite les magistrats du parquet à superviser les procédures, la durée et le début de la détention dans les lieux prévus à cet effet. De par la loi, le Procureur du Roi est tenu de visiter les lieux de détention une fois par semaine et d’examiner les dossiers des personnes maintenues en détention et de vérifier les conditions de détention de ces dernières. Lors de ces visites, le Procureur du Roi est habilité à faire des déclarations sur les conditions de détention, les périodes de repos et la nutrition (voir annexes 3 et 4).

99.En complément de ces visites périodiques, le Procureur du Roi et ses adjoints procèdent aussi à des visites inopinées dans les centres de détention de manière à vérifier que les conditions de détention y sont conformes à la loi et que le traitement des détenus y est humain. Le Conseil consultatif des droits de l’homme, des organisations de la société civile et des membres de la Fondation Mohammed V mènent eux aussi des visites dans différents postes de police et établissements pénitentiaires.

100.Lorsque des cas de traitement inhumain sont portés à sa connaissance, le parquet n’hésite pas à inspecter le centre de détention en cause afin d’établir un rapport documentant les violations et de faire des observations quant aux lacunes à combler. Lorsque de telles lacunes sont rapportées, le Procureur du Roi ordonne une enquête judiciaire, en application de laquelle les personnes responsables seront traduites devant un tribunal.

101.Dans le cadre du mécanisme de supervision des centres et conditions de détention, le droit marocain octroie aux autorités judiciaires le pouvoir de s’assurer que les conditions de détention sont humaines et la prévention de tout acte de torture ou traitement dégradant.

102.Dans le même contexte, le Procureur du Roi procède régulièrement à des visites dans les établissements pénitentiaires en application de l’autorité que la loi confère au parquet en termes de garantie de conditions de détention humaines.

103.Le Conseil consultatif des droits de l’homme a préparé un manuel spécial sur les visites des centres de détention, qui s’inspire largement des articles du Protocole additionnel

104.Conscient de la nécessité d’améliorer les conditions de vie des détenus et l’état des établissements pénitentiaires dans le cadre des efforts visant à garantir des conditions humaines et à interdire la torture, le Maroc a constitué une nouvelle commission chargée de l’administration des prisons et de la réinsertion des détenus. La mission de cette commission est de garantir des conditions conformes aux normes internationales, de prévenir toute violation de la part des personnes chargées de faire appliquer la loi dans ces établissements, de garantir la sécurité physique des détenus, d’offrir de meilleures conditions de vie aux détenus en vue de les aider à se réinsérer, de superviser la construction de nouveaux établissements conformes aux normes internationales, et d’accroître le budget alloué à l’alimentation et aux services médicaux − autant de réponses aux préoccupations exprimées par le Comité au paragraphe 6 i) du document CAT/C/CR/31/2.

Article 12Enquêtes en cas d’actes de torture

105.Conformément à l’article 12 de la Convention contre la torture, en vertu duquel tout État partie veille à ce que les autorités procèdent immédiatement à une enquête impartiale chaque fois qu’il y a des motifs raisonnables de croire qu’un acte de torture a été commis sur tout territoire sous sa juridiction, le Maroc a mis sa législation nationale en conformité avec cette obligation. Les autorités judiciaires marocaines sont tenues par la loi d’ouvrir une enquête dès lors qu’elles reçoivent des informations ou des allégations faisant état d’actes de torture.

106.Dans le souci de veiller à ce que les autorités s’acquittent de leur devoir d’enquêter sur de tels cas, la loi marocaine ne limite pas cette action à la seule autorité judiciaire mais accorde aussi à la personne victime d’actes de torture le droit de demander à ces autorités de la soumettre à un examen médical pour déterminer si une enquête doit être ouverte.

107.L’article 74 du Code de procédure pénale impose au Procureur du Roi d’ordonner une expertise médicale dès lors qu’il lui est demandé d’enquêter sur un acte de violence ou qu’un tel acte est porté à sa connaissance.

108.Pour aller encore plus loin, la loi marocaine fait aussi obligation aux magistrats du parquet d’ordonner un examen médical dans les affaires impliquant des mineurs. En fait, de par la loi, tous les mineurs se plaignant d’avoir été soumis à des violences doivent subir un examen médical.

109.En droit marocain, la protection des personnes contre les actes de torture n’est pas limitée à la victime elle-même. Une tierce partie a le droit d’agir, comme dans le cas de mineurs dont on craint qu’ils aient été victimes de torture. Un avocat agissant au nom d’un mineur peut ainsi demander à l’autorité judiciaire de se saisir de cette affaire et d’ordonner un examen médical.

110.L’examen médical doit donner lieu à un rapport médical, établi par un médecin assermenté et détaillant la nature des violences ou tortures infligées ainsi que l’ampleur des dommages physiques et des traumatismes psychologiques induits. Ce rapport est transmis au parquet, qui engagera des poursuites, lesquelles conduiront éventuellement à un procès. Un certain nombre de condamnations ont été prononcées dans des affaires impliquant des policiers, des gendarmes et des agents pénitentiaires (voir annexe 2).

111.La loi marocaine a étendu le champ des affaires entraînant obligatoirement un examen médical. Celui-ci n’est plus seulement obligatoire au niveau du juge du siège et de l’organe de répression sous sa tutelle, mais aussi au niveau du juge d’instruction, lequel doit ordonner un examen médical sur la demande de tout individu placé en détention qui déclare avoir subi des tortures, ou de son avocat.

112.Si le juge du siège reste le premier garant des libertés de la personne et est responsable de la protection contre les agressions et dommages physiques, l’article 134 du Code de procédure pénale oblige aussi les juges d’instruction à ordonner un examen médical immédiat sur toute personne dès lors que des signes de torture sont détectés (voir annexe 5).

113.Dans les affaires de cette nature, les autorités judiciaires ne ménagent aucun effort pour faire apparaître la vérité, grâce à une enquête approfondie. Le parquet, pour sa part, ouvre sans délai une enquête indépendante et impartiale, et traduit les auteurs présumés en justice.

114.La détermination de l’État à faire disparaître tout acte contraire à la loi en vigueur et représentant une menace à la sécurité physique des individus transparaît dans le nombre d’enquêtes judiciaires ouvertes contre des agents des forces de l’ordre. Dans 17 affaires ouvertes en 2006 pour des actes relevant de la Convention contre la torture et mettant en cause des policiers, les peines prononcées sont allées de la mutation à la peine d’emprisonnement en passant par le blâme, l’avertissement et le renvoi. En 2008, six cas seulement ont été signalés.

115.Dans sa gestion des événements récemment survenus dans la ville de Sidi Ifni, qui ont donné lieu à des plaintes pour recours à des méthodes dégradantes, le système judiciaire marocain a démontré l’importance du respect des droits de l’homme sans distinction d’appartenance à des groupes ethniques, politiques ou religieux. Le parquet a lancé une enquête suite aux plaintes des victimes. Toutes les personnes responsables ont été poursuivies en justice conformément à la loi. Une commission parlementaire d’établissement des faits a mené sa propre enquête sur les violations commises au cours des événements. Des représentants de l’État, des représentants de la société civile et des citoyens ont été entendus par cette commission, et des membres de la commission se sont rendus sur les lieux. La conclusion énoncée par la commission dans son rapport est qu’il n’y a eu ni viol ni homicide, contrairement à ce qui avait été dit par certaines organisations. La commission a formulé un certain nombre de recommandations, dont l’une était de faire en sorte que les responsables des événements rendent des comptes pour leurs actes. Elle a aussi recommandé certaines améliorations à apporter à l’infrastructure économique et sociale, en appelant toutes les entités politiques et organisations de la société civile à inviter leurs membres à la modération. Dans une autre recommandation, elle a invité instamment les médias à couvrir les événements de manière responsable et à faire preuve de respect pour l’éthique de la profession et pour la loi.

Article 13Droit des victimes de déposer plainte auprès des autorités compétentes

116.Conformément à l’article 13 de la Convention contre la torture, le Code de procédure pénale consacre les principes de primauté du droit et d’égalité devant la loi. Des garanties de protection des droits des accusés sont prévues dans les procédures en vigueur concernant les personnes placées en détention et la supervision des services de l’ordre par le parquet. Dans le cadre de cette procédure, l’état physique et la santé de la personne en détention et son besoin de repos entre les périodes d’interrogatoire sont pris en compte, dans la droite ligne de la recommandation formulée par le Comité au paragraphe 5 e) du document CAT/C/CR/31/2.

117.En réponse aux recommandations et préoccupations exprimées par le Comité lors de l’examen du troisième rapport périodique du Maroc, le Royaume a pris un certain nombre de mesures institutionnelles visant à enquêter sur les cas de torture et de violation des droits de la personne. Il a ainsi, entre autres choses, créé au sein du Ministère de la justice une unité spéciale chargée de recueillir les griefs des victimes touchant aux mesures judiciaires et de procédure. Cette unité analyse les plaintes et les renvoie aux autorités compétentes, qui les transmettent à leur tour aux tribunaux pour suite à donner.

118.Une cellule de communication a également été créée pour assurer une voie de leur communication entre le Gouvernement et le Conseil consultatif des droits de l’homme. Celle-ci est chargée d’étudier les plaintes déposées par des organisations de la société civile, la famille des détenus ou les victimes elles-mêmes. Les enquêtes faisant suite à ces plaintes sont menées sans délai et efficacement, en coordination avec le parquet. Toutes les parties sont entendues, y compris le demandeur, et les éléments de preuve sont rassemblés pour constituer le dossier. Si nécessaire, un examen médical est réalisé avant que le parquet ne décide de l’action à engager.

119.Pour aller plus loin encore dans la protection des droits des individus, il est possible pour une victime de déposer plainte directement auprès du Président du tribunal ou du juge d’instruction. Il lui est aussi possible de se constituer partie civile pour demander réparation des dommages subis.

120.Concernant les recommandations du Comité quant au nombre de plaintes, les enquêtes ont abouti à la résolution de certaines des infractions et à la traduction des auteurs en justice, notamment:

Décès du dénommé Al-Harithi Al-Tijania, tué par une balle du fusil du commandant d’une brigade de la gendarmerie royale de Berkane alors que celui-ci le poursuivait pour trafic de carburant: le parquet de la cour d’appel de Wajda a ordonné une enquête sur cet incident dans le cadre de la première enquête préliminaire no 7/282 datée du 2 mars 2007 et en vertu du rapport d’autopsie no 7/50 du 3 juillet 2007, laquelle enquête l’a conduit à ordonner une enquête pour homicide sur la conduite du commandant. Une action judiciaire a été ouverte sous le no 7/252 et est en cours d’instruction;

À propos du décès d’un individu au poste de police de Marrakech évoqué par le Comité au paragraphe 5 h) du document CAT/C/CR/31/2; à l’issue d’un procès en appel en 2008, un officier de la police judiciaire a été poursuivi et condamné à dix ans d’emprisonnement.

Article 14Droit des victimes d’actes de torture à une indemnisation

121.Conformément à l’article 14 de la Convention contre la torture, la loi marocaine consacre le droit des victimes à une indemnisation et en fait un principe juridique fondamental. Quels que soient la nature du préjudice subi et son auteur, toute personne, physique ou morale, a droit à une indemnisation intégrale dont la valeur est proportionnelle à la gravité du dommage qu’il soit dû à une infraction ou autre.

122.Ces principes généraux s’appliquent également aux victimes d’actes de torture infligés aussi bien par des agents des pouvoirs publics, en tant qu’agents du Gouvernement, que par des individus ou des bandes organisées. Le droit des victimes d’actes de torture à une indemnisation est un droit absolu accordé à toutes les victimes, quel que soit l’auteur de l’infraction commise à leur encontre.

123.La double peine fait partie des mesures juridiques relatives aux droits des victimes de torture prévues par la loi marocaine conformément aux principes énoncés dans la Convention, notamment l’article 14. Cette mesure vise à protéger les victimes en tenant l’auteur de l’infraction personnellement responsable de son acte.

124.Pour renforcer davantage la protection des victimes de torture, la législation marocaine leur a accordé le droit de demander réparation à l’État, dans la mesure où ce dernier est responsable des erreurs commises par ses agents. Le corps judiciaire marocain a confirmé ces garanties dans plusieurs de ses décisions, notamment la décision no 33/94 du tribunal administratif de Fès en date du 19 juin 1996, en vertu de laquelle la responsabilité pénale du service de sécurité a été confirmée indépendamment de celle des individus ayant commis les faits. Des décisions similaires ont été rendues par le même tribunal, par exemple la décision no 128 du 12 novembre 2002 dans laquelle le tribunal a reconnu le service de sécurité pénalement responsable des suites des coups portés à un individu par l’un de ses agents.

125.La loi marocaine offre diverses garanties d’indemnisation équitable et proportionnelle à la gravité du préjudice subi, y compris la réhabilitation la plus complète possible de la victime en cas de séquelles psychologiques ou physiques.

126.Il convient de noter qu’en matière de torture, la législation marocaine applique le principe de la double peine à l’auteur des faits et à l’État dans les cas où l’acte est commis par un agent de la fonction publique, de telle façon que la responsabilité de l’un n’exclut pas celle de l’autre. La victime peut ainsi demander entière réparation des deux à la fois.

127.Afin que l’indemnisation soit versée dans un délai raisonnable, la législation marocaine a prévu des procédures simplifiées permettant d’éviter tout retard susceptible de nuire aux droits des victimes.

128.Conformément au paragraphe 1 de l’article 14 des directives générales concernant le contenu des rapports présentés par les États parties (CAT/C/4/Rev.3), le Code de procédure pénale prévoit des mesures accordant aux victimes le droit de recourir à la justice pour obtenir une indemnisation. Ainsi, l’article 2 du Code de procédure pénale dispose que toute infraction donne ouverture à une action publique pour l’application des peines et, si un dommage a été causé, à une action civile en réparation de ce dommage.

129.La législation marocaine prévoit une indemnisation pour toutes les formes de préjudice causé par un acte de torture. L’article 7 du Code de procédure pénale cite notamment les dommages physique, matériel et moral. Les victimes disposent de plusieurs recours pour obtenir une indemnisation dans un délai raisonnable. Elles peuvent engager à la fois une action en indemnisation et une action publique devant la Cour pénale. Elles peuvent également exercer une action civile, indépendamment de l’action publique, devant la juridiction civile compétente.

130.Pour protéger le droit des victimes à une indemnisation adéquate, la législation marocaine ne prévoit aucune prescription en la matière, de telle sorte que l’extinction de l’action publique n’entraîne pas celle de l’action en indemnisation. Le délai de prescription auquel est soumise l’action publique n’est pas appliqué aux actions en indemnisation exercées par les victimes devant la juridiction civile compétente.

131.Compte tenu du préjudice subi par les victimes et afin de leur épargner les difficultés d’une procédure complexe, le Code de procédure pénale leur facilite l’obtention d’une indemnisation en prévoyant des mesures visant à simplifier les procédures judiciaires. Par conséquent, les victimes peuvent déposer une demande d’indemnisation à tous les stades de la procédure judiciaire, pendant l’enquête, le procès, ou séparément, devant une juridiction civile. Aucune formalité n’est imposée quant au dépôt d’une demande d’indemnisation; les victimes peuvent formuler leur demande auprès du tribunal, oralement ou par écrit.

132.La justice marocaine s’est prononcée, dans plusieurs de ses décisions, en faveur de personnes victimes de coups et de blessures infligés par des agents de police et des gendarmes. Les auteurs des infractions ont été condamnés à des peines privatives de liberté, tandis que des indemnités financières importantes ont été versées aux victimes. À titre d’exemple, un inspecteur de police a été condamné à un an de prison et la victime a obtenu 15 000 dirhams de dédommagement en vertu d’une décision rendue par la cour d’appel de Tétouan le 23 mars 2008.

133.Il ressort clairement de ce qui précède que la législation marocaine prévoit une série de mesures garantissant les droits des victimes de torture à une indemnisation. Sont ainsi garantis, premièrement, le droit à une indemnisation, deuxièmement, l’élargissement de la portée du droit de demander réparation, et troisièmement, la facilitation des procédures judiciaires permettant d’obtenir une indemnisation. L’objectif de ces mesures est d’assurer à la victime une indemnisation intégrale et appropriée du préjudice subi directement. Ce principe est clairement énoncé à l’article 8 du Code pénal. En outre, ces mécanismes juridiques mis à la disposition des victimes de torture reflètent tous la conformité dudit code aux dispositions de l’article 14 de la Convention contre la torture.

134.Pour garantir le droit des victimes et des personnes dont le soutien de famille est décédé des suites d’actes de torture à une indemnisation appropriée favorisant leur pleine réhabilitation, des mesures juridiques sont prévues par le Code pénal et le Code de procédure pénale pour faire en sorte que les ayants droit de la victime puissent être indemnisés.

135.Le Maroc a connu une expérience unique grâce au travail accompli par l’Instance Équité et Réconciliation (IER). Cet organisme a été créé comme suite à une recommandation formulée par le Conseil consultatif des droits de l’homme dans le but de régler les affaires relatives aux violations graves des droits de l’homme commises au Maroc dans le passé.

136.Dans le cadre de son mandat, cet organisme s’est employé à faire la lumière sur les violations des droits de l’homme et les actes de torture commis par des agents des pouvoirs publics ou par leurs auxiliaires.

137.L’objectif de l’IER était de consolider les principes des droits de l’homme et de la dignité humaine. À cette fin, plusieurs pouvoirs lui ont été conférés dont le premier est celui de faire toute la lumière sur les violations des droits de l’homme et de mener les enquêtes nécessaires; recevoir les plaintes relatives à ces violations et consulter les archives officielles; et recueillir les informations et les données fournies par toutes les autorités en vue d’élucider ces affaires.

138.Dans sa quête de la vérité, l’IER a eu recours à différents moyens dont des recherches juridiques fondées sur l’examen des rapports, des enquêtes menées sur le terrain par le biais d’auditions auxquelles ont participé les victimes, les témoins et les responsables de l’application de la loi, et des enquêtes effectuées sur place en lien avec les cas de violation des droits de l’homme et les lieux où les faits ont été commis. L’IER est parvenue à résoudre près de 17 000 cas et a indemnisé ainsi 10 000 personnes. Elle avait organisé 3 500 audiences afin de recueillir des témoignages et examiné de près les données portant sur les violations subies par les victimes.

139.Outre l’indemnisation matérielle des victimes ou de leurs ayants droit, l’IER a formulé des propositions et des recommandations concernant la réadaptation psychologique et médicale, la réinsertion sociale des victimes susceptibles d’en bénéficier et le parachèvement du processus de règlement des problèmes juridiques, administratifs et professionnels auxquels sont confrontées les victimes. Ainsi, le nombre total de bénéficiaires est passé à 16 892 personnes et le montant total des indemnisations a atteint 665 942 395,00 dirhams le 3 décembre 2008 (voir annexe 6).

140.En ce qui concerne les affaires d’entités ou de groupes ayant subi collectivement les séquelles de violences politiques et toutes les violations qui en découlent, l’IER a réservé une place importante à l’origine sociale des victimes lors de la réception et du traitement des plaintes. Elle a également accordé un intérêt particulier à la réparation collective en recommandant l’adoption de programmes pour le développement social, économique et culturel devant profiter à plusieurs villes, villages et entités, ainsi que la réhabilitation des anciens centres de détention non conformes à la loi et leur transformation en lieux pour entretenir la mémoire collective et rappeler l’importance de l’enseignement des droits de l’homme.

141.Par ailleurs, les victimes de violations graves des droits de l’homme bénéficient désormais d’une couverture médicale de nature à leur permettre d’adhérer au régime d’assurance maladie obligatoire, à l’initiative de la Caisse nationale des organismes de prévoyance engageant le Gouvernement à rembourser les frais entraînés par l’affiliation des victimes à l’organisme chargé de la gestion et de la mise en œuvre de cette couverture. Un total de 12 000 personnes bénéficie actuellement de cette assurance maladie (voir tableau ci-après).

Informations sur l ’ application des recommandations de l’Instance Équité et Réconciliation

Nombre de bénéficiaires de la couverture médicale

Nombre de bénéficiaires de la réinsertion sociale

Réparation par voie administrative

Nombre de personnes ayant obtenu une indemnisation

3 087

770

90

16 892

702 à l’examen

247 à l’examen

247 à l’examen

Article 15Impossibilité d’invoquer les déclarations obtenues par la torture

142.L’article 293 du Code de procédure pénale du Maroc dispose que, comme tout autre élément de preuve, les déclarations sont laissées à l’appréciation des juges. Les aveux obtenus par la violence ou la contrainte sont nuls et les auteurs de ces actes encourent les peines prévues par le Code pénal.

143.En réponse aux préoccupations exprimées par le Comité à la suite de l’examen du précédent rapport périodique du Maroc (CAT/C/CR/31/2, par. 5 g)), la législation marocaine dispose que toute déclaration obtenue par la torture est nulle et non avenue. Cette disposition est également appliquée dans le domaine de l’ordre public, son objectif étant de protéger aussi bien l’intérêt des individus que l’intérêt général. Non seulement le législateur marocain ne reconnaît pas les aveux obtenus par la contrainte, dans le souci d’en garantir la légalité, mais il déclare aussi pénalement responsable toute personne ayant eu recours à la contrainte, afin d’empêcher tout acte et pratique préjudiciables aux droits de l’homme.

144.Le Conseil supérieur considère que tout aveu obtenu par la torture rend la procédure nulle (décision no 631 rendue le 24 décembre 1973 et décision no 955 du 3 juin 1961). Les notions de contrainte et de violence visées à l’article susmentionné couvrent aussi bien l’aspect physique que moral.

145.Il convient de noter que l’article 294 du Code de procédure pénale dispose que les lettres échangées entre l’avocat et son client ne peuvent servir d’éléments de preuve. La législation marocaine affirme ainsi le caractère confidentiel du travail mené par la défense et ne tient pas compte des déclarations tirées d’une lettre adressée par l’accusé à son avocat dans laquelle il avoue avoir commis une infraction donnée. Cette disposition vise à protéger et à immuniser la relation avocat-client en vue de réaliser le but ultime de la justice, celui d’accéder à la vérité.

146.En outre, le nouveau Code de procédure pénale ne reconnaît pas de force probante aux rapports des services de police judiciaire dans le cadre des crimes, mais il la leur reconnaît dans les cas des délits (art. 291).

147.En vertu de la décision du Conseil supérieur du 25 décembre 1963: «si le rapport de police contient un aveu de culpabilité, les juges chargés de l’affaire sont pleinement habilités à évaluer la valeur de l’aveu en question, en tenant compte des conditions dans lesquelles il a été obtenu. S’ils déclarent l’accusé non coupable, leur décision n’affecte en rien la validité du rapport de police pour autant que son authenticité n’ait pas été remise en question par les juges.». La justice veille ainsi à examiner tout élément susceptible de prouver le contraire de ce qui est rapporté par la police, en vertu du principe général de la liberté d’appréciation accordée aux juges. De même, selon l’arrêt rendu par la cour d’appel de Rabat le 15 janvier 1992, les rapports de police n’ayant pas respecté les formes légales en matière pénale perdent leur valeur juridique et ne peuvent servir qu’à titre d’informations (voir le rapport soumis par le Maroc au Comité des droits de l’homme sous la cote CCPR/C/MAR/2004/5).

148.Pour être invoqué comme un élément de preuve, l’aveu doit satisfaire aux exigences ci-après, établies par le corps judiciaire:

Avoir été formulé par l’accusé en personne;

Correspondre aux faits et aux circonstances dans lesquels les actes ont été commis;

Être explicite et clairement formulé, sans aucune ambiguïté;

Être formulé par une personne jouissant de toutes ses facultés mentales;

Être formulé volontairement par l’accusé. Tout aveu obtenu par la violence, la contrainte ou la torture est nul. De même, tout aveu donnant lieu à un lien de causalité entre les déclarations faites et un recours à la contrainte, à la violence ou à la torture doit être écarté. Pour prononcer l’irrecevabilité d’un aveu, le tribunal doit avoir la preuve qu’un tel lien existe.

149.Le tribunal ne peut rendre une décision qu’après avoir entendu les plaidoiries prononcées pendant le procès et discutées oralement devant lui (art. 287), étant donné que l’accusé est présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité soit prouvée par la justice à l’issue d’un procès équitable dans lequel il aura bénéficié de toutes les garanties juridiques nécessaires (art. 1). L’accusé bénéficie également d’une assistance judiciaire réalisant son droit d’être représenté, tout au long de la procédure, par un avocat commis d’office et à titre gratuit.

Article 16Interdiction des traitements cruels, inhumains ou dégradants

150.Au Maroc, la protection de la dignité humaine et de la sûreté physique et psychologique des individus est un droit indivisible et inaliénable accordé à toutes les personnes contre toutes les formes de répression et de cruauté quelle que soit leur gravité. Le Royaume du Maroc interdit toutes les formes de traitements inhumains ou dégradants. De même, la loi protège tous les individus contre toute forme d’acte arbitraire pouvant porter atteinte à la dignité ou à la sécurité humaine, infligé par un fonctionnaire ou un agent chargé de l’application de la loi, même s’il ne s’agit pas d’un acte de torture.

151.Le Code pénal prévoit des sanctions pour tout agent de la fonction publique qui commet ou ordonne de commettre un acte arbitraire portant atteinte à la liberté individuelle ou aux droits civiques des individus. Il interdit aux fonctionnaires, aux agents de la force publique et autres détenteurs d’un pouvoir d’user, sans motif légitime, de violences dans l’exercice de leurs fonctions. S’ils enfreignent cette règle, ceux-ci sont passibles du double de la peine encourue par un simple particulier. Pour un acte de violence grave, ils encourent jusqu’à trente ans d’emprisonnement (art. 225 et 231 du Code pénal). Toute personne ayant incité, aidé ou collaboré à la commission d’un tel acte est poursuivie pour complicité et s’expose aux mêmes sanctions.

152.L’État marocain est personnellement responsable des indemnisations accordées au civil aux victimes d’actes arbitraires ou de violations de la liberté individuelle commis par des fonctionnaires. Cet engagement garantit le droit de toute personne victime de traitements cruels, inhumains ou dégradants à une indemnisation et l’application d’une sanction aux auteurs des faits.

153.Les mesures de protection des victimes prévues par la législation nationale couvrent les aspects de la dignité humaine et de la vie privée des individus. Tout fonctionnaire qui s’introduit de force dans le domicile d’un particulier s’expose à une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à un an (art. 230 du Code pénal). De même, la détention arbitraire est interdite et punie d’emprisonnement pour une durée proportionnelle à la gravité de l’acte. Toutes les personnes jouissent du droit à la protection de son honneur, de sa dignité et de sa liberté individuelle. Tout traitement discriminatoire constitue une infraction à part entière (art. 431-1 à 431-4 du Code pénal).

154.Il convient de noter que les dispositions de la Convention contre la torture sont appliquées de la même manière à toutes les formes de traitement inhumain. En effet, au Maroc, le droit à la dignité humaine ainsi qu’à la sécurité physique et psychologique constitue un droit indivisible, garanti en toute circonstance et protégé contre toutes les formes d’actes arbitraires, qu’il s’agisse de torture ou d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants.

155.Pour renforcer la protection des individus contre toutes les formes de comportements ou de pratiques dégradants pour la dignité humaine, le Maroc a lancé une série de réformes fondamentales dans tous les domaines, dont la modification du Code de procédure pénale qui réglemente désormais les arrestations effectuées par les agents de police judiciaire. La durée de la garde à vue a été réduite à quarante-huit heures et peut, exceptionnellement, être prolongée de vingt-quatre heures supplémentaires. En outre, les conditions de détention ont été améliorées, notamment en ce qui concerne la séparation obligatoire des hommes et des femmes, ainsi que des adultes et des mineurs placés en garde à vue. Les familles des personnes placées en garde à vue sont averties de la situation de ladite personne par un agent de la police. Ces réformes ont toutes été lancées à la suite des recommandations formulées par le Comité au paragraphe 5 d) du document CAT/C/CR/31/2.

156.La loi no 23-98 relative à l’organisation et au fonctionnement des établissements pénitentiaires et le décret en fixant les modalités d’application assurent aux détenus une série de garanties de base conformes à l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus ainsi qu’aux dispositions de la résolution 34/169 de l’Assemblée générale des Nations Unies du 17 décembre 1979 relative au Code de conduite pour les responsables de l’application des lois. Cette résolution interdit tout acte dégradant ou inhumain à l’égard des détenus. Elle interdit également aux fonctionnaires et aux personnes autorisées à pénétrer dans les lieux de détention d’user de violences contre les détenus ou de leur adresser des propos dégradants ou insultants, et leur fait obligation de traiter les détenus de manière décente et équitable, sans distinction d’aucune sorte.

157.Pour protéger la dignité humaine des détenus, les travaux qu’ils effectuent ne doivent pas être pénibles. De même, l’utilisation de menottes, de chaînes ou de camisole de force est interdite, sauf dans des cas exceptionnels et pour une durée déterminée, sur ordre du directeur de l’établissement ou sur indication du médecin, s’il n’existe aucun autre moyen de maîtriser le détenu concerné et de l’empêcher de se nuire ou de nuire à autrui.

158.Les mesures disciplinaires appliquées aux prisonniers excluent toutes les formes de sanctions cruelles ainsi que la mise en isolement des mineurs. Lorsqu’ils comparaissent devant le Conseil de discipline, les détenus ont le droit d’être accompagnés par la personne de leur choix. Ils ont également le droit de porter plainte auprès du directeur du centre de détention, du représentant général de l’administration pénitentiaire, des autorités judiciaires ou de l’organe régional chargé de l’inspection des établissements pénitentiaires. Avec l’entrée en vigueur de la loi faisant de la torture un crime, l’administration pénitentiaire a adressé un mémorandum aux responsables de tous les lieux de détention les invitant à respecter les conditions légales régissant l’application des mesures disciplinaires et de la mise en isolement. Elle a également organisé des réunions auxquelles ont participé les directeurs de centres de détention et le personnel pénitentiaire afin de leur présenter les modifications apportées par la nouvelle loi sur la torture, les sensibiliser à la nécessité de respecter la dignité humaine des détenus et les inviter à réhabiliter les cellules d’isolement afin qu’elles soient conformes aux normes de protection des droits des détenus.

159.Outre les garanties générales accordées à tous les détenus sans distinction, les femmes détenues bénéficient de mesures spéciales protégeant leur intimité et adaptées à leurs conditions personnelles. Bien que les centres pénitentiaires accueillent des détenus des deux sexes, les quartiers réservés aux femmes sont entièrement séparés de ceux des hommes et sont surveillés par des gardiennes. Les hommes, y compris le personnel pénitentiaire masculin et le directeur du centre, ne sont pas autorisés à pénétrer dans les quartiers des femmes, sauf dans les cas précisés dans les directives administratives et en étant accompagnés d’au moins un membre du personnel féminin.

160.Il convient de noter l’importance du travail collectif et de la contribution de la société civile et de la Fondation Mohammed VI à la réinsertion des détenus et à la promotion de leurs droits. Plusieurs associations organisent des activités sociales diversifiées au sein des centres pénitentiaires ainsi que des programmes facilitant la réinsertion des détenus. En outre, plusieurs centres pédagogiques ont été construits par la Fondation Mohammed VI dans différents lieux de détention.

161.Pour remédier au surpeuplement des prisons, le Maroc a lancé une politique à deux volets visant d’une part à rationaliser la détention par la publication de textes et l’organisation de cours et de stages à l’intention des responsables de l’administration pénitentiaire afin de les pousser à ne pas user avec excès de la détention préventive et, d’autre part, à appliquer les mesures et les sanctions de substitution, telles que la réconciliation et la libération sous caution, les amendes et les peines avec sursis. Par ailleurs, le projet de Code pénal en cours d’élaboration prévoit de nouvelles formes de sanctions de substitution, telles que le travail d’intérêt général et la privation de certains droits en tant qu’alternative à la peine privative de liberté.

162.Par ailleurs, pour faire face au surpeuplement des prisons, le Maroc s’est employé à accroître la capacité d’accueil des lieux de détention. À cet effet, un programme a été lancé dans le but de construire de nouveaux centres de détention conformes aux normes, offrant un espace de trois mètres carrés par détenu, qui permettraient de répondre aux besoins de tous les tribunaux de première instance. Huit nouvelles structures pénitentiaires ont été construites depuis 2001 d’une superficie totale de 27 000 m2. De même, plusieurs prisons ont été équipées et agrandies dans différentes parties du pays. Il existe actuellement au Maroc 59 centres de détention qui représentent une surface totale de 81 338 m2. L’accent a été mis sur les régions souffrant d’un problème de surpeuplement des prisons, comme la région d’Agadir dans laquelle trois prisons ont été construites ces dernières années dans les villes d’Ait Melloul, de Tiznit et de Taroudant. Le Maroc a ainsi répondu aux recommandations pertinentes du Comité (CAT/C/CR/31/2, par. 5 i)).

163.Il convient de souligner les difficultés et les obstacles financiers et humains que rencontre le Maroc dans ses efforts pour garantir des conditions de détention optimales conformes aux normes internationales. La détermination du Maroc et sa volonté de mener les réformes nécessaires et de protéger les détenus de tout traitement dégradant demeurent inébranlables et lui permettront de bâtir une société démocratique dans laquelle la dignité humaine est préservée, l’administration et les fonctionnaires sont au service des individus et la loi et les institutions sont respectées.

III.Principales mesures prises en réponse aux préoccupations du Comité et comme suite à ses recommandations concernant le troisième rapport périodique du Maroc

164.Comme suite aux recommandations du Comité contre la torture invitant le Maroc à consacrer une partie de son rapport aux mesures prises pour tenir compte des recommandations et des préoccupations du Comité (CAT/C/CR/31/2, par. 6 j)), il convient de souligner que le Maroc a toujours fait preuve de coopération et persévère dans l’effort. Il saisit l’occasion du présent rapport pour fournir des renseignements suffisants sur les mesures prises pour appliquer les recommandations du Comité et répondre à ses préoccupations.

165.S’agissant de la recommandation concernant l’intégration d’une définition de la torture dans le Code pénal (CAT/C/CR/31/2, par. 6 a)), le législateur marocain a défini la torture (art. 231-1 du Code pénal) conformément à l’article premier de la Convention.

166.Conformément à la recommandation du Comité et en réponse à ses préoccupations concernant la présentation de renseignements suffisants sur l’interdiction de la torture en toutes circonstances (CAT/C/CR/31/2, par. 5 b)) et de l’invocation de circonstances exceptionnelles en vue de justifier des actes de torture (CAT/C/CR/31/2, par. 5 a)), il convient de rappeler les dispositions de l’article 2 du présent rapport selon lesquelles toute pratique qualifiée d’infraction par la loi, qu’il s’agisse de torture ou de tout autre acte, est interdite au Maroc. La législation nationale ne prévoit aucune circonstance atténuante, exceptionnelle ou autre, pour ce type d’infractions.

167.Pour ce qui est des inquiétudes exprimées par le Comité au sujet de la durée de la garde à vue (CAT/C/CR/31/2, par. 5 c)), il convient de noter qu’en règle générale, la durée de la garde à vue fixée par le Code de procédure pénale est de quarante-huit heures. Cette durée peut être prolongée de vingt-quatre heures supplémentaires à titre exceptionnel, sous certaines conditions et de garanties définies dans le nouveau Code de procédure pénale.

168.Pour empêcher toute forme d’impunité et en réponse aux préoccupations du Comité à ce sujet, notamment à propos de l’absence d’une disposition énonçant l’imprescriptibilité des infractions liées à la torture (CAT/C/CR/31/2, par. 5 g)), il convient de noter que la loi marocaine, bien qu’elle ne contienne pas une telle disposition, fixe un délai de prescription pouvant aller jusqu’à vingt ans dans une partie spéciale où les infractions ne sont pas énumérées. Ce délai peut être prolongé du fait des procédures juridiques énoncées dans la même partie du texte, ce qui signifie qu’en pratique, le dossier demeure ouvert et que les victimes peuvent porter plainte auprès des autorités compétentes.

169.Pour garantir aux personnes placées en garde à vue le droit d’appeler un avocat, d’être examinées par un médecin et d’avertir leur famille, le nouveau Code de procédure pénale contient des dispositions permettant de répondre aux préoccupations du Comité à ce sujet (CAT/C/CR/31/2, par. 6 h)) en accordant aux détenus le droit d’appeler leur avocat, d’être examinés par un médecin, le cas échéant, et d’avertir leur famille.

170.En ce qui concerne les préoccupations du Comité relatives à l’absence d’une disposition faisant qu’aucune déclaration obtenue par la torture ne puisse pas être invoquée comme élément de preuve (CAT/C/CR/31/2, par. 5 g)), il est souligné à l’article 15 du présent rapport que la législation marocaine ne reconnaît pas les aveux obtenus par la force ou la contrainte. Le Maroc tient compte, de ce fait, des recommandations du Comité (CAT/C/CR/31/2, par. 6 h)).

171.Afin de remédier au surpeuplement des prisons et en réponse aux préoccupations du Comité à ce sujet (CAT/C/CR/31/2, par. 5 i), il convient de rappeler la teneur de l’article 16 du présent rapport évoquant les mesures prises par l’administration pénitentiaire afin d’améliorer les conditions de détention et d’augmenter le budget alloué au secteur pénitentiaire.

172.En ce qui concerne les préoccupations exprimées par le Comité au sujet du manque d’information sur les mesures prises pour donner suite aux allégations de torture (CAT/C/CR/31/2, par. 5 e)), il convient de rappeler que le Maroc a adopté une stratégie de lutte contre l’impunité. Dans ce contexte, plusieurs fonctionnaires de police judiciaire ont été poursuivis en justice et condamnés à des peines privatives de liberté pour des durées différentes selon les cas (voir annexe 7).

173.Pour ce qui est des préoccupations du Comité concernant les décès en prison (CAT/C/CR/31/2, par. 5 h)), le nombre de décès a diminué, passant de 148 cas en 2008 à 40 décès en 2009, dont une majorité de morts naturelles et d’autres dus à des suicides ou à la violence entre détenus.

174.Le Comité ayant invité le Maroc à présenter des informations suffisantes sur les indemnités accordées aux victimes de violations graves des droits de l’homme commises dans le passé, il est indiqué à l’article 14 du présent rapport que les victimes ont bénéficié de dédommagements financiers et psychologiques (voir annexe 6).

175.En ce qui concerne la Direction de la surveillance du territoire (DST) dont il est question au paragraphe 5 d) (CAT/C/CR/31/2), il convient de préciser que les agents de cet organisme ne possèdent ni le statut ni les compétences des fonctionnaires de police judiciaire. En outre, le Procureur général du Roi près la cour d’appel de Rabat a effectué une visite au siège de cette direction, en a inspecté les différents services et a fait rapport de sa visite, d’où il ressort l’absence de centre de détention au sein de la Direction.

176.Comme suite à la recommandation du Comité invitant le Maroc à retirer ses réserves à la Convention (CAT/C/CR/31/2, par. 6 i)), le Royaume a retiré ses réserves à l’article 22 de la Convention et examine actuellement le retrait de ses réserves à l’article 20.

177.En réponse à la recommandation du Comité encourageant le Maroc à fournir des statistiques sur les cas de torture, ainsi que sur les enquêtes menées et les suites données aux plaintes (CAT/C/CR/31/2, par. 6 k)), des statistiques ont été intégrées, dans la mesure du possible, dans le présent rapport ainsi que dans les annexes.

Annexe 1

a)Accord d’entraide judiciaire en matière pénale et en matière d’extradition des délinquants entre le Gouvernement marocain et le Gouvernement égyptien

«Article 22

Les demandes d’extradition ne seront pas satisfaites si l’État sollicité a des motifs sérieux de croire que la demande d’extradition, bien que justifiée par la commission d’une infraction au regard du droit public, se fonde sur des considérations de race, de religion, de nationalité, d’opinion politique ou met la vie de la personne en danger en raison de ces considérations.».

b)Accord entre le Gouvernement marocain et le Gouvernement belge en matière d’extradition des délinquants

«Article 3

1.Les demandes d’extradition ne seront pas satisfaites si le délit pour lequel l’extradition est demandée est politique ou de nature politique dans l’État demandeur.

2.La même règle s’applique si l’État sollicité a des raisons de croire que la demande d’extradition, bien que motivée par une infraction ordinaire, a pour but de poursuivre une personne sur la base de son origine ethnique, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou met sa vie en danger en raison de ces considérations.».

Annexe 2

Mesures prises pour faire réprimer les actes de violence commis par des agents de police et autres détenteurs d’autorité

Année

Catégorie

Nombre de cas

2003

Agent de police

14

Autres détenteurs d’autorité

20

2004

Agent de police

6

Autre s détenteurs d’autorité

8

2005

Agent de police

8

Autre s détenteurs d’autorité

12

2006

Agent de police

10

Autres détenteurs d’autorité

7

2007

Agent de police

3

Autres détenteurs d’autorité

3

2008

Agent de police

4

Autres détenteurs d’autorité

3

Annexe 3

Visites effectuées dans les établissements pénitentiairesen 2006, 2007 et 2008

2006

Circonscription judiciaire

Par le juge d’application des peines

Par le Procureur général

Par le juge d'instruction

Par le juge pour mineurs

Dans une institution de réadaptation

Par un comité régional

Fès

30

35

3

Safi

31

23

11

Marrakech

32

16

1

Rabat

13

1

Casablanca

7

3

Errachidia

1

1

1

Agadir

14

32

2

Ouarzazate

12

6

1

El-Ayoun

12

4

Oujda

7

13

1

El-Jadida

19

3

1

1

Meknès

29

18

3

Khouribga

3

Taza

17

6

Nador

9

3

Beni Mellal

12

5

5

Settat

22

26

Tanger

24

20

1

Tétouan

9

3

El-Hoceima

13

Kénitra

32

32

6

2

Total

2007

Circonscription judiciaire

Par le juge d’application des peines

Par le Procureur général

Par le juge d'instruction

Par le juge pour mineurs

Dans une institution de réadaptation

Par un comité régional

Fès

13

17

1

Safi

16

10

2

Marrakech

14

6

Rabat

5

1

Casablanca

2

1

1

Errachidia

2

1

Agadir

6

7

Ouarzazate

6

3

El-Ayoun

3

3

Oujda

1

3

El-Jadida

4

12

2

Meknès

12

9

1

Khouribga

Taza

7

1

Nador

1

Beni Mellal

6

4

1

Settat

6

9

Tanger

9

10

Tétouan

3

7

El-Hoceima

1

Kénitra

12

5

3

Total

121

115

5

8

2008

Cironscription judiciaire

Par le juge d’application des peines

Par le Procureur général

Par le juge d'instruction

Par le juge pour mineurs

Dans une institution de réadaptation

Par un comité régional

Fès

8

18

4

2

1

Safi

15

20

5

Marrakech

24

9

Rabat

10

1

Casablanca

12

1

1

Errachidia

3

Agadir

10

13

Ouarzazate

8

4

1

El-Ayoun

5

2

Oujda

2

1

1

El-Jadida

5

5

Meknès

17

5

Khouribga

1

Taza

5

10

1

1

Nador

3

Beni Mellal

5

2

Settat

2

17

Tanger

15

19

Tétouan

2

1

El-Hoceima

2

2

Kénitra

31

19

2

Total

281

151

7

7

3

4

Annexe 4

Statistiques relatives aux conditions d’incarcération,2007 et 2008

Type d’affaire

2007

2008

Plaintes de détenus

855

604

Grève de la faim

821

627

Infractions diverses

378

267

Décès

124

134

Évasions

44

55

Visites par les juges d’application des peines

125

195

Visites par les services du Procureur général

117

162

Visites par les comités régionaux

8

4

Visites des établissements de soins psychiatriques

5

13

Visites par les juges d’instruction

1

7

Visites par les juges des mineurs

5

8

Visites par les présidents de chambres des tribunaux

3

Divers

64

156

Total

2 169

2 235

Annexe 5

Statistiques des personnes ayant fait l’objet d’examens médicaux conformément aux articles 73, 74 et 134 du Code de procédure pénale de 2008

Autorité ayant ordonné l’examen

Résultats de l’examen

Mesures judiciaires prises

Circonscription judiciaire

Procureur général

Juge d’instruction

Procureur général

Juge d’instruction

Procureur général

Juge d’instruction

Cour d’appel de El-Ayoun

9

Tribunal de première instance de El-Ayoun

1

Chute lors d’une tentative d’évasion

Aucune mesure prise en raison du manque d’éléments de preuve

Tribunal de première instance de Es-Semara

Tribunal de première instance de Oued Eddahab

Cour d’appel de Taza

Tribunal de première instance de Taza

Tribunal de première instance de Guercif

Cour d’appel de El-Hoceima

1

Simples hématomes superficiels

Requête introduite par la défense de l’accusé afin de déclarer le rapport d’enquête nul et non avenu refusée

Cour d’appel de Ouarzazate

Tribunal de première instance de Ouarzazate

Cour d’appel de Tétouan

Tribunal de première instance de Chefchaouen

Tribunal de première instance de Tétouan

1

Expertise refusée par les juges

1

Blessure à la cheville consécutive à une chute

Cour d’appel de Settat

Tribunal de première instance de Berrechid

Tribunal de première instance de Ben Ahmed

Cour d’appel de Khouribga

1

Négatif

Aucune mesure prise en raison du manque d’éléments de preuve

Tribunal de première instance de Khouribga

2

1

Négatif

Négatif

Aucune mesure prise en raison du manque d’éléments de preuve

En attente du résultat de l’examen

Tribunal de première instance de Oued Zem

1

En attente du résultat

Tribunal de première instance de Boujaâd

Tribunal de première instance d’Agadir

Tribunal de première instance de Inezgane

Tribunal de première instance de Taroudante

Tribunal de première instance de Guelmim

Tribunal de première instance de Tiznit

Tribunal de première instance de Tan Tan

Tribunal de première instance de Tata

Cour d’appel de Tanger

1

Incapacité à 25%

Copie du dossier de l’affaire adressée au procureur du Roi près le Tribunal de première instance de Ksar el-Kébir

Tribunal de première instance de Tanger

Tribunal de première instance, Ksar el ‑Kébir

1

1

Négatif

Incapacité pour une durée de 15 jours

Aucune mesure prise

Aucune mesure prise

1

Incapacité pour une durée de 18 jours

Aucune mesure prise

Tribunal de première instance de Larache

Tribunal de première instance de Assila

Cour d’appel de Er Rachidia

Tribunal de première instance de Er Rachidia

Cour d’appel de El-Jadida

1

La victime est enceinte

Le prévenu a été déféré devant le tribunal pénal et a été condamné à 3 ans d’emprisonnement ferme

Tribunal de première instance de El-Jadida

Tribunal de première instance de Sidi Bennour

1

La victime présente des contusions et des blessures résultant d’un choc avec une surface dure

Affaire transmise au  procureur près la c our d’appel de El ‑Jadida

Cour d’appel de Kénitra

1

Positif

Dossier de l’affaire renvoyé à la police pour complément d’enquête

Tribunal de première instance de Kénitra

1

1

Blessures résultant de coups reçus

Blessures résultant de coups reçus

Doit encore être transféré aux services du Procureur général

Aucune mesure prise. En attente de la fin de l’interrogatoire

Tribunal de première instance de Sidi Slimane

Tribunal de première instance de Sidi Kacem

Tribunal de première instance de Souq el ‑Arbaa du Gharb

Tribunal de première instance de Ouezzane

Cour d’appel de Fès

1

Mineur souffrant d’une hypertrophie cardiaque aggravée par la détention

Mineur transféré au Centre de El-Zayat

1

Victime souffrant de schizophrénie légère

Décision à prendre en se fondant sur le résultat de l’expertise

1

Les blessures reçues ne justifient pas la délivrance d’un certificat d’incapacité totale

Décision à prendre en se fondant sur le résultat de l’expertise

1

Les blessures reçues ne justifient pas la délivrance d’un certificat d’incapacité totale

Décision à prendre en se fondant sur le résultat de l’expertise

1

Incapacité totale pour une durée de 20 jours, incapacité partielle temporaire

Décision à prendre en se fondant sur le résultat de l’expertise

1

Incapacité totale pour une durée de 20 jours, incapacité partielle temporaire

Décision à prendre en se fondant sur le résultat de l’expertise

1

Le suspect souffre de troubles mentaux chroniques

Rapport joint au dossier dans l’attente d’une décision

4

En attente

1

Le prévenu ne présente aucune trace de violences

Dans l’attente de la requête de la défense

1

Positif

En attente

Tribunal de première instance de Fès

Tribunal de première instance de Sefrou

Tribunal de première instance de Boulmane Missour

Tribunal de première instance de Taounate

Cour d’appel de Rabat

Tribunal de première instance de Rabat

Tribunal de première instance de Témara

Tribunal de première instance de Salé

Tribunal de première instance de Khémisset

Tribunal de première instance de Roumani

Cour d’appel de Safi

Tribunal de première instance de Safi

Tribunal de première instance de Essaouira

1

Incapacité pour une durée de 20 jours

Le résultat de l’examen est conservé au secrétariat du Procureur général en attente de la notification de la personne concernée

Tribunal de première instance de Youssoufia

Cour d’appel de Meknès

Tribunal de première instance de Meknès

Tribunal de première instance de Khénifra

Tribunal de première instance de Midelt

Cour d’appel de Oujda

Tribunal de première instance de Oujda

Tribunal de première instance de Berkane

Tribunal de première instance de Figuig Bouarfa

3

Aucune trace de violences

En cours d’examen

Cour d’appel de Beni Mellal

Tribunal de première instance de Beni Mellal

Tribunal de première instance de Azillal

Tribunal de première instance de Belfkih Ben Saleh

1

Aucune trace de violences

Aucune mesure prise en raison de l’absence de preuve d’agression

1

Aucune trace de violences

Aucune mesure prise en raison du manque de preuves et du retrait par le plaignant de ses accusations

1

Incapacité pour 3 jours

Dossier de l’affaire transmis au Procureur près la Cour d’appel de Beni Mellal

Tribunal de première instance de Kasba Tadla

Annexe 6

Informations sur l’application des recommandations de l’Instance équité et réconciliation

Indemnisation financière:

Total des bénéficiaires: 16 892

Montant total payé à la date du 30 décembre 2008: 665 942 395,00 dirhams

Montant transféré par le Bureau du Premier Ministre en faveur des victimes à la date du 10 décembre 2008: 598 849 759,00 dirhams

Montant total payé à la date du 19 avril 2008: 538 648 827,00

Rappel des fonds versés par la Commission indépendante d’arbitrage au titre de l’indemnisation des victimes de disparitions involontaires forcées et de détention arbitraire: 1 milliard de dirhams

Prise en charge sanitaire:

Nombre de cas: 4 175

Cas adressés à la Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale (CNOPS): 3 292

Cartes émises: 3 087

Cartes distribuées: 2 385

Cartes en cours de distribution: 702

Cas en cours d’examen par la CNOPS: 205

Réi nsertion sociale:

Nombre de dossier s de bénéficiaires de la recommandation concernant la réinsertion sociale adressés au Bureau du Premier Ministre

770

75, 71 %

Nombre de dossier s de bénéficiaires de la recommandation concernant la réinsertion sociale devant être adressés au Bureau du Premier Ministre

247

24, 29 %

Total

1 017

100 %

Procédures administratives:

Administration ou organisme

Affaires transmises

Affaires en suspens

Affaires e n cours  d ’ examen

Affaires réglées

Ministère de l ’ intérieur

104

59

45

8

Ministère de la santé

21

21

5

Ministère de l ’ agriculture

14

12

2

2

Ministère des finances

4

4

2

Ministère de la jeunesse et des sports

7

7

4

Ministère de la justice

10

8

2

2

Services postaux

2

2

1

Ministère de l ’ éducation

126

2

124

32

Administration de la Défense nationale

17

17

Royal Air Maroc

3

3

Office chérifien des phosphates

45

45

Office national des chemins de fer

8

8

Office national de l ’ électricité

4

4

Ministère de l ’ équipement

13

13

Ministère du logement et de la construction

1

1

Ministère de la planification

3

3

Ministère du travail

2

2

Cabinet royal

6

6

Ministère des affaires étrangères et de la coopération

1

1

Caisse de dépôt et de gestion

1

1

Régie autonome de distribution d ’ eau et d ’ électricité

6

6

Ministère de l ’ énergie, des mines, de l ’ eau et de l ’ environnement

1

1

Agence de presse Maghreb Arabe Presse

2

1

1

1

Ministère de l ’ industrie, du commerce et des nouvelles technologies

3

3

1

Office national de l ’ eau potable

2

2

Office national du thé et du sucre

2

2

Ministère des transports

2

2

Ministère des travaux publics et de la formation

4

4

Total

414

203

211

58

Annexe 7

Liste des dernières mesures prises concernant les décès dans les postes de police et de gendarmerie

Prénom et nom

Date et lieu du décès

Faits et d écision

Affaire n°

Remarques

Abdelkader El‑Mokhtari

29 novembre2003 à Oujda

Le défunt avait été arrêté alors qu’il était en état d’ébriété avancée et qu’il était légèrement blessé à l’arcade sourcilière gauche. Il a été conduit à l’hôpital pour y être soigné. Lors de son interrogatoire, il s’est avéré qu’il faisait l’objet d’un mandat d’arrêt pourcoups et blessures. Il a alors été placé en garde à vue. Son état s’étantdétérioré de nouveauau cours de la détention, il a été transféré au service des soins intensifs où son décès a été constaté le 10 décembre 2003. L’enquête sur les causes de sa mort a établi que le défunt avait été frappé par le dénommé Yahiya Belhafidh qui a été accusé de coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner, tel qu’indiqué dans le dossier de l’affaire no 98/2004. Belhafidh a été condamné à huit ans d’emprisonnement ferme. La sentence a été confirmée par la Cour d’appel.

Prén om et nom

Date et lieu du décès

Faits et d écision

Affaire n°

Remarques

Toufic Nasser

Le 9 juin 2003, Toufic Nasser est mort alors qu’il était détenu dans uncommissariat de police. Le témoignage d’autres personnes qui étaient détenues avec lui a confirmé qu’à 4h30, Nasser avait demandé des médicaments à ses gardiens, mais qu’il étaitdécédé peu de temps après.

Le défunt, suite à une querelle avecle dénommé Amine Betrahra, a poignardéce dernier. La victime a été transportée à l’hôpital etNasser a été arrêté, mais il est décédé alors qu’il se trouvait en garde à vue.

L’autopsie a démontré queNasser était décédé des suites de problèmes pulmonaires et cardiaques.

Après examen du dossier, le parquet a ouvert une information judiciaire à l’encontre deBetrahra et l’a inculpé d’homicide involontaire. Le tribunal pénal a acquitté l’accusé. La Cour d’appel a confirmé ce jugement.

Rabat, MC 04/804et MCA 26/05/240

Le jugementn’a pas fait l’objet d’un recours en cassation.

Prénom et nom

Date et lieu du décès

Faits et d écision

Affaire n°

Rema r ques

Mohamed Jahoun

Commissariat de police

Alors qu’il était en état d’ébriété, le défunt avait attaqué le domicile de HamidAl-Moumini. Une bagarre s’est ensuivie etAl-Moumini avait porté plusieurs coups de couteau au défuntà la tête et à d’autres endroitsdu corps. Gravement blessé, le défunt avait été conduit à l’hôpital pour y être soigné.

La police judiciaire s’est rendue sur les lieuxet a établi que le défunt sentait l’alcool et qu’il était recherché pourvol et coups et blessures à l’arme blanche, ainsi que pourdégâts matériels causés aux biens d’autrui. Il a été placé en garde à vue. Lorsqu’il a été procédé à l’appel des détenus, le défunt n’a pas répondu à l’appel. Il a été trouvé mort.

Il a été établi que le décès était dû auxblessures reçues lors de l’altercation avec Hamid Al-Moumini. Al-Moumini a été accusé de meurtre avec préméditation et ses parents de complicité. Le 2octobre 2003, Al-Moumini a été condamné à quinze ans d’emprisonnement ferme pour homicide involontaire.

Cour d’appel de Fès

Prénom et nom

Date et lieu du décès

Faits et d écision

Affaire n°

Rema r ques

Moustapha Bounaouara

Le 20 février2001, Moustapha Bounaouara a attaquéSaïd Lbitchet avec une barre de fer. Ce dernier s’est défendu en donnant un coup de couteau dans le dos deBounaouaraavant de prendre la fuite. Bounaouara s’est présenté au commissariat de police, perdant son sang. Il était très agité et incontrôlable. Il s’est enfui du commissariat, poursuivi par l’agent de police Abd el-Hakk Aït Abdelkébir et deux autres agents. Il a été ramené au commissariat de police d’El‑Daymouma. Son état empirant, il a été conduit à l’hôpital avant d’être ramené au même commissariat. Toutefois, le 21 février 2001, son état ayant de nouveau empiré, il a été ramené à l’hôpital où il est décédé.

L’autopsie a conclu que le décès avait été causé par une blessure par coup de couteau au niveau du dos. Le couteau a pénétré le corps du défunt de 8 cm perforant un des poumons.

Après examen du rapport de police no395 du 23 février 2001, Saïd Lbitchet a été présenté au juge d’instruction et accusé de coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner. L’agent Aït Abdelkébira également comparu devant le juge d’instruction pour usage abusif de la force. Le juge a ordonné des poursuitescontre les deux hommes et ouvert un dossier concernant cette affaire sous la cote22/2001/426.

Le19 février2002, le tribunal pénala condamnéLbitchet à quinze ans d’emprisonnement ferme et au paiement de50 000 dirhams de dommages et intérêts et a acquittél’agent Aït Abdelkébir.

Cour d’appel de Rabat