NATIONS UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/SR.76629 août 2007

Original: FRANÇAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

Trente‑huitième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE (PARTIEL)* DE LA PREMIÈRE PARTIE(PUBLIQUE) DE LA 766e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mardi 8 mai 2007, à 15 heures

Président: M. MAVROMMATIS

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (suite)

Quatrième rapport périodique des Pays‑Bas (suite)

La séance est ouverte à 15 heures.

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (point 5 de l’ordre du jour) (suite)

Quatrième rapport périodique des Pays-Bas (CAT/C/67/Add.4; CAT/C/NET/Q/4/Rev.1 et Add.1; HRI/CORE/1/Add.66 et 67 et HRI/CORE/1/68/Rev.1)

1.Sur l’invitation du Président, la délégation néerlandaise reprend place à la table du Comité.

2.M. de KLERK (Pays-Bas), rappelant que le Royaume des Pays-Bas est constitué de trois entités pleinement autonomes pour ce qui est de la gestion de leurs affaires intérieures, y compris la façon dont elles appliquent les traités internationaux, indique qu’un processus de réformes constitutionnelles est actuellement en cours aux termes duquel deux des cinq îles des Antilles néerlandaises, Curaçao et Sint Maarten, devraient acquérir le statut de territoire autonome. Le Royaume continuera d’être le seul habilité à signer et ratifier les traités et instruments internationaux, même si ces derniers ne s’appliquent qu’à une partie de ses entités constitutives. Enfin, conscient que deux des trois documents de base portant sur les territoires qui composent le Royaume sont relativement dépassés, en particulier celui concernant la partie européenne du Royaume, le Gouvernement néerlandais s’engage à mettre ces documents à jour dans un avenir proche.

3.Par ailleurs, si le rapport et les réponses écrites renvoient plus fréquemment à la Convention européenne des droits de l’homme qu’à la Convention contre la torture, c’est qu’un grand nombre d’arrêts ont été rendus par la Cour européenne des droits de l’homme sur des affaires intéressant les Pays-Bas et que ces décisions servent de référence pour les tribunaux de l’ensemble du Royaume.

4.S’agissant de la lutte contre le terrorisme et de ses incidences sur les droits de l’homme, la délégation réitère que, comme indiqué aux paragraphes 1 à 3 des réponses écrites (CAT/C/NET/Q/4/Rev.1/Add.1), les Pays-Bas considèrent que l’interdiction de la torture ne souffre aucune dérogation, y compris dans le contexte de la lutte contre le terrorisme. En effet, comme le montre la position adoptée par le Gouvernement néerlandais dans ses observations écrites sur l’affaire Ramzy, dont la Cour européenne des droits de l’homme est actuellement saisie, l’interdiction absolue de la torture énoncée à l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme n’est nullement remise en question par la nécessité de lutter contre le terrorisme.

5.En outre, les activités antiterroristes ne doivent pas dépasser les limites fixées par la loi, raison pour laquelle la pratique dite du transfert, qui consiste à renvoyer des terroristes présumés vers des États qui acceptent de collaborer avec les États-Unis d’Amérique sans respecter les procédures d’extradition, n’a pas sa place dans les politiques néerlandaises. Au cas où de tels transferts seraient opérés et qu’il en aurait connaissance, le Gouvernement prendrait les mesures voulues pour faire cesser ces pratiques. À ce jour, les diverses enquêtes menées par les organes du Conseil de l’Europe ou du Parlement européen n’ont fait apparaître aucun cas de transfert illégal auquel les Pays‑Bas auraient participé. De plus, le Gouvernement néerlandais, qui n’a jamais eu recours aux assurances diplomatiques d’un pays tiers pour s’assurer qu’une personne en instance d’expulsion ne risque pas d’être torturée dans le pays où elle est renvoyée, est conscient des limites de cette méthode. Toutefois, il se réserve la possibilité d’y recourir car il considère qu’elle peut s’avérer utile dans le cadre d’un ensemble de mesures de protection.

6.Concernant l’affaire relative à la livraison par une société néerlandaise de gaz toxiques au régime de Saddam Hussein, la délégation rappelle que, comme indiqué dans les réponses écrites (par. 37, 85 et 86), un ressortissant néerlandais a été reconnu coupable de participation à un acte de génocide pour avoir fourni ce gaz à l’Iraq et qu’avec l’incorporation dans le droit interne en 2006 du règlement (CE) no1236/2005 concernant le commerce de certains biens susceptibles d’être utilisés en vue d’infliger la peine capitale, la torture ou d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ce type d’échange commercial est désormais interdit.

7.La question de la mise en place de mécanismes nationaux de prévention destinés à jouer le rôle de contrepartie du Sous-Comité de la prévention institué en vertu du Protocole facultatif à la Convention est encore à l’examen à l’heure actuelle car la situation est complexe, le pays comptant plusieurs organes d’inspection dont certains sont autonomes par rapport au pouvoir central. M. de Klerk assure toutefois le Comité qu’une fois que cette question aura été tranchée, une attention prioritaire sera accordée à la question de l’efficacité de la coopération entre le futur mécanisme et le Sous‑Comité de la prévention.

8.Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale a été incorporé dans le droit interne en octobre 2003 grâce à l’entrée en vigueur de la loi relative aux crimes internationaux (rapport, par. 20), qui réprime les violations graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire, dont les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre. En outre, ladite loi établit la compétence universelle des juridictions nationales pour juger les crimes de guerre et les actes de torture et leur confère une large compétence extraterritoriale s’agissant des crimes de génocide et des crimes contre l’humanité.

9.En cas de conflit entre la Constitution et le droit des traités, ce dernier l’emporte. En effet, les articles 94 et 120 de la Constitution prévoient respectivement que les lois en vigueur aux Pays‑Bas ne sont pas applicables si leur mise en œuvre est incompatible avec les dispositions des traités ayant un caractère contraignant pour tous les individus et que les tribunaux n’ont pas à vérifier la constitutionnalité des traités internationaux. En revanche, comme le droit international coutumier est considéré comme faisant partie du droit interne, il ne prime pas les lois nationales ou la Constitution.

10.À propos de l’arrêt rendu en 2001 par la Cour suprême dans l’affaire Bouterse et sur les «meurtres de décembre» commis en 1982 au Suriname (rapport, par. 5 à 12), M. de Klerk explique que, si cette affaire a été portée jusque devant la Cour suprême, c’est que le Procureur général est habilité à introduire un pourvoi en cassation afin de demander à la Cour suprême de rendre un avis de droit sur certaines questions. Ce recours n’a aucune incidence sur l’issue du procès et vise simplement à ce que cette juridiction commente son interprétation de certaines questions fondamentales de droit. M. de Klerk souligne à cet égard que, la délégation n’étant pas à même de spéculer sur les raisons qui amènent la Cour suprême à prendre telle ou telle décision dans une affaire donnée, elle ne peut que renvoyer le Comité à la décision qui a été publiée. Toutefois, elle fait observer que l’arrêt dans l’affaire Bouterse n’est plus vraiment d’actualité du fait de l’adoption de la loi relative aux crimes internationaux. S’agissant de la question de savoir si la Convention pourrait s’appliquer rétroactivement à des actes antérieurs à son entrée en vigueur, soit le 10 décembre 1984, le Gouvernement a fait sienne la conclusion de la Cour suprême dans laquelle celle-ci a considéré que la loi portant application de la Convention contre la torture n’avait pas d’effet rétroactif et que les États n’étaient nullement tenus de déroger au principe de non‑rétroactivité énoncé à l’article 16 de la Constitution. Enfin, à la connaissance du Gouvernement, aucune demande de réparation n’a été présentée par des proches des victimes dans cette affaire.

11.M. de Klerk rappelle qu’en vertu de la loi sur les crimes internationaux, la justice néerlandaise ne peut agir que dans les trois cas suivant: l’auteur présumé des actes de torture est un ressortissant néerlandais; la victime a subi des tortures à l’étranger mais elle est de nationalité néerlandaise; l’auteur présumé des actes de torture n’est pas néerlandais mais il se trouve sur un territoire relevant de la juridiction des Pays-Bas. Selon la délégation, ces dispositions garantissent que les Pays-Bas ne puissent servir de refuge aux tortionnaires en fuite.

12.Concernant l’affaire Nzapali, M. de Klerk indique que le tribunal régional de Rotterdam a statué que les accusations de torture n’étaient suffisamment fondées que dans le cas d’une seule des victimes, raison pour laquelle une peine moins lourde que celle requise par le procureur a finalement été prononcée.

13.S’agissant de la question de savoir quelle autorité a compétence pour ouvrir une enquête lorsque des suspects en attente de jugement décèdent dans les locaux de détention des juridictions internationales se trouvant sur le sol néerlandais, M. de Klerk se propose de prendre l’exemple du Tribunal pénal pour l’ex‑Yougoslavie (TPIY) pour répondre à cette question. Conformément à l’accord conclu entre le Royaume et l’Organisation des Nations Unies (ONU) concernant le statut du siège du TPIY, le pays hôte (les Pays-Bas, en l’occurrence), n’exerce pas sa compétence en matière pénale à l’égard des suspects ou des accusés se trouvant sur son territoire qui doivent être ou ont été transférés dans les centres de détention du Tribunal pénal. En conséquence, le droit néerlandais, en particulier la législation relative au système pénitentiaire, n’est pas applicable aux personnes privées de liberté sur décision de cette juridiction et les tribunaux néerlandais ne sont donc pas compétents en cas de décès de personnes en attente de jugement détenues dans les centres de détention du TPIY. Le greffe du Tribunal pénal est chargé notamment de l’administration du quartier pénitentiaire du TPIY, unité autonome située à l’intérieur du complexe pénitentiaire néerlandais de Scheveningen. L’administration de ce centre relève uniquement du TPIY et certaines responsabilités qui devraient normalement incomber au directeur de l’institution pénitentiaire sont confiées au Bureau de l’aide juridictionnelle et des questions de détention du greffe ou au greffier adjoint. Depuis 1995, sur proposition du Président du TPIY, le Comité international de la Croix-Rouge est chargé d’inspecter le quartier pénitentiaire du TPIY, ce qui fait que les organes néerlandais d’inspection des prisons n’ont pas compétence pour effectuer des visites dans ce quartier.

14.En mars 2006, peu après le décès de Slobodan Milošević, le Greffier en chef du TPIY a demandé au Gouvernement suédois de charger un groupe spécial d’experts d’effectuer un audit indépendant du fonctionnement du quartier pénitentiaire du Tribunal pénal. Le rapport que ce groupe d’experts a publié en mai 2006 à la suite de sa visite n’était pas destiné au pays hôte, les Pays‑Bas, et ne contenait pas de critiques à son égard. De manière générale, le règlement du quartier pénitentiaire semblait être respecté et les détenus étaient en général satisfaits de leurs conditions de détention.

15.Les soldats néerlandais reçoivent une formation générale sur certains instruments internationaux, dont les Conventions de Genève, ainsi qu’une formation spécifique sur des questions relatives à l’éthique, aux droits de l’homme et au recours à la force lorsqu’ils partent en mission de maintien de la paix. En outre, un code de conduite destiné à l’ensemble du personnel du Ministère de la défense a été publié. Les membres de la police et du personnel pénitentiaire reçoivent une formation sur le traitement à réserver aux personnes privées de liberté. D’autre part, l’interdiction de la torture occupe une place importante dans le module de formation de la police sur le respect des droits de l’homme dans le cadre de ses activités. Enfin, un manuel a été publié sur le traitement des suspects retenus en garde à vue, qui comporte des lignes directrices utiles dans le travail quotidien de la police. Le personnel des établissements pénitentiaires reçoit quant à lui une formation sur le droit pénal et la réglementation pertinente, notamment sur la déontologie et les conditions d’emploi de la force contre les détenus.

16.La diversité ethnique de la société néerlandaise est reflétée dans la composition de la police, 6,4 % de ses membres étant d’origine étrangère. Le Gouvernement actuel s’est fixé comme objectif de faire augmenter ce pourcentage. La politique d’intégration dans la police de membres de minorités est du ressort des polices régionales, les besoins variant d’une région à l’autre. Afin d’améliorer la compréhension mutuelle entre les peuples et les cultures, des visites de pays ont été organisées à l’intention de membres de la police, notamment au Maroc.

17.La procédure régissant les plaintes contre des violations commises par la police est définie aux articles 61 à 65 de la loi de 1993 sur la police. Tous les corps de police sont soumis à la même procédure et rendent des comptes à une commission indépendante de règlement des litiges, qui doit enregistrer toutes les requêtes orales ou écrites qu’elle reçoit. Les personnes qui contestent le résultat de cette procédure peuvent former un recours devant le médiateur, qui règle la plupart des litiges dont il est saisi par voie de médiation. En 2005, environ 7 000 plaintes ont été déposées, dont 930 ont fait l’objet d’un recours devant le médiateur. En 2006, 974 plaintes ont été soumises au médiateur, qui a fait un rapport sur 130 d’entre elles. Dans une centaine de cas, il a jugé que la plainte était fondée, complètement ou en partie, et a formulé des recommandations spécifiques sur 14. En règle générale, la police donne suite à ces recommandations.

18.Concernant les questions posées par certains membres du Comité sur la violence dans la société néerlandaise, M. de Klerk fait observer que le lien entre ces questions et la Convention contre la torture est parfois très ténu. Il se propose néanmoins d’y répondre succinctement en donnant quelques informations récentes sur les points qui ont été évoqués.

19.En ce qui concerne la violence contre les personnes âgées, des principes directeurs ont été publiés en 2005 afin de prévenir et de combattre ce phénomène, et il est prévu de surveiller ce type de violence dans le cadre de l’application de la loi sur l’aide sociale. Comme le phénomène est relativement nouveau, il n’y a pas encore de statistiques à ce sujet. S’agissant de la violence contre les femmes, le Gouvernement a adopté une série de mesures de lutte contre la violence conjugale, qui vont de la détection précoce à l’aide aux victimes et même au traitement des auteurs de ces violations. Il prévoit de mettre en place l’infrastructure requise pour favoriser des partenariats entre les autorités locales et régionales et de soutenir les centres d’accueil pour femmes battues et les programmes de traitement destinés aux auteurs de sévices. En outre, un projet de loi prévoyant d’imposer des mesures de contrainte temporaires aux auteurs d’actes de violence familiale devrait être adopté prochainement.

20.Pour ce qui est de l’exploitation sexuelle des enfants, les dispositions du Code pénal interdisant la pornographie mettant en scène des enfants ont été durcies et leur portée élargie de façon à ce qu’elles englobent notamment le fait de contraindre des mineurs à avoir des relations sexuelles entre eux. Par ailleurs, une modification du Code civil interdisant le recours à la force à des fins éducatives est entrée en vigueur le 25 avril 2007. Aux termes de ce texte, les parents doivent s’abstenir de recourir à quelque forme que ce soit de violence physique ou psychologique, ce qui devrait rendre plus efficaces les dispositions du Code pénal réprimant les sévices à enfant, puisqu’une personne accusée d’avoir maltraité un enfant ne pourra plus espérer minimiser sa responsabilité en faisant valoir qu’elle a utilisé les châtiments corporels à des fins de discipline.

21.Par ailleurs, le nombre d’incidents violents à caractère antisémite et islamophobe ont diminué en 2005. Conformément au plan de lutte contre la discrimination adopté en 2003 par le Gouvernement, la police est chargée du suivi de tous les incidents à caractère raciste et doit les signaler au Procureur général, et un réseau de bureaux d’enregistrement des plaintes relatives à des faits de discrimination raciale facilement accessibles aux victimes a été mis en place. Enfin, en avril 2000, les Pays‑Bas ont nommé un rapporteur national sur la traite des personnes et, en 2004, un plan d’action contre la traite prévoyant tout un arsenal de mesures dans le domaine de la prévention, de la législation, des enquêtes et des poursuites a été adopté. Un bureau d’information sur la prostitution des mineurs a été créé et une campagne d’information a été lancée afin d’encourager le public à dénoncer les cas de traite dont il a connaissance à la police ou dans le cadre d’un programme de télévision offrant la possibilité de signaler ces cas de façon anonyme.

22.M. KUIJER (Pays-Bas) dit, en ce qui concerne les droits de la personne gardée à vue, que le Code de procédure pénale néerlandais n’impose pas la présence d’un avocat lors des interrogatoires menés par la police. Toutefois, la loi prévoit leur enregistrement sonore ou audiovisuel dans un certain nombre de cas. Jusque dans un passé récent, l’enregistrement n’était obligatoire que pour les infractions présentant un certain degré de gravité. Mais le Gouvernement a jugé nécessaire de l’étendre à l’ensemble des infractions passibles d’une peine d’au moins douze ans de réclusion. L’enregistrement est également requis lorsque les faits reprochés au suspect ont entraîné le décès de la victime ou un préjudice corporel grave ou en cas de violence sexuelle. Enfin, il convient de noter que tout interrogatoire subi par une personne âgée de moins de 12 ans doit également être enregistré.

23.Conformément à l’article 59 du Code de procédure pénale, la durée maximale de la garde à vue est de trois jours et 15 heures. Une fois ce délai écoulé, le suspect doit être présenté à un juge. Toutefois, en cas d’encombrement des tribunaux, il est possible de prolonger la détention dans les locaux de la police de dix jours au maximum.

24.Depuis 2003, la situation de l’Équipe spéciale chargée d’enquêter sur les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité et de faire en sorte que leurs auteurs soient traduits en justice s’est considérablement améliorée. L’Équipe dispose aujourd’hui de moyens suffisants pour s’acquitter convenablement de sa tâche. Les membres du Comité qui souhaitent davantage de renseignements sur la question sont invités à se reporter aux paragraphes 40 à 45 des réponses écrites des Pays‑Bas à la liste des points à traiter (CAT/C/NET/Q/4/Rev.1/Add.1).

25.À propos des doutes émis par Mme Sveaass quant à la fiabilité d’une étude de 2003 sur les incidences des conditions de détention dans la prison de haute sécurité sur la santé mentale des détenus (rapport, par. 33), il y a lieu de signaler que le Gouvernement a décidé de ne pas s’appuyer sur cette étude pour formuler ses recommandations sur l’amélioration du régime dans ce type d’établissement. Les autorités ont estimé que l’étude ne portait pas sur un nombre suffisant de détenus pour qu’il soit possible d’en tirer des conclusions générales. En ce qui concerne les fouilles corporelles pratiquées sur les détenus dans les locaux de haute sécurité, il convient de signaler que l’administration pénitentiaire a cessé d’y recourir de manière systématique et qu’elles ne sont désormais autorisées que lorsque le comportement du détenu ou les impératifs de la sécurité l’exigent.

26.S’agissant de la justice pour mineurs, M. Kuijer indique que lors de leur placement en détention, les délinquants juvéniles ne sont pas répartis en fonction de leur origine ethnique. On veille simplement à séparer les garçons des filles et les prévenus des condamnés.

27.En ce qui concerne la procédure accélérée d’examen des demandes d’asile prévue par la loi sur les étrangers entrée en vigueur le 1er avril 2001 (rapport, par. 22 et 23), il convient tout d’abord de rappeler que ce mécanisme dérogatoire à la procédure ordinaire d’examen des demandes d’asile a été institué dans le but de traiter plus efficacement les demandes dont l’examen ne soulève a priori aucune difficulté particulière. Les affaires plus complexes sont en revanche examinées dans le cadre de la procédure ordinaire. La décision du Service de l’immigration et de la naturalisation de recourir à la procédure accélérée fait l’objet d’un contrôle qui est exercé par les tribunaux, ce qui est une première garantie du respect des droits du requérant. Il y a lieu de préciser aussi que le recours à la procédure accélérée n’est pas automatique et résulte toujours d’un examen au cas par cas de la situation des demandeurs d’asile. Ceux d’entre eux dont la demande est examinée selon cette procédure disposent du temps nécessaire pour préparer leur dossier et bénéficient à cet égard de l’assistance d’avocats et d’interprètes. Le requérant arrivé aux frontières dans des conditions telles qu’il se trouve dans l’incapacité physique ou psychologique de présenter une demande dûment étayée ne peut être refoulé vers son pays d’origine de façon expéditive; dans un tel cas l’examen de la demande se fait dans le cadre de la procédure ordinaire. Les préoccupations exprimées à cet égard par certains membres du Comité ne sont donc pas fondées. Trente pour cent seulement des demandes d’asile sont traitées selon la procédure accélérée et il convient de noter que sur un total de 3 900 décisions prises par le Service de l’immigration et de la naturalisation dans le cadre de cette procédure, les requérants se sont vu octroyer des titres de séjour dans 1 200 cas.

28.Le Président du Comité, s’exprimant en sa qualité de Rapporteur pour les Pays‑Bas, a fait part de sa préoccupation concernant le régime de la preuve dans le cadre de la procédure accélérée de demande d’asile. Il faut dire que le requérant dont la demande d’asile est examinée selon cette procédure est effectivement tenu d’apporter la preuve que sa situation justifie l’octroi du statut de réfugié. Toutefois, le Rapporteur sera peut être rassuré d’apprendre que les fonctionnaires du Service de l’immigration et de la naturalisation sont eux aussi tenus de procéder à une enquête sur la situation des droits de l’homme dans le pays d’origine du requérant, ce qui allège d’autant le fardeau de la preuve pour l’intéressé. La procédure accélérée de demande d’asile n’est pas applicable aux mineurs âgés de moins de 12 ans. Les demandes d’asile présentées par des mineurs âgés de 12 à 18 ans peuvent être examinées selon cette procédure mais le recours à cette méthode ne peut intervenir qu’après un examen individuel de la situation du requérant et n’est en aucun cas automatique. Il convient enfin de signaler que le Gouvernement envisage d’améliorer la procédure accélérée de demande d’asile par l’adoption de mesures dont le contenu n’a toutefois pas encore été fixé.

29.Pour ce qui est des conditions de rétention des demandeurs d’asile mineurs, les membres du Comité sont invités à consulter les réponses écrites des Pays‑Bas à la liste des points à traiter (par. 66 à 69).

30.Il est, d’autre part, exact que dans plusieurs villes portuaires des Pays‑Bas, notamment à Rotterdam et à Utrecht, d’anciens navires de croisière ont été transformés en centres de rétention pour étrangers en situation irrégulière. Le pays compte à l’heure actuelle six structures de ce type (avec une capacité totale d’accueil d’environ 2 000 places) dont la gestion est conforme à l’Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement.

31.Certains membres du Comité ont estimé que, compte tenu de la rapidité de la procédure accélérée d’examen des demandes d’asile, il serait souhaitable que les tribunaux soient habilités à effectuer un contrôle des décisions prises selon cette procédure. Ils ont souligné que des faits nouveaux n’ayant pas pu être présentés à temps dans le cadre de la procédure accélérée risquaient également de ne pas être pris en compte, ce qui serait contraire aux dispositions de l’article 3 de la Convention. À ce propos, M. Kuijer informe le Comité que, conscient de ce risque, le Ministère de la justice réfléchit actuellement aux moyens d’assurer une vérification des décisions par une autre instance.

32.Quant au paragraphe 6 de l’article 4 de la loi sur le droit administratif général, en vertu duquel le réexamen d’une demande d’asile n’est possible que lorsque le requérant invoque un fait nouveau concernant sa situation personnelle ou la situation dans son pays d’origine, le Gouvernement néerlandais estime qu’il n’est pas contraire à ses obligations internationales et considère en outre que l’interprétation faite par les autorités de la notion de «fait nouveau» est suffisamment large pour que soit garanti le respect de l’article 3 de la Convention. Il convient d’ailleurs de signaler que le Conseil d’État a admis une exception au principe énoncé à cet article, lorsque l’affaire concerne des allégations de mauvais traitements.

33.Pour ce qui est de l’application du Protocole d’Istanbul par le Service de l’immigration et de la naturalisation, M. Kuijer dit que, en tant que tels, les rapports médicaux présentés par les demandeurs d’asile ne sont pas considérés comme des éléments de preuve car on ne peut pas établir avec certitude que le préjudice corporel invoqué par le requérant est la conséquence d’actes de torture ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants. Pour cette raison, les Pays‑Bas ont décidé de ne pas appliquer le Protocole d’Istanbul, un texte qui ne présente d’ailleurs aucun caractère contraignant. En outre, les Pays‑Bas n’ont pas dressé de liste de pays d’origine supposés «sûrs», de sorte que la situation des demandeurs d’asile fait toujours l’objet d’un examen au cas par cas.

34.En ce qui concerne le renvoi présumé vers leur pays d’origine d’enfants somalis ayant séjourné pendant de nombreuses années aux Pays‑Bas, M. Kuijer dit qu’il n’a pas connaissance d’une telle affaire. En tout état de cause, la législation en la matière actuellement en vigueur ne permettrait pas l’expulsion de personnes ayant séjourné de longues années sur le territoire néerlandais.

35.Les mutilations génitales, en tant que violations graves du droit de chaque individu au respect de son intégrité physique, peuvent être considérées comme des actes de torture ou des traitements cruels, inhumains ou dégradants et justifier l’octroi d’un titre de séjour.

36.En réponse à la question d’un membre du Comité qui a souhaité avoir des renseignements sur l’application des Accords de Shengen et de Dublin (aux termes desquels un demandeur d’asile ne peut présenter qu’une seule demande dans toute l’Union européenne), M. Kuijer indique que les Pays‑Bas ont été saisis de 2 050 réclamations au titre de ces Accords par d’autres pays membres de l’Union et que les autorités néerlandaises ont présenté, quant à elles, 3 300 réclamations de ce type, qui ont abouti dans 40 % des cas.

37.Il a été demandé, à propos notamment du cas d’homosexuels iraniens, si des demandeurs d’asile sont susceptibles d’être renvoyés dans leur pays lorsqu’ils risquent d’y être persécutés en raison de leur orientation sexuelle. Le cas de ces Iraniens a été difficile à trancher car il n’était pas aisé d’établir s’ils risquaient d’être persécutés au seul motif de leur orientation sexuelle. Dans le doute, il a été décidé de ne pas les renvoyer. D’une manière générale, l’orientation sexuelle est effectivement prise en considération pour décider de conférer une protection à telle ou telle catégorie de personnes originaires de certains pays. Enfin, s’agissant des femmes, il n’existe pas aux Pays‑Bas de statistiques sur le nombre de celles qui ont obtenu un permis de séjour pour des motifs liés à des violences sexuelles encourues dans le pays d’origine.

38.Mme PETERSON (Pays‑Bas), évoquant la situation à Aruba, rappelle que la Constitution dont ce territoire s’est doté en 1986 se fonde sur plusieurs instruments internationaux de protection des droits de l’homme et notamment sur la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Le paragraphe 3 de l’article premier de ladite constitution proscrit toute atteinte à l’intégrité physique des personnes et n’autorise de dérogation à ce principe que si elle est prévue par la loi. Les Antilles néerlandaises et Aruba sont dotées d’un tribunal de première instance qui leur est propre et d’une cour d’appel qui leur est commune; la Cour suprême de La Haye sert de cour de cassation aux trois pays. Enfin, Aruba et les Antilles néerlandaises, qui font partie intégrante du Royaume des Pays‑Bas, sont de ce fait parties à toutes les Conventions des Nations Unies relatives aux droits de l’homme ainsi qu’à la Convention européenne et à ses protocoles. Il est donné effet à ces instruments par la législation nationale et les arrêts de la Cour européenne de justice sont applicables à Aruba comme aux Antilles néerlandaises.

39.En vertu du Code de procédure pénale d’Aruba, la détention avant jugement ne peut excéder cent seize jours: les suspects sont placés en garde à vue les dix premiers jours, puis transférés à l’établissement pénitentiaire. Durant toute la période de détention avant jugement, le juge examine à intervalles réguliers la légalité de la détention. En principe, les suspects passent en jugement dans les quatre mois mais à titre exceptionnel (par exemple si le suspect décide de changer d’avocat au cours du procès ou si la documentation nécessaire n’a pas été réunie), ce délai peut être prolongé de un à deux mois. Il est à noter que les renseignements statistiques présentés dans les réponses écrites reflètent uniquement l’état de la population carcérale au cours du mois considéré et que l’on ne saurait en déduire la durée de la détention avant jugement; de plus, les prisonniers qui font appel de leur condamnation continuent d’être comptabilisés comme détenus avant jugement.

40.Le Code pénal d’Aruba fait de tout contact sexuel avec des mineurs de 16 ans une infraction. L’implication dans la prostitution de mineurs âgés de 16 à 18 ans est également punissable. En outre, une nouvelle loi portant modification du Code pénal, promulguée en mai 2006, fait de la traite des femmes et des enfants aux fins de prostitution une infraction pénale. Enfin, il ne semble pas exister de tourisme sexuel proprement dit à Aruba.

41.Les mutilations génitales sont inconnues à Aruba; si une victime de ces pratiques inhumaines demandait l’asile, les autorités prendraient conseil à La Haye ainsi qu’auprès de l’antenne du Haut‑Commissariat pour les réfugiés à Caracas.

42.Si une enquête disciplinaire et une enquête pénale sont ouvertes au sujet des agissements d’un policier, des sanctions disciplinaires et pénales peuvent en principe être appliquées simultanément. Les principales sanctions disciplinaires sont l’avertissement, la mise à pied et le licenciement. Les sanctions pénales sont usuelles − amendes, peines de prison, interdiction professionnelle, etc. Les investigations conduites par le Bureau des enquêtes internes (BIZO) concernent les manquements et délits mineurs; les infractions plus graves commises par des policiers relèvent de l’Agence sur les services publics, qui enquête sous l’autorité du Procureur général. En 2005, une enquête menée par l’Agence a abouti à la condamnation d’un policier pour abus de pouvoir, falsification de documents et mauvais traitements; il a été condamné à une peine de prison et licencié.

43.Il est exact qu’une proportion relativement élevée de prisonniers sont de nationalité colombienne ou vénézuélienne. Les Colombiens détenus à Aruba ont pour la plupart commis des infractions liées à la drogue; en effet, Aruba est une plaque tournante pour le transit de drogues provenant généralement de Colombie et arrivant à Aruba par le Venezuela. Beaucoup de prisonniers vénézuéliens ont également été condamnés pour des infractions liées aux drogues, mais un grand nombre le sont aussi pour escroquerie, vol qualifié, et, depuis quelque temps, traite des êtres humains. Aruba connaît une augmentation du nombre d’affaires pénales relatives à la traite des êtres humains, celle‑ci étant depuis peu considérée comme une infraction pénale à Aruba.

44.En présence d’un prisonnier ayant subi des violences sexuelles, le règlement des prisons prescrit au personnel pénitentiaire de conseiller à la victime de porter plainte auprès de la police. Si le coupable fait partie du personnel pénitentiaire, la victime doit s’adresser à l’Agence sur les services publics; mais les prisonniers préfèrent souvent ne pas porter plainte. En tout état de cause, la victime reçoit une aide médicale et psychologique. Par ailleurs, la question des violences sexuelles est largement abordée lors de la formation du personnel pénitentiaire. Il est assez rare que des affaires de violences sexuelles soient portées à l’attention de la direction de l’établissement pénitentiaire, et le personnel médical comme les autorités de surveillance ont le sentiment que les violences sexuelles entre prisonniers ou entre gardiens et prisonniers ne sont pas fréquentes. En 2006, un seul incident mettant en cause un autre prisonnier a été signalé mais la victime, qui a reçu le traitement psychologique qui s’imposait, a refusé de porter plainte.

45.Mme THEDORA‑BREWSTER (Pays-Bas), évoquant la situation aux Antilles néerlandaises, indique que la formation du personnel policier et pénitentiaire en matière de droits de l’homme, assurée par l’Institut national de formation de la police, comporte un volet sur les droits des prisonniers incluant l’interdiction de la torture; en outre, chaque prisonnier est informé de ses droits. Le suivi et l’évaluation de la formation aux droits de l’homme sont assurés sur la base des plaintes déposées par les prisonniers, et des stages de recyclage sur les droits de l’homme sont organisés. Il est tenu compte des aspects culturels des besoins des prisonniers, par exemple en matière de régime alimentaire. Des cours de langue, en créole notamment, sont assurés pour améliorer la communication entre le personnel et les prisonniers. Les convictions religieuses et culturelles de chacun sont également respectées.

46.Toute personne arrêtée a accès à un avocat le jour même de son arrestation, mais seul le magistrat peut autoriser l’avocat à assister à l’interrogatoire. La durée maximale de la garde à vue est de dix‑huit jours, le suspect devant ensuite être placé en centre de détention si la procédure se prolonge. La situation a changé au centre de détention pour mineurs, désormais appelé «Bon Futuro»; il ne s’y trouve plus aucun mineur de 15 ans, ceux‑ci étant désormais placés dans un nouveau centre d’éducation surveillée financé par le Gouvernement néerlandais, où la nutrition, l’éducation, les soins médicaux, les loisirs et la vie sociale sont considérés comme prioritaires.

47.Le centre de détention préventive héberge deux catégories de personnes: les unes, la majorité, sont en attente de jugement et les autres, déjà condamnées, sont en instance de placement dans l’établissement où elles purgeront leur peine. Quant au centre de détention provisoire, il accueille uniquement, pour des raisons de sécurité, les fonctionnaires − policiers ou douaniers par exemple − condamnés pour des infractions pénales. L’appellation en sera modifiée lorsque le nouveau centre de détention provisoire sera construit.

48.Un gardien a été blessé par un prisonnier en 2005, mais les violences en prison sont pour l’essentiel entre prisonniers. Les cellules hébergeant quatre prisonniers ne donnent pas lieu à davantage de violence que les autres, les actes violents étant plutôt commis lors des activités se déroulant en commun.

49.Les unités de maintien de l’ordre ne sont plus utilisées en milieu carcéral depuis 2001. Du personnel pénitentiaire ayant reçu une formation spéciale est responsable de la sécurité intérieure de la prison en cas de troubles. Si la situation devenait incontrôlable, il serait fait appel à la police antiémeute.

50.Aucune violence sexuelle n’a été signalée aux autorités pénitentiaires dans la période récente. En effet, on veille désormais à ce que toute plainte émanant d’un prisonnier soit traitée dans les meilleurs délais et de façon confidentielle, afin que les prisonniers n’hésitent pas à signaler tous sévices ou menace de sévices sexuels. De même, en cas de violence entre prisonniers, le service compétent de l’administration pénitentiaire procède immédiatement à une enquête interne dont les conclusions sont envoyées au parquet, qui décide d’engager ou non une procédure pénale. Parallèlement, des mesures disciplinaires sont éventuellement prises par la direction de l’établissement. Si le prisonnier auteur des actes de violence est traduit devant un tribunal, il peut être condamné à une peine supplémentaire. Entre 1997 et 2007, six cas ont été portés à l’attention du parquet. Des statistiques complémentaires concernant les violences en prison seront communiquées au Comité dans le rapport qui lui sera prochainement soumis.

51.Enfin, en ce qui concerne les modalités de répartition des prisonniers, le système de classification actuellement en vigueur est en cours de modernisation. Une équipe pluridisciplinaire de spécialistes a entrepris une étude scientifique de la population carcérale afin de proposer un nouveau mode de répartition en fonction notamment de l’âge, du sexe, du niveau d’éducation, de la nature de l’infraction et de l’état de santé.

52.Le PRÉSIDENT (Rapporteur pour les Pays‑Bas) remercie la délégation pour la façon exemplaire dont elle a répondu aux questions posées. Il subsiste cependant certains points à élucider, par exemple dans l’affaire du Suriname; les Pays‑Bas ne sont certes pas tenus de demander l’extradition d’un coupable s’il se trouve dans un autre pays, mais ils ont l’obligation de le poursuivre s’il se trouve dans leur juridiction. Au reste, s’il est vrai que nul n’est censé mettre en cause les décisions des tribunaux, les gouvernements le font parfois et le pouvoir judiciaire ne doit pas être sans limites. Quant au Comité, il a pour mission de s’assurer qu’une condamnation est proportionnée à l’infraction et pour qu’il dise si elle est par trop légère ou excessivement lourde, il doit disposer de détails concrets sur les éventuelles circonstances atténuantes ou aggravantes.

53.Il ressort des renseignements fournis que les Pays‑Bas sont soucieux de respecter les droits de l’homme dans la lutte contre le terrorisme et qu’ils n’ont été à l’origine d’aucun transfert illégal; en outre, ils font preuve de circonspection à l’égard des assurances diplomatiques.

54.Des éclaircissements ont été apportés au sujet de la procédure accélérée, notamment en ce qui concerne les affaires les plus complexes. Mais il semble que l’absence de critères, fussent‑ils négatifs, pose un problème eu égard à la brièveté des délais; il est concevable, par exemple, qu’un demandeur d’asile demeure plusieurs jours sans les conseils d’un avocat. M. Mavrommatis estime que les délais devraient être prolongés dans certains cas, et que si un demandeur sans papiers a présenté sa demande dans les délais, il serait justifié de procéder à un examen plus approfondi. En outre, le paragraphe 6 de l’article 4 de la loi sur le droit administratif général devrait être revu, car les faits qui n’ont pu être présentés dans les délais devraient être traités comme des faits nouveaux.

55.Il est surprenant que les demandes d’asile émanant de personnes venues de pays réputés peu sûrs et dont les affirmations peuvent être vérifiées rapidement ne soient pas examinées dans le cadre de la procédure accélérée. L’établissement de critères objectifs relatifs à l’applicabilité de la procédure accélérée permettrait peut-être d’éviter des incohérences de cette nature.

56.Mme SVEAASS (Corapporteuse pour les Pays-Bas) remercie la délégation pour les réponses détaillées et les informations actualisées qu’elle a fournies au Comité, notamment au sujet de la situation des mineurs à la prison de Bon Futuro. Concernant la procédure d’asile, elle espère qu’il sera à l’avenir fait en sorte que les rapports médicaux soient pris en considération dans le cadre de l’examen des demandes, dans la mesure où les informations qu’ils contiennent peuvent contribuer de manière déterminante à établir la véracité des déclarations du demandeur, notamment en ce qui concerne les allégations de torture. De ce point de vue, l’application du Protocole d’Istanbul est une absolue nécessité.

57.M. KOVALEV, considérant les Antilles néerlandaises et Aruba comme des États indépendants car dotés d’une Constitution propre, demande s’ils ne devraient pas à ce titre présenter chacun un rapport.

58.M. MARIÑO MENÉNDEZ souhaiterait que lui soit confirmé le fait que le non‑respect, par Aruba ou les Antilles néerlandaises, d’une obligation énoncée dans la Convention contre la torture, engage la responsabilité internationale de l’État néerlandais. Par ailleurs, il serait intéressant de savoir si la politique de régularisation de masse menée par le Gouvernement actuel vise également les demandeurs d’asile déboutés en première instance qui vivent sur le territoire des Pays-Bas depuis plusieurs années dans l’attente du résultat de leur recours.

59.Mme BELMIR, faisant référence aux observations finales formulées par le Comité des droits de l’enfant concernant le deuxième rapport périodique de l’État partie présenté en 2004 (CRC/C/15/Add.227), note que la persistance au sein de la société de préjugés et de comportements discriminatoires, en particulier à l’égard des enfants appartenant à des minorités ethniques ainsi que des enfants réfugiés et demandeurs d’asile, y était mentionnée parmi les sujets de préoccupation. Il serait utile de savoir si ce problème est toujours d’actualité, notamment à Aruba. En ce qui concerne la justice pour mineurs, le fait que les personnes âgées de 16 à 18 ans soient assimilées à des adultes est incompatible avec les normes internationales, notamment celles établies par la Convention relative aux droits de l’enfant. La délégation a indiqué que la procédure d’asile accélérée n’était pas applicable aux enfants de moins de 12 ans, ce qui signifie par conséquent que les demandes d’asile présentées par des mineurs de 12 à 18 ans peuvent être examinées selon cette procédure. Or quand on sait à quel point il est difficile pour un adulte de satisfaire aux exigences de cette procédure, notamment en termes de délais, on voit mal comment un mineur, même âgé de plus de 12 ans, pourrait y parvenir. À cet égard, le fait que les rapports médicaux ne sont pas pris en considération constitue un obstacle supplémentaire.

60.M. GALLEGOS CHIRIBOGA dit que la question des procédures d’asile est intimement liée aux politiques d’immigration, dont on constate un durcissement dans de nombreux pays, notamment européens. Les impératifs de sécurité nationale liés à la menace terroriste sont certes à prendre en considération, mais ils ne devraient pas empêcher les États de mener une réflexion globale sur l’immigration. Concernant la traite des personnes, un problème certes un peu en marge des préoccupations directes du Comité mais qui mérite néanmoins que l’on s’y attarde compte tenu de son ampleur, les Pays-Bas ont adopté une politique active pour lutter contre ce fléau. Des précisions sur la manière dont ils coopèrent avec d’autres pays seraient les bienvenues, l’instauration d’une coopération internationale étroite étant une condition sine qua non de la lutte contre la traite et contre les organisations criminelles transnationales qui en tirent profit.

61.M. de KLERK (Pays-Bas) dit qu’à la différence de certains traités internationaux conclus par le Royaume des Pays-Bas, les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, notamment la Convention contre la torture, s’appliquent à l’ensemble du Royaume, même si chaque État les met en œuvre de manière indépendante. C’est l’État néerlandais qui est comptable de toute violation de ces instruments car c’est lui qui est responsable de la politique de défense et de la politique étrangère des territoires du Royaume. En ce qui concerne la présentation des rapports, le Royaume des Pays-Bas entend conserver la formule du rapport unique, sauf contraintes d’ordre pratique rendant nécessaire l’établissement de rapports distincts.

62.En ce qui concerne les demandeurs d’asile présents sur le territoire des Pays-Bas depuis de nombreuses années, il a déjà été expliqué qu’il s’agissait de personnes qui avaient présenté leur demande avant l’adoption de la nouvelle loi relative aux étrangers et qui étaient par conséquent assujetties à l’ancienne loi. Le nouveau Gouvernement a néanmoins décidé, sous réserve du respect de certains critères, de régulariser leur situation.

63.M. de Klerk partage l’avis de M. Gallegos Chiriboga selon lequel la coopération internationale est la clef du combat contre la traite. Les Pays-Bas sont parties à presque tous les accords internationaux traitant de la question, dans le cadre non seulement de l’ONU, mais aussi d’institutions régionales telles que l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Il existe également un Rapporteur national chargé de cette question, qui dispose d’un important réseau international de contacts.

64.M. KUIJER (Pays-Bas) souhaiterait ajouter quelques remarques au sujet des procédures d’asile, et notamment de la procédure accélérée. Tout d’abord, aucun cas compliqué n’est examiné selon cette procédure, étant entendu que le caractère «compliqué» de l’affaire est évalué par le juge. Ensuite, il est vrai qu’il n’y a pas de critères définissant expressément les cas où la procédure accélérée est applicable, même s’il existe des règles qui déterminent les cas où elle ne s’applique pas − enfants de moins de12 ans, cas compliqués. Il pourrait en effet être utile, comme l’a suggéré le Rapporteur, de définir plus précisément les circonstances dans lesquelles elle doit être appliquée. Pour ce qui est des délais prévus dans le cadre de la procédure accélérée, qui sont effectivement très courts, une prolongation pourrait être envisagée dans certains cas. Le critère du contrôle marginal (question 6 de la liste des points à traiter) et l’application du paragraphe 6 de l’article 4 de la loi sur le droit administratif général seront réexaminés compte tenu des remarques formulées par le Comité à ce sujet. Par ailleurs, les demandes émanant de personnes provenant de pays réputés peu sûrs ne sont pas traitées suivant la procédure accélérée non pas en raison d’une incohérence dans l’application de ladite procédure, mais tout simplement parce que ces cas relèvent de la protection catégorielle, dont les procédures sont totalement distinctes de la procédure d’asile. En ce qui concerne la prise en considération des rapports médicaux dans le cadre de la procédure d’asile, il semble que la réponse fournie ait à tort donné à penser au Comité que les rapports médicaux n’étaient pas du tout examinés, ce qui n’est bien évidemment pas le cas. Lorsqu’un rapport médical est fourni, il est examiné. Pour autant, il ne pèse pas nécessairement de manière déterminante dans la décision finale.

65.M. de KLERK (Pays-Bas) remercie le Comité pour ses remarques utiles et constructives. Elles seront dûment prises en considération. En ce qui concerne le prochain rapport périodique des Pays-Bas, la délégation a cru comprendre qu’il devrait être présenté dans quatre ans. Est-ce exact?

66.Le PRÉSIDENT dit que la date de la présentation du prochain rapport de l’État partie ainsi que la recommandation du Comité sur le point de savoir si un rapport distinct concernant les Antilles néerlandaises devra entre-temps être présenté figureront dans les observations finales concernant le quatrième rapport périodique des Pays-Bas, lesquelles seront communiquées à la Mission permanente des Pays-Bas dès après la fin de la session.

67. La délégation néerlandaise se retire.

La partie publique de la séance prend fin à 17 heures.

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