Nations Unies

CAT/C/SR.1107

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

7 mai 2013

Français

Original: anglais

Comité contre la torture

Quarante-neuvième session

Co mpte rendu analytique de la 1107 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mardi 6 novembre 2012, à 15 heures

Président: M. Grossman

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 19de la Convention (suite)

Deuxième rapport périodique du Qatar (suite)

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 19de la Convention (suite)

Deuxième rapport périodique du Qatar ( suite ) (CAT/C/QAT/2; CAT/C/QAT/2/Corr.1; CAT/C/QAT/2/Rev.1)

1.Sur l’invitation du Président, la délégation qatarienne reprend place à la table du  Comité.

2.M me  Al-Obaidly (Qatar) dit à propos de la législation interne et de la Fondation qatarienne pour la protection des femmes et des enfants que le Code pénal réprime les actes de violence, dont ceux commis dans le cadre familial, mais que la violence dans la famille ne fait pas l’objet de dispositions spécifiques du droit interne. Le Code pénal prévoit que les agressions sexuelles ou le viol sont passibles de la peine de mort ou d’une peine de réclusion criminelle à perpétuité. Les femmes n’ont pas à obtenir l’autorisation de leur parrain (kafil)pour pouvoir signaler des sévices.

3.La Fondation s’emploie à lutter contre la violence et à renforcer les droits de l’homme. À cette fin, elle s’emploie notamment à prendre intégralement en charge les victimes et à leur apporter une assistance, notamment en les hébergeant dans un foyer d’accueil et en mettant à leur disposition une ligne téléphonique d’urgence. La stratégie de la Fondation est fondée sur les trois principes suivants: prévention, protection et participation. La prévention recouvre diverses mesures, dont le réexamen de la législation, la sensibilisation, le suivi et la formation. Le volet de la protection englobe notamment la mise à disposition des services d’un avocat ou d’un conseil, les soins de santé et l’accompagnement des victimes. La participation comprend les activités menées en collaboration avec les organisations non gouvernementales (ONG), la société civile, diverses institutions, le secteur privé et les organisations religieuses.

4.M me  Al-Malky (Qatar) dit que le Gouvernement qatarien a lancé une stratégie de lutte contre la traite unique en son genre dans la région, laquelle consiste à attaquer ce problème sous l’angle législatif et sous l’angle institutionnel. Parmi les modifications apportées récemment à la législation, on peut citer l’adoption de nouvelles dispositions interdisant l’utilisation d’enfants comme jockeys et d’une loi spécifiquement consacrée à la lutte contre la traite, qui prévoit des mesures tendant à protéger et à aider les victimes. L’Agence qatarienne pour la lutte contre la traite des êtres humains offre une formation aux juges et aux fonctionnaires et mène des activités de renforcement des capacités et de sensibilisation. Les victimes peuvent notamment être hébergées dans un foyer d’accueil, bénéficier des services d’un avocat, de conseils sur les modalités de dépôt d’une plainte, de services d’appui linguistique et de soins médicaux et utiliser une ligne téléphonique d’urgence. En outre, des mesures sont prises pour leur garantir la possibilité de réclamer une indemnisation. La Fondation coordonne ses activités avec celles du Ministère de l’intérieur en cas de rapatriement volontaire d’étrangers.

5.Des efforts sont déployés en collaboration avec les autorités et les ambassades d’autres États et toute une série de partenariats régionaux ont été conclus. Dans ce cadre, des activités sont menées conjointement avec la Ligue des États arabes étant donné que le phénomène de la traite doit être attaqué sur tous les fronts.

6.M. Al-Obaidly (Qatar) dit que le Ministère du travail participe à toute une série d’activités tendant à combattre la traite et à protéger les droits des travailleurs migrants et qu’un service des relations du travail a été mis sur pied à cette fin. Les plaintes émanant de travailleurs sont examinées dans les meilleurs délais. Les droits des travailleurs migrants sont protégés par des garanties constitutionnelles et les dispositions pertinentes du Code du travail et il existe des lois sur les soins médicaux, l’inspection du travail, le logement, les maladies professionnelles, les conditions de travail et le travail en plein air. Des efforts ont aussi été déployés pour apporter des améliorations aux dispositions existantes et pour faciliter le suivi des plaintes.

7.Une loi relative à la kafalah(système de parrainage) et, en particulier, au transfert de parrainage, a récemment été adoptée avec l’approbation du Ministère de l’intérieur. La législation qatarienne n’autorise pas les employeurs à confisquer le passeport des travailleurs. En 2012, le Ministère du travail a ouvert un bureau qui conseille les travailleurs sur les modalités de dépôt des plaintes et les possibilités de bénéficier de services linguistiques et leur donne des informations sur les honoraires des avocats et les dispositions du Code du travail. Si un travailleur migrant a quitté le pays alors que son affaire était en instance, il peut néanmoins suivre le déroulement de son procès par l’intermédiaire des fonctionnaires du consulat de son pays. Plus de 100 entreprises ont été traduites en justice pour non-respect des dispositions du Code du travail.

8.Les autorités compétentes examinent actuellement un projet de loi relatif aux employés de maison afin de garantir sa conformité avec les normes internationales du travail et les instruments internationaux ratifiés par le Qatar.

9.Le Ministère du travail approuve les contrats de travail proposés aux employés de maison, bien que cette catégorie de travailleurs ne soit pas couverte par le Code du travail. En outre, il surveille les activités des agences de recrutement de domestiques.

10.M. Al-Khulaifi (Qatar) dit que, conformément aux dispositions du Protocole d’Istanbul, le Conseil supérieur de la santé diffuse des informations et des lignes directrices élaborées à l’intention du personnel médical et du personnel des services sociaux sur l’obligation qui leur incombe de signaler des séquelles éventuelles de torture ou de mauvais traitements. La Fondation médicale Hamad s’emploie à garantir une couverture médicale de base et une charte relative aux droits des patients et de leurs proches a été élaborée. Une collaboration a été établie à tous les niveaux et toute une série de politiques et de stratégies ont été appliquées pour détecter les séquelles de torture et de mauvais traitements et pour apporter une assistance aux victimes. Le Ministère de l’intérieur a mis en place un service d’aide d’urgence à l’hôpital de Doha.

11.En collaboration avec les entités publiques concernées, la Fondation médicale Hamad a organisé à l’intention des professionnels de la santé plusieurs séminaires et ateliers de sensibilisation aux dispositions de la Convention ainsi qu’aux phénomènes de la traite et de la violence contre les femmes et les enfants. Des personnels spécialisés collaborent avec le personnel médical afin de garantir que les cas éventuels de torture soient détectés. Entre 2007 et 2012, plus de 1 000 affaires de violence contre les femmes et les enfants ont été découvertes et signalées.

12.Le programme national relatif aux soins de santé mentale a été lancé en 2011. Il a notamment pour objectif de réduire la fréquence des problèmes graves de santé mentale, de renforcer les structures d’accompagnement pour les patients atteints de troubles mentaux et de combattre les préjugés contre ces personnes. Conformément à la charte des patients, toutes les personnes quels que soient leur religion, origine ethnique, origine nationale, langue, âge ou handicap doivent pouvoir bénéficier de soins de santé et de services médicaux d’urgence. Des services d’interprétation sont disponibles dans les hôpitaux. Les droits des personnes handicapées, dont leur droit à des soins de santé sexuelle et procréative, sont garantis par la Constitution. Le Conseil supérieur de la santé et ses partenaires attachent une importance particulière au secret médical dans le contexte de la prise en charge des patients handicapés, qu’ils soient Qatariens ou étrangers. L’ensemble du personnel du Centre de Shafallah pour les enfants ayant des besoins spéciaux est tenu de respecter la vie privée des enfants qui y sont accueillis. Des chaises roulantes, des prothèses et des activités de réadaptation sont proposées à tous les patients s’ils en font la demande, de même qu’un programme de réinsertion sociale. Tous les résidents du Qatar peuvent bénéficier de soins de santé préventifs.

13.M. Garhab (Qatar) dit que la définition de la torture figurant à l’article premier de la Convention a été incorporée dans la législation interne. Le Gouvernement a levé sa réserve à la Convention concernant la reconnaissance des compétences du Comité telles que définies aux articles 21 et 22 de la Convention. Il a également levé sa réserve générale concernant les interprétations des dispositions de la Convention incompatibles avec les préceptes du droit islamique et de la religion musulmane et l’a remplacée par une réserve plus ciblée. Conformément à la Constitution, les tribunaux nationaux peuvent invoquer directement les dispositions de la Convention.

14.L’indépendance des juges est protégée par la loi ainsi que par plusieurs garanties adoptées à cette fin. Tous les juges sont sélectionnés et nommés par le Conseil supérieur de la magistrature en application des normes internationalement reconnues en la matière et sur approbation de l’Émir. L’âge de la retraite a été fixé à 70 ans pour les juges; toutefois, ceux-ci peuvent prendre leur retraite anticipée à partir de 60 ans. Le Centre d’études juridiques et judiciaires propose une formation continue aux juges, au personnel du ministère public ainsi qu’à tous les autres personnels de l’appareil judiciaire.

15.M. Al Mohannadi (Qatar) dit que, conformément à une loi adoptée en 2009, tous les établissements pénitentiaires et autres lieux de détention sont tenus d’enregistrer le nom des détenus, la date de leur arrestation, de leur transfert ou de leur remise en liberté, le lieu de détention, le nom complet des fonctionnaires qui ont délivré le mandat d’arrêt et de ceux qui ont procédé à l’arrestation, l’état de santé des détenus à leur arrivée et tout changement à cet égard.

16.Des employées philippines ont déposé plusieurs plaintes pour sévices sexuels. Ces affaires ont été jugées par les tribunaux et les accusés ont été condamnés et sanctionnés.

17.Comme indiqué dans les réponses écrites à la liste des points à traiter (p. 13), Mohamed Farouk al‑Mahdi a été détenu en toute légalité pendant sept mois et il a reçu la visite de son avocat et de membres de sa famille conformément aux procédures en vigueur. Il a remboursé les sommes qu’il avait obtenues par des malversations, à la suite de quoi l’affaire a été déclarée close.

18.M. Al-Sulaiti (Qatar) dit qu’en vertu de l’article 395 du Code de procédure pénale, les membres du ministère public sont habilités à se rendre dans les prisons du ressort de leur juridiction afin de vérifier si des personnes y sont détenues illégalement. Ils peuvent examiner et copier les registres et les mandats d’arrêt et de détention, s’entretenir avec les détenus et recueillir leurs doléances éventuelles. Le personnel de la prison est tenu d’aider les représentants du ministère public à obtenir les informations qu’ils demandent. Les détenus peuvent placer un document écrit contenant leur plainte dans une boîte scellée se trouvant à l’intérieur de la prison, qui est ouverte par la suite par le personnel du ministère public. L’article 396 du Code de procédure pénale dispose que tous les détenus peuvent porter plainte à tout moment, par écrit ou oralement, devant le directeur de l’établissement et demander que leur plainte soit déférée au ministère public. Quiconque constate qu’une personne est détenue illégalement ou se trouve dans un lieu qui n’est pas prévu pour accueillir des détenus a l’obligation d’alerter un fonctionnaire du ministère public. Dès que cette déposition est enregistrée, le fonctionnaire qui a reçu l’information est tenu de se rendre dans le lieu en question, de mener une enquête, d’ordonner la remise en liberté de l’intéressé et de faire rapport sur l’incident. Il n’existe pas de lieux de détention officieux ou secrets dans le pays.

19.M. Al Mohannadi (Qatar) dit que le service des droits de l’homme et du Ministère de l’intérieur a établi des lignes directrices sur les droits des détenus et le traitement à leur réserver. Il a publié un manuel à ce sujet qui est fondé sur les normes internationales en la matière. Le service des droits de l’homme effectue des visites inopinées dans les lieux de détention.

20.Conformément à l’article 37 du Code pénal, le Ministre a la possibilité de prendre un arrêté d’expulsion à l’encontre d’un travailleur migrant s’il est démontré que sa présence sur le territoire constitue une menace pour la sécurité intérieure ou extérieure du pays ou est préjudiciable à l’économie nationale, à la santé ou à la moralité publiques. La personne visée par l’arrêté d’expulsion peut indiquer dans quel pays elle souhaite être renvoyée.

21.M me  Gaer (Rapporteuse pour le Qatar) demande combien d’appels reçus par la permanence téléphonique de la Fondation qatarienne pour la protection des femmes et des enfants ont été portés à la connaissance du ministère public et combien de ces signalements ont donné lieu à des mesures disciplinaires, administratives ou pénales. Elle aimerait en outre savoir combien d’appels reçus par la permanence téléphonique chargée de la lutte contre la traite émanaient de travailleurs migrants et combien de ces personnes ont signalé des mauvais traitements infligés par leurs employeurs. Toute information sur les réponses données à ces appels serait bienvenue.

22.La Rapporteuse voudrait en outre savoir combien des 34 dossiers de traite défendus par des avocats concernaient des employés de maison qui avaient porté plainte contre leur employeur pour sévices. À ce propos, elle aimerait savoir combien de conseils commis au titre de l’aide juridictionnelle sont recensés dans l’État partie, combien d’affaires de détention illégale ceux-ci ont traitées et si des mesures disciplinaires ont été prises à l’issue des procédures pertinentes. Elle voudrait savoir si l’une des huit personnes indemnisées par l’Agence qatarienne pour la lutte contre la traite des êtres humains a été considérée comme victime d’actes de torture ou de mauvais traitements.

23.La Rapporteuse aimerait en outre savoir combien d’employeurs ont été condamnés pour avoir confisqué le passeport d’un employé ou commis des actes de torture ou des mauvais traitements. Elle demande si des personnes ont été emprisonnées à la suite des fermetures d’entreprises imposées en application de la nouvelle législation du travail. Elle voudrait savoir si l’un des 507 procès qui ont été suivis par le Ministère du travail portait sur des mauvais traitements infligés à des travailleurs migrants et si certaines de ces affaires ont d sur des poursuites pour torture ou mauvais traitements.

24.La délégation est invitée à indiquer comment l’État partie a réagi à la décision du Groupe de travail sur la détention arbitraire, qui a conclu que la détention de Mohamed Farouk al‑Mahdi avait été arbitraire, et à préciser si cette personne a été indemnisée. Il serait utile d’avoir des statistiques sur la flagellation, s’il en existe, compte tenu en particulier d’informations émanant d’Amnesty International et d’articles de presse montrant que la flagellation est encore utilisée à titre de châtiment. Des renseignements récents sur la détention au secret du poète Mohammed al‑Ajami, également connu sous le nom de Mohammed Ibn al‑Dheeb, seraient bienvenus.

25.Le Comité n’a pas reçu de réponse à la question posée dans la liste des points à traiter au sujet de l’ancien porte-parole du Ministère des affaires étrangères, M. Fawaz al‑Attiyah, dont la détention a fait l’objet d’un appel urgent du Rapporteur spécial sur la question de la torture. M. Fawaz al‑Attiyah aurait subi des mauvais traitements au siège des services de la sécurité de l’État, où on ne l’aurait pas autorisé à s’entretenir avec un défenseur ni avec des membres de sa famille, où des mauvais traitements lui auraient été infligés en détention et où il aurait été menacé de mort par un membre du ministère public. La délégation voudra bien fournir des détails sur toute enquête ouverte sur ces allégations et indiquer si des mesures ou des sanctions disciplinaires ont été prises contre les responsables de ces actes.

26.La Rapporteuse aimerait savoir combien de violations de la loi relative à la sécurité publique ont été enregistrées par la Commission nationale des droits de l’homme. Elle souhaiterait recevoir des informations sur les affaires dans lesquelles la détention d’une personne a été surveillée en application de cette loi. Elle voudrait savoir si le Gouvernement qatarien envisage de doter la Commission nationale des droits de l’homme de personnel et de ressources supplémentaires afin qu’il soit en mesure de surveiller plus efficacement la situation des détenus. Elle demande si l’État partie envisage de modifier la composition de la Commission et, en particulier, de limoger ceux de ses membres qui n’ont pas le droit de vote et qui occupent aussi un poste dans l’administration publique. Enfin, la Rapporteuse n’est pas certaine qu’il soit opportun que des membres du Gouvernement participent aux visites dans les lieux de détention.

27.M me  Belmir (Corapporteuse pour le Qatar) demande des précisions sur le rôle joué par l’État, en particulier les autorités judiciaires, dans la lutte contre la traite. Elle n’a pas compris si l’Agence qatarienne pour la lutte contre la traite des êtres humains était désormais la seule entité à mener des activités dans ce domaine ou si elle était chargée de lutter contre la traite en collaboration avec d’autres acteurs. Étant donné que la majorité des juges sont étrangers, elleaimerait savoir comment l’État partie garantit leur indépendance et quelles sont les voies de recours qui leur sont ouvertes s’ils sont indûment soumis à des pressions.

28.La Corapporteuse demande si les individus frappés d’un arrêté d’expulsion pour atteinte aux mœurs sont également flagellés et si l’exécution de ce type de châtiment corporel relève du pouvoir judiciaire. Elle répète la question déjà posée antérieurement au sujet des assurances diplomatiques ainsi que celle portant sur la délinquance juvénile. Elle aimerait savoir si l’État partie entend relever l’âge minimum de la responsabilité pénale à 15 ans compte tenu des obligations qui lui incombent à cet égard en vertu de la Convention relative aux droits de l’enfant.

29.Bien que, d’après l’État partie, le rôle de la police se limite aux enquêtes et à la détention, quelques affaires relatives à des interrogatoires de police ont été évoquées. La délégation voudra bien indiquer si les interrogatoires sont filmés et, dans la négative, si l’État partie serait disposé à adopter cette méthode à des fins de vérification.

30.Le Comité a pris acte avec satisfaction de la réponse donnée par l’État partie sur les conditions de détention et l’encourage à les améliorer dans tous les lieux de détention.

31.Bien que l’État partie ait indiqué que la législation interne prévoyait certaines garanties protégeant les personnes détenues au secret, la Corapporteuse souligne que cette forme de détention constitue en soi une violation des droits des personnes privées de liberté.

32.Enfin, la Corapporteuse espère vivement que l’État partie ratifiera le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture.

33.M. Bruni prie la délégation de citer des exemples de cas dans lesquels la Convention a été invoquée devant les tribunaux ainsi que des exemples d’affaires dans lesquelles les dispositions de la loi en vigueur excluant strictement la possibilité que les membres des forces de l’ordre et des forces armées invoquent les ordres d’un supérieur pour justifier des actes de torture ou des mauvais traitements ont été appliquées. Il demande de plus amples informations sur les infractions pour lesquelles un détenu peut être placé à l’isolement cellulaire ainsi que sur la taille des cellules, la durée du maintien à l’isolement et la façon dont la Commission nationale des droits de l’homme surveille la situation des détenus soumis à ce régime.

34.M. Bruni souligne que l’État partie devrait ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention comme le lui a recommandé la Commission nationale des droits de l’homme.

35.Enfin, il souhaiterait des éclaircissements sur la date à laquelle l’État partie a levé ses réserves aux articles 21 et 22 de la Convention, étant donné que ces réserves semblent être demeurées en vigueur.

36.M. Gaye dit que la question posée par le Comité au sujet de la compétence universelle et de l’extradition revêt une grande importance au regard de l’article 5 de la Convention; toutefois, l’État partie n’y a pas encore répondu.

37.La délégation est invitée à donner des précisions sur les 609 plaintes et requêtes émanant de détenus citées au paragraphe 88 du rapport. Sur ce total, quel est le nombre de plaintes et de requêtes, respectivement? En outre, un complément d’information sur l’aboutissement des procédures ouvertes sur la base de ces plaintes et requêtes serait bienvenu.

38.En ce qui concerne l’indépendance du pouvoir judiciaire et les garanties juridiques protégeant la profession de magistrat, des précisions sur les motifs pour lesquels un juge peut être révoqué seraient utiles.

39.M. Mariño Menéndez reformule la question posée par M. Gaye, invitant la délégation à indiquer quelle est la position de l’État partie sur la question de l’exercice de la compétence universelle lorsque des étrangers soupçonnés d’actes de torture se trouvent sur le sol qatarien.

40.La délégation est également invitée à fournir des éclaircissements sur la portée de la loi sur la lutte contre le terrorisme et les droits qu’elle confère aux enquêteurs car elle ne semble pas prévoir de dispositions portant expressément sur la conduite des interrogatoires ou sur l’interdiction de pratiques suspectes utilisées à l’égard des personnes arrêtées en application de cette loi.

41.Enfin, M. Mariño Menéndez pose plusieurs questions sur la situation des quelque 1 200 apatrides vivant dans l’État partie. Il souhaiterait savoir si les Qatariennes peuvent transmettre leur nationalité à leurs enfants et si les enfants nés hors mariage dans l’État partie sont enregistrés à l’état civil. Il demande en outre si des décisions administratives ont été prises pour déchoir des individus ou des groupes de personnes de la nationalité qatarienne. Il aimerait savoir si les apatrides jouissent des droits civils, s’ils ont un permis de séjour et s’ils sont mieux ou moins bien protégés contre le risque d’expulsion que d’autres catégories de personnes.

42.M me Sveaass prend acte avec satisfaction des réformes importantes engagées par l’État partie dans le domaine de la santé et des mesures prises en faveur des personnes handicapées. À propos de l’affaire Al-Obeidi, qui concerne une femme de nationalité libyenne renvoyée dans son pays, elle souhaiterait des explications sur les motivations de ce renvoi et demande si une enquête a été ouverte sur les circonstances de cette affaire. Elle voudrait en outre savoir combien de personnes sont détenues en application de la loi sur la lutte contre le terrorisme et si des mécanismes de surveillance rendent visite aux personnes détenues en application de cette loi.

43.Mme Sveaass souhaiterait de plus amples informations sur la suite donnée aux recommandations et observations de la Commission nationale des droits de l’homme et demande si ces recommandations ont débouché sur des changements notables ou des réformes de grande ampleur.

44.En ce qui concerne le système de parrainage, elle prie la délégation de citer des affaires de mauvais traitements et de torture dans lesquelles le parrainage d’un employé a été transféré à un autre employeur afin qu’il travaille pour ce dernier.

45.Le Président se dit frappé de constater que, bien que le système juridique de l’État partie paraisse raisonnablement complet, aucune atteinte aux droits n’a été enregistrée au cours de la période considérée, ce qui pourrait être le signe que ce système présente des lacunes.

46.La délégation voudra peut-être indiquer si l’État partie a l’intention de réformer le mandat du ministère public étant donné que le cumul de ses multiples fonctions crée inévitablement un conflit d’intérêts. En effet, il est non seulement habilité à surveiller lesdroits des détenus ainsi qu’à les poursuivre, mais aussi à superviser les activités desmembres del’appareil judiciaire ainsi qu’à prendre des mesures disciplinaires contre eux.

47.La délégation est invitée à citer des affaires dans lesquelles des personnes ont été détenues sans inculpation pendant seize jours en application de la législation nationale sur la lutte contre le terrorisme.

48.La délégation est également invitée à dire si l’État partie a l’intention d’ériger laviolence dans la famille en infraction à part entière et, si tel n’est pas le cas, pourquoi. À ce propos, le Président demande si la juge nommée en 2010 demeure la seule femme à assumer de telles fonctions au sein de l’appareil judiciaire, faisant observer qu’une plus grande mixité pourrait avoir des effets sur les décisions prises dans les affaires de violence dans la famille.

49.L’écart entre l’évaluation par l’État partie de la situation des employés de maison et l’impression d’ensemble créée par les nombreuses communications soumises au Bureau philippin du travail à l’étranger à Doha est frappant. Il serait intéressant de savoir si une suite a été donnée à ces signalements.

50.Enfin, le Président souhaiterait savoir si des fonctionnaires ont été condamnés à une peine en application de l’article 159 du Code pénal pour avoir extorqué des aveux à un suspect.

51.M. Al-Sulaiti (Qatar) dit que le principe de la compétence extraterritoriale est inscrit dans le Code pénal; les affaires de torture dans lesquelles les actes incriminés ont été commis à l’étranger par un Qatarien sont jugées en application de l’article 18 dudit code, après le renvoi de l’intéressé au Qatar. En vertu du principe de la compétence territoriale, les affaires concernant des actes de torture perpétrés sur le sol qatarien et imputés entièrement ou en partie à un Qatarien ou à un étranger résidant au Qatar sont jugées en application de l’article 13 du Code pénal. L’article 16 dudit code s’applique aux résidents qatariens ou étrangers soupçonnés d’infractions commises sur le territoire national, notamment la traite et la consommation de stupéfiants, ou d’être mêlés au terrorisme international en tant que responsables ou complices; l’article 7 du Code pénal consacre le principe de la double incrimination et s’applique aux infractions commises uniquement ou partiellement sur le territoire qatarien.

52.En ce qui concerne les interrogatoires et les méthodes de détention, M. Al-Suleiti rappelle que l’article 35 de la Constitution garantit l’égalité de tous devant la loi, tandis que l’article 36 garantit la liberté individuelle. En vertu de l’article 43 du Code de procédure pénale, le suspect doit être entendu immédiatement après son arrestation par un officier depolice judiciaire et l’interrogatoire doit avoir lieu dans les vingt-quatre heures, après quoi ildoit être remis en liberté ou placé en détention provisoire. En vertu du Code de procédure pénale, la durée de la détention provisoire est initialement de quatre jours, cette mesure étant renouvelable une fois. Ensuite, un juge, qui doit avoir examiné tous les éléments de preuve etentendu aussi bien le procureur que le prévenu, peut ordonner de nouvelles prolongations mais la durée globale de la détention provisoire ne peut pas dépasser six mois.

53.Le ministère public utilise tous les moyens techniques disponibles pour garantir que les interrogatoires sont enregistrés, voire filmés lorsque l’affaire est importante. Si le suspect avoue être l’auteur des faits, la reconstitution des événements sur les lieux du crime est filmée et l’enregistrement vidéo sert d’élément de preuve. Le ministère public étudie la question du recours à la vidéo en tant que moyen de garder une trace des enquêtes et des interrogatoires, l’objectif étant que ces enregistrements puissent être utilisés conformément à la loi.

54.En ce qui concerne les affaires Al-Mahdi et Al-Ajmi, M. Al-Sulaiti indique qu’en vertu de l’article 106 du Code de procédure pénale, le procureur peut interdire au suspect d’avoir des contacts avec d’autres détenus et de recevoir des visites; toutefois, l’intéressé conserve le droit de s’entretenir en tête-à-tête avec son conseil comme le prévoit la loi. Cet article est appliqué dans un nombre limité de cas, lorsqu’il existe un risque que des éléments de preuve disparaissent ou que des témoins soient influencés, ou lorsque la vie du suspect est en danger, en particulier dans les affaires de meurtre. Un détenu peut être placé au secret en application des articles 50, 51, 53 et 54 du règlement des prisons à titre de sanction disciplinaire. La durée maximale de cette mesure est de sept jours. Il convient de noter que M. Al-Mahdi a fait l’objet de mesures parfaitement légales et que l’affaire de M. Al-Ajmi est encore pendante devant les tribunaux.

55.M. Al Mohannadi (Qatar) dit que la police ne mène pas d’enquêtes mais qu’elle interroge les suspects et établit des procès-verbaux conformément au Code de procédure pénale. Le ministère public mène des enquêtes sur les infractions dont il présume qu’elles sont liées au terrorisme.

56.Les communications transmises par le Bureau philippin du travail à l’étranger ont été envoyées aux autorités compétentes et des décisions ont été prononcées dans les affaires en question.

57.La législation qatarienne prévoit des dispositions sur l’expulsion, qui peut être fondée sur une décision juridique ou administrative. Dans le droit interne, les personnes travaillant au Qatar ne peuvent être expulsées que si elles ont commis des actes portant atteinte aux intérêts nationaux ou internationaux de l’État, à ses intérêts économiques ou à la moralité publique.

58.M. Garhab (Qatar) dit que, le 24 janvier 2012, l’Émir a signé l’instrument relatif à la levée des réserves du Qatar à la Convention. Ce document a été dûment transmis au Secrétaire général de l’ONU.

59.Le Conseil supérieur de la magistrature a négocié les clauses des contrats proposés à des juges étrangers directement avec les intéressés; les pays d’origine de ces derniers prévoient que la durée maximale de leur détachement est de quatre ans. L’article 2 du règlement du Conseil supérieur de la magistrature garantit l’indépendance des juges.

60.M. Al-Obaidly (Qatar) dit que la délégation fera parvenir au Comité des statistiques détaillées sur le nombre de plaintes et de requêtes émanant de détenus et sur les jugements rendus en faveur d’employés.

61.En 2010, 105 cas de transfert de parrainage entre employeurs ont été recensés, contre 123 en 2011. Depuis le début 2012, 235 transferts de ce type ont été dénombrés.

62.M me Al-Obaidly (Qatar) dit que les communications reçues par la Fondation pour la protection des femmes et des enfants ont été examinées et traitées au cas par cas. En tout, 72 affaires ont été portées à l’attention du ministère public et dûment déférées aux tribunaux. Un conseil a été attribué aux plaignants dans 48 affaires. La Fondation ne se borne pas à transmettre des dossiers au ministère public mais assure leur suivi jusqu’à ce qu’ils aboutissent à une réparation adéquate.

63.En droit qatarien, tout acte pouvant être qualifié de violent est considéré comme une infraction. Bien que la violence dans la famille ne soit pas définie comme un acte violent, les articles 279, 280 et 281 du Code pénal disposent clairement que toute agression perpétrée contre une personne au sein ou en dehors de la famille constitue une infraction.

64.M. A l Mohannadi (Qatar) dit que, dans l’armée, le principe de l’obéissance aux ordres d’un supérieur est fondé sur la légalité. Un subordonné doit être certain que les ordres qu’il reçoit sont légaux et émis de bonne foi; les individus qui commettent des fautes ou qui réagissent de manière disproportionnée sont passibles de poursuites pénales.

65.La détention au secret, qui est régie par la loi no 3 de 2009, s’inscrit dans le cadre d’un système progressif de sanctions permettant aux directeurs d’établissements pénitentiaires d’appliquer toute une série de mesures disciplinaires qui vont du retrait de privilèges au placement au secret pendant une période déterminée.

66.M. Jabr Al Thani (Qatar) dit que le Gouvernement qatarien se félicite de l’occasion qui lui a été offerte de participer à un dialogue constructif avec le Comité. Il considère que la torture est illégale en toutes circonstances. La législation nationale incrimine clairement toutes les formes de torture et de mauvais traitements, conformément à la définition figurant à l’article premier de la Convention, et prévoit des peines adéquates. Un système permettant aux victimes de bénéficier de réparations, de soins médicaux et de dommages et intérêts pour le préjudice subi a été mis en place, parallèlement aux mécanismes existants de réadaptation. Le Qatar continue de renforcer ses organes législatifs et judiciaires afin de prévenir les actes de torture et les traitements cruels ou inhumains. Des améliorations ont été apportées à la législation nationale grâce aux recommandations formulées par le Comité à l’issue de l’examen du rapport initial.

La séance est levée à 18 heures.