Nations Unies

CAT/C/SR.910

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

28 octobre 2010

Français

Original: anglais

Comité contre la torture

Quarante-cinquième session

Co mpte rendu analytique (partiel)*de la 910 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mercredi 11 novembre 2009, à 10 heures

Président: M. Grossman

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 19 de la Convention (suite)

Deuxième rapport périodique de la République de Moldova

La séance est ouverte à 10 heures.

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 19 de la Convention (point 5 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique de la République de Moldova (CAT/C/MDA/2; CAT/C/MDA/Q/2 et Add.1; HRI/CORE/1/Add.114)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation moldove prend place à la table du Comité.

2.M. Cerba (République de Moldova) déclare que depuis que son pays a accédé à l’indépendance, en 1991, il a ratifié les principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et adopté un ensemble de mesures visant à donner effet aux principes reconnus en matière de prévention de la torture dans son droit interne et dans ses pratiques institutionnelles. Il s’est doté d’un nouveau code de déontologie pour le personnel chargé de l’application de la loi et a mis en place un dispositif permettant de veiller au respect de ce code. Dans le cadre du Plan d’action national de protection des droits de l’homme pour 2004-2008, une formation aux droits de l’homme est dispensée aux policiers, aux procureurs, aux juges et au personnel médical. En 2006, le Parlement a amendé la Constitution pour abolir la peine de mort, et l’instauration d’un mécanisme national de prévention de la torture est en cours.

3.Le Gouvernement ayant suivi les nombreuses recommandations formulées par les experts internationaux en matière de droits de l’homme, les conditions régnant dans les prisons se sont considérablement améliorées. En particulier, les installations sanitaires ont été modernisées, les cours de promenade ont été équipées et rénovées, et les services médicaux sont de meilleure qualité. Les prisonniers peuvent s’entretenir avec leurs avocats en privé et sans restriction, et de nouvelles techniques, telles que la musicothérapie, sont désormais utilisées dans les services psychiatriques.

4.Bien que 8 des 38 maisons d’arrêt existantes aient été fermées parce que les conditions de détention n’y étaient pas satisfaisantes, des contraintes budgétaires ont empêché le Gouvernement d’apporter nombre d’améliorations indispensables. Les autorités réfléchissent aux moyens de trouver un financement et ont proposé d’inclure le coût de la rénovation des prisons dans le budget général pour 2010. Cependant, le Gouvernement escompte que le Comité et les donateurs internationaux lui apporteront leur appui pour l’aider à résoudre le problème du surpeuplement carcéral et à améliorer encore les conditions qui y règnent.

5.Le Gouvernement réfléchit actuellement aux dispositions à prendre pour faire en sorte que la responsabilité des maisons d’arrêt ainsi que les fonctions de la police judiciaire soient transférées du Ministère de l’intérieur au Ministère de la justice. La législation qui donnera effet à ce transfert devrait entrer en vigueur le 1er janvier 2010.

6.Il est prévu d’adopter un certain nombre de mesures en matière de prévention de la torture et des traitements inhumains. Un décret pris conjointement par le Ministère de l’intérieur, le Ministère de la santé et le parquet dispose que le ministère public doit être immédiatement avisé en cas d’atteinte à l’intégrité physique des détenus. On s’attache désormais davantage à prévenir les violations des droits de l’homme dont pourraient se rendre coupables les fonctionnaires chargés de faire appliquer la loi. Un numéro d’appel téléphonique automatique mis en place dans les postes de police permet dorénavant d’enregistrer les demandes d’aide et les informations sur des infractions commises.

7.En matière de prévention de la torture, la réalisation la plus importante de la République de Moldova est la réforme entreprise au sein du Ministère de l’intérieur et notamment les efforts faits pour que la police réponde aux besoins de la société et soit responsable devant les citoyens et leurs représentants. Ces dernières années, le nombre total de cas d’allégations de torture et de traitements inhumains a diminué de façon spectaculaire. En 2007, 33 cas de torture ont été signalés, contre seulement 15 cas en 2008.

8.Le Gouvernement est extrêmement préoccupé par les événements du 7 avril 2009 et les déplore vivement; ceux-ci ont sérieusement remis en question non seulement les efforts qu’il déploie pour donner effet aux dispositions de la Convention mais aussi de nombreuses réalisations de la République de Moldova depuis son accession à l’indépendance. Le Gouvernement réfléchit aux raisons de ces événements et prendra toutes mesures appropriées pour faire en sorte que de tels actes ne se reproduisent pas et que tous les responsables soient traduits en justice. Le ministère public a examiné 104 plaintes relatives à l’emploi de la force par la police à l’occasion de ces événements. Sur un total de 32 actions engagées au pénal, 7 ont déjà donné lieu à poursuites. Il ne faut pas perdre de vue que ces événements s’expliquent par la politisation des forces de police dont est responsable le régime précédent.

9.Une commission parlementaire enquête actuellement sur ces événements pour tenter d’en discerner les raisons. La République de Moldova souhaiterait bénéficier d’un appui international pour ces recherches. Elle a examiné tous les rapports et observations émanant d’organisations internationales et s’intéresse tout particulièrement à la question de la formation des policiers en matière de droits de l’homme. Le temps que les fonctionnaires chargés de l’application de la loi doivent consacrer à l’étude des droits de l’homme et de la prévention de la torture a été multiplié par deux.

10.Le Gouvernement attache une grande importance au respect des droits de l’homme dans la région de la Transnistrie. En dépit des efforts soutenus que déploient les autorités constitutionnelles moldoves et la communauté internationale pour résoudre le différend qui affecte cette région, aucune solution n’a encore été trouvée. Le Gouvernement vérifie chaque semaine la façon dont il est donné effet aux droits de l’homme dans la région, et il coopère avec les organes locaux chargés de faire appliquer la loi dans le cadre des activités de la Commission de contrôle unifiée. Les 7 et 8 novembre 2009, sous l’égide de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), s’est tenu un séminaire consacré à la coopération entre les organes moldoves et transnistriens chargés de faire appliquer la loi. Le Gouvernement espère que la récente reprise des négociations Transnistrie 5 + 2 lui permettra de régler la question de la liberté de circulation des personnes entre les deux régions et de mettre en place des mécanismes de surveillance concernant la prévention de la torture et des traitements inhumains.

11.À la suite de l’investiture du nouveau gouvernement le 29 septembre 2009, la République de Moldova a ouvert une nouvelle page de son histoire contemporaine. Elle met avant tout l’accent sur l’instauration de la primauté du droit avec comme critères prioritaires les droits de l’homme et l’intégration européenne. Les domaines d’action clefs sont notamment: la mise en place d’un cadre juridique et d’une structure institutionnelle pour la protection des droits de l’homme; la réforme à mener d’urgence des organismes chargés de faire appliquer la loi; la prévention de la torture et des mauvais traitements aux mains de la police; l’inclusion des droits de l’homme dans les disciplines étudiées dans les écoles et établissements d’enseignement supérieur; et la liberté de la presse.

12.M me Sveaass, Rapporteuse pour la République de Moldova, relève que l’on a récemment célébré le vingtième anniversaire de la chute du mur de Berlin; cet événement marquant est aussi en rapport avec l’accession de la République de Moldova à l’indépendance, en août 1991. Le document de base de la République de Moldova (HRI/CORE/1/Add.114) rend compte de la façon dont, dans les années qui ont suivi l’indépendance, priorité a été donnée au processus de démocratisation de la vie sociale et politique; le pays a accompli de grands progrès en se dotant d’institutions, en élaborant une législation et en instaurant des relations internationales. Il a ratifié la plupart des grands instruments relatifs aux droits de l’homme, y compris le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, entré en vigueur en 2006. L’année suivante, le Parlement a promulgué une loi instituant un mécanisme national pour la prévention de la torture.

13.La République de Moldova est signataire de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, de la Convention relative aux droits des personnes handicapées et du Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Il serait utile de savoir quand elle prévoit de ratifier ces instruments.

14.Avec l’aide d’autres pays, la République de Moldova s’est employée à développer la vie sociale et à renforcer l’état de droit. Il convient de louer le Gouvernement pour l’attitude ouverte dont il a fait preuve en recevant la visite de différents experts internationaux et en coopérant avec eux.

15.Le système juridique interne moldove a connu de multiples transformations, notamment avec la mise en place d’un appareil judiciaire à trois niveaux et l’entrée en vigueur d’un nouveau Code pénal et d’un nouveau Code civil, ainsi que les codes de procédure correspondants. En outre, la loi no 45-XVI sur la prévention et la répression de la violence au foyer, entrée en vigueur en 2008, comporte d’importantes dispositions pour la protection des victimes. Un comité national a été créé afin de surveiller l’application de la loi sur la prévention et la répression de la traite des êtres humains. Il serait souhaitable de disposer de renseignements actualisés sur les activités de ce comité et sur les résultats obtenus grâce à la mise en œuvre de ladite loi.

16.Il semble toutefois qu’il y ait bien loin de la législation adoptée à sa mise en œuvre effective. La Cour européenne des droits de l’homme a constaté 22 cas de violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme et l’OSCE a signalé de graves difficultés en ce qui concerne les procès et les audiences publiques. En outre, à l’issue de la visite qu’il a effectuée en 2008, le Rapporteur spécial sur la torture s’est inquiété des mauvais traitements infligés au cours de la période initiale de la garde à vue et des graves allégations d’actes de torture commis dans certains commissariats de police (A/HRC/10/44/Add.3). Il a également relevé que les procédures de dépôt de plaintes laissaient à désirer et ne fonctionnaient pas de manière satisfaisante. Les rapports établis à la suite des visites effectuées en 2008 par le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants mentionnent des cas de torture et de mauvais traitements durant la garde à vue, font état d’inquiétudes au sujet de cas de détention avant jugement dans des locaux du Ministère de l’intérieur et évoquent de graves lacunes en ce qui concerne la formation du personnel travaillant dans des hôpitaux psychiatriques auprès de patients hospitalisés d’office.

17.Dans son rapport, le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a recommandé à l’État partie de mener des enquêtes approfondies à la suite des événements d’avril 2009. Il serait utile de savoir quelles procédures sont suivies lorsque l’État partie reçoit des rapports et recommandations de ce genre. En particulier, ces textes sont-ils rendus publics et diffusés, et si tel est le cas, auprès de qui? Rappelant les observations finales du Comité concernant le rapport initial de l’État partie (CAT/C/CR/30/7), Mme Sveaass souhaiterait que la délégation commente l’absence de réponse aux deux lettres de suivi adressées à l’État partie par le Comité, qui demandait des renseignements actualisés.

18.Ainsi qu’il est souhaitable, l’article 309 du Code pénal reprend tous les éléments figurant dans la définition de la torture donnée à l’article premier de la Convention, mentionnant notamment la torture infligée pour tout motif fondé sur la discrimination, et il dispose que la torture doit être traitée comme une infraction pénale distincte. Il serait intéressant de savoir si la Convention a jamais été directement invoquée devant une juridiction interne.

19.Il est toutefois permis de se demander si les peines prévues pour des actes de torture tiennent compte de la gravité de ces actes. Le rapport périodique fait mention de peines de prison allant de deux à cinq ans et de trois à huit ans, mais les réponses données à la liste de points à traiter laissent à penser que le souci de la réadaptation de la personne condamnée peut prendre le pas et que les tribunaux tiennent compte de la personnalité du coupable. Il serait bon d’avoir des précisions à ce sujet. Dans les réponses, les traitements inhumains sont qualifiés d’infractions de gravité modérée, et les peines imposées en conséquence sont de sévérité comparable à celles prévues pour d’autres infractions de même catégorie: à quelle catégorie l’État partie se réfère-t-il dans ce contexte?

20.Il semble ressortir des informations fournies aux paragraphes 80 à 100 du rapport périodique que seules la moitié environ des procédures engagées à l’encontre de policiers impliqués dans des actes de torture ou des affaires d’abus de pouvoir avec usage de la violence ou de la torture ont abouti à une saisine des tribunaux et que dans la plupart des cas, ceux-ci ont prononcé des condamnations avec sursis. Mme Sveaass demande si tel est bien le cas et, dans l’affirmative, comment cela peut être considéré comme compatible avec les dispositions de la Convention mettant l’accent sur la gravité de ce type d’infraction. Elle souhaiterait des informations à jour sur les 53 cas qui étaient à l’examen lors de la préparation du rapport périodique, et notamment des précisions sur les peines infligées. Il serait utile d’apprendre s’il existe une prescription pour les actes de torture.

21.Des renseignements complémentaires au sujet de la procédure de dépôt de plaintes, du nombre de plaintes déposées pour actes de torture et des condamnations prononcées seraient les bienvenus. Le ministère public a apparemment ouvert des enquêtes et engagé des poursuites au sujet de plusieurs cas de torture et de mauvais traitements au cours de la garde à vue. Au sujet des 63 condamnations prononcées en 2007, le Comité souhaiterait savoir quelles peines ont été prononcées et quelle a été la durée de celles imposées aux 14 personnes condamnées à une peine privative de liberté.

22.La Rapporteuse souhaiterait savoir si les personnes qui portent plainte bénéficient d’une assistance quelconque. L’État partie peut-il commenter les allégations selon lesquelles le Médiateur n’examinerait que 20 % environ des plaintes à lui adressées et que plus de 40 % des plaintes seraient renvoyées à d’autres institutions. C’est là un point important, car le Comité reçoit de nombreuses informations selon lesquelles la torture serait actuellement pratiquée dans l’État partie. L’une d’elles émane de l’organisation Memoria, qui dirige l’un des plus importants centres de traitement, de réadaptation et d’information sur les affaires de torture, centre qui dispense régulièrement des soins aux personnes qui ont été torturées, non seulement sous le régime précédent mais aussi dans la période récente.

23.Deux de ces victimes, MM. Colibaba et Gurgurov, ont porté leur affaire devant la Cour européenne des droits de l’homme; celle-ci a estimé qu’ils avaient été victimes de mauvais traitements ou de torture aux mains de la police nationale et que l’État partie n’avait pas enquêté de manière efficace à ce sujet. Il serait utile de disposer de renseignements supplémentaires sur ces cas. Des renseignements reçus de diverses autres sources donnent à penser que les mauvais traitements et la torture continuent d’être pratiqués, notamment durant la période initiale de la garde à vue, et que ces pratiques pourraient même être qualifiées de fort répandues. Le Comité souhaiterait recevoir un complément d’information sur l’éventuelle impunité dont bénéficieraient les auteurs de torture et de mauvais traitements, notamment lorsqu’ils ne font l’objet que de sanctions disciplinaires.

24.Le Comité s’inquiète aussi d’allégations concernant le versement de pots-de-vin et la corruption de fonctionnaires. L’OSCE a signalé que la corruption et d’autres infractions commises par des fonctionnaires représentent l’une des formes majeures de la délinquance dans l’État partie. Le Rapporteur spécial sur la question de la torture a également dénoncé les conditions de la détention en tant que facteur favorisant mais n’excusant pas la corruption, et fait état d’allégations nombreuses et concordantes selon lesquelles la corruption serait profondément ancrée dans le système pénal moldove, où il s’agirait même d’une pratique quasi institutionnalisée. L’État partie devrait fournir des informations sur les mesures prises pour lutter contre ce phénomène.

25.Le Comité serait désireux de recevoir des renseignements à jour sur les droits des détenus et en particulier des personnes placées en détention avant jugement. Il faudrait que lui soit précisé si les détenus ont accès à un avocat et à un médecin indépendant lors du placement en détention. Il serait également utile d’apprendre si tous les détenus ont droit à l’aide juridictionnelle dès leur arrestation, et combien de temps une personne peut être privée de liberté avant de comparaître devant un juge. La question de savoir si la «détention préventive» est distincte de la «garde à vue préventive» et celle de savoir si la loi sur la garde à vue préventive est toujours en vigueur mériteraient elles aussi d’être éclaircies. Les garanties juridiques dont jouissent les détenus incluent-elles le droit de consulter un médecin indépendant et de bénéficier de services médicaux?

26.Le Comité souhaiterait recevoir des informations complémentaires sur les affaires à l’occasion desquelles des rapports médicaux faisant état de torture ou de mauvais traitements ont été soumis au tribunal. Il serait utile d’apprendre quelle suite a été donnée à la présentation de tels rapports et qui a sollicité l’examen médical. Il ressort clairement de l’article 251 du Code d’exécution que les médecins sont tenus de signaler à un avocat parlementaire toute trace de torture constatée sur le corps de détenus décédés. Il n’en serait pas moins important de savoir quel est le sort réservé aux rapports établis par les médecins au sujet de traces de torture, quelles mesures sont prises à l’égard de l’établissement de détention en cause et ce qu’il advient des victimes de torture qui demeurent détenues. Étant donné que les prisonniers condamnés ont le droit de se faire examiner en prison à leurs frais, et puisque le rapport médical est ensuite versé au dossier médical du prisonnier, il serait important de savoir quelles mesures sont prises pour qu’il soit demandé des comptes aux personnes responsables, et utile d’apprendre si le Protocole d’Istanbul sert de guide pour les examens médicaux.

27.Il serait souhaitable de disposer d’informations actualisées sur la détention administrative et sur les amendements récemment apportés au règlement pertinent, notamment au sujet des garanties juridiques prévues. De même, des renseignements sont attendus sur les mesures prises pour mettre un terme aux interrogatoires conduits en l’absence d’un avocat et pour s’assurer que la qualité des conseils juridiques dispensés est suffisante pour protéger l’intéressé de la torture et des mauvais traitements. En outre, Mme Sveaass demande que lui soit expliqué ce que recouvre l’expression «détention au secret» utilisée au paragraphe 50 du rapport périodique.

28.Étant donné qu’il est souvent mis fin aux enquêtes sur des allégations de torture ou de mauvais traitements en raison d’une absence d’indices ou de preuves suffisantes, il est permis de se demander sur qui repose la charge de la preuve dans ce genre d’affaires. Il serait important de savoir si la nouvelle disposition du Code de procédure pénale imputant la charge de la preuve à l’établissement où est détenu le prisonnier dans les affaires de torture ou d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants est entrée en vigueur et si elle est effectivement appliquée.

29.Il serait utile d’avoir des renseignements à jour sur le transfert des lieux de détention provisoire ou de détention avant jugement, qu’il était prévu de placer sous la tutelle non plus du Ministère de l’intérieur mais du Ministère de la justice. La construction de nouvelles maisons d’arrêt est-elle prévue et si tel est le cas, de quel ministère relèveront-elles?

30.Mme Sveaass souhaiterait en apprendre davantage sur les éventuelles réparations non pécuniaires accordées aux 22 victimes de torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants dont l’affaire a été portée devant la Cour européenne des droits de l’homme.

31.Le Comité souhaiterait apprendre quelles mesures ont été prises en matière d’enquête, de surveillance et de prévention des violences sexuelles sur les lieux de détention, eu égard en particulier au nombre de faits de ce genre qui sont rapportés, dont les femmes seraient les premières victimes. Quatre personnes ayant affirmé avoir été victimes d’agressions sexuelles durant leur détention sont nommément désignées au paragraphe 82 des réponses à la liste de points à traiter: celles-ci ont-elles expressément donné leur accord pour que leur nom soit publié? Dans le cas contraire, leur nom doit être supprimé, car ces réponses sont un document public. Il serait utile de connaître les mesures mises en place pour faire en sorte que les victimes d’agressions sexuelles au cours de la détention ne soient pas ostracisées et qu’une réadaptation complète leur soit assurée.

32.L’institution nationale chargée de veiller au respect des droits de l’homme est le Centre des droits de l’homme de la République de Moldova, dont les représentants peuvent visiter les prisons et autres établissements où des personnes sont détenues: ont-ils la faculté d’y accéder de manière illimitée et de faire rapport, la nécessité de disposer de tels organes de surveillance est-elle généralement acceptée et leurs rapports sont-ils rendus publics? Selon des informations parvenues au Comité, il est arrivé que les médiateurs se voient refuser l’accès aux établissements pénitentiaires ou n’y aient été admis que durant quinze minutes. Il serait souhaitable que la délégation informe le Comité des mesures prises pour remédier à cette situation. Il faudrait aussi qu’elle commente les informations selon lesquelles: a) il existerait des désaccords quant à la nature du mécanisme mis en place et quant aux personnes ayant autorité pour veiller à l’accomplissement de sa mission; b) les ressources de cette institution seraient très limitées.

33.À propos des événements d’avril 2009, Mme Sveaass relève que les chiffres avancés en ce qui concerne le nombre de personnes détenues varient et demande à la délégation d’indiquer le chiffre officiel. Le Comité souhaiterait savoir combien d’allégations de torture ont été recueillies par le procureur ou tout autre organe au cours de cette période, et si certaines procédures ont fait l’objet d’un non-lieu ou sont encore à l’examen. La délégation devrait aussi lui faire connaître le mandat de la commission d’enquête parlementaire créée en octobre et lui indiquer si celle-ci est en mesure d’enquêter de manière approfondie et en toute indépendance sur les événements d’avril. L’énumération des tabassages brutaux et systématiques et autres sévices répertoriés par Memoria à propos de ces événements suscite une vive inquiétude. Il serait important de savoir si les victimes pourront obtenir réparation même dans les cas où les coupables n’auront pas été traduits en justice.

34.M. Kovalev, Corapporteur pour la République de Moldova, constate que d’importants progrès ont été accomplis en ce qui concerne la prévention de la torture dans l’État partie; ses observations porteront sur l’application des articles 10 à 16 de la Convention.

35.L’application de l’article 10 a donné lieu à des progrès notables depuis l’examen du rapport initial de la République de Moldova en 2003. Toutefois, le Comité n’a pas obtenu de réponse aux questions qu’il avait posées au sujet de la formation des médecins légistes et du personnel médical s’occupant de personnes mises en détention, de demandeurs d’asile et de réfugiés, ni au sujet de la façon dont le Protocole d’Istanbul est appliqué concrètement. Il serait utile d’apprendre quelles mesures le Gouvernement entend prendre à cet égard et si la police est formée aux opérations de maintien de l’ordre.

36.En réponse à la question 11 de la liste de points à traiter, la République de Moldova a fourni des informations détaillées sur le nombre de personnes placées dans des lieux de détention, sur la mise en place de commissions de surveillance, sur les travaux du Comité des plaintes, sur la législation relative à la réduction des peines minimum et maximum et sur un réexamen plus général des peines prévues. Toutefois, selon des informations reçues d’ONG, les conditions de la garde à vue dans les commissariats de police sont très médiocres et insalubres, et les détenus y sont retenus pour de longues périodes. Un rapport établi par un représentant de l’OSCE à l’issue d’une visite effectuée en République de Moldova en septembre 2004 qualifiait les conditions régnant dans les centres de détention d’Orhei Rayon de désastreuses: sept détenus ou plus étaient entassés dans une cellule de trois mètres sur quatre, ils devaient prendre leur tour pour dormir et ni matelas, ni couvertures, ni draps ne leur étaient fournis. Des cas de sévices sur les détenus étaient également cités. La délégation pourrait-elle commenter ces informations et préciser comment il est prévu d’améliorer les conditions réservées aux prisonniers et aux personnes gardées à vue dans l’avenir?

37.La fréquence avec laquelle les règles ou directives pour l’interrogatoire des personnes gardées à vue sont réexaminées n’a toujours pas été précisée. D’autre part, le Comité n’a pas reçu de réponse à la question qu’il a posée au sujet d’allégations relatives à un document à usage interne ou à un ordre donné oralement qui émaneraient du Ministère de la santé et du Ministère de la protection sociale, en vertu desquels toutes les institutions médicales auraient reçu pour instruction de ne délivrer aucun certificat médical attestant de mauvais traitements et du recours à la torture (même si celle-ci a entraîné un décès) à la suite des événements d’avril 2009. Il serait souhaitable de recevoir des réponses détaillées à ces questions.

38.Au sujet de l’application de l’article 12 de la Convention, le Comité n’a pas reçu de réponse à la question de savoir si un organe administratif indépendant a été mis en place pour s’occuper des plaintes formulées à l’encontre de la police et du personnel chargé de l’application de la loi et, dans l’affirmative, quel en est le mandat.

39.Selon des informations reçues par le Comité, 200 personnes ont été arrêtées à la suite des événements d’avril 2009 et n’ont pu avoir rapidement accès à un avocat. Elles auraient été frappées à coup de pied et de bouteilles de plastique remplies d’eau. Le Comité réitère sa demande d’éclaircissements sur la question de savoir s’il a été promptement enquêté sur ces allégations, et ce qui est ressorti de ces investigations.

40.La République de Moldova a fourni des renseignements détaillés en réponse aux questions posées par le Comité au sujet de l’application de l’article 13. Il a notamment été précisé que des boîtes aux lettres ont été installées dans les prisons, qu’en 2008, le Département des établissements pénitentiaires a pris un décret garantissant le droit des détenus à la correspondance, et qu’il est possible de porter plainte auprès des organes chargés des poursuites, du Centre des droits de l’homme et d’autres instances au sujet d’actions ou d’omissions imputables au personnel pénitentiaire. Toutefois, selon des renseignements parvenus au Comité, de nombreux détenus n’ont pas accès à un avocat, contrairement à ce que prévoit le Code des violations de 2009, lequel dispose en outre que les policiers doivent présenter les suspects détenus devant un tribunal dans un délai de vingt-quatre heures. Il serait souhaitable que la délégation s’exprime à ce sujet. En outre, il a été rapporté que le témoignage des amis de Valeriu Boboc, battu à mort par la police dans la nuit du 7 au 8 avril 2009, n’a pas été examiné comme il aurait dû l’être, et que non seulement le procureur a refusé d’enquêter sur ce cas, mais que bien plus, les témoins eux-mêmes ont fait l’objet de poursuites. Il serait important de savoir si quelqu’un a été sanctionné pour n’avoir pas ouvert d’enquête sur cette affaire.

41.À propos de l’application de l’article 14 de la Convention, la délégation devrait indiquer si les réparations et indemnisations auxquelles peuvent prétendre les victimes de la torture sont suffisantes et équitables, et si les victimes se satisfont des montants d’indemnisation offerts. La République de Moldova n’a pas non plus répondu à la question de savoir comment les victimes de torture et de mauvais traitements sont informées des services de réadaptation qui existent et avec quelle fréquence elles y font appel.

42.Pour ce qui est de l’application de l’article 15 de la Convention, le Comité souhaite rappeler qu’il a demandé à l’État partie de fournir des exemples d’affaires judiciaires où des tribunaux ont déclaré une déposition irrecevable au motif qu’elle avait été obtenue sous la contrainte.

43.S’agissant de l’application de l’article 16 de la Convention, il ressort clairement du rapport périodique que la République de Moldova a déployé des efforts considérables pour améliorer les conditions de détention dans de nombreuses prisons, et que certaines d’entre elles ont été rénovées ou reconstruites. Des investissements considérables sont prévus en 2009 pour moderniser d’autres établissements pénitentiaires. Toutes ces initiatives ont permis de faire reculer sensiblement l’incidence de la tuberculose. Cependant, des prisonniers continuent d’être détenus dans des casernes plutôt que dans des cellules à Orhei Rayon et ailleurs. Et la République de Moldova n’a pas répondu aux questions posées au sujet de la superficie en mètres carrés allouée en pratique à chaque prisonnier dans ces établissements et au sujet de la nourriture et de l’eau de boisson mises à la disposition des personnes gardées à vue durant de longues périodes. Le Comité a également demandé des précisions sur la violence entre prisonniers et les mesures prises pour la prévenir, ainsi que sur l’existence d’une législation tendant à prévenir et à interdire la production, le commerce, l’exportation et l’utilisation de matériel spécifiquement destiné à infliger la torture. Le Comité souhaiterait recevoir des réponses détaillées au sujet de ces importantes questions.

44.Il serait très important que la République de Moldova donne effet à la nouvelle législation dont elle s’est dotée sur l’octroi d’un statut spécial pour raisons humanitaires aux personnes qui ne répondent pas aux critères exigés pour obtenir l’asile et qui risquent d’être torturées ou maltraitées si elles sont renvoyées dans leur pays d’origine. Selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, il y a 5 000 apatrides en République de Moldova alors qu’en 2004, l’État partie n’en signalait au total que 1 927. Il semble que l’écart entre les deux chiffres s’explique par l’absence d’une législation, de procédures ou d’un organe administratif permettant de déterminer qui est apatride. Le Comité recommande que la République de Moldova adhère à la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie, qu’elle promulgue une législation réglementant le statut des apatrides et qu’elle mette en place un organe administratif chargé de s’occuper de cette question.

45.Les réponses écrites de la République de Moldova appellent également quelques commentaires. Il est indiqué au paragraphe 140 que la charge de la preuve, dans les cas de torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, incombe à l’établissement où le prisonnier est détenu, ce qui paraît curieux. Le paragraphe 186 comporte apparemment une erreur, car il fait état d’une diminution des infractions liées à la traite des êtres humains en République de Moldova entre 2007 et 2008, alors que les chiffres attestent qu’elles sont en augmentation; les chiffres reproduits au paragraphe 184 sont corrects. Aux paragraphes 196 et 197, on ne saisit pas ce que l’exploitation du travail d’autrui ou la mendicité ont à voir avec l’exploitation sexuelle. Il ressort du paragraphe 255 que le Code pénal a été amendé par la loi no 277-XVI du 18 décembre 2008 et que cela a entraîné une réduction des peines minimum et maximum et amené à un réexamen plus général des peines et de la récidive: il serait intéressant de savoir, dans ce contexte, si certaines condamnations vont être réexaminées.

46.M me Belmir, se référant aux paragraphes 10 à 14 du deuxième rapport périodique, relève que les actes de torture sont passibles de deux à cinq ans d’emprisonnement. Elle estime cette peine insuffisante en cas de viol ou d’autres actes de torture particulièrement graves, et se demande si ces infractions ne devraient pas emporter des condamnations plus lourdes.

47.La période initiale de la garde à vue est le moment où le risque de torture ou de mauvais traitements est le plus élevé; or, la notion de «détention administrative» évoquée au paragraphe 30 du rapport est très vague et il conviendrait de la modifier ou même de la supprimer, car on ne sait pas bien qui est responsable de ce type de détention, ni si elle concerne des affaires administratives, civiles ou pénales.

48.Il ressort du paragraphe 38 du rapport qu’un avocat de la défense doit être présent lorsqu’une copie du «procès-verbal» ou compte rendu de mise en détention est communiquée. Qu’en est-il de la présence d’un conseil au cours de la période qui précède? Il est regrettable que la République de Moldova n’ait pas transféré la responsabilité des lieux de détention du Ministère de l’intérieur au Ministère de la justice.

49.Le Comité des droits de l’enfant a instamment prié la République de Moldova, dans ses observations finales (CRC/C/MDA/CO/3), de rendre son système de justice pour mineurs pleinement conforme aux dispositions des instruments internationaux. En particulier, les jeunes délinquants devraient être séparés des adultes dans les centres de détention et des mesures doivent être prises pour les protéger de tout mauvais traitement.

50.L’État partie fait valoir que des personnes sont placées à l’isolement afin de garantir l’équité des procès et le respect de la loi. Or en pareil cas, elles ne sont pas autorisées à passer des appels téléphoniques ou à acheter de la nourriture, alors que l’État partie reconnaît que l’accès à une alimentation suffisante et aux soins médicaux pose un problème dans les lieux de détention.

51.M. Mariño Menéndez demande si la République de Moldova a l’intention de ratifier le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, qui définit les crimes contre l’humanité et notamment la torture, ainsi que les crimes de guerre, et stipule que ces crimes ne peuvent être prescrits. L’État partie doit aligner sa législation sur ces dispositions s’il a l’intention de ratifier le Statut de Rome.

52.Une ONG a informé le Comité que les suspects et les détenus susceptibles d’être accusés d’infractions pénales sont parfois privés d’une assistance juridique véritable en raison de la corruption à laquelle se prêtent leurs représentants légaux. Des mesures ont-elles été prises à l’encontre des avocats, et notamment des avocats commis d’office, qui se livrent à de telles pratiques?

53.La loi no 270-XVI sur l’asile promulguée en décembre 2008 régit la situation des apatrides et leur accès au statut de réfugié. Cette loi reprend-elle les dispositions de la Convention sur la réduction des cas d’apatridie et de la Convention relative au statut des apatrides et, notamment, sera-t-il plus facile à une personne apatride ayant obtenu l’asile d’acquérir la nationalité moldove?

54.Il est indiqué au paragraphe 198 du rapport que l’État partie a conclu des accords de réadmission avec plusieurs États européens. Si le ressortissant de l’un de ces États demande l’asile, sa demande est-elle examinée ou cette personne est-elle automatiquement renvoyée dans son pays d’origine? Il ressort des paragraphes 226 et 227 des réponses à la liste de points à traiter que le Bureau des migrations et de l’asile peut décider immédiatement ou dans les jours qui suivent d’expulser des demandeurs aux points de passage de la frontière. Peut-il être fait appel de telles décisions auprès d’une autorité administrative ou judiciaire?

55.Le Comité a été informé d’un certain nombre de cas où des témoins d’infractions pénales commises par des membres du personnel pénitentiaire ont été victimes de brimades alors qu’ils tentaient de déposer plainte. Il serait utile de savoir s’il existe un texte législatif ou un programme visant à protéger les témoins en pareil cas.

56.M me  Sveaass, Rapporteuse pour la République de Moldova, dit que le Comité comme le Rapporteur spécial sur la torture ont établi que dans la plupart des cas, c’est au début de la détention que la torture et les mauvais traitements se produisent. Il est donc important de veiller à ce que les détenus soient informés de leurs droits oralement et par écrit à leur arrivée, qu’un dossier soit établi pour chacun d’eux dès son placement en garde à vue, et que tous aient la possibilité d’exercer leur droit de rencontrer un médecin et un avocat indépendants et d’aviser un proche de leur arrestation.

57.Le fait que la République de Moldova a ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention et qu’elle est en train de se doter d’un mécanisme national de prévention est un motif de satisfaction. Il est très important d’autoriser les ONG à visiter les lieux de détention de manière inopinée et d’en assurer le suivi. Le Comité a été avisé que dans le passé, les ONG étaient autorisées à s’y rendre à condition d’avoir prévenu à l’avance de leur visite mais qu’elles se sont vu restreindre cet accès ces dernières années, particulièrement lorsque ces visites étaient jugées inopportunes par les autorités pénitentiaires.

58.Alors qu’il est généralement admis que les procès publics sont les garants d’un jugement équitable, il semble que toutes les audiences ne sont pas publiques et que la date et l’heure n’en sont pas toujours publiées.

59.M me  Gaer rappelle qu’au paragraphe 82 du rapport du Rapporteur spécial sur la torture (A/HRC/10/44/Add.3), il est indiqué qu’infliger des mauvais traitements au cours de la période initiale de la garde à vue est une pratique très répandue. Les suspects sont violemment frappés à coups de poings, de matraques en caoutchouc et de battes de baseball; chocs électriques, quasi-asphyxie au moyen de masques à gaz, aiguilles sous les ongles et suspensions sont également pratiqués, l’objectif étant d’obtenir des aveux. De tels aveux sont-ils considérés comme recevables par les tribunaux et, dans le cas contraire, la délégation pourrait-elle indiquer le nombre de cas où semblables dépositions ont été rejetées?

60.Une femme connue sous le nom de «Mme Z» qui avait illégalement recouru à l’avortement a été condamnée à vingt ans de prison pour meurtre avec préméditation sur la base d’une déposition qui aurait été obtenue par la contrainte. Il serait important d’apprendre si les médecins sont tenus de signaler les femmes soupçonnées d’avoir subi un avortement illégal et ce qu’il en est de la législation relative aux enquêtes pénales, notamment en ce qui concerne l’interrogatoire et l’arrestation de femmes hospitalisées ayant besoin de soins médicaux d’urgence à la suite d’un avortement. Combien de femmes ont-elles été mises en examen et condamnées pour avortement, meurtre et infanticide? Le paragraphe 261 des réponses à la liste de points à traiter fournit des chiffres relatifs aux homicides volontaires et aux infanticides: il serait souhaitable de disposer de chiffres ventilés pour l’une et l’autre infractions et d’apprendre si le crime d’infanticide inclut l’avortement.

61.La Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences a préconisé (A/HRC/11/6/Add.4) la mise en place d’unités spécialisées chargées de faire appliquer la loi en ce qui concerne les femmes ainsi que l’ouverture d’enquêtes sur les allégations de corruption au sein de la fonction publique. L’État partie a-t-il pris des mesures pour donner effet à ces recommandations? La Rapporteuse spéciale a également souligné que les violences contre les femmes et les filles sont très souvent passées sous silence en raison de sentiments de honte, de la crainte d’une mise au ban de la société, d’une ignorance des lois, procédures judiciaires et services existants ou tout simplement d’un manque de confiance dans le système.

62.Il serait souhaitable que la délégation commente les cas de Natalia Shalamova et de L. Z. mentionnés par le Rapporteur spécial sur la torture dans son rapport, l’une et l’autre ayant affirmé avoir été battues en prison. L’État partie a-t-il pris des mesures au sujet de ces deux affaires? Le Rapporteur spécial a aussi fait allusion à plusieurs reprises à une forme de torture et de coercition appelée position du moineau. Ces cas ont-ils fait l’objet d’une enquête et, si tel est le cas, quels en ont été les résultats?

63.Il est rapporté qu’un trafic est organisé pour envoyer des hommes en Fédération de Russie travailler dans le bâtiment, que des enfants sont de même envoyés dans des pays voisins pour y mendier et que de très nombreuses femmes sont victimes de la traite à des fins d’exploitation sexuelle. L’Organisation internationale des migrations a enregistré 2 027 victimes de la traite. Selon le Département d’État des États-Unis, bien que des efforts non négligeables soient faits pour lutter contre ce fléau, aucun fonctionnaire n’a été condamné pour complicité et aucune intensification de la répression n’est discernable. Mme Gaer demande si ces conclusions sont correctes.

64.D’après le paragraphe 338 des réponses à la liste de points à traiter, le Ministère de l’intérieur a l’intention de recruter des personnes appartenant à des minorités ethniques, qui seront appelées à jouer un rôle actif dans les services chargés de faire appliquer la loi. Est-il prévu de recruter des membres de la communauté rom? Mme Gaer s’émeut d’un certain nombre d’affirmations figurant aux paragraphes 346 à 349, selon lesquelles une source de difficultés dans les relations avec les Roms tient au fait qu’il se livrent à un commerce illicite, d’objets religieux notamment, sur les marchés, qu’ils ont tendance à migrer d’un lieu à un autre en sorte qu’il est impossible de les recenser ou de les informer des dispositions légales en vigueur, et que le Ministère de l’intérieur n’a pas enregistré le moindre incident concernant des menaces, des comportements discriminatoires, de la haine ou de la violence à l’encontre des minorités ethniques en 2009. Les deux premières affirmations dénotent l’existence de préjugés à l’égard de la minorité rom. Quant à la troisième, elle amène Mme Gaer à demander à la délégation d’expliquer comment il est possible que pas une seule manifestation d’hostilité à l’égard des minorités ethniques n’ait été enregistrée.

65.M. Gaye relève un manque de concordance au paragraphe 50 du rapport: il y est question de «détention au secret» dans la première phrase et d’«isolement cellulaire» ou d’incarcération dans la seconde. Lequel de ces deux régimes bien distincts est-il décrit en l’occurrence?

66.Il est surprenant qu’il ne soit nulle part question de peines de substitution permettant d’éviter l’incarcération, alors qu’il pourrait s’agir d’un moyen d’améliorer la situation apparemment désastreuse qui règne dans les lieux de détention. De telles solutions de rechange sont courantes dans les États membres de l’UE, que la République de Moldova semble souvent prendre pour modèles par ailleurs.

67.Le Président constate avec satisfaction que la République de Moldova a ratifié le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

68.Les actes de torture sont passibles d’une peine de prison pouvant aller de deux à cinq ans, sanction qui semble bien légère. Le Comité souhaiterait connaître les critères utilisés pour prononcer une condamnation dans tel ou tel cas particulier. Aux fins de comparaison, il serait en outre utile d’apprendre quelles peines sont prévues pour des infractions telles que des coups et blessures infligés par un particulier ou l’abus de confiance.

69.Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a constaté (CEDAW/C/MDA/CO/3) que la loi sur l’égalité des chances entre les hommes et les femmes ne comporte pas de mécanisme de mise en œuvre et ne prévoit pas de voies de recours en cas de violations. Des mesures ont-elles été prises à cet égard?

70.Au sujet des actes de torture commis sur ordre d’un supérieur, le paragraphe 59 du rapport indique que les subordonnés ont l’obligation d’obéir aux ordres reçus et que le supérieur est responsable de la légalité de l’ordre donné. L’État partie a-t-il l’intention de modifier la législation afin de la rendre compatible avec les dispositions de la Convention? Nul ne saurait invoquer les ordres d’un supérieur pour se dégager de sa responsabilité pénale.

71.Il serait important de connaître la portée du mandat et les ressources du Centre de lutte contre la traite des êtres humains ainsi que les dispositions du Code pénal applicables aux trafiquants d’êtres humains. L’un d’eux a-t-il été condamné à ce jour?

72.Les questions posées au paragraphe 11 a) de la liste de points à traiter n’ont pas encore reçu de réponse. Y a-t-il eu des cas de transferts illégaux ou des circonstances où des assurances diplomatiques ont été acceptées?

73.L’État partie indique que les instruments internationaux l’emportent sur le droit interne. La Convention est-elle directement applicable par les tribunaux, peut-elle être invoquée par les avocats et des exemples concrets peuvent-ils être cités à cet égard?

74.Dans ses observations finales relatives au rapport précédent de l’État partie (CAT/C/CR/30/7), le Comité a évoqué le traitement des malades tuberculeux dans les prisons moldoves. À la fin de 2003, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a fait part de son inquiétude (E/C.12/1/Add.91) au sujet de l’incidence croissante de la tuberculose dans l’État partie, constatant avec une préoccupation particulière la gravité de ce problème dans les prisons, où les taux d’infection sont plus de 40 fois supérieurs à la moyenne nationale. Il serait souhaitable de savoir comment a évolué la situation depuis lors.

75.Le Conseil des droits de l’homme a fait savoir que des avocats moldoves se plaignent de faire l’objet de menaces qui sont de nature à les empêcher de s’acquitter comme il convient de leur devoir professionnel de protéger les droits de l’homme et de défendre leurs clients, notamment ceux qui affirment avoir été torturés. Une lettre émanant de l’ordre des avocats évoque le cas d’Ana Ursachi et de Roman Zadoinovv, deux avocats qui auraient été empêchés de représenter des victimes de torture. La façon dont ils ont été traités aurait eu pour effet d’intimider les autres avocats. Le Comité souhaiterait disposer de statistiques que la délégation pourrait peut-être lui fournir au sujet de ces plaintes. L’État partie prévoit-il de modifier l’article 335 du Code pénal afin que les avocats ne puissent plus être poursuivis pour abus de leurs fonctions officielles alors qu’ils ne font que représenter un client?

76. La délégation moldove se retire.

Le débat- résumé prend fin à 12 h 20.