Nations Unies

CMW/C/MLI/CO/2

Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Distr. générale

1 mai 2014

Français

Original: français

Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Observations finales concernant le deuxième rapport périodique du Mali *

Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique du Mali (CMW/C/MLI/2)à ses 247e et 248e séances(CMW/C/SR.247 et 248), tenues les 2 et 3 avril 2014,et a adopté les observations finales ci-après à sa 261e séance (CMW/C/SR.261), tenue le 11 avril 2014.

A.Introduction

Le Comité se félicite de la présentation du deuxième rapport périodique de l’État partie en réponse à la liste des points à traiter établie avant la soumission du deuxième rapport périodique du Mali (CMW/C/MLI/Q/2).

Le Comité félicite l’État partie pour sa délégation de haut niveau conduite par le Ministre du travail et des affaires sociales et humanitaires, M. Hamadou Konaté, et composée d’un représentant du Ministère des affaires étrangères et de la coopération internationale, de la Représentantepermanentedu Mali auprès de l’Office des Nations Unies à Genève et d’autres membres de la Mission permanente. Le Comité apprécie le dialogue qui s’est tenu entre la délégation et les membres du Comité, même si le rapport et les réponses orales ne contenaient pas suffisamment d’informations sur certaines questions, notamment des informations statistiques.

Le Comité note que les pays où sont employés la plupart des travailleurs migrants maliens ne sont pas encore parties à la Convention, ce qui constitue un obstacle à la jouissance par ces travailleurs des droits que leur reconnaît la Convention.

B.Aspects positifs

Le Comité note avec satisfaction les mesures législatives et politiques ci-après:

a)L’adoption de la loi no2012-023 du 12juillet 2012 relative à la lutte contre la traite des personnes et les pratiques assimilées;

b)L’adoption du décret no036 PR-RM du 3 février 2011 portant création du Comité national de coordination de la lutte contre la traite des personnes et les pratiques assimilées;

c)L’adoption de l’arrêté no06-1940/MPFEF-SG du 8 septembre 2006 portant création du Comité national de suivi des programmes de lutte contre la traite des enfants au Mali;

d)La signature, le 15 mars 2006, d’un accord de financement (MLI no2005‑081) pour un programme de codéveloppement (2006-2009) entre le Mali et la France, incluant des projets de réinsertion des migrants maliens retournés dans l’État partie.

Le Comité note avec satisfaction la ratification par l’État partie des traités internationaux suivants:

a)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en 2009;

b)La Convention relative aux droits des personnes handicapées et son protocole facultatif, en 2008.

C.Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention

Le Comité reconnaît les difficultés auxquelles l’État partie est confronté, notamment la récente crise qu’a traversée l’État partie, la porosité des frontières et les changements climatiques, qui peuvent faire obstacle à la pleine réalisation de tous les droits et libertés fondamentales des travailleurs migrants et des membres de leur famille.

D.Principaux sujets de préoccupation, suggestions et recommandations

1.Mesures d’application générales (art. 73 et 84)

Législation et application

Le Comité note avec satisfaction les déclarations de la délégation selon lesquelles le code du travail en cours d’élaboration intègrera les dispositions de la Convention. Le Comité est cependant préoccupé par le fait que l’État partie n’a pas encore adopté de dispositions juridiques relatives à l’application de la Convention.

L e Comité invite l’ État partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour s’assurer que les dispositions de la Convention soient intégrées dans le code du travail en cours d’élaboration et pour assurer la mise en œuvre effective des présentes recommandations.

Le Comité note avec satisfaction la déclaration de la délégation selon laquelle l’État partie s’engage à prendre les dispositions nécessaires, dans les meilleurs délais, pour faire les déclarations prévues aux articles 76 et 77 de la Convention par lesquelles il reconnaîtrait la compétence du Comité pour recevoir des communications d’États parties et de particuliers.

Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre ses actions en vue de faire les déclarations prévues aux articles 76 et 77 de la Convention .

Tout en notant les difficultés énoncées par l’État partie, telles que l’insuffisance de ressources, pour faire face aux obligations qui naîtraient d’une ratification des conventions nos97 (1949) et 143 (1975) sur les travailleurs migrants de l’Organisation internationale du Travail (OIT), le Comité regrette que l’État ne soit pas encore partie à ces deux conventions, ni aux conventions de l’OIT nos181 (1997) sur les agences d’emploi privées et 189 (2011) sur les travailleuses et travailleurs domestiques.

Le Comité rappelle à l’État partie que le niveau de développement et l’insuffisance de ressources disponibles ne peuvent justifier l’inaction de l’État pour la promotion et la protection des droits de l’homme. Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de ratifier les conventions n os 97, 143, 181 et 189 de l’OIT.

Collecte de données

Le Comité prend note des données statistiques existantes sur le nombre de migrants au Mali, ventilées par sexe et collectées lors du quatrièmerecensement général de la population du Mali de 2009; de l’existence de la base de données Malikunnafoni sur le nombre de filles migrantes assistées; et de l’élaboration d’une base de données sur la migration depuis 2011. Cependant, le Comité regrette l’insuffisance des données statistiques, ventilées par sexe, âge et origine, sur les flux migratoires à destination et en provenance de l’État partie, incluant les membres des familles des travailleurs migrants. Il rappelle que ces informations sont indispensables pour comprendre la situation migratoire dans l’État partie et pour évaluer le niveau de mise en œuvre de la Convention.

Le Comité recommande à l’ État partie :

a) D e solliciter l’assistance technique nécessaire en vue de faire en sorte que la base de données existante sur la migration soit centralisée et ventilée par sexe, âge et origine, en vue :

i) D e mieux appréhender le contexte migratoire et la situation des travailleurs migrants dans l’État partie , y compris ceux qui sont en situation irrégulière ;

ii) D e permettre une mise en œuvre efficace de l a politique migratoire ;

iii) D e surveiller l’application des dispositions de la Convention ;

b) De fournir des renseignements sur le nombre de travailleurs migrants ma liens et de membres de leur famille se trouvant à l’étranger, y compris ceux qui sont en situation irrégulière et, dans la mesure du possible, sur leur situation au titre de la Convention . En l’absence d’informations précises, le Comité souhaiterait obtenir des données fiables, fondées sur des sondages ou des estimations crédibles.

Formation et diffusion de la Convention

Tout en notant avec satisfaction l’engagement exprimé par la délégation de renforcer la capacité des fonctionnaires en matière de migration, le Comité note l’absence d’informations sur l’existence de programmes spécifiques de formation portant sur la Convention destinés aux fonctionnaires concernés, tels que les membres des forces de sécurité, les agents des ambassades et des consulats, les travailleurs sociaux, les juges et les procureurs, à l’instar de ce qui a été recommandé par le Comité dans ses premières observations finales (CMW/C/MLI/CO/1).

Le Comi té recommande à l’État partie d’instaurer des sessions de formation spécifiques sur le contenu et l’applica tion de la Convention à l’intention de l’ensemble des fonctionnaires amenés à travailler avec des travailleurs migrants, en particulier les magistrats, l es forces de sécurité et la police des frontières, les agents de l’immigration , les agents des ambassades et des consulats , les inspecteurs du travail et les travailleurs sociaux .

2.Principes généraux (art. 7 et 83)

Droit à un recours utile

Tout en notant les informations reçues de l’État partie concernant le nombre de travailleurs migrants ayant effectué un recours judiciaire, le Comité note le nombre limité de recours effectués et l’absence de programmes spécifiques d’information des travailleurs migrants sur leur droit d’engager des recours devant les juridictions lorsque leurs droits ont été violés.

Le Comité invite l’État partie à i nformer les travailleurs migrants et les membres de leur famille des recours judiciaires et autres qui leur sont ouverts en cas de violation des dispositions de la Convention et à traiter leurs plaintes le plus efficacement possible et dans des délais raisonnables.

3.Droits de l’homme de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (art. 8 à 35)

Tout en notant les déclarations de la délégation selon lesquelles l’emprisonnement des travailleurs migrants pour avoir violé la législation relative à la migration est une pratique quasiment inexistante, le Comité reste préoccupé par l’absence de statistiques à ce sujet. Le Comité est également préoccupé par l’existence de dispositions légales prévoyant des peines d’emprisonnement pouvant aller de trois mois à trois ans lorsque l’étranger séjourne ou habite dans l’État partie sans avoir reçu l’autorisation appropriée ou après l’expiration du délai fixé par l’autorisation.

Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’i ndique r , dans son prochain rapport périodique, le nombre de migrants, ventilés par âge, sexe, nationalité et/ou origine, actuellement placés en détention pour avoir violé la législation relative à la migration, en précisant le lieu , la durée moyenne et les conditions de détention et en donnant des informations sur les décisions prises à leur encontre ;

b) D’envisager de dépénaliser la migration irrégulière et de prévoir des sanctions administratives adéquates pour les migrants ayant violé la législation relative à l’immigration, le Comité considérant que, conformément à son observation générale n o  2 (2013) sur les droits des travailleurs migrants en situation irrégulière et des membres de leur famille, le fait de séjourner dans un pays sans y être autorisé ou sans être en possession des documents nécessaires ou de demeurer dans un pays après l’expiration d’un permis de séjour ne doit pas faire l’objet d’une incrimination pénale ;

c ) De ne procéder à la détention de travailleurs migrants pour violation de la législation relative à la migration que de façon exceptionnelle et en dernier recours et de s’assurer que, dans tous les cas, ils soient séparés des détenus de droit commun, et que les femmes soient séparées des hommes et les mineurs des adultes.

Le Comité est préoccupé par l’affirmation de l’État partie selon laquelle, bien que prévue par la législation, la carte de résident n’existe pas dans la pratique, ce qui constitue pour les travailleurs migrants et les membres de leur famille un obstacle à la régularisation de leur situation.

Le Comité recommande à l’État partie d’instaurer, dans la pratique, la carte de résident, telle que prévue par la loi n o 04 ‑ 058 du 25 novembre 2004 relative aux conditions d’entrée, de séjour et d’établissement des étrangers en République du Mali .

Le Comité prend note des déclarations de la délégation selon lesquelles les cas d’expulsion de travailleurs migrants en situation irrégulière sont rares. Toutefois, il regrette l’absence d’informations précises sur le nombre de migrants ayant fait l’objet d’une expulsion ainsi que sur l’accès effectif des travailleurs migrants en situation irrégulière aux voies de recours leur permettant de contester la décision d’expulsion prise à leur encontre.

Le Comité invite l’ État partie à fournir des informations plus précises sur le nombre de migrants ayant fait l’objet d’une procédure d’expulsion. Par ailleurs, il prie l’ É tat partie de fournir des informations sur les dispositions légales et les mesures existantes reconnaissant aux migrants sous le coup d’une procédure d’expulsion, en dehors des cas où la décision finale est prononcée par une autorité judiciaire, le droit: a) de faire valoir les raisons de ne pas être expulsés; b) de faire examiner leur cas par l’autorité compétente; et c) en attendant cet examen, de demander la suspension de la décision d’expulsion, conformément au paragraphe 4 de l’ article 22  de la Convention.

Le Comité prend note des informations reçues de l’État partie selon lesquelles les autorités consulaires effectuent des visites dans les lieux de détention des pays d’accueil pour s’enquérir de l’état des prisonniers maliens. Cependant, le Comité est préoccupé par les informations reçues selon lesquelles l’État partie ne fournirait pas une assistance adéquate aux ressortissants maliens détenus à l’étranger, dont certains, détenus en Mauritanie, au Maroc, en Guinée équatoriale et en Arabie saoudite, auraient demandé en vain l’assistance consulaire de l’État partie. Le Comité note également que l’État partie n’a pas communiqué d’informations concernant les mesures prises pour informer les autorités consulaires ou diplomatiques des États d’origine des travailleurs migrants qui sont détenus au Mali.

Le Comité recommande à l’ État partie :

a) De faciliter le recours des travailleurs migrants maliens vivant à l’étranger à l’assistance consulaire ou diplomatique de l’État partie, notamment en cas de détention ou d’expulsion ;

b) De s’assurer que ses services consulaires s’acquittent plus efficacement de leur mission de protection et de promotion des droits des travailleurs migrants maliens et des membres de leur famille et, en particulier, qu’ils apportent l’assistance requise à ceux qui sont privés de liberté ou visés par une décision d’expulsion;

c) De prendre les mesures nécessaires afin que les autorités consulaires ou diplomatiques des É tats d’origine , ou d’un É tat représentant les intérêts de ces É tats, soient systématiquement informé e s de la mise en détention dans l’État partie de l’un de leurs ressortissants , et que cette information soit dûment inscrite dans le registre de garde à vue (personne s contactées, date, heure, etc . ) .

Le Comité note l’insuffisance des informations reçues sur l’accès, en droit et en pratique, des travailleurs migrants et des membres de leur famille, quel que soit leur statut migratoire, aux soins médicaux d’urgence qui sont nécessaires pour préserver leur vie ou éviter un dommage irréparable à leur santé, sur la base de l’égalité de traitement avec les ressortissants de l’État partie.

Le Com ité recommande à l’État partie de fournir des informations, dans son prochain rapport périodique, sur la possibilité pour tous les travailleurs migrants et les membres de leur famille −  quel que soit leur statut migratoire  − de jouir en droit et en pratique de l’accès aux soins médicaux d’urgence qui sont nécessaires pour préserver leur vie ou éviter un dommage irréparable à leur santé, sur la base de l’égalité de traitement avec les ressortissants de l’État partie , conformément à l’article 28 de la Convention.

Le Comité note avec satisfaction l’existence d’un Ministère des Maliens de l’extérieur et de l’intégration africaine qui veille à informer les Maliens candidats à l’émigration sur les conditions d’entrée et de séjour dans les pays d’accueil et les dangers de la migration irrégulière. Toutefois, le Comité regrette l’absence d’informations sur l’impact de ces mesures.

Le Comité recommande à l’ État partie d’intensifier ses efforts pour informer les M aliens candidats à l’émigration ainsi que les membres de leur famille sur les droits que leur reconnaît la Convention et sur leurs droits et ob ligations dans l’État d’emploi, et de fournir dans son prochain rapport périodique des informations sur l’impact de ces mesures.

4.Autres droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille qui sont pourvus de documents ou en situation régulière (art. 36 à 56)

Le Comité félicite l’État partie pour les mesures qu’il a prises pour assurer la participation des travailleurs migrants maliens résidant à l’étranger aux dernières élections présidentielles tenues au Mali. Le Comité demeure cependant préoccupé par l’insuffisance des informations reçues sur la jouissance effective de ce droit, notamment sur le taux de participation des Maliens résidant à l’étranger. Le Comité regrette en outre que le droit de vote ne soit pas accordé aux travailleurs migrants maliens lors des élections législatives.

Le Comité invite l’État partie à fournir dans son prochain rapport périodique des informations concernant le taux de participation aux élections présidentielles des nationaux maliens vivant à l’étranger et des précisions sur l’application concrète de ce droit de vote. Le Comité invite également l’État partie à envisager d’étendre le droit de vote des travailleurs migrants maliens vivant à l’étranger aux élections législatives.

Le Comité se réjouit du volume important des fonds rapatriés dans l’État partie par les travailleurs migrants vivant à l’étranger, de l’aide considérable que ces fonds représentent pour le développement de l’État partie et de l’existence de mécanismes de transfert rapide de fonds. Toutefois, le Comité est préoccupé parl’absence d’informations disponibles sur les partenariats mis en place avec les institutions financières afin de faciliter les transferts de fonds et l’épargne, notamment par l’application de taux préférentiels.

Le Comité invite l’État partie : a)  à communiquer des informations sur les partenariats mis en place avec les institutions financières pour faciliter l’envoi de fonds par les travailleurs migrants maliens vivant à l’étranger vers l’État partie; b)  à prendre des mesures pour réduire les coûts de l’envoi et de la réception de s fonds ; et c) à rendre l’épargne plus accessible.

5.Promotion de conditions saines, équitables, dignes et légales en ce qui concerne les migrations internationales des travailleurs migrants et des membres de leur famille (art. 64 à 71)

Le Comité saluel’existence d’un accord bilatéral entre l’État partie et l’Espagne afin d’encourager la migration régulière des nationaux maliens. Le Comité note égalementles déclarations de la délégation selon lesquelles il existe un code de voisinage avec les pays limitrophes et un projet nommé «sikabo» avec deux pays voisins concernant les frontaliers. Le Comité regrette cependant que, malgré le nombre très important de travailleurs migrants maliens vivant à l’étranger, l’État partie n’ait signé que peu d’accords bilatéraux et multilatéraux afin de leur garantir des conditions saines, équitables et humaines.

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour la signature d’accords bilatéraux et multilatéraux qui favoriseraient la migration régulière, garantiraient des conditions saines, équitables et humaines pour les travailleurs migrants maliens vivant à l’étranger, et prévoiraient des garanties procédurales en leur faveur .

Le Comité accueille avec satisfaction les mesures prises par l’État partie auprès des autorités des pays d’accueil afin de soutenir les travailleurs migrants maliens dans des contentieux relatifs au droit du travail, au droit foncier et aux questions de visas. Cependant, le Comité regrette l’absence d’informations plus précises sur les activités des services consulaires et diplomatiques en faveur de la protection des droits des travailleurs migrants maliens et des membres de leur famille.

Le Comité recommande à l’ État partie :

a) De fournir dans son prochain rapport des informations sur les activités menées par l es services consulaires et diplomatiques en vue de la protection des droits des travailleurs migrants maliens et des membres de leur famille;

b) De s’assurer que ses autorités consulaires ou diplomatiques fournissent des renseignements et une aide appropriée aux travailleurs migrants maliens et aux membres de leur famille vivant à l’étranger, y compris ceux en situation irrégulière, notamment en ce qui concerne:

i) Les autorisations, les formalités requises et les démarches nécessaires pour leur départ, leur voyage, leur arrivée, leur séjour, leurs activités rémunérées, leur sortie et leur retour;

ii) Les conditions de travail et de vie dans l’État d’emploi ainsi que les lois et règlements en matière douanière, monétaire, fiscale et autres.

Le Comité note avec satisfaction l’existence de projets de réinsertion de migrants maliens retournés dans l’État partie. Cependant, le Comité est informé du fait qu’un certain nombre de migrants maliens de retour dans l’État partie feraient face à des difficultés pour accéder aux fonds qui leur sont destinés et ne recevraient pas un soutien suffisant.

Le Comité encourage l’État partie:

a) À faire en sorte que les accords de réadmission existants et à venir entre l’État partie et les pays hôtes garantissent durablement l a réi nsertion économique, sociale et culturelle des travailleurs migrants de retour dans l’État partie, comportent des garanties procédurales en faveur des travailleurs migrants et des membres de leur famille et garantissent que les travailleurs migrants maliens expulsés ne soient pas l’objet de mauvais traitements;

b) À s’assurer que les migrants maliens de retour dans l’État partie aient effectivement accès aux fonds qui leur sont destinés et reçoivent un appui suffisant et adéquat.

Tout en notant les actions entreprises par le Ministère des Maliens de l’extérieur en faveur du rapatriement des Maliens qui vivaient en Centrafrique, le Comité relève avec préoccupation l’absence de structures ou programmes supplémentaires de réintégration en faveur de ces rapatriés.

Le Comité invite l’État partie à mettre en place des structures et programmes supplémentaires pour l’accueil et la réintégration des travailleurs migrants maliens et des membres de leur famille récemment rapatriés de Centrafrique.

Le Comité note les déclarations de la délégation selon lesquelles l’État partie commence à fournir une assistance pour le retour de réfugiés maliens qui ont quitté l’État partie lors de la crise. Le Comité est cependant préoccupé par les informations reçues selon lesquelles ces réfugiés de retour dans l’État partie se trouveraient confrontés à un manque d’accès aux services de base, à un taux de chômage élevé, à un risque d’arrestation arbitraire ou de détention lorsqu’ils appartiennent à des groupes spécifiques et à des tensions intercommunautaires.

Le Comité encourage l’ État partie à organiser le retour des réfugiés maliens qui ont quitté l’ État partie pendant la crise, à s’assurer que leur sécurité et leurs droits sont garantis, et à prendre des mesures pour qu’ils réintègrent le tissu économique, social et culturel .

Le Comité accueille avec satisfaction les importantes mesures législatives et réglementaires prises par l’État partie pour lutter contre la traite des personnes, la création du Comité national de coordination de la lutte contre la traite des personnes et les pratiques assimilées, et la signature d’accords avec les pays limitrophes pour lutter contre la traite des enfants. Le Comité est cependant préoccupé par:

a)L’absence d’études, d’analyses et de données ventilées qui permettraient d’évaluer l’ampleur de la traite aussi bien vers l’État partie qu’à travers et à partir de celui‑ci;

b)Les informations reçues concernant l’existence: de circuits de traite du Mali vers la Côte d’Ivoire; du recrutement de femmes maliennes en tant que domestiques en Guinée; et du trafic d’enfants maliens vers les pays de la région, dont des enfants maliens victimes de travail forcé au Gabon et des enfants maliens exploités économiquement par des marabouts qui les obligent à mendier au Sénégal;

c)Les informations reçues indiquant la présence dans l’État partie: i) de victimes de trafic originaires du Burkina Faso, du Nigéria et de l’Ouganda; ii) de femmes nigérianes forcées à la prostitution; iii) d’enfants du Burkina Faso et de Guinée travaillant dans les mines d’or artisanales, certains d’entre eux étant victimes de trafic, d’abus et d’exploitation sexuelle; et iv) d’enfants de Guinée, du Burkina Faso et du Niger forcés à mendier et exploités par des marabouts.

Le Comité recommande à l’ État partie:

a) De collecter systématique ment de s données ventilées par sexe, âge et origine en vue de mieux combattre le trafic et la traite des personnes;

b) D’intensifier les campagnes de prévention du tra fic et de la traite de travailleurs migrants, et de prendre des mesures appropriées contre la diffusion d’informations trompeuses concernant l’émigration et l’immigration;

c) De renforcer la formation à la lutte contre le trafic et la traite d’êtres humains des policiers et autres membres des forces de l’ordre , des gardes-frontières, des juges , des procureurs, des inspecteurs du travail , des enseignants , ainsi que du personnel des services de santé et des ambassades et consulats de l’État partie;

d ) De renforcer ses mécanismes pour enquêter sur les cas de traite des personnes et poursuivre et punir les trafiquants ;

e) De f ournir protection et assistance à toutes les victimes de la traite , en particulier en leur offrant des refuges et en lançant des projets visant à les aider à reconstruire leur vie ;

f ) De renforcer sa coopération internation ale, régionale et bilatérale afin de prévenir et combattre le trafic et la traite des personnes.

Le Comité est préoccupé par le grand nombre de Maliens qui décèdent lors de leurs tentatives d’immigration vers l’Europe, le nombre limité d’enquêtes effectuées dans les États de transit et de destination afin de traduire les responsables en justice, l’absence de mesures prises par ces États pour l’identification et le rapatriement des corps, et les actions limitées de l’État partie en faveur des familles des victimes.

Le Comité invite l’État partie:

a) À envisager de conclure des accords ou d’intervenir auprès des États de transit et de destination des travailleurs migrants maliens en vue:

i) D’assurer une migration sécurisée qui protège la vie et l’intégrité physique des travailleurs migrants maliens lors de leurs tentatives d’immigration, et notamment lors des migrations vers l’Europe;

ii) De recueillir des données sur le nombre de décès de Maliens lors de leurs tentatives d’immigration et les conditions dans lesquelles ces décès se sont produits;

b) À engager des actions appropriées pour que des enquêtes soient ouvertes dans les É tats de transit et de destination afin d’établir les responsabilités de ces décès et de traduire en justice les responsables et afin de faciliter l’identification et le rapatriement dans l’État partie des corps des Maliens décédés lors de leur tentative d’immigration;

c) À informer et collaborer avec les familles des Maliens décédés durant leur tentative d’immigration.

6.Suivi et diffusion

Suivi

Le Comité prie l’État partie de faire figurer dans son troisième rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures qu’il aura prises pour donner suite aux recommandations formulées dans les présentes observations finales. Il lui recommande de prendre toutes les dispositions appropriées pour que lesdites recommandations soient appliquées.

Le Comité prie l’État partie d’assurer une large participation de tous les ministères et organismes publics à l’élaboration du troisième rapport périodique et de consulter à cette occasion diverses organisations de défense des droits des travailleurs migrants et des droits de l’homme. Le Comité invite l’ É tat partie à demander , à cet égard, l’assistance technique d e la Division des droits de l’homme de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) .

Diffusion

Le Comité prie également l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales, notamment auprès des organismes publics, de l’Assemblée nationale, du pouvoir judiciaire, des autorités locales compétentes, des o rganisations non gouvernementales et des autres membres de la société civile, et de prendre des mesures pour les faire connaître aux travailleurs migrants maliens établis à l’étranger et aux travailleurs migrants étrangers en transit ou résidant dans l’État partie.

7.Prochain rapport périodique

Le Comité invite l’État partie à soumettre son troisième rapport périodique le 1 er mai 2019 au plus tard. À titre subsidiaire, l’État partie peut aussi tirer parti de la procédure simplifiée de présentation de rapports, selon laquelle le Comité élabore à l’intention de l’État partie une liste de points à traiter. Les réponses de l’État partie à cette liste constituent son rapport aux fins de l’article 73 de la Convention, ce qui le dispense de soumettre un rapport périodique traditionnel. Cette nouvelle procédure facultative a été adoptée par le Comité à sa quatorzième session, en avril 2011 (voir A/66/48 , par. 26).

Le Comité invite l’État partie à suivre les directives harmonisées concernant l’établissement des rapports destinés aux organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ( HRI/GEN/2/ Rev .6 ), notamment les directives portant sur le document de base commun et les rapports propres à chaque instrument. Le document propre à la Convention ne devrait pas dépasser 40 pages et le document de base commun mis à jour ne devrait pas dépasser 80 pages. À cet égard, l’ É tat partie est invité à demander l’assistance technique du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme .