Pacte international relatif aux droits civilset politiques

Distr.

GÉNÉRALE

CCPR/CO/73/CH/Add.1

26 février 2003

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN VERTU DE L’ARTICLE 40 DU PACTE

Observations finales du Comité des droits de l’homme

SUISSE

Additif

Réponses du Gouvernement suisse aux préoccupations exprimées par le Comité des droits de l’homme dans ses observations finales (CCPR/CO/73/CH)

[4 novembre 2002]

1.Le 17 septembre 1998, le Gouvernement suisse a remis au Comité des droits de l’homme son deuxième rapport périodique concernant la mise en œuvre en Suisse du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (CCPR/C/CH/98/2). À la suite de la présentation orale de ce rapport, le 19 octobre 2001, le Comité a adopté, le 12 novembre 2001, ses observations finales (CCPR/CO/73/CH).

2.À cette occasion, le Comité a prié la Suisse de l’informer, dans un délai d’un an, des mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations figurant aux paragraphes 13 (expulsion du territoire) et 15 (statut des ressortissants étrangers) de ses observations finales, reproduites ci-dessous:

«13.Le Comité est profondément préoccupé par le fait qu’au cours de l’expulsion d’étrangers il y a eu des cas de traitement dégradant et de recours à une force excessive ayant parfois entraîné la mort de l’expulsé.

L’État partie devrait veiller à ce que tous les cas d’expulsion forcée soient traités d’une manière compatible avec les articles 6 et 7 du Pacte. En particulier, l’État partie devrait veiller à ce que les méthodes de contrainte utilisées ne mettent pas en jeu la vie et l’intégrité physique des personnes concernées.

15.Le Comité est préoccupé par les conséquences des distinctions faites, dans différents textes législatifs, entre citoyens et non-citoyens, ces derniers constituant une fraction considérable des effectifs de la main-d’œuvre. Les étrangers sans permis de travail risquent en particulier d’être victimes d’exploitation et d’abus. Une autre catégorie de personnes vulnérables concerne les conjoints étrangers d’étrangers titulaires d’un permis de séjour, qui risquent d’être expulsés si cesse la cohabitation de fait et peuvent donc être contraints de ne pas quitter un conjoint qui les maltraite.

L’État partie devrait examiner sa politique concernant les distinctions entre citoyens et étrangers et entre différentes catégories d’étrangers, en particulier ceux qui n’ont pas de papiers et les conjoints d’étrangers titulaires de permis de séjour, pour veiller à ce que les droits de ces personnes consacrés par le Pacte soient respectés et garantis (art. 2, 3, 9, 12, 17 et 23).»

3.Dans le délai imparti, le Gouvernement suisse a l’honneur de transmettre au Comité des droits de l’homme les informations complémentaires ci‑après:

I.Recommandation figurant au paragraphe 13

4.Comme la délégation suisse l’avait indiqué lors de la présentation orale du deuxième rapport périodique au Comité, le rapatriement d’étrangers relève de la compétence exclusive des autorités cantonales. La loi fédérale sur le séjour et l’établissement des étrangers charge toutefois le Département fédéral de justice et police (DFJP) d’assister les cantons, notamment dans l’organisation des voyages. Le DFJP est également l’autorité de coordination.

5.À cette fin, une division «Rapatriement» a été mise en place sur le plan fédéral le 1er juillet 1999 en vue de conseiller les autorités cantonales chargées des renvois. Un nouveau service fédéral, nommé «swissREPAT», a vu le jour en août 2001. Ce service s’est vu confier les tâches de versement de l’aide au retour, d’établissement de l’itinéraire, de réservation centralisée des billets et de coordination de l’escorte de sécurité pour tout ce qui a trait aux départs de Suisse par voie aérienne.

6.Lors de la présentation orale du deuxième rapport périodique, la délégation suisse avait également fait état de l’avancée du projet «Passagers 2», qui devait notamment apporter des améliorations pratiques à l’exécution par les polices cantonales des décisions de renvoi de ressortissants étrangers. Depuis lors, l’équipe de projet, constituée de représentants des autorités cantonales compétentes et d’agents fédéraux, a remis son rapport final du 25 février 2002 (en annexe) à la Conférence des directrices et directeurs des départements cantonaux de justice et police (CCDJP). Se fondant sur différentes expertises, ce rapport propose une série de mesures, qui ont toutes été acceptées par les autorités cantonales compétentes.

7.Parmi ces mesures figurent, notamment, la reprise par tous les cantons des Directives relatives aux rapatriements sous contrainte par voie aérienne (en annexe) figurant dans l’annexe 3 du rapport du projet «Passagers 2». Ces directives répondent de manière précise aux préoccupations formulées par le Comité. Elles excluent en particulier tout moyen de contrainte qui pourrait entraver la respiration des personnes rapatriées ou mettre d’une quelconque autre manière leur santé en danger. La mise en place de cette mesure est devenue effective à la fin du mois d’octobre 2002.

8.Une autre mesure adoptée par les cantons est la mise en place d’un pool intercantonal d’agents d’escorte ayant suivi une formation ad hoc auprès de l’Institut suisse de police à Neuchâtel. La formation des premiers agents d’escorte a débuté le 4 novembre 2002 en langue allemande. Elle débutera le 27 janvier 2003 en langue française.

9.Le 11 avril 2002, le groupe de travail paritaire «Exécution du renvoi» a été chargé par la CCDJP de la surveillance de la mise en œuvre du projet «Passagers 2». Le groupe de travail paritaire fait depuis lors régulièrement état à la CCDJP des derniers développements. À ce jour, l’exécution des renvois d’étrangers n’a pas donné lieu à de nouvelles difficultés.

10.À noter, enfin, que les conclusions du rapport du 25 février 2002, telles qu’admises par la CCDJP, enjoignent le DFJP d’édicter une réglementation fédérale formellement contraignante relative aux moyens de contrainte. Cette dernière mesure devrait toutefois être plus longue à mettre en œuvre.

II.Recommandation figurant au paragraphe 15

11.Il est indéniable que la Suisse, comme d’autres États, abrite des ressortissants étrangers qui ne sont pas titulaires d’une autorisation de séjour ou de travail. Leur nombre exact n’est pas connu. Sur le principe, le Gouvernement fédéral s’est dit opposé à une régularisation collective (amnistie) de ces personnes sans papiers. Les dispositions légales pertinentes prévoient en effet que les ressortissants étrangers présents sans autorisation sur le territoire doivent quitter la Suisse. Le Gouvernement a toutefois reconnu qu’il y avait un besoin d’agir et a élaboré, d’entente avec les cantons, un certain nombre de solutions.

12.Le Gouvernement a en particulier décidé de procéder à un examen individuel de chaque cas, afin de déterminer si, au vu des circonstances, il y aurait rigueur excessive à renvoyer une personne. Lorsqu’un tel cas personnel de rigueur est constaté, des autorisations de séjour sont en principe octroyées. La politique suisse en matière d’étrangers et d’asile tient ainsi compte, dans une large mesure, des situations d’ordre humanitaire. À titre d’exemple, entre janvier 1999 et fin octobre 2001, plus de 11 000 personnes se sont vu octroyer une autorisation de séjour pour des raisons humanitaires, et ce malgré le fait qu’elles ne remplissaient pas les conditions ordinaires d’admission.

13.Le 21 décembre 2001, l’Office fédéral des étrangers et l’Office fédéral des réfugiés ont établi, à l’attention des autorités cantonales et communales, une circulaire rappelant et précisant la pratique des autorités fédérales concernant la réglementation du séjour s’agissant de cas personnels d’extrême gravité (en annexe). Cette circulaire précise notamment quels sont les critères pertinents en la matière (durée du séjour, degré d’intégration, situation familiale, comportement personnel irréprochable, etc.) et la façon dont ces critères doivent être appliqués.

14.Le Gouvernement a également constaté le lien étroit existant entre présence illégale de ressortissants étrangers et possibilités de travail au noir offertes par certains employeurs peu scrupuleux. Vu l’absence de statut, ces travailleurs sont souvent contraints d’accepter des conditions de travail et de rémunération défavorables, sans que les autorités puissent exercer un contrôle. Les autorités fédérales ont par conséquent élaboré un projet de loi, actuellement soumis au Parlement fédéral. Ce projet comporte un paquet complexe de mesures, dont voici les principales:

Allégements administratifs en matière d’assurances sociales;

Renforcement des sanctions;

Accroissement des compétences de contrôle des organes cantonaux;

Mise en réseau de données administratives et devoir de communication des résultats des contrôles des employeurs.

15.Une fois ces mesures devenues opérationnelles, le Gouvernement s’attend à une diminution sensible du travail au noir, qui aura elle-même des effets positifs sur le nombre et la situation générale des ressortissants étrangers en situation illégale en Suisse.

16.Enfin, en ce qui concerne la situation du conjoint étranger après une séparation ou un divorce, le droit actuel prévoit déjà la possibilité de prolonger l’autorisation de séjour du conjoint. Dans le nouveau projet de loi sur les étrangers actuellement discuté par le Parlement fédéral, la continuité du séjour après la dissolution de la communauté conjugale est expressément prévue en cas de rigueur. Le projet subordonne cette possibilité à l’existence de raisons personnelles importantes qui rendent nécessaire la poursuite du séjour en Suisse. Il en irait par exemple ainsi dans l’hypothèse où l’échec du mariage en Suisse rendrait difficile l’intégration familiale et sociale de l’ex-conjoint dans son pays d’origine.

17.L’ensemble de ces mesures devraient renforcer la protection et améliorer la situation de droit et de fait de ces deux catégories de personnes vulnérables.

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