Quarante-quatrième session

20 juillet-7 août 2009

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes : Bhoutan

Le Comité a examiné le septième rapport périodique du Bhoutan (CEDAW/C/BTN/7) à ses 890e et 891e séances, le 23 juillet 2009 (voir CEDAW/C/SR/890 et CEDAW/C/SR/891). La liste des questions soulevées par le Comité figure dans le document CEDAW/C/BTN/Q/7 et les réponses du Bhoutan dans le document CEDAW/C/BTN/Q/7/Add.1.

Introduction

Le Comité félicite l’État partie de son septième rapport périodique, qui a été soumis dans les délais et est conforme aux directives générales précédentes pour l’établissement des rapports périodiques, ainsi que des consultations qu’il a tenues avec les différentes institutions étatiques, la société civile et les autres parties prenantes lors de l’élaboration du rapport. Il déplore toutefois que certaines sections du rapport ne contiennent pas suffisamment d’informations pertinentes, ce qui l’a gêné dans son évaluation de la situation spécifique des femmes dans certains domaines.

Le Comité félicite également l’État partie d’avoir présenté ses réponses par écrit aux questions du groupe de travail présession, ainsi que de son exposé oral et des éclaircissements donnés en réponse aux questions posées oralement.

Le Comité félicite le Bhoutan pour avoir envoyé une délégation de haut niveau, conduite par le Ministre des affaires étrangères et comprenant le Représentant permanent du pays auprès de l’Organisation des Nations Unies à New York, ainsi que des représentants de la Commission nationale pour les femmes et les enfants, de la Commission du bonheur national brut et du Fonds de développement pour les jeunes et il apprécie le dialogue constructif qui s’est instauré entre ses membres et ceux de la délégation.

Aspects positifs

Le Comité félicite l’État partie de son passage en 2008 à une monarchie constitutionnelle démocratique, qui constitue le fondement solide d’une démocratie viable et dynamique.

Le Comité accueille avec satisfaction le Plan d’action national pour la parité des sexes élaboré par la Commission nationale pour les femmes et les enfants, plan qui est le premier en son genre au Bhoutan, la mise en place d’un réseau des points focaux de la parité des sexes, y compris dans les forces armées, et l’inscription de la question de l’égalité des sexes comme thème de développement intersectoriel dans le dixième plan quinquennal de la Commission du bonheur national brut, où figure également un chapitre sur la participation des femmes au développement.

Le Comité félicite l’État partie d’avoir ratifié récemment les deux Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant. Il salue également l’évolution intervenue récemment dans le domaine législatif, notamment l’adoption de la première Constitution écrite de l’État partie.

Le Comité accueille favorablement la détermination de l’État partie exprimée au cours du dialogue interactif à appliquer pleinement la Convention et à améliorer davantage certains domaines ayant enregistré des progrès.

Principaux domaines de préoccupation et recommandations

Le Comité rappelle que l’État partie a l’obligation de s’assurer que toutes les dispositions de la Convention sont appliquées systématiquement et en permanence, et estime que, d’ici à la présentation de son prochain rapport, il doit en priorité accorder son attention aux préoccupations et aux recommandations formulées dans les présentes observations finales. En conséquence, le Comité engage l’État partie à centrer son attention sur les domaines en question dans ses activités de mise en œuvre et à rendre compte dans son prochain rapport périodique des mesures prises et des résultats obtenus. Il l’engage également à transmettre les présentes observations finales à tous les ministères concernés, aux autres structures gouvernementales à tous les niveaux et au Parlement, afin qu’elles soient appliquées effectivement.

Parlement

Tout en réaffirmant que la responsabilité de la mise en œuvre des obligations de l’État partie aux termes de la Convention incombe au premier chef au Gouvernement, qui est tenu d’en rendre compte, le Comité souligne que ses dispositions s’imposent à toutes les instances gouvernementales et invite l’État partie à encourager son gouvernement à faire le nécessaire, conformément à son mandat et aux procédures applicables, selon que de besoin, en vue de l’application des présentes observations finales et de l’élaboration du prochain rapport périodique.

Statut juridique de la Convention et définition de la discrimination

Tout en saluant l’adoption en 2008 de la première Constitution écrite, les efforts de l’État partie visant à incorporer les dispositions de la Convention dans la Constitution et l’indication par la délégation que la plupart des lois ont été harmonisées avec la Convention, le Comité est préoccupé que la Constitution ne contienne pas explicitement une disposition sur l’applicabilité des traités internationaux, notamment la Convention, et qu’elle ne précise pas que, en cas de conflit entre le droit national et la Convention, c’est la Convention qui prévaudra. Le Comité note que l’article 7 de la Constitution prévoit une égale protection devant la loi qui, comme la délégation l’a expliqué, devrait s’interpréter comme incluant l’égalité formelle et réelle entre hommes et femmes, et que l’article 9 contient des dispositions spécifiques tendant à sauvegarder les droits des femmes. Le Comité s’inquiète toutefois que les dispositions figurant aux articles 7 et 9 de la Constitution puissent être interprétées de façon très restrictive et déplore que la Constitution ne contienne pas une définition explicite détaillée de la discrimination à l’égard des femmes conformément à l’article 1 de la Convention, qui interdit la discrimination tant directe qu’indirecte.

Le Comité demande à l’État partie d’envisager de promulguer des lois nationales appropriées, contenant une interdiction de la discrimination à l’égard des femmes, tant directe qu’indirecte, conformément à l’article 1 et à l’alinéa b) de l’article 2 de la Convention, ainsi qu’au principe de l’égalité formelle et réelle entre hommes et femmes, conformément à l’alinéa a) de l’article 2 de la Convention. Le Comité demande en outre à l’État partie de disposer explicitement dans sa Constitution ou d’autres lois appropriées que les dispositions du droit international relatif aux droits de l’homme, en particulier la Convention, s’appliquent directement au niveau national et prévalent sur tout autre texte en cas de conflit.

Mécanisme national pour la promotion de la femme

Le Comité reconnaît : l’important travail accompli par la Commission nationale pour les femmes et les enfants ainsi que les changements institutionnels qu’elle a subis en 2008, notamment son élévation au rang d’organe autonome; la diversité de ses membres parmi lesquels figurent des représentants du Gouvernement, des médias, des ONG, du secteur privé et des forces armées afin de garantir que l’ensemble des secteurs de la société sont associés aux questions relatives aux femmes et aux enfants; ses nouvelles fonctions, qui englobent la réception de plaintes, l’examen des lois nationales et la formation; et la création de postes de point focal pour la parité des sexes. Le Comité s’inquiète de voir que la Commission nationale n’ait pas bénéficié de ressources suffisantes afin qu’elle puisse mener à bien ses nouvelles fonctions, que sa visibilité soit faible dans les zones rurales et les zones reculées et que son indépendance puisse être limitée par le fait qu’elle est présidée par un ministre. Le Comité est en outre préoccupé de constater que la Commission traite de questions relatives aussi bien aux femmes qu’aux enfants, ce qui renforce les stéréotypes concernant le rôle des femmes dans la société.

Le Comité recommande que l’État partie fournisse des ressources financières et humaines additionnelles à la Commission afin d’améliorer son efficacité et d’accroître sa capacité de coordonner et de contrôler les mesures liées aux droits des femmes et à l’égalité des sexes à tous les niveaux, ainsi que de recevoir des plaintes et de mener les enquêtes y relatives. Le Comité recommande en outre que le réseau des points focaux de la parité des sexes soit renforcé, en particulier en les plaçant aux niveaux régional et local, notamment dans les zones reculées et les zones rurales. Il recommande de surcroît d’envisager des moyens de renforcer l’autonomie, l’indépendance et l’obligation de rendre compte de la Commission, ainsi que de veiller à ce qu’il y ait une séparation claire et nette des fonctions de la Commission en ce qui concerne les femmes, d’une part, et les enfants, de l’autre.

Mesures temporaires spéciales

Tout en notant que l’État partie a indiqué qu’il envisagerait d’adopter et d’appliquer, le cas échéant, des mesures temporaires spéciales, le Comité est préoccupé que des mesures temporaires spéciales n’aient pas servi à accélérer l’égalité de fait entre les femmes et les hommes dans tous les domaines couverts par la Convention, en particulier eu égard à l’accès des femmes à l’enseignement secondaire et supérieur et à leur participation à la vie publique et politique. Le Comité est également préoccupé de constater que le concept de mesures temporaires spéciales, ainsi que la raison de leur application conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention, de même que les explications données à leur sujet dans la recommandation générale no 25 du Comité semblent mal compris dans l’État partie.

Le Comité encourage l’État partie à introduire des lois spécifiques prévoyant l’adoption et l’application de mesures temporaires spéciales conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à sa recommandation générale n o  25 afin d’accélérer la réalisation de l’égalité de fait des femmes avec les hommes dans tous les domaines où les femmes sont sous-représentées, ou dans les zones rurales et les zones reculées. Le Comité recommande que l’État partie fasse mieux comprendre par le public l’importance des mesures temporaires spéciales dans une réalisation accélérée de l’égalité des sexes.

Participation politique et participation à la vie publique

Tout en prenant dûment note du fait que, lors des dernières élections, 54,2 % des électeurs étaient des femmes, le Comité est préoccupé par le faible taux de représentation des femmes à tous les niveaux de la vie publique et politique, en particulier à un moment où la société subit une profonde mutation. Le Comité s’inquiète tout particulièrement du faible niveau de participation des femmes aux organes de prise de décisions, notamment le Parlement (13,88 %), le Gouvernement et la carrière diplomatique, ainsi qu’aux niveaux régional et local, et du fait que le taux de participation ait, dans certains cas, diminué ces dernières années.

Le Comité prie l’État partie de mettre en œuvre de toute urgence des politiques durables visant à ce que les femmes participent pleinement, activement et à égalité avec les hommes à la prise de décisions dans tous les domaines de la vie publique et politique. En particulier, il encourage l’État partie à revoir les critères requis pour accéder à certains postes lorsque ces critères deviennent des barrières ou des obstacles à l’accès des femmes à la prise de décisions. Il recommande également le recours à des mesures temporaires spéciales conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à ses propres recommandations générales n os  25 et 23. Il recommande en outre l’exécution d’activités de sensibilisation à l’importance de la participation des femmes aux postes de responsabilité au cours de la transition actuelle de la société tout entière, notamment dans les zones reculées et les zones rurales.

Violence à l’égard des femmes

Le Comité se félicite des diverses initiatives prises par le Gouvernement pour s’attaquer à la violence sexuelle, sexiste et familiale, notamment le fait de commander un rapport sur la violence à l’égard des femmes, la mise en place de postes de police mobiles la formation de la police aux questions de parité des sexes et les initiatives prises par la société civile telles que l’ouverture d’un centre de crise et de réadaptation à l’intention des femmes victimes de ces violences. Le Comité se félicite en outre que la délégation ait indiqué qu’un projet de loi sur la violence familiale serait déposé au Parlement en 2010. Il est toutefois préoccupé par le fait que des femmes aient été apparemment victimes de ces formes de violence dans le mariage, au sein de la famille et à leur lieu de travail, et que le rapport de l’État partie ait indiqué une faible prise de conscience parmi les femmes de leurs droits et qu’il y ait une culture du silence. Le Comité considère qu’il y a de nombreuses questions à traiter dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes, en particulier compte tenu du très petit nombre d’affaires portées devant les tribunaux concernant la violence sexuelle et d’autres formes de violence à l’égard des femmes. Il s’inquiète en outre que les filles employées domestiques puissent être particulièrement vulnérables à de telles formes de violence.

Le Comité exhorte l’État partie à veiller en priorité à l’élimination de toutes les formes de violence à l’égard des femmes, ainsi qu’à accroître l’accès des femmes victimes de ces violations à la justice, notamment dans les zones reculées et les zones rurales. Il encourage l’État partie à promulguer, de toute urgence, des lois, notamment sur la violence familiale. En vertu de telles lois, la violence à l’égard des femmes et des filles constituerait une infraction pénale et servirait de base à une procédure civile, les auteurs seraient poursuivis et punis en proportion de la gravité de l’infraction et les femmes et les filles, notamment dans les zones reculées et les zones rurales, qui sont victimes de cette violence auraient accès à des mesures de protection. Le Comité encourage l’acquisition d’une formation et de connaissances supplémentaires par les agents chargés de l’application des lois et les prestataires de soins de santé afin de veiller à ce qu’ils soient sensibilisés à toutes les formes de violence à l’égard des femmes. Il recommande également que l’État partie adopte des mesures en vue d’augmenter le nombre des femmes travaillant dans ce domaine, notamment dans les forces de police et les autres organes chargés de l’application des lois.

Traite des personnes

Rappelant la signature de la Convention de l’Association sud-asiatique de coopération régionale sur la prévention et l’élimination de la traite des femmes et des enfants aux fins de la prostitution et saluant les nouvelles mesures de lutte contre la traite, dont la formation spécialisée du personnel de maintien de l’ordre et l’introduction d’unités de police mobiles, le Comité note néanmoins avec inquiétude la progression de ce phénomène. Le Comité est en outre préoccupé par les définitions de la traite et de la prostitution qui figurent dans le Code pénal et qui peuvent différer des définitions internationales de ces termes, en particulier en ce qui concerne les femmes victimes de la traite à des fins d’exploitation sexuelle. En outre, le Comité regrette que le rapport de l’État partie soit silencieux sur cette question et s’inquiète du manque de protection envers les femmes exposées à ce danger et du caractère limité des services d’appui, d’accueil et d’assistance psychologique offerts aux victimes, ainsi que du très faible nombre d’affaires relatives à ces questions et à des questions connexes portées devant les tribunaux.

Le Comité prie instamment l’État partie d’intensifier ses efforts pour lutter contre toutes les formes de traite. Il encourage l’État partie à entreprendre des recherches en vue de déterminer l’ampleur du problème et à recueillir et à analyser les données sur la traite dont disposent la police et des sources internationales. De plus, le Comité invite l’État partie à aligner sa définition nationale de la prostitution et de la traite avec les normes internationales et lui recommande d’intensifier ses efforts pour fournir un appui aux filles et aux femmes exposées à ce danger, y compris en mettant en place des mécanismes d’accès à la justice en prévoyant d’autres moyens, pour elles, de gagner leur vie, ainsi qu’en dispensant un recyclage aux membres du parquet et de la police, y compris à la police des frontières, aux prestataires de services médicaux et aux travailleurs sociaux. Le Comité recommande en outre que des mesures et des accords bilatéraux soient envisagés avec les pays d’origine et les pays voisins.

Stéréotypes et pratiques culturelles

Tout en saluant les efforts réalisés par l’État partie pour lutter contre les stéréotypes et les pratiques culturelles nuisibles, dont la publication de directives éthiques à l’attention des médias, pour qu’ils présentent une image objective des femmes, le Comité demeure préoccupé par le fait que les femmes se heurtent encore à diverses formes de discrimination, aussi bien dans la famille que dans la vie publique, qui perpétuent les rôles et les responsabilités qui leur sont traditionnellement assignés.

Conformément à ses recommandations antérieures (A/59/38), le Comité engage l’État partie à analyser les traditions et vues stéréotypées existantes afin d’évaluer leur impact sur l’égalité des sexes. Il recommande que des politiques soient élaborées et des programmes mis en place à l’intention des femmes et des hommes en vue de mettre fin aux stéréotypes associés aux rôles traditionnels dans la famille, sur le lieu de travail et dans la société en général, et de prévenir l’émergence de nouveaux stéréotypes sources de discrimination à l’égard des femmes. Il recommande également d’encourager les médias à présenter une image positive des femmes ainsi que le statut d’égalité et les responsabilités égales des femmes et des hommes dans la vie publique et privée.

Éducation

Tout en prenant acte des progrès réalisés en matière d’inscription des filles dans l’enseignement primaire, et notamment du fait que 83 % des filles remplissant les conditions voulues suivent un enseignement primaire, des incidences des écoles primaires communautaires et de l’élargissement du programme d’éducation permanente, ainsi que des activités des ONG dans ce domaine, le Comité est préoccupé par le fait que l’écart entre les sexes se creuse et que les taux d’abandon scolaire sont plus élevés chez les filles dans l’enseignement secondaire et supérieur. Le Comité est également préoccupé par l’accès limité à l’école des filles qui vivent dans les zones rurales et éloignées, faute d’enseignants qualifiés, de moyens de transport sûrs et d’une infrastructure scolaire adaptée. Le Comité s’inquiète en outre du taux élevé d’analphabétisme chez les filles et les femmes. Tout en prenant acte du fait que les manuels scolaires ont été révisés pour résoudre le problème posé par les comportements sexistes, le Comité demeure préoccupé par les attitudes traditionnelles existant dans certaines régions du pays, qui peuvent contribuer au faible niveau d’instruction des femmes et des filles.

Le Comité invite instamment l’État partie à adopter et à appliquer des mesures ciblées en vue d’assurer l’accès égal des filles et des femmes à tous les niveaux de l’enseignement. Plus spécifiquement, le Comité recommande que l’État partie envisage la possibilité de fournir des incitations aux filles et à leur famille, pour les encourager à rester à l’école. L’État partie devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour accroître le nombre des enseignants qualifiés, mettre en place une infrastructure pédagogique adéquate, y compris dans les zones rurales éloignées ainsi que des moyens de transport adéquats. Le Comité prie également instamment l’État partie d’agir, pour résoudre le problème posé par l’analphabétisme des filles et des femmes, notamment en mettant en place un enseignement extrascolaire et en poursuivant et en intensifiant les programmes d’enseignement des adultes. En outre, le Comité invite instamment l’État partie à prendre les mesures nécessaires pour engager les filles enceintes et les filles mariées à poursuivre leur éducation.

Santé

Tout en notant la gratuité des soins de santé traditionnels et modernes et le fait que le Gouvernement a l’intention de continuer à affecter les ressources nécessaires à ce secteur, ainsi que les importants progrès réalisés sur les plans qualificatif et quantitatif dans certains domaines des soins de santé maternelle et de la santé procréative, le Comité est préoccupé par l’absence d’informations quant à l’état de santé général des femmes, y compris de renseignements spécifiques sur les taux de morbidité et de mortalité et sur le dépistage précoce du cancer du sein, des ovaires et de l’utérus chez la femme. S’agissant de la santé procréative, compte dûment tenu des progrès réalisés en matière d’accès à la contraception, le Comité est préoccupé par l’absence d’informations concernant la fréquence des consultations médicales à l’intention des femmes enceintes et les mesures de planification familiale et d’éducation sexuelle à l’intention des jeunes filles et des adolescentes et par les incidences que cela peut avoir sur les grossesses des adolescentes. Le Comité note également avec inquiétude l’accès limité aux soins et aux conseils médicaux confidentiels dans ce domaine et constate qu’en dépit des efforts visant à améliorer l’accès aux soins médicaux d’urgence et en matière de santé procréative dans les zones rurales et éloignées, les services demeurent limités. En outre, le Comité est extrêmement préoccupé par la prévalence du VIH/sida chez les femmes de moins de 25 ans.

Le Comité recommande que l’État partie continue à prendre des mesures pour améliorer l’accès des femmes aux soins de santé en général et aux soins de santé procréative, ces services devant concerner toutes les femmes, y compris les femmes âgées et les femmes vivant dans des zones rurales et éloignées. Le Comité prie l’État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des renseignements concernant l’existence d’une politique globale de la santé à l’intention des femmes, portant notamment sur les moyens de dépistage du cancer. Il prie instamment l’État partie de ne ménager aucun effort pour accroître l’accès des femmes à des soins de santé et à une assistance médicale confidentielle dispensée par du personnel formé, en particulier dans les zones rurales et éloignées, en dépit des problèmes liés à la topographie. Il recommande en outre de promouvoir largement une éducation concernant la planification familiale et la santé procréative, y compris dans les zones éloignées, à l’intention aussi bien des filles que des garçons, une attention particulière étant accordée à la prévention des grossesses précoces et au contrôle des maladies sexuellement transmissibles. Le Comité invite l’État partie à entreprendre des recherches approfondies pour déterminer les facteurs de la féminisation du VIH/sida, afin de concevoir des stratégies propres à réduire la vulnérabilité des femmes à cette maladie.

Emploi

Tout en se félicitant de l’adoption de la loi sur le travail et l’emploi, le Comité demeure préoccupé par le taux élevé des cas signalés de harcèlement sexuel sur le lieu de travail. En outre, le Comité s’inquiète du nombre très élevé des travailleurs étrangers et migrants ne pouvant pas exercer leurs droits fondamentaux ni bénéficier de la protection minimale, y compris l’accès aux soins de santé de base. Il s’inquiète également de la féminisation de la pauvreté, en particulier dans les zones rurales, et du manque de données sur la pauvreté.

Le Comité recommande que l’État partie prenne des mesures efficaces en vue de garantir aux femmes victimes du harcèlement sexuel un accès à des recours, y compris à la justice. Il recommande également que les droits fondamentaux de tous les travailleurs migrants, y compris les femmes, soient pris en compte, y compris leur droit à des soins de santé de base. Il recommande en outre la création, à l’intention des femmes rurales, d’emplois adéquats rémunérés par d es salaires décents, ainsi que la mise en place d’un large éventail de services de soutien à l’intention des femmes travaill ant dans le secteur informel et l’ouverture de l’accès à des services de commercialisation. Le Comité demande de surcroît à l’État partie de fournir des prestations sociales aux travailleurs à domicile et de présenter dans son prochain rapport des données ventilées par sexe sur la pauvreté.

Le Comité est préoccupé par la persistance du travail des enfants, en particulier par la situation des petites filles employées de maison, qui viennent essentiellement de zones rurales et éloignées, ont une longue journée de travail, n’ont pas accès à l’éducation et peuvent être victimes de la violence.

Le Comité prie instamment l’État partie de redoubler d’efforts pour éliminer les abus en matière de travail des enfants employés de maison et faire en sorte que les enfants, en particulier les filles, puissent accéder à l’éducation, aux soins de santé, à la protection sociale et bénéficient de la protection offerte par les normes internationales du travail élaborées par l’Organisation internationale du Travail. En outre, le Comité recommande que l’État partie mène une campagne de vulgarisation pour faire savoir à la population qu’il faut que les droits de tous les enfants soient respectés, y compris celui d’accéder à l’enseignement et aux soins médicaux.

Rapports familiaux

Le Comité constate avec préoccupation que la garde des enfants de moins de 9 ans est automatiquement accordée à la mère, ce qui renforce les stéréotypes sexistes, et que les enfants de plus de 9 ans ont le droit de choisir leur gardien. Le Comité est en outre préoccupé par le fait que le rapport ne contient pas suffisamment de renseignements sur les diverses pratiques et lois qui réglementent, entre autres, le mariage et sa dissolution, y compris l’héritage et les relations familiales. Tout en se félicitant de ce que l’âge légal du mariage soit de 18 ans pour les hommes et les femmes, le Comité s’inquiète de la persistance des mariages précoces illicites. Il demeure également préoccupé par le fait que la polygamie reste pratiquée dans certaines régions du pays.

Le Comité recommande que l’État partie harmonise ses dispositions relatives à la garde des enfants lors de la dissolution du mariage, conformément au paragraphe 1 d) de l’article 16 de la Convention qui souligne la nécessité de prendre en compte l’intérêt des enfants. En outre, le Comité demande que l’État partie communique dans son prochain rapport périodique des renseignements sur le mariage et sa dissolution, portant notamment sur l’héritage et les relations familiales, qui permettraient de mieux comprendre la situation en la matière. Le Comité invite également l’État partie à prendre des mesures efficaces, dont des mesures juridiques et des campagnes de vulgarisation, pour mettre fin à la pratique des mariages précoces illicites. Le Comité recommande que l’État partie intervienne pour mettre fin à la pratique de la polygamie, conformément à sa recommandation générale n o  21, sur l’égalité dans le mariage et les rapports familiaux.

Caractère discriminatoire du droit de la nationalité

Le Comité rappelle sa recommandation antérieure sur la situation des Népalaises de souche qui ont perdu leur nationalité bhoutanaise après la promulgation de la loi de 1958 sur la nationalité bhoutanaise et indique qu’il demeure préoccupé par les incidences de cette mesure sur l’acquisition, par les femmes, d’une nationalité par mariage, ainsi que sur la transmission de la nationalité aux enfants nés à l’étranger ainsi qu’aux enfants nés de père non bhoutanais, en particulier aux enfants de moins de 15 ans, dont les droits, notamment en matière d’éducation et d’accès aux soins de santé, risqueraient d’être limités.

Le Comité est encouragé par le fait que l’État partie est disposé à reprendre les pourparlers avec le Gouvernement népalais et lui recommande de résoudre tous les problèmes en suspens, notamment d’assurer un accès illimité aux services d’enseignement et de santé gratuits à tous les enfants de moins de 15 ans.

Protocole facultatif et modification du paragraphe 1 de l’article 20

Le Comité prend note de l’intention exprimée par l’État partie de ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et invite le Bhoutan à le faire dans les meilleurs délais et à accepter la modification du paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention, relatif à son nombre de jours de réunion.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité exhorte l’État partie à appliquer intégralement, dans l’exécution des obligations qui lui incombent au titre de la Convention, la Déclaration et le Programme d’action de Beijing, qui renforcent les dispositions de la Convention, et lui demande de faire figurer dans son prochain rapport périodique des éléments d’information sur la question.

Objectifs du Millénaire pour le développement

Le Comité souligne qu’une mise en œuvre intégrale et effective de la Convention est indispensable à la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement. Il prie l’État partie d’intégrer le souci de l’égalité des sexes et de prendre expressément en considération les dispositions de la Convention dans toute action visant la réalisation de ces objectifs et lui demande de lui communiquer des informations à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Ratification des traités

Le Comité note que l’adhésion des États aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme permet aux femmes de mieux jouir de leurs droits et libertés fondamentaux à tous égards. Il encourage donc le Gouvernement bhoutanais à ratifier les instruments auxquels il n’est pas encore partie, à savoir le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, la Convention relative aux droits des personnes handicapées et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Diffusion des observations finales

Le Comité prie le Bhoutan de diffuser largement les présentes observations finales afin de faire connaître aux responsables gouvernementaux et politiques, aux parlementaires et aux organisations de femmes et de défense des droits de l’homme les mesures qui ont été prises pour assurer l’égalité de jure et de facto des femmes et des hommes ainsi que les autres mesures qui sont nécessaires à cet égard. Il demande à l’État partie de continuer à diffuser, en particulier auprès des organisations de femmes et de défense des droits de l’homme, la Convention, son Protocole facultatif, les recommandations générales du Comité, la Déclaration et le Programme d’action de Beijing et les textes issus de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale intitulée « Les femmes en l’an 2000 : égalité des sexes, développement et paix pour le XXI e  siècle ».

Suite donnée aux observations finales

Le Comité prie l’État partie de fournir, dans un délai d’un an, des informations écrites sur les mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations figurant au paragraphe 18 sur la participation à la vie politique et publique et au paragraphe 20 sur la violence à l’égard des femmes. Le Comité prie également l’État partie d’envisager d’obtenir une coopération et une assistance techniques, dont des services consultatifs, selon que de besoin, pour appliquer les recommandations précitées.

Assistance technique

Le Comité recommande que l’État partie mette à profit l’assistance technique pour l’élaboration et la mise en œuvre d’un vaste programme visant à l’application des recommandations susmentionnées ainsi que des dispositions de la Convention tout entière. Il se déclare disposé à poursuivre le dialogue avec l’État partie, notamment par le biais d’une visite que ses membres effectueraient dans le pays afin de fournir des directives supplémentaires concernant l’application des recommandations susmentionnées et les obligations contractées par l’État partie en vertu de la Convention. Il demande également à l’État partie de renforcer davantage sa coopération avec les institutions spécialisées et les programmes des Nations Unies, notamment le Programme des Nations Unies pour le développement, le Fonds de développement des Nations Unies pour la femme, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance, le Fonds des Nations Unies pour la population, l’Organisation mondiale de la Santé, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et la Division de statistique ainsi que la Division de la promotion de la femme relevant du Département des affaires économiques et sociales du Secrétariat.

Date du prochain rapport

Le Comité prie l’État partie de donner suite aux préoccupations exprimées dans les présentes observations finales dans le prochain rapport périodique qu’il doit présenter au titre de l’article 18 de la Convention. Il l’invite à lui faire tenir ses huitième et neuvième rapports périodiques, qu’il doit soumettre, sous forme d’un rapport unique , le 30  septembre 2014.