NATIONS UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/SR.7933 décembre 2007

Original: ANGLAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

Trente-neuvièmesession

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA PREMIÈRE PARTIE (PUBLIQUE)*DE LA 793e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mercredi 13 novembre 2007, à 10 heures

Président: M. MAVROMMATIS

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES ENAPPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (suite)

Quatrième rapport périodique de l’Estonie

La séance est ouverte à 10 h 5.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (suite)

Quatrième rapport périodique de l’Estonie (CAT/C/80/Add.1; CAT/C/EST/Q/4 et Add.1; HRI/CORE/1/Add.50/Rev.1)

1.Sur l’invitation du Président, les membres de la délégation d e l’ Estonie prennent place à la table du Comité.

2.MmeLEPIKVONWIREN (Estonie), mettant à jour les informations fournies dans le quatrième rapport périodique de son pays (CAT/C/80/Add.1), précise que plusieurs amendements ont été apportés au Code de procédure pénale afin d’accélérer les procédures pénales et de réduire la population carcérale. Le nombre de détenus a baissé, passant de 4 800 en 2001 à quelque 3 600 en 2007. Grâce aux amendements, d’autres mécanismes procéduraux sont davantage utilisés, qu’il s’agisse du règlement, des procédures sommaires et des procédures accélérées, au même titre que des solutions techniques telles que la surveillance électronique des prisonniers placés en liberté surveillée et soumis à une mesure d’assignation à résidence. Ces procédures alternatives ont accéléré les procédures pénales, en les rendant par ailleurs plus efficaces et moins importunes à l’égard des droits des personnes. Elles comptent actuellement pour 42 % de toutes les procédures pénales.

3.Le nombre de prisons en Estonie a été réduit de neuf à six, en raison de mesures d’amélioration des conditions d’emprisonnement. Certaines prisons ont été fermées ou le seront et d’autres seront fusionnées. De nouveaux établissements pénitentiaires sont par ailleurs en cours de construction. Toutes les prisons disposeront d’installations éducatives. L’ouverture de nouvelles prisons permettra de fermer certains centres de détention. Plusieurs centres de détention ont fait l’objet de travaux de rénovation.

4.Des progrès significatifs ont également été accomplis dans la prévention de la traite des êtres humains depuis 2002. S’il est difficile de mesurer l’étendue du problème, certaines estimations indiquent qu’il est moins important depuis la fin des années 1990. Un article spécifique introduit dans le Code pénal criminalise l’aide à la prostitution et facilite la tâche des forces de l’ordre. Plusieurs campagnes de sensibilisation ont par ailleurs été mises sur pied, dont celle contre la traite des femmes de 2002-2003 dans les pays nordiques et baltes, ainsi que celle organisée conjointement par le CICR et l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) axée sur la traite des jeunes. Plusieurs séminaires de formation sur la traite des êtres humains et la prostitution réservés aux officiers de police et aux gardes-frontières ont été organisés par l’OIM, dont certains en collaboration avec le Centre estonien d’études et de ressources sur les femmes. Le Ministère des affaires sociales et diverses ONG ont proposé des formations à des spécialistes de l’aide aux victimes, des assistants sociaux, des enseignants, des spécialistes de la jeunesse et des fonctionnaires de police chevronnés. Une permanence téléphonique financée par le Ministère a été lancée en 2004 afin de contribuer à la prévention de la traite des êtres humains et apporter une aide aux victimes. L’une des principales réalisations dans ce domaine a été l’adoption par le Gouvernement en 2006 d’un plan d’action de lutte contre la traite des êtres humains. Ce plan stipule des objectifs stratégiques et détermine les principales mesures et activités à entreprendre pour 2006-2009. L’Estonie est également partie prenante à plusieurs projets de l’Union européenne de lutte contre la traite des êtres humains.

5.Bien que deux projets de recherche quantitatifs majeurs sur la prévalence, les causes et conséquences de la violence domestique en Estonie aient été réalisés, d’autres études s’imposent. Le premier centre d’accueil pour les femmes victimes de violence domestique a ouvert ses portes en 2002. De plus, quatre ONG ont offert un abri et prodigué des conseils. Des centres pour les mères et les enfants sont également disponibles. Néanmoins, il est nécessaire d’augmenter le nombre de centres dans certaines régions. Une vaste campagne publique contre la violence domestique a été lancée en 2005 et des directives sur le traitement du problème soumises aux travailleurs de la santé. Son Gouvernement est en train d’élaborer un plan d’action de lutte contre la violence domestique qui entrera en vigueur en 2008. Depuis janvier 2006, les tribunaux sont habilités à appliquer des ordonnances restrictives de maximum trois ans au titre du Code de procédure pénale. Depuis juillet 2006, ce dernier autorise les tribunaux à interdire temporairement aux accusés de visiter des lieux spécifiques, voire de s’associer ou de communiquer avec certaines personnes.

6.Une nouvelle stratégie et un nouveau plan d’action de lutte contre l’épidémie du VIH/SIDA ont été élaborés pour 2006-2015. La stratégie garantit l’implication d’un plus grand nombre d’agences gouvernementales et d’organismes du secteur privé ainsi que de la société civile que par le passé. Un organisme plurisectoriel de haut niveau a conseillé le Gouvernement et veillé à une coordination centralisée de la mise en œuvre de la stratégie. Cette dernière repose sur des mesures de prévention des infections de la population en général, des personnes impliquées dans le milieu de la prostitution, des usagers de drogues par injection et d’autres groupes vulnérables; elle s’attache en outre à prévenir la transmission mère-enfant. Des services de soutien et des soins de santé sont mis à disposition des personnes déjà infectées et une thérapie antirétrovirale est offerte gratuitement au besoin.

7.MmeSVEAASS, Rapporteuse de pays, salue l’État partie pour ses réalisations majeures dans les domaines de la protection des droits de l’homme en général et de la prévention de la torture en particulier. S’agissant de l’article premier de la Convention, elle demande de préciser quelles sont les affaires visées au paragraphe 4 des réponses écrites (CAT/C/EST/Q/4/Add.1) qui relèvent ou non de l’article 122 du Code pénal. La délégation devrait également commenter la déclaration reprise dans ce paragraphe précisant que «tous les aspects de la torture sont couverts et par conséquent la différence de définition n’est pas un obstacle à la poursuite des personnes au sens de l’article premier de la Convention». Elle aimerait savoir si le Gouvernement a l’intention d’intégrer la définition de la torture proposée à l’article premier dans la législation nationale. Elle demande en outre si cette dernière reprend toutes les dispositions de la Convention et si la Convention peut être directement invoquée devant les tribunaux de l’État partie. La délégation doit préciser le rôle de la Convention au sein du système de tribunaux et si une sanction spéciale est déjà infligée pour la torture. Les actes de discrimination pouvant faire partie intégrante de la torture, elle aimerait connaître le traitement que le système juridique national réserve à de tels actes. Le Comité souhaite des précisions sur les dispositions actuelles et les modifications qui seront éventuellement apportées au Code pénal pour le mettre en conformité avec la Convention.

8.Quant à l’article 2 de la Convention, elle requiert un complément d’information sur le rôle du Chancelier de justice, faisant office de médiateur. Elle veut savoir de quelle manière l’État partie garantit l’indépendance à cet égard et comment ledit Chancelier coopère avec la société civile. Il serait utile de savoir si l’État partie dispose actuellement d’une institution nationale des droits de l’homme et, dans ce cas, si celle-ci respecte les Principes de Paris. Elle s’interroge sur les mesures qui seront prises pour pallier l’absence dans le Code de procédure pénale de toute référence explicite au droit des personnes privées de leur liberté de signaler leur détention à une tierce partie. À quelle fréquence et dans quelles circonstances les détenus sont-ils privés de leur droit de disposer d’un avocat et de consulter un médecin de leur choix? Elle souhaite disposer d’informations actualisées sur la période de détention maximale dans les centres de détention et demande si les détenus subissent un examen médical à leur arrivée, les mécanismes d’examen des plaintes disponibles ainsi que le mode de surveillance des centres de détention. La délégation devrait apporter un complément d’information sur la brutalité policière dont il a été fait état à Tõnismägi (Tallinn), entre le 26 et le 29 avril 2007. Des poursuites ont-elles été engagées dans le sillage de ces événements? La délégation doit préciser si la traite des êtres humains est un délit spécifique et doit fournir des détails sur le plan d’action national de lutte contre ce délit. Elle s’interroge sur la raison pour laquelle des immigrants clandestins au sein de l’État partie n’ont pas demandé l’asile et pourquoi ils ont été enfermés dans des centres de détention pendant plus de trois mois en moyenne.

9.S’agissant de l’article 3, elle aimerait savoir de quels pays les 36 demandeurs d’asile enregistrés depuis 2004 sont originaires et ce qu’il est advenu de leur demande. Elle cherche en outre à savoir si le rejet de demandes d’asile et les arrêtés d’expulsion peuvent être contestés devant un tribunal administratif dans un délai de 10 jours dans le cadre de procédures accélérées. Le Comité apprécierait des données complémentaires sur les assurances diplomatiques, les mineurs non accompagnés et les transfèrements extrajudiciaires.

10.À propos de l’article 4, elle souhaite des précisions sur la durée des peines infligées pour le délit de torture, auquel il est fait référence dans la réponse à la question 10 de la liste des points à traiter.

11.Quant aux articles 5 à 9, elle s’enquiert de l’issue des trois demandes d’extradition de 2003 et 2004 encore en attente, ainsi que le suggère le tableau repris au paragraphe 11 du rapport. Il serait bon de savoir sur la base de quels motifs ces demandes ont été faites. Il serait en outre utile de disposer d’informations actualisées sur les demandes d’extradition ultérieures. Enfin, elle veut connaître les alternatives habituelles à l’emprisonnement dans le cas de mineurs en situation de conflit avec la loi ayant atteint l’âge de la responsabilité criminelle.

12.M.KOVALEV, Corapporteur de pays, précise que la loi sur l’aide aux victimes compte parmi les points positifs mentionnés dans le quatrième rapport périodique de l’Estonie (CAT/C/80/Add.1). Au titre du paragraphe 77 du rapport, toute détention d’un ressortissant estonien à l’étranger doit être immédiatement signalée aux autorités consulaires estoniennes. Qui est tenu de fournir une assistance consulaire lorsque le détenu fait partie des 30 % d’Estoniens apatrides?

13.En 2004, quelque 41 000 femmes en Estonie ont été victimes de violences physiques. Quel pourcentage de ces incidents concerne les apatrides? Quelles mesures le Gouvernement a-t-il prises afin de mettre en œuvre les dispositions de la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie à travers une diminution du nombre d’apatrides ne jouissant pas du statut de minorité nationale au titre de la législation estonienne? Qu’est-ce qui a été fait pour implémenter la recommandation du Comité des droits de l’enfant prônant une réduction du nombre d’enfants apatrides ainsi qu’une baisse de la discrimination à leur égard?

14.Quant aux dispositions de la Convention contre la torture, il note les dispositions du nouveau Code pénal estonien en faveur d’une compétence universelle pour les crimes couverts par le Statut de Rome de la Cour pénale internationale. De quelle manière ces dispositions sont-elles interprétées dans la pratique et comment l’Estonie applique-t-elle son droit pénal dans les cas d’actes de torture perpétrés en dehors de l’Estonie?

15.S’agissant de l’article 10 de la Convention, la prohibition de la torture est-elle un thème de la formation du personnel médical soignant les détenus, ou ce sujet n’est-il enseigné qu’aux organismes chargés de faire appliquer la loi? Existe-t-il une formation sur les moyens d’identification des cas de torture, de cruauté ou d’autres traitements inhumains, dont la violence sexuelle? Une formation est-elle dispensée sur la mise en œuvre de la Convention d’Istanbul et à qui incombe l’évaluation de ladite formation?

16.En ce qui concerne les conditions de détention, les réponses écrites du Gouvernement (CAT/C/EST/Q/4/Add.1, par. 45) évoquent 52 poursuites engagées pour maltraitance physique dans les prisons. Quelles sanctions ont été prises à l’encontre des responsables? De combien de mètres carrés d’espace vital jouit chaque prisonnier, sachant qu’il existe des normes européennes sur ce point? Quelles sont les sanctions administratives infligées en cas d’incapacité à prévenir la violence entre prisonniers; les prisonniers concernés sont-ils punis dans de tels cas?

17.Comment le droit à une enquête rapide et impartiale sur des allégations faisant état de tortures au titre de l’article 122 du Code pénal est-il garanti, et plus particulièrement dans les 239 affaires ayant fait l’objet d’enquêtes en 2003 et 2004? Quelles autres allégations de traitement cruel dans des centres de détention ont fait l’objet d’enquêtes?

18.Les chiffres communiqués ne permettent pas de penser que le Gouvernement prend des mesures adéquates pour enquêter et éradiquer les crimes sexuels à l’encontre des mineurs, dont la prostitution. Il apprécierait un complément d’information sur ce point.

19.Le Chancelier de justice, faisant par ailleurs office de mécanisme de prévention national aux fins du Protocole facultatif à la Convention, est probablement le fonctionnaire vers lequel les plaignants prétendant avoir été victimes d’actes de torture doivent se tourner. Il ressort néanmoins des réponses écrites du Gouvernement (ibid., par. 74), que dans 1 043 cas sur 2 006, (plus de 65 % du total), le Chancelier n’a pas accepté les demandes de procédures en tant que médiateur, en majeure partie en raison d’un «manque de compétence». Cela n’a aucun sens puisque le mandat du Chancelier couvre les litiges entre particuliers ainsi qu’avec des organes publics. Il souhaiterait une explication.

20.Le nombre de cas d’indemnisation des victimes d’actes de torture est inférieur à celui des plaintes reçues. Quelles sont les mesures prises pour accorder une indemnisation aux victimes de violence domestique? Le problème est-il simplement ignoré ou est-il traité par la police, voire par d’autres biais? Il note que l’association d’assistance aux victimes «Ohvriabi» a émis des critiques au sujet de la loi sur l’aide aux victimes, estimant que le public n’était pas suffisamment informé du droit à une indemnisation ou à des services de conseil. Il demande des informations sur les règles régissant l’indemnisation des victimes en Estonie. Le droit à réparation des résidents étrangers temporaires, auquel le paragraphe 100 du document HRI/CORE/1/Add.50/Rev.1 fait référence, s’applique-t-il aux apatrides? Par ailleurs, ces derniers ont-ils droit à une indemnisation s’ils sont victimes de torture?

21.S’agissant de l’article 15 de la Convention, ces dernières années, des éléments de preuve ont-ils dans certains cas été jugés irrecevables pour avoir été obtenus par le biais de la torture? De quelle manière les juges traitent-ils les allégations de torture non fondées?

22.Le rapport ne fournit aucune information sur des institutions psychiatriques en Estonie. Combien d’institutions de ce type existe-t-il? Elle invite la délégation à décrire les conditions au sein de ces institutions et à préciser si les médecins et d’autres experts effectuent des visites régulières aux détenus?

23.M.GROSSMAN indique que sur la base des réponses écrites du Gouvernement (CAT/C/EST/Q/4/Add.1, par. 1), ceux qui infligent des souffrances mentales à des personnes dans «certains lieux de détention» peuvent être poursuivis. De quelles institutions s’agit-il, dans quelles circonstances la question d’une poursuite peut-elle se poser, et combien de poursuites ont été engagées? Quant à la définition de la torture, selon lui, la législation estonienne couvre des actes de traitement inhumain, la contrainte et la discrimination, mais pas les actes contre de tierces parties. Cela est-il exact et de tels cas se sont-ils présentés? Il est indiqué que la peine maximale pour des actes de torture est cinq ans d’emprisonnement. Qu’en est-il de cette sentence par rapport à d’autres peines pour des infractions graves au sein du système juridique national?

24.Le Code pénal estonien permet d’ignorer les informations d’une tierce partie si celles-ci mettent à mal une procédure pénale. La Cour interaméricaine des droits de l’homme a établi qu’une telle règle peut équivaloir à un traitement cruel infligé aux membres de la famille, étant ainsi laissés dans l’ignorance. Un cas de ce genre s’est-il présenté en Estonie?

25.L’examen médical des détenus à leur arrivée dans le centre de détention inclut-il un dépistage du VIH/SIDA? Quelles sont les mesures prises pour limiter la durée de la détention provisoire? Existe-t-il des chiffres sur les enquêtes et condamnations de trafiquants spécialisés dans la traite des êtres humains, voire sur ceux qui ont été indemnisés au titre de la loi sur l’aide aux victimes? En quoi le test de «nécessité raisonnable» s’applique à l’usage de la force et cette question fait-elle l’objet d’une jurisprudence? Fin 2005, il n’y a eu que 15 enquêtes sur un usage excessif de la force, les chances de poursuites effectives apparaissant par ailleurs faibles. Il est essentiel de disposer d’un système d’enquête indépendant sur les actions de la police.

26.Y-a-t-il eu des cas de «transfèrement extrajudiciaire» d’Estonie, et comment le principe de non-refoulement est-il appliqué? Y a-t-il des affaires en cours? En 2004, le pays comptait entre 5 000 et 10 000 individus sans papiers. Quelles sont les politiques en vigueur pour réduire ce nombre? Quelles mesures ont été prises pour appliquer les arrêts rendus par la Cour européenne des droits de l’homme dans les affaires Puhk c. Estonie,Mõtsnik c. Estonie et Tammer c. Estonie? L’exploitation sexuelle de quelque sorte que ce soit doit être érigée en infraction pénale, indépendamment de la réduction en esclavage et de l’enlèvement.

27.Est-il clair que le Code de procédure pénale interdit l’exploitation de confessions obtenues par la torture? Dans l’affirmative, quelle est la procédure respectée pour éliminer de tels éléments de preuve?

28.Il salue les mesures prises par l’Estonie visant à réduire la population carcérale. Ce pays envisage-t-il d’adhérer à la Convention sur la réduction des cas d’apatridie? À l’heure actuelle, la définition des minorités nationales ne tient pas compte des apatrides. S’agissant de la violence domestique, existe-t-il des chiffres quelconques sur le nombre de centres pour les femmes et les enfants victimes d’une telle violence?

29.M.MARIÑOMENÉNDEZ demande si, dans le cadre de la ratification du Protocole facultatif à la Convention, l’Estonie met en place un nouveau mécanisme autorisant des visites à des personnes incarcérées dans des lieux de détention.

30.Au titre du paragraphe 26 du rapport périodique, l’Estonie a ratifié le Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Toutefois, il est encore plus important d’inclure dans sa Constitution et son droit pénal une interdiction de la torture, laquelle ne figure pas dans le Statut de Rome.

31.Contrairement à ce qui est indiqué au paragraphe 73, la protection contre la torture garantie par la Convention européenne des droits de l’homme n’est pas meilleure que celle offerte par les articles 2 et 3 de la Convention. Il n’existe aucune rivalité entre les deux instruments mais il apprécierait une discussion sur ce point. Il s’interroge sur le concept de détention administrative auquel il est fait référence au paragraphe 89. Les tribunaux administratifs peuvent-ils ordonner la détention de demandeurs d’asile? Par ailleurs, un individu peut-il se plaindre de manquements de fonctionnaires ainsi que de leurs agissements, par exemple l’incapacité à prendre une décision dans un délai imparti?

32.Au titre du paragraphe 144, l’Estonie a appliqué des mesures nationales et internationales dans la lutte contre le terrorisme, mais le rapport ne fournit aucune précision sur le traitement réservé aux actes de terrorisme au titre du nouveau Code pénal. C’est un fait bien établi que les gouvernements se servent souvent de la menace de terrorisme en guise de prétexte pour certaines mesures. Existe-t-il un différend entre les défenseurs des droits de l’homme en Estonie et les services de sécurité sur la question du terrorisme? Il convient de garder à l’esprit que pour certains, la disparition forcée doit être considérée comme une forme de torture compte tenu de ses répercussions sur les proches des disparus.

33.Quant à la question 25 de la liste des points à traiter, il aimerait connaître les mécanismes de surveillance et les protections en vigueur en ce qui concerne le placement d’office dans des établissements psychiatriques. En rapport avec les paragraphes 7 et 12 des réponses écrites de l’État partie, il voudrait en outre connaître les mesures prises pour satisfaire à l’obligation d’enregistrer toutes les détentions et transferts – en particulier au sein de et entre les centres de détention. Il sollicite un complément d’information sur la réglementation spéciale régissant la collecte de preuves dans l’intérêt de la sécurité nationale dont il est fait état au paragraphe 65 (f) du rapport périodique.

34.Quant à la question des apatrides et des non-nationaux, en référence au paragraphe 183 du rapport, il demande le délai maximal de détention dans un centre d’expulsion, en particulier pour les ressortissants russes. Quel est le rôle précis de la Fondation pour l’intégration, les recommandations qu’elle peut formuler et sa valeur aux yeux des autorités estoniennes?

35.MmeBELMIR demande des clarifications sur la relation entre l’article 122 du Code pénal et la Convention contre la torture en ce qui concerne la définition de la torture. L’État partie a indiqué au paragraphe 73 de son rapport que l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme propose une définition encore plus large de l’interdiction de la torture que la Convention contre la torture, et en outre que l’indépendance des tribunaux et la protection des victimes d’actes de torture sont garanties en Estonie. Le paragraphe 149 du rapport stipule toutefois que la définition énoncée à l’article premier de la Convention contre la torture constitue une définition de la torture «seulement dans le cadre de cette Convention» et que l’État partie ne juge pas nécessaire de modifier la définition de la torture figurant à l’article 122 du Code pénal. Cela est source de confusion. Est-il exact que l’État partie se sent davantage lié par la Convention européenne des droits de l’homme étant donné que la définition de la torture est plus vaste que l’article premier de la Convention contre la torture ou juge-t-il plutôt que ledit article n’inclut pas tous les éléments figurant à l’article 122 du Code pénal?

36.À propos de l’administration de la justice, dont il est question à l’article 2 de la Convention, elle demande un complément d’information sur le rôle du parquet en ce qui concerne les informations fournies par l’État partie selon lesquelles l’abandon des poursuites par le parquet donne lieu à une relaxe, le tribunal n’ayant pas le droit de maintenir les poursuites à sa propre discrétion. La décision du parquet est-elle définitive dans de tels cas ou un recours est-il possible? Dans l’affirmative, de quelle manière?

37.Conformément au paragraphe 65 alinéa d, une personne peut être maintenue en détention provisoire plus de six mois sur demande du Procureur général. Elle aimerait connaître la période de prolongation maximale, les garanties fournies pour protéger la personne en question et le contrôle judiciaire sur cette décision.

38.Elle demande si la discrimination peut être l’une des raisons expliquant la forte proportion de citoyens et d’apatrides non estoniens parmi les détenus et les prisonniers condamnés (par. 191, 193 et 194 du rapport) ainsi que les droits et la protection qui leur sont conférés.

39.Elle demande si une stratégie générale de lutte contre la violence contre les femmes impliquant les organismes d’État pertinents a été élaborée. Dans l’affirmative, elle apprécierait des détails.

40.Divers organes conventionnels des Nations Unies se sont dits préoccupés par la violence policière en Estonie. Une telle violence est-elle subjective et trouve-t-elle ses racines dans la discrimination? Elle rappelle que l’État partie a été invité à réviser sa loi sur les armes et demande à cet égard s’il a élaboré une stratégie de lutte contre la maltraitance d’enfants, dont des mesures de prévention des châtiments corporels. Elle note que l’âge de la responsabilité criminelle est fixé à 14 ans, ce qui n’est pas conforme aux dispositions de la Convention relative aux droits de l’enfant.

41.MmeGAER rappelle que, dans ses observations finales de 2002 (CAT/C/CR/29/5), le Comité a recommandé une étroite surveillance de la violence entre prisonniers. L’incident survenu dans la prison de Murru ayant entraîné le meurtre de deux détenus par d’autres prisonniers l’a donc inquiétée. Elle demande si l’enquête pénale lancée pour examiner l’éventualité d’une négligence de la part des personnels pénitentiaires est terminée et, dans le cas contraire, où elle en est. Elle apprécierait tout commentaire par l’État partie sur l’incident et l’enquête, ainsi que sur toute mesure prise dans le domaine de la violence entre prisonniers.

42.Dans les mêmes observations finales, le Comité a recommandé à l’État partie «de procéder à une étude approfondie des raisons pour lesquelles les personnes de nationalité russe et les apatrides sont surreprésentés dans la population des détenus condamnés et d’établir un rapport à ce sujet». Selon le paragraphe 192 du rapport périodique, aucune étude globale n’a été réalisée pour analyser la question. Le même paragraphe fournit des statistiques sur la criminalité générale qui indiquent une forte proportion de Russes et d’Estoniens en 2001, mais en 2004, le pourcentage a changé. Elle demande si les méthodes utilisées pour la collecte des statistiques ont été modifiées et si l’État partie continue à prendre note de la nationalité des citoyens russes. Elle apprécierait tout commentaire sur la raison de l’augmentation du nombre de ressortissants estoniens parmi la population de détenus condamnés.

43.Au paragraphe 193 du rapport, l’État partie affirme qu’il n’est pas exact d’affirmer que les citoyens russes et les apatrides constituent la majorité des détenus condamnés mais reconnaît néanmoins qu’ils sont très nombreux. Il précise que la recommandation du Comité sur la question – en d’autres termes, celle datant de 2002 - constituerait un sujet de recherche intéressant. Elle se demande si l’État partie peut fournir un complément d’information sur les droits des apatrides et des prisonniers apatrides. Une étude a-t-elle cherché à établir le profil de ces apatrides? Bien qu’ils puissent provenir de n’importe quelle ancienne république de l’Union soviétique, ils pourraient compter des personnes ne demandant pas la citoyenneté.

44.Elle note que comme indiqué au paragraphe 105 des réponses écrites, «les apatrides» sont essentiellement des personnes qui se sont établies en Estonie à l’époque de l’ancienne Union Soviétique. Elle souhaite un complément d’information sur ce point ainsi que sur le nombre de Roms dans les prisons.

45.M.WANGXuexian appuie les commentaires formulés en rapport avec la question des apatrides. Il s’agit d’une question complexe qui trouve parfois ses racines dans l’histoire. Il convient d’accorder une grande importance à la nécessité de protéger les droits fondamentaux des nombreuses personnes impliquées, que ce soit par le biais de moyens juridiques ou sur la base de motifs humanitaires.

46.Le PRÉSIDENT salue le rapport de l’État partie, les réponses écrites ainsi que la présentation, qui attestent des énormes progrès accomplis dans l’enracinement de la démocratie. Il désire lui aussi un complément d’information sur les points suivants: la question des apatrides, la définition de la torture à la lumière du Code pénal (il est particulièrement préoccupé par les références inappropriées à la «réparation pécuniaire»), les problèmes liés à l’appareil judiciaire et l’admissibilité des confessions obtenues sous la torture. Il se demande quelle procédure un juge est tenu de respecter si une personne ayant fait des aveux devant le tribunal révèle ensuite que sa confession est le fruit de la torture.

La partie publique de la séance prend fin à 11 h 55.

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