NATIONS

UNIES

CAT

Convention contre

la torture et autres peines

ou traitements cruels,

inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/SR.4978 janvier 2002

Original: FRANÇAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

Vingt-septième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA PARTIE PUBLIQUE* DE LA 497e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mardi 20 novembre 2001, à 15 heures

Président: M. BURNS

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (suite)

Rapport initial de la Zambie

QUESTIONS D’ORGANISATION ET QUESTIONS DIVERSES

La séance est ouverte à 15 h 10.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Rapport initial de la Zambie (CAT/C/47/Add.2) (suite)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation zambienne reprend place à la table du Comité.

2.M. MUTALE (Zambie), répondant aux questions et observations présentées par les membres du Comité, souhaite tout d’abord évoquer la très importante question du dualisme en droit international. Consciente de ce qu’implique le principe Pacta sunt servanda, la Zambie réaffirme qu’elle est résolue à remplir tous les engagements et obligations qu’elle a contractés en droit international; c’est pourquoi elle intégrera à sa législation, à titre prioritaire, tous les instruments internationaux qu’elle a ratifiés dans le domaine des droits de l’homme. En tout état de cause, elle a jusqu’à présent veillé à s’acquitter de ses obligations internationales comme le ferait un État moniste et elle a notamment appliqué les cinq décisions la concernant prises par le Comité des droits de l’homme au titre du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques. La Zambie a l’intention d’incorporer à sa législation interne les dispositions de la Convention contre la torture, au titre du Plan‑cadre des Nations Unies pour l’aide au développement mis en place pour 2002‑2006.

3.Dans le cadre du programme de développement de ses capacités pour une bonne gouvernance, le Gouvernement zambien cherche à développer la coopération avec les organisations non gouvernementales qu’il considère comme ses partenaires. C’est ainsi que, quoique l’obligation de faire rapport aux organes créés en vertu de traités incombe bien entendu à l’État, il collabore avec elles à cet effet; le fait de consulter largement les ONG et de recueillir des informations auprès d’elles en vue d’établir ces rapports ne signifie nullement qu’ils n’émanent pas de lui. Par ailleurs, en ce qui concerne l’amélioration de conditions socioéconomiques difficiles qui pourraient avoir une incidence sur l’application de la Convention, des fonds fournis par l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) ont récemment été affectés au secteur social.

4.La raison pour laquelle l’article 15 de la Constitution zambienne n’évoque pas les châtiments cruels est que cet article a été rédigé en 1996, c’est-à-dire bien avant que la Zambie ait ratifié la Convention; ce problème sera résolu lorsque la Convention aura été incorporée au droit interne. Par ailleurs, il est vrai que la Zambie a ratifié le premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et que le Comité des droits de l’homme peut être saisi de plaintes formulées par des particuliers à son encontre; elle devrait de même envisager de faire les déclarations prévues aux articles 21 et 22 de la Convention contre la torture afin de reconnaître la compétence du Comité contre la torture en ce qui concerne de telles plaintes.

5.L’article 125 de la Constitution garantit l’indépendance de la Commission nationale des droits de l’homme, financée par le Gouvernement sur des fonds alloués par le Parlement. Elle dispose de ressources suffisantes pour mener à bien ses programmes et a mis en place une structure lui permettant d’être accessible au public. Dans le cadre de l’Initiative en faveur des PPTE, la Commission a reçu 0,5 milliard de kwachas. S’agissant des allégations de torture ayant suivi la tentative de coup d’État, c’est la Commission des droits de l’homme qui a défini le mandat de la commission d’enquête. Le juge qui présidait lors du procès en haute trahison a été nommé Président de cette commission parce que le Gouvernement ne souhaitait pas que deux tribunaux parallèles siègent en même temps, ce qui aurait pu nuire à leur objectivité; il était important que le procès pénal soit terminé avant que la commission d’enquête ne commence ses travaux.

6.M. Mutale ne partage pas l’analyse de M. Mavrommatis en ce qui concerne la tentative de coup d’État de 1997. Il s’agissait d’une insurrection fomentée par des militaires contre un gouvernement légitime, qui n’a pu être réprimée qu’en recourant à la force: on ne saurait pour autant parler de torture, même s’il n’est pas exclu qu’il y ait eu des blessés. Les chefs de la police ont indiqué à la commission qu’après l’échec du coup d’État, des soldats rebelles avaient été appréhendés et conduits au siège de la police où, selon certaines allégations, bon nombre d’entre eux auraient été battus; or, ont‑ils précisé, aucun suspect n’a été maltraité au siège de la police mais des brutalités avaient eu lieu dans les locaux des forces armées. Cependant, ainsi qu’il est précisé au paragraphe 137 du rapport (CAT/C/47/Add.2), la commission chargée de l’enquête a conclu que des personnes soupçonnées d’avoir participé à la tentative de coup d’État avaient été torturées par la police, mais l’identité des coupables n’a pu être établie. Quoi qu’il en soit, le Gouvernement a accepté les recommandations de la commission et y a donné suite en mettant en chantier un programme de réforme de la police et du service pénitentiaire; en revanche, il n’a pas suivi les conclusions de la commission en ce qui concerne la culpabilité des policiers. En effet, plusieurs policiers que l’on affirmait être les auteurs de tortures n’avaient pu témoigner devant la commission; leur cause n’ayant pas été entendue, le Gouvernement a estimé que la commission avait eu tort de les condamner. En outre, on n’avait pas établi de manière concluante la façon dont les militaires avaient traité les suspects appréhendés avant de les remettre à la police et il était par conséquent difficile de savoir à quel moment et par qui certaines lésions leur avaient été infligées. Le Gouvernement n’a pas non plus suivi la commission en ce qui concerne les dédommagements, car aucun lien n’avait été établi entre les lésions que présentaient les suspects et la torture, aucune expertise médicale n’avait été faite et les indemnisations avaient été fixées sans tenir compte de la gravité de ces lésions. En outre, la commission n’avait pas tenu compte des efforts faits par le Gouvernement pour protéger les droits et libertés individuels, alors qu’il avait notamment facilité l’enquête, fait hospitaliser à ses frais plusieurs personnes, veillé à ce que tous les accusés bénéficient d’un procès équitable devant un tribunal civil plutôt que d’être traduits en Cour martiale et fait ouvrir une enquête sur les allégations mettant en cause ses fonctionnaires.

7.Afin d’assurer l’indépendance du pouvoir judiciaire, c’est le Parlement qui est chargé de la nomination des magistrats; leur inamovibilité est garantie par la Constitution et leur intégrité consacrée par un code de déontologie. Par ailleurs, le bureau du Procureur général comporte un département d’aide judiciaire qui vient en aide aux personnes les plus démunies. En vertu d’une loi portant modification de l’aide judiciaire, un fonds ayant pour vocation de régler les honoraires des avocats privés souhaitant assurer la défense des personnes à revenu modeste a été créé. L’association des juristes zambiens a, de son côté, mis en place des dispositifs tels que le centre national d’aide judiciaire aux femmes.

8.Le Gouvernement zambien convient que pour donner effet à l’article premier de la Convention, il lui faudra sans retard qualifier d’infraction pénale les actes de torture. Par ailleurs, contrairement à ce qui est indiqué au paragraphe 22 du rapport, les ordres illégaux émanant de supérieurs hiérarchiques n’ont pas à être respectés: les textes législatifs et les consignes données aux policiers à cet égard ne concernent que les ordres licites. De plus, l’article 30 de la Constitution zambienne dispose qu’il ne peut en aucun cas être dérogé à l’interdiction de la torture.

9.À propos du paragraphe 38 du rapport à l’examen, M. Mutale confirme que les services organiques de la Commission nationale des droits de l’homme ont leur siège à Lusaka mais des comités des droits de l’homme ont été créés dans les provinces et des secrétariats au niveau provincial sont en cours d’installation grâce à un financement de l’Initiative en faveur des PPTE. Des donateurs ont aussi alloué 150 000 dollars des États‑Unis à la Commission pour qu’elle puisse ouvrir des antennes dans les provinces. Le Gouvernement a l’intention de prendre les mesures qui s’imposent pour résoudre les difficultés qui ont surgi entre les comités des droits de l’homme et les services de détection et de répression, évoquées au paragraphe 45 c) du rapport. Le Ministre de l’intérieur a par ailleurs été chargé de nommer les membres de l’Inspection générale des services de police, pour laquelle un budget est prévu et qui commencera à fonctionner en 2002. Ces personnes aux compétences très diverses seront largement représentatives de la société et seront les garantes de l’efficacité de cet organe.

10.Actuellement, la torture n’est pas une infraction extraditionnelle. Si le Procureur général ne peut extrader une personne qui risque la torture dans le pays requérant, aucune loi ne prévoit l’extradition d’un tortionnaire et, à l’heure actuelle, il n’est pas possible de juger quelqu’un pour acte de torture en Zambie, d’où l’urgente nécessité d’intégrer le crime de torture dans le droit interne. Il est à noter cependant que des policiers ont été sanctionnés pour d’autres infractions ayant un rapport avec la torture; la délégation zambienne communiquera des chiffres à leur sujet, ainsi que concernant le nombre de policiers coupables d’infractions qui ont été poursuivis et condamnés. On notera aussi que des actions peuvent être intentées contre l’État. En cas de brutalités policières avérées, le ministère public fait l’objet de poursuites et les victimes sont indemnisées. Une circulaire de l’Inspecteur général de la police prévoit d’imposer des amendes aux policiers qui se sont rendus coupables d’infractions à l’encontre des personnes. Consciente que les tortionnaires ne doivent pouvoir trouver refuge nulle part, la Zambie fera en sorte que la torture soit qualifiée de crime passible d’extradition; en attendant, afin de combler cette lacune, le Gouvernement va veiller à ce qu’il soit fait usage des dispositions générales du Code pénal pour condamner les auteurs d’actes de torture. Enfin, si la Zambie honore certes les traités d’extradition conclus avec les autres pays du Commonwealth, la torture n’est pas couverte par leurs dispositions, toujours en raison de cette lacune du droit zambien.

11.Il a été fait référence au meurtre de Ronald Penza, mais les personnes citées à ce sujet n’ont aucun rapport avec cette affaire; elles étaient impliquées dans un vol qualifié ayant entraîné des échanges de coups de feu avec la police. Le nombre de personnes suspectées du meurtre de Ronald Penza était de trois et non de huit; ces informations erronées ont été le fait du porte‑parole de la police, qui a depuis été sanctionné. Les meurtriers de Ronald Penza n’ont toujours pas été arrêtés. D’autre part, des communications ont été remises au Haut‑Commissariat pour les droits de l’homme à propos d’autres affaires et notamment le cas de Dean Muncomba. Pour ce qui est du décès d’une fillette de 12 ans dans les locaux de la police, le policier responsable de son décès a été condamné pour meurtre et purge actuellement une peine d’emprisonnement. Enfin, à une certaine époque, les enfants des rues étaient recueillis et placés dans des centres d’accueil spécialisés; ces mesures étaient prises dans leur intérêt par le Ministère du développement communautaire et des services sociaux et diverses ONG. La police ne s’en est jamais occupée et la délégation zambienne rejette toute allégation à ce sujet.

12.Afin de lutter contre la violence au foyer, une unité de soutien aux victimes a récemment été créée afin de protéger les droits des groupes les plus défavorisés, c’est‑à‑dire les enfants, les femmes et les personnes âgées. Des actions de sensibilisation à ces problèmes ont été organisées à l’intention des policiers afin qu’ils sachent comment réagir dans ce genre de cas. De nombreuses personnes s’adressent maintenant à l’unité de soutien aux victimes. Pour ce qui est des institutions chargées d’appliquer le droit coutumier, les pouvoirs publics s’intéressent actuellement à la façon dont est rendue la justice à l’échelon local, afin de protéger les citoyens qui comparaissent devant ces tribunaux et notamment les femmes.

13.Afin de donner suite aux recommandations du Comité, le Gouvernement zambien examinera la question des preuves indirectes. Il reconnaît en outre qu’un programme dynamique de formation de la police s’impose dans le cadre du plan de développement stratégique des services de police pour 2001‑2006; il est envisagé d’élaborer des manuels de formation à l’intention des forces de l’ordre et du personnel pénitentiaire à tous les échelons de la hiérarchie; l’aide internationale sera à cet égard la bienvenue. Par ailleurs, le Gouvernement va étudier la question du réexamen systématique des règles relatives à l’instruction, qui sont dépassées et à revoir entièrement. En outre, il est conscient que les personnes inculpées doivent être jugées dans des délais raisonnables. Enfin, on notera que la Zambie n’a pas connu d’état d’urgence récemment, le dernier remontant au début de 1999.

14.M. Mutale souhaite dissiper les inquiétudes suscitées par le paragraphe 92 du rapport à l’examen, en précisant que des poursuites peuvent parfaitement être engagées à l’encontre de policiers ayant failli à leur devoir. D’ailleurs, la responsabilité d’engager les poursuites sera prochainement retirée aux procureurs de la police afin de garantir l’impartialité de l’instruction. Il n’existe pas de registre de toutes les plaintes formulées à l’encontre des services de l’État; mais le nombre en sera communiqué ultérieurement au Comité. Par ailleurs, des fonds ont été réunis afin de mettre en place des programmes de recherche, d’éducation, d’information et de réadaptation des personnes dont les droits fondamentaux ont été violés; à cet égard, l’État ne joue qu’un rôle de catalyseur. S’agissant du rapprochement qui a été fait entre les paragraphes 72 et 146 du rapport, M. Mutale tient à préciser que le paragraphe 146 est à supprimer et à remplacer par le texte du paragraphe 72, le paragraphe 73 devant seul figurer dans la section consacrée à l’article 9 de la Convention.

15.Pour ce qui est de la situation dans les prisons, il faut d’abord préciser, à propos de l’alinéa d du paragraphe 33 du rapport, que lorsqu’ils visitent des centres de détention pour femmes, les visiteurs sont accompagnés par des gardiennes. En ce qui concerne la discipline imposée dans les prisons, M. Mutale indique que les sanctions qui y sont appliquées sont régies par les articles 97 et 98 de la loi sur les prisons; par exemple, lorsqu’un détenu commet un délit mineur, il peut notamment être placé dans une cellule d’isolement pour une durée maximale de 14 jours, se voir appliquer un régime alimentaire plus ou moins restreint et, le cas échéant, voir sa peine prolongée de 30 jours au plus. Pour des infractions plus graves, la sanction peut être une période d’isolement pouvant aller jusqu’à 25 jours, un régime alimentaire plus ou moins restreint durant 25 jours ou plus, une prolongation de la durée de la peine de 60 jours au maximum et, enfin, un travail supplémentaire pendant une durée maximale de 10 jours. À propos de la règle 172 de la loi sur les prisons (par. 160 du rapport), il y a lieu de signaler que depuis l’arrêt rendu dans l’affaire John Banda c. Le ministère public,les châtiments corporels n’ont plus cours dans les prisons. Dans une circulaire datée de décembre 1999, le Procureur général a d’ailleurs interdit la pratique de la bastonnade, désormais illégale. Les mêmes observations s’appliquent à la règle 173‑1. Il est vrai que les prisons zambiennes sont surpeuplées et que les conditions qui y règnent ne sont pas bonnes. Le Gouvernement, aidé de ses partenaires, s’efforce de remédier à cette situation, mais il a besoin pour ce faire de l’aide de la communauté internationale. Enfin, M. Mutale précise que les «prisons en plein air» sont des structures ouvertes semblables à des villages, où les prisonniers sont surveillés par un ou deux gardiens. Elles permettent de désencombrer les prisons et de faire en sorte que les prisonniers puissent assurer en partie leur propre subsistance. En ce qui concerne la situation des femmes en prison, conformément au Règlement des prisons, aucun surveillant de sexe masculin ne peut pénétrer dans la section des femmes sans être accompagné par un membre féminin du personnel. En cas de manque d’effectifs, du personnel temporaire est engagé. Un homme seul ne peut pas entrer dans le quartier des femmes et aucune atteinte à cette règle n’a été signalée aux autorités. Si toutefois une détenue est victime d’une violation de ses droits, elle peut porter plainte auprès du fonctionnaire responsable des prisons, des juges inspecteurs, du secrétaire permanent de la région ou du Ministre de l’intérieur, conformément à la loi sur les prisons. De plus, le Gouvernement a approuvé un programme de réforme qui prévoit notamment de faire passer le nombre de surveillants de 2 000 environ à 6 000, pour répondre à l’accroissement de la population carcérale, et de mettre en place des services de soins médicaux pour les employés et les détenus.

16.Comme il est indiqué au paragraphe 165 f) du rapport, les femmes placées en détention provisoire dans un établissement non équipé pour accueillir des femmes sont libérées sous caution; la mesure s’applique aux mères d’enfants en bas âge, aux femmes enceintes inculpées d’une infraction susceptible de caution; les femmes soupçonnées d’une infraction grave, sont en revanche obligatoirement immédiatement transférées dans un centre de détention pour femmes.

17.En ce qui concerne les brutalités dont Emily Sikazwe, directrice d’une ONG aurait été victime, les autorités n’ont eu connaissance de l’incident que par un journal indépendant; comme aucune plainte n’a été officiellement déposée, le Gouvernement n’est pas en mesure de donner des éclaircissements. En effet, des articles de presse ne peuvent servir de base à l’ouverture d’une enquête et il est nécessaire que le plaignant ou une tierce personne informe la police ou dépose plainte devant un magistrat, qui charge ensuite la police de mener une enquête.

18.Le viol est considéré comme un crime grave en Zambie et est passible d’un emprisonnement allant de trois ans à la réclusion à perpétuité. Le tribunal n’a pas pouvoir discrétionnaire en la matière. Les seules infractions qui peuvent faire l’objet d’un règlement extrajudiciaire sont les agressions, si la victime et l’agresseur s’entendent; la possibilité de régler une affaire de viol par le paiement d’un dédommagement à la victime est donc totalement exclue et il est faux de donner à entendre que l’État encourage l’impunité du viol. En ce qui concerne la pratique consistant à avoir des relations sexuelles avec des jeunes filles vierges en vue de guérir du VIH/sida, les autorités n’en ont pas connaissance. Pour ce qui est des allégations selon lesquelles des fonctionnaires de police auraient exigé des faveurs sexuelles, le Gouvernement zambien dément catégoriquement de telles allégations et regrette que les personnes qui se prétendent victimes de tels actes ne se soient pas fait connaître des autorités compétentes.

19.En ce qui concerne la procédure d’asile, M. Mutale indique que le projet de loi sur les réfugiés reconnaît juridiquement le Comité national chargé d’examiner la recevabilité des demandes d’asile et que désormais, les recours pourront être présentés au Ministre de l’intérieur; la décision rendue par ce dernier est finale sur le plan administratif mais pourra, avec la nouvelle loi être réexaminée par une autorité judiciaire.

20.M. Mutale remercie les membres du Comité de leurs intéressantes questions qui ont permis un dialogue fructueux et réaffirme l’engagement de la Zambie en faveur de la réalisation des principes démocratiques et de la promotion et de la protection des droits de l’homme.

21.M. MAVROMMATIS (Rapporteur pour la Zambie) se félicite de la franchise avec laquelle la délégation a répondu aux questions du Comité et de ce que l’État partie se soit engagé à incorporer les dispositions de la Convention dans son droit interne. Il souhaite qu’un programme soit mis en place sans délai pour mener à bien cette tâche. Par ailleurs, il tient à dissiper un malentendu: il a fait allusion aux droits économiques, non pas pour accuser l’État partie de les violer, mais pour expliquer l’incapacité de ce dernier à prendre des mesures dans certains domaines. De même, il n’a pas repris à son compte les allégations de certaines organisations non gouvernementales selon lesquelles le coup d’État n’en était pas réellement un, mais les a citées afin de connaître l’avis de la délégation à ce sujet.

22.Dans le cas du meurtre de la fillette de 12 ans, il se félicite que le meurtrier ait été jugé et souhaiterait connaître la durée exacte de la peine qui a été prononcée. Pour ce qui est de l’affaire Penza, il estime qu’elle a été traitée assez sommairement et s’étonne en particulier de ce qu’autant de témoins dans une même affaire aient disparu, soit parce qu’ils se seraient évadés, soit parce qu’ils auraient été tués. Ce dossier devrait être rouvert. L’État partie peut envoyer ultérieurement des réponses écrites à ces questions. En conclusion, le Rapporteur se félicite du dialogue fructueux qui a pu s’établir.

23.M. RASMUSSEN (Corapporteur pour la Zambie) salue les efforts faits par la délégation pour répondre de façon détaillée aux nombreuses questions du Comité et les assurances qui ont été données concernant la mise en œuvre de réformes. Il existe des mesures qui n’ont pas d’incidences financières et qui pourraient être prises aisément. Ainsi l’abolition des châtiments corporels dans les prisons représente un progrès notable de même que la mise en place de prisons à l’air libre, solution au surpeuplement dans les prisons autant que bonne préparation à la réinsertion des détenus. Il attend avec intérêt des renseignements approfondis à ce sujet dans le deuxième rapport périodique de l’État partie.

La partie publique de la séance est suspendue à 16 h 5; elle est reprise à 16 h 40.

QUESTIONS D’ORGANISATION ET QUESTIONS DIVERSES (point 2 de l’ordre du jour)

Réponse du Comité à la lettre de la Haut‑Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme

24.Le PRÉSIDENT rappelle que, dans une lettre datée du 11 octobre 2001, la Haut‑Commissaire aux droits de l’homme a sollicité l’opinion du Comité sur les mesures à prendre pour garantir la protection des droits relevant du mandat du Comité, à la lumière des actions engagées par divers États en réponse aux événements du 11 septembre 2001. Il a donc rédigé un projet de lettre – distribué aux membres du Comité – qui constituerait soit une réponse à la Haut‑Commissaire, soit une déclaration à l’intention de tous les États parties à la Convention. Dans ce projet, où ne figure aucun nom d’État ni aucune proposition, le Comité se dit conscient de la terrible menace que représente le terrorisme international pour la société mais rappelle que la plupart des obligations auxquelles les États parties ont souscrit en vertu de la Convention, et en particulier celles prévues aux articles 2 et 15, ne sont pas susceptibles de dérogation et doivent être respectées en toutes circonstances.

25.M. MAVROMMATIS se dit très préoccupé par la situation actuelle et par le risque d’escalade dans l’usage de la force qui pourrait fortement compromettre tous les progrès réalisés en matière de droits de l’homme depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il est donc favorable à l’envoi à la Haut‑Commissaire et éventuellement aussi aux États partie d’une déclaration appelant au respect des règles humanitaires minima. Cette communication devra être rédigée dans des termes qui puissent être approuvés par l’ensemble des membres.

26.M. YAKOVLEV est d’avis que le Comité doit s’en tenir à une argumentation strictement juridique s’inscrivant dans les limites de la Convention même si la situation, nouvelle à bien des égards, inspire à chacun des réactions de nature plutôt émotionnelle. Plus précisément, il se demande si les références aux articles 2 et 15 sont suffisantes et s’il ne faudrait pas rappeler la teneur des principaux articles de la Convention.

27.M. CAMARA dit que, avant de se pencher sur le contenu de la lettre, le Comité doit réfléchir à la légitimité d’une telle démarche, ajoutant que la formulation à adopter dépendra des destinataires de la déclaration. Il considère pour sa part que le Comité – institué pour veiller au respect des dispositions de la Convention par les États parties – est parfaitement autorisé à prendre des mesures tendant à prévenir les actes visés par la Convention. Pour ce qui est de la teneur de la déclaration, il insiste pour que soient également rappelées à ses destinataires s’il s’agit des États parties, les dispositions de l’article 16 de la Convention, qui revêtent une importance toute particulière dans le contexte actuel, ainsi que la nécessité absolue pour des États régis par le droit, de réagir dans le respect des voies de droit.

28.M. RASMUSSEN est favorable lui aussi à l’ajout, dans la lettre, d’une référence à l’article 16 de la Convention.

29.Le PRÉSIDENT ne s’oppose pas à ce qu’il soit fait mention de l’article 16 à condition que le projet puisse être accepté par consensus.

30.M. EL MASRY, convaincu du bien‑fondé de la démarche proposée, demande si la réunion des États parties prévue le 28 novembre 2001 ne pourrait pas constituer l’occasion d’une adresse aux États parties sur ce sujet.

31.Mme GAER estime que le Comité doit adresser sa lettre à la Haut‑Commissaire aux droits de l’homme et non pas aux États parties avec lesquels il n’a pas l’habitude de correspondre de cette façon. Il lui semble en outre réducteur de ne citer que deux ou trois articles de la Convention alors que la plupart d’entre eux pourraient utilement être rappelés. Enfin, les termes choisis dans le préambule de la lettre lui semblent un peu trop faibles étant donné qu’il s’agit de la disparition de 6 000 personnes originaires de 80 nations.

32.M. GONZÁLEZ POBLETE préconise, étant donné le caractère exceptionnel de la situation, l’envoi de la déclaration à tous les États parties même si la correspondance entre ceux‑ci et le Comité est normalement limitée à l’application des articles 19, 20, 21 ou 22. Bien que tous les droits consacrés par la Convention soient menacés, ce sont ceux prévus aux articles 2, 15 et 16 dont il convient de rappeler le caractère intangible.

33.M.YU Mengia fait siennes les diverses suggestions qui ont été présentées par les membres du Comité, mais n’estime pas judicieux, pour des raisons de temps d’aborder cette question à la huitième réunion des États parties à la Convention.

34.Le PRÉSIDENT croit comprendre qu’un certain consensus semble se dégager parmi les membres du Comité. Il invite Mme Gaer à rédiger le préambule de la déclaration et décrira lui‑même dans un langage simple le contenu des trois articles 2, 15 et 16 de la Convention. La déclaration sera adressée aux États parties et également jointe en annexe à la réponse envoyée à la Haut-Commissaire aux droits de l’homme. Les membres du Comité ont de toute façon la possibilité de revenir sur la question avant la fin de la session.

Questions d’intérêt commun

35.Le PRÉSIDENT invite les membres du Comité à indiquer des questions d’intérêt commun que les présidents des organes créés en vertu d’instruments relatifs aux droits de l’homme pourraient examiner au cours des deux journées de leur treizième réunion. Il propose que la réunion examine la procédure interne d’élaboration des rapports périodiques puisqu’elle semble être à certains égards différente selon les organes conventionnels.

36.M. RASMUSSEN rappelle que les membres du Comité s’étaient déjà interrogés sur la manière dont le Comité pourrait aider et encourager les pays qui n’ont toujours pas soumis leur rapport. Deux moyens sont possibles: soit un appui technique apporté par un expert qui joue le rôle de catalyseur, mais ne rédige pas le rapport, soit la participation des ONG; dans le deuxième cas il importe de déterminer quel degré de participation des ONG à l’élaboration du rapport d’un État partie les divers comités souhaitent.

37.Le PRÉSIDENT se demande quelle position le Comité doit adopter si un petit pays a les ressources suffisantes pour faire établir son rapport en recourant aux services de consultants d’un grand pays. Le Comité sera en droit d’émettre des critiques quant au fond, mais sera‑t‑il fondé à critiquer le pays sur la manière dont il a établi son rapport?

38.M. GONZÁLEZ POBLETE dit qu’il importe peu de savoir si les États parties peuvent bénéficier d’une assistance technique de la part de membres du Comité, puisque le rapport présenté par les représentants du Gouvernement engage de toute manière la responsabilité de l’État partie qui présente le rapport. Le rapport doit contenir des informations fiables et impartiales; or force est de constater que le rapport d’un État partie et les informations présentées par des ONG sur un même sujet tendent souvent à diverger et il est donc souhaitable que l’éventail le plus large de représentants de la société civile participe à l’établissement d’un rapport, pour qu’il reflète différentes visions.

39.M. MAVROMMATIS dit que le sujet débattu présente un intérêt certain pour les organes conventionnels, mais pense qu’a leur réunion les présidents souhaiteront sans doute traiter de la suite à donner à la Conférence de Durban. La question de l’harmonisation des procédures concernant des dispositions conventionnelles qui traitent d’un même sujet, par exemple, l’article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et divers articles de la Convention contre la torture, serait aussi intéressante. Il serait donc utile de tenter d’établir une certaine coordination pour tenir compte des dispositions semblables ou similaires, notamment dans la jurisprudence des divers comités, pour éviter une interprétation trop divergente qui risquerait de nuire à leur crédibilité.

40.Le PRÉSIDENT souscrit entièrement aux vues exprimées par M. Mavrommatis. Il doute cependant que le Comité des droits de l’homme accepte de renoncer à l’examen de l’article 7 du Pacte pour laisser intégralement la question des mauvais traitements au Comité contre la torture. Peut-être serait-il bon d’envisager, même si cette approche lui semble quasiment impossible à mettre en œuvre, que les organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme adoptent des observations générales communes.

41.Mme GAER ne croit pas que l’élaboration d’observations générales communes soit une bonne solution. En revanche, il faut souligner le problème du chevauchement des dispositions de divers instruments internationaux sur un même sujet.

42.Le PRÉSIDENT reconnaît qu’il s’agit là d’une question importante qui appelle une réflexion plus poussée et invite les membres du Comité à revenir sur ce point avant la réunion des présidents des organes conventionnels.

La séance est levée à 17 h 45.

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