NATIONS UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/SR.73815 janvier 2007

Original: FRANÇAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

Trente-septième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 738e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genèvele mercredi 15 novembre 2006, à 10 heures

Président: M. MAVROMMATIS

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (suite)

Quatrième rapport périodique de la Hongrie

La séance est ouverte à 10 h 5.

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (suite)

Quatrième rapport périodique de la Hongrie (CAT/C/55/Add.10; HRI/CORE/1/Add.11; CAT/C/HUN/Q/4 et Add.1)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation hongroise prend place à la table du Comité.

2.M. SZELEIKISS (Hongrie) se félicite de l’occasion donnée à son pays de dialoguer avec les membres du Comité, dont les observations sont toujours utiles dans l’optique de l’adoption de nouvelles politiques et de la réforme de la législation en vigueur. Le Gouvernement hongrois est fermement engagé dans la lutte contre la torture, comme en témoignent les différents rapports périodiques présentés au Comité et les efforts qu’il déploie à l’échelon régional dans le cadre du Conseil de l’Europe.

3.La protection des droits fondamentaux des personnes est garantie par la Constitution hongroise, qui dispose notamment que nul ne doit faire l’objet d’actes de torture et de traitements cruels, inhumains ou dégradants. Nul ne peut être privé de sa liberté sauf dans des conditions et selon les procédures prévues par la loi. Toute personne suspectée d’une infraction pénale et placée en garde à vue doit être remise en liberté ou présentée rapidement à un juge. Les lois hongroises garantissent également une protection efficace contre les actes de torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradants.

4.Mme GARAI, répondant à la première question de la liste de points à traiter (CAT/C/HUN/Q/4), dit que la définition de la torture énoncée dans la Convention n’a pas été incorporée dans le Code pénal de 1978, dont les articles 226 (mauvais traitements infligés par un agent de l’État), 227 (interrogatoires sous la contrainte) et 228 (détention illégale) sont toutefois conformes aux dispositions de la Convention. En réponse à la question 2, Mme Garai signale qu’il n’est pas dans l’intention du Gouvernement de modifier l’article 123 du Code pénal, en vertu duquel un militaire ne peut être sanctionné pour un acte qu’il a commis sur l’ordre d’un supérieur, sauf s’il savait qu’en exécutant cet ordre il commettait une infraction, car il semble inconcevable qu’une personne puisse affirmer qu’elle ne savait pas qu’un acte de torture, au sens de la Convention, constituait une infraction.

5.M. SZÜCS, répondant à la question 3 qui porte sur l’article 2 de la Convention, rappelle que la Constitution interdit la torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que les expériences scientifiques pratiquées sur des personnes sans leur consentement. En vertu de la législation hongroise, quiconque est arrêté ou détenu illégalement a droit à une réparation. Toute privation ou restriction de liberté autorisée par la Constitution doit être réglementée par la loi. Le Code de procédure pénale protège les droits de la personne détenue d’une manière conforme aux dispositions de la Convention. Plusieurs autres textes garantissent les droits fondamentaux des détenus, notamment le décret-loi no 11 de 1979 sur l’exécution des peines et des mesures pénales et le décret no 19 de 1995 sur les lieux de détention de la police.

6.S’agissant du droit à l’assistance d’un conseil, M. Szücs indique que l’article 3 du Code de procédure pénale garantit une telle assistance à tous les stades de la procédure. Ce droit peut être exercé dès l’inculpation. Lorsque l’assistance d’un avocat est obligatoire (art. 48 du Code de procédure pénale), celui-ci doit être désigné avant le premier interrogatoire du suspect. Quant à l’article 4 du décret no 23 de 2003 du Ministère de l’intérieur et du Ministère de la justice sur les règles régissant les enquêtes menées par les organes qui relèvent du Ministère de l’intérieur, il prévoit que la personne détenue a droit à l’assistance d’un avocat dès le premier acte de procédure dont elle fait l’objet. Rappelant enfin que le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT) a estimé que l’article 33 de la loi de 1994 sur les forces de police n’établissait pas clairement le droit à l’assistance d’un avocat durant la garde à vue, M. Szücs indique que, dans un avis du 7 octobre 2004, la direction des services du Procureur général a précisé qu’aux termes de l’article 126 du Code de procédure pénale toute personne placée en garde à vue bénéficiait des garanties prévues par le Code de procédure pénale, et donc du droit à l’assistance d’un avocat.

7.Pour ce qui est de l’accès à un médecin, l’article 17 du décret sur les lieux de détention de la police prévoit que nul ne peut être placé en détention dans les locaux de la police sans avoir été examiné au préalable par un médecin. Suite à différentes recommandations du Comité européen pour la prévention de la torture, la direction de la police a adopté la décision no 17 de 2006, qui confère aux détenus le droit de prendre connaissance des conclusions du premier examen médical et de signer, s’ils le souhaitent, le certificat médical établi par le médecin. Par cette décision, le droit d’accès de la personne détenue à son dossier médical et celui d’en obtenir une copie sont garantis. Ces droits peuvent aussi être exercés par l’intermédiaire d’un avocat. Les détenus, c’est-à-dire à la fois les personnes en garde à vue et les prévenus, ont le droit de correspondre avec des membres de leur famille et de recevoir leur visite au moins une fois par mois. Toutefois, l’exercice de ces droits peut être restreint pour les besoins de l’enquête pénale. Selon l’article 128 du Code de procédure pénale, le proche désigné par le suspect doit être informé des motifs et du lieu de la détention dans un délai de 24 heures. La décision no 17 de 2006 de la direction de la police va encore plus loin, prévoyant que le motif et le lieu de la détention doivent être immédiatement signifiés aux proches de la personne détenue et que la notification doit être consignée dans un registre.

8.Répondant à la question 4 de la liste des points à traiter (art. 2 de la Convention), M. Szücs dit que le placement en détention provisoire relève de la compétence des tribunaux. Lorsque la détention provisoire est ordonnée avant l’inculpation, celle-ci peut durer jusqu’à la décision du tribunal de première instance mais ne saurait excéder un mois. La détention avant jugement peut être prolongée par le juge d’instruction par périodes de trois mois jusqu’à un an au total. Par la suite, la détention provisoire peut être prorogée par périodes de deux mois par le juge du fond pour une durée totale de trois ans. Les prévenus sont généralement placés dans des établissements pénitentiaires, mais le ministère public peut ordonner leur maintien dans les locaux de la police lorsque les besoins de l’enquête le justifient, pour une durée qui ne peut excéder 30 jours. Une fois ce délai écoulé, le tribunal peut décider, sur requête du ministère public, de prolonger la détention dans les locaux de la police pour une nouvelle période de 30 jours au maximum. Aucun recours ne peut être exercé contre la décision ordonnant le placement en détention dans les locaux de la police. Selon les informations de la direction générale de la police nationale, 85 personnes étaient détenues par la police au 15 août 2006.

9.S’agissant des mesures de substitution à la détention provisoire, M. Szücs indique que la législation hongroise prévoit l’interdiction de la personne en cause de quitter le lieu de résidence, l’assignation à domicile, des ordonnances de ne pas faire, et la libération sous caution. Pour de plus amples informations en la matière, il invite les membres du Comité à consulter les réponses écrites de la Hongrie à la liste de points à traiter.

10.En réponse à la question 5 (art. 2), M. Szücs dit qu’en vertu de l’article 36 du décret-loi de 1979 sur l’exécution des peines et des mesures pénales, les femmes et les mineurs ont droit à une protection spéciale. D’autre part, l’article 39 du décret no 6 de 1996 sur la détention provisoire dispose que les mineurs doivent être détenus séparément des adultes; cette disposition est pleinement respectée dans les établissements pénitentiaires. Les délinquants mineurs placés en détention sont également répartis en fonction de leur âge, de la gravité de l’infraction, de la peine prononcée et de leur comportement. Selon le Code de procédure pénale, toute personne qui n’a pas atteint l’âge de 18 ans au moment de l’infraction est considérée comme mineure. Un mineur condamné à une peine de prison peut être détenu avec des adultes lorsqu’il atteint l’âge de 21 ans.

11.En réponse à la question 6 (art. 2), M. Szücs dit que l’interdiction de la torture et des interrogatoires «musclés» ont des règles de portée générale qui s’appliquent à la fois aux femmes et aux hommes. En conséquence, aucune donnée sur le nombre de femme ou d’homme victimes de ce type d’infraction n’est disponible. La législation couvre par ailleurs différentes infractions à caractère sexuel parmi lesquelles le viol, l’atteinte aux bonnes mœurs ou encore le proxénétisme. Pour de plus amples informations à cet égard, le Comité est invité à consulter les réponses écrites de la Hongrie.

12.M. TALLÓDI, répondant à la question 7 de la liste de points à traiter (art. 2 de la Convention), rappelle que le Médiateur pour les droits civils et le Médiateur pour les droits des minorités nationales et ethniques sont respectivement chargés d’enquêter sur des violations des droits constitutionnels et des droits des minorités nationales ou ethniques portées à leur connaissance et d’adopter des mesures pour y remédier. Il précise que 50 personnes sont employées par le Médiateur pour les droits civils et 18 par le Médiateur pour les droits des minorités nationales et ethniques. En outre, 37 personnes sont employées par les services du Médiateur sur la protection des données et la liberté de l’information.

13.Les Médiateurs ont été saisi de 75 165 plaintes entre le 1er juillet 1995 et le 31 juillet 2006, dont 16,5 % ont débouché sur une enquête. Le Médiateur pour les droits civils a mené 2 725 enquêtes, et des violations de l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants ont été constatées dans 0,7 % des cas seulement. Dans la plupart des cas, ces violations résultaient de mesures de coercition prises par des représentants de la force publique, mais des cas se sont également produits dans des foyers ou des établissements éducatifs à vocation sociale. M. Tallódi relève en outre que 12,45 % des plaintes concernaient les autorités chargées des enquêtes pénales. Dans certaines affaires, le Médiateur pour les droits civils a estimé que le droit constitutionnel au respect de la dignité humaine avait été violé.

14.Quant au médiateur pour les droits des minorités nationales et ethniques, il a été saisi de 4 991 plaintes depuis 1995, dont 10 % mettaient en cause des organes de la police et des autorités pénales. Il s’agissait, dans la plupart des cas, non pas d’actes de torture mais de bavures commises par des membres de la police ou des agents chargés de l’application de la loi. Des enquêtes ont été menées de manière systématique sur chacun de ces cas et certaines se sont soldées par des poursuites. Vu que les principales victimes de mauvais traitements infligés par des membres de la police sont des Roms, des projets ont été lancés pour améliorer les rapports entre cette communauté et les forces de l’ordre, et la police a noué des relations «officielles» avec des organisations roms en vue de faciliter l’accès des représentants roms aux dossiers pénaux concernant des membres de cette minorité. En outre, les fonctionnaires de police sont sensibilisés au problème et reçoivent une formation axée sur les textes de lois interdisant la discrimination.

15.M. ÖRDÖG, répondant à la question 8 relative à l’article 3 de la Convention, dit qu’aucune mesure n’a été prise pour mettre la traduction du paragraphe 1 de cet article en conformité avec le texte original. Cela ne lui semble pas poser de problème dans la mesure où, en cas de doute, c’est ce texte qui fait foi. En réponse aux questions 9 et 10, M. Ördög précise que l’article 43 de la loi sur le droit d’entrée et de séjour des étrangers, qui a pris effet en janvier 2002, est conforme à l’article 3 de la Convention. L’article 43 prévoit en effet qu’un ressortissant étranger ne peut être expulsé, refoulé ou extradé vers un pays où il y a des motifs sérieux de croire qu’il risque d’être soumis à la torture, à des traitements cruels, inhumains ou dégradants et à la peine de mort. Il convient de souligner, à cet égard, que le service chargé d’examiner les demandes d’asile est systématiquement tenu de se prononcer sur l’application du principe de non-refoulement. En ce qui concerne le nombre de demandeurs d’asile et de personnes refoulées entre 2002 et mi‑2006, le Comité est invité à se reporter aux réponses écrites de la Hongrie à la liste de points à traiter. Ces réponses contiennent également des données sur le nombre de demandeurs d’asile qui se sont vu refuser le statut de réfugié et sur le nombre de personnes en situation irrégulière qui n’ont pas été expulsées, au cours de la période 2002-2006, car leur expulsion aurait été contraire au principe de non-refoulement.

16.Répondant à la question 11 relative à l’article 4 de la Convention, M. Ördög indique que six agents de l’État ont été condamnés en 2005 pour avoir employé la force lors d’interrogatoires ou infligé des mauvais traitements dans la cadre d’une procédure officielle. Le ministère public vérifie chaque année si les prisonniers sont traités dans le respect de la loi et ne sont pas victimes d’infractions telles que la violation du droit à la vie, les mauvais traitements, les interrogatoires «musclés», la détention illégale et l’abus d’autorité.

17.Mme GARAI, répondant à la question 12 relative à l’article 5 de la Convention, dit qu’il n’y a pas eu de rejet, pour quelque raison que ce soit, d’une demande d’extradition émanant d’un État tiers concernant une personne soupçonnée d’avoir commis un acte de torture. En réponse à la question 13, elle signale qu’en vertu de l’article 4 du Code pénal les tribunaux hongrois sont compétents pour connaître de cas de torture ou de mauvais traitements mettant en cause des étrangers lorsque les faits en question sont constitutifs d’une infraction au regard du droit hongrois et de la législation du lieu où ils se sont produits. Les tribunaux hongrois sont également compétents en cas de crime contre l’humanité, ainsi que de toute autre infraction passible de poursuites en application de traités internationaux, dont la Convention. Au sujet de la question 14, posée à propos de l’article 10, Mme Garai précise que l’enseignement des droits de l’homme est une priorité dans le programme des écoles secondaires de formation de policiers ainsi que dans celui de l’École de police. Les futurs policiers doivent être en mesure de garantir le respect des droits de l’homme et des droits des minorités lors d’interventions ou d’actes de procédure. Une formation aux droits de l’homme et aux droits des minorités est dispensée également au cours de stages spéciaux destinés au personnel pénitentiaire, le but étant de faire en sorte que le respect des droits de l’homme aille de soi dans sa conduite quotidienne.

18.À la suite de la visite effectuée par le CPT en 1999 dans les prisons hongroises, les directeurs de prison ont reçu pour consigne d’appeler l’attention des membres de leur personnel, avant leur entrée en fonctions, sur l’obligation d’appliquer des mesures proportionnées et de respecter l’interdiction de la torture, des interrogatoires «musclés» et des traitements cruels, inhumains ou dégradants. À titre d’exemple, on peut citer deux importants stages de formation. Le premier, organisé depuis 2002 à l’intention des policiers par l’Institut de formation et de recherche de la police, est consacré à la population rom et à l’action de la police auprès d’elle; il est axé sur la prévention et la gestion des conflits et sur la lutte contre les stéréotypes défavorables concernant les Roms. L’autre stage, financé par le Fonds Schengen, est destiné au personnel des centres de rétention des migrants et des services de contrôle de l’immigration. En outre, des juges, procureurs, spécialistes de la protection des témoins et membres d’organisations caritatives sont régulièrement invités à donner des conférences. Enfin, le service de la surveillance aux frontières organise des formations traitant de questions juridiques et psychologiques.

19.M. TALLÓDI (Hongrie), répondant à la question 15, précise que les médecins légistes doivent passer un examen de spécialité avant de prendre leurs fonctions. L’ordonnance no 66/1999 du Ministère de la santé dispose qu’ils doivent avoir pratiqué la médecine interne, la psychiatrie, la traumatologie, et avoir exercé en tant que médecin des prisons. Avant qu’un détenu soit placé en cellule, le médecin doit lui demander de faire une déclaration sur l’origine de tout signe extérieur de traumatisme observé au cours de l’examen. Si l’intéressé déclare que ces blessures résultent de mauvais traitements infligés par un agent de l’État, le médecin consigne sa déclaration dans le rapport médical qu’il demande au détenu de signer; ce rapport est ensuite communiqué confidentiellement au parquet. En outre, la licéité de la détention est vérifiée régulièrement et au minimum une fois par mois, en même temps que l’on s’assure que les règles interdisant les mauvais traitements sont respectées. Enfin, tous les médecins sont de par leur formation capables de déceler des signes de mauvais traitements ou de torture sur les personnes admises à l’hôpital central ou dans les établissements qui en dépendent. Ils sont alors tenus d’en signaler l’existence à la police, par l’intermédiaire de l’administration de l’hôpital.

20.M. SZÜCS (Hongrie), se référant à l’article 11 de la Convention, indique que les points soulevés dans la question 16 sont régis par la loi no 5 de 1972, qui dispose que les magistrats responsables de l’exécution des peines s’assurent au moins deux fois par mois que la légalité est respectée en ce qui concerne le traitement des personnes se trouvant dans tous les lieux de détention. En ce qui concerne la question 17, il n’existe aucune donnée concernant des cas de détention arbitraire ou de mauvais traitements de mineurs par la police. Au demeurant, de tels faits ne semblent pas courants en Hongrie. Si les règles régissant la séparation des différentes catégories de détenus sont respectées, il est totalement exclu que des adultes puissent maltraiter des jeunes détenus dans le même établissement. Enfin, compte tenu des principes constitutionnels régissant la collecte des données, les autorités ne sont pas en mesure de vérifier les allégations selon lesquelles les Roms seraient surreprésentés dans la population carcérale.

21.Passant à la question 18 concernant les articles 12 et 13 de la Convention, M. Szücs souligne que le texte auquel se réfère la question est probablement l’article 190 de la nouvelle loi sur la procédure pénale. Les dispositions pertinentes de cet article prévoient que le parquet met fin à l’enquête sur des actes de torture si l’acte en question ne constitue pas une infraction pénale, si l’infraction pénale n’a pas été commise par le suspect, ou s’il existe un motif excluant que l’acte soit punissable. Il est vrai que, dans la plupart des cas où un non-lieu a été prononcé, c’est qu’il était impossible de prouver la réalité de l’infraction. Il peut aussi arriver que l’enquête soit close en raison de l’absence d’infraction.

22.Au sujet des questions 19 et 20, M. Szücs précise que les infractions militaires et autres commises par le personnel des prisons dans l’exercice de ses fonctions sont instruites par les organes de la justice militaire et jugées par la division de justice militaire, qui font partie du système judiciaire général. En 2004, 16 membres des services pénitentiaires ont fait l’objet de poursuites pénales car ils étaient sérieusement soupçonnés de mauvais traitements infligés dans l’exercice de leurs fonctions; un seul de ces cas a été porté devant les tribunaux, qui ont statué qu’eu égard au peu de gravité de l’acte commis il ne convenait pas de prononcer une condamnation mais seulement de réprimander le coupable. Neuf fonctionnaires ont bénéficié d’un non-lieu parce que, dans six cas, il était devenu évident au cours de l’instruction qu’aucune infraction n’avait été commise, cependant que dans les trois autres cas il n’avait pas été possible d’établir les faits. Une procédure est en cours à l’encontre de six personnes. Le nombre de poursuites pénales engagées en 2005 a doublé, mais une seule personne a été condamnée à verser une amende par le tribunal militaire. Plus de la moitié des enquêtes ouvertes en 2005 ont abouti à un non-lieu, en raison de l’absence d’une infraction dans 7 cas et d’une absence de preuve dans 10. La procédure engagée en 2005 à l’encontre de 14 personnes sur lesquelles pesaient de graves présomptions de mauvais traitements est en cours. Il est à noter que l’on ne dispose d’aucune donnée sur le sexe et l’âge des plaignants et que la loi interdit de consigner l’origine ethnique des personnes.

23.En ce qui concerne les infractions commises à l’encontre de codétenus, des décisions ont été prises au sujet de 13 cas d’attentat à la pudeur en 2005. Les données dont on dispose laissent penser que ce genre d’affaires est relativement rare: 9 cas en 2004, 21 en 2003, 10 en 2005 et 6 en 2001. Les accidents susceptibles d’occasionner des traumatismes visibles sont apparemment très fréquents. Des données statistiques sur ces cas (rixes, mauvais traitement de codétenus, etc.) sont présentées dans les réponses écrites de la délégation.

24.M. TALLÓDI (Hongrie) en vient à l’article 14 et à la question 21. Aux termes de la loi hongroise, les victimes d’infractions reçoivent toutes le même type d’assistance et il n’existe pas de forme d’aide distincte pour les victimes de mauvais traitements infligés lors de procédures officielles ou d’interrogatoires forcés. La loi no 135 de 2005 fait appel au concept d’infraction violente intentionnelle commise à l’encontre d’une personne. La victime a alors droit à réparation de la part de l’État, qui lui donne aussi accès à des services de soutien. Ces services ne disposent pas de données sur le nombre de personnes victimes de mauvais traitements ou d’interrogatoires «musclés», ni sur l’aide financière qui leur est apportée. Entre juillet 1999 et janvier 2006, la Fondation hongroise pour la sécurité a reçu quelque 1 900 demandes de réparation et a octroyé un soutien financier à 1 146 personnes. Depuis le 1er janvier 2006, le Bureau d’assistance aux victimes des services judiciaires de Budapest statue sur les demandes de réparation en matière administrative. Au cours du premier semestre 2006, 276 demandes ont été examinées et 55 personnes ont été indemnisées.

25.La réadaptation médicale et psychosociale des victimes, qui fait l’objet de la question 22, est assurée par le Système national de sécurité sociale. Le personnel du Bureau d’assistance aux victimes aide celles‑ci à bénéficier rapidement des soins nécessaires. Pour ce qui est des mesures prises pour donner suite aux constatations du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, ce qui fait l’objet de la question 23, M. Tallódi renvoie le Comité aux réponses écrites communiquées par la délégation.

26.En ce qui concerne la question 24, relative à l’article 15 de la Convention, la recevabilité des preuves est régie par l’article 77 de la loi sur la procédure pénale, en vertu duquel toute preuve doit être recueillie et utilisée conformément aux dispositions de ladite loi, qui précise les modalités de l’établissement et de l’examen des preuves. Au cours de la procédure de recueil des éléments de preuve, la dignité et les droits individuels des personnes en cause doivent être respectés et toute divulgation non nécessaire de données sur la vie privée est interdite. L’article 78 dispose que tous faits dérivés d’éléments obtenus par le tribunal, le parquet ou le magistrat instructeur par des moyens constituant une infraction pénale, par d’autres méthodes illicites ou en restreignant les droits des personnes en cause ne peuvent être reçus comme éléments de preuve. La loi sur la procédure pénale, telle que modifiée, oblige les policiers à enregistrer mot pour mot les réponses d’un suspect au cours de l’enquête, faute de quoi son témoignage est systématiquement exclu des éléments à produire. L’article 4 de ladite loi dispose que la charge de la preuve incombe à l’accusation. En vertu de l’article 76, les faits doivent être entièrement établis au cours de la procédure, mais le tribunal n’est pas tenu d’examiner les moyens de preuve fournis à l’appui de l’accusation si le parquet n’en a pas fait la demande. En 2005, un grand nombre de procédures pénales ont été engagées en raison d’allégations relatives à des aveux qui auraient été obtenus par des mauvais traitements. Le CPT n’a toutefois pas jugé que les traitements appliqués dans ces cas pouvaient être qualifiés de torture.

27.M. BERECZKI (Hongrie), se référant à l’article 16 et à la question 25, indique que des statistiques récentes ventilées par sexe et par âge concernant le nombre de personnes incarcérées ainsi que le taux d’occupation des prisons pour 2002‑2005 figurent dans les réponses écrites communiquées par la délégation. Des mesures ont été prises, et d’autres sont prévues, pour désencombrer les établissements pénitentiaires hongrois. Alors qu’au cours du second semestre 2002 on comptait 2 000 détenus à la maison d’arrêt de Budapest, ils n’étaient plus que 1 652 à la fin de 2003, et leur nombre actuel est de 1 517. À long terme, seule la création de nouvelles installations décidée par les pouvoirs publics et le recours à d’autres types de peines permettront d’améliorer la situation.

28.Mme GARAI (Hongrie), répondant à la question 26, précise tout d’abord qu’après sa visite de 2003 le CPT s’est à nouveau rendu en Hongrie en 2005. Dans les limites de leurs possibilités financières, les services de police font tout ce qui est en leur pouvoir pour améliorer leurs centres de détention. En 2006, les lits, que le CPT avait jugés trop étroits, ont été remplacés. Les autres travaux de modernisation en cours ou prévus, dont certains financés par l’Union européenne, sont évoqués dans les réponses écrites. Un nouveau centre d’internement des migrants conforme aux normes de l’Union européenne a été construit, et une surveillance médicale est assurée nuit et jour dans les locaux du service de la surveillance aux frontières. Ce dernier prévoit aussi d’engager de nouveaux travaux de rénovation et de reconstruction, également évoqués dans les réponses écrites.

29.Le dépistage et les soins médicaux sont assurés de manière conforme à la législation pertinente et aux règles de la profession. C’est ainsi que les détenus ne sont placés en cellule qu’après avoir subi un examen médical préliminaire, qui a pour but d’identifier les personnes dont l’état de santé risquerait de se détériorer en dépit des traitements médicaux dispensés sur le lieu de la détention. Si le médecin considère que leur prise en charge ne peut être assurée en cellule, il les fait admettre dans un établissement approprié.

30.Le service du parquet compétent surveille étroitement la légalité de l’application des peines et le Procureur général, dans son rapport de 2005, a constaté une évolution positive dans ce domaine: les détenus sont traités d’une manière conforme aux normes internationales et à la législation. Selon les données dont on dispose, il est permis de conclure que depuis deux ans le sort des détenus s’est nettement amélioré, ce qui s’explique par la surveillance sans faille assurée par les services du parquet et par la volonté affirmée des directeurs des services pénitentiaires.

31.Très conscient des problèmes causés par le surpeuplement, le Ministre de la justice a fait procéder à une étude sur les moyens d’améliorer le sort des détenus, à la suite de laquelle leurs rations alimentaires quotidiennes ont augmenté de 10 %; leur régime est désormais plus varié et comporte des fruits et des aliments riches en vitamines, et ils disposent de davantage d’argent pour leurs achats personnels. Les prisonniers peuvent aussi accéder plus fréquemment aux salles de gymnastique, et des installations sportives de plein air ont été créées. Enfin, un plus grand nombre de cabines téléphoniques est à leur disposition.

32.En ce qui concerne l’amélioration des services de soins à la maison d’arrêt de Budapest, il y a lieu de signaler que trois dentistes travaillant 30 heures par semaine offrent des soins à quelque 1 500 détenus. Par ailleurs, le CPT a demandé des précisions sur la situation des détenus séropositifs au VIH. Il est vrai que pour des raisons médicales ceux‑ci sont regroupés dans un seul établissement où leur est assuré un traitement adapté. Une fois transférés au centre de Tököl, les intéressés bénéficient d’un cadre plus tranquille, mais aussi des compétences d’un spécialiste. Lorsque leur état se détériore, ils sont transférés vers un hôpital civil. Le personnel soignant employé par les services pénitentiaires a les compétences exigées par les autorités sanitaires, et les détenus ont les mêmes droits, en matière de santé, que toute autre personne assurée.

33.M. BERECZKI (Hongrie), répondant à la question 27, indique que l’administration judiciaire a pris les mesures ci‑après pour désengorger les prisons, conformément aux recommandations du Conseil de l’Europe: le Code pénal a récemment été modifié en vue d’élargir les possibilités de libération conditionnelle et le nombre de personnes ayant bénéficié d’une telle mesure est passé de 6 372 en 2002 à 8 803 en 2003. De plus, les juges ne sont plus tenus d’appliquer une condamnation minimale, ce qui, à terme, diminuera la durée totale des peines d’emprisonnement. Le recours à des peines de substitution devrait également permettre de désencombrer les prisons. La population carcérale a baissé de 7,4 % par rapport à l’année précédente. En dépit de travaux de rénovation ayant entraîné une réduction temporaire de la capacité, le taux d’occupation des prisons est passé de 160 % à 145 %. Une unité spéciale du service national des prisons est chargée de répartir les prisonniers en fonction du taux d’occupation dans les différents établissements. Enfin, il convient de préciser que le budget du Ministère ne lui permet pas d’entreprendre la construction de nouveaux locaux, mais seulement de poursuivre les travaux déjà commencés, grâce auxquels des conditions plus décentes seront offertes aux détenus. Enfin, à propos de la question 28, il y a lieu de signaler qu’un établissement régional pour mineurs a été créé au sein de la maison d’arrêt du comté de Borsod‑Abaúj‑Zemplén en 2002. Des installations destinées aux mères et à leurs enfants ont été construites à la maison d’arrêt du comté de Bács‑Kiskun; elles se composent de 20 cellules dont chacune est équipée pour les besoins de la détenue et de l’enfant. Dans le même établissement, un quartier est destiné à recevoir 10 jeunes détenues. Enfin, dans un souci de prévention, les visites de supervision du parquet sont devenues plus fréquentes.

34.Mme TÓTH (Hongrie), se référant à la question 29, indique qu’un accord a été conclu avec la Fondation hongroise pour les femmes concernant un projet de soutien en prison et de traitement à l’intention des victimes et des auteurs de violences domestiques; des détails sont fournis dans les réponses écrites au sujet de ce projet financé par la Commission européenne.

35.Mme GARAI (Hongrie), constatant que le temps va manquer, renvoie aux réponses données par écrit à la question 30, concernant notamment les articles du Code pénal relatifs à la traite des êtres humains. Elle appelle l’attention sur la place qui y est faite aux circonstances aggravantes, qui instaurent différents niveaux de responsabilité − par exemple le fait qu’une victime ait moins de 18 ans, qu’elle soit assujettie au travail forcé, etc.; l’accumulation de plusieurs de ces éléments vient encore aggraver l’infraction. En ce qui concerne la question 31, les renseignements demandés figurent dans les réponses écrites.

35.M. TALLÓDI (Hongrie), répondant à la question 32, dit qu’il existe depuis dix ans un programme d’allocations qui permet à des jeunes défavorisés d’origine rom qui souhaitent devenir fonctionnaires de police de bénéficier d’une prise en charge totale des frais liés à leur formation à l’école de police. En 2004, 10 jeunes Roms en ont bénéficié. Par ailleurs, un programme d’intégration sociale de la communauté rom, établi en application du décret gouvernemental no 1021/2004, est entré en vigueur. Aux fins de sa mise en œuvre, le chef de la police nationale a émis des directives harmonisées sur le traitement des questions relatives à la minorité rom, qui prévoient notamment que les plaintes pour discrimination émanant de membres de cette minorité doivent faire l’objet d’une attention spéciale. Une coopération régulière s’est en outre établie entre les forces de police et la communauté rom, notamment sous la forme de programmes conjoints.

36.M. SZELEIKISS (Hongrie), en réponse à la question 33, dit que la Hongrie s’est engagée à ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture lorsqu’elle a proposé sa candidature pour siéger au Conseil des droits l’homme et qu’elle ne se dédira pas. Le Ministère des affaires extérieures, en collaboration avec le Ministère de la justice, travaille actuellement à la mise en conformité de la législation avec les dispositions du Protocole facultatif en vue de sa ratification. Pour ce qui est de la désignation du mécanisme national prévu par le Protocole, il y a lieu de signaler que les services du parquet effectuent régulièrement des visites d’inspection dans les lieux de détention afin de prévenir la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

37.M. GROSSMAN (Rapporteur pour la Hongrie) remercie la délégation pour la qualité de son rapport ainsi que pour la richesse et la sincérité des réponses qu’elle a fournies aux questions de la liste des points à traiter. En ce qui concerne la réponse à la question 1, il estime que les articles 226 (mauvais traitements infligés par un agent de l’État) et 227 (interrogatoires sous la contrainte) du Code pénal sont trop restrictifs par rapport à la définition de la torture figurant à l’article premier de la Convention et que le vide juridique qui en résulte, notamment en ce qui concerne les motifs autres que l’obtention d’aveux et la notion de consentement exprès ou tacite, est un facteur potentiel d’impunité. Il encourage par conséquent l’État partie à refléter dans son Code pénal l’intégralité de la définition telle qu’elle est énoncée dans la Convention.

38.En ce qui concerne l’application de l’article 2 de la Convention, il est dit au paragraphe 10 des réponses écrites (CAT/C/HUN/Q/4/Add.1) que le droit de correspondre et de recevoir des visites peut faire l’objet de restrictions dans l’intérêt de la procédure. Des plaintes de détenus relatives à des restrictions de cette nature ont‑elles déjà été enregistrées? On peut lire au paragraphe 18 des réponses écrites que 85 personnes en attente de jugement sont actuellement détenues dans des cellules de garde à vue. Depuis combien de temps ces personnes sont‑elles détenues? Quelle est la durée moyenne pendant laquelle une personne peut être détenue avant jugement dans les locaux de la police? Le Code de procédure pénale prévoit en outre que dans certains cas exceptionnels le juge peut ordonner le placement en détention avant jugement dans une cellule de garde à vue pour une durée maximale de 30 jours, renouvelable une fois. Que faut‑il entendre par «cas exceptionnels»?

39.En ce qui concerne l’accès à un conseil, le Code de procédure pénale garantit le droit à un avocat à tous les stades de la procédure. Toutefois, en application de l’article 33 de la loi sur la police, douze heures peuvent s’écouler à compter de l’arrestation avant que la personne appréhendée n’ait accès à un avocat. Il serait intéressant de savoir à quel moment exactement ce droit peut être exercé et si la personne arrêtée en est informée. La même question se pose pour les étrangers détenus par les gardes frontière. S’agissant de l’accès des plus démunis à un conseil, il serait utile de connaître le nombre total d’avocats commis au titre de l’aide juridictionnelle. Par ailleurs, il semblerait que les personnes détenues dans les locaux de la police ou par les gardes frontière ne puissent être examinées que par des médecins désignés par les autorités. Certaines organisations non gouvernementales ont signalé que ces médecins avaient tenté de dissuader des détenus de porter plainte contre des fonctionnaires de police. Est-ce exact? Dans l’affirmative, des enquêtes ont‑elles été ouvertes? Des détenus ont‑ils présenté des demandes afin d’être examinés par un médecin indépendant? Le rapport du Comité européen pour la prévention de la torture donne à entendre que les examens médicaux se déroulent en présence d’un agent de police ou d’un garde frontière. Il serait utile d’entendre la délégation sur ce sujet. En outre, en cas de lésions corporelles constatées lors de l’examen médical d’entrée, une procédure d’enquête est‑elle ouverte?

40.Le Code de procédure en matière d’enquête établi par le décret conjoint no 23/2003 du Ministre de l’intérieur et du Ministre de la justice a constitué un important progrès. Il serait intéressant de savoir si ce code interdit expressément la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et s’il prévoit l’application de mesures disciplinaires à l’égard des fonctionnaires de police dont le comportement est contraire à ses dispositions. Des poursuites ont-elles déjà été engagées contre un fonctionnaire de police au motif qu’il n’avait pas respecté le Code? Plusieurs organisations non gouvernementales ont par ailleurs soulevé la question du port de badges par les fonctionnaires de police. Existe‑t‑il un quelconque règlement établissant une obligation à cet égard?

41.D’après des organisations de la société civile, sur 560 cas de brutalités policières signalées, 32 seulement auraient donné lieu à des poursuites. Ces statistiques sont-elles exactes? Le nombre élevé d’enquêtes closes sans suite conduit à douter de l’intégrité des autorités chargées des enquêtes. Dans l’affaire Jakab Richárd, jeune homme d’origine rom retrouvé mort le 25 juillet 2004 après avoir été pris en chasse par trois policiers, l’enquête a conclu à l’absence d’infraction alors que, selon certaines sources, le corps n’avait même pas pu être examiné par un médecin indépendant. La délégation confirme‑t-elle cette information? Des statistiques relatives au nombre de plaintes imputant des actes de torture et des mauvais traitements à des fonctionnaires de police ou des gardes frontière, ventilées par âge, sexe, origine ethnique et, le cas échéant, pays d’origine des plaignants, seraient utiles. Un certain nombre d’affaires ont été transmises à la Cour européenne des droits de l’homme. Il serait utile de savoir si les décisions rendues par cette dernière ont eu des répercussions dans le pays. En ce qui concerne les activités du Médiateur pour les droits de l’homme et du Médiateur pour les droits des minorités nationales et ethniques (question 7), il ressort des réponses écrites que ceux‑ci sont très actifs et formulent un grand nombre de recommandations. Il serait intéressant de savoir si celles‑ci sont suivies d’effets.

42.En ce qui concerne l’article 3 de la Convention, des précisions concernant la manière dont le risque de torture est évalué dans le cadre de décisions d’expulsion, de refoulement ou d’extradition serait utiles. Des personnes menacées de refoulement ont‑elles déjà obtenu le droit d’asile à la suite d’une détermination positive de l’existence d’un tel risque? Il serait utile d’entendre l’avis de la délégation au sujet de la compatibilité de l’accord de réadmission conclu entre la Hongrie et l’Ukraine avec le principe de non‑refoulement.

43.Mme SVEAASS (Corapporteuse pour la Hongrie) dit qu’il ne ressort pas clairement de la réponse de l’État partie que la diffusion de la Convention fait expressément partie des programmes destinés aux agents de la fonction publique. Des précisions sur ce sujet seraient par conséquent les bienvenues. Il est en revanche intéressant de noter que l’enseignement dispensé aux futurs fonctionnaires de police et gardes frontière met l’accent sur les aspects juridiques, sociaux et psychologiques de ces professions, ainsi que sur les techniques d’enquête. Les programmes axés sur la communication et la résolution de conflits, le soutien psychologique des fonctionnaires eux‑mêmes et leur évaluation psychologique régulière sont également des initiatives très positives. Il serait intéressant de savoir quelles catégories de fonctionnaires bénéficient de ces programmes, si ceux‑ci sont destinés uniquement aux débutants ou s’ils s’adressent également aux fonctionnaires en poste depuis longtemps, et quelles sont les mesures adoptées à l’égard des fonctionnaires dont les évaluations ne sont pas satisfaisantes. Il est également dit dans les réponses écrites que la formation à l’évaluation des preuves médicales est une priorité. Il s’agit en effet d’un aspect essentiel de la formation, car faire la différence entre des lésions accidentelles et des lésions résultant d’actes de torture ou de mauvais traitements nécessite des compétences spécifiques. Des précisions concernant les modalités de la formation dispensée aux agents de l’État dans ce domaine seraient les bienvenues.

44.À propos de l’article 11, Mme Sveaass note avec satisfaction que la période pendant laquelle les gardes frontière peuvent détenir des étrangers en situation irrégulière a passé de 12 à 6 mois. Elle souhaiterait toutefois savoir si ces étrangers ont droit à une assistance juridique, si des personnes particulièrement vulnérables, comme les femmes enceintes et les personnes présentant des symptômes de stress post-traumatique, sont également détenues dans les centres administrés par les gardes frontière, et si des organisations non gouvernementales telles que le Comité Helsinki hongrois ont accès à ces personnes. Par ailleurs, Mme Sveaass voudrait savoir de quelle façon l’État partie s’assure que les dispositions de l’article 128 du Code de procédure pénale concernant les droits de la défense sont effectivement respectées et que les personnes placées en détention provisoire ont accès à un avocat et peuvent contacter des membres de leur famille.

45.Concernant l’argument avancé par l’État partie selon lequel il n’a aucun moyen de savoir si les personnes appartenant à la minorité rom sont surreprésentées dans les prisons car la loi n’autorise pas l’établissement de statistiques ventilées par religion et origine ethnique, Mme Sveaass prie la délégation hongroise d’indiquer si des mesures pourraient être prises afin de modifier les textes législatifs pertinents.

46.En ce qui concerne les articles 12 et 13 de la Convention, Mme Sveaass constate à la lecture des réponses écrites que la moitié des enquêtes ordonnées en 2005 a été abandonnée faute de pouvoir établir l’existence d’une infraction (par. 114). Elle souhaiterait savoir pour quelles raisons autant d’affaires ont été classées de la sorte et s’il arrive qu’aucune enquête ne soit ouverte à la suite d’une plainte.

47.Par ailleurs, la Corapporteuse voudrait savoir si l’État partie a tenu compte de la recommandation formulée par le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) dans le rapport relatif à la visite qu’il a effectuée en 2005, tendant à ce que les détenus ne soient plus menottés à des radiateurs ou à d’autres objets fixes.

48.Par ailleurs, notant que, d’après des informations émanant d’organisations non gouvernementales, la police aurait fait un usage excessif de la force pendant les manifestations de septembre et d’octobre 2006, Mme Sveaass voudrait savoir quel organe sera chargé d’enquêter sur ces incidents, quelle méthode d’investigation sera utilisée et si les policiers soupçonnés d’avoir participé à ces infractions seront suspendus de leurs fonctions pendant la durée de l’enquête.

49.Constatant que, d’après les statistiques fournies dans les réponses à la liste des points à traiter (par. 128 et 129), la moyenne annuelle des sanctions disciplinaires imposées aux personnes privées de liberté est nettement plus élevée chez les jeunes de moins de 18 ans que chez les autres groupes d’âge, la Corapporteuse souhaiterait savoir en quoi consistent ces sanctions.

50.S’agissant de l’article 14 de la Convention, il ressort des réponses écrites que, pour ce qui est des réparations et de l’aide à la réadaptation, le droit interne n’établit pas de distinction entre les victimes de la torture et les victimes d’actes de violence en général (par. 135). Or, la torture laisse des séquelles psychologiques particulièrement graves, raison pour laquelle Mme Sveaass juge indispensable que l’État partie fasse en sorte que les victimes de cette pratique bénéficient de mesures de réparation et de réadaptation qui prennent en compte la spécificité de la torture.

51.Concernant l’article 15 de la Convention, Mme Sveaass souhaiterait savoir de quelle nature étaient les actes qui ont fait l’objet des plaintes déposées en 2003 pour extraction d’aveux par la contrainte. S’agissait‑il de mauvais traitements ou d’actes de torture? Enfin, à propos de l’article 16 de la Convention, elle demande à la délégation hongroise de décrire la situation des homosexuels en Hongrie.

52. M. Grossman (Vice-Président) prend la présidence.

53.M. KOVALEV, notant qu’en 2003, dans le cadre d’un accord de réadmission conclu avec l’Ukraine, 140 demandeurs d’asile, dont 32 Iraquiens et 13 Afghans, ont été refoulés à la frontière avec ce pays, rappelle que ce n’est pas aux gardes frontière d’appliquer les accords de réadmission car ils n’ont pas compétence pour juger si un demandeur d’asile pourrait être torturé ou non dans le pays de renvoi. À cet égard, la Hongrie ne respecte pas les dispositions de l’article 3 de la Convention. M. Kovalev voudrait donc savoir quel a été le sort de ces 140 personnes refoulées et, en particulier, si les autorités ukrainiennes les ont ensuite renvoyées dans leur pays d’origine ou si elles se sont engagées, avant leur transfert de Hongrie en Ukraine, à ne pas prendre une telle mesure.

54.Mme BELMIR, rappelant que, dans ses conclusions et recommandations relatives au troisième rapport périodique de la Hongrie, le Comité s’était dit préoccupé par les dispositions de l’article 123 du Code pénal hongrois, qui ne rend la torture punissable que si le soldat ou le policier auteur de l’acte savait qu’en commettant cet acte il perpétrait une infraction pénale, juge regrettable que, dans ses réponses écrites (par. 3), l’État partie maintienne que cet article de loi n’a pas besoin d’être modifié.

55.En ce qui concerne la durée maximale de la détention provisoire et de la garde à vue, qui peut atteindre trois ans et un mois, respectivement, Mme Belmir souhaiterait savoir si les possibilités de prolongation s’expliquent par les lenteurs de la justice ou par une volonté délibérée de mettre le suspect dans une situation d’insécurité psychologique. Elle déplore en outre que la délégation n’ait apporté aucun nouvel élément de réponse à ce sujet, alors que la question avait déjà été soulevée lors de l’examen du troisième rapport.

56.Par ailleurs, Mme Belmir souhaiterait des explications sur l’usage qui est fait dans le rapport et les réponses écrites du terme «groupe ethnique». Selon elle, un individu est soit un ressortissant, soit un non‑ressortissant. Faut‑il donc comprendre qu’il existe deux classes de citoyens dans l’État partie, les Hongrois de souche et les Hongrois appartenant à une minorité nationale ou ethnique? Enfin, elle souhaiterait savoir si la personnalité juridique des étrangers est reconnue dans le droit interne en Hongrie.

57.M. MARIÑO MENÉNDEZ demande si l’Accord de Schengen est appliqué dans son intégralité par la Hongrie et si des dispositions ont été adoptées pour l’incorporer dans le droit interne. En outre, il souhaiterait savoir si les règles relatives à l’harmonisation des procédures d’asile des pays membres de l’Union européenne sont appliquées en Hongrie. À cet égard, il prie la délégation hongroise d’indiquer s’il existe une procédure accélérée d’examen de la recevabilité des demandes d’asile présentées par les étrangers en situation irrégulière et, dans l’affirmative, combien de jours dure cet examen. Au cas où le demandeur est autorisé à rester dans le pays, est‑il logé dans un centre d’accueil et combien de temps doit‑il attendre avant que la décision définitive concernant sa demande d’asile soit rendue?

58.À propos des accords bilatéraux de réadmission évoqués par M. Kovalev, M. Mariño Menéndez voudrait savoir si l’État partie a établi une liste de pays «sûrs», c’est-à-dire vers lesquels une personne peut être renvoyée sans qu’elle risque d’y être soumise à la torture. En outre, il demande si des actions judiciaires ont été intentées contre des agents étrangers qui auraient détenu illégalement des personnes sur le territoire hongrois ou des États qui auraient utilisé l’espace aérien hongrois pour transporter des suspects dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.

59.En ce qui concerne l’arrestation de suspects pris en flagrant délit, M. Mariño Menéndez voudrait savoir si les membres de l’armée sont habilités à y procéder et, le cas échéant, si les suspects sont ensuite envoyés dans un commissariat ou ailleurs. Enfin, il demande si le droit interne contient des dispositions obligeant l’État partie à accorder une protection diplomatique à ceux de ses ressortissants qui se trouveraient dans un autre pays et y subiraient des traitements inhumains ou dégradants, comme les femmes victimes de la traite à des fins de prostitution, ou des actes de torture.

60. M. Mavrommatis (Président) reprend la présidence.

61.Le PRÉSIDENT note, à la lecture du paragraphe 109 des réponses écrites, que l’article 190 du nouveau Code de procédure pénale prévoit que la contrainte ou la menace peuvent être des motifs d’exonération de la responsabilité pénale lorsque l’auteur de l’infraction a été poussé à l’acte pour ces raisons. Il souhaiterait savoir si cet article pourrait être invoqué dans le cas où un agent de l’État aurait commis des actes de torture sous l’effet de pressions exercées par un supérieur hiérarchique. En conclusion, le Président remercie la délégation hongroise et l’invite à revenir à une séance ultérieure pour répondre aux questions du Comité.

62. La délégation hongroise se retire.

La séance est levée à 12 h 45.

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