Trente-cinquième session

15 mai-2 juin 2006

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes

Bosnie-Herzégovine

À ses 721e et 722e séances, le 16 mai 2006 (voir CEDAW/C/SR.721 et 722), le Comité a examiné le rapport unique valant rapport initial et deuxième et troisième rapports de la Bosnie-Herzégovine (CEDAW/C/BIH/1 à 3). La liste de questions posées par le Comité figure dans le document CEDAW/C/BIH/Q/3 et les réponses de la Bosnie-Herzégovine dans le document CEDAW/C/BIH/Q/3/Add.1.

Introduction

Le Comité félicite l’État partie d’avoir adhéré à la Convention sans réserve et le remercie d’avoir présenté son rapport valant rapport initial et deuxième et troisième rapports qui était instructif et suivait les directives du Comité pour la présentation des rapports mais regrette qu’il l’ait présenté en retard et qu’il n’ait pas précisé si les recommandations générales du Comité avaient été prises en compte. Il remercie également l’État partie pour les réponses fournies à la liste de questions posées par le groupe de travail présession du Comité, l’exposé oral qui a situé le rapport dans le contexte politique et administratif complexe du pays et les réponses aux questions que le Comité lui a posées oralement.

Le Comité félicite l’État partie d’avoir envoyé une délégation, présidée par le Directeur de l’Agence nationale chargée de la promotion de l’égalité des sexes. Il se réjouit qu’un dialogue franc et constructif se soit tenu entre la délégation et les membres du Comité.

Le Comité félicite l’État partie d’avoir ratifié le Protocole facultatif en septembre 2002.

Le Comité se réjouit que l’État partie ait consulté les organisations non gouvernementales de femmes pour élaborer le rapport et répondre aux questions posées.

Le Comité note avec satisfaction que l’État partie s’est intéressé aux 12 domaines d’intervention critiques de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing dans son projet de plan d’action national pour la promotion de l’égalité des sexes (2005), qui a été intégré dans le projet de plan d’action national pour la promotion de l’égalité des sexes qui sera présenté au Conseil des ministres en 2006.

Aspects positifs

Le Comité se félicite de la création, au niveau de l’État, de l’Agence nationale chargée de la promotion de l’égalité des sexes, mécanisme national pour la promotion de la femme, et de centres pour la promotion de l’égalité des sexes dans les deux entités (Fédération de Bosnie-Herzégovine et Republika Srpska). Il accueille avec satisfaction la création de mécanismes institutionnels visant à intégrer la promotion de l’égalité des sexes dans les pouvoirs exécutif et législatif aux niveaux des gouvernements de l’État et des entités et des administrations publiques cantonales et municipales.

Le Comité salue les mesures législatives et activités connexes que le Gouvernement a mises en place pour éliminer la discrimination à l’égard des femmes et promouvoir l’égalité des sexes. Il se félicite en particulier que la loi relative à l’égalité des sexes (2003), qui interdit toute discrimination directe et indirecte dans les sphères publique et privée dans tous les secteurs de la société, ait été promulguée en Bosnie-Herzégovine. Dans cet esprit, il accueille favorablement l’assistance fournie par l’État partie dans le cadre du projet du PNUD intitulé « Projet sur l’application de la loi relative à l’égalité des sexes et projet sous-régional pour l’égalité des sexes », qui vise à améliorer et à accélérer l’application de cette loi grâce à la création de groupes de travail chargés d’effectuer des analyses et de formuler des recommandations ayant une orientation pratique.

Le Comité se félicite des mesures prises récemment pour assurer la protection des femmes contre la violence, notamment la promulgation dans les deux entités de la loi relative à la protection contre la violence dans la famille. Il note avec satisfaction que de nouvelles procédures policières ont été établies dans le district de Brčko, que des points de contact ont été nommés dans les ministères de l’intérieur des cantons dans la Fédération de Bosnie-Herzégovine, qu’une permanence téléphonique a été établie en Republika Srpska pour aider les femmes victimes de la violence et que des stratégies et des mesures de lutte contre la traite des personnes ont été adoptées, dont la nomination d’un coordonnateur national chargé de lutter contre la traite des êtres humains et l’immigration clandestine et la constitution d’une équipe d’experts composée de représentants de plusieurs ministères et du Bureau du Procureur d’État.

Le Comité constate avec satisfaction qu’un certain nombre de projets et programmes de promotion de la femme ont été mis en œuvre, notamment l’analyse des stéréotypes sexuels dans les manuels scolaires, la sensibilisation à l’égalité des sexes dans les médias, les campagnes et autres activités visant à inciter les femmes roms à s’inscrire dans les registres d’État et la formation antisexiste de certains groupes de travail dans l’Unité de planification des politiques économiques chargée d’élaborer une stratégie de développement à moyen terme.

Principaux domaines d’intervention et recommandations

Conscient des difficultés auxquelles se heurte l’État partie en raison des retombées du conflit armé et des transformations politiques, économiques et sociales survenues pendant la période de reconstruction, le Comité s’inquiète du fait que pendant la période d’après-guerre, l’exercice effectif des droits fondamentaux des femmes a été entravé par plusieurs facteurs : l’absence d’analyse des conséquences du conflit armé en fonction du sexe, le manque de participation des femmes aux processus de paix, de reconstruction et de transformation ainsi que l’absence d’analyse par sexe de ces processus. Il trouve fâcheux que la création d’un cadre constitutionnel et la mise en place de structures politiques et administratives fondées sur l’ethnicité en tant que facteur déterminant aient contribué à limiter la reconnaissance et la mise en œuvre des principes d’égalité des sexes.

Le Comité exhorte l’État partie à s’acquitter des obligations qui lui incombent en vertu de la Convention pour éliminer sans tarder la discrimination à l’égard des femmes, faire participer les femmes au même titre que les hommes à tous les processus de transformation politique, économique et sociale aux niveaux de l’État, des entités, des cantons et des municipalités et veiller à ce que les analyses par sexe en soient une partie intégrante.

Bien que tous les traités internationaux relatifs aux droits de l’homme, dont la Convention, soient directement applicables dans l’État partie, le Comité est troublé par le fait que la Convention n’a pas encore été invoquée par les femmes dans les procédures internes ni appliquée par le pouvoir judiciaire.

Le Comité engage instamment l’État partie à assurer de fait la justiciabilité des droits énoncés dans la Convention dans toutes les instances nationales et autres mécanismes internes. Il le prie vivement de prendre les mesures complémentaires voulues pour diffuser des informations concernant la Convention et mettre en place, à l’intention des procureurs, juges, médiateurs et juristes, des programmes consacrés à l’application de la Convention et, en particulier, des notions de discrimination directe et indirecte et d’égalité. Il recommande en outre que des campagnes de sensibilisation et des formations juridiques s’adressant aux femmes et aux organisations non gouvernementales de femmes soient organisées durablement afin d’encourager les femmes et de leur donner les moyens de se prévaloir des procédures et remèdes à leur disposition en cas d’atteinte à leurs droits conformément à la Convention.

Le Comité déplore que l’adoption de la loi relative à l’égalité des sexes n’ait pas encore débouché sur l’éventuelle harmonisation de la législation en vigueur même si de nombreux amendements ont été formulés.

Le Comité recommande à l’État partie d’accélérer la procédure d’harmonisation législative afin de s’acquitter des obligations qui lui incombent en vertu de la loi relative à l’égalité des sexes (art. 30, par. 2) et des articles de la Convention et de mettre en place des procédures d’application effective de ces dispositions.

Tout en félicitant l’État partie d’avoir intégré dans l’article 18 de la loi relative à l’égalité des sexes l’obligation de collecter, d’enregistrer et d’analyser les données ventilées par sexe dans les organisations et institutions publiques et privées, le Comité reste préoccupé par le manque de données actualisées sur l’ensemble de la population et sur les femmes, en particulier, dans tout l’État partie et dans tous les domaines visés dans la Convention.

Le Comité demande à l’État partie de donner la priorité à la collecte de données et de faire figurer dans son prochain rapport des données statistiques détaillées ventilées par sexe afin de rendre compte pleinement de l’exercice effectif des droits fondamentaux des femmes. Il recommande également que les peines prévues en cas de non-respect de l’article 18 de la loi relative à l’égalité des sexes soient appliquées.

Tout en saluant l’action de l’Agence nationale chargée de la promotion de l’égalité des sexes créée récemment, le Comité s’inquiète du fait que ce mécanisme national, faute d’effectifs et de ressources, n’est pas en mesure d’exercer pleinement son vaste mandat tel qu’il est décrit dans la loi relative à l’égalité des sexes et que son appartenance à un ministère d’État entrave son efficacité à travailler avec d’autres ministères.

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer l’Agence nationale chargée de la promotion de l’égalité des sexes en lui accordant plus d’autorité par rapport aux ministères concernés et au Conseil des ministres quant à l’évaluation des dispositions législatives et réglementaires qu’elle mène dans un souci d’égalité des sexes et en lui consacrant des ressources humaines et financières complémentaires. Il lui recommande également de reconsidérer s’il convient que l’Agence relève du Ministère des droits de l’homme et des réfugiés et d’envisager d’en faire un organe relevant directement du Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine. Le Comité recommande en outre à l’État partie de continuer de sensibiliser les administrations publiques aux niveaux de l’État, des entités, des cantons et des municipalités à leur responsabilité collective vis-à-vis de l’application de la Convention et de renforcer leurs capacités dans ce domaine.

Tout en se félicitant que l’État partie ait élaboré un projet de plan d’action pour la promotion de l’égalité des sexes, qui intègre les dispositions du précédent projet de plan d’action national en la matière, fondées sur la Déclaration et le Plan d’action de Beijing, le Comité regrette que son adoption risque d’être retardée par les processus politiques et que sa mise en œuvre puisse être entravée par l’incompréhension des fonctionnaires dans les ministères concernés à tous les niveaux qui sont chargés de l’appliquer et par le manque de fonds.

Le Comité recommande de présenter rapidement le projet de plan d’action pour la promotion de l’égalité des sexes au Conseil des ministres et à l’Assemblée parlementaire afin qu’il puisse être adopté avant la prochaine élection en 2006. Il recommande également à l’État partie de prendre des mesures immédiates en vue de continuer à dispenser une formation sur l’égalité des sexes aux fonctionnaires à tous les niveaux et de financer l’application du plan en créant des rubriques budgétaires dans les ministères chargés de sa mise en œuvre et en incitant les donateurs internationaux à fournir des fonds.

Le Comité s’inquiète de la persistance de stéréotypes patriarcaux traditionnels profondément ancrés dans la société en ce qui concerne le rôle et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société en général, situation qu’illustrent les choix éducatifs des femmes, leur situation sur le marché du travail et leur faible participation à la vie politique et à la vie publique.

Le Comité exhorte l’État partie à diffuser des informations sur la Convention dans les programmes éducatifs, en particulier ceux qui portent sur les droits de l’homme et l’égalité des sexes, en vue de modifier les perceptions et les attitudes stéréotypées en ce qui concerne le rôle des femmes et des hommes. Il recommande de mener des campagnes de sensibilisation auprès des femmes et des hommes et d’inciter les médias à projeter une image positive des femmes et de l’égalité entre hommes et femmes ainsi que des responsabilités de chacun dans les sphères privée et publique.

Le Comité reconnaît que l’État partie a fait des efforts, notamment sur le plan législatif, pour lutter contre la violence à l’égard des femmes, mais il est préoccupé par le fait que les textes législatifs adoptés par les deux entités peuvent se prêter à des interprétations en sens opposé par les juges et qu’il peut y avoir des incompatibilités en ce qui concerne l’application des peines, vu que la Fédération de Bosnie-Herzégovine qualifie la violence familiale de crime, alors que la Republika Srpska la qualifie à la fois de crime et de délit. En outre, l’absence des décrets d’application et structures nécessaires ne facilite guère l’application de la loi. Le Comité est également préoccupé par l’absence de données statistiques concernant les cas de violence familiale à l’égard des femmes et par le fait que ces cas ne font toujours pas l’objet de dénonciation et sont considérés comme des affaires privées.

Le Comité demande à l’État partie d’harmoniser les lois des deux entités et d’accélérer l’élaboration et l’adoption de décrets d’application et la création des structures et institutions requises aux fins d’application. En outre, il recommande que des mesures concrètes soient prises pour renforcer les moyens des femmes et les mettre en mesure de dénoncer les cas de violence familiale, et de faire en sorte, grâce à des programmes de formation, que les fonctionnaires, en particulier les agents de la force publique, les magistrats, les prestataires de soins de santé, les travailleurs sanitaires et les enseignants soient pleinement au courant des dispositions légales applicables, soient sensibilisés à toutes les formes de violence à l’égard des femmes et possèdent les connaissances spécialisées requises pour y remédier. Le Comité encourage aussi l’État partie à recueillir des données sur les cas de violence familiale à l’égard des femmes et, sur cette base, à continuer de concevoir des stratégies durables pour lutter contre cette violation des droits fondamentaux.

Des mesures d’ordre législatif et d’autres mesures, notamment un plan d’action national, ont été adoptées en ce qui concerne le trafic de personnes et ont permis de réduire le nombre de cas, mais le Comité est préoccupé par le fait que le trafic de femmes demeure un problème dans l’État partie en tant que pays d’origine, de transit et de destination. Il ne laisse pas non plus d’être préoccupé par les nouvelles formes que prend ce trafic vers la Bosnie-Herzégovine, y compris par le biais de simulacres de mariages arrangés. Il est également préoccupé par le fait que les mesures actuelles de protection ne visent pas le trafic interne de femmes ressortissantes de la Bosnie-Herzégovine et le trafic de femmes à des fins autres que la prostitution.

Le Comité exhorte l’État partie à intensifier ses efforts pour lutter contre le trafic de femmes et de jeunes filles. Il recommande de renforcer les mesures visant à améliorer la situation économique des femmes ainsi que les actions de sensibilisation pour éviter qu’elles ne soient la proie de trafiquants, et de renforcer les mesures de soutien social, de réadaptation et de réinsertion des femmes et des jeunes filles qui ont été victimes d’un tel trafic. Le Comité recommande que la protection soit étendue également aux femmes de Bosnie-Herzégovine victimes d’un trafic interne et à celles d’entre elles qui ont été victimes d’un trafic à des fins autres que la prostitution. Il demande au Gouvernement de faire en sorte que les trafiquants soient punis avec une sévérité maximale et que les femmes et les jeunes filles bénéficient du soutien nécessaire afin de pouvoir déposer contre leurs trafiquants, en amont, au cours et en aval de l’instance. Il demande à l’État partie de présenter dans son prochain rapport des renseignements et des données exhaustives sur le trafic des femmes et des jeunes filles, ainsi qu’une analyse des nouvelles formes de trafic de femmes en Bosnie-Herzégovine et des mesures prises pour y remédier.

Le Comité note que la loi sur l’égalité entre les sexes en Bosnie-Herzégovine prévoit une représentation paritaire de ceux-ci dans le processus d’élaboration des décisions, mais il est préoccupé par le fait que cet aspect est absent de la loi électorale récemment modifiée et que l’introduction de listes ouvertes de candidats aux récentes élections a donné lieu à une baisse considérable de la proportion de femmes au Parlement de Bosnie-Herzégovine. Le Comité ne laisse pas non plus d’être préoccupé par la sous-représentation des femmes dans les organes pourvus par voie d’élection ou de désignation et par leur sous-représentation, en particulier aux postes élevés, dans l’administration et le pouvoir judiciaire, dans les organes chargés de l’administration et de la gestion des établissements d’enseignement, dans les entreprises publiques ou dans les associations de dirigeants d’entreprise, les organisations professionnelles et les partis politiques.

Le Comité exhorte l’État partie à harmoniser la loi électorale et la loi sur l’égalité entre les sexes et à appliquer et renforcer les mesures visant à augmenter la représentation des femmes dans les organes pourvus par voie d’élection ou de désignation et dans les postes de responsabilité de l’administration, du pouvoir judiciaire et des entreprises publiques par le biais, entre autres, de mesures spéciales temporaires, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à la recommandation générale 25. Le Comité encourage aussi l’État partie à sensibiliser les entreprises privées, les syndicats et les partis politiques à la nécessité de promouvoir des femmes à des postes de responsabilité.

Le Comité prend note du processus de réforme visant à harmoniser et moderniser la législation en matière d’enseignement et les programmes de cours à tous les niveaux de l’État partie, mais il demeure préoccupé par la discrimination existant dans ce domaine, spécialement par le phénomène d’abandon scolaire précoce observé chez les filles dans les zones rurales, spécialement les filles roms, et par la ségrégation sexuelle dans l’enseignement secondaire et dans l’enseignement supérieur, qui ne manque pas de retentir sur les perspectives professionnelles des femmes, ainsi que par le taux élevé d’analphabétisme qui prévaut chez les femmes âgées et également, et en particulier, chez les femmes et les fillettes roms.

Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre le processus de réforme afin de s’assurer que les deux sexes bénéficient dans les deux entités de la Bosnie-Herzégovine de perspectives comparables dans le domaine de l’enseignement, notamment dans les zones rurales, et dans les groupes marginalisés de femmes et de fillettes, en particulier celles de la minorité rom. Il recommande aussi que l’État partie encourage la diversification des choix éducationnels et professionnels des femmes et des hommes.

Le Comité est préoccupé par le niveau particulièrement faible de représentation des femmes sur le marché du travail, par le taux élevé de chômage frappant les femmes instruites et par la persistance des pratiques discriminatoires directes et indirectes dont les femmes sont victimes dans le secteur public et dans le secteur privé en ce qui concerne le recrutement, les promotions, les salaires, la protection de la maternité et les licenciements, et du harcèlement sexuel. Le Comité est préoccupé aussi par le fait qu’un grand nombre de femmes travaillent dans certains secteurs où elles sont moins bien rémunérées que ce n’est le cas dans les secteurs où les hommes prédominent et, d’une manière générale, exercent des emplois mal rémunérés, notamment dans le secteur informel et dans les petites entreprises agricoles, ce qui a des incidences négatives sur leur droit aux prestations de sécurité sociale et aux soins de santé.

Le Comité demande instamment à l’État partie d’appliquer les dispositions pertinentes de la loi sur l’égalité entre les sexes et les recommandations pertinentes du décret d’application de ladite loi, et de traduire en justice les dirigeants d’entreprises publiques et privées qui contreviennent à l’égalité entre les sexes telle qu’elle est prévue dans la loi sur l’égalité entre les sexes et dans les règlements du travail. Il exhorte aussi l’État partie à redoubler d’efforts et de faire en sorte que tous les programmes de création d’emplois comportent une dimension sexospécifique et que les femmes bénéficient pleinement de tous les programmes visant à soutenir l’esprit d’entreprise, notamment par des conditions favorables en matière d’accès au crédit. Il recommande de redoubler d’efforts pour augmenter la représentation des femmes dans le secteur formel de l’économie et éliminer la ségrégation professionnelle, tant horizontale que verticale, réduire, puis combler l’écart salarial entre les femmes et les hommes dans le secteur public, et garantir aux femmes l’accès à la formation professionnelle.

Le Comité est préoccupé par l’état de santé des femmes et par leur accès limité aux services de soins de santé en général, et ceci vaut aussi pour les femmes au chômage, les femmes employées dans le secteur informel et les autres groupes vulnérables de femmes. Il est préoccupé par le fait que les règlements et les ressources financières ayant trait à l’accès aux soins de santé et à la fourniture de ceux-ci varient entre les deux entités et entre les cantons de la Fédération de Bosnie-Herzégovine, ce qui paraît, entre autres, contribuer au taux élevé de mortalité maternelle. Le Comité est préoccupé aussi par le manque de formation à la planification familiale et par la difficulté qu’il y a à se procurer des contraceptifs, ce qui entraîne un taux élevé d’avortements et de grossesses chez les adolescentes.

Le Comité invite instamment l’État partie à poursuivre ses efforts pour harmoniser et améliorer la réglementation et la prestation des soins de santé et à intégrer une dimension sexospécifique dans toutes les réformes du secteur de la santé, afin que toutes les femmes sur toute l’étendue du territoire aient un accès égal à des services de soins de santé appropriés et adaptés et, en particulier, que les taux de mortalité maternelle puissent être réduits. Il recommande aussi d’adopter des mesures garantissant aux femmes et aux jeunes filles un accès effectif à l’information et aux services en matière de santé génésique et d’hygiène sexuelle, afin de prévenir le recours à l’avortement et de préserver les femmes des incidences négatives que celui-ci a sur leur état de santé. Il recommande également l’adoption de programmes et politiques visant à mieux faire connaître les méthodes contraceptives et à faciliter l’accès à celles-ci, étant entendu que la planification familiale doit être une responsabilité partagée des deux partenaires.

Le Comité est préoccupé par le sort des victimes de la violence sexuelle durant le conflit armé de 1992-1995, la plupart de ces victimes étant des femmes et ayant souvent souffert de l’inconvénient supplémentaire d’être des chefs de famille et des personnes déplacées. Il est préoccupé par le fait qu’elles-mêmes et leurs souffrances ne sont pas suffisamment reconnues dans la législation applicable aux victimes civiles de la guerre dans chacune des entités. Il est également préoccupé par l’absence de stratégies cohérentes et de soutien à ces femmes, qui n’ont guère accès, voire aucun accès du tout à l’assurance maladie, ni aux prestations en espèces ni encore aux services généraux ou spécialisés de soins de santé pour ce qui est des traumatismes qu’elles ont vécus. Il est préoccupé aussi par la menace d’expulsion de leur logement qui pèse dans la Fédération de Bosnie-Herzégovine sur des femmes qui sont des victimes civiles de la violence sexuelle et des personnes déplacées dans leur propre pays.

Le Comité engage vivement l’État partie à reconnaître expressément et à protéger comme il se doit les femmes qui ont été des victimes civiles de la violence sexuelle durant le conflit armé, par le biais de la législation et l’octroi de ressources financières permettant de leur assurer une couverture sociale, notamment l’assurance maladie et le logement, en sorte que leurs droits soient garantis sur l’ensemble du territoire de l’État partie à un niveau comparable à celui des victimes militaires de la guerre. Il demande instamment à l’État partie de revoir sa réglementation et ses plans en matière de logement pour les femmes qui sont des victimes civiles de la guerre ou des personnes déplacées, afin de leur épargner des formes supplémentaires de discrimination indirecte.

Le Comité prend acte des efforts déployés par l’Office pour l’égalité entre les sexes en vue d’intégrer une dimension sexospécifique dans le document intérimaire sur la stratégie de développement pour la réduction de la pauvreté, mais il ne laisse pas d’être préoccupé par l’existence de catégories de femmes, surtout les femmes chefs de famille monoparentale, les femmes âgées, les femmes déplacées, les femmes rapatriées, les femmes handicapées et les femmes appartenant à des minorités, notamment la minorité rom, qui ont à souffrir tout particulièrement de la pauvreté.

Le Comité demande à l’État partie de s’assurer que tous les programmes nationaux de réduction de la pauvreté conçus par le biais du document intérimaire sur la stratégie de développement pour la réduction de la pauvreté et appliqués par les ministères compétents bénéficient pleinement aux femmes et, en particulier, aux groupes de femmes marginalisées, selon leurs besoins et leur situation, et de fournir dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les résultats des mesures ainsi adoptées.

Le Comité encourage l’État partie à adopter sans retard la modification qu’il est proposé d’apporter au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention, en ce qui concerne la durée de la session annuelle du Comité.

Le Comité souligne que la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement passe par l’application effective de toutes les dispositions de la Convention. Il demande que tous les efforts déployés pour réaliser les objectifs comportent une perspective sexospécifique et s’inspirent explicitement des dispositions de la Convention et prie l’État partie de fournir des renseignements à cet égard dans son prochain rapport périodique.

Le Comité tient à féliciter l’État partie d’avoir ratifié les sept principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Il note que l’adhésion de l’État partie à ces instruments renforce la possibilité pour les femmes de jouir de leurs libertés et droits fondamentaux sous tous les rapports.

Le Comité demande que les présentes observations finales fassent l’objet d’une vaste diffusion en Bosnie-Herzégovine afin de porter à la connaissance de la population, y compris les hauts responsables, les hommes politiques, les parlementaires, les organisations de femmes et les organisations de défense des droits de l’homme, les mesures qui ont été prises pour assurer l’égalité de droit et de fait des femmes, ainsi que les prochaines mesures qui s’imposeront à cet égard. Il demande aussi que les présentes observations finales soient transmises au Haut Représentant pour la Bosnie-Herzégovine. Il invite l’État partie à poursuivre ses efforts de diffusion, en particulier en direction des organisations de femmes et des organisations de défense des droits de l’homme, en ce qui concerne la Convention, son Protocole facultatif, les recommandations générales du Comité, la Déclaration et le Plan d’action de Beijing et les conclusions de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale, intitulée « Les femmes en l’an 2000  : égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXI e siècle ».

Le Comité demande à l’État partie de répondre dans son prochain rapport périodique, conformément à l’article 18 de la Convention, aux préoccupations exprimées dans les présentes observations finales. Il l’invite à présenter son quatrième rapport périodique, qui doit être présenté en octobre 2006, et son cinquième rapport périodique, qui doit être présenté en octobre 2010, sous la forme d’un rapport unique en 2010.