Nations Unies

CAT/C/TLS/CO/1

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

15 décembre 2017

Français

Original : anglais

Comité contre la torture

Observations finales concernant le rapport initialdu Timor‑Leste *

1.Le Comité contre la torture a examiné le rapport initial du Timor-Leste (CAT/C/TLS/1) à ses 1594e et 1597e séances (voir CAT/C/SR.1594 et 1597), les 22 et 23 novembre 2017, et a adopté les présentes observations finales à sa 1610e séance, le 4 décembre 2017.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction la soumission du rapport initial du Timor‑Leste et les informations qu’il contient. Il regrette toutefois que ce rapport ait été soumis avec onze ans de retard, ce qui l’a empêché d’analyser périodiquement la manière dont l’État partie mettait en œuvre la Convention depuis qu’il a adhéré à cet instrument, en 2003.

3.Le Comité se félicite de l’occasion qui lui a été donnée de mener un dialogue constructif avec la délégation de l’État partie et des réponses apportées aux questions et préoccupations qu’il a soulevées lors de l’examen du rapport.

B.Aspects positifs

4.Le Comité note avec satisfaction que depuis 2003, date de l’entrée en vigueur de la Convention pour l’État partie, celui-ci a ratifié les instruments internationaux ci-après, ou y a adhéré :

a)La Convention relative aux droits de l’enfant (16 avril 2003) ;

b)La Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (16 avril 2003) ;

c)La Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (16 avril 2003) ;

d)Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (16 avril 2003) ;

e)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (16 avril 2003) ;

f)Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (18 septembre 2003) ;

g)Le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort (18 septembre 2003) ;

h)La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (30 janvier 2004) ;

i)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés (2 août 2004).

5.Le Comité note également avec satisfaction les mesures législatives ci-après adoptées par l’État partie dans des domaines se rapportant à la Convention :

a)La loi no 7 de 2004 portant création du Bureau du Médiateur pour les droits de l’homme et la justice (26 mai 2004) ;

b)La loi no 2 de 2009 relative à la protection des témoins (6 mai 2009) ;

c)La loi no 7 de 2010 contre la violence domestique (3 mai 2010).

6.Le Comité salue les initiatives prises par l’État partie pour modifier ses politiques et procédures afin de renforcer la protection des droits de l’homme et de mettre en œuvre la Convention, en particulier :

a)L’adoption du deuxième plan d’action national contre la violence à l’égard des femmes (2017-2021) ;

b)L’adoption du plan d’action national pour les droits de l’enfant (2016-2020), qui prévoit de s’attaquer à la question des châtiments corporels ;

c)La création par le Ministère de la justice d’un réseau de service d’appui pénitentiaire, cadre d’échange d’informations sur la surveillance des prisons comprenant des représentants de plusieurs ministères, de l’institution nationale des droits de l’homme et d’organisations de la société civile.

7.Le Comité se félicite de la publication en 2005 du rapport final de la Commission Accueil, Vérité et Réconciliation, qui présente les résultats des enquêtes qu’elle a menées sur les violations des droits de l’homme subies par la population timoraise entre avril 1974 et octobre 1999.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Violations flagrantes des droits de l’homme, y compris torture, commises pendant l’occupation indonésienne et la période qui a suivi le référendum (1975‑1999)

8.Le Comité accueille avec satisfaction la création, en juillet 2017, du mémorial appelé Centre national Chega mais il demeure gravement préoccupé de constater que l’État partie n’a pas encore mis en œuvre un certain nombre de recommandations essentielles de la Commission Accueil, Vérité et Réconciliation et de la Commission Vérité et Amitié établie par l’Indonésie et le Timor‑Leste. À ce sujet il note avec inquiétude l’absence de tout effort concerté pour faire traduire en justice les responsables de la mort ou de la disparition d’un très grand nombre de personnes, estimé à 18 600, d’actes de torture dénoncés dans plus de 11 000 plaintes, et des violences sexuelles, notamment des viols et des cas d’esclavage sexuel, signalés dans plus de 1 000 plaintes, dont la Commission Accueil, Vérité et Réconciliation a établi la réalité. De plus le Comité estime que la décision de l’État partie, en 2014, d’expulser les juges, procureurs et autres acteurs judiciaires étrangers qui exerçaient des fonctions opérationnelles dans le système judiciaire empêche de procéder à des enquêtes diligentes sur les crimes contre l’humanité et les autres violations flagrantes des droits de l’homme qui ont été commises, d’engager des poursuites et de punir les responsables, fait obstacle aux efforts déployés par les victimes pour obtenir réparation et suscite des inquiétudes concernant l’indépendance de la magistrature dans le pays. Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas donné d’informations sur l’état d’avancement des 396 dossiers achevés par l’Équipe chargée des enquêtes sur les infractions graves et transmis au Procureur général du Timor‑Leste en juin 2013. Il regrette également que le Parlement n’ait pas adopté de texte législatif portant sur les réparations dues pour les violations des droits de l’homme commises dans le passé (art. 2 et 12 à 14).

9. Le Comité note que la délégation de l ’ État partie a exprimé l ’ opinion qu ’ il était dans l ’ intérêt national de maintenir de bonnes relations avec l ’ Indonésie et que le mode d ’ approche adopté pour ce qui est des violations du passé reflétait cette conviction. Tout en reconnaissant le contexte difficile dans lequel l ’ action de l ’ État s ’ est inscrite à ce jour le Comité rappelle que l ’ interdiction de la torture n ’ est pas susceptible de dérogation et que la Convention impose à l ’ État partie l ’ obligation de prendre des mesures pour empêcher que les responsables ne restent impunis et pour assurer réparation aux nombreuses victimes de torture vivant dans le pays. Le Comité engage l ’ État partie à :

a) Faire connaître largement du public les recommandations de la Commission Accueil, Vérité et Réconciliation et de la Commission Vérité et Amitié concernant le droit des victimes à la justice, à la vérité et à une réparation, et mettre effectivement en œuvre l ’ intégralité de ces recommandations ;

b) Prendre des mesures concrètes pour permettre que les chambres spéciales pour les infractions graves siè gent de nouveau et pour que les poursuites dans des affaires comportant des griefs de torture, y compris de violences sexuelles, et de disparition forcée, reprennent ;

c) Solliciter la coopération des autorités indonésiennes pour obtenir l ’ extradition des personnes qui ont fait l ’ objet d ’ un mandat d ’ arrestation des chambres spéciales pour des actes constitutifs notamment de crimes de torture et faire des efforts accrus pour garantir que les auteurs d ’ infractions commises dans le passé répondent de leurs actes devant la justice pénale, en particulier ceux qui ont la plus grande responsabilité dans la perpétration de ces actes ;

d) Envisager d ’ intégrer dans des archives nationales, accessibles au public, la base de données sur les victimes, les auteurs présumés et les témoins établie par l ’ Équipe spéciale chargée des infractions graves et remise aux autorités nationales en 2013 ;

e) Faire procéder rapidement à une nouvelle rédaction d ’ un projet de texte législatif visant à assurer réparation à toutes les victimes des violations des droits de l ’ homme commises dans le passé, comme l ’ a recommandé le Centre national Chega, et garantir que toutes les victimes de torture et de mauvais traitements, y compris de violences sexuelles, obtiennent une réparation comportant une indemnisation et les moyens nécessaires à leur réadaptation la plus complète possible.

Disparitions forcées

10.Le Comité constate avec préoccupation le peu de progrès accomplis dans les enquêtes sur les nombreux cas signalés de disparition forcée qui se sont produits pendant la période 1975‑1999. Il note également avec préoccupation que l’État partie n’a pas encore établi une commission spécialement chargée de rassembler des données sur toutes les disparitions forcées commises pendant toute cette période et de déterminer ce qu’il est advenu des enfants du Timor‑Leste, dont le nombre est estimé à 4 500, qui ont été emmenés de force en Indonésie pendant l’occupation, organe spécial dont la création a été recommandée par la Commission bilatérale Vérité et Amitié (art. 2, 12 à 14 et 16).

11. Le Comité engage instamment l ’ État partie à intensifier ses efforts pour déterminer le sort de tous les individus déclarés disparus entre 1975 et 1999 et le lieu où ils se trouvent. En particulier l ’ État partie devrait :

a) Prendre les mesures nécessaires pour que des enquêtes diligentes et impartiales soient menées sur tous les cas non élucidés de disparition présumée forcée, pour que, si c ’ est possible, les responsables soient traduits en justice et punis, et pour que les familles des victimes soient indemnisées ;

b) Reprendre les actions visant à déterminer, en coopération avec l ’ Indonésie, ce qu ’ il est advenu des personnes disparues, faire en sorte que les responsables répondent pénalement de leurs actes et prendre des dispositions pour organiser la restitution des restes des disparus. L ’ État partie devrait, en particulier : instituer d ’ urgence une commission sur les personnes disparues, qui soit habilitée à mettre en place une base de données et à rassembler des informations sur les personnes disparues, ventilées par sexe, âge, origine géographique, type, lieu de la disparition et, s ’ ils sont connus, date et lieu de l ’ exhumation, afin de déterminer ce qu ’ il est advenu des enfants timorais emmenés de force en Indonésie, et d ’ entreprendre de nouvelles enquêtes sur les cas non élucidés de disparition qui se sont produits avant 1999 ;

c) Envisager d ’ apporter un appui financier aux organisations de la société civile et au B ureau du Médiateur pour les droits de l ’ homme et la justice qui mènent des actions pour recenser les enfants qui ont été séparés de leurs parents, les retrouver et les rendre à leur famille au Timor ‑Leste ;

d) Étudier la possibilité de ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Impunité pour les actes de torture et les mauvais traitements

12.Le Comité note avec préoccupation que l’État partie affirme de façon répétée qu’aucun cas de torture n’a été enregistré par les autorités pendant la période couverte par le rapport. Il se déclare de nouveau préoccupé par le fait que des cas allégués de torture ou mauvais traitements imputés à des fonctionnaires de police à Atauro, Oecusse et Maliana, abondamment exposés dans les médias, n’ont pas donné lieu à des poursuites, et plus généralement par les nombreuses allégations de torture et de mauvais traitements, notamment d’usage excessif de la force, imputés à la police qui lui ont été rapportées et par le fait que, d’après les informations reçues, les forces de sécurité commettent ces exactions en toute impunité. De plus, le Comité regrette de ne pas avoir eu de renseignements montrant les résultats des enquêtes menées par l’État partie sur les nombreux cas de torture et de mauvais traitements imputés aux membres de la police et de l’armée dans le contexte d’une opération conjointe menée en 2014 et 2015 contre le Conseil révolutionnaire Maubere dans le village de Lalulai (municipalité de Bacau), au cours de laquelle un certain nombre d’habitants, dont des femmes et des enfants, auraient été arbitrairement arrêtés, frappés et menacés par les autorités qui voulaient leur faire dire où se trouvaient des membres du Conseil révolutionnaire (art. 2, 4, 12 à 14 et 16).

13. Le Comité engage instamment l ’ État partie à :

a) Faire en sorte que tous les cas et allégations de tort ure et de mauvais traitements fasse nt sans délai l ’ objet d ’ enquêtes diligentes et impartiales et que les responsables soient poursuivis et, s ’ ils sont reconnus coupables, soient condamnés à une peine à la mesure de la gravité de leurs actes, comme l ’ exige l ’ article 4 de la Convention ;

b) Suivre l ’ avancement des enquêtes relatives aux allégations récentes de torture et de mauvais traitement s imputés aux membres de la police et de l ’ armée, en particulier dans les cas mentionnés plus haut (Lalulai, Oecusse et Maliana), et faire savoir dans le prochain rapport périodique quels ont été les résultats, notamment si elles ont abouti à des poursuites et si les victimes ont obtenu réparation.

Allégations de mauvais traitements imputés à la police

14.Le Comité note avec préoccupation que des études réputées fiables, notamment des sondages de population, ont révélé que les membres de la police étaient perçus comme faisant un usage excessif de la force − seuls et dans les opérations conjointes avec l’armée − n’étant pas dignes de foi et alimentant un cercle de violence et d’impunité. De plus, d’après les renseignements reçus, il est arrivé que des fonctionnaires de haut rang aient encouragé la police à employer une force excessive contre des suspects. En outre le Comité regrette que l’État partie n’ait pas donné de renseignements sur les condamnations, s’il y en a eu, prononcées contre des fonctionnaires de police jugés pour mauvais traitements, y compris pour usage excessif de la force, pendant la période considérée, et sur les sanctions disciplinaires imposées, et n’ait pas précisé si les auteurs soupçonnés avaient été suspendus de leurs fonctions pendant tout le temps qu’a duré l’enquête sur la plainte (art. 1er à 13 et 16).

15. L ’ État partie devrait :

a) Veiller à ce que les fonctionnaires de haut rang réaffirment sans ambiguïté l ’ interdiction absolue de la torture et des mauvais traitements et annoncent publiquement que quiconque commet de tels actes, en est complice ou les autorise tacitement, sera personnellement tenu pour responsable devant la loi, fera l ’ objet de poursuites pénales et encourra des peines appropriées ;

b) Faire le nécessaire pour que des enquêtes diligentes et impartiales soient ouvertes sans délai sur toute plainte dénonçant des actes de torture ou des mauvais traitements , y compris un usage excessif de la force, imputés à des membres de la police et d ’ autres services de répression, et veiller à ce que les responsables soient traduits en justice et à ce que les victimes reçoivent une réparation adéquate ;

c) Intensifier ses efforts pour dispenser systématiquement à tous les agents de la force publique une formation sur l ’ emploi de la force, en se fondant sur les Principes de base sur le recours à la force et l ’ utilisation des armes à feu par les responsables de l ’ application des lois ;

d) Fournir à tous les membres de la police et autres agents de la force publique des uniformes portant un moyen d ’ identification visible afin de garantir la responsabilité personnelle des individus et une protection contre les actes de torture et les mauvais traitements ;

e) S ’ efforcer de recueillir systématiquement des données concernant les plaintes pour utilisation excessive de la force par les agents de la force publique déposées auprès de la police, du B ureau du Médiateur pour les droits de l ’ homme et la justice ou de tout autre organe officiel, et suivre l ’ avancement des enquêtes ouvertes, notamment pour savoir si les enquêtes ont abouti à des sanctions disciplinaires ou à des poursuites et, dans le deuxième cas, quelle en a été l ’ issue, y compris les peines prononcées ; et informer le Comité à ce sujet.

Enquêtes approfondies et impartiales ouvertes sans délai

16.Le Comité note la création, en 2014, de l’unité de police scientifique et criminelle placée sous l’autorité du Ministère de la justice mais il regrette de ne pas avoir eu de renseignements sur le travail de cette unité en ce qui concerne les enquêtes sur les allégations de torture et de mauvais traitements pendant la période considérée (art. 2, 12, 13 et 16).

17.  Le Comité engage instamment l ’ État partie à :

a) Faire en sorte que toutes les plaintes pour torture et mauvais traitements fassent sans délai l ’ objet d ’ une enquête impartiale menée par un organe indépendant, en veillant à ce qu ’ il n ’ y ait aucun lien institutionnel ou hiérarchique entre les enquêteurs de l ’ organe et les personnes soupçonnées de tels actes, et renforcer les capacités de l ’ unité de police scientifique et criminelle pour lui permettre de mener ces enquêtes ;

b) Veiller à ce que les autorités ouvrent une enquête chaque fois qu ’ il existe des motifs raisonnables de croire qu ’ un acte de torture ou des mauvais traitements ont été commis ;

c) Veiller à ce que, dans les cas d ’ allégations de torture et de mauvais traitements, les suspects soient immédiatement suspendus de leurs fonctions et le restent pendant toute la durée de l ’ enquête, en particulier s ’ ils risquent d ’ être en mesure de commettre de nouveau le même acte, d ’ exercer des représailles sur la victime ou d ’ entraver l ’ enquête ;

d) Compiler des données sur les enquêtes menées à bien par l ’ unité de police scientifique et criminelle et leurs résultats et faire figurer des renseignements à ce sujet dans le prochain rapport périodique.

Garanties juridiques fondamentales

18.Le Comité prend note des garanties procédurales énoncées à l’article 60 du Code de procédure pénale, à savoir le droit de toute personne en état d’arrestation d’être présentée à un juge dans les soixante‑douze heures, le droit d’être informée des motifs de son arrestation et de ses droits, le droit de garder le silence, d’avoir accès à un avocat indépendant, si nécessaire au titre de l’aide juridictionnelle, et le droit de prendre contact avec un proche. Il regrette toutefois l’absence de renseignements sur les mesures et les procédures qui permettent d’assurer l’application dans la pratique de ces droits et d’autres garanties afin de prévenir la torture et les mauvais traitements. À ce propos il a été signalé que fréquemment les détenus ne peuvent pas communiquer rapidement avec un avocat. Le Comité est également préoccupé par les informations selon lesquelles les postes de police ne tiennent pas de registres de détention exacts et le délai de soixante‑douze heures pour le déferrement devant un juge n’est pas respecté (art. 2).

19. L ’ État partie devrait :

a) Veiller à ce que toutes les personnes arrêtées bénéficient, en droit et dans la pratique, de toutes les garanties juridiques fondamentales protégeant contre la torture, dès le début de la privation de liberté, ce qui comprend le droit d ’ être assistées sans délai d ’ un avocat, le droit d ’ être immédiatement examinées par un médecin indépendant, indépendamment de tout examen médical qui pourrait être réalisé à la demande des autorités, le droit d ’ être informées dans une langue qu ’ elles comprennent des motifs de leur arrestation et de la nature des charges pesant contre elles, le droit d ’ être enregistrées dans le lieu de détention, le droit d ’ avertir rapidement un parent proche ou un tiers de leur situation et le droit d ’ être présentées sans délai à un juge ;

b) Veiller à ce que tous les postes de police aient un protocole d ’ action uniformisé énonçant les garanties juridiques fondamentales, et faire connaître ces règles aux fonctionnaires de police et au grand public ;

c) Faire en sorte que dans la pratique l ’ assistance gratuite d ’ un avocat soit assurée pour toutes les personnes privées de liberté, en particulier en s ’ efforçant d ’ employer des défenseurs publics dans toutes les municipalités du pays ;

d) Renforcer la surveillance indépendante des postes de police de façon à vérifier que les garanties fondamentales sont bien respectées dans la pratique, notamment en dotant le B ureau du Médiateur pour les droits de l ’ homme et la justice des ressources suffisantes pour lui permettre de se rendre sans préavis dans les postes de police, de façon régulière ;

e) Établir un registre de détention uniforme et le distribuer dans tous les postes de police, veiller à ce que les policiers consignent avec précision dans ce registre les données détaillées relatives à chaque cas de privation de liberté, et s ’ efforcer de créer un registre central ;

f) Envisager de créer un organe autonome de supervision de la police qui soit habilité à recevoir des plaintes signalant les manquements des fonctionnaires de police à l ’ obligation de respecter les garanties fondamentales dans la pratique, y compris les signalements provenant du B ureau du Médiateur pour les droits de l ’ homme et la justice, et à rendre des décisions officielles concernant les sanctions disciplinaires ;

g) Recueillir des données sur les affaires dans lesquelles des fonctionnaires de police ont été sanctionnés pour manquement à l ’ application des garanties fondamentales, et faire figurer ces données dans le prochain rapport périodique.

Définition et incrimination de la torture

20.Le Comité note avec préoccupation que les actes de torture et les mauvais traitements sont traités comme s’ils constituaient la même infraction en vertu des dispositions du Code pénal de l’État partie. En outre, la définition énoncée à l’article 167 est limitée aux actes commis directement par des personnes investies de fonctions publiques particulières, ce qui pourrait empêcher de poursuivre les fonctionnaires travaillant dans des domaines qui n’y sont pas expressément mentionnés ou d’autres personnes agissant par délégation de fonctions ou fonctionnaires qui consentent de manière expresse ou tacite à l’infliction de douleurs ou de souffrances aiguës par des tiers. Le Comité note également que la définition de la torture figurant dans le Code pénal ne s’étend pas aux douleurs et souffrances infligées aux fins de toute forme de discrimination, comme l’exige la Convention. Enfin, il constate avec préoccupation que le Code pénal ne prévoit pas de peines appropriées pour les actes de torture, car il fixe la peine minimale pour la torture à deux ans d’emprisonnement (art. 1er et 4).

21. L ’ État partie devrait mettre l ’ article 167 du Code pénal en conformité avec l ’ article  premier de la Convention et, à cet effet :

a) Définir la torture en tant qu ’ infraction spécifique qui se distingue des mauvais traitements ;

b) Veiller à ce que la définition de la torture vise tout acte de torture infligé par un agent de la fonction publique ou par toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite ;

c) Inclure expressément la discrimination sous toutes ses formes parmi les motifs sur lesquels se fonde la torture ;

d) Veiller à ce que l ’ infraction de torture soit passible de peines appropriées qui prennent en considération la gravité de l ’ acte, conformément au paragraphe 2 de l ’ article 4 de la Convention. Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son observation générale n o  2 (2007) concernant l ’ application de l ’ article 2, dans laquelle il indique que si la définition de la torture en droit interne est trop éloignée de celle énoncée dans la Convention, le vide juridique réel ou potentiel qui en découle peut ouvrir la voie à l ’ impunité (par. 9).

Allégations de torture et de mauvais traitements dans les prisons

22.Le Comité prend note des explications de la délégation concernant le recours à des « cellules de sécurité » pour accueillir les nouveaux détenus, mais il regrette que cette pratique entraîne l’application d’un régime d’isolement à tous les détenus pendant leurs premiers jours d’incarcération. Le Comité regrette que la délégation n’ait pas répondu aux préoccupations qu’il avait exprimées concernant les informations selon lesquelles tous les nouveaux détenus ne sont pas seulement soumis au régime cellulaire pendant plusieurs jours, mais subissent aussi régulièrement des passages à tabac et/ou des traitements dégradants de la part du personnel pénitentiaire à titre d’initiation (art. 2, 11 et 16).

23. L ’ État partie devrait :

a) Ouvrir une enquête indépendante sur les allégations selon lesquelles les nouveaux détenus sont régulièrement battus par le personnel pénitentiaire au cours des premiers jours suivant leur arrivée dans tous les centres de détention de l ’ État partie et veiller à ce que les allégations de torture ou de mauvais traitements révélées par cette enquête donnent lieu à des poursuites et à des condamnations, ainsi qu ’ à des sanctions disciplinaires lorsque cela se justifie ;

b) Mettre sa législation et sa pratique en conformité avec les normes internationales, en particulier les règles 43 à 46 de l ’ Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela), qui disposent, entre autres, que les pratiques telles que le placement d ’ un détenu dans une cellule obscure et les châtiments corporels sont interdits en toutes circonstances ; que l ’ isolement cellulaire ne doit être utilisé qu ’ en dernier ressort dans des cas exceptionnels, pour une durée aussi brève que possible, sous contrôle indépendant et uniquement avec l ’ autorisation d ’ une autorité compétente ; que l ’ isolement cellulaire ne doit pas être imposé du fait de la nature de la peine du détenu ; et que le recours à l ’ isolement cellulaire et à des mesures similaires à l ’ égard des femmes et des enfants est interdit ;

c) Veiller à ce que les responsables informent tous les employés de l ’ administration pénitentiaire que l ’ infliction de châtiments corporels aux détenus est assimilable à des actes de torture ou des mauvais traitements, ne sera pas tolérée et donnera lieu à des sanctions disciplinaires ou pénales contre les auteurs et les supérieurs qui ordonnent, encouragent ou tolèrent de manière expresse ou tacite de telles pratiques.

Conditions de détention

24.Comme la délégation l’a reconnu, la surpopulation est l’un des principaux problèmes du système pénitentiaire. Le Comité apprécie les efforts que l’État partie déploie pour améliorer les conditions de détention, en particulier le projet de construction d’un centre de détention pour mineurs et de deux prisons dans les municipalités de Bacau et de Manufahi, et l’installation de caméras de télévision en circuit fermé pour décourager la violence en prison. Tout en prenant note des arrangements relatifs à la séparation des différentes catégories de détenus, le Comité demeure préoccupé par les informations selon lesquelles la stricte séparation entre les mineurs et les adultes, les prévenus et les condamnés, et les femmes et les hommes, n’est pas toujours garantie. Le Comité regrette en outre que, si la délégation a indiqué que l’État partie s’employait à construire un centre de détention distinct pour les mineurs, elle n’a rien dit d’un éventuel projet de construction d’un centre de détention distinct pour les femmes (art. 11 et 16).

25. L ’ État partie devrait :

a) Remédier au surpeuplement dans les établissements pénitentiaires et autres lieux de détention, notamment en appliquant des mesures non privatives de liberté. À ce propos, le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur les Règles Nelson Mandela et sur les Règles des Nations Unies concernant le traitement des détenues et l ’ imposition de mesures non privatives de liberté aux délinquantes (Règles de Bangkok) ;

b) Garantir, en droit et dans la pratique, que la détention avant jugement ne soit pas d ’ une durée excessive ;

c) Garantir la stricte séparation des prévenus des condamnés, des mineurs des adultes et des femmes des hommes dans tous les centres de détention, s ’ employer à créer des structures de détention séparées pour les mineurs et pour les femmes, et veiller à ce que des services appropriés soient disponibles pour les membres de ces deux groupes ;

d) Continuer d ’ installer des dispositifs de vidéosurveillance dans tous les locaux de garde à vue où des détenus peuvent être présents , sauf dans les cas où cela risquerait de porter atteinte aux droits des détenus au respect de la vie privée ou à la confidentialité des échanges avec leur avocat ou un médecin. Les enregistrements devraient être conservés en lieu sûr et mis à la disposition des enquêteurs, des détenus et de leurs avocats.

Mécanisme interne de plainte dans les prisons

26.Le Comité regrette l’absence d’informations fournies par l’État partie concernant l’existence d’un mécanisme interne de plainte dans les prisons (art. 13).

27. L ’ État partie devrait :

a) Mettre en place un mécanisme de plainte pleinement indépendant auquel les personnes privées de liberté peuvent accéder de manière confidentielle et qui est habilité à enquêter sans délai, de manière impartiale et efficace, sur toutes les allégations et les plaintes concernant des actes de torture et de mauvais traitements ;

b) Garantir que les auteurs présumés d ’ actes de torture ou de mauvais traitements soient relevés de leurs fonctions immédiatement et pour toute la durée de l ’ enquête, en particulier s ’ il existe un risque qu ’ ils soient en mesure de commettre de nouveau les actes dont ils sont soupçonnés, d ’ exercer des représailles contre la victime présumée ou de faire obstruction à l ’ enquête en cas de maintien dans leurs fonctions.

Inspection des centres de détention

28.Le Comité salue la création par le Ministère de la justice du réseau de services d’appui pénitentiaire et prend note des explications de la délégation concernant les activités de surveillance des prisons menées par le Ministère de la santé, le Ministère de la justice et le Bureau du Médiateur pour les droits de l’homme et la justice. Il regrette toutefois que l’État partie n’ait pas fourni d’informations sur les mesures concrètes prises par les autorités pénitentiaires ou les procureurs en réponse aux recommandations formulées et aux plaintes pour mauvais traitements reçues par des représentants de ces ministères et d’autres organes publics.

29. L ’ État partie devrait :

a) Veiller à ce que le personnel du B ureau du Médiateur pour les droits de l ’ homme et la justice et les membres d ’ organisations non gouvernementales qui s ’ occupent des droits de l ’ homme aient accès à tous les lieux de privation de liberté, sans préavis ni autorisation, et faire en sorte que le B ureau du Médiateur pour les droits de l ’ homme et la justice dispose de ressources suffisantes pour effectuer une surveillance régulière de tous les lieux de détention et assurer le suivi des mesures que les autorités ont prises suite aux plaintes qu ’ il porte à leur attention ;

b) Assurer un suivi efficace des recommandations découlant des activités de surveillance menées dans les centres de détention, et recueillir systématiquement des données sur l ’ issue des plaintes pour mauvais traitements reçues par les personnes chargées de la surveillance, y compris sur les enquêtes menées et les procédures pénales ou disciplinaires résultant de ces plaintes ;

c) Envisager de ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Asile et non‑refoulement

30.Le Comité prend note des explications de la délégation mais demeure préoccupé par les informations selon lesquelles l’État partie aurait pu avoir eu recours à des pratiques contraires au principe de non‑refoulement au cours de la période considérée. Il est particulièrement préoccupé par le renvoi forcé en Indonésie, en juillet 2013, d’un groupe de 95 demandeurs d’asile potentiels de la minorité rohingya, du Myanmar et du Bangladesh. Le Comité prend note de l’adoption d’une nouvelle loi relative à l’immigration et à l’asile en 2017, mais il constate avec préoccupation que cette nouvelle loi maintient un délai de soixante‑douze heures pour le dépôt des demandes d’asile, et que les recours contre le rejet d’une demande d’asile n’ont pas un effet suspensif automatique.

31. L ’ État partie devrait :

a) Veiller à ce que nul ne puisse être expulsé, refoulé ou extradé vers un autre pays lorsqu ’ il existe des raisons fondées de croire qu ’ il courrait un risque personnel et prévisible d ’ y être soumis à la torture, notamment en modifiant la loi relative à l ’ immigration et à l ’ asile afin de supprimer le délai de soixante ‑douze heures pour le dépôt des demandes d ’ asile ;

b) Garantir que toutes les personnes se trouvant sur le territoire ou sous la juridiction de l ’ État partie aient effectivement accès à la procédure de détermination du statut de réfugié ;

c) Veiller à ce que des garanties de procédure contre le refoulement soient en place et à ce qu ’ un recours utile soit ouvert contre les décisions de renvoi dans le cadre des procédures d ’ expulsion, notamment à ce qu ’ un organe judiciaire indépendant puisse réexaminer ces décisions, en particulier en appel.

Violence sexuelle et sexiste contre les femmes

32.Le Comité prend note de certains progrès que l’État partie a réalisés pour sensibiliser et remédier à la violence sexuelle et sexiste envers les femmes, mais il est préoccupé par les rapports faisant état de l’existence généralisée d’une telle violence, y compris la violence familiale, à l’égard des femmes, du très faible taux de condamnation pour de telles infractions, et du manque d’assistance médicale, psychologique et juridique à la disposition des victimes. Un autre sujet de préoccupation est la réticence de l’État partie à ériger le viol conjugal et l’inceste en infractions distinctes. Le Comité regrette également l’absence d’informations dans le rapport de l’État partie sur le nombre de plaintes, d’enquêtes, de poursuites, de condamnations et de peines dans les affaires de violence sexuelle et sexiste contre les femmes au cours de la période considérée (art. 2, 12, 13 et 16).

33. L ’ État partie devrait :

a) Veiller à ce que tous les cas de violence sexuelle et sexiste contre les femmes fassent l ’ objet d ’ une enquête approfondie, à ce que les auteurs soient poursuivis et dûment sanctionnés et à ce que les victimes obtiennent réparation, sous la forme notamment d ’ une indemnisation juste et appropriée ;

b) Définir dans son Code pénal et incriminer expressément la violence familiale et le viol conjugal, en établissant les sanctions qui s ’ imposent ;

c) Veiller à ce que toutes les femmes victimes de violence sexuelle et sexiste puissent avoir accès à des centres d ’ accueil et bénéficier des soins médicaux, du soutien psychologique et de l ’ assistance juridique nécessaires ;

d) Mener des programmes de sensibilisation pour encourager les femmes à solliciter l ’ aide des autorités nationales pour les protéger contre la violence sexuelle et sexiste, et surveiller le comportement des policiers et des procureurs afin que les autorités réagissent de manière appropriée aux femmes qui demandent protection contre la violence sexuelle et sexiste et les encouragent à le faire ;

e) Former efficacement les agents des forces de l ’ ordre, les juges, les avocats et les travailleurs sociaux qui sont en contact direct avec les victimes aux questions relatives à la violence sexuelle et sexiste.

Avortement

34.Le Comité constate avec une vive préoccupation que, en vertu d’une modification du Code pénal de l’État partie faite en 2009, l’avortement constitue une infraction pénale dans tous les cas, sauf lorsque cela est nécessaire pour protéger la vie de la mère, et que le Code pénal ne prévoit aucune dérogation à cette règle lorsqu’une femme risque de subir des douleurs et des souffrances aiguës parce qu’elle a été contrainte de poursuivre une grossesse, en particulier dans les cas de viol, d’inceste ou de grave malformation du fœtus.

35. L ’ État partie devrait revoir sa législation de façon à autoriser une dérogation à l ’ interdiction de l ’ avortement dans des circonstances particulières où la poursuite de la grossesse est susceptible de causer des douleurs et souffrances aiguës, par exemple lorsque la grossesse résulte d ’ un viol ou d ’ un inceste ou en cas de malformation mortelle du fœtus, conformément à l ’ engagement pris par le Timor ‑Leste pendant l ’ Examen périodique universel en novembre 2017 (voir A/HRC/34/11/Add.1, par. 5).

Réparations

36.Le Comité note avec préoccupation l’absence d’un cadre juridique pour la fourniture d’une réparation aux victimes de torture et de mauvais traitements. En outre, il regrette que l’État partie n’ait pas fourni de renseignements sur les mesures de réparation et d’indemnisation qui ont été ordonnées par les tribunaux ou d’autres organes de l’État et dont les victimes d’actes de torture ou leur famille ont effectivement bénéficié depuis l’entrée en vigueur de la Convention dans l’État partie. Il regrette aussi que l’État partie n’ait présenté aucune information sur les programmes de réparation ou les mesures prises pour appuyer et faciliter les activités des organisations non gouvernementales visant à assurer la réadaptation des victimes de torture et de mauvais traitements (art. 14).

37. L ’ État partie devrait prendre toutes les mesures législatives et pratiques nécessaires pour que toutes les victimes de torture et de mauvais traitements obtiennent réparation, notamment un droit opposable à une indemnisation juste et appropriée et les moyens d ’ une réadaptation aussi complète que possible. Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son observation générale n o  3 (2012) relative à l ’ application de l ’ article 14 de la Convention par les États parties, dans laquelle il explique le contenu et la portée des obligations qui incombent aux États parties de fournir une réparation complète aux victimes de torture.

Aveux obtenus sous la contrainte

38.Tout en prenant note des garanties énoncées au paragraphe 4 de l’article 34 de la Constitution et au paragraphe 1 de l’article 110 du Code de procédure pénale concernant l’irrecevabilité des preuves obtenues notamment au moyen de la torture, de la contrainte ou d’atteintes à l’intégrité physique ou morale de l’individu, le Comité regrette que l’État partie n’ait pas donné d’exemples d’affaires rejetées par les tribunaux pour production de preuves ou de déclarations obtenues par la torture ou au moyen de mauvais traitements (art. 15).

39. L ’ État partie devrait prendre des mesures efficaces pour faire en sorte que, dans la pratique , les aveux obtenus sous la torture ou au moyen de mauvais traitements soient déclarés irrecevables. Il devrait également développer les programmes de formation professionnelle destinés tant aux juges qu ’ aux procureurs pour permettre à ceux-ci de détecter effectivement les actes de torture et les mauvais traitements et d ’ enquêter sur toutes les allégations faisant état de tels actes. L ’ État partie devrait aussi fournir au Comité des renseignements sur tous les cas dans lesquels des aveux auraient été jugés irrecevables au motif qu ’ ils ont été obtenus par la torture , et indiquer si des fonctionnaires ont été poursuivis et sanctionnés pour avoir extorqué de tels aveux.

Châtiments corporels

40.Tout en notant que le Ministère de l’éducation a adopté une politique de « tolérance zéro » à l’égard de la violence contre les enfants dans les structures éducatives, le Comité constate avec préoccupation que les châtiments corporels sur enfants à la maison, à l’école et dans les structures de protection de remplacement et de garderie ne sont toujours pas expressément interdits par la législation nationale et demeurent répandus (art. 2 et 16).

41. L ’ État partie devrait modifier sa législation ou adopter de nouvelles dispositions pour interdire expressément et clairement les châtiments corporels dans tous les contextes, et prendre les mesures de prévention nécessaires, notamment en faisant strictement appliquer les instructions du Ministère de l ’ éducation relatives à la discipline scolaire. Il devrait encourager des formes de discipline non violentes à la place des châtiments corporels et mener des campagnes d ’ information pour sensibiliser la population aux effets néfastes de tels châtiments.

Personnes handicapées mentales

42.Le Comité est préoccupé par le nombre limité de services psychiatriques existant dans l’État partie pour les personnes souffrant de déficiences mentales, ce qui oblige ces dernières à rester dans leur famille, ainsi que par les informations dignes de foi indiquant que de nombreuses personnes handicapées mentales sont maltraitées par des membres de leur famille ou de la communauté, notamment enfermées et maintenues de force dans des conditions dégradantes.

43. L ’ État partie devrait prendre d ’ urgence des mesures pour protéger les personnes handicapées contre les sévices et les mauvais traitements, et, à cet effet, investir davantage à titre prioritaire dans les services de santé mentale et former les policiers et autres fonctionnaires compétents à la nécessité d ’ intervenir lorsque des membres de la famille ou de la communauté se livrent à de telles pratiques. L ’ État partie devrait également envisager de ratifier la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Violence à l’égard des personnes lesbiennes, bisexuelles et transgenres

44.Tout en notant avec satisfaction que l’État partie a publiquement condamné la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre, le Comité demeure préoccupé par les informations indiquant que les personnes lesbiennes, bisexuelles et transgenres sont victimes de brutalités.

45. L ’ État partie devrait prendre des mesures efficaces pour prévenir la violence fondée sur l ’ orientation sexuelle ou l ’ identité de genre réelles ou supposées et faire en sorte que tous les actes de violence donnent lieu rapidement à des enquêtes et à des poursuites effectives et impartiales, que les auteurs de ces actes soient traduits en justice et que les victimes obtiennent réparation.

Formation

46.Le Comité prend note des programmes de formation générale sur les droits de l’homme destinés aux policiers, aux membres des forces armées et aux agents du système judiciaire, mais il reste préoccupé par l’absence de renseignements sur l’impact de la formation dispensée. Il constate également avec regret que les membres des forces de l’ordre, les juges, les procureurs, les médecins légistes et le personnel médical ne reçoivent pas de formation spécifique sur la manière de détecter et de documenter les séquelles physiques et psychologiques d’actes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (art. 10).

47. L ’ État partie devrait :

a) Développer encore les programmes de formation obligatoire de façon que tous les agents de la fonction publique, en particulier les membres des forces de l ’ ordre, le personnel militaire, les agents pénitentiaires et le personnel médical employé dans les prisons , soient familiarisés avec les dispositions de la Convention et pleinement conscients du fait que les violations ne seront pas tolérées et donneront lieu à des enquêtes et que les responsables seront poursuivis ;

b) Élaborer des programmes de formation sur les techniques d ’ enquête non coercitives et adopter une méthode pour évaluer l ’ effet des programmes de formation sur la réduction du nombre de cas de torture et de mauvais traitements et sur l ’ ouverture d ’ enquêtes et de poursuites concernant de tels actes ;

c) Veiller à ce que l ’ ensemble du personnel concerné, y compris le personnel médical, soit spécialement formé pour pouvoir détecter les cas de torture et de mauvais traitements, conformément au Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d ’ Istanbul) ;

d) Élaborer d ’ autres programmes de formation et de renforcement des capacités dans le secteur de la justice pour former les procureurs et les juges aux dispositions de la Convention et à l ’ interdiction de la torture et des mauvais traitements en droit interne.

Procédure de suivi

48. Le Comité demande à l ’ État partie de lui faire parvenir au plus tard le 6  décembre 2018 des renseignements sur la suite qu ’ il aura donnée à ses recommandations concernant : les violations des droits de l ’ homme commises dans le passé ; l ’ enquête sur les récentes allégations faisant état d ’ un usage excessif de la force et de mauvais traitements par la police et l ’ armée ; et l ’ enquête sur toutes les plaintes pour torture et mauvais traitements (voir ci-dessus par. 9 a) à d), 13 b) et 17  a)). Dans  ce contexte, l ’ État partie est invité à informer le Comité des mesures qu ’ il prévoit de prendre pour mettre en œuvre, d ’ ici à la soumission de son prochain rapport, tout ou partie des autres recommandations formulées dans les présentes observations finales.

Autres questions

49. Le Comité encourage l ’ État partie à étudier la possibilité de faire la déclaration prévue à l ’ article 22 de la Convention par laquelle il reconnaîtrait la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications émanant de particuliers relevant de sa juridiction.

50. Compte tenu des engagements pris par la délégation au cours du dialogue avec le Comité, le Comité encourage l ’ État partie à examiner la possibilité d ’ adhérer au Protocole facultatif à la Convention. Il recommande également à l ’ État partie d ’ accéder à la demande du Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants qui souhaite se rendre dans le pays .

51. L ’ État partie est invité à diffuser largement le rapport soumis au Comité ainsi que les présentes observations finales, dans les langues voulues, à tous ses organes, notamment aux autorités compétentes, ainsi qu ’ au moyen des sites Web officiels et par l ’ intermédiaire des médias et des organisations non gouvernementales.

52. Le Comité prie l ’ État partie de soumettre son prochain rapport périodique, qui sera le deuxième, le 6 décembre 2021 au plus tard. À cette fin, il invite l ’ État partie à accepter d ’ ici le 6 décembre 2018 la procédure simplifiée d ’ établissement des rapports, dans le cadre de laquelle le Comité communique à l ’ État partie une liste de points avant que celui-ci ne soumette le rapport attendu. Les réponses de l ’ État partie à cette liste constitueront alors le deuxième rapport périodique qu ’ il soumettra en application de l ’ article 19 de la Convention.