NATIONS UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/SR.73922 novembre 2006

Original : ANGLAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

Trente-septième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA PREMIÈRE PARTIE (PUBLIQUE)* DE LA 739e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,

le mercredi 15 novembre 2006, à 15 heures

Président : M. MAVROMMATIS

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN VERTU DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (suite)

Rapport initial de l’Afrique du Sud (suite)

La séance est ouverte à 15 h 05

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L'ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (suite)

Rapport initial de l’Afrique du Sud (suite) (CAT/C/52/Add.3; HRI/CORE/1/Add. 92)

À l’invitation du Président, les membres de la délégation de l'Afrique du Sud prennent place à la table du Comité.

M. NQAKULA (Afrique du Sud) dit que les réponses de sa délégation aux questions soulevées par le Comité à propos du rapport périodique initial de l’Afrique du Sud (CAT/C/52/Add.3) comprennent deux parties : un exposé général et des réponses écrites détaillées (document sans symbole distribué dans la salle de réunion).

L’Afrique du Sud a fondé son éthique des droits de l’homme sur le préambule de sa Constitution et sur les déclarations fondamentales faites par Nelson Mandela, premier Président de la République démocratique d’Afrique du Sud, et par son successeur Thabo Mbeki, préambule dont il fait la lecture. Ces déclarations trouvent leur essence dans le dynamisme montré par les Sud-africains pour la poursuite des idéaux défendus par la Constitution, ainsi que dans leur dévouement en faveur de la démocratie.

Les commentaires du Comité concernant la définition de la torture ont bien été entendus. Une définition appropriée sera ajoutée dans la proposition de loi sur la criminalisation de la torture, laquelle est en cours de discussion et sera diffusée parmi les organisations de la société civile pour la soumettre à leur avis.

La Commission Vérité et réconciliation (TRC) a été créée en vue de traiter les atrocités commises par le gouvernement précédent. Son objectif n’est pas de court-circuiter les principes internationaux de lutte contre les violations flagrantes des droits de l’homme, en particulier la commission contre la torture et l’impunité. Son Gouvernement a suivi les recommandations de la TRC en ce qui concerne les amnisties et réparations à accorder. Dans son discours à l’occasion de la fin de la TRC en 1999, le Président de l’Afrique du Sud a évoqué la nécessité de création d’un mécanisme chargé des cas particuliers. La National Prosecuting Authority (authorité nationale de répression) est en train de créer un organe destiné aux cas des personnes n’ayant pas bénéficié d’une amnistie, ou ne s’étant pas présentées auprès de la TRC pour déclarer les atrocités qu’elles avaient commises, ceci afin de permettre d’éventuelles poursuites judiciaires. Pour ce qui est des réparations, près de 90 % des 180 000 victimes ont obtenu une compensation de 30 000 Rand. Pour les 650 cas restants, le problème est que les victimes sont soit introuvables, soit décédées. Une campagne de sensibilisation va être menée pour retrouver les victimes et leur famille afin de pouvoir leur octroyer une compensation.

Une nouvelle législation relative à l’extradition va être adoptée, mais il a préféré ne pas s'avancer quant à ses effets.

La Constitution prévaut sur toutes les autres lois du pays. Toute règle de droit coutumier ou écrit entrant en contradiction avec la Constitution est jugée invalide. Ce principe s’applique également au droit international coutumier. Dans la section 231 (4), il a été prévu que tout accord international aurait force de loi dès qu’il serait arrêté dans la législation nationale. C’est ainsi que la Convention contre la torture a été incluse dans la législation interne et a pu traiter des cas tels que les peines de torture.

La Constitution reconnaît trois niveaux au sein du gouvernement : le gouvernement national, provincial et local. La section 212 de la Constitution permet aux autorités traditionnelles conformes au système de droit coutumier d’exercer leurs fonctions par rapport à n’importe quelle législation ou coutume applicable. De plus, les juges de droit commun ont le droit d’appliquer le droit coutumier soumis à la Constitution, ainsi que toute loi relative au droit coutumier. Lorsque certains aspects de ce droit coutumier s'avèrent contradictoires par rapport à la Constitution, des lois sont adoptées afin de corriger les anomalies. Ce fut le cas, par exemple, de la loi sur la reconnaissance juridique des mariages coutumiers de 1988, laquelle plaçait l’homme et la femme sur un pied d’égalité et garantissait la propriété commune dans le cadre du régime matrimonial.

Les procédures d’obéissance et de recours permettant aux subordonnés de s’opposer à des ordres impliquant des actes de torture sont décrites dans la Bill of Rights (Déclaration des droits) de la Constitution, dans loi sur la défense et dans la loi sur les procédures pénales. Toute forme de torture est illégale et en contradiction par rapport aux Conventions de Genève de 1949, dont l’Afrique du Sud est un État partie. Par conséquent, la législation nationale décourage les ordres illégaux des commandants, et M. Nqakula présume que si de tels ordres étaient donnés malgré tout, les subordonnés se tourneraient vers les autorités supérieures.

Des questions ont été posées à propos d'inconduites sexuelles de la part de membres de la SANDF (force de défense nationale d’Afrique du Sud) envoyés pour des opérations de maintien de la paix dans d’autres États africains. Le Ministère de la défense a demandé l’aide des Nations Unies pour identifier les présumés coupables afin de pouvoir entamer des poursuites. Cette information n’est pas encore publique, mais trois procès sont déjà en cours, impliquant des soldats de la SANDF envoyés au Burundi et en République démocratique du Congo.

La Independent Complaints Directorate (ICD, Direction des plaintes individuelles) a été créée sur la base d'une disposition constitutionnelle. Personne n’interfère avec le travail de l’ICD. Bien qu’elle ait rencontré, au sein des forces de police, une certaine opposition à sa pérennité, l'ICD ne sera pas dissoute dans la mesure où son objectif est de renforcer la démocratie sud-africaine. Le budget de cet organe provient du parlement. L'ICD rapporte au parlement par l'intermédiaire du Ministre de la sûreté et de la sécurité. En ce qui concerne les autorités du pouvoir exécutif, il a répondu immédiatement aux remarques du Commissaire national du service de police sud-africain en déclarant que non seulement l’ICD continuerait à exister, mais qu’en outre elle bénéficierait de ressources humaines et matérielles supplémentaires pour l’aider dans sa mission. Les questions parlementaires sur le même sujet ont reçu une réponse similaire.

L’ICD a mené une enquête sur les événements qui se sont déroulés en août 2004 à Harrismith, et trois policiers ont étés accusés. Ils ont étés acquittés en grande partie sur la base de la remarque d’un pathologiste de la défense selon lequel le décès de la victime était dû à la négligence des médecins qui le soignaient.

L’ICD est également responsable de la mise en application de la loi sur la violence domestique, et fait un compte rendu à ce sujet tous les six mois auprès du parlement. Une observation plus stricte des dispositions de la loi doit être assurée.

Il existe de nombreuses lois pour lutter contre le crime organisé, le vigilantisme et les organisations paramilitaires, parmi lesquelles la loi sur la prévention du crime organisé et la loi sur l’assistance militaire à l'étranger. La loi interdit aux gens de faire appliquer la loi eux-mêmes.

Il réagit aux préoccupations concernant le trafic d’armes en expliquant qu’il y a eu une évolution importante depuis la promulgation de la loi sur le contrôle des armes à feu de 2002. À ce jour, près de 248 868 armes à feu ont été récupérées par les services de police sud-africains par le biais d'enquêtes, de confiscations et de dépôts volontaires. Vu le problème posé par le commerce illégal d'armes à feu sur le continent africain, l'Afrique du Sud a pris part à des programmes dans le but d'aider à découvrir et à détruire des armes à feu, comme par exemple au Mozambique et en République démocratique du Congo.

En raison de la prédominance de crimes graves et violents, en particulier les vols aggravés organisés, il existe maintenant des prisons de très haute sécurité parmi les infrastructures du système pénitentiaire sud-africain. Le crime organisé a traversé les frontières des États et les gangs de criminels en question sont extrêmement habiles et sophistiqués.

Sur 160 213 détenus dans les institutions pénales, 113 453 ont commis des crimes graves et violents, dont le viol et le meurtre, et certains d’entre eux sont coupables de crimes en série. Il y a eu des cas de détenus évadés puis arrêtés à nouveau. Parmi des exemples typiques, notons celui du délinquant récidiviste de 33 ans condamné à 30 ans de réclusion pour 16 détournements de voitures. En attendant le résultat de son appel, il s'est rendu coupable d’autres crimes plus graves et violents, et il s’est échappé pendant son procès pour ensuite être arrêté à nouveau. Il a été condamné à 30 ans de réclusion pour l'évasion et à 96 ans pour les crimes violents.

Entre les mois d’août et de novembre 2006, la police a procédé à des arrestations liées à 23 braquages de banques et à 193 attaques de transports de fonds, dont certains étaient liés à d’autres cas de crimes organisés aggravés. Entre les mois de juillet et d’octobre 2006, 1 192 suspects ont été appréhendés dans le cadre de 1 508 crimes graves et violents.

Les établissements pénitentiaires sud-africains font face à un gros problème de surpopulation, mettant la santé des détenus en danger et freinant leur réinsertion. La capacité approuvée est de 114 505 alors que le nombre de détenus s'élève actuellement à 160 213, dont 46 393 en attente de jugement et 113 820 condamnés. Le Justice Crime Prevention and Security Cluster (cellule agissant en faveur de la justice, de la prévention du crime et de la sécurité) a reçu ordre du Gouvernement de traiter la surpopulation en priorité. Pour ce faire, il a élaboré une stratégie et mis sur pied un comité spécial. La stratégie vise la réduction du nombre de détenus en attente de procès grâce à entre autres : des lois autorisant la libération sur caution et l'exécution de la peine hors des établissements pénitentiaires; des procédures pénales plus rapides; des améliorations du système de liberté conditionnelle; une meilleure mise à profit des procureurs et greffiers; la modernisation d'infrastructures existantes et la construction de nouvelles; la création de conditions économiques et sociales pour assurer la réinsertion d'anciens détenus et pour limiter les récidives.

Conformément à la loi sur les réfugiés de 1998, personne ne doit se voir refuser l'entrée du pays, ni être expulsé, extradé ou renvoyé vers n'importe quel pays, ni être exposé à aucune mesure similaire si en conséquence cette personne risque d’être persécutée à cause de ses appartenances ethniques, de sa religion, de sa nationalité ou de ses convictions politiques, ou encore si cela pourrait menacer sa vie, sa sécurité ou sa liberté. La mise au point d'un statut pour les réfugiés a accumulé beaucoup de retard, mais ce retard est presque rattrapé à présent. Selon la loi, les réfugiés ont le droit de rester en Afrique du Sud en attendant une décision quant à leur statut. Pendant cette période, ils bénéficient de la liberté de mouvement. Il n'y a pas de camps de réfugiés en Afrique du Sud. Les personnes arrêtées en vertu de la loi sur l'immigration et qui déclarent leur intention d'introduire une demande d'asile ou de statut de réfugié se voient octroyer un permis d'asile provisoire d'une durée de 14 jours, le temps d'introduire la demande. Interrogé sur le cas des immigrants et réfugiés zimbabwéens, il déclare qu'il n'existe aucune discrimination de nationalité.

À propos du cas de Khalid Mehmood Rashid, il déclare que ce citoyen pakistanais a été arrêté le 31 octobre 2005 par la police sud-africaine et les agents du Ministère de l'intérieur. M. Rashid a été expulsé vers le Pakistan dans le respect des dispositions de loi relatives aux droits du détenu. Durant sa détention, M. Rashid a reconnu avoir pénétré sur le territoire sud-africain de manière illégale. Il a également signé un document signifiant qu'il renonçait à son droit de recours prévu par la loi.

Le Ministère de l'intérieur est compétent pour les expulsions, tandis que l'extradition relève de la responsabilité du Ministère de la justice et du développement constitutionnel. Ce dernier aurait pu refuser l'extradition si celle-ci était jugée contraire à la bonne foi ou aux intérêts de la justice. Concernant l’expulsion, il attire l'attention du Comité sur le cas de Mohammed et consort contre le Président de la République d’Afrique du Sud et consorts, dans le cadre duquel la Cour constitutionnelle avait décrété qu'en extradant M. Mohammed vers les États-Unis, les fonctionnaires sud-africains avaient enfreint la loi sur le contrôle des étrangers de 1991, et plus spécifiquement son droit constitutionnel à la vie et à la dignité, ainsi que son droit à ne pas être soumis à une peine cruelle, inhumaine ou dégradante. La Cour avait déclaré que l'Afrique du Sud ne pouvait pas exposer une personne au risque d’exécution en la déportant ou en l'extradant, que cette personne soit consentante ou pas. Son gouvernement se consacre à l'amendement des lois concernées afin d'éviter de tels cas à l'avenir.

La Loi sur les services pénitentiaires a prescrit un code d'éthique et de conduite pour les fonctionnaires de l'administration pénitentiaire. Cette loi a pour but de contribuer à une société juste en faisant respecter les sentences et en garantissant une réclusion sûre aux détenus, tout en assurant la dignité humaine et en encourageant la responsabilité sociale et le développement personnel de tous les détenus. La loi se soucie également de la protection des droits des prisonniers et réglemente les fouilles, l'usage de la force, les armes à feu et la ségrégation. La violation de cette loi entraîne des poursuites judiciaires et disciplinaires.

En 2001, le Président a chargé la Commission Jali de mener une enquête sur des allégations de corruption, de violence et d'intimidation au sein du Département des services correctionnels. Le rapport de la Commission est en cours d'étude par le Président, de même que des plans d'action mis au point par le Département, afin de pouvoir appliquer les recommandations. Des recommandations intermédiaires ont déjà été appliquées, entraînant des poursuites judiciaires et disciplinaires contre des agents corrompus et criminels, lesquels ont étés renvoyés du Département. Une stratégie anti-corruption et une politique de dénonciation ont également été développées.

Selon les allégations d'une ONG, l'incident de la prison de St Alban était une tentative de la part du Département des services correctionnels d'interférer avec le droit de représentation légale des prisonniers soupçonnés d'être impliqués dans le meurtre d'un agent. Ce cas faisant l'objet d'une procédure au sein du tribunal civil, ainsi que d'une enquête interne au département, il n'est pas autorisé à en parler en public.

Conformément à la loi sur les services pénitentiaires, le Département des services correctionnels est tenu de prodiguer des soins de santé adéquats dans la mesure de ses possibilités. Chaque prisonnier a le droit d'être examiné par un médecin, et le Département emploie une équipe qualifiée d'infirmiers et de médecins. Si un détenu meurt et que le médecin est incapable de certifier qu'il s'agit d'une mort naturelle, le directeur de la prison est tenu par la loi de signaler le décès au Ministère de la santé afin de permettre une éventuelle autopsie ou une enquête. Il doit également informer la famille et le juge d'instruction. Ce dernier a alors la possibilité de mener ou d'ordonner une enquête.

Son gouvernement analyse actuellement la possibilité de fournir une infrastructure sûre aux détenus en attente de procès. Cinq groupes de travail différents ont étés créés pour développer les politiques, les procédures et les législations indispensables. Dans le respect du principe selon lequel une personne est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité soit démontrée, les prisonniers jugés coupables sont séparés de ceux qui n'ont pas encore été jugés.

Le PRÉSIDENT, parlant en tant que Rapporteur de pays, se réjouit de constater que certains problèmes pointés par le Comité sont déjà en cours de résolution au moyen de nouvelles lois ou de propositions. Concernant la définition de la torture, il insiste auprès de l'État partie pour qu'il se conforme à la définition de l'article premier de la Convention. Il demande la même chose en ce qui concerne la législation relative à l'expulsion, au refoulement et à l'extradition, ainsi que l'exigence décrite à l'article 3 paragraphe 1 de la Convention, laquelle est non susceptible à dérogation, même en état d'urgence.

Il est également satisfait d'entendre la délégation assurer que l'ICD bénéficiera de ressources supplémentaires pour continuer sa mission.

En ce qui concerne les événements de Harrismith, il est surpris qu'un verdict d'acquittement ait été prononcé plutôt qu'une sentence moins sévère. Il exprime ensuite son étonnement par rapport aux 96 ans de réclusion imposés au récidiviste. Peut-être le but était-il de souligner la gravité du crime commis.

Il demande si le Gouvernement sud-africain a mené une enquête pour savoir ce qu'il était advenu de M. Rashid après son expulsion. Le renvoi des agents corrompus du Département des services correctionnels est une conséquence positive du rapport Jali; il aimerait savoir si d'autres résultats ont été obtenus. Enfin, il demande si des poursuites judiciaires ou disciplinaires ont été engagées à la suite de l'incident de la prison de St Alban.

M. WANG Xuexian, Co-rapporteur de pays, insiste sur l'importance de la formation et de l'éducation pour la prévention de la torture. S'il a bien compris, les forces de l'ordre doivent uniquement déclarer les décès survenus au cours de la garde à vue auprès de l'ICD, en vue d'une enquête. Il suggère qu'un rapport soit également exigé pour toutes les allégations de mauvais traitements. Au vu de l'importance du contrôle et de la surveillance dans le cadre de la prévention des actes criminels en détention, il conseille la création d'un mécanisme indépendant de surveillance pour établir des rapports sur toutes les personnes, y compris les enfants, séjournant dans des centres de détention, des institutions psychiatriques ou des hôpitaux. Un mécanisme similaire pourrait également être mis en place dans les centres pour immigrants illégaux.

Il est nécessaire d'organiser une formation et une sensibilisation au châtiment corporel dans toutes les écoles. Il se demande si la loi sur l'enfance de 2005 pourrait être amendée pour y ajouter des dispositions relatives au châtiment corporel à l'école.

M. MARIÑO MENÉNDEZ dit qu'il aimerait obtenir des informations sur toute l’aide légale apportée par l'État aux détenus dont les moyens sont insuffisants, ainsi qu'aux victimes souhaitant entamer des poursuites judiciaires pour des cas de torture. Dans la même optique, quelle assistance légale est fournie aux minorités ethniques, compte tenu des différentes langues parlées par ces minorités ?

Mme SVEAASS demande si les allégations de violence, y compris de violence sexuelle, faites dans le cadre des missions sud-africaines de maintien de la paix ont fait l'objet d'une enquête de l'ICD. Si oui, comment s'est déroulée cette enquête? Elle voudrait savoir de quelle manière sont traités les cas des personnes accusées de plusieurs viols, au vu de l'incidence extrêmement élevée de ce crime. Elle serait également intéressée d'en apprendre plus sur la législation appliquée pour l'octroi des amnisties.

Mme BELMIR voudrait obtenir des éclaircissements quant à l'organe responsable de l'élaboration de la politique de la criminalité en Afrique du Sud, faisant surtout référence au rapport initial dans lequel est évoquée l'élaboration de la « politique relative à la prévention de la torture et au traitement des personnes maintenues en garde à vue par la police sud-africaine ». Elle demande une réaction par rapport à la contradiction de cette situation dans la mesure où les services de police développent la politique qu'ils ont justement été accusés d'enfreindre. Elle souhaite aussi un commentaire par rapport aux périodes parfois longues de détention provisoire dans les commissariats.

M. CAMARA se dit préoccupé par la sentence de 30 et 96 ans de réclusion consécutifs imposée à un homme de 33 ans, laquelle entre en contradiction avec les objectifs mis en avant par la délégation, c'est-à-dire la réhabilitation des personnes inculpées. Cette pratique devrait s'aligner sur les systèmes de justice pénale modernes, dans lesquels les juges peuvent préciser la durée minimale à purger dans le cadre d'une condamnation à perpétuité, par exemple 30 ans. De cette manière, l'État partie respecterait les obligations décrites à l'article 16 de la Convention, et offrirait en même temps une possibilité de réhabilitation au condamné.

M. GALLEGOS CHIRIBOGA attire l'attention sur le fait que la législation doit fournir des résultats tangibles. Les droits garantis par la loi doivent également pouvoir être revendiqués dans la pratique, et il faut effectivement imposer des sanctions afin de montrer qu'il n'y a pas d'impunité.

La discussion et la sensibilisation par rapport à tous les aspects des réformes législatives en Afrique du Sud - en particulier le message signifiant que la torture et autres traitements inhumains ne seront plus tolérés et que l'impunité ne sera plus accordée - revêt une importance nationale et internationale. Ceci doit également être appliqué aux troupes sud-africaines envoyées en mission de maintien de la paix, comme par exemple en République démocratique du Congo : les abus sexuels commis par des soldats ou des personnes sous leur protection ne peuvent pas être tolérés.

M. GROSSMAN demande quelles ont été les suites du cas de M. Rashid Khalid, expulsé au Pakistan. Le gouvernement sait-il ce qu'il lui est arrivé au Pakistan, s'il a reçu la visite de représentants diplomatiques, et quelle est sa situation actuelle? Le principe de non-refoulement doit être appliqué à tous, y compris aux résidents illégaux.

M. NQAKULA (Afrique du Sud) dit que M. Rashid Khalid a été visité au Pakistan, entre autres par des agents du Ministère de la sûreté et de la sécurité. À sa connaissance, M. Khalid se trouve toujours au Pakistan.

Les mesures nécessaires vont être prises pour inclure la définition de la torture, telle qu'elle se trouve dans la Convention, dans la législation sud-africaine. Les problèmes liés à l’expulsion et les autres questions relatives aux immigrants illégaux vont aussi être étudiés.

Le Gouvernement travaille actuellement sur une stratégie visant à améliorer le contrôle des ministères en termes de sécurité, stratégie qui impliquerait la création d'une structure de contrôle général dont les compétences dépasseraient celles de l'ICD.

Il fera le compte rendu de ses discussions avec le Comité auprès des autorités judiciaires et gouvernementales compétentes afin d'appliquer certaines recommandations du Comité et d’élaborer les propositions de lois nécessaires.

En raison de la séparation du pouvoir judiciaire et exécutif, le Gouvernement n'a joué aucun rôle dans le résultat fâcheux de l’affaire Harrismith. Il reconnaît qu'une préparation lacunaire du dossier judiciaire peut parfois aboutir à des jugements inappropriés.

Il fournira des détails supplémentaires sur l'homme de 33 ans condamné à de longues peines de prison consécutives. La réhabilitation des prisonniers ainsi que la prévention de la récidive sont des préoccupations importantes.

Il existe des « soupapes de sécurité » dans le système correctionnel sud-africain, comme par exemple le recours à des comités de probation et d'aide aux libérés et la possibilité de libération anticipée. Cependant, les crimes violents tels que le meurtre sont jugés très sévèrement.

À ce jour, le Gouvernement n'a pas pu obtenir d'informations à propos de M. Mohammed à la suite de son expulsion aux États-Unis (voir paragraphe 22). Les recherches seront poursuivies afin d'établir ce qu'il est advenu de lui, et le Comité sera tenu informé des résultats.

Bien que le châtiment corporel ne soit pas très répandu dans les écoles, il reconnaît qu'il puisse exister dans certaines institutions. Des cas d'agression d'élèves par des enseignants ont étés enregistrés auprès des administrations répressives compétentes. Il s'intéressera plus étroitement au problème.

L'ICD n'est pas responsable de l'enquête sur les allégations d'inconduite des forces armées, y compris les troupes de maintien de la paix à l'étranger. Cette tâche incombera à la structure de contrôle général mentionnée précédemment. D'ici là, le Ministère de la défense étudie les questions posées et prend les mesures appropriées.

Le viol multiple est puni très sévèrement en Afrique du Sud. Il explique qu'aucune nouvelle loi ne sera adoptée en ce qui concerne l'octroi d'amnisties, et décrit le processus relatif à l'octroi des amnisties appliqué depuis l'abolition de la Commission d'amnistie. À ce sujet, si un juge considère que la personne accusée d'actes violents a révélé l'entièreté de ses crimes, cette personne peut être relâchée. Cependant, les familles des victimes ont le droit d'intenter un procès contre l'auteur des crimes.

La politique en matière de criminalité fait partie de la législation sud-africaine. Les services de police sud-africains ne sont aucunement responsables de l’élaboration de cette politique, mais bien des règles de conduite destinées aux officiers de police lorsqu'ils font respecter la loi.

Il reconnaît que les longues périodes de détention préventive dans des cellules de police sont préoccupantes. Ce problème est en cours d'étude. La possibilité de créer des installations alternatives pour la détention préventive est également envisagée.

Mme SISHUBA (Afrique du Sud) dit que la Commission d'enquête Jali a été créée en 2001 pour enquêter sur le Département des services correctionnels. Son rapport contenait un certain nombre de recommandations pour des réformes de politiques, et plusieurs recommandations intermédiaires ont déjà été appliquées. La Commission a particulièrement identifié de la corruption dans les processus de recrutement. Une nouvelle législation approuvée par le Cabinet en février 2005 a pris ces recommandations en compte et une nouvelle stratégie a été adoptée pour la gestion des ressources humaines. Les origines de la corruption ont été déterminées, le recrutement a été sous-traité et les formations ont réellement commencé. Tous les responsables de services pénitentiaires reçoivent maintenant une formation portant sur l'éthique et sur les moyens de combattre la corruption. Le Département a également corrigé son code de conduite ainsi que son code disciplinaire. Une équipe d'enquête a été mise sur pied et une politique de dénonciation a été lancée afin de détecter et de sanctionner les cas de corruption.

La Commission a également recommandé que tous les prisonniers aient accès à des soins de santé et soient examinés dès leur admission afin d'identifier tout besoin médical spécifique et de détecter toute blessure. Cette recommandation a été appliquée dans la limite des ressources disponibles. Le Ministère de la santé a mis son équipe médicale à disposition et le Département des services correctionnels a engagé une équipe d'infirmiers à plein temps.

Une nouvelle loi, adoptée à la suite d’une autre recommandation de la Commission, exige que tous les prisonniers reçoivent trois repas complets par jour. L'application de cette loi est facile pour les prisons plus petites, mais des stratégies spéciales sont nécessaires pour les grandes, à cause de la surpopulation et des ressources limitées. Le recrutement de gardiens de prison a augmenté et leur formation de base a été étendue et intensifiée.

On soupçonne que le meurtre du gardien de la prison St Alban soit lié à un gang. Une procédure civile et une enquête ministérielle sont en cours.

Mme MTIMKULU (Afrique du Sud) dit qu’à la suite d’une évaluation de la formation sur les droits de l'homme destinée aux agents de police sud-africains, un nouveau manuel a été élaboré, expliquant entre autres la manière de traiter les personnes placées en détention provisoire. Tous les officiers de police du pays, quelle que soit leur ancienneté, reçoivent maintenant une formation sur les droits de l'homme incluant les obligations de l'État qui découlent de la Convention contre la torture. Naturellement, la formation et la sensibilisation sont des processus en cours.

M. XINWA (Afrique du Sud) dit que la loi d'aide judiciaire de 1969 avait créé le Conseil d'aide judiciaire. En théorie, le système d'aide judiciaire national est accessible à toute personne estimant qu'elle ne bénéficiera pas d'un procès équitable à moins d'avoir un avocat, ou si la sentence est susceptible de dépasser 3 ans d'emprisonnement. Les personnes indigentes sont subordonnées à un contrôle de ressources, et les plus pauvres d'entre elles sont qualifiées automatiquement pour l'aide judiciaire. Cependant, des contraintes financières excluent une portée universelle. Son gouvernement affronte un triple défi : moderniser le Conseil d'aide judiciaire afin de pouvoir répondre aux besoins actuels; rendre l'aide judiciaire possible; pousser la sensibilisation aux droits de l'homme parmi les plus vulnérables, y compris les personnes les plus pauvres.

L'Afrique du Sud compte 11 langues officielles et chacun a droit à un service d'interprétation dans le cadre du tribunal, conformément aux valeurs égalitaires consacrées dans la Constitution.

M. MAKHUBELA (Afrique du Sud), en réponse à la question à propos de l'ICD, dit que selon la législation existante, la Direction est tenue d'étudier toutes les plaintes formulées par le public et liées à des décès survenus durant une garde à vue ou à la suite d’une intervention de police. Récemment, il a également reçu des plaintes contre des membres des services de sûreté et de sécurité municipaux. Des plaintes sont également formulées par le Ministre de la sûreté et de la sécurité et par les membres du conseil exécutif responsable de la sûreté et de la sécurité dans les provinces. L'ICD quant à elle peut enquêter sur des allégations d'actions policières illégales de sa propre initiative. Le Président de la République a ordonné récemment à l'ICD d'étudier des plaintes concernant des membres de la Direction des opérations spéciales, connus sous le nom de « Scorpions ». La plupart des actions de la Direction sont menées dans les provinces, mais une toute petite équipe anti-corruption s'est également chargée des bureaux centraux à Pretoria afin d'enquêter sur des accusations de corruption de la police.

Le PRÉSIDENT remercie la délégation pour son étroite collaboration et son dialogue productif avec le Comité.

La partie publique de la séance prend fin à 16 h 40.

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