NATIONS

UNIES

CAT

Convention contre

la torture et autres peines

ou traitements cruels,

inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/SR.55419 août 2003

Original: FRANÇAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

Trentième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 554e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève

le vendredi 2 mai 2003, à 10 heures

Président: M. BURNS

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (suite)

Deuxième rapport périodique de la Turquie

La séance est ouverte à 10 heures.

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique de la Turquie (CAT/C/20/Add.8; HRI/CORE/1/Add.116)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation turque prend place à la table du Comité.

2.M. KURTTEKIN (Turquie) dit qu’il se réjouit d’avoir l’occasion de procéder à un échange de vues avec les membres du Comité sur une question aussi importante que celle des droits de l’homme et d’apporter des informations complémentaires sur les faits nouveaux survenus récemment en Turquie concernant la mise en œuvre de la Convention contre la torture. Son pays reste fermement engagé à promouvoir et à protéger ces droits. Depuis la présentation du rapport à l’examen en novembre 2001, la Turquie s’est attachée à renforcer la démocratie, le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la primauté du droit ainsi que l’indépendance du pouvoir judiciaire. Les actes de torture, les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants constituent une atteinte flagrante aux droits de l’homme et à la dignité humaine. M. Kurttekin assure donc les membres du Comité que son pays, État partie à la Convention contre la torture depuis 1988, continuera de prendre des mesures efficaces sur les plans législatif, administratif et autres afin de prévenir et d’éliminer la torture.

3.En ce qui concerne la Constitution, le 3 octobre 2001, le Parlement turc a adopté une série d’amendements contenant de nouvelles dispositions relatives à la prévention de la torture, ainsi qu’au renforcement de la démocratie et de l’autorité civile, de la liberté et de la sécurité de la personne, du respect de la vie privée, de l’inviolabilité du domicile, de la liberté de communication, de la liberté de résidence et de circulation, de la liberté d’association ainsi que de l’égalité entre les hommes et les femmes. En vertu de l’amendement apporté au paragraphe 5 de l’article 19, une personne arrêtée ou détenue doit désormais être déférée devant un juge dans les 48 heures et, lorsque le délit a été commis collectivement, dans un délai de quatre jours (au lieu de 15 jours auparavant). L’amendement apporté au paragraphe 6 du même article lève les restrictions dont faisait l’objet la procédure de notification de l’arrestation ou de la détention d’une personne à ses proches, cette notification devant être désormais faite sans délai. Le dernier paragraphe de l’article 19 de la Constitution a également été modifié afin d’assurer qu’une personne ayant été soumise à un traitement incompatible avec les dispositions de cet article soit dédommagée conformément aux principes de la législation relative à l’indemnisation. À l’article 38 de la Constitution (concernant les infractions et les peines) a été ajouté un nouveau paragraphe, en vertu duquel les dépositions recueillies dans des circonstances non conformes à la loi ne peuvent être retenues comme éléments de preuve. Quant à l’amendement apporté à l’article 74, il prévoit que les étrangers résidant en Turquie, ont, conformément au principe de réciprocité, le droit de s’adresser par écrit aux autorités compétentes et à la Grande Assemblée nationale de Turquie en ce qui a trait à une plainte les concernant ou concernant le public. Le résultat de leur requête leur est désormais communiqué sans retard par écrit.

4.Au sujet des changements apportés à la législation, M. Kurttekin signale qu’en février 2002, le Parlement turc a adopté le premier ensemble de textes d’harmonisation (loi no 4744) avec l’acquis de l’Union européenne en vue de l’application des amendements constitutionnels susmentionnés. En vertu d’un l’amendement à l’article 107 du Code de procédure pénale, toute mesure de détention ou de prorogation de la détention doit être notifiée sans retard à un proche ou à une autre personne désignée par le détenu. Celui‑ci peut, s’il le souhaite, prévenir lui‑même sa famille. En mars 2002, le Parlement a adopté le deuxième ensemble de textes d’harmonisation (loi no 4748). D’autre part, un amendement dissuasif important apporté à la loi sur la fonction publique dispose que l’indemnisation devant être versée en cas de torture et autres peines ou traitement cruels, inhumains ou dégradants par l’organisme concerné de l’État conformément aux décisions de la Cour européenne des droits de l’homme est désormais remboursée par le fonctionnaire qui a commis l’infraction. Par ailleurs, le dernier paragraphe de l’article 16 de la loi sur la création des tribunaux de sûreté de l’État et la procédure suivie par ces tribunaux en vertu duquel tant que l’action en justice n’était pas engagée le juge pouvait dissimuler à l’accusé certains éléments du dossier, a été abrogé.

5.En janvier 2003, le Parlement a adopté le quatrième ensemble de textes d’harmonisation qui a introduit de nouvelles dispositions visant à renforcer les mesures de lutte contre la torture. C’est ainsi que l’obligation d’obtenir une autorisation administrative dans les affaires de torture ou de mauvais traitements, figurant dans la loi sur les poursuites à l’encontre des membres de la fonction publique et autres employés de l’État, a été supprimée. Des amendements ont également été apportés au Code pénal afin de renforcer les mesures tendant à dissuader le recours à la torture. À cet égard, les sanctions encourues pour les infractions visées aux articles 243 et 245 du Code pénal ne peuvent plus être converties en amendes ni faire l’objet d’un sursis. Le décret‑loi no 430 concernant la durée et conditions de détention dans les zones sous état d’urgence a, conformément aux amendements apportés à la Constitution dont il est fait état plus haut, fait l’objet de modifications qui ont consisté à ramener de dix à quatre jours la période maximale pendant laquelle un condamné ou un détenu peut être sorti de prison pour aider à faire avancer une enquête. La décision à ce propos doit être prise par le juge après consultation de l’intéressé. La période passée à l’extérieur de la prison est déduite de la peine. En outre, l’état de santé du détenu doit faire l’objet d’un rapport médical, chaque fois qu’il sort de la prison ou du centre de détention ou qu’il y revient. M. Kurttekin tient, dans ce contexte, à préciser qu’il a été mis fin à l’état d’urgence en Turquie le 30 novembre 2002, de sorte que le pays a pu retirer sa réserve au sujet de l’article 5 (concernant le droit à la liberté et à la sûreté de la personne) de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

6.Le paragraphe 4 de l’article 16 de la loi sur la création des tribunaux de sûreté de l’État et la procédure suivie par ces tribunaux a été supprimé et les dispositions du Code de procédure pénale visant à protéger les droits des personnes appréhendées ou arrêtées s’appliquent désormais aussi aux infractions pénales relevant des tribunaux de sûreté de l’État. D’autre part, plusieurs articles de la loi sur les requêtes ont été modifiés conformément à l’article 74 de la Constitution. En vertu des nouveaux textes, les citoyens turcs ou étrangers résidant en Turquie ayant déposé une plainte sur un sujet les concernant doivent recevoir une réponse ou des informations sur l’état d’avancement de la procédure d’examen de leur requête dans un délai maximum de 30 jours. S’agissant des requêtes adressées à la Grande Assemblée nationale de Turquie, les décisions prises à leur sujet par le Comité des requêtes de cette instance doivent être communiquées au requérant dans un délai maximum de 60 jours. Les organes et institutions concernés doivent, quant à eux, répondre dans les 30 jours à toute demande émanant du Comité des requêtes ou de la Grande Assemblée nationale de Turquie. De son côté, la Commission d’enquête sur les droits de l’homme de la Grande Assemblée nationale de Turquie doit informer le requérant des résultats ou de l’état d’avancement de sa demande dans un délai maximum de 60 jours.

7.Le 5 février 2003, certains articles du Code pénal turc et de la loi sur l’administration des établissements pénitentiaires et des centres de détention ont été modifiés. Selon un nouvel article ajouté au Code pénal, les personnes qui empêchent les condamnés et les détenus de communiquer, d’avoir des visites, de participer aux diverses activités (cours de formation, sport, loisirs, ateliers, activités sociales et culturelles), de consulter le médecin de l’établissement, de choisir ou de voir un avocat ou un conseil, de se rendre aux audiences du tribunal ou auprès du Procureur général, de rencontrer des responsables de la prison ou encore qui empêchent des prisonniers ou des détenus libérés de quitter l’établissement, ou qui entravent toutes sortes de visites et contacts prévus par la loi, sont, indépendamment de la question de savoir si ces actes sont constitutifs d’autres infractions pénales, passibles d’une peine d’emprisonnement allant de un à trois ans. Les personnes qui empêchent des condamnés ou des détenus de se nourrir ou les incitent à une grève de la faim encourent deux à quatre ans d’emprisonnement. Au cas où un détenu décède par suite d’un des deux actes susmentionnés, le responsable est passible de 10 à 20 ans d’emprisonnement.

8.Des modifications ont également été apportées aux articles 3 et 4 de la loi no 1721 sur l’administration des établissements pénitentiaires et des centres de détention afin d’améliorer la protection de la santé des détenus et le traitement médical qui leur est fourni. Ces derniers doivent recevoir une nourriture de qualité en quantité suffisante ainsi que de l’eau potable et avoir la possibilité de se procurer des aliments nécessaires à leur bien-être, dans le magasin de la prison ou à l’extérieur, avec la permission et sous la surveillance de l’administration pénitentiaire.

9.M. Kurttekin, évoquant la législation secondaire, indique que le règlement relatif à l’arrestation, à la garde à vue et à l’interrogatoire a été modifié conformément aux changements apportés à la Constitution et à la législation. Le nouveau règlement tient également compte des recommandations du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT). Les examens médicaux doivent désormais être effectués en privé, en présence du seul médecin, sauf si ce dernier ou le patient réclame la présence d’un tiers. Cette mesure vise à permettre aux détenus de formuler librement toute plainte de mauvais traitement ou de torture. Les principes régissant l’arrestation, la garde à vue et l’interrogatoire fixés par les nouveaux textes de loi ont été pris en compte. C’est ainsi, qu’après l’expiration du délai prescrit par la loi, nul ne peut être maintenu en détention sans l’accord d’un juge. Le règlement stipule en outre que les agents de la force publique doivent notifier immédiatement aux personnes appréhendées leur droit de garder le silence et d’être assistées par un conseil juridique. Un membre de la famille ou toute personne désignée par le détenu est informé sans retard de la décision concernant l’arrestation ou de l’extension de la période de détention. La personne arrêtée est également informée de son droit de contester son arrestation et de la manière dont elle peut exercer ce droit.

10.Le 15 octobre 2002, la Cour de cassation a établi une nouvelle jurisprudence concernant l’interprétation du concept de torture et de mauvais traitements. La Cour a statué que la torture était un crime contre l’humanité et rappelé qu’à l’instar de tout autre acte inhumain ou dégradant, elle était interdite en vertu des instruments internationaux et de la législation interne. Les décisions de la Cour de cassation sont contraignantes pour toutes les juridictions.

11.À propos de l’application des lois et règlements, M. Kurttekin fait observer qu’en vertu du paragraphe 2 de l’article 25 du règlement relatif à l’arrestation, à la garde à vue et à l’interrogatoire, les procureurs publics doivent, en application de leur mandat, examiner les centres de détention, les salles d’interrogatoire, les conditions de détention, les motifs et la durée de la détention; ils doivent également inspecter les procédures d’enregistrement des personnes écrouées et consigner leurs conclusions dans le registre du centre de détention. Conformément aux rapports et recommandations des procureurs, les directions de la sûreté ont pris les mesures nécessaires pour assurer la pleine observation du règlement.

12.La modernisation des centres de détention se poursuit conformément aux normes énoncées dans le règlement, lesquelles répondent aux critères internationaux en la matière. D’autre part, un projet élaboré par la Direction générale de la sûreté vise à améliorer l’équipement technique des salles d’interrogatoire, notamment les moyens de surveillance et d’enregistrement vidéo des déclarations des suspects et détenus. Le descriptif du projet a été envoyé au CPT pour évaluation. Conformément aux recommandations de cet organe, une circulaire datée du 30 janvier 2002, contenant des instructions sur le réaménagement des salles d’interrogatoire et centres de détention a été envoyée à tous les services de la Direction générale de la sûreté.

13.En vertu de l’article 10 du règlement, tout changement opéré dans la situation de la personne placée en détention nécessite au préalable un examen médical de l’intéressé. Le rapport du médecin est envoyé au Procureur et au chef de la police (dans une enveloppe cachetée). Un exemplaire est remis à la personne concernée. Conformément aux dispositions du règlement, toute personne arrêtée, même si elle relève des tribunaux de sûreté de l’État, reçoit un document l’informant de ses droits. Elle en est également informée oralement.

14.La Turquie entretient une coopération étroite avec le CPT et tient dûment compte de toutes les recommandations formulées par cet organe dont les remarques sur les réformes en cours sont positives et encourageantes. Il importe de noter que la Turquie a autorisé la publication des rapports du CPT, y compris ceux établis à l’issue de ses visites dans les prisons de type F, l’objectif étant de rendre le système pénitentiaire plus transparent.

15.À propos de la formation aux droits de l’homme qu’il considère comme vitale dans le cadre des efforts pour prévenir toute violation et, en particulier la torture, M. Kurttekin signale que la Turquie coopère avec le Conseil de l’Europe et l’Union européenne. Un aspect important de cette coopération porte sur le projet consacré à la formation des formateurs des écoles de police et de gendarmerie et à l’élaboration de cursus. De plus, un programme de coopération entre les trois parties a été lancé en 2001 afin d’aider la Turquie à se conformer à l’acquis communautaire dans le domaine des droits de l’homme. Ce programme comprend notamment une formation aux droits de l’homme à l’intention des fonctionnaires, une campagne de sensibilisation de la société à ces droits et le soutien des réformes législatives.

16.Le Ministère de l’intérieur organise en permanence des programmes de formation et d’éducation visant à prévenir toute violation des droits de l’homme. Des cours sur les droits de l’homme ont été incorporés aux programmes de formation des futurs gouverneurs de province et de district. Tous les cours des centres de formation de la police et de l’Académie de la police font également une large place à l’éducation dans le domaine des droits de l’homme. En outre, les cours sur les «droits de l’homme» et les «relations publiques» sont devenus obligatoires dans tous les programmes de formation en cours d’emploi de la Direction générale de la sûreté. En 2001, 378 programmes de formation de ce type ont été organisés avec la participation de 2 886 responsables et 12 065 agents de police. En 2002, 3 005 fonctionnaires ont participé à 47 stages de formation en cours d’emploi. Les droits de l’homme seraient, d’autre part, au centre de 289 programmes de formation prévus pour 2003. En outre, des séminaires et conférences sont organisés dans tout le pays à l’intention du personnel chargé de la sécurité avec la participation d’éminents universitaires et de hauts fonctionnaires des ministères de la justice et de l’intérieur afin de l’informer des derniers changements apportés à la législation. Plus de 12 000 fonctionnaires ont reçu, dans le cadre de cours de base sur la lutte contre le terrorisme, une formation aux droits de l’homme. Un de ces cours a permis de familiariser de hauts responsables des services de lutte contre le terrorisme avec les modifications législatives dans le domaine des droits de l’homme et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. La Direction générale de la sûreté a élaboré, à des fins préventives, un projet de formation consacré à l’analyse du profil des personnes qui se suicident en détention. Depuis 1992‑1993, des cours sur les droits de l’homme sont également dispensés dans les écoles de gendarmerie, à tous les niveaux. À ce jour, 29 713 membres de ce corps ont participé à des activités de formation aux droits de l’homme. Dans le cadre d’un protocole signé entre l’Université d’Eskişehir et le commandement central de la gendarmerie, des officiers de ce corps suivront, à partir de l’année 2003, un programme d’études supérieures de deux ans, qui comprendra un module sur les droits de l’homme. Une formation (séminaires et conférences) est également assurée dans toutes les unités provinciales de la gendarmerie à l’intention des officiers, sous‑officiers et des hommes du rang. Depuis 2001, des cours sur la déontologie sont également organisés. Un manuel sur l’éthique de la gendarmerie est utilisé à cet effet. D’autre part, selon le règlement relatif à la formation en cours d’emploi, à la promotion du personnel et à la formation des candidats à des postes de responsabilité du Ministère de la justice, l’enseignement des droits de l’homme est obligatoire. Des cours sur ce thème font aussi partie de la formation en cours d’emploi du personnel pénitentiaire et de celui des centres de détention provisoire, laquelle met l’accent sur la lutte contre la torture et les mauvais traitements. Un projet commun avec le British Council intitulé «Formation des juges et des procureurs» est en cours depuis 2001. Il convient aussi de mentionner un autre projet avec l’Union européenne et le Conseil de l’Europe, dans le cadre duquel 200 juges et procureurs publics seront formés aux droits de l’homme sur la base de la jurisprudence de la Cour européenne. De même, conformément à la loi sur les établissements pénitentiaires et les centres de détention, adoptée en juillet 2002, le personnel des nouvelles prisons de type F recevra une formation à Ankara avant de prendre ses fonctions.

17.La réforme des prisons se poursuit. C’est un processus continu que la Turquie a engagé en étroite coopération avec l’Union européenne, le Conseil de l’Europe et le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT). L’un des problèmes cruciaux à résoudre est celui du financement de cette réforme. Il a fallu trouver des ressources supplémentaires pour améliorer l’environnement physique aussi bien que la nourriture des prisonniers. Des progrès sensibles ont été faits dans ces deux domaines. Depuis peu, les sommes consacrées quotidiennement à l’alimentation des détenus sont identiques à celles dépensées pour les soldats dans les forces armées. En juin 2001, des conseils de surveillance des prisons composés de membres de la société civile indépendants et de représentants du Ministère de la justice ont été créés et sont déjà au nombre de 121. Leurs membres doivent répondre à certaines exigences quant à leur compétence et à leur réputation. Une loi portant création des juges de surveillance est en vigueur depuis mai 2001. Ce nouveau dispositif permet à tout prisonnier de porter plainte au sujet des conditions dans lesquelles il purge sa peine; ces juges sont au nombre de 140.

18.Un important programme de construction de prisons a été engagé. Dix‑huit sont déjà en service, dont 11 sont des prisons de type F, où les détenus ne sont que un à trois par cellule. Les prisons de type E, les cellules de mise à l’isolement et les unités médicales sont en cours de rénovation, et les anciens dortoirs vont tous être transformés en unités accueillant de deux à huit prisonniers.

19.Les autorités turques sont bien conscientes des critiques qui leur sont adressées en matière de mauvais traitements et de torture; c’est pourquoi elles ont fourni des renseignements extrêmement détaillés sur ce qui est et sera accompli en matière législative, administrative et dans le domaine de l’éducation et de la formation aux droits de l’homme, eu égard au contexte difficile qui est celui où se trouve la Turquie. Le nouveau Gouvernement élu en novembre 2002 va engager une politique de tolérance zéro. Il est résolu à aller de l’avant dans le domaine de la protection des droits de l’homme et notamment de la lutte contre la torture, et il mènera à bien les réformes auxquelles le peuple turc aspire légitimement.

20.M. MARIÑO MENÉNDEZ (Rapporteur pour la Turquie) remercie la délégation turque pour le rapport présenté (CAT/C/20/Add.8) et l’exposé détaillé qui vient d’être fait. Il rappelle que le rapport initial (CAT/C/7/Add.6) remonte à 1990 et que le présent rapport, remis en 2001, couvre en réalité une période correspondant quasiment à trois rapports périodiques. Beaucoup de choses se sont passées en Turquie et dans le monde depuis 1990 et l’État partie a connu d’importants changements. La perspective d’une intégration à l’Union européenne, en particulier, l’a amené à accepter peu à peu une surveillance internationale accrue de l’application des normes internationales reconnues en matière de lutte contre la torture. À cet égard, on peut citer les faits marquants qu’ont été le droit reconnu aux particuliers turcs de saisir la Cour européenne des droits de l’homme (ce que plusieurs centaines d’entre eux ont fait), la reconnaissance de la compétence du Comité conformément aux articles 21 et 22 de la Convention, les visites du Rapporteur spécial sur la question de la torture de la Commission des droits de l’homme et la publication des rapports du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT). Enfin, on se rappellera qu’entre 1990 et 1992, la Turquie a fait l’objet d’une enquête confidentielle engagée en application de l’article 20 de la Convention, et qu’à l’issue de celle‑ci, le Comité a conclu que la pratique de la torture était systématique en Turquie.

21.Face à un si grand nombre d’événements intervenus sur une période aussi longue, il est bien difficile d’avoir une idée claire de l’évolution de la situation. Dans la période récente, l’État partie a fait preuve d’une louable diligence, apportant quantité de renseignements sur les changements, législatifs notamment, intervenus depuis novembre 2001; tout récemment encore, le Comité a reçu copie d’une circulaire du Ministère de la santé relative aux procédures d’examen médico‑légal. L’abondance des documents fournis rend plus délicate encore la tâche d’apprécier la situation régnant en Turquie en matière de torture, mais certains faits importants doivent être relevés: tout d’abord, l’état d’urgence, en vigueur depuis 1978, a été levé dans différentes provinces du sud‑est de la Turquie, si bien que les instruments de protection des droits de l’homme peuvent enfin prendre effet sur l’ensemble du territoire de l’État partie. En outre, un cessez‑le‑feu a été signé en 1999 avec le parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), de telle sorte que les principales difficultés faisant obstacle à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne semblent quelque peu aplanies.

22.La Turquie a accepté la plupart des recommandations du CPT, du Conseil de l’Europe et de l’Union européenne et elle fait des efforts louables pour rendre sa législation conforme aux normes internationales et notamment européennes. Nul doute que les nouvelles mesures prises portent à la fois sur les textes législatifs et sur les pratiques de l’administration, qu’il s’agisse du Ministère de l’intérieur, du Ministère de la justice, du système pénitentiaire, etc., et qu’elles intéressent notamment le traitement des détenus. Le rapport à l’examen fait état d’une décision toute récente de la Cour de cassation qui semble indiquer que les actes de torture commis par des fonctionnaires vont être considérés comme des crimes, voire des crimes contre l’humanité, et non plus comme de simples délits passibles d’une amende. Cette décision fera jurisprudence et devrait amener les autorités turques à conférer à la torture le statut spécifique qui est le sien en droit international.

23.Pas plus que le rapport initial de la Turquie (CAT/C/7/Add.6), le rapport à l’examen n’évoque l’application de l’article premier de la Convention. On retire toutefois de l’ensemble du rapport l’impression que le droit turc tient compte de cet article et la section du rapport consacrée à l’application de l’article 4 de la Convention, notamment le paragraphe 57 relatif aux articles 243 et 245 du Code pénal est à cet égard instructive. M. Mariño Menéndez se demande toutefois si l’article 243 du Code pénal reprend véritablement la définition de la torture figurant à l’article premier de la Convention en ce qui concerne l’acquiescement à la torture et si les tortures infligées avec l’assentiment des autorités entraînent la responsabilité de l’État. D’autre part, la définition de la torture donnée par la législation turque fait‑elle du viol une forme de torture, et le viol est‑il considéré comme un crime aussi grave que d’autres actes de torture?

24.À propos de l’article 2, il est indiqué que de nouvelles mesures ont été prises pour faire appliquer la Convention. Le Comité souhaiterait obtenir des précisions sur les progrès accomplis sur les plans législatif, administratif et judiciaire pour prévenir la torture et en particulier, apprendre quelle est l’efficacité des normes appliquées. Des règles de conduite ont récemment été promulguées en matière de procédure pénale notamment, mais édicter des normes est une chose, en garantir l’application en est une autre: en matière de respect des normes applicables aux détenus – enregistrement immédiat de chacun d’eux, délais de garde à vue, etc. –, il semble que la surveillance a été renforcée et que les magistrats ont reçu des instructions. Mais il serait, à cet égard, aussi important de savoir si des inspections systématiques ont lieu, si un compte rendu est établi et si, de l’avis de la délégation turque, ces inspections sont efficaces. Des organisations non gouvernementales indépendantes participent‑elles en pratique à cette surveillance et sont‑elles notamment admises dans les commissariats de police, les lieux de détention avant jugement et les établissements médicaux et psychiatriques? M. Mariño Menéndez rappelle que ce travail d’inspection systématique ne doit pas être fait uniquement par des fonctionnaires et à cet égard, il demande si les conseils de surveillance des prisons sont associés à cette activité et jouent un rôle concret dans la protection des droits des détenus. Des ONG indépendantes ont récemment rapporté qu’en réalité, toutes les garanties ne sont pas appliquées aux détenus: les policiers n’enregistreraient pas immédiatement le placement en détention, le droit des personnes arrêtées de consulter immédiatement un avocat serait assez rarement respecté, les détenus seraient retenus beaucoup plus longtemps que les délais prévus, et divers aspects du fonctionnement du système laisseraient à désirer. On ne rappellera jamais assez que la surveillance systématique des lieux de détention est un outil essentiel de la lutte contre la torture.

25.L’article 2 de la Convention a également pour effet d’assurer la protection des groupes ou individus vulnérables. Or des cas de harcèlement des défenseurs des droits de l’homme ont été signalés, dont les membres d’ONG et d’autres représentants de la société civile sont notamment la cible. C’est ainsi que le Président de l’Association pour les droits de l’homme d’Istanbul a été condamné le 5 novembre 2002 à 45 mois de prison pour s’être fait l’écho, en décembre 2000 lors d’une émission télévisée, de l’opposition du PKK au transfert forcé de prisonniers dans des prisons de type F. Des plaintes concordantes font état de multiples cas où des organisations de défense des droits de l’homme se heurtent à des difficultés dans leurs activités, sans apparemment que les autorités de l’État ne s’en émeuvent. Il serait souhaitable que la délégation donne son avis à ce sujet.

26.Les enfants sont un autre groupe vulnérable. De nombreuses plaintes font état de mauvais traitements et même de tortures à enfants. Le Comité souhaiterait savoir s’il existe en Turquie des normes juridiques de protection des enfants privés de liberté. Des cas affligeants, par exemple de placement en détention d’enfants de moins de six ans, ont été rapportés. Les enfants bénéficient‑ils d’emblée d’une aide juridique adaptée à leur âge et existe‑t‑il un organisme public chargé de protéger les mineurs privés de liberté?

27.Les minorités sont également un groupe vulnérable et si la population kurde est nombreuse, elle n’en constitue pas moins une minorité nationale, ethnique et culturelle. M. Mariño Menéndez n’abordera pas le problème dans son ensemble mais se contentera d’évoquer les démolitions de logements et déplacements forcés dont cette population est victime en différents endroits du pays. Il y a lieu de rappeler que la destruction de villages et le déplacement de populations peuvent constituer des violations de l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales − article qui correspond aux articles premier et 16 de la Convention contre la torture. Tout récemment encore, le 20 juillet 2002, 600 à 700 personnes de deux villages de la province de Sirnak ont été déplacées de force par les autorités turques: il serait souhaitable que le Comité dispose de plus amples renseignements sur cet épisode et sur d’autres affaires du même genre.

28.Enfin, les femmes constituent elles aussi un groupe à risque. Une ONG indépendante a signalé que les détenues faisaient souvent l’objet de violences sexuelles. M. Mariño Menéndez souhaiterait savoir quelles garanties les protègent des violences de tous ordres. Il semble que les certificats médicaux établis à la suite de sévices ne sont pas toujours complets et qu’ils tendent souvent à dissimuler l’existence de traces de violences dont seraient victimes des femmes en détention.

29.À propos de l’article 3 de la Convention, le rapport à l’examen évoque la loi de 1950 sur le séjour et les déplacements des étrangers et précise que la Turquie est partie à la Convention de Genève relative au statut des réfugiés de 1951, à laquelle elle a néanmoins formulé une réserve géographique. Étant donné qu’un nombre considérable d’immigrants arrivent en Turquie (94 000 personnes en 2001), il serait souhaitable de savoir dans quelles conditions ceux‑ci sont refoulés et notamment si on s’abstient de le faire dans les cas où ils risquent la torture à leur retour dans leur pays. On peut se demander si c’est uniquement en vue de son accession à l’Union européenne que la Turquie se montre disposée à revoir sa législation en matière d’expulsion et M. Mariño Menéndez souhaiterait savoir ce qu’il en est réellement, connaître le nombre d’expulsions ou de refoulements opérés, vers quels pays ils le sont et ce qu’il advient des personnes qui restent dans le pays. Il voudrait également savoir si l’État partie projette de réformer sa législation dans la perspective de son intégration à l’espace sécurité, justice et paix de l’Union européenne.

30.Lutter contre l’impunité est l’objectif essentiel de l’article 4 de la Convention et un élément clé du combat contre la torture. Or des renseignements dignes de foi donnent à penser qu’en dépit des normes en vigueur dans l’État partie, une impunité parfois scandaleuse est favorisée par les lenteurs de la justice qui sont particulièrement flagrantes lorsque ce sont des fonctionnaires qui sont accusés d’actes de torture. Il serait souhaitable d’entendre les observations de la délégation au sujet, par exemple, du cas bien connu de Suleyman Yeter, placé en détention en 1997 et mort en prison en 1999, sans doute après avoir été torturé à diverses reprises; un jugement est intervenu dans cette affaire en 2002, dont la teneur donne l’impression que les policiers mis en cause ont été entièrement absous, quelques-uns étant seulement condamnés à des peines légères, voire symboliques, à condition de promettre de ne pas recommencer. D’autres cas d’impunité dans des affaires de mauvais traitements et torture à enfants ont été cités, d’où il ressort qu’à l’issue de procédures interminables, justice n’a pas été faite. Une plainte a été déposée pour torture sur la personne d’une jeune militante du PKK, Gülistan Durç, qui n’avait que 17 ans lorsqu’elle avait été arrêtée en mars 1996, mais aucune suite réelle n’a été donnée à cette affaire. Il semble donc bien que des retards injustifiés se produisent lorsque certaines catégories de personnes sont en cause. L’affaire de Marisa, qui remonte à 1995, n’a finalement été jugée qu’en avril 2003, et ce de manière contestable sur le plan juridique. L’obligation de châtier pénalement les auteurs de tortures suppose aussi de lutter contre la corruption et il serait souhaitable de savoir non seulement si des fonctionnaires ont été sanctionnés pour des actes de torture, mais aussi si des juges ont été révoqués pour corruption, la longueur indue des procédures pouvant parfois être assimilée à une forme de prévarication.

31.À propos de l’application par la Turquie du principe de la compétence universelle, le Rapporteur souhaiterait connaître la durée de la peine d’emprisonnement prévue dans le Code pénal pour les actes de torture commis à l’étranger par un non‑ressortissant jugé en Turquie en vertu de l’article 5 de la Convention. Rappelant que l’article 4 fait obligation aux États parties de rendre les actes de torture passibles de peines appropriées qui prennent en considération la gravité de ces actes, il prie la délégation turque de commenter le fait que, selon des statistiques récentes, le nombre d’acquittements prononcés à l’issue d’actions engagées pour violation des articles 243 et 245 du Code pénal, qui répriment les actes de torture, est largement supérieur au nombre de condamnations, et, que les peines qui sont prononcées sont généralement moins lourdes que celle qui est prévue dans la législation, à savoir huit ans.

32.Enfin, tout en reconnaissant les mesures prises par l’État partie pour mettre sa législation en conformité sur les normes internationales, le Rapporteur constate que ces efforts sont entravés par des habitudes qui sont encore ancrées dans la société. Il est néanmoins convaincu que la Turquie peut lutter efficacement contre la torture si elle s’emploie à assurer le respect des nouvelles normes adoptées et à faire poursuivre et condamner les auteurs des infractions visées dans la Convention.

33.M. RASMUSSEN (Corapporteur pour la Turquie) dit qu’avant d’examiner le rapport de la Turquie, il souhaite exprimer ses condoléances aux familles des victimes du tremblement de terre qui vient de frapper ce pays.

34.Le Corapporteur se félicite de la présentation du rapport, qui a été soumis avec dix ans de retard, de la présentation orale faite par la délégation turque et des renseignements complémentaires qui ont été communiqués au Comité par le Gouvernement turc par une lettre datée du 25 avril 2003 (document non distribué). Il rappelle que la Turquie est l’un des quatre pays à avoir fait l’objet d’une enquête au titre de l’article 20 de la Convention, qui a eu lieu entre 1990 et 1992 et dont le compte rendu a été publié en 1993 (A/48//44/Add.1). En outre, pendant la période à l’examen (1990-2001), deux déclarations publiques ont été faites sur la Turquie par le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT), l’une en 1992 et l’autre en 1996. En effet, en application du paragraphe 2 de l’article 10 de la Convention européenne pour la prévention de la torture, cet organe peut décider de faire de telles déclarations si un État ne coopère pas ou refuse d’améliorer la situation à la lumière de ses recommandations. De plus, des membres du Comité se sont rendus quatorze fois en Turquie, ce qui fait que ce pays est celui où cet organe a effectué le plus de visites. À cet égard, le Corapporteur se dit très satisfait de constater que l’État partie coopère avec le CPT et qu’il ait autorisé la publication des rapports relatifs à ces visites. Il se félicite également des nombreuses améliorations apportées récemment à la législation interne et encourage le Gouvernement turc à continuer de faire largement connaître les modifications opérées dans le pays de façon à ce qu’elles soient appliquées dans la pratique. Enfin, il remercie les organisations non gouvernementales pour les nombreuses informations qu’elles ont communiquées au Comité.

35.Passant à l’examen de l’application de l’article 10, le Corapporteur fait observer que les nombreuses mesures de promotion des droits de l’homme énumérées dans le rapport, dont la création par le Haut Conseil des droits de l’homme d’un comité chargé de fournir des conseils sur l’éducation en matière de droits de l’homme, sont certes encourageantes mais elles n’entrent pas véritablement dans le cadre de l’article 10, qui porte sur la question bien spécifique de l’enseignement de l’interdiction de la torture. De même, dans sa lettre datée du 25 avril 2003, le Gouvernement turc fait état de plusieurs réunions et séminaires sur les droits de l’homme organisés à l’intention des agents de la fonction publique. Cependant, on n’y trouve nulle mention de l’interdiction de la torture ni du Comité contre la torture. En revanche, les informations données dans le rapport sur les séminaires et ateliers organisés par le Ministère de la justice et le Ministère de l’intérieur et sur le programme de formation de la police (par. 82, 85 et 88, respectivement) sont pertinentes. Le Corapporteur souhaiterait de plus amples informations au sujet de ces activités et encourage l’État partie à inviter des organisations non gouvernementales à y participer.

36.Par ailleurs, toute référence à la profession médicale est également absente des programmes de formation cités. En particulier, on ignore si la Turquie utilise le Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels inhumains ou dégradants (Protocole d’Istanbul), qui serait d’une grande utilité dans ce domaine, d’autant plus que les autorités turques semblent accorder une place non négligeable aux expertises médicales. À ce propos, le Corapporteur souligne qu’il est important de former des médecins capables de déterminer s’il y a eu torture en en recherchant les séquelles aussi bien physiques que psychologiques. Il recommande donc au Gouvernement turc de promouvoir l’utilisation du Protocole d’Istanbul et d’assurer qu’une formation soit dispensée à ce sujet.

37.M. Rasmussen accueille avec satisfaction l’information selon laquelle les médecins doivent remplir un formulaire en cas d’allégations de torture et le fait que des programmes de formation ont été organisés à l’intention du personnel médical sur la bonne utilisation de ces formulaires. Cette méthode d’établissement des faits s’inscrivant dans le droit fil du Protocole d’Istanbul, le Corapporteur invite instamment l’État partie à accorder une place prioritaire à ce type de formation et à fournir des renseignements sur les progrès accomplis en la matière dans son rapport suivant.

38.D’après les informations les plus récentes fournies par le Gouvernement turc, a été adoptée une loi portant modification de l’article 10 de la loi sur l’arrestation, la garde à vue et l’interrogatoire des suspects tendant à ce que les visites médicales se déroulent sans qu’un agent de la force publique n’y assiste, à moins que le médecin ne le demande expressément pour des raisons de sécurité. Cependant, cette modification ne prend pas pleinement en compte la recommandation du Comité européen pour la prévention de la torture, selon laquelle la législation devrait être modifiée de façon à exclure la possibilité que les responsables de l’application des lois entendent l’entretien entre le médecin et le patient. C’est pourquoi le Corapporteur se félicite de la circulaire du Ministère de la santé datée du 20 septembre 2000, qui contient une instruction prévoyant que les examens médicaux pratiqués sur les personnes en détention sont réalisés dans un cadre adéquat où les membres de la force publique ne puissent ni voir ni entendre quoi que ce soit pendant la consultation. De façon générale, toute personne devrait être examinée par un médecin dès son arrivée dans un lieu de détention afin de prévenir efficacement les actes de torture.

39.Sachant qu’en vertu de l’article 11 de la Convention, les États parties sont tenus de garantir que toute personne appréhendée soit informée de ses droits au moment de son arrestation, le Corapporteur juge encourageants les renseignements fournis dans le rapport à cet égard ainsi que le récent complément d’information apporté dans la lettre susmentionnée du Gouvernement turc, selon lequel le Code de procédure pénale a été modifié afin que la famille d’une personne placée en garde à vue soit systématiquement avisée de toute prolongation de la détention. Le Gouvernement reconnaît qu’en revanche, le droit d’avoir accès à un conseil n’est qu’imparfaitement appliqué, la durée des entretiens entre l’avocat et le prévenu ne dépassant généralement guère cinq minutes. En outre, les personnes soupçonnées d’un délit collectif, qui sont justiciables des tribunaux de sûreté de l’État, n’ont droit à un avocat qu’après les premières 48 heures de détention, une fois que la garde à vue a été prolongée sur ordre du Procureur. Le Corapporteur souhaiterait savoir ce que fait le Gouvernement pour assurer que toute personne arrêtée puisse avoir un entretien d’une durée suffisante avec un avocat et ce, dès le tout début de la garde à vue, quelle que soit la nature du délit, conformément aux recommandations du Comité pour la prévention de la torture et de l’Organisation non gouvernementale Human Rights Watch.

40.Concernant la détention au secret, le Corapporteur souhaiterait que la délégation turque lui indique sa durée normale ainsi que sa durée maximale en cas de prolongation, en particulier s’agissant des personnes soupçonnées d’un délit collectif.

41.Revenant sur la question de la protection des mineurs en garde à vue déjà abordée par le Rapporteur, le Corapporteur suggère que les affaires concernant les mineurs soient confiées à une autorité judiciaire qui ne s’occuperait que de cette catégorie de personnes, plutôt qu’au Procureur ou à son substitut, comme indiqué dans le rapport (par. 103 b)), et demande à la délégation son avis sur la question.

42.Par ailleurs, le Corapporteur souhaiterait que les informations sur la situation dans les prisons soient mises à jour. Les problèmes auxquels s’est attaqué le Gouvernement, dont celui de la surpopulation carcérale, ont-ils pu être résolus? La réforme du système carcéral décrite dans le rapport, qui se caractérise par le passage des prisons de type E, système d’emprisonnement en dortoirs, à une nouvelle génération de prisons, dites de type F, qui sont structurées en petites unités où les détenus ont nettement moins de liberté, a créé toute une série de graves problèmes. Les arguments avancés dans le rapport pour justifier cette réforme permettent de comprendre la réaction des détenus: en clair, il s’agissait pour le Gouvernement de faire cesser une situation où les détenus imposaient leur loi dans les prisons, à partir desquelles ils organisaient des activités terroristes. Par conséquent, une fois transférés dans les prisons de type F, ils se sont retrouvés en quelque sorte doublement privés de liberté, et on ne saurait être surpris qu’ils aient réagi en entamant des grèves de la faim radicales, qui se soldent à ce jour par une soixantaine de morts. Le Corapporteur prie instamment le Gouvernement turc de trouver rapidement une solution à ce problème et lui suggère d’appliquer les recommandations formulées à ce sujet par le Comité européen pour la prévention de la torture ainsi que de faire appel à un négociateur extérieur afin de nouer un véritable dialogue avec les grévistes de la faim.

43.Par ailleurs, le Corapporteur fait observer que le type d’inspection des prisons décrit au paragraphe 104 du rapport ne constitue pas un mécanisme indépendant, à la différence du système faisant intervenir les conseils de surveillance des prisons mentionnés au paragraphe 134 du rapport et au cours de la présentation orale, qui sont des organes issus notamment de la société civile. Il accueille avec satisfaction la nouvelle de la création de 129 de ces organes et souhaiterait savoir quel est leur fonctionnement et s’ils établissent des rapports qui sont rendus publics. Il se félicite également de ce que la Turquie semble se préparer à ratifier le Protocole facultatif à la Convention puisqu’un mécanisme a été mis en place à cet effet.

44.Passant à l’examen de l’application de l’article 12, le Corapporteur estime nécessaire d’abolir la procédure décrite dans le rapport (par. 144) selon laquelle le procureur chargé d’enquêter sur les actes d’un agent de l’État faisant l’objet d’une plainte doit en référer à l’administration dont relève l’intéressé, ce système occasionnant des lenteurs dans l’administration de la justice qui peuvent entraîner des risques que la victime et son entourage subissent des pressions et que des preuves disparaissent. Les plaintes de ce type devraient être uniquement du ressort des organes du pouvoir judiciaire ou pourraient éventuellement être confiées au Médiateur, étant donné que l’État partie est sur le point de créer une telle institution. Le Corapporteur demande à la délégation turque de lui donner son avis sur cette possibilité.

45.M. Rasmussen se félicite des données présentées au paragraphe 140 et dans l’appendice VIII du rapport au sujet des procès pénaux ouverts contre des membres des forces de sécurité accusés de violations des articles 243 (torture) et 245 (mauvais traitements) du Code pénal turc. Rappelant que la Convention prévoit que les affaires concernant des actes de torture doivent être examinées sans délai, il constate que, bien que sept années se soient écoulées, un nombre important de procédures pénales (environ 130) ne sont toujours pas achevées et demande si les accusés ont été suspendus de leurs fonctions ou travaillent encore dans les institutions où ils auraient commis l’infraction qui leur est reprochée. Vu la lenteur de la procédure, la Cour européenne des droits de l’homme accepte d’examiner des affaires concernant l’État partie sans même attendre que les recours internes aient été épuisés. Les 4 246 requêtes, dont elle est actuellement saisie, ne concernent pas toutes la torture mais portent aussi sur des cas de disparition, d’exécution extrajudiciaire, de destruction et d’évacuation forcée de villages, et de violation du droit à la liberté d’expression. Sur environ 14 000 décisions rendues par la Cour au cours des deux années écoulées, environ un tiers concernait des violations de la Convention européenne par la Turquie. Le rapport du Rapporteur spécial sur la question de la torture contient également une liste impressionnante de personnes dont l’affaire n’a pas encore été complètement examinée. Par ailleurs, M. Rasmussen constate que le rapport de l’État partie ne contient pas de renseignements sur les mesures prises pour garantir l’impartialité des enquêtes et demande à la délégation d’apporter des précisions à ce sujet.

46.Actuellement en Turquie, six instances différentes peuvent être saisies de plaintes ou ont compétence pour enquêter sur des allégations de torture: le Procureur, l’Assemblée nationale suprême, la Commission d’enquête sur les droits de l’homme de la Grande Assemblée nationale (5 000 requêtes reçues depuis 1991), le Haut Conseil des droits de l’homme, le Département des droits de l’homme, qui relève du cabinet du Premier Ministre, et le Conseil consultatif des droits de l’homme, qui est chargé d’assurer la liaison avec les ONG (sans même parler du médiateur dont le poste est en cours de création). Une telle abondance pouvant traduire aussi bien la force que la faiblesse du système en place, il conviendrait que l’État partie précise le mécanisme auquel les particuliers peuvent effectivement s’adresser et étudie les moyens d’améliorer le système en le rationalisant.

47.Au sujet de l’article 14, malgré les mesures prises pour améliorer les procédures, il semble que l’État partie ne verse pas encore aux victimes d’actes de torture les indemnisations prévues, notamment, dans les décisions rendues par la Cour européenne des droits de l’homme. Il apparaît également que les centres de réadaptation des victimes ne bénéficient pas de tout l’appui voulu de la part du Gouvernement. Des cas d’arrestation et de harcèlement ayant été signalés, il serait utile de connaître les mesures prises pour protéger ces établissements, dont l’utilité est reconnue au niveau international. Par ailleurs, ces centres ont acquis une expérience qu’il conviendrait de mettre davantage à profit pour renforcer les activités de prévention de la torture, dans le cadre de la formation des membres des forces de l’ordre notamment. Un appui financier pourrait aussi leur être apporté, en veillant cependant à préserver comme il se doit leur indépendance. Par ailleurs, des données statistiques sur l’application des dispositions visées au paragraphe 133 du rapport serait très utiles.

48.Pour ce qui est de l’article 15, M. Rasmussen se félicite de l’amendement apporté à l’article 38 de la Constitution concernant l’inadmissibilité des déclarations obtenues sous la torture. Il demande si l’État partie pourrait fournir des exemples concrets de l’application de cette disposition au cours des deux années précédentes. Se référant aux données communiquées par le Rapporteur spécial sur la question de la torture dans le rapport sur sa mission en Turquie en 1998 (E/CN.4/1999/61/Add.1), il note que jusqu’à 90 % des condamnations reposaient exclusivement sur des preuves testimoniales. Pour remédier à cette situation alarmante, il recommande à l’État partie de charger un groupe de travail d’examiner la nature des éléments de preuves produits afin, le cas échéant, de faire rejuger rapidement les affaires dans lesquelles il apparaît que des déclarations ont été obtenues sous la torture.

49.En ce qui concerne l’article 16, M. Rasmussen voudrait connaître les mesures prises pour populariser la nouvelle règle interdisant l’usage du bandeau sur les yeux pendant un interrogatoire et en garantir l’application. Il engage l’État partie à suivre la recommandation formulée par Amnesty International dans son rapport de février 2003 (EUR/44/010/2003) en vue de mettre fin à la pratique, injustifiable à tous égards, des tests de virginité. En ce qui concerne l’affaire Ocalan, il rappelle que l’État partie est tenu de garantir à un détenu l’accès à un défenseur en toutes circonstances et quelles que soient les contraintes géographiques. Par ailleurs, il voudrait connaître les raisons pour lesquelles Mme Sema Pichinsüt, qui avait critiqué le traitement des prisonniers dans un rapport, a été contrainte de quitter la Commission des droits de l’homme. Il voudrait également savoir pourquoi M. Alp Ayan, médecin au centre de réadaptation des victimes de la torture à Izmir, a été inculpé en vertu de la loi antiterroriste pour avoir critiqué le nouveau système cellulaire (prisons de type F) et ne cesse de voir son procès repoussé sous toutes sortes de prétextes. Considérant qu’il s’agit là de pratiques antidémocratiques, il exhorte l’État partie à abandonner immédiatement toute procédure engagée contre des défenseurs des droits de l’homme ayant exercé sans aucune violence leur droit à la liberté d’expression. Le Gouvernement devrait affirmer clairement le rôle qui revient de façon générale à la société civile et reconnaître l’utilité de la contribution des organisations de défense des droits de l’homme. Il devrait admettre que, même si elles émettent des critiques qui peuvent parfois le mettre dans une position inconfortable, ces organisations contribuent de façon essentielle au maintien d’un système efficace de protection des droits et du bien‑être de la population turque. L’affaire concernant M. Alp Ayan, qui a attiré l’attention de la communauté internationale, devait être jugée le 31 décembre 2002. Au lieu de cela, le juge a déclaré avoir égaré le dossier et décidé de remettre le procès à plus tard, alors même que de nombreux observateurs internationaux avaient pris la peine de se déplacer en Turquie en cette période de fêtes de fin d’année. Il serait particulièrement utile, entre autres, que l’État partie explique les raisons d’un tel comportement. Eu égard à la faute grave commise par ce juge, il serait intéressant de connaître les procédures applicables en tel cas pour relever les magistrats de leurs fonctions.

50.En tout état de cause, l’État partie a déployé, pour améliorer la situation relative à l’application de la Convention, des efforts considérables qui se traduisent par des progrès manifestes. Il reste à espérer qu’il continuera dans cette voie et que le dialogue avec le Comité, malgré toutes les différences d’appréciation qui pourront apparaître, y contribuera.

51.M. EL MASRY exprime ses condoléances et sa sympathie au Gouvernement turc et aux familles des victimes du tremblement de terre qui vient de frapper la Turquie. Au sujet des cours de sûreté de l’État, il constate les nombreuses réformes de fond qui ont été adoptées en vue d’améliorer la situation des accusés dont l’affaire est examinée par ces tribunaux: raccourcissement de la durée maximale de garde à vue, réduction de la période de détention provisoire, notification des tiers (qui ne souffre aucune exception), droit à un défenseur, etc. Il note également que la compétence de ces tribunaux a été restreinte notamment aux crimes contre l’État, aux crimes terroristes et au trafic illicite d’armes ou de stupéfiants. Cependant, et c’est là que le problème se pose, une nouvelle catégorie d’infractions vient compléter cette liste: il s’agit des délits qui entraînent le maintien d’un état d’urgence ou qui y contribuent (par. 42 du rapport). Eu égard au caractère flou et très général de cette définition, il serait bon que la délégation apporte des précisions sur la nature des infractions visées.

52.Mme GAER, reprenant les termes utilisés par Human Rights Watch, dit que les principales garanties juridiques contre la torture existent désormais en Turquie et que le Gouvernement en place et son prédécesseur méritent d’être loués pour avoir mené à bien cette réforme. Toutefois, la connaissance des nouvelles lois et les circulaires qui en réglementent l’application laissent encore à désirer et il serait bon de savoir comment l’État partie entend y remédier.

53.En ce qui concerne l’obligation des États d’enquêter sur les cas de torture et d’exercer une surveillance sur les lieux de détention, la pratique des fouilles à corps pose particulièrement problème. Plusieurs organismes ont appelé l’attention du Comité sur la question des tests de virginité et des examens de l’anus. La Rapporteuse spéciale sur la question de la violence contre les femmes indique dans son rapport pour 2003 (E/CN.4/2003/75/Add.2, par. 213 à 227) que, malgré l’interdiction, la pratique traditionnelle de la vérification de la virginité se poursuit et qu’une étude a montré que la moitié des examens ainsi pratiqués en 1998 sur des femmes en détention l’avait été sans le consentement des intéressées. Il serait bon de savoir dans ces conditions comment l’État partie entend donner suite à la recommandation de la Rapporteuse spéciale, concernant non seulement la question du consentement mais aussi celle de la protection des personnes.

54.Il semble également que pour être exemptés du service militaire, les homosexuels doivent prouver leur homosexualité et, dans la pratique, subir un examen de l’anus (pratiqué le plus souvent sans ménagement) et fournir un enregistrement vidéo et des photographies de leurs ébats avec un partenaire de sexe masculin. La délégation voudra bien expliquer en quoi ces mesures sont compatibles avec la Convention.

55.Par ailleurs, Mme Gaer voudrait savoir si une enquête indépendante a été effectuée comme suite à la demande de M. Asan, qui a été menacé après avoir dénoncé des expulsions dans un village de la province de Semak et placé en détention pour une infraction relative à ses papiers d’identité. Elle demande quelles mesures ont été prises par l’État partie pour garantir à l’intéressé et à toutes les personnes dans son cas la bonne application de l’article 13 de la Convention. En ce qui concerne la violence sexuelle dans les prisons, elle demande s’il est vrai, comme l’indiquent des ONG, qu’il est pratiquement impossible que des enquêtes indépendantes et impartiales aient lieu. Elle voudrait aussi savoir si l’État partie exerce une surveillance régulière de la violence sexuelle dans les établissements de détention et s’il établit des statistiques à ce sujet. Quelles sont les procédures à suivre pour déposer une plainte et comment est assurée la protection des personnes qui portent plainte?

56.Mme Gaer demande également des précisions sur des cas signalés par Amnesty International dans son rapport de 2003 sur la Turquie (EUR/44/009/2003). Elle voudrait savoir s’il y a eu effectivement enquête sur le meurtre de Nikla Akdeniz, victime d’un crime «d’honneur», et si l’auteur a été identifié et jugé. Elle demande si la législation pénale comprend des dispositions exonérant les mineurs d’une partie de leur responsabilité dans ce type de crime. Elle voudrait aussi connaître les résultats de l’enquête concernant les actes de torture subis par Guldëran Baran (p. 42 du rapport susmentionné d’Amnesty international). Enfin, elle souhaiterait recevoir des précisions sur la situation d’Erin Kaskin, membre d’une association de défense des droits de l’homme qui vient en aide aux femmes portant plainte pour viol et abus sexuels, qui se trouve sous le coup de 86 inculpations, dont plusieurs pour insulte aux forces de sécurité. Enfin, elle demande si les rapports du Conseil consultatif des droits de l’homme sont rendus publics et avec quelle fréquence.

M. YU Mengjia demande, s’agissant des réfugiés, si la pratique de la «préférence géographique» qui date des années 1950 a toujours cours.

58.Le PRÉSIDENT, en sa qualité d’expert, dit qu’il est évident que les choses évoluent en Turquie et qu’il existe dans ce pays un engagement en faveur des normes internationales relatives aux droits de l’homme. Dans la pratique, toutefois, les changements apportés aux règles et institutions juridiques commencent à faire leur effet quoique lentement. C’est sans doute la raison pour laquelle le rapport pour 2003 du Rapporteur spécial sur la question de la torture (E/CN.4/2003/68/Add.1) comprend 16 pages de communications relatives à l’État partie. Cela étant, il faut garder à l’esprit que cela peut être le signe que la communauté des ONG est devenue plus active et qu’il vaut donc la peine d’examiner attentivement la situation.

Pour ce qui intéresse plus particulièrement le Comité, force est de constater que l’article 243 du Code pénal ne définit pas réellement la torture en ne visant que les déclarations obtenues sous la contrainte. Cette définition n’est pas conforme à la Convention et à l’obligation qu’a contractée l’État partie en adhérant à cet instrument. La délégation voudra donc bien indiquer si une décision visant à combler cette lacune a été prise ou est envisagée. Par ailleurs, les dispositions prévoyant que, pour poursuivre en justice un agent de l’État, le Procureur doit demander à l’administration à laquelle est rattaché le fonctionnaire mis en cause l’autorisation d’ouvrir une enquête (par. 144), sont préoccupantes. Il serait intéressant de savoir si, d’une part les policiers sont considérés comme des fonctionnaires aux fins de cette disposition et, d’autre part, si cette dernière n’a pas dans la pratique pour effet d’entraver l’indépendance du Procureur. Elle vise à prévenir l’impunité, mais elle semble en fait aller dans le sens contraire. La délégation voudra bien apporter des éclaircissements à ce sujet. Elle pourrait également indiquer s’il existe des délais de prescription applicables à la poursuite ou à la répression d’infractions aussi graves que la torture et, dans l’affirmative, quels en sont les motifs.

La séance est levée à 13 heures.

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