NATIONS UNIES

CCPR

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr.

G ÉNÉ RAL E

CCPR/C/FRA/CO/4/Add.1 2 8 août 2009

Original: FRANÇAIS

cOMITÉ DES DROITS DE L ’ HOMME

eXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES éTATS PARTIES AU TITRE DE L ’ ARTICLE 40 DU PACTE

FRANCE *

Renseignements communiqués par la France sur la suite donnée aux observations finales du Comité des droits de l’homme * * ( CCPR/C/FRA/CO/4)

[20 juillet 2009]

Introduction

L’audition de la France devant le Comité des droits de l’homme des Nations Unies s’est déroulée les 9 et 10 juillet 2008. Les observations finales rendues par le Comité, le 31 juillet 2008(CCPR/C/FRA/CO/4), demandaient à la France par 28) de transmettre, dans un délai d’un an, des renseignements sur la suite donnée aux recommandationsfigurant aux paragraphes12, 18 et 20 (sections I à III ci-dessous).

Le Gouvernement souhaite également saisir l’occasion de cette réponse intermédiaire pour apporter certaines précisions destinées à clarifier des éléments qui semblent, au vu des recommandations formulées par le Comité, n’avoir pas été assez clairement exposés à l’occasion de la présentation du rapport de la France (sections IV et V ci-dessous).

I .

«  12. L’État partie devrait recueillir et communiquer des données statistiques adéquates, ventilées par origine raciale, ethnique et nationale, de façon à accroître l’efficacité de son action visant à assurer l’égalité des chances aux personnes appartenant à ces groupes minoritaires, et à satisfaire aux conditions énoncées dans les directives du Comité concernant l’établissem ent des rapports.  (…) »

Le Gouvernement prend note de cette demande répétée du Comité, et comprend qu’il s’agit là d’éléments demandés pour contribuer à l’analyse des politiques publiques nationales.

Il souhaite néanmoins rappeler que la collecte de telles données ne serait pas conforme à la Constitution française et souligner qu’en tout état de cause ces données sont inopérantes pour l’appréhension de l’action publique nationale, qui ne s’appuie en aucune manière sur les notions de minorités, de race ou d’ethnie. L’État ne saurait donc produire des statistiques ventilées par origine ethnique ou raciale et va tenter de s’en expliquer une nouvelle fois en apportant les précisions suivantes.

La France ne reconnaît pas en son sein l’existence de minorités ayant un statut juridique en tant que tel et considère que l’application des droits de l’homme à tous les ressortissants d’un État , dans l’égalité et la non-discrimination, apporte normalement à ceux-ci, quelle que soit leur situation, la protection pleine et entière à laquelle ils peuvent prétendre. Il s’agit donc d’une conception particulièrement exigeante des droits de l’homme , ancrée dans la tradition républicaine depuis la Révolution française il y a plus de deux siècles.

Dans sa traduction concrète, la conception française postule donc que l’affirmation de l’identité est le résultat d’un choix personnel, non de critères applicables définissant a priori tel ou tel groupe et dont découlerait un régime juridique distinct. Une telle approche protège tout à la fois le droit de chaque individu de se reconnaître une tradition culturelle, historique, religieuse ou philosophique, et celui de la refuser. La défense du particularisme, en effet, doit s’accompagner du droit fondamental d’y échapper. La France a toujours souligné ce point dans les instances internationales, en relevant les effets pervers que pourrait receler une conception trop rigide de la protection des minorités et notamment la tentative de définition des critères généraux d’appartenance à des minorités, voire la réalisation de véritables recensements des personnes appartenant à ces minorités.

Cette conception s’opposant directement à la réalisation de statistiques ventilées par origine raciale ou ethnique est reflétée par l’article 1 er de la Constitution, qui dispose précisément que la République « assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion ».

En application de ces dispositions, le Conseil constitutionnel a jugé contraire à la Constitution des dispositions de la loi du 20 novembre 2007 relative à l’immigration (article 63) relatives à la conduite d’études portant sur la mesure de la diversité des origines des personnes, estimant que « si les traitements nécessaires à la conduite d'études sur la mesure de la diversité des origines des personnes, de la discrimination et de l'intégration peuvent porter sur des données objectives , ils ne sauraient, sans méconnaître le principe énoncé par l'article 1 er de la Constitution, reposer sur l'origine ethnique ou la race  » (DC n° 2007-557, 15 novembre 2007 ).

La législation française proscrit ainsi la collecte des « données à caractère personnel qui font apparaître, directement et indirectement, les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses, ou l’appartenance syndicale des personnes (…) » (article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative aux fichiers, à l’informatique et aux libertés, telle que modifiée par la loi n°2004-801 du 6 août 2004 relative à la protection des personnes physiques à l’égard des traitements de données à caractère personnel).

Au-delà de ces règles nationales, on peut noter que très peu de pays de l’Union européenne ont mis en place des dispositifs de mesure des discriminations en se fondant sur la collecte de données raciales ou ethniques et que la législation communautaire impose elle-même des restrictions à la collecte de données personnelles. Ainsi, la directive 95/46/CE du 25 octobre 1995 du Parlement européen et du Conseil, relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, interdit le traitement des données à caractère personnel qui révèlent l’origine raciale ou ethnique (cette disposition étant néanmoins assortie de réserves concernant, par exemple, le cas où le traitement est nécessaire à la défense des intérêts vitaux de la personne concernée ou aux fins de la médecine préventive et des diagnostics médicaux).

Le cadre juridique existant  fait donc obstacle à la conduite d’études statistiques prenant en compte l’origine ethnique ou raciale. Ce cadre, loin cependant d’être figé, s’appuie sur une réflexion nationale permanente , dont le dernier temps fort fut le dépôt, le 17 décembre 2008, des conclusions d’un Comité de réflexion sur le Préambule de la Constitution (dit « Comité Veil »). Ce Comité avait été chargé par le Président de la République « d'étudier si et dans quelle mesure les droits fondamentaux reconnus par la Constitution doivent être complétés par des principes nouveaux » , notamment une approche renouvelée du principe d’égalité permettant des politiques différenciée selon l’appartenance ethnique.

Sur ce sujet, le Comité, relevant par ailleurs « l’importance des marges de manœuvre offertes par le cadre constitutionnel actuel pour mettre en œuvre des politiques d’action positive », qui sont « loin d’être inexistantes dans le droit positif français » , a souligné que :

«  Plusieurs pays de par le monde ont expérimenté ou expérimentent encore des dispositifs autorisant à cette fin la prise en compte directe de la race, des origines ou plus rarement de la religion. Le refus du comité de transposer en France une telle logique procède de [plusieurs] séries de considérations.

«  Le comité n’a, en premier lieu, pas manqué d’observer que les motifs qui ont historiquement justifié, dans les pays concernés, la mise en œuvre de tels critères ne trouvent pas d’équivalent direct en France. Aux États-Unis, en Afrique du Sud ou en Inde notamment, les dispositifs de promotion par le droit ont fait suite, pour les groupes ethniques qu’ils visent, à des périodes de véritable ségrégation par le droit. Pour le dire autrement, la discrimination positive ainsi conçue ne peut avoir un sens qu’à la condition d’apparaître aux yeux de tous comme une mesure de rattrapage au profit de groupes ayant été victimes dans leur propre pays d’une entreprise de marginalisation organisée par le système juridique, et qui se sont de ce fait trouvés maintenus dans une position sociale subalterne. (…)

«  Le comité a, en deuxième lieu, relevé qu’il y aurait quelque paradoxe à s’engager aujourd’hui dans la voie de la discrimination positive sur des fondements ethniques à l’heure où elle marque clairement le pas aux États-Unis. Alors qu’une politique originale d’affirmative action a été mise en œuvre à partir des années 1960 dans trois domaines principaux - accès à l’université, emplois publics et marchés publics - une série d’arrêts de la Cour suprême et de référendums lui ont porté de sérieuses atteintes, au point que sa substance - voire sa conformité à la Constitution - sont aujourd’hui des plus incertains . (…)

«  En [dernier] lieu, le comité redoute que, sans même parler des risques d’instrumentalisation, par des groupes extrémistes, d’une politique de discrimination positive sur une base ethnique, sa mise en œuvre emporte de graves effets pervers : au mieux, un affaiblissement du vivre-ensemble, en raison de l’incitation donnée aux administrés de se rattacher à leurs communautés d’appartenance pour pouvoir tirer profit des dispositifs mis en place ; au pire, une montée des tensions et des ressentiments entre communautés, génératrice de concurrence entre groupes ethniques et matrice d’une dislocation accrue de la Nation.

«  (…) Au total, il apparaît au comité que le cadre constitutionnel actuel ne peut pas être regardé comme constituant un obstacle à la mise en œuvre de mesures ambitieuses d’action positive susceptibles de bénéficier, notamment, aux populations d’origine étrangère qui souffrent d’un déficit d’intégration dans la société française. »

Sur la question plus précise des statistiques ethniques, le Comité indique dans son rapport qu’il « est permis de penser que la prise en compte du nom, de l’origine géographique ou de la nationalité antérieure à l’acquisition de la nationalité française, tout cela éventuellement joint à la considération du « ressenti d’appartenance » exprimé par les enquêtés, pourrait donner des résultats assez comparables à celle que permettrait le maniement d’un référentiel de type ethno-racial » .

Ces conclusions font écho à des prises de positions régulières d’universitaires et d’associations sur le sujet. Ainsi, en février 2007, une pétition signée par des chercheurs, des syndicalistes et des militants associatifs exprimait son opposition à l’introduction de statistiques ethniques en France. Plus récemment, cette opposition s’est exprimée au sein de la Commission alternative de réflexion sur les statistiques ethniques et les discriminations (qui regroupe juristes, historiens, démographes, etc . ) ou par la voix de figures du monde associatif (Patrick Gaubert, président du Haut conseil à l’intégration et de la Ligue contre le racisme et l’antisémitisme, Mouloud Aounit, Président du Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples ou encore Dominique Sopo, président de SOS Racisme). Le Président de la Haute autorité de lutte contre les discrimination s et pour l’égalité (HALDE) , autorité administrative indépendante, a également réitéré ses doutes sur l’efficacité de telles statistiques.

Au-delà des arguments juridiques, ces personnalités soulignent la dimension éthique d’un tel débat, et la volonté traditionnelle du combat anti-raciste de ne pas figer les appartenances et d’éviter de donner une dimension sociale au concept de race. La publication de données brutes dans ce domaine est ainsi regardée comme présentant le risque de renforcer les stéréotypes et les antagonismes, au détriment d’une véritable égalité des chances pour tous.

Le cadre constitutionnel repose donc sur un large consensus national, en vertu duquel, par exemple, certaines données, telles la nationalité de l’enfant, ont dû être retirées de la « Base Elève 1 er degré », qui recense les élèves des écoles publiques. L’article 4 de l’arrêté du 20 octobre 2008 instituant cette base (voir, à cet égard, les réponse s écrites apportées par la France au Comité des droits de l’enfant en préparation de l’audition du 26 mai 2009) prévoit ainsi désormais qu’ « aucune donnée relative à la nationalité et à l’origine raciale ou ethnique des élèves et de leurs parents ou responsables légaux ne peut être enregistrée » ( CRC/C/FRA/Q/4/Add.1 , p. 37).

Enfin, au-delà des arguments juridiques et éthiques ainsi que du consensus national sur lequel ils reposent, il importe de rappeler que les statistiques actuellement autorisées en France, portant sur le nom, l’origine géographique ou la nationalité permettent déjà de disposer d’une connaissance précise de la population et d’appréhender les discriminations.

En effet, les données relatives à la nationalité ainsi qu’au lieu de naissance des individus et de leurs parents, ou encore à la langue transmise pendant l’enfance, peuvent à l’heure actuelle être exploitées, ce qui permet de faire émerger des statistiques sur la première et la deuxième générations des familles immigrées, et ainsi de suivre leurs parcours scolaires et universitaires, et d’adapter en conséquence les politiques publiques.

La plupart des chercheurs français estiment, comme le sociologue Jean-François Amadieu (président de l’Observatoire des discriminations), qu’ils «  dispos[sent] d’outils de mesure suffisants  » . Sur l'étude des discriminations, de nombreux chercheurs étrangers considèrent d'ailleurs que les données françaises permettent des études comparables à celles effectuées dans la plupart des autres pays d'Europe. Des organes institutionnels, tels le Conseil économique et social , et des centres de recherche, tels l’Observatoire des discriminations , oeuvrent ainsi pour la connaissance des inégalités, concernant notamment les populations d’origine étrangère.

La réflexion se poursuit néanmoins dans d’autres instances de réflexion. Ainsi, le Commissaire à la diversité et à l’égalité des chances, nommé en décembre 2008 par le chef de l’État , a-t-il mis en place au printemps 2009 un Comité pour la mesure et l'évaluation des discriminations et de la diversité (COMEDD), présidé par le directeur de l’Institut national des études démographiques (INED), chargé notamment d’étudier les outils statistiques dans ce domaine.

On soulignera enfin que l e cadre juridique ci-dessus rappelé semble, en France, un facteur essentiel de cohésion nationale et d’efficacité des politiques publiques. À cet égard, il n’est pas inintéressant de constater que des études utilisant les concepts de minorité et de communauté, étrangers au droit national, mettent néanmoins en lumière des résultats satisfaisants pour la société française. On pourra ainsi rappeler que, dans un sondage réalisé par le Pew Research Center , testant les perceptions mutuelles entre différentes catégories culturelles et religieuses de la population, la France détenait le premier rang mondial en matière d’acception et de tolérance réciproque ; selon les terminologies retenues par cette étude, la population musulmane française apparaissait même (avec l’espagnole) comme la moins négative du monde à l’égard des «  occidentaux  » . Cette cohésion nationale se retrouve également, par exemple, dans les chiffres élevés de mariages mixtes célébrés sur le territoire.

Il n’est pas inutile de rappeler pour finir, puisque le Comité évoque notamment dans ses observations l’accès à l’emploi dans le secteur public, que l’égalité d’accès de tous les citoyens, sans distinction d’origine, à la fonction publique est plus particulièrement garantie par un mode de recrutement privilégiant le concours, dont le principe repose sur un socle juridique solide, à caractère constitutionnel (en particulier, l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen). Le caractère anonyme de la procédure, dans le cadre des épreuves écrites, est une garantie du principe d’impartialité du recrutement, de même que la collégialité des jurys et le contrôle du juge administratif. Enfin, le 2 décembre 2008, le Ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, le Secrétaire d’État chargé de la fonction publique et le président de la HALDE ont signé une charte pour la promotion de l’égalité dans la fonction publique, dont la mise en œuvre est en cours.

II.

«  18. L’État partie devrait revoir sa politique de détention à l’égard des étrangers sans papiers et des demandeurs d’asile, y compris des mineurs non accompagnés. Il devrait prendre des mesures pour atténuer la surpopulation et améliorer les conditions de vie dans les centres de rétention, en particulier ceux des départements et territoires d’outre ‑mer. (…) »

L’État apportera ici d’autant plus volontiers les renseignements demandés que ce sujet, bien que figurant dans les recommandations finales, n’avait donné lieu à aucune question du Comité, formulée par écrit ou à l’oral, à l’occasion de l’audition.

Les préoccupations exprimées par le Comité dans cette recommandation appellent plusieurs explications. En effet, les conditions du «  maintien en zone d'attente  » (pour les étrangers ayant fait l’objet d’une décision de refus d'admission à la frontière ou qui ont présenté une demande d'asile à la frontière) ainsi que celles relatives au «  maintien en rétention administrative  » (pour les étrangers ayant fait l'objet d'une mesure d'éloignement) sont précisément encadrées par la loi (articles L.221-1 à L. et L.551-1 et suivants du Code l'entrée et du séjour en France des étrangers et du droit d'asile - CESEDA) et entourées de garanties tant sur le plan juridique que sur le plan matériel, qu'il paraît nécessaire de rappeler.

A. L'encadrement juridique :

Concernant la durée du maintien : le maintien en zone d'attente ne peut avoir une durée supérieure à 20 jours (sauf dans les cas où une demande d'asile est présentée dans les six derniers jours de la période de rétention, ou dans le cas où un recours juridictionnel contre la décision de refus d'asile a été introduit dans les quatre derniers jours, auxquels cas une prorogation est possible pour les mêmes délais). Le maintien en rétention , quant à lui ne peut avoir une durée supérieure à 32 jours. Ces délais, qui reposent sur la nécessité de concilier l'effectivité des mesures de refus d'entrée ou d'éloignement et le respect des droits des personnes, sont parmi les plus courts d'Europe.

Dans la pratique, la durée moyenne de maintien en zone d'attente est de deux jours pour un non admis et de six jours pour un demandeur d'asile, et la durée moyenne de maintien en rétention est de 10 jours.

Concernant les modalités du prononcé : le maintien en zone d'attente ne peut être autorisé, au-delà d'un délai de quatre jours, que par le juge des libertés et de la détention, pour une durée qui ne peut être supérieure à huit jours, et seul celui-ci peut encore autoriser, à titre exceptionnel, au-delà des 12 premiers jours, la prorogation de ce maintien. Le maintien en rétention ne peut être autorisé, au-delà de 48 heures, que par le même juge pour une durée de 15 jours, et une nouvelle fois, à l'issue de cette période, pour une durée de 5 ou 15 jours, selon les cas limitativement énumérés par la loi.

Toutes ces décisions juridictionnelles sont prises après audition de l'intéressé, en présence de son conseil, lequel peut être désigné d'office et en conséquence pris en charge financièrement par l’État , et avec le concours d'un interprète. L’ordonnance du juge est susceptible d'un appel devant le premier président de la cour d'appel.

Concernant les droits reconnus aux étrangers : les étrangers placés en zone d'attente ou en rétention peuvent, tout au long de la durée de leur placement, demander l'assistance d'un interprète et d'un médecin, et communiquer avec un conseil ou toute personne de son choix. Ces droits leur sont notifiés, dans une langue qu'ils comprennent, dans les meilleurs délais suivant leur placement. Ils bénéficient, de droit, de l’assistance d’un interprète aux différentes étapes de la procédure de maintien (notification de la décision de non admission ou de maintien, entretien avec l’ Office français de protection des réfugiés et des apatrides ( OFPRA ) , audience devant le juge). Dans chaque lieu de rétention, un document rédigé dans les langues les plus couramment utilisées et décrivant les droits de l'étranger au cours de la procédure d'éloignement et de rétention (y compris le droit à demander l'asile) ainsi que leurs conditions d'exercice est mis à disposition des retenus.

En zone d'attente, à l’aéroport de Roissy (qui concentre plus de 90 % des arrivées de migrants), en application d'une convention souscrite avec l'ANAFE (collectif d'associations), cet organisme qui peut être présent en permanence assure l'assistance juridique des étrangers. La Croix - Rouge y assure une assistance humanitaire permanente. En centre de rétention, une assistance juridique est apportée par la Cimade ou des associations spécialisées et une aide humanitaire est apportée par l'OFII ( Office français de l'immigration et de l'intégration, à la suite du changement de dénomination de l'ANAEM).

Concernant le contrôle des conditions du maintien en zone d'attente ou en rétention : la vérification du respect des droits reconnus aux étrangers et des conditions de leur maintien est assurée par le procureur de la République ainsi que par le juge des libertés et de la détention, qui peuvent se rendre sur place. Elle peut l'être également en zone d'attente par la délégation française du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés ainsi que par les associations humanitaires, qui bénéficient d'un droit d'accès selon des modalités prévues par convention avec les pouvoirs publics, et peuvent notamment s'entretenir confidentiellement avec les étrangers.

Les zones d'attente et les lieux de rétention peuvent également être à tout moment visités et contrôlés par les parlementaires (art. 720-1 du Code de procédure pénale), ou par le contrôleur général des lieux de privation de liberté, autorité indépendante instituée par la loi du 30 octobre 2007 prise en application du Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants . Ils peuvent l'être également par le Comité pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants du Conseil de l'Europe (CPT - voir le rapport du 10 décembre 2007 - [CPT/Inf (2007) 44] ) et par le Commissaire aux droits de l'homme de cette même organisation ( voir le Memorandum faisant suite à sa visite des Zones d’Attentes de l’aéroport de Roissy et du centre de rétention administrative du Mesnil-Amelot [ CommDH(2008)5 ] du 20 novembre 2008).

B. Les conditions matérielles

En principe, et en application des articles R 551-2 et suivants du CESEDA, les étrangers placés en rétention sont retenus dans des centres de rétention administrative à vocation nationale. Ce n’est qu’en raison de circonstances particulières et s’ils ne peuvent être immédiatement placés en centre, que des étrangers peuvent être placés dans des locaux de rétention administrative pour une durée qui ne peut excéder, sauf cas exceptionnels, 48 heures. Les centres de rétention administrative relèvent de dispositions statutaires définies par le décret du 30 mai 2005, qui fixe les conditions matérielles d'accueil des personnes retenues. Il prévoit en particulier une surface de 10 m 2 par personne, des normes sanitaires et de confort, la présence de téléphone en libre accès, la présence d'équipements hôteliers et de restauration collective. Des locaux permettant des entretiens confidentiels avec les avocats, sont prévus ainsi que la possibilité de recevoir des visites. Des locaux permettant une présence médicale et infirmière quotidienne sont mis en place. Les locaux de rétention doivent, quant à eux, comporter certains équipements permettant des conditions d’hébergement temporaire suffisantes (chambre collective, équipement sanitaire) et l’exercice des droits reconnus aux étrangers (téléphone, local de visite, local destiné aux avocats).

Les normes en matière de centres de rétention prennent en compte les recommandations du CPT. Depuis 2005, par un effort continu de rénovation et de constructions nouvelles, les pouvoirs publics mettent aux normes les centres de rétention, et restent vigilants en ce qui concerne le recours aux locaux de rétention administrative.

S'agissant des conditions de maintien en zone d'attente , les mêmes exigences sont d'application et la zone d'attente de Roissy (ZAPI 3), qui accueille plus de 90 % des étrangers non admis et des demandeurs d'asile à la frontière, est considérée, selon le rapport du Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, comme «  un centre d'hébergement tout à fait satisfaisant, ce qui a été constaté dans le rapport 2006  » ( voir CommDH(2008)5 précité ).

Par ailleurs un accent particulier est mis sur la professionnalisation et la formation des personnels des centres, destiné à améliorer les conditions d'accueil des personnes.

Outre-Mer , le Gouvernement est pareillement soucieux de retenir les étrangers dans de bonnes conditions. Les lieux de privation de liberté qui se trouvent dans les collectivités d’outre-mer sont ainsi ouverts à tous les organismes qui souhaitent les contrôler. C’est ainsi que, dernièrement, la Défenseure des enfants a visité le centre de rétention administrative de Mayotte, et l e CPT a effectué, en Guyane, une visite de tous les lieux de privation de liberté.

À Mayotte, la vétusté des conditions d’accueil au sein du centre de rétention administrative a conduit le Gouvernement à engager des travaux importants de rénovation. Il a été apporté des améliorations notables aux prestations matérielles (achat de matelas neufs, installation d'un téléphone), médicales, sanitaires, juridiques et de restauration. Un nouveau centre sera par ailleurs construit avant la fin de l’année 2011.

En Guyane, il existe également un programme de rénovation des lieux de détention et le Gouvernement veillera, en tout état de cause, à la mise en oeuvre des recommandations faites par le CPT.

C. Les mineurs isolés

Il ne peut pas y avoir de mineurs isolés placés en rétention dans la mesure où le droit français interdit le prononcé d'une mesure d'éloignement à l'égard d'un mineur.

En revanche, si leurs parents font eux-mêmes l'objet d'une mesure d'éloignement pour séjour irrégulier, les enfants ayant vocation à suivre leurs parents peuvent se trouver en centre de rétention, mais une attention particulière est apportée à cette situation et les familles sont hébergées dans des centres comportant des espaces spécialement dédiés aux familles. Lorsqu'à titre exceptionnel une telle solution ne peut être envisagée, les familles sont installées dans les zones réservées aux femmes. Toutes ces mesures sont placées sous le contrôle du juge des libertés et de la détention qui peut mettre fin à la rétention, s’il estime que les conditions ne sont pas satisfaisantes. L'expérience montre également que les familles sont souvent placées sous le régime de l'assignation à résidence plutôt qu'en rétention.

S'agissant des mineurs isolés placés en zone d'attente , une attention particulière leur est apportée. Au-delà des garanties légales prévues pour tous les étrangers et rappelées ci-dessus, en application de la loi du 4 mars 2002, un administrateur ad hoc doit être désigné sans délai par le Procureur de la République, qui est chargé de l'assister et d'assurer sa représentation dans toutes les procédures judiciaires et administratives relatives à son maintien en zone d'attente et à son entrée sur le territoire national.

Par ailleurs, l'article 93 de la loi relative à l’immigration et l’intégration du 24 juillet 2006 a supprimé, à compter du 1er décembre 2008, la condition d’entrée régulière en France ou de détention d’un titre de séjour d’une durée de validité au moins égale à un an posée par la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique. Ainsi, les mineurs ou jeunes majeurs étrangers isolés peuvent désormais bénéficier de l’aide juridictionnelle dans le cadre du contentieux du droit d’asile dès lors qu’ils justifient d’une résidence habituelle en France, même irrégulière. L’arrêté du 2 septembre 2008 relatif aux frais de justice criminelle en matière de médecine légale, de traduction, d’interprétariat et d’administrateur ad hoc a permis l’entrée en vigueur de ce nouveau dispositif en fixant le montant des indemnités versées. S’agissant plus particulièrement des administrateurs ad hoc désignés en faveur des mineurs étrangers isolés, l’indemnité forfaitaire a été réévaluée de 50 % à 200 %, selon les phases de la procédure au cours desquelles l’administrateur ad hoc intervient.

À l'aéroport de Roissy, les mineurs de moins de 13 ans sont hébergés dans un hôtel sous la protection d'une nurse, dans l'attente de la mise en place prochaine de structures dédiées où ils seront sous protection de la Croix - Rouge. Ils bénéficient de toutes les garanties juridiques prévues ci-dessus (notamment la désignation d’un administrateur ad hoc). Les mineurs de plus de 13 ans sont placés dans les locaux de la ZAPI 3, en bénéficiant d'une attention particulière apportée notamment par la Croix - Rouge.

Dans le respect du principe de non refoulement garanti par l'article 3 de la Convention contre la torture, aucun mineur isolé qui demande son admission en France et pour lequel un examen fait apparaître qu'il serait exposé à des traitements contraires à ladite convention en cas de renvoi dans son pays d'origine ne saurait être renvoyé dans ce pays. Si tel est le cas, le mineur sera orienté vers un centre d'accueil spécialement dédié et aucune mesure d'admission ne pourra conduire à le laisser isolé et sans protection sur le territoire français. Dans le cas où le besoin de protection en France n'est pas établi, les autorités françaises veillent à ce que le mineur soit effectivement récupéré par sa famille dans son pays d'origine, dans des conditions de sécurité nécessaires.

Il convient enfin de préciser qu'un groupe de travail interministériel sur les mineurs étrangers isolés a été mis en place, le 11 mai 2009, par le Ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Il associe des organisations internationales (Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et Fonds des Nations Unies pour l’enfance [ UNICEF ] ) et des organisations non gouvernementales (Croix -R ouge, France terre d'asile, Forum réfugiés, ANAFE). Il est chargé d'examiner la question des mineurs étrangers isolés se trouvant en France, et notamment les questions liées au maintien en zone d'attente de ces mineurs. Ce groupe de travail prendra attentivement en compte le principe de l'intérêt supérieur de l'enfant, garanti par la Convention relatives aux droits de l'enfant, et la situation de particulière vulnérabilité dans laquelle ils se trouvent. Il devrait rendre ses conclusions en septembre 2009.

D. La surpopulation

Il n'existe pas, de manière générale, de situation de surpopulation dans les centres de rétention et les zones d'attente de la France métropolitaine, grâce en particulier aux efforts déployés par les autorités françaises depuis plusieurs années pour augmenter les places en centres de rétention tout en y améliorant les normes de confort.

Il se peut cependant que dans des circonstances exceptionnelles, du fait d'une pression migratoire particulièrement forte, les capacités d'hébergement soient temporairement insuffisantes. Tel a été le cas en décembre 2007 et au début de janvier 2008 dans la zone d'attente de Roissy, à la suite d'un afflux massif et soudain de demandeurs d'asile. Cette situation avait motivé une visite en France du Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe ( CommDH(2008)5 précité ). La ZAPI 3 ayant atteint son taux d'occupation maximal, les autorités françaises avaient été contraintes d'utiliser provisoirement les différents postes de l'aérogare et la salle d'embarquement B33 qui, il est vrai, ne sont pas appropriés pour un hébergement durable et n'offrent pas des conditions satisfaisantes. Très rapidement des mesures ont cependant été prises : hébergement par priorité des femmes et des enfants dans la ZAPI 3, aménagement de la salle B33 permettant des conditions d'hébergement plus satisfaisantes, fourniture de couvertures et de kits d'hygiène, mise en place d'un dispositif d'information en plusieurs langues.

Cette situation exceptionnelle s'est terminée à la fin du mois de janvier 2008 et ces structures provisoires ont alors cessé d'être utilisées. Cette situation a cependant montré combien, en dépit des efforts qui peuvent être accomplis, le maintien des normes de qualité communément admis es en matière d'hébergement des demandeurs d'asile à la frontière s'accommode mal de situations exceptionnelles de crise.

Les autorités françaises entendent poursuivre de manière continue leurs efforts d'amélioration des conditions d'accueil et d'hébergement dans les centres de rétention et les zones d'attente, dans le respect des droits et de la dignité des personnes. L'institution du Contrôleur général des lieux de privation de liberté, dont la compétence s'exerce également sur ces lieux et qui peut formuler des avis et des recommandations aux autorités administratives, contribuera également, à la faveur du dialogue instauré entre cette institution indépendante et les pouvoirs publics, à l'amélioration des conditions de la rétention et du maintien en zone d'attente.

III.

«  20. L’État partie devrait veiller à ce que la décision de renvoyer un étranger, y compris un demandeur d’asile, soit prise à l’issue d’une procédure équitable qui permet d’exclure effectivement le risque réel de violations graves des droits de l’homme dont l’intéressé pourrait être victime à son retour. Les étrangers sans papiers et les demandeurs d’asile doivent être correctement informés de leurs droits, lesquels doivent leur être garantis, y compris du droit de demander l’asile, et bénéficier d’une aide juridictionnelle gratuite. L’État partie devrait également veiller à ce que tous les individus frappés d’un arrêté d’expulsion disposent de suffisamment de temps pour établir une demande d’asile, bénéficient de l’assistance d’un traducteur et puissent exercer leur droit de recours avec effet suspensif.

« L’État partie devrait en outre reconnaître que plus la pratique de la torture ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants est systématique moins il y a de chances que les assurances diplomatiques permettent d’éviter le risque réel de traitements incompatibles avec le Pacte, aussi rigoureuse la procédure de suivi éventuellement arrêtée soit‑elle. L’État partie devrait faire preuve de la plus grande circonspection quand il recourt aux assurances diplomatiques et adopter des procédures claires et transparentes prévoyant un réexamen par des mécanismes judiciaires appropriés avant de procéder à une expulsion, ainsi que des moyens efficaces de suivre la situation des personnes renvoyées. »

Le Gouvernement constate que des confusions demeurent sur certaines de ses procédures et de ses pratiques et tient en particulier à rappeler qu’en aucun cas les autorités françaises n’ont recours aux « assurances diplomatiques ». La France a ainsi pris fermement position contre la notion même d’ « assurances diplomatiques » devant les instances internationales, notamment dans le cadre du Conseil de l’Europe,

En tout état de cause, le respect du principe fondamental selon lequel un étranger ne saurait être renvoyé dans un État où il serait exposé à des risques de torture ou de mauvais traitements est assuré par la législation française, d'une part au stade de l'examen des demandes d'asile, qu'elles soient présentées à la frontière ou à l'intérieur du territoire français, d'autre part au stade des procédures d'éloignement (parmi lesquelles il convient plus particulièrement de distinguer les reconduites à la frontière des expulsions). Ces procédures sont entourées de garanties juridiques respectueuses des droits des personnes concernées.

A. Les modalités d'examen des demandes d'asile

L'instruction des demandes d'asile s'effectue par référence à la Convention relative au Statut des réfugiés, mais aussi au regard de «  la protection subsidiaire  » qui couvre les personnes qui ne répondent pas aux critères de la Convention de 1951 mais sont exposées à un risque de peine de mort, de torture ou de peines ou traitements inhumains ou dégradants ou à des menaces résultant d'une situation de violence généralisée. Dans tous les cas, la protection peut être accordée sans considération de l'auteur des persécutions, qui peut être un acteur non étatique, dès lors que les autorités ne sont pas en mesure d'apporter une protection.

L'OFPRA est seul compétent pour examiner les demandes d'asile. Il s'agit d'un établissement public indépendant disposant d'un personnel qualifié et spécialisé, recruté par concours et disposant d'une formation appropriée.

Si la demande d'asile est présentée à la frontière , elle ne peut être rejetée que par décision du Ministre de l'immigration, prise sur la base d'un avis de l'OFPRA. Cet avis est systématiquement suivi et rendu après un entretien individuel avec le demandeur d'asile, assisté si nécessaire d'un interprète. La demande d'asile ne peut être rejetée qu'à la condition qu'elle soit «  manifestement infondée  » .

Depuis la loi du 20 novembre 2007, le refus d'entrée au titre de l'asile peut faire l'objet devant le juge administratif d'un recours en annulation qui a un caractère pleinement suspensif, conformément aux prescriptions de la Cour européenne des droits de l'homme (Arrêt Gebremedhin c/France du 26 avril 2007). Dans le cadre de cette procédure, l'étranger peut être entendu, demander le concours d'un interprète et être assisté d'un conseil, le cas échéant désigné d'office, et pris en charge par l'aide juridictionnelle; le juge procède à un contrôle approfondi de la décision de refus d'asile et peut l'annuler dès lors qu'il lui apparaît que l'étranger est exposé à des risques en cas de retour. La mesure de refus d'entrée ne peut être exécutée avant que le juge ne se soit prononcé.

En outre, le demandeur d'asile placé en zone d'attente, comme indiqué en réponse à la recommandation n°18, est précisément informé des droits dont il dispose dans le cadre de cette procédure et peut bénéficier de l'assistance juridique de l'ANAFE. Le délai de recours est fixé à quarante-huit heures, afin de concilier les exigences du droit au recours, lequel n'est entouré d'aucun formalisme particulier, et les contraintes résultant de la durée maximale de maintien en zone d'attente. Toutefois, une proposition de loi est en cours d'examen devant le Parlement qui vise à porter à 72 heures le délai de recours dans le but de faciliter sa présentation par les étrangers.

Si la demande d'asile est présentée à l'intérieur du territoire français, et elle peut l'être à tout moment , elle est examinée par l'OFPRA, sur la base de la demande écrite et, dans l'immense majorité des cas, après un entretien individuel, en présence si nécessaire d'un interprète financièrement pris en charge par l'État . Les décisions de rejet de l'OFPRA peuvent faire l'objet d'un recours devant la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), juridiction administrative spécialisée relevant du contrôle de cassation du Conseil d'État , qui statue de manière collégiale et comporte en son sein un représentant du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Le demandeur d'asile peut présenter oralement ses observations, assisté d'un interprète et d'un conseil, lequel peut de manière générale être pris en charge par l'aide juridictionnelle.

Le principe général est que tout demandeur d'asile bénéficie d'un droit de séjour pendant toute la durée de l'instruction de sa demande par l'OFPRA et, en cas de recours devant la CNDA, jusqu'à ce que la Cour ait statué. Le recours est donc pleinement suspensif. Cependant, par dérogation à ce principe, certaines demandes d'asile sont examinées selon une procédure «  prioritaire  » , qui permet un examen dans des délais plus rapides par l'OFPRA et en application de laquelle le recours devant la CNDA n'a pas un caractère suspensif. Cette procédure est exclusivement applicable dans trois hypothèses, limitativement énumérées par la loi : a ) la présence en France de l'étranger constitue une menace grave pour l'ordre public ; b ) la demande est manifestement frauduleuse ou abusive ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement ; c ) le demandeur d'asile est ressortissant d'un pays pour lequel la clause de cessation du statut de réfugié a été mise en œuvre ou qui figure sur la liste des pays considérés comme sûrs. 7 % des demandes d'asile ont été examinées en procédure prioritaire en 2008 (essentiellement des demandes de réexamen).

Ce dispositif repose sur un juste équilibre entre, d'une part, le respect du droit d'asile qui commande qu'en toutes circonstances, il soit procédé à un examen attentif de la demande d'asile par l'OFPRA, lequel est entouré des mêmes garanties que celles accordées dans le cadre de la procédure normale et, d'autre part, la nécessité de faire face à des demandes d'asile dilatoires présentées à des fins étrangères à une demande de protection.

À cet égard, des précisions peuvent être apportées au sujet de la notion de pays d'origine considéré comme sûr . Celle-ci est issue d'une directive communautaire du 1 er décembre 2005, et un pays est considéré comme sûr si, selon la loi, «  il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales » . Cette liste est arrêtée par le Conseil d'administration de l'OFPRA, sous le contrôle du Conseil d'État et comporte à l'heure actuelle 15 pays : le Bénin, la Bosnie-Herzégovine, le Cap -V ert, la Croatie, la Géorgie, le Ghana, l'Inde, le Mali, Maurice, la Mongolie, le Sénégal, l'Ukraine, la ex-République yougoslave de Macédoine, Madagascar et la République-Unie de Tanzanie.

Contrairement à ce que semble craindre le Comité , ni l'Algérie (qui n'a jamais figuré dans la liste), ni le Niger (dont l'inscription a été annulée par le Conseil d'État le 13 février 2008) ne figurent sur cette liste. Le Conseil d'administration de l'OFPRA veille avec attention à l'actualité de la liste, en suivant l'évolution de la situation internationale. La part de cette demande représente 9,5 % de la demande globale.

Enfin, s’agissant des demandes d'asile en rétention, il convient d'observer qu'il s'agit de demandes d'asile présentées par des étrangers faisant l'objet d'une mesure d'éloignement et qui se trouvent le plus souvent en France depuis une période prolongée, tout en s'étant abstenus de présenter spontanément une demande d'asile. Dès son arrivée en centre de rétention, l'étranger est précisément informé de son droit à présenter une demande d'asile dans un délai de cinq jours suivant cette notification et, faute de celle-ci, ce délai ne sera pas opposable. Ce délai de cinq jours est un délai raisonnable, compte tenu de la durée maximale de la rétention (32 jours) et de la nécessité d'organiser, dans ce même délai, l'instruction de la demande par l'OFPRA, qui peut nécessiter plus de 96 heures, et les formalités de départ. Tout allongement du délai de dépôt de la demande d'asile risquerait de porter atteinte à la possibilité d'exécuter la mesure d'éloignement en cas de rejet de cette demande.

S'il est exact que le formulaire de demande d'asile doit être rempli en français, le demandeur d'asile peut bénéficier à cet égard de l'assistance juridique apportée par les associations présentes de manière permanente en centres de rétention, en vertu de conventions signées avec l'Etat, et il convient de ne pas surestimer l'importance de cette obligation dans la mesure où le formulaire n'est qu'une base, les explications du requérant pouvant être largement développées lors de l'entretien avec l'OFPRA, qui est pratiquement systématique s'agissant d'une première demande.

B. Les procédures d'éloignement

En premier lieu, il convient de rappeler que la législation française garantit qu’un étranger ne soit pas renvoyé dans un État où il est exposé à des risques de traitements contraires à la Convention contre la torture.

Ainsi, que l'étranger ait ou non préalablement présenté une demande d'asile sur le territoire, la loi française prohibe l'éloignement à destination d'un pays dans lequel il existe, conformément à la Convention contre la torture, des motifs sérieux de croire que l'étranger court un risque réel de mauvais traitements. Cette règle s’applique quelle que soit la mesure d'éloignement prononcée : reconduite à la frontière pour séjour irrégulier, interdiction judiciaire du territoire accompagnant le prononcé d'une sanction pénale, expulsion pour motif grave d'ordre public.

Dans tous les cas, dès lors que sont allégués des risques, l'autorité administrative procède à un examen de situation. Celui-ci prend en compte la situation générale en matière de respect des droits de l'homme dans le pays de renvoi, la situation de certains groupes exposés lorsque l'étranger allègue appartenir à ceux-ci et la situation personnelle de l'étranger, ses activités passées, ses relations avec ses autorités.

Les mesures d'éloignement peuvent être contestées devant le juge administratif, qui vérifie qu'elles ne sont pas contraires aux conventions internationales et peut annuler la décision fixant le pays de destination s'il apparaît que l'étranger y serait exposé à des risques de traitements inhumains ou dégradants. S'il s'agit d'un recours contre une obligation de quitter le territoire ou une décision de reconduite à la frontière , ce recours est pleinement suspensif. Dès la notification de la mesure d'éloignement, l'étranger est informé de ses droits en matière de recours dans une langue qu'il peut comprendre et, dans le cadre de ces recours, il est entendu si nécessaire en présence d'un interprète et peut être assisté d'un conseil, le cas échéant désigné d'office.

S’agissant des mesures d’expulsion , prises pour motif d’ordre public, les autorités françaises tiennent, en outre, à rappeler que, sauf cas exceptionnel, la décision intervient après que l’intéressé a été informé de l’engagement de la procédure à son encontre et convoqué devant la commission départementale d’expulsion (COMEX). Cette commission, composée de magistrats des ordres judiciaire et administratif, émet un avis consultatif. L’étranger peut se faire accompagner d’un avocat ou de toute personne de son choix, être entendu avec un interprète et peut bénéficier de l’aide juridictionnelle.

Quelle que soit la procédure d’expulsion appliquée, l’arrêté d’expulsion peut faire l’objet de recours gracieux ou hiérarchique devant l’autorité administrative, et d’un recours en annulation devant le juge administratif, assorti éventuellement d’un référé suspension. Il peut également faire l’objet d’un référé liberté. S’il est prononcé par le juge, le référé suspend l’exécution de la mesure. Dans ce cas le requérant peut faire l’objet d’une assignation à résidence.

Enfin, il peut être précisé que, dans le cadre de ces procédures, l’aide juridictionnelle est accordée, sans condition de résidence régulière et habituelle, lorsque la personne de nationalité étrangère fait l’objet de l’une des procédures prévues aux articles L. 222-1 à L. 222-6 (prolongation du maintien en zone d’attente), L. 312-2 (saisine de la commission du titre de séjour par l’autorité administrative), L. 511-1 et L. 512-1 à L. 512-4 (contentieux du titre de séjour assorti d’une obligation de quitter le territoire français et contentieux de la reconduite à la frontière), L. 522-1 et L. 522-2 (saisine de la commission d’expulsion par l’autorité administrative), L. 552-1 à L. 552-10 (prolongation de la rétention administrative dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire) du CESEDA. En outre, devant la Cour nationale du droit d’asile, la condition d’entrée et de résidence régulière en France n’est plus exigée des demandeurs à l’aide juridictionnelle depuis le 1 er décembre 2008.

C. Précisions concernant l’Outre-mer

Ce sont des ordonnances spécifiques qui ont étendu à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, le droit applicable aux étrangers. Ces ordonnances reprennent la structure et le plus souvent les termes du droit métropolitain, pour imposer des modalités d’accès au territoire et des conditions de séjour identiques.

Si l’immigration irrégulière est un phénomène présent en métropole, il prend cependant une ampleur particulière outre-mer, toutes les collectivités ultramarines n’étant cependant pas touchées de manière identique. La situation de l’immigration à Mayotte, en Guyane et en Guadeloupe est incontestablement spécifique en raison de la pression migratoire particulièrement élevée que subissent ces collectivités. Ce phénomène s’explique, d’une part, par la proximité géographique avec des zones où le niveau de vie de la population est beaucoup bas que celui des populations françaises et, d’autre part, par la porosité des frontières de ces trois collectivités.

La situation particulière de ces collectivités nécessite donc des mesures destinées à préserver l’ordre public et la cohésion des territoires . Ces mesures visent également à endiguer les trafics, notamment humains, devenus une véritable économie parallèle au détriment des personnes en situation difficile dans leur pays d’origine.

À l’occasion de l’adoption des dernières lois relatives à l’immigration (loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 et loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007), le Gouvernement a donc adapté plusieurs dispositions législatives aux caractéristiques et contraintes particulières de certaines collectivités.

La possibilité d’adapter la législation applicable outre-mer par rapport à celle prévalant en métropole est autorisée par l’article 73 de la Constitution, pour les départements d’outre-mer, et par l’article 74, pour les collectivités d’outre-mer. Ces adaptations, limitées géographiquement et dans le temps, sont soumises au contrôle du juge administratif. Elles doivent être justifiées par de réelles difficultés. C’est le cas du régime dérogatoire des recours contre les arrêtés de reconduite à la frontière, qui ne sont pas suspensifs dans les collectivités où les circonstances le justifient . L’intéressé dispose cependant d’un recours en annulation pour contester la validité de l’arrêté, et de la faculté de saisir le juge des référés. À plusieurs reprises, le Conseil constitutionnel a admis la validité de ce système.

Enfin, s’agissant du nombre d’enfants reconduits chaque année hors de Mayotte, il est important de faire la distinction entre les enfants accompagnés de leurs familles et qui repartent avec elles, et les mineurs isolés, c'est-à-dire, émigrant en France sans leur famille, qui se trouvent de ce fait potentiellement en danger. Il est de jurisprudence constante que l’éloignement des personnes accompagnées de leurs enfants mineurs ne méconnaît pas la législation en vigueur. En revanche, la gestion de la deuxième catégorie de mineurs, nécessite une approche différente, actuellement en cours de réflexion.

À Mayotte, si le Conseil général est compétent en matière d’aide sociale à l’enfance, aucune structure adaptée n’existe pourtant pour accueillir les mineurs isolés. Ils sont alors signalés au juge des enfants, au titre des «  enfants potentiellement en danger ». Conformément à l’article 375-3 du Code civil, si la protection de l’enfant l’exige, le juge a la possibilité de le confier à «  une personne digne de confiance  ». Le mineur repart alors dans son pays d’origine, sous la responsabilité de cette personne. Le temps moyen de rétention est, le plus souvent, de quelques heures.

IV .

« 14. L’État partie devrait veiller à ce que toute personne arrêtée du chef d’une infraction pénale, y compris les personnes soupçonnées de terrorisme, soit déférée dans le plus court délai devant un juge, conformément aux dispositions de l’article 9 du Pacte. Le droit de communiquer avec un avocat constitue également une garantie fondamentale contre les mauvais traitements et l’État partie devrait faire en sorte que les personnes en garde à vue soupçonnées de terrorisme bénéficient sans délai de l’assistance d’un avocat. Toute personne arrêtée du chef d’une infraction pénale devrait être informée qu’elle a le droit de garder le silence pendant l’interrogatoire de police, conformément au paragraphe 3 g) de l’article 14 du Pacte. »

«  15. L’État partie devrait limiter la durée de la détention avant jugement et renforcer le rôle des «juges des libertés et de la détention ».

Au regard des observations et recommandations du Comité concernant la garde-à-vue et la détention provisoire, il semble utile de formuler à nouveau certaines précisions.

Concernant la garde-à-vue, et au regard des observations précédant la recommandation figurant au paragraphe 14, on rappellera que la loi du 23 janvier 2006 permet de placer en garde à vue les personnes soupçonnées de terrorisme pour une période initiale de quatre jours, avec une prolongation supplémentaire et sous certaines conditions de 24 heures renouvelable une fois permettant une garde à vue d'une durée totale de six jours, ces prolongations étant décidées par un magistrat du siège, indépendant de l’enquête (le juge de la liberté et de la détention). Il importe de préciser, en outre, que l’accès à un avocat peut intervenir à l'issue de la soixante-douzième heure de garde à vue, puis à l'expiration de la quatre-vingt-seizième heure et enfin de la cent-vingtième heure, si la personne en fait la demande.

Enfin, si le Comité indique que le droit de garder le silence pendant l’interrogatoire n’est pas explicitement garanti dans le  Code de procédure pénale, il importe de souligner que l’intéressé a toujours la possibilité de se taire sans que cela n’entraîne de conséquence.

S’agissant des observations précédant la recommandation figurant au paragraphe  15, le Gouvernement souhaite rappeler que l’assistance d’un avocat de la défense et le réexamen périodique de la détention par le juge des libertés et de la détention sont garantis. De plus, le réexamen de la détention à tout moment et sans aucune restriction, à la demande du détenu, est de droit. La possibilité, dans certains cas, de telles détentions provisoires prolongées peut s’expliquer par les nombreuses investigations qui doivent être entreprises, y compris à l’étranger. Il y a enfin lieu d’ajouter qu’en tout état de cause, la durée de la détention provisoire s’impute sur la durée de la peine prononcée.

V .

«  19. L’État partie ne devrait accepter aucune tolérance pour les actes de mauvais traitements commis par les agents des forces de l’ordre sur la personne de ressortissants étrangers, y compris de demandeurs d’asile, qui sont placés dans des prisons et des centres de rétention administrative. Il doit mettre en place des systèmes adéquats pour surveiller les pratiques et prévenir les violations et devrait mettre au point de nouvelles formations à l’intention des agents des forces de l’ordre. »

Le Gouvernement souhaite enfin formuler des observations complémentaires au sujet de la recommandation figurant au paragraphe 19, qui semble suggérer que les autorités françaises tolèrent les actes de mauvais traitements commis par les agents des forces de l’ordre sur la personne de ressortissants étrangers. Un bref rappel du dispositif français de formation des forces de l’ordre en matière de déontologie, des contrôles existants et des sanctions prononcées semble donc devoir être à nouveau porté à la connaissance du Comité.

Les autorités françaises tiennent à rappeler qu’elles ne tolèrent en aucune manière les actes de mauvais traitements commis par les agents des forces de l’ordre, quelles que soit les situations ou les personnes les subissant.

À cet égard, les autorités françaises sont très attentives aux conditions dans lesquelles doivent être traitées les personnes lors d’une arrestation, d’une garde à vue ou de toute autre mesure privative de liberté, ainsi que lors de l’exécution d’une mesure d’éloignement prise à l’égard d’un étranger. Une très grande attention est notamment portée à trois grands principes, énoncés dans le code de déontologie du 16 mars 1986 et déclinés dans le guide pratique de déontologie, revu en 2001 : le respect absolu des personnes, quelles que soient leur nationalité ou leur origine, l’utilisation strictement nécessaire et proportionnée de la force, la protection des personnes appréhendées et le respect de leur dignité.

Dans une période récente, la circulaire du Ministre de l’intérieur du 11 mars 2003 relative à la dignité des personnes placées en garde à vue, le nouveau règlement général d’emploi de la police nationale du 6 juin 2006 ainsi que le schéma directeur de la police nationale 2008- 2012 ont à nouveau mis l’accent sur le respect de ces principes. Dans cet esprit, les autorités françaises s’emploient à organiser une formation adaptée , à assurer un contrôle vigilant et sanctionnent avec rigueur tout manquement avéré.

Dans le cadre de la formation , le volet consacré à la déontologie a été renforcé depuis 1999, et le principe de respect de la dignité de toutes les personnes ainsi que l’interdiction de mauvais traitements sont particulièrement soulignés. Des modules de formation associent la Commission nationale de déontologie de la sécurité et la HALDE .

Une grande attention est également portée à la formation aux gestes techniques professionnels d’intervention, intégrant les principes précités, notamment s’agissant des procédures d’éloignement des étrangers. Des stages spécifiques peuvent également être organisés. Ainsi, un stage a été mis en place sur le thème «  [du] policier face aux différences  » , afin de permettre une meilleure prise en compte des personnes, respectueuse de différences notamment culturelle ou religieuse.

Parallèlement à la formation, l’effort est mis sur l’encadrement des agents par leur hiérarchie et le contrôle, notamment par les corps d’inspection, des conditions d’arrestation et de rétention des personnes.

Parce qu’elles sont chargées de l’application de la loi et disposent de l’exercice de la force légitime, les forces de sécurité intérieure font partie des services publics les plus contrôlés , par des mécanismes aussi bien externes qu’internes aux institutions.

Sur un plan interne, le respect des droits de l’homme fait l’objet d’un contrôle de la part de l’autorité hiérarchique ainsi que des corps spécifiques que sont l’Inspection générale de la police nationale (IGPN ) et l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN).

Par ailleurs, de nombreux mécanismes de contrôle externes ont été mis en place. On peut souligner, tout d’abord, que la justice engage des poursuites pénales en cas d’infractions pénales commises par des policiers. La France a, ensuite, institué des autorités administratives indépendantes chargées par le législateur de missions spécifiques de protection des droits de l’homme, telles la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la Commission nationale de déontologie de la sécurité et le contrôleur général des lieux de privation de libertés.

Il convient de rappeler, en outre, que plusieurs mécanismes internationaux permettent de contrôler le respect des droits de l’homme en France, que ce soit par une juridiction comme la Cour européenne des droits de l’homme ou par des comités, notamment le Comité européen de prévention de la torture.

Enfin, tout fonctionnaire de police qui s’écarte des lois et des règles éthiques s’expose à une double sanction, pénale et disciplinaire. Ainsi, en 2008, parmi les 3 423 sanctions disciplinaires prononcées à l’égard de policiers (contre 3 318 en 2007 et 3 228 en 2006), 163 se rapportaient à des violences avérées dont 14 ont conduit à la révocation ou à une mesure assimilée des agents concernés et 4 à la mise en retraite d'office. Au cours de la même année, l’IGPN a été saisie de 1 348 faits allégués contres les policiers (contre 1 454 en 2007 et 1 721 en 2006). Sur ceux-ci 585 concernaient des atteintes aux personnes (contre 727 en 2007 et 708 en 2006). Ces faits sont à rapprocher des 4 millions d’interventions de police réalisées chaque année.

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