* A doptées par le Comité à sa cinquante-neuvi ème session, tenue du 20 octobre au 7 novembre 2 014.

Observations finales concernant le septième rapport périodique de la Belgique *

Le Comité a examiné le septième rapport périodique de la Belgique (CEDAW/C/BEL/7) à ses 1257e et 1258e séances le 28 octobre 2014 (voir CEDAW/C/SR.1257 et 1258). La liste des questions du Comité a été publiée sous la cote CEDAW/C/BEL/Q/7 et les réponses de la Belgique l’ont été sous la cote CEDAW/C/BEL/Q/7/Add.1.

A.Introduction

Le Comité remercie l’État partie d’avoir présenté son septième rapport périodique. Il le remercie également de ses réponses écrites à la liste des questions soulevées par son groupe de travail d’avant-session, de l’exposé oral de la délégation belge et des précisions que celle-ci a apportées en réponse aux questions posées par les membres du Comité au cours des débats.

Le Comité sait gré à l’État partie du soin qu’il a mis à composer sa délégation, dirigée par M. Bertrand de Crombrugghe, Ambassadeur, Représentant permanent de la Belgique auprès de l’Office des Nations Unies à Genève. La délégation comprenait des représentants de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes, des services publics fédéraux de la justice, de l’intérieur et de l’emploi, du travail et de la concertation sociale, des institutions fédérées, et de la Mission permanente de la Belgique auprès de l’Office des Nations Unies et des autres institutions internationales sises à Genève.

B.Aspects positifs

Le Comité constate avec satisfaction les progrès accomplis en matière de réforme législative depuis qu’il a examiné en 2008 les cinquième et sixième rapports périodiques de l’État partie (CEDAW/C/BEL/6). Il relève notamment à cet égard :

a)L’adoption de la loi du 28 juillet 2011 sur la représentation des femmes dans les conseils d’administration des sociétés cotées et des entreprises publiques autonomes;

b)L’adoption de la loi du 8 mars 2012 visant à lutter contre l’écart salarial entre femmes et hommes;

c)L’adoption de l’arrêté royal du 2 juin 2012 promouvant la représentation des femmes dans les hautes fonctions du service public;

d)L’adoption de la loi du 8 mai 2014 modifiant le Code civil en vue d’instaurer l’égalité de l’homme et de la femme dans le mode de transmission du nom à l’enfant et à l’adopté;

e)L’adoption de la loi du 28 février 2014, de la loi du 28 mars 2014 et de l’arrêté royal du 10 avril 2014 relatifs à la prévention des risques psychosociaux au travail, y compris le harcèlement sexuel;

f)L’adoption de la loi du 22 mai 2014 visant à lutter contre le sexisme.

Le Comité relève également avec satisfaction l’adoption pour 2010-2014 d’un plan national d’action de lutte contre la violence entre partenaires et d’autres formes de violences intrafamiliales.

Le Comité se félicite de la ratification par l’État partie, depuis l’examen du rapport précédent, des instruments internationaux suivants :

a)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en 2011;

b)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, en 2009;

c)La Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, en 2009.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Parlement

Le Comité souligne le rôle crucial qui revient au pouvoir législatif pour garantir l’application intégrale de la Convention (voir la déclaration du Comité sur ses liens avec les parlementaires, adoptée lors de sa quarante-cinquième session, en 2010). Il invite le Parlement fédéral et les parlements des entités fédérées à prendre, conformément à leurs mandats respectifs, les mesures nécessaires pour donner suite aux présentes observations finales d’ici à la prochaine période à l’examen au titre de la Convention.

Cadre législatif

Le Comité constate qu’il existe une jurisprudence constante depuis l’arrêt de la Cour de cassation du 27 mai 1971 affirmant la prééminence des dispositions des traités internationaux qui produisent des effets directs dans l’ordre juridique interne sur les dispositions nationales. Il se déclare toutefois préoccupé par le fait que l’applicabilité directe des dispositions de la Convention est laissée à l’appréciation des tribunaux internes, ce qui ne garantit pas la pleine intégration des dispositions de fond de la Convention à l’ordre juridique de l’État partie.

Le Comité invite l ’ État partie à veiller à ce que toutes les dispositions de fond de la Convention soient pleinement intégr ées à son droit interne.

Mécanisme national de promotion de la femme

Le Comité salue le travail accompli par l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes, mais il note toutefois avec préoccupation que cet organe n’est pas habilité à coordonner la mise en œuvre des politiques fédérales de prise en compte de la problématique hommes-femmes prévues par la loi du 12 janvier 2007 sur la prise en compte systématique de la problématique hommes-femmes. Le Comité s’inquiète également de l’absence d’une stratégie globale pour la prise en compte de la problématique hommes-femmes. Il est préoccupé en outre par la lenteur et le caractère fragmenté de la mise en œuvre du « test gender », qui vise à évaluer l’impact des projets de textes législatifs et réglementaires sur la situation des femmes et des hommes.

Le Comité recommande à l ’ État partie, eu égard à la complexité de sa structure fédérale :

a) D ’ envisager d ’ adopter un plan d ’ action national pour la prise en compte systématique de la problématique hommes-femmes assorti d ’ un calendrier clair et d ’ objectifs mesurables afin de parvenir à l ’ application intégrale et uniforme de la loi de 2007 sur la prise en compte systématique de la problématique hommes-femmes;

b) D ’ envisager d ’ habiliter l ’ Institut pour l ’ égalité des femmes et des hommes à coordonner la mise en œuvre de la politique d ’ intégration de la pr oblématique hommes-femmes ;

c) De veiller à la mise en œuvre systématique du « test gender », qui vise à évaluer l ’ impact potentiel des projets de textes législatifs et réglementaires sur la situation des femmes et des hommes.

Institution nationale de défense des droits de l’homme

Le Comité est préoccupé par l’absence d’une institution nationale des droits de l’homme indépendante dotée d’un vaste mandat lui permettant de traiter tous les aspects des droits de l’homme, y compris les droits des femmes, conformément aux principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris), annexés à la résolution 48/134 de l’Assemblée générale.

Le Comité recommande à l ’ État partie de créer, dans des délais précis, une institution nationale des droits de l ’ homme indépendante conforme aux Principes de Paris dont le mandat prévoira expressément la promotion des droits des femmes et de l ’ égalité entre les sexes .

Mesures temporaires spéciales

Le Comité se félicite des mesures temporaires spéciales qui sont appliquées actuellement pour accroître la représentation des femmes au Parlement et dans les conseils d’administration des sociétés cotées et des entreprises publiques autonomes. Il demeure toutefois préoccupé par la persistance de la sous-représentation des femmes, en particulier des femmes appartenant à des communautés minoritaires, aux différents niveaux de la prise de décisions, dans la vie politique et publique comme dans le secteur privé. Il s’inquiète aussi de l’absence de mesures temporaires spéciales visant à corriger les inégalités dont sont victimes des groupes de femmes défavorisés, par exemple les femmes rurales, les femmes âgées, les femmes handicapées et les migrantes.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ évaluer l ’ application des mesures temporaires spéciales en vigueur et d ’ élaborer de nouvelles mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et à la recommandation générale n o 25 du Comité en la matière, considérées comme une stratégie nécessaire pour accélérer la réalisation de l ’ égalité de fait entre les femmes et les hommes, et en particulier renforcer les droits des femmes appartenant à des minorités, dans tous les domaines où les femmes sont sous-représentées ou défavorisées.

Stéréotypes et pratiques préjudiciables

Le Comité est préoccupé par le défaut d’application effective du plan national de lutte contre la violence entre partenaires et d’autres formes de violences intrafamiliales pour 2010-2014, notamment en ce qui concerne les mariages forcés, les violences commises au nom du prétendu honneur et les mutilations génitales féminines. Il s’inquiète également de l’application inefficace de la loi interdisant les mutilations génitales féminines, à laquelle s’ajoute la méconnaissance de cette loi par les communautés qui se livrent à cette pratique et les agents de santé.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intensifier ses efforts afin de garantir la stricte application de la loi interdisant les mutilations génitales féminines et de mettre en œuvre de manière effective le plan national de lutte contre la violence entre partenaires et d ’ autres formes de violences intrafamiliales pour 2010-2014 en vue d ’ éliminer les mutilations génitales féminines et autres pratiques préjudiciables, telles que les mariages forcés et les violences commises contre des femmes et des filles au nom du prétendu honneur. Rappelant la recommandation n° 31 du Comité pour l ’ élimination de la discrimination à l ’ égard des femmes/observation générale n° 18 du Comité des droits de l ’ enfant relative aux pratiques néfastes, le Comité recommande également à l ’ État partie de s ’ attacher davantage à informer les communautés dans l esquelles ces pratiques sont courantes ainsi que les agents de santé sur le caractère délictueux de sdites pratiques et le s atteintes aux droits des femmes et des filles qui en résultent .

Le Comité est préoccupé par le défaut d’informations sur les effets pour les femmes et les filles de l’interdiction du port du foulard imposée par les règles, règlements et statuts de plusieurs administrations locales, hôpitaux publics, écoles et entreprises privées dans différentes circonscriptions du territoire de l’État partie.

Le Comité recommande à l ’ État partie de surveiller et d ’ évaluer l ’ impact pour les femmes et les filles, notamment en matière d ’ accès à l ’ éducation et à l ’ emploi, de l ’ interdiction du port du foulard adoptée par plusieurs administrations locales, hôpitaux publics, écoles et entreprises privées, et de rassembler des informations sur le nombre de femmes et de filles qui ont été sanctionnées pour contravention à cette interdiction.

Violence à l’égard des femmes

Le Comité relève avec préoccupation ce qui suit :

a)Le plan national de lutte contre la violence entre partenaires et d’autres formes de violences intrafamiliales pour 2010-2014 ne fixe pas d’échéances précises ni d’objectifs mesurables et ne prend pas en considération les besoins spécifiques des migrantes victimes de violences conjugales;

b)Le nombre de refuges pour femmes victimes de violences est insuffisant et, souvent, les migrantes sans papiers n’y sont pas admises en raison de restrictions financières;

c)La loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers (loi sur les étrangers) ne prévoit pas l’octroi de titres de séjour temporaire aux femmes victimes de violences conjugales qui sont en situation irrégulière ou en attente d’une autorisation de séjour sur la base du regroupement familial. De plus, bien qu’il note que, d’après les indications de l’État partie, il est peu probable qu’une expulsion soit ordonnée dans les circonstances susmentionnées, et que les femmes peuvent demander des titres de séjour pour motifs humanitaires, le Comité craint que la peur de l’expulsion dissuade les victimes de dénoncer les violences conjugales qu’elles subissent.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D e faire figurer dans son plan national de lutte contre la violence entre partenaires et d ’ autres formes de violences intrafamiliales pour 2010-2014 des délais précis, des objectifs mesurables et des mesures visant à répondre aux besoins spécifiques des migrantes victimes de violences conjugales ;

b) D ’ accroître le nombre et la capacité d ’ accueil des refuges de l ’ État pour femmes victimes de violences et de veiller à ce que toutes les femmes, y compris les migrantes sans papiers, y aient accès sans discrimination ;

c) D ’ apporter des modifications à la loi sur les étrangers de sorte à accorder des titres de séjour temporaire aux migrantes victimes de violences conjugales qui sont en situation irrégulière ou en attente d ’ autorisations de séjour sur la base du regroupement familial et à ne pas exiger que, pour obtenir un titre de séjour propre, les migrantes bénéficiant d’une autorisation de séjour obtenue au titre du regroupement familial qui sont victimes de violences conjugales et souhaitent quitter leur conjoint apportent la preuve qu ’ elles occupent un emploi salarié, qu ’ elles exercent une activité professionnelle indépendante ou qu ’ elles ont des moyens de subsistance suffisants. L ’ État partie d evra prendre des mesures pour appeler l ’ attention des femmes migrantes sur l ’ existence des nouvelles dispositions de la loi dès qu ’ elle s auront été adoptées ;

d) De veiller à ce que toutes les migrantes puissent demander une protection contre les violences conjugales et de mettre fin aux procédures d ’ expulsion dans ces circonstances.

Le Comité se félicite de l’élaboration, en février 2014, d’un répertoire des bonnes pratiques à l’usage des policiers qui interviennent dans des affaires pouvant comporter des infractions sexuelles. Il est néanmoins préoccupé par les points suivants :

a)La qualification des violences sexuelles d’« infractions contre la moralité publique et contre l’ordre des familles », visées au titre VI du Code pénal;

b)Le défaut de données statistiques complètes sur la violence à l’égard des femmes, ventilées selon l’âge, l’appartenance ethnique, la nationalité et le lien éventuel entre la victime et l’auteur des faits, y compris sur le nombre de femmes tuées par leur partenaire ou ancien partenaire;

c)Le défaut de centres spécialisés de prise en charge des femmes victimes de violences sexuelles qui puissent fournir des soins médicaux et un accompagnement psychologique, procéder à des examens médicaux et médicolégaux immédiats en vue de recueillir des preuves et proposer une assistance juridique;

d)La sous-déclaration des viols et le nombre élevé de cas d’abandon des poursuites dans les affaires de viol et de violences conjugales, tenant en partie à un manque de confiance dans la police et à l’insuffisance des services d’accompagnement;

e)Le fait que le processus de ratification de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul), signée le 11 septembre 2012, reste inachevé.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De modifier son Code pénal afin de qualifier les violences sexuelles de crimes contre les personnes plutôt que d ’ infractions contre la moralité publique et l ’ ordre des familles ;

b) De recueillir des données statistiques sur toutes les formes de violence à l ’ égard des femmes, ventilées selon l ’ âge, l ’ appartenance ethnique, la nationalité et le lien éventuel entre la victime et l ’ auteur des faits ;

c) De créer des centres spécialisés (« guichets uniques ») à l ’ intention des victimes de violences sexuelles, où celles-ci pourront subir des examens médicaux et médicolégaux immédiats en vue du recueil de preuves, recevoir des soins médicaux, bénéficier d ’ un accompagnement psychologique, et obtenir des conseils juridiques pour le dépôt d ’ une plainte ;

d) D ’ étudier les raisons de la sous-déclaration des viols et du nombre élevé de cas d ’ abandon des charges dans les affaires de viol et de violences conjugales, afin de disposer de bases pour l ’ élaboration de politiques et de stratégies destinées à remédier au problème, y compris de politiques tendant à accroître la confiance des femmes victimes de violences dans la police et les autres institutions répressives;

e) D ’ accélérer la ratification de la Convention d ’ Istanbul.

Traite et exploitation de la prostitution

Le Comité constate avec préoccupation que les femmes soumises à la traite qui, après un délai de réflexion de 45 jours, ne déclarent pas qu’elles en ont été victimes et refusent ou ne sont pas à même de coopérer avec les autorités judiciaires ne se voient pas accorder d’autorisations de séjour temporaire. Il est également préoccupé par l’absence d’informations et de données approfondies sur la traite des femmes et des filles, le fait que le nombre de poursuites et de condamnations de trafiquants serait faible et les indications selon lesquelles les crédits consacrés à la lutte contre la traite des femmes et des enfants et à l’aide aux victimes seraient insuffisants.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ accorder des autorisations de séjour temporaire aux femmes et aux filles victimes de la traite qui ne peuvent pas ou ne veulent pas coopérer avec les autorités judiciaires et déposer plainte ;

b) D ’ intensifier ses efforts pour enquêter sur les affaires de traite et pour poursuivre et punir les trafiquants ;

c) De faire en sorte que des ressources humaines et financières suffisantes soient consacrées aux politiques et aux programmes de lutte contre la traite des personnes ;

d) De poursuivre ses efforts pour garantir l ’ accès effectif des victimes de la traite à des soins médicaux, à des services d ’ accompagnement psychologique, à une assistance juridique et à des programmes de réadaptation et de réinsertion ;

e) De consolider la coopération internationale, régionale et bilatérale avec les pays d ’ origine, de transit et de destination afin de prévenir la traite grâce à l ’ échange d ’ informations et à l ’ harmonisation des procédures judiciaires visant à poursuivre et punir les trafiquants.

Le Comité est préoccupé par :

a)Le défaut d’informations et de données complètes sur l’ampleur du phénomène de la prostitution dans l’État partie;

b)Le défaut de mesures visant à décourager le recours aux services de prostitution;

c)Le manque d’informations sur les mesures prises pour proposer d’autres moyens de gagner leur vie aux femmes qui souhaitent sortir de la prostitution.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De réaliser une étude sur l’ampleur du phénomène de la prostitution sur son territoire et de s’attaquer aux causes profondes de la prostitution des femmes et des filles, afin que celle s-ci ne soient plus vulnérables à l’exploitation sexuelle et à la traite;

b) De prendre des mesures visant à décourager le recours aux services de prostitution, notamment d ’ envisager d ’ ériger en infraction l ’ achat de services sexuels;

c) De venir en aide aux femmes et aux filles qui souhaitent sortir de la prostitution en leur proposant, entre autres mesures, d ’ autres moyens de gagner leur vie.

Participation à la vie politique et publique

Le Comité salue les progrès réalisés du point de vue de la représentation des femmes au sein des organes législatifs à tous les niveaux de l’État. Il demeure toutefois préoccupé par le déséquilibre existant dans la représentation des hommes et des femmes, en particulier des femmes appartenant aux minorités ethniques et religieuses, dans les postes pourvus par nomination au sein du Gouvernement fédéral et des gouvernements des entités fédérées. Le Comité est également préoccupé par le fait que les femmes demeurent sous-représentées au sein du corps diplomatique et dans les organisations internationales. Il s’inquiète également de ce que les mesures envisagées pour le secteur privé sont limitées et qu’il n’est pas prévu de les évaluer avant 2023, ce qui ne permettra pas d’apporter les mesures correctives qui pourraient s’avérer nécessaires.

Le Comité demande à l ’ État partie de prendre des mesures, notamment l’instauration de quotas, pour garantir l ’ égale représentation des hommes et des femmes, en particulier des femmes appartenant aux groupes ethniques et minoritaires, dans les postes pourvus par nomination dans le Gouvernement fédéral et des gouvernements des entités fédérées ainsi que dans le corps diplomatique et les organisations internationales. Le Comité recommande à l ’ État partie de renforcer les mécanismes qu ’ il a établi s pour le secteur privé, afin de mieux s ’ attaquer au problème de la sous-représentation des femmes dans tous les types d ’ entreprises.

Éducation

Le Comité prend note avec satisfaction du niveau élevé de rendement scolaire parmi les femmes et les filles dans l’État partie, mais il demeure préoccupé par :

a)Le fait que les femmes et les filles continuent de choisir des filières d’études traditionnellement féminines;

b)La persistance des stéréotypes sexistes dans certains manuels scolaires;

c)Le faible nombre d’enseignantes dans les établissements d’enseignement supérieur;

d)Le défaut d’informations permettant de déterminer si l’abandon scolaire, dont le taux est élevé chez les enfants issus de l’immigration, touche les filles nettement plus que les garçons.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De redoubler d ’ efforts pour élargir les choix de formations universitaires et d ’ orientations professionnelles offertes aux femmes et aux hommes et de prendre de nouvelles mesures pour encourager les femmes et les hommes à opter pour des filières d ’ études et des carrières non traditionnelles ;

b) De faire en sorte que les stéréotypes sexistes disparaissent des manuels scolaires, que les droits des femmes soient abordés dans les programmes scolaires, les programmes universitaires et la formation des enseignants, de manière à promouvoir l ’ égalité d es sexes, et que des cours consacrés à la problématique hommes-femmes soient donnés dans l’enseignement supérieur;

c) D ’ encourager les femmes à se porter candidates à des postes d ’ enseignant du supérieur et d ’ accélérer la nomination de femmes dans les établissements universitaires ;

d) De réaliser une étude sur l ’ ampleur et les causes profondes de l ’ abandon scolaire chez les filles issues de l ’ immigration, dont les conclusions servir ont de base à l ’ élaboration de mesures propres à favoriser leur persévérance scolaire.

Emploi

Le Comité relève avec satisfaction l’adoption, en 2012, d’une loi visant à lutter contre l’écart salarial et, en 2011, d’une loi relative à la représentation des femmes dans les conseils d’administration des sociétés cotées et des entreprises publiques autonomes. Il demeure toutefois préoccupé par :

a)La persistance des écarts de salaires entre les hommes et les femmes ainsi que par la ségrégation horizontale et verticale sur le marché du travail, où beaucoup de femmes occupent des emplois à temps partiel et moins bien rémunérés, ce qui nuit à leur carrière et à la constitution de leur pension de retraite;

b)Le fait qu’il ne soit prévu d’évaluer l’application de la loi sur la représentation des femmes dans les conseils d’administration des sociétés cotées et des entreprises publiques autonomes qu’en 2023 et qu’il ne soit pas envisagé de prendre des mesures temporaires spéciales semblables pour d’autres entreprises afin d’accroître la participation des femmes aux processus décisionnels;

c)Le grand nombre de plaintes pour discrimination fondée sur la grossesse et la maternité enregistrées par l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes;

d)Le faible nombre de plaintes pour harcèlement sexuel qui sont jugées fondées par les tribunaux du travail (14,3 %) et l’augmentation du nombre de plaintes pour harcèlement sexuel reçues par l’Institut entre 2009 et 2011;

e)L’absence d’étude sur la discrimination fondée sur le sexe dans le système de sécurité sociale.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De continuer de prendre des mesures spécifiques et énergiques en vue de mettre fin à la ségrégation professionnelle et de réduire les écarts de rémunération entre les sexes, notamment en veillant à la stricte application de la loi de 2012 visant à réduire l ’ écart salarial entre hommes et femmes ;

b) D ’ offrir aux femmes davantage de possibilités d ’ obtenir des emplois à temps plein ;

c) D ’ envisager de réaliser une première évaluation des effets de la loi de 2011 sur la représentation des femmes dans les conseils d ’ administration des sociétés cotées et des entreprises publiques autonomes dans les quatre années à venir , de procéder à des évaluations à intervalle s régulier s , et de faire figurer des renseignements sur les résultats de ces évaluations dans s es prochain s rapport s périodique s; et d’envisager de prendre des mesures temporaires spéciales en vue d ’ accroître la participation des femmes aux processus décision nels dans les entreprises qui ne sont pas visées par la loi de 2011 ;

d) De faire en sorte que les femmes aient un accès effectif à la justice en cas de discrimination fondée sur la grossesse et la maternité ou en cas de harcèlement sexuel ;

e) De faire une étude sur l ’ ampleur de la discrimination fondée sur le sexe dans le système de sécurité sociale.

Santé

Le Comité est vivement préoccupé par :

a)Le nombre particulièrement élevé de cas déclarés de stérilisation de femmes souffrant d’un handicap mental ou psychosocial;

b)Le taux élevé de cancers du sein dans l’État partie en comparaison des taux observés dans d’autres pays d’Europe.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De faire en sorte que, dans la pratique, les femmes souffrant d ’ un handicap mental ou psychosocial qui ont été privées de leur capacité juridique ou dont la capacité juridique est limitée ne subissent en aucune circonstance de stérilisation non consentie, et d ’ offrir à ces femmes l ’ appui nécessaire pour décider en connaissance de cause si elles consentent ou non à la stérilisation ;

b) De redoubler d ’ efforts pour sensibiliser les femmes à l ’ importance de se soumettre régulièrement à une mammographie de contrôle.

Groupes de femmes défavorisées

Le Comité est préoccupé par la persistance de la discrimination qui s’exerce à l’égard des femmes immigrées, y compris des formes de discrimination multiples et convergentes fondées sur le sexe et sur d’autres motifs comme l’origine ethnique ou la religion, tant dans la société en général qu’au sein de leurs communautés.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures en vue d ’ éliminer la discrimination à l ’ égard des femmes immigrées, y compris les formes de discrimination multiples et convergentes, tant dans la société en général qu ’ au sein de leurs communautés, et de promouvoir une image positive des femmes appartenant à des minorités ethniques ou religieuses.

Le Comité prend note avec préoccupation de la féminisation croissante de la population âgée ainsi que des multiples formes de discrimination auxquelles sont confrontées les femmes âgées.

Conformément à sa recommandation générale n° 27 sur les femmes âgées et la protection de leurs droits fondamentaux, le Comité recommande à l’État partie d’accorder une attention particulière à la situation précaire des femmes âgées, de prendre des mesures répondant à leur situation économique et affective et à leur état de santé pour leur éviter la pauvreté et l’isolement, et de garantir l’existence de centres spécialisés dans la prise en charge des besoins des femmes âgées, en particulier des femmes seules et de celles qui n’ont pas de soutien familial.

Le Comité est préoccupé par les formes de discrimination multiples et convergentes que subissent les femmes souffrant de handicap ainsi que par le taux élevé de violence à leur égard.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ intensifier l ’action qu’il a entreprise pour éliminer la discrimination et la violence à l ’ égard des femmes handicapées.

Le Comité salue l’établissement d’un cadre juridique et institutionnel permettant d’accorder le statut de réfugié aux personnes qui ont des craintes légitimes de faire l’objet de persécution fondée sur le sexe. Il s’inquiète toutefois que les filles demandeuses d’asile non accompagnées ne se voient pas toujours assigner des tuteurs de sexe féminin et que les femmes demandeuses d’asile ne soient pas systématiquement assistées d’avocats ou d’interprètes de sexe féminin.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ assigner des tuteurs de sexe féminin aux filles demandeuses d ’ asile non accompagnées et des avocats et interprètes de sexe féminin aux femmes qui demandent l ’ asile.

Le Comité s’inquiète du fait que, pour obtenir la reconnaissance de leur identité sexuelle, les femmes transgenres doivent suivre une procédure longue et contraignante et sont obligées de se soumettre à un examen psychiatrique et de subir une stérilisation ou une intervention chirurgicale.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ alléger la procédure que doivent suivre les femmes transgenres pour obtenir la reconnaissance de leur identité sexuelle, en accélérant cette procédure et en la rendant plus transparente et accessible;

b) De modifier les lois et pratiques en vigueur, en particulier la loi du 10 mai 2007 relative à la transsexualité, afin d ’ abolir l ’ obligation faite aux femmes transgenres qui souhaitent obtenir la reconnaissance de leur identité sexuelle de se soumettre à un examen psychiatrique et de subir une stérilisation et une intervention chirurgicale.

Collecte et analyse de données

Le Comité est préoccupé par l’insuffisance générale de données statistiques. Il relève que des données ventilées selon le sexe, l’âge, le secteur géographique et la situation socioéconomique sont nécessaires pour évaluer précisément la situation des femmes, déterminer si elles sont victimes de discrimination, élaborer des politiques ciblées en toute connaissance de cause et surveiller et évaluer les progrès de la réalisation de l’égalité réelle des femmes et des hommes dans tous les domaines visés par la Convention.

Le Comité demande à l ’ État partie d ’établir un système d ’ indicateurs de l ’ égalité des sexes afin d ’ améliorer la collecte de données ventilées selon le sexe et d ’ autres critères pertinents permettant d ’ évaluer l ’ impact et l ’ efficacité des règles et programmes ayant pour objet d’ intégrer le principe d e l’ égalité des sexes et de permettre aux femmes d ’ exercer plus pleinement leurs droits fondamentaux. À cet égard, le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur sa recommandation générale n o 9 sur les données statistiques concernant la situation des femmes.

Amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention

Le Comité encourage l ’ État partie à accepter dès que possible l ’ amendement au paragraphe 1 de l ’ article 20 de la Convention concernant le calendrier de réunions du Comité.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité demande à l ’ État partie de se prévaloir de la Déclaration et du Programme d ’ action de Beijing dans le cadre des mesures qu’il prend pour appliquer les dispositions de la Convention.

Objectifs du Millénaire pour le développement et cadre de développement pour l’après-2015

Le Comité invite à intégrer une démarche tenant compte de la problématique hommes-femmes, conformément aux dispositions de la Convention, dans tous les efforts déployés en vue de la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement et dans le cadre de développement pour l ’ après-2015.

Diffusion

Le Comité rappelle l ’ obligation qu ’ a l ’ État partie d ’ appliquer de façon systématique et suivie les dispositions de la Convention. Il demande instamment à l ’ État partie de s ’ attacher, à titre prioritaire, à donner suite aux présentes observations finales et recommandations d ’ ici à la soumission de son prochain rapport périodique. Il demande ainsi que les présentes observations finales soient communiquées sans tarder dans les langues officielles de l ’ État partie aux institutions publiques concernées à tous les niveaux (national, régional et local), notamment au Gouvernement, au Parlement fédéral et au x organes judiciaire s , afin qu’il y soit intégrale ment donné suite . Il encourage l ’ État partie à collaborer avec toutes les parties prenantes, dont les organisations patronales, les syndicats, les organisations de défense des droits de l ’ homme et les organisations féminines, les universités, les institutions de recherche et les médias. Il lui recommande de diffuser les présentes observations finales sous une forme appropriée dans les collectivités locales afin d ’ e n faciliter l’ application. Il demande également à l ’ État partie de continuer à diffuser auprès de toutes les parties prenantes la Convention, son Protocole facultatif et la jurisprudence pertinente, en plus des recommandations générales du Comité.

Ratification d’autres traités

Le Comité fait observer que l ’ adhésion de l ’ État partie à la totalité des neuf instruments internationaux principaux relatifs aux droits de l ’ homme permettrait aux femmes d ’ exercer plus pleinement leurs libertés individuelles et leurs droits fondamentaux dans tous les aspects de l eur vie. Par conséquent, le Comité encourage l ’ État partie à envisager de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille .

Suite à donner aux observations finales

Le Comité prie l ’ État partie de fournir par écrit, dans le courant des deux prochaines années, des informations sur les mesures prises par lui pour appliquer les recommandations figurant aux paragraphes 21 b) et c) et 25 a).

Élaboration du prochain rapport

Le Comité invite l ’ État partie à présenter son huitième rapport périodique en novembre 2018.

Il demande à l’État partie de suivre les directives harmonisées concernant l’établissement des rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’homme, notamment les directives concernant l’établissement de documents de base communs et de documents portant sur l’application de chaque instrument ( HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).