NATIONS UNIES

CCPR

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr.GÉNÉRALE

CCPR/C/SR.239031 juillet 2006

Original: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME

Quatre-vingt-septième session

Compte rendu analytique de la 2390e sÉance

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mardi 25 juillet 2006, à 10 heures

Présidente: Mme CHANET

SOMMAIRE

OBSERVATIONS GÉNÉRALES DU COMITÉ (suite)

ORGANISATION DES TRAVAUX ET QUESTIONS DIVERSES (suite)

Réunion du groupe de travail sur les réserves établi par la quatrième réunion intercomités et la dix-septième réunion des présidents des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (suite)

La séance est ouverte à 10 h 15 .

OBSERVATIONS GÉNÉRALES DU COMITÉ (point 8 de l’ordre du jour) (suite) (CCPR/C/GC/32/CRP.1/Rev.1)

1.La PRÉSIDENTE invite les membres du Comité à reprendre les discussions sur le projet d’observation générale n° 32 (CCPR/C/GC/32/CRP.1/Rev.1).

Paragraphe 34

2.M. KÄLIN, s’exprimant en qualité de rapporteur sur le projet d’observation générale n° 32 concernant l’article 14 du Pacte, indique que le paragraphe 34 est basé sur la décision du Comité dans l’affaire Carlos Correia de Matus c. Portugal (CCPR/C/86/D/1123/2002).

3.Sir Nigel RODLEY fait observer que cette décision n’a pas fait l’objet de l’unanimité et est contraire à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Il pourrait s’avérer peu judicieux de refléter une décision aussi controversée dans une observation générale.

4.Mme PALM, appuyant l’observation de Sir Nigel, dit qu’il pourrait s’indiquer de reformuler le paragraphe afin d’éviter qu’il y ait des divergences manifestes par rapport à la position d’un autre organe international de défense des droits de l’homme.

5.La PRÉSIDENTE suggère de remplacer la proposition «n’est donc pas compatible avec le Pacte» de la dernière phrase, par «pose certains problèmes eu égard au Pacte», suivi par une référence à la jurisprudence pertinente.

6.M. KÄLIN remarque que la décision du Comité n’entre pas en contradiction avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme en général; la divergence se manifeste eu égard à l’affaire Carlos Correia de Matus c. Portugal uniquement. Éviter de faire référence à des décisions qui peuvent s’écarter des positions d’autres organes internationaux est susceptible de saper l’autorité du Comité. Cela étant, dans un esprit de consensus, il propose de modifier la dernière phrase, qui se lirait ainsi: «Par conséquent, la législation interne devrait éviter d’exclure purement et simplement toute possibilité quelle qu’elle soit d’assurer sa propre défense dans une procédure pénale, sans l’assistance d’un conseil».

7. Le paragraphe 34, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 35

8.La PRÉSIDENTE, appuyée par M. LALLAH, suggère de remplacer les mots «tels que» de l’avant dernière phrase, par «par exemple». Les exemples relevés sont basés sur les décisions du Comité dans des affaires pertinentes de la common law. Il importe de prendre en considération le fait que la faute ou l’incompétence de la part du conseil de la défense peuvent revêtir différentes formes selon les juridictions du droit civil. Il conviendrait d’ajouter une référence pertinente.

9.M. AMOR dit que la formulation actuelle de l’avant-dernière phrase manque de clarté. Il pourrait s’indiquer de consacrer une phrase par sujet évoqué, à savoir: le devoir du conseil de la défense de défendre l’accusé; l’obligation pour le juge de veiller à ce que le comportement de l’avocat serve les intérêts de la justice; et la responsabilité de l’État en cas d’infraction aux dispositions de l’article 14.

10.M. RIVAS POSADA attire l’attention sur certaines inconsistances entre les versions anglaise et espagnole du paragraphe 35; il conviendrait d’apporter les corrections nécessaires.

11. Le paragraphe 35 est adopté, compte tenu des modifications éditoriales requises.

Paragraphe 36

12.M. ANDO suggère que, comme dans le paragraphe 29, le mot «émanation» de la deuxième phrase soit remplacé par «application».

13.M. AMOR propose que, dans l’avant-dernière phrase de la version française, le mot «quelconque» soit inséré avant «stade».

14.M. SOLARI YRIGOYEN dit que la deuxième phrase de la version espagnole devrait être reformulée dans un souci de clarté.

15. Le paragraphe 36 est adopté, compte tenu des modifications éditoriales requises.

Paragraphe 37

16.M. RIVAS POSADA dit qu’il ne saisit pas précisément la signification de la deuxième phrase.

17.M. KÄLIN dit que certains États parties peuvent mettre en question la nécessité de l’assistance d’un interprète lorsque la procédure devrait déboucher sur un acquittement, ou si la culpabilité du défendeur a été établie sans équivoque avant l’audition. C’est pourquoi il importe de préciser que le droit prévu à l’alinéa fdu paragraphe 3 de l’article 14 doit être protégé indépendamment de l’aboutissement de la procédure.

18.Il suggère de modifier la dernière phrase, qui se lirait comme suit: «n’a pas le droit de se faire assister gratuitement d’un interprète s’il connaît suffisamment bien la langue officielle pour se défendre efficacement», de manière à éviter une interprétation erronée du mot «adéquatement».

19.La PRÉSIDENTE observe que l’une des questions clefs en relation avec le droit à se faire assister gratuitement d’un interprète est le moment à partir duquel ce droit peut être exercé. L’on pourrait interpréter la disposition du Pacte comme ne garantissant ce droit qu’à partir du moment où les motifs de l’accusation sont communiqués. Néanmoins, dans certaines situations, l’assistance d’un interprète peut être requise dès l’arrestation; c’est pourquoi elle suggère d’inclure une référence pertinente.

20.M. AMOR marque son accord. Par ailleurs, il arrive que des défendeurs refusent par principe de parler la langue officielle utilisée au cours de la procédure. Certains États parties accordent néanmoins aux défendeurs concernés le bénéfice de l’assistance d’un interprète en dépit de leur maîtrise parfaite de la langue utilisée au cours de la procédure. Cette possibilité ne peut être exclue. C’est pourquoi il propose d’insérer, dans la dernière phrase, les mots «en principe» entre «n’a» et «pas le droit».

21.M. ANDO suggère que la première phrase fasse référence aux principes d’équité et d’égalité des armes dans les procédures pénales.

22.M. SHEARER indique que l’octroi de facilités linguistiques à l’accusé avant le procès est déjà traité au paragraphe 28.

23.La PRÉSIDENTE suggère que, dans la mesure il n’est pas fait mention de l’assistance d’un interprète au paragraphe 28, ce dernier pourrait comprendre une référence au paragraphe 37.

24.M. KÄLIN propose que, dans la première phrase, les termes «principe d’égalité des armes» soient remplacés par «principes d’équité et d’égalité des armes». Pour préciser quand l’assistance d’un interprète s’indique, la deuxième phrase devrait se lire comme suit: «Ce droit existe à tous les stades de la procédure et indépendamment de leur aboutissement». La dernière phrase devrait être modifiée et se présenter comme suit: «Toutefois, un accusé dont la langue maternelle n’est pas la même que la langue officielle du tribunal n’a, en principe, pas le droit de se faire assister gratuitement d’un interprète s’il connaît suffisamment bien la langue utilisée devant le tribunal pour se défendre efficacement.»

25.M. SHEARER suggère une formulation alternative de la première partie de la deuxième phrase: «Ce droit existe à tous les stades de la procédure et indépendamment de leurs visées». La proposition «indépendamment de leurs visées» est nécessaire pour indiquer que, quoi qu’il se passe pendant les audiences, l’accusé a le droit de comprendre. La proposition «indépendamment de leur aboutissement» ne devrait pas être retenue dans la mesure où il va de soi que le défendeur a le droit de comprendre le procès.

26.La PRÉSIDENTE s’interroge sur la nécessité d’introduire la proposition «indépendamment de leurs visées».

27.M. KÄLIN propose la formulation suivante: «Ce droit existe à tous les stades de la procédure orale et s’applique aux étrangers comme aux ressortissants nationaux.»

28. Le paragraphe 37, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 38

29.M. SOLARI YRIGOYEN fait remarquer que, dans la dernière phrase de la version espagnole, la forme correcte du verbe devrait être «establecerse».

30.M. WIERUSZEWSKI demande que la note de bas de base relative à la dernière phrase comprenne des exemples extraits de la jurisprudence de régions diverses, notamment d’États russophones.

31.M. GLÈLÈ AHANHANZO propose que la dernière phrase commence par les mots «La législation devrait disposer» et non «requiert».

32. Le paragraphe 38, ainsi modifié, est adopté compte tenu des modifications éditoriales requises.

La réunion est suspendue à 11 h 10; elle est reprise à 11 h 40.

ORGANISATION DES TRAVAUX ET QUESTIONS DIVERSES (point 3 de l’ordre du jour) (suite)

Réunion du groupe de travail sur les réserves établi par la quatrième réunion intercomités et la dix-septième réunion des présidents des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (suite) (HRI/MC/2006/5)

33.Sir Nigel RODLEY, s’exprimant en qualité de Président-Rapporteur de la réunion du groupe de travail sur les réserves tenue les 8 et 9 juin 2006, rappelle que, lors de la précédente discussion du Comité sur le sujet, il avait été demandé un rapport du Rapporteur spécial de la troisième commission de l’Assemblée générale sur les réserves aux traités relatifs aux droits de l’homme. Il s’excuse de ne pas s’être rendu compte au moment même que M. Solari Yrigoyen se référait en réalité au rapport du Rapporteur spécial de la Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme (E/CN.4/Sub.2/1999/28). L’approche adoptée dans ce rapport était de permettre aux États parties de décider s’ils souhaitaient rester liés à un traité après invalidation d’une réserve. Les États peuvent donc simplement dénoncer le traité et choisir de le ratifier à nouveau ou non. Effectivement, le groupe de travail a discuté de ce rapport. Alors que la solution adoptée convient pour la plupart des traités, elle ne s’accorde pas avec le Pacte dans la mesure où, de l’avis du Comité, le Pacte ne peut être dénoncé. S’il peut être utile de se référer aux conclusions tirées dans ce rapport pour d’autres organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, cette position ne coïncide pas avec celle du Comité.

34.Si la notion de présomption qui figure dans la recommandation 7 peut être interprétée comme une faille éventuelle dans la position du Comité, comme l’exprime l’observation générale n° 24, l’intention n’était certes pas telle. L’idée est que l’État partie devrait identifier ses intentions de bonne foi. En cas d’invalidation d’une réserve, l’on présume que l’État partie préfère demeurer partie au traité sans le bénéfice de la réserve. Si le groupe de travail se réunit à nouveau, le représentant du Comité devrait aborder le sujet sous cet angle d’approche.

35.S’agissant de la proposition «la prudence doit être exercée» contenue dans la recommandation 2, le Comité ne devrait pas s’attarder sur la terminologie. Le message essentiel est qu’il convient de ne pas considérer automatiquement toute déclaration formulée au moment de la ratification comme étant une réserve, surtout lorsque la déclaration ne porte pas le qualificatif de réserve et est exprimée par un État partie qui a formulé des réserves par ailleurs.

36.M. SOLARI YRIGOYEN dit que, pour harmoniser la version espagnole de la recommandation 7 avec les textes français et anglais, le terme «desmentida» devrait être remplacé par «refutada». Les discussions relatives à la position du Comité sur les réserves devraient prendre en considération les deux communications sur le thème soumis à M. Alain Pellet, Rapporteur spécial de la Commission du droit international, par le Président du Comité, en avril et novembre 1998. Les discussions doivent également tenir compte de l’observation générale n° 24 du Comité, qui, contrairement à ce que M. Pellet craignait, n’a pas empêché la ratification du Pacte. En réalité, 28 États supplémentaires ont ratifié le Pacte depuis l’adoption de l’observation générale.

37.M. AMOR propose d’engager des discussions sur les conséquences du fait que des États parties à des traités contenant des dispositions sur des thèmes similaires émettent des réserves par rapport à un traité mais pas à un autre. La position du Comité a été de considérer qu’il ne pouvait être dérogé aux articles 3 et 26 du Pacte dans la mesure où l’égalité, notamment entre hommes et femmes, constituait une norme générale de droit international. Certains États n’ayant pas déposé de réserves au Pacte relativement à ces articles, ont, par la suite, ratifié la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes ou la Convention des droits de l’enfant tout en émettant des réserves eu égard à des dispositions similaires. Ce manque de cohérence mine la mise en œuvre du Pacte et affecte la validité des réserves émises vis-à-vis des autres traités.

38.La PRÉSIDENTE suggère que la question soulevée par M. Amor soit discutée lors de la prochaine réunion du groupe de travail.

39.Sir Nigel RODLEY, en réponse aux commentaires formulés par M. Solari Yrigoyen, précise que le groupe de travail a débattu en parfaite connaissance de la position exprimée sur le sujet par le Rapporteur spécial. Cette position a cependant été influencée par un malentendu, étant donné l’omission de la traduction du mot «generally» de la dernière phrase du paragraphe 18 de la version française de l’observation générale n° 24. Cette omission a été rapportée à M. Pellet, qui ensuite a précisé qu’il était prêt à accepter que, dans certaines circonstances et pour l’exercice de leur mandat, les organes créés en vertu d’instruments internationaux pourraient être en mesure de déterminer les conséquences juridiques de l’invalidité. Ce changement d’attitude constitue un progrès considérable et de tels développements doivent être encouragés.

40.Les réserves à d’autres traités ne peuvent être transférées au Pacte, et l’idée qu’un organe créé en vertu d’instruments internationaux, prenant acte d’une réserve, devrait, avant de se prononcer sur la validité d’une réserve, prendre en considération le fait que l’État réservataire n’a pas déposé de réserves à l’encontre de dispositions similaires dans d’autres traités, est particulièrement intéressante.

41.La PRÉSIDENTE considère que la question abordée par M. Amor concerne davantage les autres organes crées en vertu d’instruments internationaux que le Comité des droits de l’homme dans la mesure où la majorité des réserves ont été déposées pour d’autres instruments que le Pacte.

42.Sir Nigel RODLEY dit que la dernière phrase de la recommandation 7 du groupe de travail devrait se lire comme suit: «Cette intention doit être identifiée de bonne foi, étant normalement attendu que l’État préférerait demeurer partie au traité sans le bénéfice de la réserve.»

43.La PRÉSIDENTE dit que les avis du Comité sur les recommandations devraient être communiqués au groupe de travail avant sa prochaine séance et demande quand cette dernière est prévue.

44.Sir Nigel RODLEY dit qu’il serait intéressant de programmer la prochaine réunion du groupe de travail en sorte que les organes créés en vertu d’instruments internationaux puissent discuter de ses conclusions avant la réunion intercomités. Le résultat des discussions de la réunion intercomités pourrait ensuite être transmis à la Commission du droit international. Il suggère donc, dans cet esprit, de programmer la prochaine séance du groupe de travail à la fin de 2006 ou au début de 2007.

45.M. AMOR se demande s’il serait intéressant que Sir Nigel Rodley rende visite aux autres organes crées en vertu d’instruments internationaux avant la prochaine réunion du groupe de travail afin de prendre note de leurs avis.

46.Sir Nigel RODLEY répond qu’il pense que ce genre de visite risque de compliquer les discussions au-delà du nécessaire.

La séance est levée à 12 h 35.

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