Année

Nombre de peines de mort prononcées

Nombre de peines de mort non appliquées

Période

2000

78

20

À la fin 2002

2001

103

23

À la fin 2002

2002

115

-

Aucune des peines de mort prononcées en 2002 na été appliquée à ce jour du fait que les diverses procédures judiciaires, légales et constitutionnelles préalables à son application nont pas encore été menées à leur terme

Tableau 2

Chefs d accusation au motif desquels les peines de mort (appliquées)

visées au tableau 1 ont été prononcées

Rubrique

Année

2000

2001

2002

1

Drogue

1

2

Enlèvement accompagné de viol

3

1

3

Assassinat

11

17

4

Meurtre accompagné dautres crimes

6

4

Total

20

23

10.La peine de mort ne peut être appliquée quaprès épuisement des divers recours légaux, à savoir: pourvoi en cassation, examen des contestationsformulées devant la juridiction originelle et recours en grâce auprès du Président de la République.

11.Les tribunaux ne sont pas tenus de prononcer la peine de mort. Conformément aux articles 17 et 88 bis c) du Code pénal, ils ont la possibilité de prononcer une peine moindre et le prononcé dune condamnation à mort est de plus assujetti à un certain nombre de conditions et de procédures légales et constitutionnelles, auxquelles lÉgypte a déjà fait référence dans ses précédents rapports, à savoir:

a)Les crimes, dont ceux passibles de la peine de mort, relèvent des tribunaux pénaux, composés de juges de la cour dappel et présidés par le Président de la cour dappel; ils constituent le plus haut degré de juridiction (art. 366 a) du Code de procédure pénale);

b)Étant donné que les crimes passibles de la peine de mort correspondent à des actes graves et sont considérés comme des infractions majeures en droit égyptien et étant donné que la loi prévoit que toute personne accusée davoir commis ce type dinfraction doit bénéficier dune défense gratuite, la loi impose au tribunal de désigner un avocat pour défendre laccusé aux frais de lÉtat (art. 375 et 376 du Code de procédure pénale);

c)La peine de mort ne peut être prononcée quà lunanimité, et après avis du Mufti de la République. Un recours peut être formé contre la sentence devant la Cour de cassation (art. 381 du Code de procédure pénale);

d)Le parquet doit soumettre tout arrêt de mort, qui doit être prononcé en présence de laccusé, à la Cour de cassation pour quelle vérifie que la loi a été correctement appliquée, même si la personne condamnée na pas formé de recours contre la sentence devant la Cour de cassation (art. 46 de la loi n° 57 de 1959 relative aux procédures de recours devant la Cour de cassation);

e)Le dossier contenant larrêt de mort devenu définitif doit être soumis au Président de la République – par lintermédiaire du Ministère de la justice – afin quil puisse exercer son droit de grâce ou commuer la peine à sa discrétion (art. 470 du Code de procédure pénale);

f)La peine de mort ne peut être exécutée les jours fériés officiels ou un jour de fête de la religion à laquelle appartient le condamné (art. 475 du Code de procédure pénale);

g)Lorsque la peine de mort est prononcée contre une femme enceinte, lexécution en est reportée à lexpiration dun délai de deux mois après laccouchement (art. 476 du Code de procédure pénale);

h)Aucune personne âgée de moins de 18 ans ne peut être condamnée à la peine de mort (art. 112 de la loi n° 12 de 1998 sur les mineurs);

i)Les parents du condamné peuvent lui rendre visite le jour de lapplication de la sentence et laider à sacquitter des devoirs religieux prévus par la religion à laquelle il appartient (art. 472 du Code de procédure pénale).

12.Ce qui précède montre clairement que la législation égyptienne est pleinement conforme à lensemble des dispositions de larticle 6 du Pacte, et létait au demeurant déjà avant même la ratification du Pacte par lÉgypte. Létat durgence nest pas considéré comme pouvant justifier une dérogation à ces dispositions.

13.LÉgypte a adhéré à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, dont les dispositions sont en vigueur et ont été incorporées dans lordre juridique interne du pays (loi n° 121 de 1951).

La torture et le système juridique égyptien (CCPR/CO/76/EGY, par. 13)

14.Dans les rapports périodiques quelle a soumis au Comité des droits de lhomme et au Comité contre la torture en sa qualité dÉtat partie à ces instruments, lÉgypte a fourni des explications détaillées au sujet du statut légal et constitutionnel du délit de torture dans lordre juridique égyptien et a indiqué quelles sont les autorités judiciaires compétentes pour juger ce type de crimes et quelles sont les procédures légales applicables. LÉgypte a fourni au Comité des statistiques sur les sanctions et peines infligées à des membres des forces de police par les autorités administratives ou par les tribunaux (sous forme de sanctions pénales dans ce dernier cas). LÉgypte a en outre fourni des statistiques relatives aux jugements accordant une indemnisation aux victimes.

15.Ces diverses mesures prises à lencontre de personnes reconnues coupables dactes délictueux impliquant la torture montrent le souci qua lÉgypte de réprimer les auteurs de telles infractions et dengager les procédures légales, pénales ou administratives pertinentes à leur encontre. Ce souci doit également être perçu dans le contexte de la détermination de lÉgypte à donner effet aux dispositions du Pacte et à celles de la Convention contre la torture, instrument auquel lÉgypte a adhéré sans formuler de réserves, faisant partie intégrante du droit égyptien en vertu de la Constitution égyptienne.

16.Après un bref rappel du statut juridique du délit de torture et du statut de la Convention contre la torture en Égypte, on trouvera plusieurs exemples de la manière dont cet instrument a été appliqué par les tribunaux ainsi que des statistiques relatives aux sanctions prises à lencontre des personnes reconnues coupables du délit de torture et sur les réparations accordées aux victimes.

Le statut juridique du délit de torture en Égypte

17.Le statut juridique du délit de torture en Égypte repose sur les deux grands piliers essentiels de lordre juridique égyptien, à savoir la Constitution et la loi. La Constitution égyptienne énonce des garanties visant à préserver les droits et libertés des individus et à les protéger contre toute atteinte physique ou morale. On exposera dabord les dispositions constitutionnelles relatives à ce point puis les dispositions légales en vigueur en Égypte concernant la torture.

La torture et la Constitution égyptienne

18.La Constitution égyptienne − Loi fondamentale liant le législateur − contient les dispositions ci‑après concernant la torture.

19.Tout citoyen arrêté, détenu ou dont la liberté est restreinte de quelque façon que ce soit, doit être traité dune manière sauvegardant sa dignité humaine. Il est interdit de le maltraiter physiquement ou moralement (art. 42).

20.Toute déclaration dont il est établi quelle a été faite sous la torture est nulle et non avenue (art. 42).

21.Les actions pénales ou civiles visant des infractions attentatoires aux droits et libertés garantis par la Constitution, dont le délit de torture, sont imprescriptibles (art. 57).

22.LÉtat garantit une juste réparation à toute personne qui a été victime dune telle infraction (art. 57).

23.Ces principes et prescriptions constitutionnels bénéficient dune protection judiciaire en ce que la constitutionnalité des droits est soumise à contrôle judiciaire. En vertu de la Constitution, la Cour constitutionnelle suprême est en effet investie de cette fonction et est donc chargée de veiller à ce que le législateur national respecte ces principes et prescriptions. Toute loi promulguée allant à lencontre de ces principes et prescriptions est contraire à la Constitution et donc nulle.

La torture et le Code pénal égyptien

24.La torture est érigée en infraction par le Code pénal égyptien depuis la fin du XIXe siècle. Dans le volume II du Code pénal no 57 de 1937 en vigueur figure un chapitre spécial consacré aux mesures coercitives et aux mauvais traitements infligés à des personnes par des fonctionnaires et les actes de torture sont qualifiés de délits dans les termes suivants aux articles126 et282 du Code pénal.

Article 126 du Code pénal

25.Tout fonctionnaire ou haut responsable qui donne lordre de torturer un accusé, ou participe à linfraction, afin de lui arracher des aveux, est passible de 3 à 10 ans de travaux forcés et de détention. Si la victime décède, la peine est celle prévue pour lhomicide volontaire.

Article 282, paragraphe 2, du Code pénal

26.Dans tous les cas, quiconque arrête illégalement une personne et menace de la tuer ou de la torturer physiquement sexpose à une peine de travaux forcés.

27.Les dispositions générales du Code pénal qui portent sur les tentatives dinfraction punissables en vertu des articles 45 et 46 sappliquent à ces infractions ainsi quà toutes les formes de participation telles quelles sont décrites à larticle 40 du Code pénal, à savoir linstigation, le consentement ou la complicité. Selon larticle 41 du Code pénal, les complices sont punis de la même peine que lauteur principal. Lacquiescement à un acte de torture est puni comme sil sagissait dun ordre de commettre un acte de torture.

28.De la même façon, un ordre donné par un supérieur ne légitime pas la torture et ne peut être invoqué pour justifier celle-ci, comme le stipule larticle 63 du Code pénal, puisque lacte auquel sapplique lordre, à savoir la torture, est considéré comme une infraction.

29.Lapplication par la justice des dispositions pénales mentionnées a donné lieu à létablissement dun certain nombre de principes juridiques qui sont passés dans lusage conformément à la jurisprudence de la Cour suprême.

30.Les paragraphes 2 et 3 de larticle 2 de la Convention contre la torture indiquent quaucune circonstance exceptionnelle, y compris létat dexception, ni lordre dun supérieur ne peut être invoqué pour justifier la torture. En outre, conformément à larticle 15 de la Convention, toute déclaration dont il est établi quelle a été obtenue par la torture ne peut être invoquée comme un élément de preuve dans une procédure. La position du législateur égyptien concernant ces trois points est exposée ci‑après.

Torture, circonstances exceptionnelles et état d urgence

31.Larticle 148 de la Constitution permanente de lÉgypte, promulguée en 1971, traite de la question des circonstances exceptionnelles et de létat durgence. Le législateur égyptien a adopté un arsenal législatif destiné à encadrer linstauration de létat durgence, la Constitution disposant que la déclaration de létat durgence doit seffectuer par voie de décret du Président de la République.

32.La loi no 162 de 1958 sur létat durgence définit les conditions dans lesquelles létat durgence est proclamé et les mesures à prendre en cas de danger public exceptionnel. Aucune disposition de cette loi nest susceptible dêtre invoquée pour justifier la suspension des dispositions du Code pénal relatif aux délits que sont la torture, lemprisonnement arbitraire et le recours à des traitements cruels, pour accorder à une quelconque partie le droit de se comporter de manière dérogatoire aux dispositions du Code pénal ou pour autoriser des actes qualifiés dinfraction pénale dans le Code. Par conséquent, le crime de torture et autres crimes sont poursuivables même en période détat durgence et ne sauraient donc servir de prétexte à la commission dacte de torture.

33.Quiconque est arrêté en vertu des dispositions de la loi sur létat durgence doit être détenu dans un lieu légal de détention. Les personnes arrêtées bénéficient du même traitement que les personnes placées en détention provisoire et jouissent de tous les droits garantis aux prisonniers. Nul ne peut les maltraiter et leur détention est sujette à un réexamen régulier tous les 30 jours sur requête de lintéressé adressée à la juridiction compétente. Au regard de la loi, les actes de torture ou les mauvais traitements de même que la détention dindividus dans un lieu autre quun établissement légalement approuvé constituent donc des infractions pénales.

34.Il convient de signaler à ce propos que les dispositions de la Convention contre la torture relative à ces points ont acquis force de loi en Égypte étant donné quen application de larticle 151 de la Constitution, lintégralité de la Convention a acquis force de loi à sa promulgation. Toute personne peut se prévaloir de ses dispositions devant tous les types de juridiction et toute décision de justice contraire aux dispositions de la loi peut être contestée à ce motif.

Invocation de l ordre d un supérieur pour justifier la torture

35.Aux termes du paragraphe 3 de larticle 2 de la Convention, lordre dun supérieur ou dune autorité publique ne peut être invoqué pour justifier la torture. Larticle 63 du Code de procédure pénale égyptien dispose quil ny a pas infraction lorsquun agent de lÉtat commet un acte sur ordre dun supérieur auquel il est tenu dobéir ou lorsquil commet un acte de bonne foi en exécution dun ordre donné en application de la loi ou en croyant que cet acte relève de sa compétence. Conformément audit article, il doit dans tous les cas prouver quil a commis cet acte après avoir examiné la situation de près et sêtre renseigné à son sujet. Il doit prouver aussi quil avait des motifs raisonnables de penser agir en toute légitimité.

36.La torture étant un délit punissable selon la loi égyptienne et lignorance de la loi ne pouvant être invoquée comme justification, conformément à ce qui précède, en aucune circonstance le fait davoir agi sur ordre dun supérieur ne peut être invoqué pour justifier des actes de torture, le recours à la force ou dautres actes qualifiés dinfractions.

37.Le législateur égyptien traite donc spécifiquement de la torture telle quelle est visée à larticle 126 du Code pénal, qui dispose quun acte de torture commis sur ordre dun fonctionnaire ou par un fonctionnaire constitue une infraction pénale. Étant donné que lacquiescement à un acte de torture est considéré comme un ordre de commettre cet acte, selon la loi égyptienne, toute personne qui donne lordre de torturer ou qui torture parce quon lui en a donné lordre commettent toutes deux un acte de torture considéré comme une infraction selon le Code pénal et se voient appliquer les peines prévues par le Code pénal en la matière.

38.À ce propos, la Cour de cassation a estimé ce qui suit:

a)En vertu dun principe établi, un subordonné ne doit pas obéir à lordre donné par son supérieur de commettre un acte dont il sait quil est punissable par la loi. En aucune circonstance lobéissance due à un officier supérieur ne doit conduire à commettre des infractions (Appel no936 de la seizième année judiciaire, audience du 13 mai 1946; Appel no 1913 de la trentehuitième année judiciaire, audience du 6 janvier 1969, registre 20, sect.6, p.24; Appel no 869 de la quarantequatrième année judiciaire, audience du 4 novembre 1974, registre 25, sect.163, p.756);

b)Les personnes qui ne sont pas des fonctionnaires ne tombent pas sous le coup des dispositions de larticle 63 du Code pénal sappliquant aux fonctionnaires, même si le type de rapport quelles ont avec la personne qui leur donnent un ordre exige quelles lui obéissent (Appel no 13 de la trentedeuxième année judiciaire, audience du 21 janvier 1973, registre 24, sect18, p.78 et Appel no 742 de la quaranteneuvième année judiciaire, audience du 22novembre 1979, registre 30, sect.176, p.821).

Irrecevabilité des déclarations faites sous la torture

39.Le principe dirrecevabilité des déclarations faites sous la torture est énoncé à larticle 15 de la Convention contre la torture et à larticle 42 de la Constitution égyptienne. Pareillement, la Cour suprême a estimé que les aveux arrachés sous la torture ou la contrainte devaient être considérés comme nuls et non avenus, même si la véracité de ces aveux est établie.

40.Dans le cadre de son important dialogue avec lÉgypte à loccasion de lexamen des rapports périodiques quelle lui soumet, le Comité contre la torture, après avoir pris acte des informations sur le statut juridique de la torture en Égypte et le degré auquel les dispositions du droit égyptien sont compatibles avec les dispositions de la Convention, a rendu hommage à lÉgypte pour sa position légale et judiciaire en la matière.

Quelques règles et principes dégagés par la Cour de cassation

concernant le délit de torture

41.Cette section présente un certain nombre de principes relatifs au délit de torture que la Cour de cassation a dégagés et que les juridictions de tous les degrés sont tenus dappliquer lorsquelles connaissent daffaires de torture.

Le délit de torture au sens de l article 126 du Code pénal

42.La loi ne donne pas de définition de lexpression torture physique et ne fixe pas de seuil de gravité a priori; ce point est laissé à lappréciation de la juridiction du jugement qui se détermine en fonction des circonstances de laffaire (Appel no 1314 de la quatre‑vingt‑seizième année judiciaire, audience du 28 janvier 1966, registre 17, p. 1161).

43.En application des dispositions du paragraphe 1 de larticle 126 du Code pénal, peut être poursuivie toute personne suspectée sur la base dindications solides davoir commis dans le cadre dune enquête les faits délictueux incriminés, ce même si des enquêteurs poursuivent leurs investigations concernant linfraction faisant lobjet de lenquête et la recherche de ses auteurs et sont en train de recueillir des éléments de preuve essentiels pour ladite enquête et la procédure en application des articles 21 et 19 du Code de procédure pénale. Aucune disposition nempêche de poursuivre une telle personne en application de larticle 126 du Code pénal pour avoir torturé un accusé en vue de lui arracher des aveux, quelle que soit la motivation de cet acte. Il ny a aucune raison détablir de distinction entre les déclarations de laccusé telles quelles figurent dans le rapport denquête établi par lautorité investigatrice et les déclarations figurant dans le dossier des pièces à conviction, étant donné que le juge pénal nest nullement lié par un type de preuves et a toute latitude pour dégager des éléments de preuve − sil les estime probants − en recourant à toutes les sources dans le cadre de la procédure. Il est également impossible daffirmer que le législateur entendait protéger un certain type daveux, étant donné que rien nest singularisé et que ce serait incompatible avec la disposition en question (Appel n° 1314 de la quatre‑vingt‑seizième année judiciaire, audience du 28 janvier 1996, registre 17, p. 1161).

44.Si la torture est avérée, les déclarations faites par les témoins et personnes interrogées soumises à la torture ne sont pas recevables. Même si elles sont exactes et compatibles avec les faits, ces déclarations ne peuvent être utilisées dès lors quelles ont été obtenues par la torture ou la contrainte − quel quen soit le degré de gravité. Sil ny a pas eu torture, les déclarations sont recevables (Appel no 1275 de latrente‑neuvièmeannée judiciaire, audience du 13 octobre 1969, registre 20, p. 1056).

45.Il est établi quen aucune circonstance lobéissance à un supérieur ne sétend à la commission dinfractions et quun subordonné ne doit pas obéir à lordre donné par son supérieur de commettre un acte dont il sait quil est punissable. En conséquence, si lappelant invoque pour se défendre la force des circonstances, en faisant valoir quil a commis lacte sur ordre de son supérieur, le jugement contesté en appel ne peut être considéré comme vicié dans son application de la loi (Appel no 6533, vingt‑cinquième année judiciaire, audience du 24 mars 1983, registre 34, p. 432).

46.Pour être pris en considération, un aveu doit avoir été fait librement et volontairement; dès lors, un aveu, même avéré, résultant de lusage de quelque forme que ce soit de contrainte ou de menace, nest pas fiable. Une promesse ou une incitation est comparable à la contrainte et à la menace en ce quelle affecte la liberté du suspect dopter pour la dénégation ou laveu et lamène à croire quen passant aux aveux il obtiendra un avantage ou évitera dêtre maltraité. En conséquence, lorsque lon a fait valoir devant le tribunal que les aveux du premier et du cinquième des défendeurs reconnus coupables avaient été obtenus en recourant à la contrainte physique – le cinquième défendeur reconnu coupable ayant été soumis à la torture et les deux à la contrainte morale sous forme de menace, de promesse et dincitation – le tribunal aurait dû diligenter une enquête pour déterminer la véracité de ces affirmations de la défense en vue détudier le lien entre la contrainte, les raisons layant motivée et ses répercussions sur les dépositions des deux personnes en question. Or le tribunal ne la pas fait, se contentant daffirmer que puisque le procureur navait trouvé aucun signe de torture sur lun ou lautre des deux défendeurs ils ne pouvaient avoir fait lobjet de contrainte. Toutefois, le fait que le procureur na pas décelé de tels signes sur les deux défendeurs nexclut pas en soi la possibilité que le cinquième défendeur reconnu coupable ait porté des marques résultant de la torture, de coups ou de la contrainte. Aucun lien ferme na toutefois été établi entre la menace, la promesse et lincitation et leurs aveux − sur lesquels le tribunal sest fondé. Le jugement du tribunal était donc vicié en raison des carences des éléments de preuve et des faits de négligence (Appel no 951 de la trente‑cinquièmeannée judiciaire, audience du 2 juin 1983, registre 34, p. 730).

47.La loi égyptienne ne précise pas le degré de gravité ou dintensité de la douleur ou de la souffrance au‑dessus duquel est constitué le délit de torture ni nindique que la torture doit laisser des traces. En conséquence, le délit de torture est constitué aussi légère quait été la douleur et quelle ait ou non laissé des traces (Arrêt de la Cour de cassation, audience du 5 novembre 1986).

48.Il suffit que la personne accusée se soit livrée à des actes de torture en vue de susciter des aveux − même si ces aveux nont pas été obtenus − pour que les dispositions de larticle 126 du Code pénal sappliquent (Arrêt de la Cour de cassation, audience du 28 novembre 1966).

49.Le délit de torture tel que visé à larticle 126 du Code pénal ne suppose pas que le tortionnaire ait compétence pour rechercher des preuves ou mener une enquête en rapport avec linfraction imputée à laccusé soumis à la torture. En fait, il suffit que lagent de lÉtat en cause soit, de par ses fonctions, investi dune autorité le mettant en position de torturer un accusé en vue de lui arracher des aveux (Arrêt de la Cour de cassation, audience du 8 mars 1995).

50.En matière de torture, lintention criminelle existe dès lors quun agent de lÉtat torture délibérément un suspect afin de linciter à passer aux aveux, quelle que soit la motivation de cet agent (Arrêt de la Cour de cassation, audience du 8 mars 1995).

Le délit de cruauté au regard de l’article  1 29 du Code pénal

51.Il y a délit de cruauté selon les termes de l’article 129 du Code pénal lorsqu’un agent de l’État se livre, en se servant de sa position, à un acte de cruauté qui porte atteinte à la dignité d’une personne ou lui cause des souffrances physiques. Il n’est pas nécessaire que l’auteur de cet acte ait agi dans l’exercice de ses fonctions ou que l’acte en question atteigne un certain degré de gravité, s’il est établi lors du procès que l’auteur de l’acte est un membre de la police qui s’est servi de sa position pour agresser et blesser la victime. Le fait que la décision du tribunal ne précise pas si l’auteur de l’acte agissait dans le cadre de ses fonctions, qu’il ne mentionne pas le nom de la victime ou qu’il ne fournisse aucun détail sur l’agression ne constitue pas un motif suffisant pour casser le jugement (audience du 20 mars 1944, appel no 374, quatorzième année judiciaire).

52.Commet une infraction passible de sanctions en vertu de l’article 129 du Code pénal tout agent de l’État qui se sert de sa position pour commettre des actes de cruauté. S’il y a voies de fait, l’infraction tombe également sous le coup de l’article 242 et d’autres articles du Code pénal qui interdisent les coups ou blessures infligés volontairement. Selon le paragraphe 1 de l’article 32 du Code pénal, si les deux actes (cruauté et voies de fait) constituent une seule et même infraction, l’accusé n’est passible que d’une seule peine, celle qui est prévue pour l’infraction la plus grave. La peine prescrite à l’article 241 du Code pénal pour les coups et blessures rendant une personne incapable de mener une vie normale pendant plus de 20 jours est plus sévère que celle qui est prévue à l’article 129 du Code pénal. Il n’est donc pas abusif de punir l’accusé (qui était un chef de village dans le cas d’espèce) en lui appliquant les dispositions de l’article 242 s’il est établi que les coups et blessures infligés ont atteint un tel degré de gravité (audience du 12 novembre 1945, appel no 1466, quinzième année judiciaire).

53.S’agissant du délit de cruauté, l’élément déterminant dans l’infraction visée à l’article 129 du Code pénal est l’existence d’un acte matériel de nature à causer à la victime des souffrances physiques quelle qu’en soit la sévérité même s’il n’y a aucune lésion apparente. Sont donc compris dans l’infraction les voies de fait et les traumatismes mineurs (audience du 14 avril 1952, appel no 264, vingt‑deuxième année judiciaire).

54.Les principaux éléments permettant de conclure qu’il y a acte de cruauté, selon les termes de l’article 129 du Code pénal, sont réunis lorsqu’il est prouvé que l’accusé a agressé la victime en se servant de l’autorité que lui confère sa position. Il n’est pas nécessaire de mentionner les blessures causées à la victime (audience du 16 novembre 1954, appel no 1022, vingt‑quatrième année judiciaire).

55.La Cour de cassation a statué que les dispositions de l’article 129 du Code pénal visaient uniquement l’usage de la violence dans des conditions autres que l’arrestation d’une personne et son placement en détention. Cet article figure dans la même section du Code que les articles relatifs à la contrainte exercée sur des personnes ou les mauvais traitements qui leur sont infligés par des agents de l’État (vol. II, chap. VI, crimes et délits portant atteinte à l’intérêt public). Quant aux articles 280 et 282 du Code pénal, ils figurent dans la même section du Code que les articles ayant trait aux délits d’arrestation et de détention illégales de personnes (vol. III, chap. V, crimes et délits d’atteinte aux personnes). Cette distinction dénote la prise en compte par le législateur égyptien du fait que l’atteinte à la liberté individuelle en cas d’arrestation, d’emprisonnement ou de détention est une infraction commise par un agent de l’État (audience du 8 décembre 1964, registre 15, p. 805, appel no 1286, trente‑quatrième année judiciaire).

56.Le délit de torture visé à l’article 126 du Code pénal ne présuppose pas que celui qui le commet doit être une personne habilitée à rechercher des preuves ou à mener une enquête sur l’infraction en cause. Il suffit que l’agent de l’État concerné ait le pouvoir, de par ses fonctions publiques, de torturer l’accusé en vue de lui arracher des aveux. L’intention criminelle existe si l’agent de l’État concerné, quels que soient les motifs qui l’animent, torture délibérément l’accusé en vue de le contraindre à faire des aveux.

57.S’il est prouvé qu’il y avait entente entre les auteurs présumés de l’acte, compte tenu des liens existant entre eux, ainsi que du fait que l’infraction a été commise pour un motif commun, qu’ils étaient d’accord sur la façon de le commettre, que chacun d’eux attendait de l’autre qu’il exécute l’acte incriminé et que le droit violé de la victime est un seul et même droit, lesdits auteurs présumés seront considérés comme les auteurs effectifs des actes de torture infligés à la victime pour lui arracher des aveux et assumeront la même responsabilité, indépendamment de la question de savoir qui d’entre eux a porté les coups ayant causé la mort (appel no 5732, soixante‑troisième année judiciaire).

58.Notre description du système juridique égyptien et des modalités d’application de la législation relative à la torture devrait permettre au Comité de se rendre pleinement compte que l’Égypte est fermement déterminée à appliquer d’une manière effective les instruments auxquels elle est partie et qu’elle n’épargne aucun effort pour honorer les obligations découlant de ces instruments, en poursuivant un dialogue constructif avec les mécanismes chargés de surveiller l’application des instruments relatifs aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales.

Données statistiques sur les sanctions et peines imposées aux membres de la police reconnus coupables de torture et sur les décisions judiciaires portant indemnisation des victimes

59.Les statistiques fournies ci‑après permettent de faire le point sur les procédures judiciaires en cours et celles qui ont permis de prouver la culpabilité de personnes accusées d’actes de torture et de cruauté. Dans le tableau A sont passées en revue les affaires dans lesquelles l’enquête a débouché sur des sanctions administratives, des décisions judiciaires ou des mesures disciplinaires. Dans le tableau B sont énumérées les affaires soumises au parquet et celles dans lesquelles aucune décision judiciaire définitive n’a été rendue. Quant au tableau C, il fait le point sur les décisions judiciaires définitives portant sur l’octroi d’une indemnisation à des personnes victimes d’actes de torture.

T ableau A

Torture et mauvais traitements, 1998 ‑2002

Année

Fonctionnaires ayant fait l’objet de poursuites pénales

Fonctionnaires traduits devant un conseil de discipline

Fonctionnaires ayant fait l’objet d’une sanction administrative

Total

1998

2 non‑lieux

2 rétrogradations

12 rétrogradations

16

1999

3 peines de prison

3 rétrogradations

6 rétrogradations

26

5 peines de prison avec sursis

1 mise à pied

6 avertissements

2 non‑lieux

2000

2 peines de prison

6 rétrogradations

19 rétrogradations

53

1 peine de prison avec sursis

6 mises à pied

7 avertissements

4 non‑lieux

6 procès en cours

2 procès en cours

2001

1 peine de prison

20 rétrogradations

89 rétrogradations

180

1 non‑lieu

1 mise à pied

27 avertissements

5 procès en cours

20 procès en cours

1 peine de prison avec sursis

15 non‑lieux

2002

4 peines de prison

43 procès en cours

59 rétrogradations

126

1 non‑lieu

15 avertissements

4 procès en cours

Tableau B

Fonctionnaires déférés devant le parquet dans le cadre de poursuites pour actes de torture, de cruauté ou mauvais traitements (1 er septembre 1999−31 janvier 2003)

Numéro de dossier

Actes incriminés

Décision

1

Centre de Qanatir al‑Khayriya , a ffaire pénale no 26026/2001

Voies de fait et détention illégale

Fonctionnaire condamné à trois ans d’emprisonnement et à payer des dommages (audience du 16 décembre 2002)

2

Tanta II, a ffaire correctionnelle no 8738/2003

Voies de fait

Procès en cours

3

Khanika, a ffaire correctionnelle no 18767/2001

Emploi de la force par un agent de l’État

Procès en cours

4

Centre de Dasouq, affaire administrative no 18755/2001

Voies de fait

Fonctionnaire déféré devant un tribunal pénal

5

Tanta I, affaire correctionnelle no 20875/2002

Voies de fait

En cours d’investigation

6

Awsim, affaire correctionnelle no 3991/2001

Voies de fait

En cours d’investigation

7

Minya, affaire administrative no 1021/2003

Voies de fait

En cours d’investigation

8

Qouwainsa, affaire correctionnelle no 15343/2002

Voies de fait

En cours d’investigation

9

Centre de Sanwars, affaire administrative no 5036/2002

Emploi de la force

En cours d’investigation

10

Athmoun, affaire administrative no 9749/2002

Emploi de la force

En cours d’investigation

11

Kafar al‑Dawar, affaire no 5054/2003

Voies de fait et détention illégale

En cours d’investigation

12

Centre de Wasta, affaire administrative no 4346/2003

Voies de fait

En cours d’investigation

13

Centre de Fayoum, affaire correctionnelle no 9200/2002

Voies de fait

Pas de décision

14

Poste de police de Bani Abid, affaire no 340/2003

Voies de fait

Pas de décision

15

Abin, affaire no 470/2003

Voies de fait

Pas de décision

16

Bab al‑Sha’bah, affaire administrative no 1359/2001

Voies de fait

En cours d’investigation

17

Isma’iliya III, affaire administrative no 1725/2002

Coups et blessures ayant causé une incapacité permanente

Pas de décision

18

Centre d’Adouwah, affaire correctionnelle no 4302/2001

Torture

En cours d’investigation

Tableau C

Décisions judiciaires en dernier ressort portant sur l’octroi d’une indemnisation aux victimes (1998-2002)

Année

Nombre de décisions d’indemnisation prononcées et exécutées

1997

2

1998

4

1999

8

2000

3

2002

2

(jusqu’au 1er septembre)

6 affaires encore en instance en 2001

3 affaires encore en instance en 2002

60.Il ressort de ce qui précède que, conformément aux dispositions de la Constitution et de la législation nationale concernant le délit de torture et dans le cadre des principes régissant ce délit consacrés par le système judiciaire égyptien, le législateur national a prévu des garanties fondamentales pour protéger les personnes contre la torture. Il a veillé à ce que soit assuré aux victimes le droit d’obtenir que les auteurs de ce type d’infraction soient punis et de demander réparation pour le préjudice subi. L’État assure à chacun ce droit conformément à la Constitution quel que soit le temps écoulé depuis que l’infraction a été commise.

61. Les statistiques fournies ci‑dessus rendent compte des sanctions et des peines imposées aux personnes qui se sont rendues coupables d’actes de torture ainsi que des indemnisations accordées aux victimes par le biais de décisions judiciaires. Les infractions en cause correspondent généralement à des abus individuels commis par certains membres de la police, phénomène dont aucune société n’est exempte. Ces violations imputables à une minorité de policiers ne sauraient être qualifiées de comportement systématique, eu égard à l’existence d’un système juridique intégré doté de moyens indépendants et équitables de demander réparation, d’obtenir que les coupables soient traduits en justice et de réclamer un dédommagement, une telle qualification ne pouvant être conciliée avec l’existence d’un vaste éventail de garanties juridiques et de procédure appliquées par l’autorité judiciaire, dont l’indépendance et l’impartialité dans l’exercice de ses fonctions sont pleinement garanties par la Constitution et la loi et dont les décisions sont opposables à tous les pouvoirs publics.

62.En outre, l’Égypte coopère avec le Programme des Nations Unies pour le développement dans le cadre d’un projet pour le renforcement des institutions visant à dispenser une formation aux droits de l’homme, au personnel du pouvoir judiciaire, du parquet, de la police et des prisons ainsi qu’aux journalistes et aux personnes travaillant dans le secteur de l’édition, l’objectif étant de les sensibiliser davantage aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, aux obligations incombant aux pays en vertu de ces instruments et aux normes devant être respecté e s dans la pratique. Cette coopération traduit la volonté de l’État d’assurer une éducation en matière de droits de l’homme à tous ceux qui travaillent dans le domaine de l’administration de la justice pénale afin de faire en sorte que la pratique soit pleinement conforme aux dispositions de la Constitution et à la législation nationale et de prévenir tout abus pouvant être commis par des individus.

Définition du terrorisme (CCPR/CO/76/EGY, par . 16)

Définition

63.Par suite des nombreux actes de terrorisme commis en Égypte après l’assassinat de l’ancien Président Anouar al‑Sadate par des groupements terroristes qui prenaient pour cible les symboles de l’État et les dirigeants ainsi que la population civile et les touristes étrangers et eu égard à l’ampleur prise par ce phénomène et à la nécessité d’intensifier les efforts pour y faire face dans le respect de la légitimité constitutionnelle et des lois, l’Égypte a proclamé l’état d’urgence et a adopté des mesures constitutionnelles et législatives pour combattre ce fléau. C’est ainsi qu’a été adoptée la loi no 97 de 1992 qui a modifié le Code pénal, instituant des peines plus sévères pour certaines infractions lorsqu’elles sont commises à des fins terroristes. Cet amendement visait à mettre un terme aux crimes aveugles de ce type commis contre des innocents, y compris des enfants, des femmes et des personnes âgées. À cet effet, le législateur a dû définir le terrorisme afin de délimiter les actes criminels pour lesquels des peines plus sévères seraient imposées. Par le biais de la loi susmentionnée, a été ajouté au Code pénal un nouvel article (l’article 86) qui se lit comme suit:

«Aux fins de l’application des dispositions du présent C ode, le terrorisme s’entend de tout usage de la force et de la violence, de la menace ou de l’intimidation pour exécuter un plan criminel individuel ou collectif visant à troubler l’ordre public ou à mettre en danger la sécurité et la sûreté publiques en portant préjudice à des personnes ou en les terrorisant, en mettant en danger leur vie, leur liberté ou leur sécurité, en causant des dégâts à l’environnement, en portant atteinte aux communications, aux moyens de transport, aux ressources, aux bâtiments ou aux biens publics ou privés ou en en prenant possession, en empêchant ou en entravant le fonctionnement des services publics, des lieux de culte ou des établissements d’enseignement, ou en rendant la Constitution ou les lois et les règlements inopérants.».

64.Le législateur a rédigé les textes contenant les définitions dans des termes juridiques sans entrer dans les détails subjectifs qu’il serait impossible de mentionner intégralement dans une loi. Ces détails sont laissés à la discrétion de ceux qui prennent les décisions requises tout au long de la procédure pénale et durant le procès, si l’affaire est renvoyée devant un tribunal aux fins d’appliquer et d’interpréter les dispositions en question à la lumière des faits de la cause.

65.La définition exposée ci‑dessus a été adoptée en vue d’alourdir les peines prévues dans le Code pénal pour certaines infractions, notamment celles qui sont commises à des fins terroristes ou lorsque le terrorisme est le moyen utilisé pour parvenir aux objectifs visés à travers l’infraction.

66.À cet égard, l’article 86 bis du Code pénal punit d’emprisonnement quiconque crée une association, un organe, une organisation, un groupe ou une bande en vue de porter atteinte aux dispositions de la Constitution ou d’empêcher le fonctionnement des institutions de l’État ou des autorités publiques ou d’empiéter sur la liberté personnelle des citoyens ou d’autres droits et libertés publics garantis par la Constitution ou de saper l’unité nationale et la paix sociale. La peine prévue pour cette infraction est plus lourde si le terrorisme figure parmi les moyens utilisés par l’entité concernée pour atteindre ses objectifs.

67.Il ressort de ce qui précède que les dispositions de l’article 86 du Code pénal ne portent pas sur un simple acte criminel mais sur la définition du terrorisme en tant que facteur aggravant pris en compte lorsqu’il s’agit de déterminer la peine. Les peines prévues à l’encontre des organisations terroristes sont énumérées à l’article 86 bis du Code pénal.

68.La constitutionnalité de l’article 86 bis du Code pénal a été contestée devant un tribunal administratif (affaire no 10458, cinquante‑cinquième année judiciaire) qui a renvoyé l’affaire à la Cour constitutionnelle (affaire no 330, vingt‑quatrième année judiciaire). La décision dans cette affaire a été ajournée en attendant qu’une commission mandatée par la Cour présente son rapport. À ce jour, aucune décision n’a été prise en la matière.

69.Afin d’alourdir les peines prévues en cas d’infraction terroriste, le législateur a institué la peine de mort ou de réclusion à perpétuité pour les crimes terroristes les plus graves tels que le fait de diriger ou de financer des bandes ou des groupements terroristes (art. 86 bis, par. a) du Code pénal). Les mêmes peines sont prévues pour d’autres crimes terroristes entraînant la mort de la victime (art. 86 bis, par. b) du Code pénal). Dans de tels cas, la peine est la même que celle qui est prévue par le Code pénal en cas de meurtre avec préméditation. En conséquence , aucun changement n’est intervenu en ce qui concerne la peine capitale.

70.Cela étant, sachant que se sont les crimes les plus graves et les plus abominables dont pâtit le monde entier et qui causent d’une manière aveugle d’énormes préjudices à la société et à des personnes innocentes, y compris des femmes et des enfants qui sont passibles de la peine de mort, le fait d’infliger une telle peine n’est pas incompatible avec l’objet de l’article 6 du Pacte.

Tribunaux de la sûreté de l’État (d’exception)

71.Compte tenu des circonstances exceptionnelles qui ont rendu nécessaire la proclamation d’un état d’urgence et étant donné qu’il s’agit, comme le prévoient la Constitution et la législation, d’un régime temporaire qui implique l’adoption de mesures spéciales pour régler rapidement les problèmes à l’origine de la situation et assurer le retour de la société à la normale, la loi no 126 de 1958 sur l’état d’urgence prévoit la mise en place de tribunaux de sûreté de l’État (d’exception) habilités à connaître de certaines infractions tombant sous le coup du Code pénal, notamment les actes terroristes. Ces tribunaux respectent toutes les garanties fondamentales d’une procédure judiciaire, se composent de juges ordinaires et appliquent, pour ce qui est de la conduite des débats, du prononcé des décisions et de l’exécution des peines, les dispositions du Code de procédure pénale.

72.Le législateur égyptien a prévu deux dérogations aux règles générales en vigueur, compte tenu des circonstances exceptionnelles qui ont rendu nécessaire la mise en place de ces tribunaux. Premièrement, il a autorisé des juges militaires à y siéger bien que les magistrats ordinaires doivent être majoritaires. Deuxièmement, la procédure se déroule à un seul degré. Le système de recours a été remplacé par un système de ratification des jugements dans lequel tous les aspects de fond et procéduraux du jugement sont passés en revue par des juges ordinaires occupant les plus hauts postes dans la hiérarchie judiciaire sans que l’accusé n’ait à faire appel.

73.Dans ses précédents rapports, l’Égypte a fourni des explications détaillées sur les textes législatifs régissant ces tribunaux au sein desquels aucun juge militaire n’a jamais siégé depuis la proclamation de l’état d’urgence. La Cour constitutionnelle suprême a statué que la Haute Cour de la sûreté de l’État était la juridiction la mieux placée pour connaître des plaintes au sujet des mandats d’arrêt délivrés en application de la loi sur l’état d’urgence et que le fait d’avoir habilité les tribunaux de la sûreté de l’État à connaître de telles plaintes ne constituait nullement une violation des dispositions de l’article 68 de la Constitution relatives au droit de faire appel devant les tribunaux (arrêt de la Cour constitutionnelle suprême, affaire no 50, cinquième année judiciaire, audience du 2 mars 1985).

74.Comme on peut le voir, en dépit des circonstances dans lesquelles les tribunaux de la sûreté de l’État ont été créés et de leur caractère exceptionnel, toutes les garanties nécessaires sont réunies pour assurer l’indépendance de ces tribunaux et offrir un système de recours alternatif qui assure concrètement tous les droits fondamentaux dont jouissent les personnes traduites devant des juridictions ordinaires. Tout cela confirme que l’Égypte ne viole en aucune façon les garanties relatives au droit de faire appel devant les tribunaux consacrées aux articles 4, 9 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Publication d’articles violents prenant pour cible les juifs (CCPR/CO/76/EGY, par. 18)

75.Le Comité a commenté l’absence de réaction de la part de l’État à des articles violents prenant pour cible les juifs parus dans la presse égyptienne qui constituent un appel à la haine religieuse et raciale et une incitation à la discrimination, à la violence et à l’hostilité.

76.L’Égypte a donné son point de vue sur la question dans sa réponse orale au Comité, soulignant que sa politique à l’égard de médias était fondée sur le respect de la liberté de la création et de la liberté d’expression, droits de l’homme reconnus dans la Constitution égyptienne et les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels l’Égypte est partie.

77.Selon la Constitution égyptienne, la presse est le quatrième pouvoir. Ses activités sont régies par la loi no 96 de 1996 sur la presse, qui garantit la liberté et l’indépendance des médias de façon à leur permettre de jouer leur rôle dans le cadre du système démocratique et des plans de développement globaux de l’État.

78.Les articles en question étaient des analyses de la situation politique complexe qui règne au Moyen‑Orient et visaient essentiellement les politiques gouvernementales. Il ne s’agissait nullement d’une position hostile à une religion ou à une confession. En Égypte, les religions révélées, y compris le judaïsme, sont pleinement protégées par la loi au même titre que les autres religions conformément au Code pénal égyptien. Elles ne peuvent être dénigrées et il ne peut être porté atteinte à leurs lieux sacrés ou à leurs symboles.

79.Les articles en question ont été écrits dans les limites de la liberté de la presse garantie par la Constitution. Ils répondaient à des lois ainsi qu’à des écrits, des déclarations et des descriptions faites par des personnalités publiques contre l’Islam, les prophètes et les Arabes et constatées par différents comités de l’Organisation des Nations Unies qui ont demandé que les responsables soient punis dès lors que leurs propos constituaient un encouragement à la discrimination raciale.

Conclusion

80.L’Égypte présente le présent rapport complémentaire en réponse à la demande du Comité et en tant que gage de l’attachement inébranlable à la primauté du droit et à la démocratie qui sous‑tend son souci de poursuivre un dialogue constructif avec les mécanismes de l’ONU, dont le Comité, en vue de promouvoir l’action commune visant à renforcer les principes relatifs aux droits de l’homme et les libertés fondamentales.

81.En conclusion, l’Égypte souhaite appeler en particulier l’attention sur les mesures qu’elle a prises dans le domaine à l’examen, mue par son ferme attachement aux principes de la primauté du droit et de la démocratie, mesures qui ont notamment consisté à promulguer les lois suivantes:

a)Loi no 94 de 2003 portant abolition des tribunaux de la sûreté de l’État et des peines de travaux forcés à perpétuité et de durée déterminée, lesquelles seront remplacées par la réclusion à perpétuité et l’emprisonnement sans possibilité de bénéficier d’une libération conditionnelle;

b) L oi no 95 de 2003 portant création du Conseil national des droits de l’homme conformément aux Principes (de Paris) concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme.

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