Nations Unies

CAT/C/BRA/2

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

17 novembre 2020

Français

Original : anglais

Anglais, espagnol et français seulement

Comité contre la torture

Deuxième rapport périodique soumis par le Brésil en application de l’article 19 de la Convention selon la procédure simplifiée d’établissement des rapports, attendu en 2002 * , ** , ***

[Date de réception : 13 août 2020]

Liste des acronymes

ADIRecours direct en inconstitutionnalité

CCTComité contre la torture

CEDRComité pour l’élimination de la discrimination raciale

CNJConseil national de la justice

CNMPConseil national du ministère public

CNPCPConseil national des politiques pénales et pénitentiaires

CNPCTComité national de prévention et de répression de la torture

CNVCommission nationale de la vérité

CPPCode de procédure pénale

CPPMCode de procédure pénale militaire

CDEComité des droits de l’enfant

CSNUConseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies

DepenDépartement pénitentiaire national

DPFDépartement de la police fédérale

DRCIDépartement du recouvrement des biens et de la coopération judiciaire internationale

EaD-SENASPRéseau Enseignement à distance du Secrétariat national à la sécurité publique

ECAStatut de l’enfant et de l’adolescent

EspenÉcole de formation et de perfectionnement pénitentiaire

HC h abeas corpus

GAFIGroupe d’action financière sur le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme

IDCDemande de dessaisissement de juridiction

IPEAInstitut de recherche économique appliquée

LEPLoi relative à l’exécution des peines

LMPLoi Maria da Penha

MCNMatrice nationale des programmes de formation

MMFDHMinistère de la femme, de la famille et des droits humains

MJSPMinistère de la justice et de la sécurité publique

MNPCTMécanisme national de prévention et de répression de la torture

MPMinistère public

MPFMinistère public fédéral

ONDHBureau du Médiateur national pour les droits de l’homme

ONUOrganisation des Nations Unies

PNDH-3Troisième Programme national relatif aux droits de l’homme

PPCAAMProgramme de protection des enfants et des adolescents en danger de mort

PPDDHProgramme de protection des défenseurs des droits de l’homme

ProvitaProgramme fédéral de protection des victimes et témoins menacés

RDDRégime disciplinaire différencié

RDERégime disciplinaire spécial

RenaespRéseau national d’études supérieures en sécurité publique

REspRecours spécial (devant la Cour supérieure de justice)

RSSRaposa Serra do Sol (territoire autochtone)

SDH/PRSecrétariat spécial aux droits de l’homme/présidence de la République

SenaspSecrétariat national à la sécurité publique

SinaseSystème national d’assistance socioéducative

SinespSystème national d’information sur la sécurité publique, les prisons et les stupéfiants

SISTACSystème des audiences de garde à vue

SNJSecrétariat national de la justice

SNPCTSystème national de prévention et de répression de la torture

STFCour suprême fédérale

STJCour supérieure de justice

Introduction

1.Le présent rapport est le deuxième soumis par le Brésil en application de l’article 19 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

2.La liste des points à traiter établie par le Comité contre la torture à sa quarante‑deuxième session et figurant dans le document CAT/C/BRA/Q/2 du 13 mai 2009 a servi de guide pour sa préparation.

3.Il couvre la période allant de 2000 à 2017.

Réponses à la liste des points à traiter établie avant la soumission du présent rapport (CAT/C/BRA/Q/2)

Article premier

Réponse au paragraphe 1 de la liste des points

4.La loi no9455/1997, qui définit le crime de torture au Brésil, prévoit que ce crime peut être commis par des personnes privées. Cet écart par rapport aux termes de la Convention, laquelle limite sa définition de la torture aux actes commis « par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite », a fait l’objet de recommandations de la part du Rapporteur spécial.

5.Le troisième Programme national relatif aux droits de l’homme (PNDH-3) prévoyait une action programmatique visant à « créer un groupe de travail chargé d’examiner et de proposer des améliorations et des modifications de la loi no 9455/1997, qui définit le crime de torture, en vue de modifier les incriminations pénales, de créer un système national de lutte contre la torture, de mettre en place un cadre juridique permettant d’uniformiser les normes de médecine légale, et d’ordonner des mesures préventives obligatoires telles que des actions spécifiques de sensibilisation des personnels de police ainsi que des formations leur apprenant à reconnaître les signes de torture ».

6.Adoptée dans le cadre de cette action programmatique, la loi no 12847/2013 a créé le Système national de prévention et de lutte contre la torture (SNPCT), mais la qualification de l’infraction prévue par la loi no 9455/1997 n’a pas été modifiée. Il importe cependant de noter que la Cour supérieure de justice (STJ), qui statue en dernier recours sur les conflits d’interprétation des normes infraconstitutionnelles, a adopté un arrêt sur la loi no 9455/1997 qui la déclare conforme à l’article premier de la Convention.

7.Selon l’interprétation de la Cour supérieure de justice, « [e]n faisant du crime de torture une infraction de droit commun, l’article premier de la loi no 9455/1997 ne contredit pas la définition donnée à l’article premier de la Convention de 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, compte tenu de la réserve formulée dans le texte ratifié par le Brésil ».

8.Dans son application spécifique des définitions du crime de torture, la Cour supérieure de justice a condamné les traitements cruels infligés par des agents de l’État et établi que « la pratique de la torture par des agents de police constitue un manquement au devoir de probité des fonctionnaires en ce qu’elle porte atteinte aux principes de l’administration publique ».

Article 2

Réponse aux paragraphes 2 et 3 de la liste des points

9.Le Brésil a mis en place un solide cadre juridique qui assure la protection des droits et garanties reconnus aux personnes privées de liberté. Son Code pénal dispose que le fonctionnaire chargé d’informer les détenus de leurs droits qui manquerait à cette obligation s’expose à des poursuites.

10.L’article 5 incisoLXIII de la Constitution fédérale dispose que toute personne arrêtée doit être informée de ses droits et que l’assistance de sa famille et d’un avocat lui est garantie. Le même article offre une garantie constitutionnelle supplémentaire, qui est que toute arrestation est notifiée à la famille de l’intéressé.

11.Au-delà de ces dispositions constitutionnelles, le Code de procédure pénale, qui est un code législatif infraconstitutionnel encadrant les enquêtes pénales au Brésil, dispose que si une personne détenue ne désigne pas elle-même un avocat, son dossier sera envoyé au Bureau du défenseur public, qui est chargé de garantir son droit à se voir attribuer d’office un défenseur.

12.Une fois l’intéressé arrêté ou détenu, la loi no 7210/1984 relative à l’exécution des peines prend effet à son égard et garantit expressément ses droits en tant que détenu, y compris le droit de s’entretenir en personne et en privé avec son avocat.

13.La même loi dispose que les détenus condamnés ou provisoires peuvent être autorisés par décision du directeur de l’établissement pénitentiaire à quitter temporairement cet établissement pour subir un traitement médical. Elle dispose également que les détenus ont le droit de retenir les services d’un médecin privé pour orienter et accompagner leur traitement.

14.En 2003, un plan national de santé dans le système pénitentiaire a été adopté pour organiser la prestation de services et de soins de santé primaires dans les prisons et garantir aux détenus de toutes catégories l’accès à des soins médicaux. Dans le cadre de ce plan, 250 équipes de soins réparties entre 230 établissements avaient été mises en place en 2011. En 2014, une politique nationale de soins complets dans les prisons a été adoptée pour organiser et garantir l’accès de toute la population carcérale au Système de santé unifié ; 23 États et 127 municipalités ont adhéré à cette politique, qui est financée par des transferts de crédits du Gouvernement fédéral aux États et aux municipalités.

15.Le Gouvernement fédéral a adopté des mesures de renforcement des capacités des agents de la sécurité publique afin qu’ils s’acquittent mieux de leur obligation d’informer les personnes arrêtées ou détenues de leurs droits. Le Ministère de la justice et de la sécurité publique (MJSP) a diffusé un manuel intitulé « L’action de la police dans la protection des droits humains des personnes vulnérables » qui contient des directives sur la procédure à suivre pour conduire des personnes arrêtées au poste et qui rappelle notamment l’obligation faite aux agents d’informer ces personnes qu’elles ont les droits suivants : droit de garder le silence, droit d’avoir l’assistance de sa famille et droit d’avoir l’assistance d’un avocat.

16.Le pouvoir judiciaire s’est lui aussi employé à faire largement connaître les droits des personnes en état d’arrestation. Le Conseil national de la justice a publié en 2010 un guide des personnes arrêtées, et en 2012 un guide des femmes en état d’arrestation. Ces deux guides sont distribués dans les prisons pour aider les personnes privées de liberté à mieux connaître leurs droits, leurs devoirs et les garanties dont elles bénéficient.

17.La loi relative à l’exécution des peines prévoit que le Bureau du défenseur public fournit une aide juridictionnelle complète et gratuite à l’intérieur comme à l’extérieur des établissements pénitentiaires. Elle impose à tous ces établissements de mettre des locaux spécifiques à la disposition des « défenseurs publics » (avocats de l’aide juridictionnelle). Outre le Gouvernement fédéral, tous les États du Brésil et le District fédéral se sont dotés de Bureaux du défenseur public. Cette institution est encore en train d’évoluer. Selon le MJSP, « les Bureaux du défenseur public des États comptent en moyenne 227 avocats, ce qui est nettement plus que leur nombre moyen en 2008, quand ces bureaux comptaient environ 190 avocats. Cette moyenne cache cependant de grandes disparités, puisque le nombre des défenseurs publics va de 38 dans l’État de Rio Grande do Norte à 771 dans l’État de Rio de Janeiro, qui dispose du Bureau du défenseur public le plus ancien du Brésil ». Malgré cette évolution positive des Bureaux du défenseur public, la gratuité de l’aide juridictionnelle promise par la Constitution est encore limitée. Le nombre des défenseurs publics en activité est environ la moitié de celui des juges et procureurs.

18.Cette situation s’explique principalement par le fait qu’à la différence du ministère public et de la magistrature assise, les Bureaux du défenseur public ne jouissent pas de l’autonomie budgétaire et administrative. Leur organisation et leur fonctionnement dépendent donc du pouvoir exécutif. Pour réduire l’écart entre le nombre des défenseurs publics d’une part et le nombre des juges et procureurs d’autre part, le Congrès a adopté en 2014 l’amendement constitutionnel no 80, qui dispose que le nombre des défenseurs publics d’une juridiction doit être proportionnel à la demande effective de services d’aide juridictionnelle et à la population de cette juridiction, et qui impose au Gouvernement fédéral, aux États et au District fédéral un délai maximum pour réaliser cet objectif.

Réponse au paragraphe 4 de la liste des points

19.Aucune disposition législative ne prévoit actuellement que les personnes détenues doivent subir automatiquement un examen médical, appelé « examen du corps du délit » au Brésil. La loi no 7960/1989 relative à la détention provisoire donne au juge la possibilité d’ordonner, d’office ou sur réquisition du parquet, qu’une personne détenue soit examinée par un médecin. Des projets de loi tendant à rendre cet examen obligatoire ont été soumis au Congrès dans le cadre d’initiatives visant à modifier le Code de procédure pénale.

20.Ceci dit, certains États de la Fédération ont déjà intégré à leurs procédures régulières l’« examen du corps du délit ad cautelam », c’est-à-dire un examen médical « par précaution », pour garantir l’intégrité physique des personnes détenues et pour protéger les policiers eux-mêmes contre d’éventuelles accusations.

21.La résolution no 213/2015 du Conseil national de la justice (CNJ) relative à la garde à vue a institutionnalisé cette pratique en disposant que, pendant l’audience de garde à vue (audiência de custódia), le juge devra « Article 8, alinéa VII − demander si le gardé à vue a été examiné par un médecin, et ordonner qu’il le soit dans les cas suivants : a) le gardé à vue n’a pas été examiné par un médecin ; b) les documents attestant l’examen médical sont insuffisants ; c) il existe une allégation de torture ou de mauvais traitements postérieurs à l’examen médical ; d) l’examen médical a été effectué en présence d’un policier ; dans tous ces cas, il conviendra de respecter strictement les instructions de la recommandation no 49/2014 du CNJ relative à la formulation des questions à poser au médecin ».

22.En droit brésilien, l’organisation des forces de police et du système de sécurité publique relève des États et du District fédéral. Les autorités fédérales n’ont pas compétence pour légiférer dans ce domaine. Elles ont cependant adopté en 2009 la loi no 12030, qui établit les normes générales applicables aux expertises officielles en matière pénale, garantit l’indépendance technique, scientifique et fonctionnelle de l’activité d’expert officiel en matière pénale et impose un recrutement par concours public et une formation universitaire spécifique pour être nommé à un poste d’expert officiel.

23.Selon le « diagnostic de l’expertise en matière pénale au Brésil » publié par le MJSP en 2013, 14 États avaient alors recours à ce genre d’expertise. Le Brésil s’est énergiquement employé à renforcer les expertises en matière pénale. Le « diagnostic » susmentionné était une initiative allant dans ce sens, puisqu’il visait à « améliorer la qualité des investissements » du Gouvernement dans ce domaine grâce à une meilleure connaissance de son organisation et de ses besoins. Non content d’avoir investi dans les équipements nécessaires et la formation d’experts, le Brésil a publié par l’entremise du MJSP, en 2013, sous la forme d’instructions permanentes pour les expertises en matière pénale, ses premières directives générales applicables aux expertises les plus courantes dans les enquêtes sur des infractions violentes (Procedimento Operacional Padrão Perícia Criminal).

Réponse au paragraphe 5 de la liste des points

24.La loi no 12847/2013 définit clairement le cadre dans lequel inscrire une énergique politique des droits de l’homme visant à lutter contre les graves violations de ces droits dans les lieux de détention.

25.Cette loi a créé le Système national de prévention et de répression de la torture (SNPCT), grâce auquel l’État brésilien a facilité la création d’un réseau d’acteurs nationaux et locaux pour mieux intégrer les actions visant à prévenir et réprimer la torture. Entre autres activités, ce réseau facilite l’échange de bonnes pratiques, adopte les mesures voulues pour appliquer les recommandations formulées dans le cadre du Mécanisme national de prévention et de répression de la torture (MNPCT) et négocie des solutions aux plaintes pour privation de liberté portées devant les organisations internationales.

26.Les représentants des organes et institutions qui composent le SNPCT ont tenu leur première réunion le 27 août 2015. Pendant cette réunion, ils ont adopté une résolution approuvant un modèle de contrat d’adhésion au SNPCT des comités et mécanismes de prévention et de répression de la torture des États et du District fédéral et publié une brochure intitulée « Guide pratique du contrôle des lieux de détention » (Monitoramento de locais de detenção  : um guia prático).

27.Le Comité national de prévention et de répression de la torture (CNPCT) est un organe collégial composé de représentants du pouvoir exécutif fédéral et de la société civile. Il a pour mandat de prévenir et réprimer la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il collabore avec le MNPCT, dont il reçoit les rapports, participe à des réunions avec des représentants locaux pendant des visites de terrain et facilite la mise en œuvre de ses recommandations. Il a participé à des recommandations sur la garde à vue ; l’importance de respecter les normes établies par le Protocole d’Istanbul et le Protocole brésilien d’expertise médico-légale dans les enquêtes sur les crimes de torture ; sur la privatisation des actifs du système pénitentiaire ; et sur les fonctions de contrôleur des « unités d’internement socioéducatif » exercées par le Bureau du défenseur public et divers organismes spécialisés dans la défense des droits des adolescents.

28.Une des principales missions du MNPCT créé en 2013 est de contrôler les lieux de privation de liberté. C’est pourquoi il a adopté en 2016 une résolution dans laquelle il définit les règles qui doivent encadrer ses inspections d’établissements pénitentiaires, unités d’internement socioéducatif, postes de police et hôpitaux psychiatriques. Ces règles couvrent la préparation de la mission envisagée, avec notamment un examen obligatoire des informations disponibles sur l’État qui doit accueillir la mission ; une explication des diverses phases de la mission ; et la méthode retenue pour les inspections. Elles définissent également les normes à respecter dans l’établissement des rapports de mission. La résolution en question contient des directives et des procédures qui visent à assurer la transparence, la cohérence et la fiabilité du travail accompli par le MNPCT. Ce travail est décrit plus en détail dans la réponse au paragraphe 42 de la liste des points.

29.Des initiatives du Ministère de la femme, de la famille et des droits humains (MMFDH), renforcées par le Pacte fédéral pour la prévention et la répression de la torture, visent à aider les États fédérés à créer des comités et des mécanismes locaux. Le Brésil compte actuellement 21 comités et trois mécanismes en place :

Comités : Acre, Amapá, Rondônia, Pará, Amazonas, Goiás, Piauí, Maranhão, Ceará, Rio Grande do Norte, Paraíba, Pernambouc, Alagoas, Sergipe, Bahia, Espírito Santo, Minas Gerais, Rio de Janeiro, Paraná, Santa Catarina et Rio Grande do Sul (créés au sein de la société civile) ;

Mécanismes : Installés dans les États de Rio de Janeiro, Pernambouc et Rondônia. Autres mécanismes dans les États de Maranhão et Paraíba. Inscrits dans la loi mais pas encore installés dans les États d’Alagoas, Espírito Santo, Amapá et Sergipe.

30.Aucune règle générale applicable à la gestion du système carcéral au Brésil ne prévoit un accès illimité de tous les acteurs concernés aux lieux de détention. En revanche, il existe une procédure bien définie d’inspection de ces lieux par des représentants de l’État et de la société civile.

31.Les principaux acteurs de ces inspections sont les mécanismes de prévention et de répression de la torture, les bureaux du Médiateur et les représentants du ministère public, du pouvoir judiciaire et du CNPCP.

32.La loi relative à l’exécution des peines institue, comme modèle national pour les inspections, une visite mensuelle obligatoire des établissements pénitentiaires par des représentants du ministère public, cette obligation s’imposant à tous les bureaux du ministère public, tant dans les États qu’au niveau fédéral. Le Conseil national du ministère public (CNMP) a adopté en 2010 sa résolution no 56, qui encadre le déroulement de ces visites. Il a également publié un formulaire normalisé à remplir pendant les visites afin de pouvoir créer et alimenter une base de données reprenant les conclusions des inspections effectuées.

33.Depuis 2008, le pouvoir judiciaire procède lui aussi à des inspections, par le biais des missions d’inspection des lieux de privation de liberté (mutirões carcerários) instituées par le Conseil national de la justice. En bref, l’activité de ces missions d’inspection a une double visée : la première est de garantir le droit à un procès régulier en examinant les jugements définitifs et provisoires prononcés contre les détenus, et la seconde consiste à inspecter les lieux de détention. Les missions sont composées de juges qui sont dépêchés dans les États pour y analyser le statut des détenus au regard de la procédure engagée contre eux et pour inspecter les lieux de détention afin de prévenir tout manquement aux règles et de garantir la bonne application de la loi relative à l’exécution des peines. Tous les États du Brésil ont reçu la visite de missions d’inspection, qui ont analysé environ 400 000 procédures. Suite à ces analyses, 80 000 aménagements de peine ont été accordés, par exemple sous forme d’assouplissement du régime d’incarcération, de libération conditionnelle et de droit d’avoir un emploi à l’extérieur. En outre, les missions d’inspection ont permis de mettre en liberté plus de 45 000 détenus. Le Conseil national de la justice a adopté en 2007 une résolution qui impose aux juges de l’application des peines de procéder chaque mois à une inspection de lieux de détention dans leur ressort.

Réponse au paragraphe 6 de la liste des points

34.Le Gouvernement a lancé une série d’initiatives d’ordre législatif, administratif et judiciaire visant à aménager les peines d’emprisonnement et les mesures de substitution à l’incarcération.

35.Sur le plan législatif, la principale innovation a été l’adoption de la loi no 12403/2011 relative aux mesures conservatoires, aux termes de laquelle les juges ne peuvent ordonner la détention provisoire que lorsque d’autres mesures moins attentatoires au droit à la liberté du mis en cause ou de l’accusé ne sont pas adéquates. Cette loi offre aux magistrats la possibilité de choisir entre 10 mesures alternatives à la détention avant jugement, parmi lesquelles l’assignation à résidence et la surveillance électronique. Cette nouvelle disposition signifie que des personnes qui, sans elle, auraient été placées en détention provisoire pourront plus facilement rester en liberté jusqu’au jour de leur jugement.

36.Outre les mesures susmentionnées prévues par les lois et règlements applicables, des mesures de protection telles que celles prévues par la loi dite Maria da Penha (éloignement du conjoint violent du domicile, interdiction d’entrer en contact avec la victime ou de s’approcher d’elle), ou encore la transaction pénale, les accords de poursuites différées, la conciliation, la médiation et les techniques de justice restaurative, constituent autant d’alternatives pénales.

37.Non content d’encourager, en coopération avec le CNJ, l’adoption d’alternatives pénales à vocation restaurative, le Gouvernement fédéral facilite leur application en transférant aux États des crédits qui doivent leur servir à mettre en place des dispositifs de surveillance électronique ainsi que des « centres de l’exécution des peines et des mesures alternatives ». Il a également élaboré les documents de référence voulus pour guider l’exécution des politiques publiques dans ce domaine.

38.En 2011, le Ministre de la justice et de la sécurité publique a pris l’arrêté no 2594 qui instituait une stratégie nationale des alternatives pénales. En 2016, il a adopté une politique nationale des alternatives pénales qui prévoit des actions, projets et stratégies visant à étendre l’application d’alternatives pénales dans le pays et à réduire l’incarcération de masse. L’un des objectifs de cette politique était de réduire de 10 % le taux de détenus entre 2016 et 2019.

39.La loi no 10259/2001 institue des tribunaux spéciaux civils et pénaux de justice fédérale (j uizados e speciais c íveis e c riminais da j ustiça f ederal) compétents pour poursuivre et juger des infractions de gravité relativement mineure. Elle est similaire à la loi no 9099/1995, qui portait création de tribunaux spéciaux civils et pénaux relevant du pouvoir judiciaire des États fédérés et qui préconisait l’application de peines et mesures alternatives à la détention à des faits réputés constituer des infractions relativement mineures, dans des affaires de moindre complexité, qui devaient être réglées plus rapidement en amenant chaque fois que possible les parties à composer entre elles. Sur le plan pénal, l’objectif visé par ces lois et les règlements afférents était de faciliter l’indemnisation du préjudice subi et l’application de peines non privatives de liberté, telles que des restrictions de droits et des amendes.

40.Le CNJ publie chaque année un rapport dans lequel on peut mesurer les résultats obtenus par la mise en œuvre de ces deux lois. Selon celui de 2017, intitulé Justiça em Números 2017 (« La justice en chiffres 2017»), qui commente des données de 2016, on comptait cette année-là 10 433 tribunaux ordinaires (varas) et tribunaux spéciaux (juizados especiais) relevant de la juridiction des États et 976 tribunaux ordinaires et tribunaux spéciaux de compétence fédérale. Le principal résultat de la mise en place des tribunaux spéciaux, toujours selon ce rapport, est une réduction de la durée des procédures. En première instance, il faut en moyenne deux ans et trois mois aux tribunaux spéciaux des États et un an et deux mois aux tribunaux spéciaux de compétence fédérale pour rendre leur jugement, contre trois ans et un mois et trois ans et quatre mois en moyenne pour les tribunaux ordinaires. En appel, il faut en moyenne huit mois aux tribunaux spéciaux des États pour rendre leur décision, contre un an aux tribunaux ordinaires, et un an et sept mois aux tribunaux spéciaux fédéraux contre deux ans et sept mois aux tribunaux ordinaires. En ce qui concerne l’indice de productivité, le rapport montre que dans les tribunaux spéciaux, où la présence d’un avocat n’est pas obligatoire, 16 % des affaires débouchent sur une conciliation. Ce pourcentage baisse à 13,6 % lorsque la procédure atteint le stade du procès en première instance et à 0,4 % lorsqu’elle atteint le stade de la deuxième instance. À la fin de 2016, on comptait 1 400 000 peines en cours d’exécution, dont 444 000 prononcées dans l’année. Plus de la moitié − 272 000, soit 61,3 % − étaient des peines d’emprisonnement. Parmi les peines non privatives de liberté, 163 000 (94,9 %) avaient été prononcées par des tribunaux ordinaires de première instance (sauf cours et chambres d’appel) et 9 000 (5,1 %) par des tribunaux spéciaux.

41.Ces chiffres illustrent la détermination avec laquelle le pouvoir judiciaire brésilien met en œuvre la loi no 10259/2001.

Réponse au paragraphe 7 de la liste des points

42.La loi relative à l’exécution des peines dispose que les établissements pénitentiaires sont destinés aux condamnés, aux personnes visées par des mesures de sûreté, aux détenus provisoires et aux ex-détenus ; que les femmes et les hommes âgés de plus de 60 ans sont accueillis dans des quartiers distincts et adaptés à leur âge ; que le même complexe immobilier peut accueillir des quartiers destinés à des publics différents à condition qu’ils soient correctement séparés les uns des autres ; que le Conseil national des politiques pénales et pénitentiaires (CNPCP) détermine la capacité théorique des locaux pénitentiaires selon leur catégorie et leurs particularités.

43.En 2015 a été adoptée la loi no 13167, qui définit les critères selon lesquels les détenus doivent être séparés dans les établissements pénitentiaires. Les détenus provisoires doivent être séparés selon les critères suivants  : I − détenus accusés de crimes odieux et assimilés ; II − détenus accusés de crimes commis avec violences ou de menaces graves contre leur victime ; III − détenus accusés d’autres crimes et délits que ceux visés aux alinéas I et II ci‑dessus. Les condamnés doivent être séparés selon les critères suivants : I − condamnés convaincus de crimes odieux et assimilés ; II − récidivistes convaincus de crimes commis avec violences ou de menaces graves contre leur victime ; III − primo-délinquants convaincus de crimes commis avec violences ou de menaces graves contre leur victime ; IV − condamnés convaincus d’avoir commis d’autres crimes et délits dans des circonstances différentes de celles visées aux alinéas I, II et III ci-dessus. La même loi dispose que le détenu que la cohabitation avec des codétenus expose à des atteintes à son intégrité physique, morale ou psychologique doit être accueilli dans un local distinct.

44.En dépit de ces dispositions de la loi, il est difficile de séparer les détenus en fonction de la gravité de l’infraction pour laquelle ils ont été condamnés, à cause de la croissance de la population carcérale au Brésil au cours de ces dernières années.

45.En 2015, la Cour suprême fédérale a pris une décision qui pourrait faciliter une amélioration progressive de la situation. En effet, dans une ordonnance rendue en l’affaire de violation d’un principe fondamental de la Constitution no 347, elle a partiellement fait droit à une demande en indication de mesures conservatoires en décidant que tous les détenus du pays devaient bénéficier d’une audience de présentation à un juge dite « audience de garde à vue » (audiência de custódia) dans un délai de quatre-vingt-dix jours.

Réponse aux paragraphes 8 à 10 de la liste des points

46.L’État brésilien s’appuie sur des lois et règlements spécifiques concernant les enfants et les adolescents, et notamment sur la loi portant Statut de l’enfant et de l’adolescent adoptée en 1990, qui consacre le principe de la protection intégrale due aux intéressés, compte tenu de leur condition de personnes en développement. Ces lois et règlements excluent la responsabilité pénale des adolescents qui commettent des infractions et prévoient de leur imposer des mesures sociales et éducatives plutôt que des peines. Ces mesures peuvent se dérouler en milieu ouvert, comme l’avertissement, l’obligation de réparer le préjudice causé, le travail d’intérêt public ou la liberté assistée ; il peut également s’agir de mesures restrictives ou privatives de liberté, comme la semi-liberté et l’internement (internação), qui peut être provisoire.

47.Les lois et règlements prévoient que la justice des mineurs et son régime de la responsabilité pénale sont différents du système qui organise la poursuite et la répression des infractions commises par des adultes. Il s’agit d’un régime social et éducatif qui est actuellement mis en œuvre sur la base des principes internationaux en la matière, et notamment de l’Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs de 1985, dit « Règles de Beijing », et des Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, de 1990. L’internement provisoire des mineurs (internação provisória) ne peut dépasser une durée de quarante-cinq jours et doit être effectué dans un établissement accueillant exclusivement des adolescents. De même, le droit d’être « interné » dans des quartiers différents selon l’âge et la gravité de l’infraction est garanti. L’article 123 du Statut de l’enfant et de l’adolescent dispose que tant l’internement à terme que l’internement provisoire doivent être effectués dans un établissement accueillant exclusivement des adolescents et garantissant une stricte séparation des détenus en fonction de leur âge, de leur constitution physique et de la gravité de l’infraction. Les établissements concernés sont tenus d’offrir des activités éducatives.

48.Le système éducatif et social de la justice des mineurs est par conséquent complètement distinct du système de justice pénale et de sécurité publique des adultes, et il est organisé par des lois et règlement et des politiques publiques spécifiques et différenciés.

49.Le texte législatif le plus récent visant à améliorer ce système est la loi no 12594 de 2012, qui a créé le Système national d’assistance socioéducative (SINASE) et réglementé l’exécution des mesures sociales et éducatives visant les délinquants adolescents.

50.Le nombre des adolescents visés par des mesures socioéducatives restrictives ou privatives de liberté a fortement augmenté au cours des dernières années, passant de 16 868 en 2008 à 25 929 en 2016, dernière année pour laquelle ces chiffres sont disponibles. Cette augmentation a accru la difficulté de gérer la séparation des adolescents entre eux dans les lieux de restriction ou de privation de liberté. En revanche, la règle qui veut que les adolescents et les adultes soient détenus dans des établissements différents est respectée. Tout manquement à cette règle fait l’objet d’une enquête de poursuites devant les tribunaux si nécessaire.

51.Le Statut de l’enfant et de l’adolescent prévoit que les États fédérés et le District fédéral peuvent établir des tribunaux spécialisés pour enfants et adolescents. Le pouvoir judiciaire est présumé les établir en proportion du nombre d’habitants, leur fournir l’infrastructure nécessaire et définir l’assistance mise à leur disposition, y compris pour les permanences. Selon une enquête effectuée par le CNJ en 2012, 100 villes brésiliennes s’étaient dotées de ces tribunaux spécialisés. Le CNJ considère que cette spécialisation des tribunaux reflète l’importance du principe de « priorité absolue » de l’enfant et de l’adolescent consacré par l’article 227 de la Constitution fédérale et l’article 4 du Statut. Il s’emploie à faciliter et rationaliser l’organisation des services mis à la disposition des enfants et adolescents et renforce la coordination et l’intégration de l’ensemble des institutions chargées de défendre leurs droits, conformément aux dispositions de l’article 88 du Statut. À cet égard, il a élaboré une politique judiciaire visant à encourager la création de nouveaux tribunaux spécialisés et, en conséquence, il a créé en 2009 le Forum national de l’enfance et de la jeunesse. Cet organe collégial, régi par les dispositions de la résolution 231/20016 du CNJ, a pour mandat « de procéder à des études et de proposer des mesures propres à faciliter la coordination, l’élaboration et l’exécution des politiques publiques, dans le domaine de compétence du pouvoir judiciaire, en privilégiant les projets nationaux d’amélioration des prestations juridictionnelles au service de l’enfance et de la jeunesse ».

52.Les adolescents ne peuvent être soumis à une mesure privative de liberté qu’en cas de flagrant délit ou sur ordonnance écrite et dûment motivée de l’autorité judiciaire compétente, et leur « internement » provisoire présentenciel ne peut être ordonné que par un juge et pour une durée maximum de quarante-cinq jours. La Chambre des députés examine actuellement un projet de loi qui établit une obligation de présenter à l’autorité judiciaire compétente, dans un délai de vingt-quatre heures, tout adolescent arrêté pour avoir commis une infraction. Le Statut de l’enfant et de l’adolescent prévoit que l’adolescent mis en état d’arrestation doit être immédiatement présenté à un procureur, mais le projet de loi actuel étend la portée de cette obligation en prévoyant que la présentation doit être faite à un juge des mineurs.

53.L’arrêté nº 1082 pris par le Ministre de la santé en 2014 redéfinit les lignes directrices de la politique nationale de prise en charge intégrale de la santé des adolescents en conflit avec la loi en régime d’internement ou d’internement provisoire et définit de nouveaux critères pour l’administration de soins de santé complets aux adolescents privés de liberté placés dans des établissements d’internement ou d’internement provisoire et dans des établissements de semi-liberté.

54.Conscient de la difficulté de mettre en œuvre un système social et éducatif efficace, le Ministère de la femmes, de la famille et des droits humains, qui coordonne le SINASE en application de la loi fédérale no 12594/2012, s’efforce de privilégier les mesures en milieu ouvert qui n’imposent pas de restrictions aux libertés des adolescents. Il garantit ainsi le droit à la vie de famille, à la vie communautaire et à d’autres activités quotidiennes.

Réponse au paragraphe 11 de la liste des points

55.Si la population carcérale a fortement augmenté ces dernières années, la proportion de cette population qui est détenue dans des cellules de police a diminué. Selon les données du Département pénitentiaire national, cette proportion est progressivement passée de 26,7 % en 2001 à 5 % en 2016.

56.Les cellules de détention de la plupart des postes de police sont désormais fermées à cause du risque qu’elles font courir à l’intégrité physique des détenus et de la nécessité de réduire le nombre des agents de police chargés de les surveiller.

57.La fermeture des cellules de police sur tout le territoire brésilien était l’un des objectifs proposés par le CNJ à la Troisième réunion nationale du pouvoir judiciaire en 2010, à un moment où, selon le Département pénitentiaire national, 56 500 détenus encombraient les postes de police. Le CNJ, le MJSP et les gouvernements des États collaborent entre eux pour atteindre cet objectif.

58.En sus des mesures générales visant la fermeture des cellules de police, l’instauration des audiences de garde à vue (audiência s de custódia) a fortement contribué à la réduction de la durée de la détention dans les postes de police.

59.Aux termes de la résolution 213/2015 du CNJ, tout gardé à vue doit être présenté à une autorité judiciaire dans un délai de vingt-quatre heures. L’audience de garde à vue tenue à l’expiration de ce délai a pour but de déterminer si le gardé à vue a subi des actes de torture et des mauvais traitements et si son maintien en détention est véritablement nécessaire. Pendant cette audience, le juge peut décider, le cas échéant, d’ouvrir une enquête sur d’éventuelles violations des droits du gardé à vue et charger un expert de procéder aux examens médicaux voulus. Il peut aussi décider d’ordonner sa mise en liberté pour cause d’illégalité de son arrestation ou de remplacer sa détention présentencielle par une mise en liberté provisoire jusqu’au prononcé du jugement. Il peut enfin décider de prescrire des mesures conservatoires telles que la surveillance électronique et une présentation à intervalle régulier au tribunal.

60.Tous les États et le District fédéral ont déjà institutionnalisé les audiences de garde à vue. Ce dispositif fait l’objet d’évaluations du CNJ par le biais d’enquêtes financées par le MJSP et le CNJ lui-même. Il reste cependant plusieurs problèmes à régler, tels que les obstacles auxquels se heurte la systématisation de ces audiences et certaines pratiques judiciaires qui ne facilitent pas l’ouverture d’enquêtes sur les violations des droits des détenus. Ainsi, les acteurs du système judiciaire ne posent pas toujours, au cours des audiences de garde à vue, les questions susceptibles de révéler d’éventuelles violations. De plus, la présence d’agents de sécurité pendant ces audiences crée souvent une atmosphère peu favorable à la dénonciation de violences policières.

61.Malgré ces problèmes, les audiences de garde à vue constituent un moyen essentiel de réduire le nombre des détenus dans le système pénitentiaire et la durée de la détention dans les postes de police, outre qu’elles permettent d’enquêter sur les éventuelles violations des droits commises par des policiers suite à l’arrestation.

62.Selon le CNJ, de 2015 à juin 2017, 258 485 audiences de garde à vue ont déjà été conduites, dont 44,68 % se sont conclues par la mise en liberté du détenu et 4,9 % ont révélé des allégations de violences consécutives à l’arrestation.

63.La loi complémentaire no 79/1994 portant création du Fonds pénitentiaire national (Funpen) a été adoptée en 1994. Le Funpen consacre ses ressources à des activités d’entretien, telles que la rénovation et l’agrandissement des établissements pénitentiaires, et à l’amélioration des services fournis par le système pénitentiaire. Des difficultés de financement du Funpen ont conduit la Cour suprême fédérale à enjoindre au pouvoir exécutif, en 2015, de lui verser l’intégralité de ses crédits budgétaires et de s’abstenir à l’avenir de les bloquer. Selon le Département pénitentiaire, environ 1,2 milliard de reais étaient destinés aux fonds des États, du District fédéral et locaux en 2016. En 2017, ces transferts du Funpen aux autres fonds se sont chiffrés à environ 590 millions de reais.

Article 3

Réponse aux paragraphes 12 et 13 de la liste des points

64.La loi de 1980 relative au statut de l’étranger a été remplacée par la loi no 13445 relative aux migrations, qui prend en compte la dimension humanitaire de la question. Elle s’inscrit en effet dans le cadre des engagements pris par le Brésil de sauvegarder les droits individuels des citoyens et des migrants. Il n’est désormais possible d’extrader un migrant que dans deux situations : a) lorsqu’il a commis une infraction dans l’État requérant ; et b) lorsqu’il est visé par une enquête ou a été condamné dans son pays d’origine. Les lois et règlements disposent également que « […] la personne réclamée n’est pas extradée si l’État requérant ne s’engage pas à : I − ne pas mettre la personne réclamée en prison ou lui faire un procès pour des faits antérieurs à la demande d’extradition ; II − déduire de la peine d’emprisonnement de la personne réclamée le temps que celle-ci a passé en détention au Brésil en attendant d’être extradée ; III − commuer en peine privative de liberté avec un maximum de trente années d’emprisonnement effectif les éventuels châtiments corporels, réclusion à perpétuité ou peine de mort prononcés contre la personne réclamée ; IV − ne pas livrer la personne réclamée à un autre État requérant sans le consentement du Brésil ; V − ne pas envisager d’aggraver la peine encourue sous quelque motif politique que ce soit ; et VI − ne pas soumettre la personne réclamée à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ».

65.La Cour suprême fédérale statue sur les demandes d’extradition en observant les principes constitutionnels de la défense en justice et du procès contradictoire, ce qui garantit les droits de la défense et permet à la personne réclamée d’invoquer le risque de torture auquel elle pourrait être exposée. Aucun cas d’expulsion ou de remise d’une personne réclamée à un pays où elle serait exposée à la torture n’a été répertorié. On trouvera à l’annexe VII du présent rapport des graphiques illustrant les demandes d’extradition et de transfèrement de personnes condamnées pour les années 2016 à 2018, telles qu’elles ressortent des données du MJSP.

66.Les mesures de refoulement et d’expulsion, de leur côté, sont des mesures administratives et ont par conséquent un caractère discrétionnaire. Il est toutefois possible d’introduire un recours contre les décisions de l’administration. Ces décisions peuvent être contestées devant le pouvoir judiciaire en intentant une action ordinaire, en introduisant une requête en habeas corpus, en sollicitant une ordonnance de mandamus ou en formant un autre type de recours en fonction des caractéristiques de la cause.

67.Du fait que les règles internes protègent les étrangers qui risquent d’être exposés à des pratiques interdites par la Convention, aucun cas d’expulsion ou de remise effective d’une personne réclamée à un pays où elle serait exposée à la torture ne figure dans nos dossiers.

68.Selon les informations dont dispose le MJSP, il y a eu 31 extraditions actives et 26 extraditions passives en 2017. En l’absence de dispositif établi pour les extraditions passives, celles-ci n’ont pas été examinées aux fins du présent rapport. Il n’existe aucun cas connu de rejet par la Cour suprême fédérale ou le MJSP d’une demande d’extradition motivée par le fait que la personne réclamée aurait commis le crime de torture.

Article 4

Réponse au paragraphe 14 de la liste des points

69.La loi no 9455/1997 et le Code pénal brésilien répriment et la tentative et la participation à la torture. La peine prévue pour la tentative est celle de l’infraction consommée, avec une réduction d’un tiers à deux tiers, tandis que dans le cas de la participation à l’acte de torture, la peine est la même que celle prévue pour l’auteur principal, sachant cependant qu’elle peut être réduite de un sixième à un tiers lorsque cette participation est de moindre importance.

70.Le Gouvernement brésilien souffre encore d’une insuffisance de statistiques judiciaires et pénales qui lui permettraient de donner des informations précises sur les procès pour torture. Il lui est donc impossible pour le moment de fournir de plus amples renseignements sur le nombre des procédures engagées, leurs conclusions, les caractéristiques des accusés et les peines prononcées.

71.Le pouvoir judiciaire et le pouvoir exécutif se sont cependant employés à remédier à l’insuffisance des données disponibles. En 2012, la loi no 12681 a créé le Système national d’information sur la sécurité publique, les prisons et les stupéfiants (SINESP), qui vise à stocker, traiter et intégrer les données et informations voulues pour faciliter la formulation, l’application, l’exécution, l’accompagnement et l’évaluation des politiques relatives à la sécurité publique, au système pénitentiaire et à l’exécution des peines, ainsi qu’à la lutte contre le trafic de drogues. Les seules données actuellement disponibles sur le sujet sont celles communiquées par le Département pénitentiaire national. Celles-ci indiquent qu’en juin 2016, 229 personnes purgeaient des peines d’emprisonnement pour crime de torture au Brésil, à raison de 174 hommes et 55 femmes.

72.La législation brésilienne établit une distinction entre le crime de torture, l’atteinte à l’intégrité physique, les mauvais traitements et l’abus de pouvoir en fonction des actes commis. À ces différentes qualifications correspondent des peines différentes.

73.Les acteurs de la justice et de la sécurité publique ne comprennent pas toujours la gradation entre ces différentes pratiques criminelles, si bien que la qualification pénale qu’ils leur donnent est souvent subjective.

74.La doctrine distingue entre la torture comme punition (où l’agent a pour but de blesser la victime) et la torture comme moyen de preuve (où l’agent a pour but d’obtenir des informations ou des données susceptibles de servir de preuves). En raison même de cette distinction doctrinale, dans un grand nombre de jugements, en particulier de tribunaux des États, il n’a pas été considéré que ces pratiques étaient constitutives de torture, au motif qu’il n’existerait pas suffisamment d’éléments attestant que l’agent disposait d’un tel pouvoir sur la victime.

75.En 2008, le barreau brésilien a introduit auprès de la Cour suprême fédérale un recours pour violation de principe constitutionnel fondamental dans lequel il faisait valoir que la loi d’amnistie de 1979 était contraire à la Constitution fédérale de 1988. Deux juges seulement ont fait droit à cette requête, qui a été rejetée à la majorité des voix à une audience plénière de la Cour suprême en 2010.

76.À cet égard, le rapport final de la Commission nationale de la vérité (CNV), publié en 2014, a déclaré contraire à la Constitution brésilienne et au droit international la décision d’amnistier les agents publics responsables de détentions illégales et arbitraires, torture, exécutions, disparitions forcées et dissimulation de cadavre, au motif que ces actes constituent des crimes contre l’humanité. Le ministère public fédéral (MPF) s’est lui aussi employé, en particulier par l’intermédiaire du Bureau du Médiateur national, à obtenir des tribunaux qu’ils suspendent l’application de la loi d’amnistie, en même temps qu’il prenait des mesures visant à engager la responsabilité civile des auteurs de violations des droits de l’homme commises pendant la dictature. Le ministère public a également introduit une action en révision de la loi d’amnistie en saisissant la Cour suprême fédérale d’un recours pour violation de principe constitutionnel fondamental (recours no 320), qui est encore en instance, pour empêcher que cette loi ne s’applique aux graves violations des droits de l’homme commises par des agents publics et aux auteurs de crimes continus ou permanents.

77.À cet égard, le rapport final de la Commission nationale de la vérité, publié en 2014, a déclaré contraire à la Constitution brésilienne et au droit international la décision d’amnistier les agents publics responsables de détentions illégales et arbitraires, torture, exécutions, disparitions forcées et dissimulation de dépouilles mortelles, au motif que ces actes constituent des crimes contre l’humanité. Le ministère public fédéral (MPF) s’est lui aussi employé, en particulier par l’intermédiaire du Bureau du Médiateur national, à obtenir des tribunaux qu’ils suspendent l’application de la loi d’amnistie, en même temps qu’il prenait des mesures visant à engager la responsabilité civile des auteurs de violations des droits de l’homme commises pendant la dictature. Le ministère public a également introduit une action en révision de la loi d’amnistie en saisissant la Cour suprême fédérale d’un recours pour violation de principe constitutionnel fondamental (recours no 320), qui est encore en instance, pour empêcher que cette loi ne s’applique aux graves violations des droits de l’homme commises par des agents publics et aux auteurs de crimes continus ou permanents.

78.Malgré tous ces efforts, la loi d’amnistie de 1979 est toujours en vigueur au Brésil.

Articles 5 à 8

Réponse aux paragraphes 15 et 16 de la liste des points

79.Les cas visés à l’article 5 de la Convention contre la torture sont régis au Brésil par le Code pénal et le Code de procédure pénale. Le principe cardinal en la matière est le principe de territorialité de la loi pénale brésilienne qui s’applique, sans préjudice du droit international, aux infractions commises sur le territoire national, lequel comprend les navires et aéronefs brésiliens, tant commerciaux qu’au service du Gouvernement brésilien, en quelque lieu qu’ils se trouvent dans l’espace aérien ou en haute mer. La loi pénale brésilienne s’applique également aux infractions commises à bord d’aéronefs et de navires privés étrangers, quand ils atterrissent sur le territoire brésilien ou se trouvent dans l’espace aérien brésilien pour les premiers et quand ils relâchent dans un port brésilien ou se trouvent dans les eaux territoriales brésiliennes pour les seconds.

80.Le Code pénal brésilien régit également les cas d’extraterritorialité dans lesquels la loi brésilienne s’applique à des infractions commises à l’étranger, ce qui inclut notamment les cas où l’auteur de l’infraction est Brésilien et les cas impliquant des infractions que le Brésil est tenu de réprimer en vertu d’un instrument international. Dans les situations d’extraterritorialité, l’application de la loi brésilienne est subordonnée aux conditions suivantes : l’auteur de l’infraction doit être présent sur le territoire national ; il doit y avoir réciprocité d’incrimination dans la loi du pays où l’infraction a été commise et dans la loi brésilienne ; l’infraction en cause doit être incluse dans la liste des infractions pour lesquelles la loi brésilienne autorise l’extradition ; l’auteur de l’infraction ne doit pas avoir été acquitté, avoir purgé sa peine ou avoir été gracié à l’étranger ; et les poursuites contre l’auteur de l’infraction ne doivent pas avoir été annulées.

81.La loi pénale brésilienne s’applique également aux étrangers dès lors que les conditions susmentionnées concernant les Brésiliens sont remplies, que leur extradition n’a pas été requise ou refusée et que le Ministre de la justice n’a pas présenté de réquisition.

82.L’extradition est de règle dans le cas de demandes d’extradition tendant à ce que l’État requérant puisse juger la personne réclamée pour des faits de torture. Il existe cependant un débat à la Cour suprême fédérale sur la question de savoir si la prescription est applicable dans certaines affaires (Extradition 1278 et Extradition 1270), car le Brésil n’a signé ni la Convention sur l’imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ni la Convention interaméricaine sur la disparition forcée des personnes ; dans ces affaires, l’extradition a été accordée, mais parce qu’elles embrassaient d’autres infractions que celle de torture et que ces infractions ont pu être qualifiées de continues.

Article 10

Réponse aux paragraphes 17 et 18 de la liste des points

83.La structure fédérative du Brésil emporte que la vaste majorité des compétences en matière de sécurité publique et d’administration pénitentiaire appartient aux États. Le Gouvernement fédéral n’est responsable que de la sélection et de la formation du personnel de la Police fédérale, de la Police fédérale de la route et du Département pénitentiaire national.

84.Depuis le début des années 2000 cependant, le Gouvernement fédéral s’emploie à étendre ses prérogatives en encourageant les États à participer à l’exécution de politiques, programmes et projets nationaux. Il a ainsi mis en place, au sein du Ministère de la justice, devenu aujourd’hui Ministère de la justice et de la sécurité publique, des structures fédérales spécifiquement consacrées au renforcement et à l’intégration des forces de police et du système pénitentiaire des États.

85.Dans ce contexte, le Gouvernement fédéral a lancé, par l’intermédiaire du Secrétariat national à la sécurité publique (SENASP) et du Département pénitentiaire national, un certain nombre de mesures visant à améliorer et professionnaliser l’action des professionnels du système de sécurité publique et du système pénitentiaire du point de vue des droits de l’homme.

86.Le SENASP a ainsi mis au point des activités de renforcement des capacités et des formations qui s’appuient sur une matrice nationale des programmes de formation (Matriz Curricular Nacional) créée en 2003 et actualisée en 2005 et 2014. Cette matrice est conçue comme un outil théorique et méthodologique au service de la formation initiale et continue des professionnels de la sécurité publique, et elle est devenue un document de référence pour la conception des programmes de formation de la plupart des académies de police des États.

87.La matrice nationale des programmes de formation s’articule autour d’un ensemble de principes qui valorisent la relation entre les programmes de formation et la transversalité des droits de l’homme, afin de mieux encadrer l’action des professionnels de la sécurité publique dans un État démocratique respectueux de l’état de droit.

88.La conformité à la matrice nationale des programmes de formation est l’un des critères retenus par le SENASP pour autoriser le transfert aux États de crédits fédéraux destinés à financer des actions éducatives. La matrice encadre également tous les programmes exécutés directement par le SENASP pour la prestation de cours en présentiel et en distanciel, ainsi que l’organisation d’un réseau d’études supérieures lato sensu en partenariat avec les universités.

89.Depuis 2005, le SENASP administre un réseau d’enseignement à distance appelé l’EaD‑SENASP qui offre gratuitement aux professionnels de la sécurité publique de l’ensemble du pays des formations de qualité, intégrées et continues, sans restrictions géographiques ni limites de temps. Ce réseau a formé plus de 670 000 professionnels de la sécurité publique qui ont pris plus de 3 000 000 d’inscriptions aux 125 cours qu’il offre, dont plusieurs concernent spécifiquement les droits de l’homme, comme les cours intitulés « Philosophie des droits de l’homme appliquée à l’action de la police (I et II) », « Police et groupes vulnérables », « Règlement des conflits agraires », « Sécurité publique sans homophobie » et « Emploi proportionné de la force ». Le réseau propose depuis 2015 un cours spécialisé dans la prévention et la répression de la torture mis au point en collaboration avec le Ministère de la femme, de la famille et des droits humains, qui rapporte que 12 588 professionnels de la sécurité publique l’ont suivi.

90.Il convient également de souligner la création d’un cours consacré à la prévention et à la répression de la torture sur la plateforme d’enseignement à distance du SENASP. Ce cours vise à sensibiliser et former les professionnels de la sécurité publique et du système pénitentiaire à la prévention et à la répression de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants infligés dans les lieux de détention (postes de police, casernes, prisons et unités hospitalières) et à encourager une nouvelle culture institutionnelle de promotion et défense des droits de l’homme.

91.Depuis 2005, le SENASP administre un réseau national d’études supérieures en sécurité publique (RENAESP), en collaboration avec plusieurs établissements d’enseignement supérieur, pour faciliter aux professionnels de la sécurité publique l’accès à des cours de haut niveau, dont plusieurs ont trait aux droits de l’homme.

92.Enfin, les concepts des droits de l’homme constituent l’axe transversal de tous les cours professionnels dispensés directement par le SENASP et consacrés, par exemple, à des sujets tels que les techniques d’investigation, la réalisation d’expertises au service de la preuve, ou encore l’usage de la force). Entre 2004 et 2011, environ 11 400 professionnels de la sécurité publique ont participé à des séances de formation aux droits de l’homme organisées par le SENASP.

93.De plus, le Gouvernement fédéral a publié à l’intention des professionnels de la sécurité publique une série de documents de référence sur les droits de l’homme, parmi lesquels les suivants :

•Guide des droits de l’homme − Code de conduite éthique, technique et juridique des institutions de police militaire (2008) ;

•Manuel d’intervention policière pour la protection des droits des personnes vulnérables (2010-2013) ;

•Directives policières pour l’approche des personnes de la rue ;

•L’interpellation policière du point de vue des droits de l’homme (2018).

94.Le Département pénitentiaire national supervise l’École nationale d’administration pénitentiaire (ESPEN), qui offre aux agents du système pénitentiaire fédéral et des systèmes pénitentiaires des États des cours, des formations et des modules dispensés tant en présentiel qu’à distance, sur des sujets comme les droits de l’homme, les politiques publiques en matière pénitentiaire, les techniques opérationnelles et le renseignement en milieu carcéral. Dans son travail, l’ESPEN s’appuie sur une matrice nationale des programmes de formation aux services pénitentiaires qui est un document pédagogique entièrement guidé par le respect des droits de l’homme.

95.Il existe de nombreuses autres modalités de formation aux services pénitentiaires, veuillez faire des recherches.

96.En ce qui concerne les formations proposées aux procureurs, il convient de noter que le ministère public de chaque État fédéré administre sa propre école de formation et d’éducation permanente. Le Conseil national du ministère public (CNMP) s’emploie depuis quelque temps à définir les paramètres nationaux des concours de recrutement des fonctionnaires du secteur judiciaire ; les matières de ces concours seront intégrées aux cours de formation et de perfectionnement proposés aux magistrats et fonctionnaires du secteur. À cette fin, le CNMP a créé une Unité nationale de formation du ministère public dont les objectifs sont alignés sur ceux de son plan stratégique et incluent le renforcement continu des processus de recrutement et de formation des magistrats et des fonctionnaires du ministère public pour garantir que celui-ci pourra compter sur des cadres éminemment qualifiés dans tous ses domaines d’activité.

97.Le CNMP a également participé à la promotion et au déroulement d’une série d’interventions sur la question de la torture, parmi lesquelles des rencontres nationales pour le renforcement de l’action du ministère public dans le contrôle extérieur des activités policières. Dans le cadre de ces rencontres, qui ont eu lieu cinq fois entre 2011 et 2015, les membres des ministères publics des États se réunissent pour examiner et proposer divers moyens d’améliorer leur action. La première de ces rencontres, tenue en 2011 (veuillez mettre à jour), comprenait un groupe de travail sur la torture qui, entre autres mesures préventives, a proposé « une formation spécifique des magistrats à la répression de la torture qui serait dispensée dans le cadre des cours organisés par l’Administration pénitentiaire, et l’inscription de ce sujet au programme des concours de recrutement de la fonction publique ».

98.Dans le cadre des initiatives visant à renforcer la formation des personnels judiciaires à la répression de la torture, le Secrétariat spécial aux droits de l’homme de la présidence de la République (SDH/PR), qui fait partie du dispositif mis en place par le MMFDH, a publié un manuel de lutte contre la torture à l’intention des juges, procureurs, défenseurs publics et avocats. Par ailleurs, un séminaire intitulé « Protéger les Brésiliens contre la torture » organisé conjointement par la cour d’appel et le ministère public de l’État de Rondônia au siège de la cour d’appel en 2013, a réuni 100personnes qui ont participé aux activités proposées. Le même séminaire a été organisé, en 2013 également, à Porto Alegre, dans l’État de Rio Grande do Sul, avec l’appui du ministère public de cet État. Environ 40personnes, dont des représentants des services de police et de la société civile, ont participé à ses activités.

Réponse au paragraphe 19 de la liste des points

99.En 2003, le SDH/PR a adopté par voie d’arrêté le Protocole brésilien d’expertise médico‑légale dans les enquêtes sur des crimes de torture, qui énonce les principes et les règles que doivent observer les organes d’experts, les médecins légistes et les autres professionnels compétents dans la conduite des expertises médico‑légales sur des cas de torture. Ce Protocole est basé sur le Protocole d’Istanbul, avec les aménagements voulus pour tenir compte de la réalité brésilienne en matière d’identification des victimes et de collecte des éléments de preuve. Il s’inspire également du Protocole facultatif se rapportant à la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

100.Soucieux d’encourager la conformité au Protocole, le SDH/PR a organisé entre 2006 et 2011 11 ateliers de formation à l’expertise médico-légale appliquée au crime de torture, auxquels ont participé environ 360 magistrats, procureurs, commissaires, défenseurs publics, médecins légistes, experts auprès des tribunaux pénaux, membres de comités de lutte contre la torture et représentants d’associations de défense des droits de l’homme.

101.En 2014, le CNJ a adopté sa recommandation no 49 par laquelle il invitait les magistrats brésiliens à appliquer le Protocole d’Istanbul et le Protocole brésilien d’expertise médico‑légale dans les enquêtes sur des crimes de torture. Cette recommandation définit les règles que doivent observer les médecins légistes quand ils examinent une victime de torture présumée et engage les magistrats à prêter attention à la présence d’autres indices de torture dans les enquêtes de police.

102.Allant dans le même sens, le Conseil national du ministère public a publié en 2016 sa recommandation no 31, qui invite les agents du ministère public à observer les dispositions du Protocole d’Istanbul et du Protocole brésilien dans les enquêtes sur les cas de torture.

Article 11

Réponse au paragraphe 20 de la liste des points

103.Il n’existe pas au Brésil de procédure de surveillance systématique des règles encadrant la pratique des interrogatoires, la garde à vue et le traitement des détenus.

104.Le texte juridique qui régit l’interrogatoire par la police des personnes accusées d’infraction est le Code de procédure pénale qui, au chapitre III, prescrit les conditions auxquelles doit satisfaire ledit interrogatoire. Le débat sur la nécessité d’encadrer plus rigoureusement cette phase de la procédure est récent au Brésil. Comme il s’agit d’un moment où la personne interrogée est particulièrement vulnérable, du fait qu’elle se trouve sous la garde de la police, le Gouvernement fédéral étudie actuellement les moyens de mieux encadrer cette procédure pour mettre fin à une tradition de torture à l’intérieur des postes de police qui est largement documentée dans les travaux de recherche et les enquêtes sur le sujet.

105.Les restrictions que les règles générales énoncées dans le Code de procédure pénale imposent à l’interrogatoire ainsi qu’à l’ensemble de l’enquête se sont révélées insuffisantes non seulement pour prévenir des violations occasionnelles des droits, mais encore pour garantir l’efficacité de la procédure, si bien que le Gouvernement fédéral s’est efforcé d’adopter des règles et des documents de référence plus détaillés.

106.En 2014, le SENASP a publié dans sa collection des Cahiers thématiques de référence un numéro sur les enquêtes de police judiciaire en matière d’homicides (Investigação criminal de homicídios) qui est le fruit d’une analyse approfondie de la bibliographie brésilienne et internationale sur le sujet et d’une longue recherche empirique menée auprès des services spécialisés dans les enquêtes sur les homicides de plusieurs États brésiliens. En 2016, le Brésil a publié, en collaboration avec ONU-Femmes, un recueil de « Directives nationales pour enquêter, poursuivre et juger dans une perspective de genre les affaires de mort violente de femmes (féminicides) » (Diretrizes Nacionais para investigar , processar e julgar com perspectiva de gênero as mortes violentas de mulheres(feminicídios)), qui est un protocole de mesures à prendre pour améliorer l’action de la police et des magistrats dans les affaires de mort violente de femmes à raison de leur genre. En 2017, la loi no 13431 a été adoptée, qui prescrit les formalités que doivent respecter les organismes publics lorsqu’ils recueillent les dépositions des enfants et des adolescents victimes ou témoins de violences.

107.Ces dernières années, le SENASP a assuré des formations aux techniques d’audition et d’interrogatoire en collaboration avec le Département de la police fédérale. Entre 2013 et 2017, 457 professionnels de la sécurité publique ont suivi ces formations.

Réponse au paragraphe 21 de la liste des points

108.Le régime disciplinaire différencié a été introduit en 2003 dans la loi relative à l’exécution des peines par modification de son article 52, qui décrit les conditions et les modalités d’application de cette sanction. Il s’agit d’un mode particulier d’exécution de la peine en régime fermé, qui consiste à imposer au détenu, qu’il soit condamné ou provisoire, un placement permanent en cellule individuelle, avec restriction de ses droits de recevoir des visites et de quitter sa cellule.

109.La durée maximale du régime disciplinaire différencié est de trois cent soixante jours, mais cette sanction peut être imposée à nouveau en cas de nouvelle faute grave de même nature, jusqu’à concurrence d’un sixième de la peine. Le détenu est placé en cellule individuelle, avec droit de recevoir la visite de deux personnes par semaine, non compris les enfants, pour deux heures au maximum, et droit de sortir de sa cellule deux heures par jour pour une promenade à l’air libre.

110.Hors le système pénitentiaire fédéral, qui compte cinq prisons à sécurité maximum dans le pays, seuls trois États brésiliens − ceux de São Paulo, Rio de Janeiro et Minas Gerais − disposent de quartiers pour détenus en régime disciplinaire différencié.

111.Quant au régime disciplinaire spécial, il s’agit d’un régime qui a été créé et appliqué dans l’État de São Paulo, mais qui n’existe plus.

Réponse au paragraphe 22 de la liste des points

112.Au Brésil, les délinquants mineurs sont couverts par la doctrine de la protection intégrale et, en application du Statut de l’enfant et de l’adolescent, les enfants soupçonnés d’infractions se voient appliquer des mesures de protection, tandis que les adolescents bénéficient de mesures sociales et éducatives qui vont du rappel à la loi à l’internement. S’il est de la responsabilité des États de garantir l’application des mesures sociales et éducatives dans les unités d’internement en régime fermé (internement socioéducatif et semi-liberté), le Gouvernement fédéral a quant à lui compétence pour « définir les directives encadrant l’organisation et le fonctionnement des unités et des programmes d’assistance, ainsi que les règles encadrant l’application des mesures socioéducatives que sont l’internement et la semi-liberté », selon la loi no 12594/2012 portant création du Système national d’assistance socioéducative (SINASE).

113.Avant même l’adoption en 2006 de la loi qui a créé le SINASE, le Gouvernement fédéral avait approuvé les normes architecturales qui devaient encadrer la construction des établissements chargés d’appliquer les mesures socioéducatives en milieu fermé, afin qu’ils puissent accueillir des activités de loisir et un dispensaire, ainsi que des salles pour des activités éducatives et des ateliers d’enseignement technique. 57 En 2016, selon le rapport annuel sur le SINASE publié par le MMFDH, on comptait 477 « unités d’assistance socioéducative » au Brésil, mais on ne dispose pas de données sur le nombre de ces unités qui respectent les normes architecturales susmentionnées.

114.Un plan national d’assistance socioéducative a été adopté en 2013. Ce document présente les directives et le modèle de gestion que le Brésil doit suivre dans ce domaine pendant la période 2014-2023. Il s’agit d’un plan décennal qui prévoit des actions interdépendantes et transversales en matière d’éducation, de santé, d’assistance sociale, de sports, de culture et de renforcement des capacités.

115.On trouvera de plus amples renseignements sur le SINASE dans le troisième rapport du Brésil sur la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

Articles 12 et 13

Réponse au paragraphe 23 de la liste des points

116.Comme nous l’avons dit dans notre réponse au paragraphe 14 de la liste des points, la collecte systématique de données sur le système de sécurité publique et sur la justice pénale est une pratique toute récente au Brésil. Bien que le Comité national de prévention et de répression de la torture ait été chargé de « créer et maintenir un registre des allégations, plaintes pénales et décisions de justice » dans ce domaine, les seules données actuellement disponibles proviennent du Département pénitentiaire national et font état de 174 personnes détenues pour faits de torture au Brésil en juin 2016, à raison de 174 hommes et 55 femmes. En ce qui concerne la sécurité publique, le Système national d’information sur la sécurité publique, les prisons et les stupéfiants (SINESP) créé en 2012 a pour mandat de stocker, traiter et intégrer les données et informations voulues pour faciliter la formulation, l’application, l’exécution, l’accompagnement et l’évaluation des politiques relatives à la sécurité publique et à la lutte contre le trafic de drogues, mais il ne contient pas encore de données sur la torture. En ce qui concerne les procès, le CNJ s’emploie à centraliser les données provenant des tribunaux des États, mais ses efforts ont jusqu’à maintenant porté surtout sur l’informatisation des procédures, qui est un outil important pour obtenir des informations plus détaillées dans un avenir proche, et sur la productivité.

117.Toujours en ce qui concerne le pouvoir judiciaire, il convient de rappeler que la même résolution du CNJ qui a instauré les audiences de garde à vue au Brésil a créé le système des audiences de garde à vue (SISTAC). Le SISTAC est un système de portée nationale qui oblige les cours d’appel (Tribunais de Justiça) à enregistrer des informations sur les audiences de garde à vue tenues. L’une de ses fonctionnalités permet de recueillir des informations sur les allégations de torture et de mauvais traitements subis au moment de l’arrestation d’un individu pris en flagrant délit ou pendant la garde à vue. Les données ainsi recueillies ne sont cependant pas présentées séparément, mais le CNJ a pu quand même déterminer qu’il y avait eu des allégations de violence au moment de l’arrestation dans 4,9 % des audiences tenues jusqu’en juin 2017.61 En 2017, une recherche sur la mise en œuvre des audiences de garde à vue faite sur commande du CNJ et publiée à sa demande, sans avoir recours au SISTAC, a obtenu des résultats très différents, puisqu’il en ressortait que 22 % des personnes accusées d’infraction avaient déclaré pendant leur audience de garde à vue qu’elles avaient subi des violences d’un type ou d’un autre lorsqu’elles avaient été arrêtées ; 73 % de ces cas de violence étaient imputés à la police militaire. Améliorer sa production de statistiques dans ce domaine constitue un véritable défi pour le Gouvernement brésilien, mais on peut déjà constater que des progrès importants ont été faits au cours des dernières années dans l’institutionnalisation de systèmes et de procédures à cet effet.

Réponse au paragraphe 24 de la liste des points

118.Parmi les sanctions prévues au Brésil, la loi relative à l’exécution des peines institue « l’isolement en cellule disciplinaire ou dans un local approprié », qui ne doit pas durer plus de trente jours. Selon la même loi, cette sanction, qui doit être « notifiée au juge », peut être appliquée à titre préventif par l’autorité administrative pour une durée maximum de dix jours.

119.Toute sanction qui s’écarterait des dispositions de la loi relative à l’exécution des peines constitue une infraction ou une faute administrative dont les auteurs seront poursuivis et punis.

Réponse au paragraphe 25 de la liste des points

120.Au Brésil, le ministère public est compétent pour mener des enquêtes judiciaires, et son intervention dans des affaires concernant l’action de la police, y compris les allégations de torture, est prévue par la résolution no 20 du CNMP, qui organise le contrôle extérieur de cette action et dispose que « les organes du ministère public doivent, chaque fois qu’il est nécessaire et opportun de le faire, ouvrir une enquête sur les infractions pénales commises dans le cadre de l’action de la police ».

121.La fonction de juge d’instruction n’existe pas au Brésil et il n’y a pas de consensus sur l’opportunité de la créer, encore que certains projets en ce sens soient à l’examen, y compris dans le cadre de propositions de réforme du Code de procédure pénale qui pourraient instituer un juge des garanties si elles aboutissent.

122.Comme nous l’avons mentionné dans notre réponse au paragraphe 14 de la liste des points, le Brésil souffre encore d’une pénurie de statistiques judiciaires et pénales, et il ne lui est donc pas possible pour le moment de fournir plus d’informations concernant les enquêtes sur les allégations de torture, y compris les exactions systématiques.

Réponse au paragraphe 26 de la liste des points

123.Aux termes de la Constitution fédérale, les tribunaux de droit commun sont chargés de poursuivre les infractions de droit commun et les tribunaux militaires les infractions de droit militaire. Avec la révision no 45 de 2004, la Constitution est allée plus loin en attribuant compétence à un jury quand la victime est un civil.

124.Les instances comprenant une infraction militaire et une infraction de droit commun commises simultanément, telles que l’atteinte à l’intégrité physique et la torture, par exemple, sont disjointes en application du précédent no 90 de la Cour supérieure de justice, dans lequel la Cour a jugé que : « La juridiction militaire de l’État est compétente pour poursuivre et juger les membres de la police militaire du chef d’une infraction militaire et la juridiction de droit commun est compétente pour poursuivre et juger les membres de la police militaire du chef de l’infraction de droit commun commise simultanément. ».

125.Il existe une divergence d’interprétation sur la juridiction compétente pour enquêter sur les atteintes à la vie commises par des militaires. Cette divergence vient de ce qu’en retirant cette infraction de la liste des infractions militaires, la loi no9299/1996 a omis de préciser quelle était la juridiction compétente pour enquêter sur les faits, si bien que le Code de procédure pénale militaire a retenu la formulation suivante : « En cas d’atteinte à la vie commise contre un civil, la justice militaire remet à la justice de droit commun le dossier de l’enquête effectuée par la police militaire ».

126.Cette formulation a rendu possible une interprétation selon laquelle l’enquête pouvait être menée par les forces militaires et remise à la justice militaire, qui se chargerait de la transmettre à la justice de droit commun. Dans la pratique, il n’y a pas eu de normalisation de l’interprétation à donner de cette disposition dans les différents États du Brésil, si bien qu’il y a eu des affaires d’atteintes à la vie commises par des policiers militaires dans lesquelles l’enquête a été menée à la fois par la police militaire et la police judiciaire, et d’autres dans lesquelles elle a été menée par l’une seulement d’entre elles, soit la militaire soit la judiciaire. Ce défaut de normalisation de la compétence en matière d’enquête s’est aggravé du fait de la décision préliminaire de la Cour suprême fédérale dans le recours direct en inconstitutionnalité (ADI) no 1494, qui a conclu à « l’apparente validité constitutionnelle de cette règle ».

127.La question reste donc ouverte, dès lors que la Cour suprême fédérale n’a pas rendu de décision définitive sur elle. Le recours en inconstitutionnalité susmentionné a été classé sans avoir été examiné sur le fond, et d’autres recours sur la même question − les recours ADI no 4164 et ADI no 5804 − n’ont pas été examinés non plus.

128.La rivalité corporatiste entre police militaire et police civile des États sur cette question s’est avivée avec l’adoption de la loi no 13491, qui a rendu aux juridictions militaires la compétence pour juger les atteintes à la vie commises contre des civils par des membres des forces armées lorsqu’elles sont commises : I − dans l’accomplissement de missions assignées par le Président de la République ou le Ministre de la défense ; II − dans le cadre d’une action impliquant la sûreté d’une institution militaire ou d’une mission militaire, même en l’absence de conflit ; III − dans le cadre d’activités militaires, d’opérations de paix, d’opérations de maintien de l’ordre public ou d’attributions subsidiaires. Cette loi, qui est elle aussi visée par un recours en inconstitutionnalité devant la Cour suprême fédérale (ADI no 5901), a également fait l’objet, en 2016, d’un avis défavorable de l’ancien Secrétariat spécial aux droits de l’homme, au motif que le changement qu’elle portait était contraire aux orientations des principaux instruments internationaux.

Réponse au paragraphe 27 de la liste des points

129.Créé en 2009 par décret présidentiel, le troisième Programme national relatif aux droits de l’homme (PNDH-3) a institué, dans le cadre de son objectif stratégique de renforcement du contrôle extérieur des organismes publics, un Bureau du Médiateur national pour les droits de l’homme (Ouvidoria Nacional dos Direitos Humanos) qui remplace le Bureau du Médiateur national des citoyens (Ouvidoria -Geral da Cidadania) et jouit de l’indépendance et de l’autonomie politiques. Le Conseil national des droits de l’homme a été chargé de nommer le Médiateur, de définir son mandat et de garantir que ses services disposent des moyens humains, matériels et financiers nécessaires à son fonctionnement. Le même objectif stratégique prévoit d’encourager les États et les municipalités à se doter de bureaux du Médiateur ayant même mandat. Il convient de noter qu’il existe au niveau des États des ouvidorias (bureaux du médiateur) et des corregedori as(inspections générales de la justice) compétents pour recevoir et évaluer les plaintes et pour leur donner suite.

130.Outre les ouvidorias et les corregedori as, il existe plusieurs institutions qui reçoivent et évaluent les plaintes pour torture et mauvais traitements, parmi lesquelles le ministère public, les bureaux du défenseur public et le pouvoir judiciaire. Le Système national de prévention et de répression de la torture (SNPCT), et en particulier le Mécanisme national de prévention et de répression de la torture (MNPCT) et le Comité national de prévention et de répression de la torture (CNPCT), sont eux aussi habilités à recevoir les plaintes. Il n’est pas rare non plus que des affaires de ce genre soient dénoncées au pouvoir législatif, tant fédéral que des États, et fassent l’objet d’un suivi de sa part. L’objectif principal visé par cette multiplication des institutions habilitées à recevoir les plaintes est de faciliter l’accès au système judiciaire et de rassurer des citoyens qui craindraient de porter plainte auprès de forces de police susceptibles d’être liées aux auteurs des faits dénoncés. Cependant, si d’un côté cette multiplication des institutions habilitées à recevoir les plaintes facilite l’ouverture d’enquêtes et l’accès au système judiciaire, de l’autre côté elle complique la centralisation de l’information et, partant, toute tentative d’avoir une vue d’ensemble de la situation.

131.Comme il a été dit plus haut, le Brésil ne dispose pas encore de données systématiques sur son secteur de la sécurité et son système judiciaire, mais nous présenterons ci-après des données communiquées par le Bureau du Médiateur national pour les droits de l’homme (ONDH). Le Bureau est un service qui relève directement du Ministère de la femme, de la famille et des droits humains et qui coordonne un centre d’appel d’urgence connu sous le nom de Disque Direitos Humanos (« Compose droits humains »). Ce centre d’appel reçoit des plaintes et des dénonciations de violations des droits humains.

132.Selon le Bilan annuel 2017 du Bureau du Médiateur national, plus de 19 000 plaintes pour violation des droits humains de personnes privées de liberté ont été reçues entre 2013 et 2017. Les violations les plus fréquemment dénoncées en 2016 et 2017 ont été les suivantes : négligence (6 809), violence institutionnelle (4 816), violence physique (3 672), violence psychologique (3 040) et torture (741). Le même bilan fait état du dépôt de 7 120 plaintes pour violation des droits humains commises par des policiers entre 2011 et 2017. Le nombre des plaintes pour torture s’est élevé à 908 pour les années 2016 et 2017.

133.Le centre d’appel d’urgence Disque Denúncia Nacional (« Compose plainte nationale »), plus connu sous le nom de « Disque 100 » (« Compose le 100 »), est actuellement géré par une société privée du nom de CALL dont le siège social est à Brasilia. Il fonctionne 24 heures sur 24 sept jours par semaine et compte environ 200 écoutants.

134.Les bureaux du Médiateur sont chargés d’analyser les plaintes dans une perspective plus large, de recueillir des données sur elles, de faciliter l’action des réseaux de protection de groupes spécifiques et d’assurer la coordination stratégique des centres d’appel d’urgence.

135.Le centre d’appel d’urgence Disque Direitos Humanos observe la procédure suivante de traitement des plaintes qu’il reçoit :

•L’écoutant écoute la personne qui appelle et cherche à obtenir d’elle le plus d’informations possible sans la mettre mal à l’aise. Dans les cas les plus graves, lorsque l’appel émane d’un agresseur ou d’adolescents peut-être suicidaires, la personne qui appelle est orientée vers un service spécialisé ;

•Sur confirmation d’une violation des droits de l’homme, l’écoutant recueille les informations pertinentes et les enregistre dans le Système national d’assistance et de médiation pour les droits de l’homme (SONDHA), qui est un système national intégré de services dans le domaine des droits de l’homme ;

•Une fois l’appel terminé, l’équipe de contrôle vérifie et répertorie la plainte avant de la transmettre aux personnels chargés de l’analyser et de lui attribuer un degré de priorité ; ces personnels se mettent ensuite en rapport avec les organismes compétents ;

•Dans le cas de plaintes plus graves, telles que les demandes d’urgence ou celles émanant d’usagers réguliers du centre d’appel, les coordinateurs chargés de traiter les plaintes procèdent à ce qu’ils appellent une « recherche active », qui consiste à établir le contact entre les écoutants concernés et l’organisme chargé de traiter la plainte afin d’obtenir des informations à jour sur l’affaire.

Réponse au paragraphe 28 de la liste des points

136.Dans le but d’éliminer la torture et de réduire le recours à la force meurtrière par la police, le PNDH‑3 a réaffirmé la nécessité de créer des ouvidorias de polícia (bureaux du médiateur de la police) indépendants. La question est formulée en ces termes dans la directive relative à la démocratisation et à la modernisation du système de sécurité publique : « proposer la création obligatoire de bureaux du médiateur de la police indépendants dans les États et le District fédéral, dont les médiateurs seraient protégés par leur mandat et choisis avec la participation de la société ». La question est également évoquée dans la directive relative à la lutte contre la violence institutionnelle, qui invite à éliminer la torture et à réduire le nombre des décès en milieu carcéral ou suite à une intervention de la police « en subordonnant le transfert volontaire de ressources fédérales aux États et au District fédéral à l’existence de bureaux du médiateur de la police et du système pénitentiaire ou d’un plan visant à ouvrir de tels bureaux, étant entendu que ces bureaux doivent être coordonnés par un médiateur indépendant, doté d’un mandat et choisi avec la participation de la société civile ».

137.Il existe actuellement des bureaux du médiateur de la police dans 22 États. Le Gouvernement fédéral a financé plusieurs analyses de ces bureaux, dont il ressort que la plupart d’entre eux sont encore inféodés au gouvernement de l’État considéré et ne jouissent pas d’une véritable indépendance politique. De plus, la plupart d’entre eux ne disposent pas de leur propre budget et se heurtent à plusieurs limitations institutionnelles dans l’accomplissement de leur mission de contrôle de l’action de la police.

138.Le Gouvernement fédéral a encouragé la création et le fonctionnement effectif de bureaux du médiateur de la police dans les États, en particulier dans le cadre d’un partenariat majeur avec l’Union européenne, mais ses efforts ont été entravés par le caractère fédéral du Brésil, qui consacre l’autonomie des États dans l’organisation de leurs services de sécurité. Pour la même raison, il n’existe pas de données nationales normalisées qui permettraient d’évaluer l’efficacité des corregedorias de polícia (inspections générales de la police).

139.La présidence de la République a créé le Forum national des médiateurs des droits de l’homme par décret no 9400/2018. Ce forum réunit les médiateurs des organes et entités de l’État fédéral, des États, du District fédéral et des municipalités, ainsi que du ministère public et du Bureau du défenseur public. Il a pour objectif, entre autres, d’accélérer le traitement des plaintes reçues par les centres d’appel d’urgence Disque Direitos Humanos et Disque 100. Le Forum est administré par le Ministère de la femme, de la famille et des droits humains.

140.Le Forum s’intéresse à des questions comme la police, la sécurité publique et le système pénitentiaire, les migrants et les réfugiés, les enfants et les adolescents, les personnes âgées et les quilombolas. Il a une compétence très large et peut proposer des mesures transversales, en plus d’améliorer le traitement et le règlement des plaintes reçues dans tous les domaines des droits de l’homme.

Réponse au paragraphe 29 de la liste des points

141.Les organismes chargés de recevoir les plaintes pour violation des droits de l’homme ont mis en place les dispositifs voulus pour garantir le caractère confidentiel des plaintes et protéger l’identité de leurs auteurs.

142.Le Brésil exécute depuis 1999 un programme fédéral de protection des victimes et témoins menacés (Provita) créé par la loi no 9807/1999, complétée ultérieurement par le décret no 3518/2000. Ce programme offre une protection spéciale aux victimes et aux témoins d’infractions visés par des pressions ou exposés à des menaces graves en raison de leur collaboration à une enquête ou à une procédure pénale et qui ne bénéficient pas d’une autre protection. La protection qu’il offre aux victimes, aux témoins et aux membres de leur famille est pleine et entière et comprend une aide psychologique et sociale, la promotion de leurs droits humains et un accès en toute sécurité aux programmes sociaux.

143.En règle générale, le Brésil met en œuvre ces mesures de protection dans le cadre de partenariats entre le Gouvernement fédéral et les gouvernements des États, et entre ces derniers et des organisations non-gouvernementales justifiant d’une compétence reconnue en matière de défense des droits de l’homme.

144.Le partenariat entre le Gouvernement fédéral et les États prend la forme d’un transfert volontaire de ressources consécutif à la signature d’un accord à cet effet. Quatorze de ces accords sont actuellement en vigueur, dont 13 organisent le financement de programmes de protection mis en place par les États et 1 concerne les États qui n’ont pas signé d’accord avec le Gouvernement fédéral. Dans les États qui n’ont pas mis en place un programme de protection des victimes et témoins menacés, ces derniers sont couverts par le programme fédéral Provita.

145.Le programme Provita étend sa protection aux victimes, aux témoins, aux accusés collaborant à l’enquête qui ne sont pas privés de liberté, à leurs conjoints de droit ou de fait, aux ascendants et descendants en ligne directe et personnes à charge habitant habituellement avec la victime ou le témoin, qu’ils soient ou non eux-mêmes visés par une menace, et aux membres de la famille de l’accusé collaborant à l’enquête qui sont exposés à une menace en raison de cette collaboration.

146.Les conditions d’admission au bénéfice de ce programme sont les suivantes :

a)Se trouver en danger (être exposé à la contrainte ou à une menace grave) ;

b)Collaborer à une procédure pénale en qualité de victime ou de témoin et se trouver en danger en raison de cette collaboration ;

c)Observer les règles de conduite naturellement imposées par le programme pour des motifs de sécurité ;

d)Ne pas être soi-même sous le coup de mesures restrictives de liberté ;

e)Donner son consentement à bénéficier du programme et à respecter ses règles et autres mesures de sécurité.

Réponse au paragraphe 30 de la liste des points

147.En 2007, le décret no 6044/2007 a institué une politique nationale de protection des défenseurs des droits de l’homme qui définit les principes et les directives qui doivent encadrer la protection et l’assistance dues aux personnes morales et physiques, groupes, institutions, organisations et mouvements sociaux qui assurent la promotion, la protection et la défense des droits de l’homme et, du fait de leurs activités, peuvent se trouver dans des situations de danger ou de vulnérabilité. Ce décret vise également à assurer la continuité du travail des défenseurs des droits de l’homme exposés à des situations de danger ou de vulnérabilité ou dont les droits ont été violés à cause de leur travail.

148.Le MMFDH administre au niveau national un programme de protection des défenseurs des droits de l’homme (PPDDH) comprenant une Coordination générale et une équipe technique. Cette dernière prête assistance aux défenseurs des droits de l’homme et surveille leur situation dans les États qui n’ont pas mis en place un programme local de protection. C’est la Coordination nationale qui décide de la réponse positive ou négative à donner aux demandes d’inclusion dans le PPDDH. Au niveau des États, le PPDDH fonctionne par l’intermédiaire d’une Coordination de l’État considéré, qui agit en lien avec la Coordination générale du programme national. Les activités d’assistance et de surveillance y sont menées par une équipe technique sélectionnée par l’organisme chargé d’exécuter le programme. Six États se sont dotés de ces programmes, qui sont soutenus par le Gouvernement fédéral : Minas Gerais, Pernambouc, Maranhão, Ceará, Pará et Bahia. Les programmes des États de Pará et de Bahia en sont encore au stade de la mise en place.

149.L’accompagnement des défenseurs des droits de l’homme bénéficiant du Programme prend la forme d’un suivi systématique et périodique, qui s’ajoute aux mesures particulières concernant chaque cas individuel. Le PPDDH a été modifié en 2018 et son champ d’application étendu aux communicateurs sociaux et aux écologistes, compte tenu de leur engagement dans la défense des droits de l’homme. L’arrêté ministériel no 300/2018 portant règlement du Programme étend en effet aux défenseurs de l’environnement et aux communicateurs sociaux visés par des menaces ou dont les droits sont violés en raison de leur activité dans leur domaine de compétence la protection offerte jusque-là aux seuls défenseurs des droits de l’homme. Toujours en 2018, le budget du MMFDH a bénéficié d’une rallonge de 5 000 000 de reais brésiliens pour financer le PPDDH.

150.En ce qui concerne la compétence à l’égard des graves violations des droits de l’homme, la Constitution a été révisée en 2004 par ajout à son article 109 d’un paragraphe 5 qui se lit comme suit : « Dans les cas de graves violations des droits de l’homme, le Procureur général de la République peut, aux fins de garantir l’exécution d’obligations découlant de traités internationaux des droits de l’homme auxquels le Brésil est partie, déposer auprès de la Cour supérieure de justice, à n’importe quel stade de l’enquête ou de la procédure judiciaire, une demande incidente de dessaisissement de juridiction en faveur de la justice fédérale ». Avec cette révision, un nouveau mécanisme procédural a été créé dans l’ordre juridique brésilien, à savoir la procédure incidente de dessaisissement de juridiction (Incidente de Deslocamento de Competência, ou IDC), qui autorise les tribunaux fédéraux, sur demande du Procureur général de la République, à se déclarer compétents dans des affaires qui relèvent normalement de la compétence des tribunaux des États.

151.Depuis l’incorporation de ce dispositif procédural dans le droit brésilien, trois demandes de dessaisissement de juridiction ont été acceptées. La première, IDC no 02, a été introduite en 2009 par le Procureur général de la République et concernait l’assassinat du défenseur des droits de l’homme, conseiller municipal et avocat Manoel Bezerra de Mattos Neto, commis le 24 janvier 2009 dans la ville de Pitimbu (État de Paraíba). Selon le jugement, l’assassinat a été commis après que Manoel Mattos eut « reçu plusieurs menaces qui, selon toute vraisemblance, s’expliquaient par l’action qu’il menait notoirement et avec constance contre les «escadrons de la mort qui semblent avoir agi en toute impunité pendant plus de dix ans à la frontière des États de Paraíba et Pernambouc, entre les villes de Pedras de Fogo et Itambé, avec la participation supposée des autorités de l’État ». Manuel Mattos avait dénoncé « 200 homicides présentant les caractéristiques d’exécutions sommaires commis par ces escadrons de la mort au cours des dix années précédentes ». Cette IDC concerne à la fois la demande de dessaisissement en faveur de la justice fédérale de l’affaire de l’assassinat du défenseur des droits de l’homme et la dénonciation faite par celui-ci des agissements des escadrons de la mort. Dans sa demande initiale, le Procureur général de la République a fait valoir que l’implication supposée des autorités de l’État dans l’affaire risquait d’entraver, voire d’empêcher, une enquête crédible, raison pour laquelle ces agissements devaient être jugés par des juridictions fédérales. La Cour supérieure de justice a fait droit à l’IDC no 2 en 2010.

152.L’IDC no 3 a été introduite en 2013. Elle demandait que l’enquête sur les soupçons de participation d’escadrons de la mort composés de fonctionnaires à l’assassinat de personnes de la rue dans l’État de Goiás passe sous juridiction fédérale. Sur les 40 affaires évoquées dans cette procédure, huit enquêtes judiciaires et actions pénales des chefs d’homicide, de torture et de disparition forcée ont été portées devant les tribunaux fédéraux. Il a également été décidé que les affaires dont les tribunaux de l’État resteraient saisis seraient jugées en priorité. Cette décision a été rendue en décembre 2014.

153.Il a de même été fait droit en novembre 2014 à l’IDC no 5, qui demandait que soit transférée à la justice fédérale l’affaire de l’assassinat du Procureur de l’État de Pernambouc, Thiago Faria Soares. On soupçonne que cette affaire a un rapport avec les agissements d’escadrons de la mort dans cet État, et il importe par conséquent d’établir si le crime en cause a été commis en raison des activités de la victime.

154.Sont encore pendantes les IDC no 9, relative à des assassinats commis dans l’État de São Paulo et imputés à des escadrons de la mort avec la participation supposée de fonctionnaires, et no 10, qui demande le dépaysement de l’enquête et du procès en l’affaire des violations commises par la police dans une opération menée en février 2015 qui a fait 12 morts âgés de 15 à 28 ans et 6 blessés.

Article 14

Réponse au paragraphe 31 de la liste des points

155.Les victimes de torture peuvent en principe être indemnisées équitablement et de manière adéquate de leur préjudice grâce aux décisions rendues par les tribunaux saisis à cet effet. Si l’action engagée par une victime de torture obtient un jugement favorable, l’indemnité est payée par l’État à la victime elle-même ou, en cas de décès de celle-ci, aux membres de sa famille. Dans la pratique cependant, comme le Brésil est une fédération d’États, la réalisation de ce droit varie en fonction de l’État concerné.

156.En ce qui concerne les actes de torture commis pendant la dictature militaire, il est acquis pour la Cour supérieure de justice que le préjudice causé par une violation de droits fondamentaux est imprescriptible, en particulier quand cette violation a été commise pendant le régime militaire, à une époque où les justiciables ne pouvaient faire valoir adéquatement leurs prétentions. En conséquence, la Cour supérieure de justice non seulement reconnaît l’obligation faite à l’État d’indemniser la victime, mais encore admet que les actions en indemnisation peuvent être engagées à n’importe quel moment.

157.Il est également possible d’être indemnisé par la voie administrative de certains faits associés à la période de la dictature. La loi no 10559/2002 ouvre ainsi droit à indemnisation aux personnes qui peuvent prouver qu’elles ont perdu leur emploi en raison d’une persécution politique, auquel cas elles sont indemnisée de la perte de revenus correspondante par versement d’une pension mensuelle permanente et continue et remboursement des sommes dues jusqu’en 1988. Quant aux personnes qui ne peuvent pas apporter la preuve requise, elles reçoivent une indemnité forfaitaire unique de 100 000 reais brésiliens. Ces montants sont sujets à révision par décision des tribunaux.

158.L’indemnisation accordée par la voie administrative implique également la reconnaissance du statut d’amnistié politique de la victime, qui est effectuée par la Commission d’amnistie. Créée par la loi no 10559/2002, cette commission a déjà reçu plus de 77 000 demandes, dont plus de 65 000 ont été examinées.

159.Depuis 2012, la Commission d’amnistie subventionne le projet Cliniques de témoignage, qui met en place, en partenariat avec la société civile, des centres d’aide et de soutien psychologique au service des personnes, familles et groupes touchés par les violences commises par des agents de l’État entre 1946 et 1988. Ce projet vise à offrir une réparation symbolique sous forme de soutien psychologique aux personnes qui ont été directement ou indirectement touchées par la violence étatique, pour les aider à surmonter les séquelles de la dictature.

160.La loi no 12528 portant création de la Commission nationale de la vérité (CNV) a été adoptée à la fin de 2011. La CNV avait pour mandat d’enquêter sur les graves violations des droits de l’homme commises entre 1946 et 1988, et plus particulièrement sur celles commises pendant le régime militaire installé en 1964. Constituée en mai 2012, elle a conclu ses travaux le 10 décembre 2014, avec la publication d’un rapport d’activité dans lequel elle décrivait les faits qu’elle avait examinés et présentait ses conclusions et recommandations.

161.Le rapport reconnaît que des violations des droits de l’homme ont été commises entre 1946 et 1988, plus particulièrement pendant la dictature militaire, et les classe sous les quatre grandes catégories suivantes : torture, homicide, disparition forcée et dissimulation de cadavre. Au total, 191 morts et 210 disparitions ont été constatées. On compte également 33 personnes disparues dont les corps ont été découverts ultérieurement, et 337 agents publics et autres personnes employées par l’État ont été dénoncés comme auteurs de violations des droits de l’homme. Le rapport contient 29 recommandations aux autorités, réparties en trois groupes : 17 mesures visant les institutions, 8 propositions de révision législative et 4 mesures de suivi des actions et recommandations. Parmi les recommandations figurent celle de poursuivre les auteurs de violations des droits de l’homme devant les juridictions pénales, civiles et administratives et celle d’adopter diverses réformes dans le domaine de la sécurité publique, telles que la démilitarisation de la police et des réformes du système pénitentiaire.

162.Un chapitre du rapport est consacré aux relations entre la CNV et les Forces armées. Selon le rapport, 84 lettres ont été adressées au Ministère de la défense et à ses différents commandements, dont 53 sollicitaient des informations.

Article 15

Réponse au paragraphe 32 de la liste des points

163.La disposition de la Constitution fédérale voulant que les preuves obtenues par des moyens illicites soient irrecevables dans un procès est fondamentale à cet égard. La Constitution elle-même établit l’illégalité de la torture. Une interprétation systématique de la Constitution permet donc de conclure que l’utilisation de preuves ou d’aveux obtenus sous la torture est frappée d’interdiction constitutionnelle au Brésil.

164.Cette interdiction est également consacrée par le Code de procédure pénale brésilien (CPP) tel que modifié par la loi no 11690/2008. Cette loi remplace en effet le libellé de l’article 157 par le texte suivant : « Sont irrecevables et doivent être exclues du procès les preuves illicites, entendues comme les preuves obtenues en violation de normes constitutionnelles ou légales. ». Le même article étend cette irrecevabilité aux preuves dérivées de preuves irrecevables et dispose qu’une preuve déclarée irrecevable ne peut être utilisée dans une décision de justice.

Article 16

Réponse au paragraphe 33 de la liste des points

165.Le Code pénal a été révisé en 2009 et 2016 afin de renforcer l’arsenal judiciaire dans la lutte contre la traite des personnes. Sa révision la plus récente, effectuée par la loi no 13344/2016, organise la prévention et la répression de la traite nationale et internationale des personnes et institue des mesures de prise en charge des victimes. Elle punit de quatre à huit ans d’emprisonnement et d’une amende les faits constitutifs de traite des personnes aux fins de : 1)prélèvement d’organes, tissus ou autres parties du corps ; 2)réduction en esclavage ou à des pratiques analogues à l’esclavage ; 3)réduction en servitude ; 4)adoption illégale ; ou 5)exploitation sexuelle. Les circonstances suivantes emportent aggravation de la peine d’un tiers à la moitié : 1)l’infraction est commise par un agent public dans l’exercice de ses fonctions ou sous prétexte de les exercer ; 2)l’infraction est commise contre un enfant, un adolescent, une personne âgée ou une personne handicapée ; 3)l’auteur de l’infraction tire avantage de relations familiales, domestiques, de cohabitation ou d’hospitalité ou de relations de dépendance économique ou abuse de son autorité ou de la supériorité hiérarchique inhérente à sa position, à sa fonction ou à son état ; et 4)la victime est éloignée du territoire national.

166.En sus de modifier la qualification de l’infraction, la loi de 2016 prévoit un ensemble de mesures préventives telles qu’une mobilisation intersectorielle des organismes publics compétents, l’organisation de campagnes socioéducatives, un soutien à la mobilisation et à la participation de la société civile et un soutien à des projets de prévention de la traite des personnes. Au chapitre de la répression, la même loi prévoit les mesures suivantes : coopération entre les organismes judiciaires et policiers nationaux et étrangers ; intégration des politiques de répression des infractions connexes à la traite des personnes et de poursuites pénales contre leurs auteurs ; et création d’équipes conjointes d’enquête.

167.Les lois et règlements en vigueur ont également mis en place des mesures de protection et de prise en charge des victimes directes ou indirectes de la traite des personnes, avec notamment : une prise en charge juridique et sociale, des services d’aide au travail et à l’emploi, des services de santé tant physique que psychologique ; des possibilités d’accueil et d’hébergement provisoire ; la prise en charge de besoins spécifiques tenant au sexe, à l’orientation sexuelle, à l’origine ethnique ou sociale, à l’origine, à la nationalité, à la race, à la religion, à l’âge, à la situation migratoire, aux compétences professionnelles, à la diversité culturelle, à la langue, aux liens sociaux et de famille et à d’autres spécificités ; la protection de l’intimité et de l’identité ; la prévention de la revictimisation dans le cadre de la prise en charge, des enquêtes et du processus judiciaire ; des soins dispensés avec humanité ; le droit d’être informé sur les procédures administratives et judiciaires les concernant.

168.Le Brésil dispose d’une politique nationale de lutte contre le trafic de personnes depuis 2016 et a déjà exécuté deux plans nationaux dans ce domaine, le premier publié en 2008 et le deuxième en 2013. En 2017, le deuxième plan national, qui prévoit des actions aux niveaux fédéral, des États et municipal et tient compte des politiques sectorielles en vigueur et du caractère transversal de la lutte contre la traite des personnes, a été soumis à un processus d’évaluation auquel a participé la société civile dans le cadre d’une consultation publique. Le rapport d’évaluation des résultats du deuxième plan national de lutte contre le trafic de personnes a établi que 58 % des objectifs visés avaient été atteints et 25  % avaient été partiellement atteints.

169.Il n’existe pas de sources d’information fiables sur les procès et condamnations pour traite des personnes, mais le Secrétariat national à la justice a produit deux rapports qui, bien qu’ils ne soient pas comparables entre eux, offrent quelques données recueillies entre 2005 et 2016. Le plus récent, établi en 2017, offre des données sur la période 2014-2016 et signale que, selon le système informatique du Département de la police fédérale, 959 enquêtes de police judiciaire ont été ouvertes et 1 745 personnes ont été mises en examen entre 2007 et 2016, la grande majorité d’entre elles pour des faits de réduction en esclavage.

170.On trouvera de plus amples renseignements sur la traite des personnes dans le rapport du Brésil sur le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

171.Selon le rapport national d’informations pénitentiaires sur les femmes de 2016 (Levantamento Nacional de Informações Penitenciárias − Infopen Mulheres 2016), le Brésil se situe au 4e rang dans le monde pour sa population carcérale féminine, avec plus de 40 000 femmes privées de liberté. La croissance moyenne de la population carcérale féminine est plus rapide que celle de la population carcérale masculine. Elle a été de 256 % entre 2000 et 2012, alors que la croissance moyenne de la population carcérale masculine pendant la même période était de 130 %.

172.Une récente décision d’habeas corpus collectif de la Cour suprême fédérale a accordé l’assignation à domicile aux femmes incarcérées mères d’enfants de moins de 13 ans ou enceintes. Cette décision représente un progrès considérable en ce qu’elle tient compte de la vulnérabilité de ces femmes.

Réponse au paragraphe 34 de la liste des points

173.Selon le dernier rapport national d’informations pénitentiaires publié par le Département pénitentiaire national, il y avait 726 712 personnes dans les prisons brésiliennes en juin 2016.

174.Comme on l’a dit plus haut, le Brésil s’est efforcé d’élargir le recours effectif à des peines et mesures alternatives. De plus, depuis 2008, le Conseil national de justice a mis en place un programme de campagnes de désincarcération appelées Mutirões Carcerários dans le cadre duquel des membres du système judiciaire sont dépêchés dans plusieurs États pour y inspecter les établissements pénitentiaires, analyser la situation juridique des détenus et garantir que celle-ci est conforme aux dispositions de la loi relative à l’exécution des peines. Ce programme a permis d’analyser environ 400 000 procédures et d’obtenir plus de 80 000 aménagements de peine tels qu’un changement de régime pénitentiaire, une mise en liberté provisoire et le droit d’avoir un emploi à l’extérieur. Il a aussi permis de mettre en liberté 45 000 personnes qui avaient déjà purgé leur peine originale.

175.Le Gouvernement fédéral a adopté plusieurs mesures en vue de redresser la situation des établissements pénitentiaires, notamment en finançant la création de nouvelles places pour réduire le surpeuplement carcéral et améliorer les conditions de détention.

176.Le système pénitentiaire fédéral est composé de cinq établissements à sécurité maximum situés à Porto Velho (Rondônia), Mossoró (Rio Grande do Norte), Campo Grande (Mato Grosso do Sul), Catanduvas (Paraná) et Brasília (District fédéral), qui offrent 1 032 places au total. En juin 2016, il accueillait 437 détenus, dont 119 détenus provisoires. Le régime des établissements du système pénitentiaire fédéral est celui de la sécurité maximum. Les détenus sont accueillis en cellule individuelle et ont droit à deux heures de promenade à l’air libre par jour, qu’ils font par petits groupes. Les détenus ont également le droit de recevoir des visites, à condition qu’elles aient été programmées à l’avance.

177.Les textes qui encadrent le transfèrement et la mise sous écrou des détenus dans les établissements pénitentiaires fédéraux − la loi no 11671/2008 et le décret no 6877/2009 − prévoient que les intéressés doivent présenter au moins l’une des caractéristiques suivantes :

a)Avoir exercé des fonctions de direction dans une organisation criminelle ou participé de façon substantielle à ses activités ;

b)Avoir commis une infraction qui les expose à des atteintes à leur intégrité physique dans leur établissement pénitentiaire d’origine ;

c)Être soumis au régime disciplinaire différencié ;

d)Être membre d’une bande ou association de malfaiteurs impliquée dans la commission réitérée de crimes accompagnés de violences ou de menaces graves ;

e)Être un accusé collaborant aux poursuites ou être partie à une procédure de plaider coupable, si cette situation les expose à des atteintes à leur intégrité physique dans leur établissement d’origine ; ou

f)Avoir participé à des tentatives d’évasion, des violences ou des faits d’indiscipline graves dans leur établissement d’origine.

178.Depuis sa création, le Système pénitentiaire fédéral n’a connu aucune révolte ni aucune évasion. Ses strictes règles de sécurité interdisent l’introduction de téléphones et divers autres objets. Les fautes contre la discipline exposent les détenus à l’application du régime disciplinaire différencié, qui les place dans une cellule d’isolement spéciale disposant de son propre espace de promenade pour assurer leur isolement complet.

179.Le compendium annuel de données 2017 intitulé « Prestations effectuées dans les prisons fédérales » (Compêndio anual de dados 2017  −  Asistências nos presídios federales) fait état de 23 016 prestations de soins de santé, dont 74,4 % étaient des soins infirmiers. La même année, 215 détenus étaient inscrits dans le système éducatif formel et 438 ont bénéficié d’un enseignement professionnel et technique dispensé à distance. Les établissements pénitentiaires fédéraux ont également mis en place des programmes de réduction de peine pour récompenser la lecture et, dans certains cas, des activités culturelles comme une cinémathèque. Ils n’ont cependant pas encore concrétisé des offres de travail.

Réponse au paragraphe 35 de la liste des points

180.La loi dite Maria da Penha marque un progrès important dans la défense des droits des femmes et repose sur l’idée que la violence domestique est une forme de violation des droits humains. Ses dispositions encouragent l’adoption par l’État de stratégies de prise en charge intégrale et multidisciplinaire des femmes victimes de violence domestique et élargissent le champ d’action de l’État face à ce problème. Porteuse d’innovations majeures, cette loi a élargi l’éventail des services visant à répondre aux violences faites aux femmes, en créant des unités spécialisées non seulement dans les soins de santé, mais aussi dans la sécurité et l’accompagnement judiciaire. Elle organise également un ensemble de mesures d’urgence visant à protéger les femmes dans des situations où leur vie est menacée, telles que l’éloignement de l’auteur des violences du domicile conjugal et l’interdiction qui lui est faite de s’approcher de la victime et de ses enfants.

181.Les résultats d’une enquête d’évaluation de l’impact de cette loi menée en 2015 par l’Institut de recherche économique appliquée ont « montré sans exception que l’adoption de la loi Maria da Penha avait eu des effets statistiquement importants en termes de diminution du nombre des homicides liés au genre ». Le Gouvernement a fait de la lutte contre les homicides liés au genre une priorité en adoptant la loi no 13104/2015, qui fait du féminicide une circonstance aggravante de l’homicide.

182.Cette question est traitée de façon plus approfondie dans les rapports du Brésil sur le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

Réponse au paragraphe 36 de la liste des points

183.Le recours aux châtiments corporels contre les enfants est interdit au Brésil par la loi no 13010/2014, qui dispose que ces pratiques ne peuvent être utilisées sous prétexte de correction, discipline ou éducation.

184.Adopté en 2006, le Plan national de promotion, protection et défense du droit des enfants et des adolescents à la vie familiale et communautaire aborde, entre autres sujets, celui des enfants en situation de rue. Il prévoit d’inclure dans la Politique nationale pour la population en situation de rue un certain nombre d’actions visant à garantir les droits des enfants et des adolescents en situation de rue. En 2011, une étude commanditée par le secrétariat aux droits de l’homme de la présidence de la République a été publiée sous le titre de Première enquête censitaire nationale sur les enfants et les adolescents en situation de rue. S’appuyant sur cette enquête et plusieurs autres études, le Conseil national des droits des enfants et des adolescents (CONANDA) a créé, en 2015, un groupe de travail chargé de renforcer le dispositif d’assistance sociale et les politiques publiques au service des enfants et adolescents en situation de rue. Les travaux de ce groupe ont abouti à la publication, en 2017, de directives nationales pour la prise en charge des enfants et des adolescents en situation de rue.

185.La question de la violence contre les enfants et les adolescents est abordée par plusieurs politiques publiques, dont un « Agenda social » adopté en 2007 qui comprend quatre projets majeurs de prise en charge des enfants et adolescents en situation de violence et de vulnérabilité sociales. Ces projets sont intitulés Bem -me- quer (« Prends soin de moi »), Caminho para Casa (Retour à la maison), Na Medida Certa (Une juste mesure) et Observatório Nacional dos Direitos da Criança e do Adolescente (Observatoire national des droits de l’enfant et de l’adolescent), ce dernier projet étant conçu comme un outil d’accompagnement des autres projets. L’Agenda social vise à défendre, promouvoir et garantir les droits des enfants et des adolescents et s’appuie sur le décret no 6230/2007 portant engagement national à réduire la violence contre les enfants et les adolescents.

186.Depuis 2000, le Brésil s’est doté de plans et programmes visant à prévenir et réprimer les atteintes sexuelles et l’exploitation sexuelle des enfants et des adolescents. Le Plan national de lutte contre la violence sexuelle visant les enfants et les adolescents prévoit une série d’actions à mener jusqu’à l’horizon 2020. Parmi les principales mesures envisagées par ce plan figurent le renforcement du réseau de prise en charge des victimes et l’exécution d’actions menées conjointement par le Gouvernement et les organisations de la société civile.

187.Le Gouvernement fédéral exécute depuis 2003 un programme de protection des enfants et des adolescents en danger de mort institutionnalisé en 2007 par le décret no 6231, qui vise à « protéger les enfants et les adolescents exposés à une menace de mort grave et imminente, lorsque les moyens d’action habituels sont épuisés, au moyen de mesures de prévention et de répression de la menace ». Depuis sa création, ce programme exécuté par le Ministère de la femme, de la famille et des droits humains, a fourni une assistance à plus de 10 000 personnes, dont 74 % étaient de sexe masculin et 26 % de sexe féminin, tandis que 74 % étaient des Afro‑Brésiliens, et dont l’âge moyen était de 15,7 ans. Ce programme couvre actuellement 13 États et comprend un centre technique fédéral qui intervient dans les cas relevant d’États non couverts.

188.La loi no 12127 adoptée en 2009 a créé un registre national des enfants et adolescents disparus qui est une base de données contenant des informations sur les enfants et adolescents disparus, et notamment des photos. Il offre des fonctionnalités de saisie, de consultation et de diffusion des informations à l’échelle du pays et mobilise les agents de la sécurité publique, les représentants des gouvernements des États, les agents des services de protection de l’enfance et les représentants de la société civile dans la lutte contre ce problème. N’importe qui peut y inscrire un enfant ou un adolescent disparu. Le registre national contient actuellement les noms de 138 jeunes disparus.

Réponse au paragraphe 137 de la liste des points

189.On trouvera les informations sollicitées sur le travail servile et le travail forcé dans le rapport du Brésil sur le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Réponse au paragraphe 38 de la liste des points

190.Le contrôle du recours à la force par les personnels de police reste un problème pour les services publics de sécurité. Du fait que le Brésil est une fédération, les données sur l’usage de la force par la police ne font pas l’objet d’une collecte systématique au niveau national.

191.Plusieurs actions ont été engagées ces dernières années pour renforcer la réglementation et le contrôle du recours à la force par les organismes de sécurité.

192.En 2010, l’arrêté interministériel no 4226 a établi des directives relatives à l’usage de la force par les agents de la sécurité publique qui visent à réduire progressivement le nombre des interventions mortelles effectuées par ceux-ci. Le texte de ces directives est basé sur deux documents de l’ONU, le Code de conduite des responsables de l’application des lois et les Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois. Les directives énoncent les principes fondamentaux en ce domaine et traitent de la formation des professionnels de la sécurité, de l’adoption de techniques et de tactiques moins meurtrières et des procédures d’enquête sur les incidents. Pour encourager les États à adopter ces directives, le Gouvernement fédéral agissant par l’intermédiaire du Ministère de la justice a conclu avec eux un accord de coopération technique sur la réduction du nombre d’interventions policières mortelles et investi dans l’acquisition d’équipement de protection personnelle, dans l’adoption de techniques moins meurtrières et dans la formation des professionnels de la sécurité publique.

193.La loi no 13060, qui régit sur tout le territoire national l’emploi d’armes moins dommageables par les agents de la sécurité publique, a été adoptée en 2014. Elle prescrit d’équiper les agents de la sécurité publique d’autres armes que les armes à feu pour leur permettre de faire un usage proportionné de la force.

194.Après l’adoption de cette loi et de ses règlements d’application, le Réseau Enseignement à distance du Secrétariat national à la sécurité publique (EaD-SENASP) a révisé et mis à jour son cours sur ce sujet. Selon le tableau figurant à l’annexe I du présent rapport, plus de 140 000 agents de la sécurité publique ont déjà suivi ce cours à distance.

195.En 2015, le Conseil national du ministère public a adopté sa résolution no 129 qui définit les règles minimum que doit suivre le ministère public dans sa mission de contrôle extérieur des enquêtes sur les interventions policières mortelles. Non content de donner des directives procédurales sur les mesures à prendre dans ces enquêtes, le CNMP dispose qu’« il appartient au ministère public de promouvoir des politiques publiques de prévention des interventions policières mortelles ».

196.Il importe de souligner que cette question est à l’ordre du jour du CNMP, lequel s’est fixé un certain nombre d’objectifs systématiques pour résoudre ce problème ; ces objectifs sont consignés dans un document intitulé O MP no Enfrentamento à Morte Decorrente de Intervenção Policial (« Le ministère public face aux interventions policières mortelles ») publié en 2014, ainsi que dans un rapport publié sous le même titre en 2016.

197.En 2014, un service de la lutte contre les crimes contre la personne a été créé au sein de la division des droits de l’homme du Département de la police fédérale, avec pour objectif de lutter contre les agissements des « escadrons de la mort », organisations criminelles dont les membres tant policiers que civils sont impliqués dans la pratique d’exécutions sommaires. Le Département de la police fédérale a lancé de nombreuses opérations contre les escadrons de la mort, avec notamment l’opération Sixième Commandement (2011 et 2016), qui a permis d’arrêter de nombreux agents de la police militaire dans l’État de Goiás et d’exécuter des mandats de perquisition et saisie ; l’opération Squadre (2012), qui a permis d’exécuter 45 mandats d’arrêt, 11 mandats d’amener et 19 mandats de perquisition et saisie ; l’opération Hécatombe (2013), qui a permis l’exécuter 21 mandats d’arrêt, 9 mandats d’amener et 32 mandats de perquisition et saisie ; l’opération Cold Case (2013), qui a permis d’exécuter 9 mandats d’arrêt, 3 mandats d’amener et 21 mandats de perquisition et saisie ; et l’opération Puits rouge (2014), qui a permis d’exécuter 6 mandats d’arrêt, 15 mandats d’amener et 3 mandats de perquisition et saisie.

Réponse au paragraphe 39 de la liste des points

198.Le Brésil répondra à ce paragraphe de la liste des points dans son rapport sur la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Réponse au paragraphe 40 de la liste des points

199.Les informations sollicitées relatives à la question des peuples autochtones et des communautés quilombola seront communiquées dans les rapports du Brésil sur le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, sur le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et sur la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Renseignements d’ordre général sur la situation des droits de l’homme dans le pays, y compris sur les nouvelles mesures et les faits nouveaux concernant la mise en œuvre de la Convention

Réponse au paragraphe 41 de la liste des points

200.Le Brésil répond principalement au terrorisme sous la forme des actions préventives menées par le Département de la police fédérale à travers le travail effectué en permanence par les renseignements généraux à partir d’informations communiquées par INTERPOL, par les attachés des ambassades du Brésil à l’étranger et étrangères au Brésil et par l’Agence brésilienne du renseignement.

201.Le Département du recouvrement des biens et de la coopération judiciaire internationale du Ministère de la justice est le service chargé d’appliquer les sanctions du Conseil de sécurité des Nations Unies en donnant suite à ses demandes de gel des biens et des actifs des personnes et des entités désignées dans ses résolutions. Pour transposer dans l’ordre juridique interne l’obligation d’exécuter les résolutions du Conseil de sécurité, le Brésil a adopté la loi no 13170/2015. Celle-ci ayant été déclarée insuffisante par le Groupe d’action financière (GAFI), un groupe interdisciplinaire composé de représentants du Ministère des affaires étrangères, du Ministère de l’intérieur, du Ministère de la justice, du Bureau du Procureur général de l’Union et du Conseil de contrôle des activités financières a préparé un projet de loi actuellement pendant devant le Congrès national qui organise « l’exécution des sanctions imposées par des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies, par ses comités des sanctions ou demandées par une autorité étrangère, et notamment le gel des avoirs et des biens des personnes et des entités [désignées dans lesdites résolutions], ainsi que la désignation sur le plan national des personnes visées par des enquêtes ou mises en examen du chef de terrorisme, de financement du terrorisme et d’agissements connexes ». Ce projet de loi tend à régler le problème de l’inadéquation du dispositif législatif et réglementaire brésilien face aux défis nouveaux posés par la nécessité d’empêcher la circulation et l’utilisation de biens appelés à faciliter la commission de crimes contre l’humanité. En outre, il met en place un mécanisme plus souple que celui que prévoit actuellement la loi no 13170/2015. Pour cela, il dispose que « les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies et les désignations effectuées par ses comités des sanctions sont immédiatement exécutoires au Brésil ».

202.La loi no 13260/2016met en œuvre l’inciso XLIII de l’article 5 de la Constitution fédérale en organisant la répression du terrorisme, en complétant ses dispositions relatives à l’enquête et à la procédure judiciaire et en reformulant le concept d’organisation terroriste. Elle confère compétence aux tribunaux fédéraux pour enquêter sur les crimes prévus par ses dispositions, de sorte que c’est devant ces tribunaux que les personnes visées par des mesures antiterroristes doivent former leurs recours.

203.La principale voie de recours ouverte aux personnes visées par des mesures antiterroristes est l’habeas corpus. Toute personne qui a eu le droit d’entrer dans le pays ou d’y séjourner peut former un recours.

204.Enfin, aucune plainte n’a été déposée contre le Brésil pour non-respect des règles internationales auxquelles doit se conformer la lutte contre le terrorisme.

Réponse au paragraphe 42 de la liste des points

205.Le Mécanisme national de prévention et de répression de la torture (MNPCT) a pour mission de prévenir et réprimer la torture par les moyens suivants : effectuer régulièrement auprès des personnes privées de liberté, sur tout le territoire national, des visite programmées selon un calendrier annuel ; rédiger des rapports circonstanciés sur les observations faites pendant ces visites ; faire des recommandations aux autorités concernées ; rédiger des notes techniques sur des questions intéressant la prévention et la répression de la torture. Le MNPCT est composé de 11 experts et expertes dont la loi fixe la durée du mandat et garantit l’autonomie, et qui peuvent exprimer en toute indépendance leurs positions et leurs opinions dans l’exercice de leurs fonctions.

206.Depuis mars 2015, une fois le MNPCT dûment installé, des directives et protocoles minimum ont été adoptés pour encadrer son action, en même temps que ses experts et expertes suivaient une période de formation intensive. Dès le début de ses activités, le MNPCT a visité 30 lieux de privation de liberté dans six États et dans le District fédéral, à savoir des établissements pénitentiaires, des unités socioéducatives et des institutions psychiatriques. Pour choisir les lieux de privation de liberté à visiter, il a établi un diagnostic conjoncturel national et repéré les États qui présentaient les indices les plus manifestes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

207.Ce diagnostic était basé sur des critères comme la diversité régionale du Brésil, les demandes du Comité national de prévention et de répression de la torture (CNPCT) reprenant des plaintes déposées par des organismes de la société civile et des organismes publics, les plaintes communiquées au centre d’appel d’urgence Disque 100 et les informations publiées par les médias. De plus, le MNCPT a tenu compte de la séparation des genres qui caractérise les lieux de privation de liberté ; il a également privilégié les États où peu de plaintes pour violations des droits humains dans des lieux de privation de liberté sont déposées, faisant de ce déficit de plaintes un critère important dans la préparation de son programme annuel de visites.

208.Comme il a été dit plus haut, le MNPCT a pour mission de visiter tout lieu, qu’il soit public ou privé, dans lequel des personnes se trouvent privées de liberté. Une enquête encore incomplète lui a permis de recenser plus de 3 000 lieux de privation de liberté sur l’ensemble du territoire brésilien, tels que des prisons, des pénitenciers, des unités socioéducatives, des centres de tri, des refuges pour enfants, des institutions de long séjour, des établissements psychiatriques, des communautés thérapeutiques, etc. Compte tenu de cette diversité, le MNPCT essaie de faire entrer dans sa programmation plusieurs types de lieux de détention.

209.Avant d’effectuer ces visites, le MNPCT planifie son programme d’activités dans les États considérés, en procédant à des consultations avec la société civile et le gouvernement, en évaluant les plaintes reçues, en adressant des lettres d’introduction aux organes exécutif, législatif et judiciaire, etc. Il effectue ainsi un travail préalable d’organisation qui vise à préparer ses activités au niveau des États.

210.Les visites que le MNPCT a effectuées entre avril 2015 et août 2016 se sont déroulées en moyenne sur cinq jours, la première journée étant consacrée à un dialogue avec la société civile locale et la dernière à des entretiens avec les organes de gouvernement de l’État considéré. De cette façon, le MNPCT pouvait d’un côté faire connaître son travail et de l’autre réfléchir à des stratégies de contrôle des lieux de privation de liberté dans cet État. Pendant les autres jours, ses membres visitaient les lieux de privation de liberté en appliquant les protocoles internationaux des droits de l’homme ainsi que les directives de l’Association pour la prévention de la torture.

211.Dans toutes leurs missions dans les États de l’Union, les membres du MNPCT nouent des liens avec le gouvernement et la société civile locale en vue de renforcer les comités et mécanismes de prévention et de répression de la torture de l’État considéré s’il en existe déjà ou d’encourager leur création s’il n’en existe pas.

212.Le MNPCT a publié trois rapports annuels, qui peuvent être consultés à l’adresse suivante :http://www.mdh.gov.br/informacao-ao-cidadao/participacaosocial/orgaos-colegiados/mnpct/mecanismonacional-de-prevencaoe-combate-a-tortura-mnpct.

213.Sur le modèle des comités de prévention et de répression de la torture existant dans les États, le Gouvernement fédéral s’efforce de mettre en place des mécanismes de prévention et répression de la torture dans les unités fédérales. Neuf mécanismes ont ainsi été créés par la loi, mais seuls ceux de Rio de Janeiro et Pernambouc sont actuellement en fonctions :

•Rondônia : Mécanisme de prévention et de répression de la torture de l’État de Rondônia (loi no 3262/2013) ;

•Maranhão : Mécanisme de prévention et de répression de la torture de l’État de Maranhão (loi no 10334/2015) ;

•Paraíba : Mécanisme de prévention et de répression de la torture de l’État de Paraíba (loi no 9413/2011) ;

•Pernambouc : Mécanisme de prévention et de répression de la torture de l’État de Pernambouc (loi no 14863/2012) ;

•Alagoas : Mécanisme de prévention et de répression de la torture de l’État d’Alagoas (loi no 7141/2009) ;

•Sergipe : Mécanisme de prévention et de répression de la torture de l’État de Sergipe (loi no 8135/2016) ;

•Rio de Janeiro : Mécanisme de prévention et de répression de la torture de l’État de Rio de Janeiro (loi no 5778/2010) ;

•Espírito Santo : Mécanisme de prévention et de répression de la torture de l’État d’Espírito Santo (loi no 10006/2013) ;

•Amapá : Mécanisme de prévention et de répression de la torture de l’État d’Amapá (loi no 2226 du 20 septembre 2017).

Réponse aux paragraphes 43 à 45 de la liste des points

214.En ce qui concerne les politiques et programmes du Brésil en matière de droits de l’homme depuis son rapport initial en 2001, l’action du Gouvernement fédéral en la matière est actuellement guidée par son troisième Programme national relatif aux droits de l’homme (PNDH‑3).

215.L’un des principaux documents de référence pour la prévention et la répression de la torture est le plan d’action intégré pour la prévention et la répression de la torture au Brésil (PAICPT 2006, révisé en 2010). Des spécialistes de différentes disciplines ont contribué à la conception du PAICPT, qui prévoit un ensemble d’activités visant à prévenir et réprimer la torture. Le PAICPT propose aux différents organes de la République et des États un ensemble d’actions intégrées en appui à leur projet de prévention et de répression de la torture.

216.Le PAIPCT est informé par des données issues d’études menées au Brésil qui montrent que la torture est un crime d’occasion ou d’opportunité (« l’occasion fait le larron »). C’est pourquoi, pour mettre fin à une certaine culture de la torture, il propose d’augmenter le risque d’être puni. Le PAIPCT recommande en conséquence les actions suivantes : amener les échelons supérieurs de la hiérarchie à faire des déclarations rappelant l’interdiction de la torture ; créer un module sur « les droits de l’homme et la torture » pour les écoles de formation des policiers et des agents pénitentiaires ; et subordonner le financement par le Gouvernement fédéral de postes de police et d’établissements pénitentiaires à l’existence des dispositifs et programmes nécessaires pour garantir les droits des personnes privées de liberté.

217.Pour engager la responsabilité des auteurs d’actes de torture, le PAIPCT propose d’instituer des organes d’inspection exprès pour l’institution policière et le système pénitentiaire et de former les personnels de santé travaillant en milieu pénitentiaire à la constatation et au traitement judiciaire des cas de torture. Du côté des victimes, il propose des mesures qui systématisent l’examen médical (exame de corpo de delito) des détenus à l’entrée et à la sortie du lieu de détention ; élargissent et améliorent les services d’accueil, de prise en charge et de protection des victimes et des témoins de violences institutionnelles ainsi que des membres de leurs familles ; permettent de réparer le préjudice subi par les victimes d’abus de pouvoir et d’usage excessif de la force par des agents publics.

218.Le PAICT fait également les recommandations suivantes :

•Réduire la surpopulation des lieux de privation de liberté et faciliter l’adoption de peines et mesures alternatives socioéducatives ;

•Veiller à ce que l’effectif des agents pénitentiaires soit approprié et favoriser l’emploi de moyens techniques comme les caméras et la surveillance électronique en général ;

•Dans les États où il n’en existe pas, créer des écoles d’administration pénitentiaire et des écoles de police qui appliquent des méthodes de recrutement, de formation et de perfectionnement des personnels basées sur les principes d’une saine administration publique axée sur la prestation de services de qualité et respectueuse des droits des citoyens ;

•Élaborer, en collaboration avec les autres acteurs de la sécurité publique, des procédures réglementaires de traitement des détenus et d’enquête sur les plaintes pour torture ;

•Engager les services de police à prendre les dispositions voulues pour que les déclarations ou les aveux d’une personne détenue ne soient recueillis qu’en présence de son avocat ;

•Éviter que des personnes légalement prises en flagrant délit ne soient détenues en garde à vue dans un commissariat de police pendant plus que les vingt-quatre heures prévues pour obtenir un mandat de détention provisoire ; éviter également que toute détention soit accomplie dans un commissariat de police, même s’il s’agit d’une détention provisoire. Mettre fin à la détention de tout suspect détenus sans mandat d’arrêt ou qui n’aurait pas été pris en flagrant délit ;

•Engager les agents publics à informer les personnes détenues de leurs droits, et plus particulièrement de leur droit d’être assistées par un avocat habilité à leur prêter conseil et assistance juridique ;

•Réserver une entrée distincte dans le registre de garde à vue pour chaque personne arrêtée, en précisant l’heure et les motifs de l’arrestation, l’identité des agents de police qui ont procédé à l’arrestation et l’heure et les motifs des éventuels transfèrements ultérieurs ;

•Encourager l’enregistrement vidéo de tous les interrogatoires, les personnes présentes y étant dûment identifiées ;

•Encourager la tenue de débats sur les restrictions imposées au dessaisissement des juridictions des États en faveur de la juridiction fédérale pour les affaires de violations des droits de l’homme ;

•Encourager, y compris auprès des services de sécurité privés, l’offre de cours et de formations diffusant des informations sur la protection et la promotion des droits des citoyens et la prévention des abus de pouvoir et de l’usage excessif de la force.

219.L’arrêté no 346 du 19 septembre 2017 du Ministère de la femme, de la famille et des droits humains (MMFDH) instituant le Pacte fédéral relatif à la prévention et à la répression de la torture a été publié au Journal officiel de l’Union. En juillet 2018, le MMFDH a organisé la troisième Réunion des comités et mécanismes nationaux de prévention et de répression de la torture, à l’issue de laquelle a été publiée la Charte de Brasilia qui formule une série de propositions basées sur une analyse des besoins et visant à renforcer le Système national de prévention et de répression de la torture. La Charte recommande expressément d’adopter des mesures visant à favoriser la mise en place de comités et de mécanismes au niveau des États.

220.De plus, la création en 2017 du Ministère des droits humains − aujourd’hui Ministère de la femme, de la famille et des droits humains − a renforcé l’institutionnalisation de cette question au sein du Gouvernement en mettant fin aux discontinuités administratives induites par plusieurs changements successifs de ministère compétent.

221.En ce qui concerne le cadre juridique de la promotion et de la protection des droits de l’homme au-delà du PNDH‑3, le présent rapport a renvoyé systématiquement, au fur et à mesure de ses réponses à la liste des points, aux lois brésiliennes concernant chacun desdits points. Le nouveau document de base commun offre une description plus large de l’ordre juridique interne brésilien relatif aux droits de l’homme.

222.La liste des affaires de droits de l’homme jugées par les tribunaux ces dernières années, dont la longueur s’explique par la nécessité d’introduire des recours en justice chaque fois que ces droits sont violés, a produit une jurisprudence importante. Dans nos réponses à la liste des points, nous avons chaque fois présenté les décisions judiciaires les plus pertinentes.