Cinquante-neuvième session
Compte rendu analytique de la 1577e séance
Tenue au Siège, à New York, le vendredi 4 avril 1997, à 15 heures
Président e :Mme Chanet
puis :M. El Shafeil (Vice-Président)
puis :Mme Chanet
Sommaire
Examen des rapports présentés par les États parties en vertu de l’article 40 du Pacte
Troisième rapport périodique du Portugal relatif à l'application du Pacte à Macao (suite)
La séance est ouverte à 15 heures 15.
Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 40 du Pacte (suite)
Troisième rapport périodique du Portugal sur l’application du Pacte à Macao (suite) (CCPR/C/70/Add.9)
Première partie de la liste des questions (suite)
À l’invitation de la Présidente, M. Oliveira, M. Vidal, M. Nataf et M me Silva (Portugal) prennent place à la table du Comité.
M. Oliveira (Portugal), revenant sur les réponses de sa délégation aux autres questions du Comité sur sa présentation orale et sur la première partie de la liste de questions, dit que tout ce qui concerne le judiciaire sera repris dans la deuxième partie, à la question 13. Les articles 8 et 22 de la Constitution portugaise sont applicables à Macao ainsi que le stipule l’article 2 de la Loi organique de Macao qui comprend la section relative aux libertés civiles de la Constitution portugaise, à savoir le chapitre concernant les droits, les libertés et les garanties.
Un résident de Macao peut contester la constitutionnalité de la Loi en suivant les procédures qui s’appliquent au Portugal. La compétence de la Cour constitutionnelle du Portugal est étendue à Macao. Les différents niveaux de contrôle de la constitutionnalité ou de la légalité sont définis à l’article 280 de la Constitution portugaise qui est applicable dans le système juridique de Macao. Ainsi récemment, parmi d’autres affaires, un certain nombre d’extraditions demandées par la Chine a fait l’objet d’un recours jusque devant la Cour constitutionnelle de Lisbonne qui a estimé que la législation de Macao portait atteinte au principe constitutionnel général selon lequel il n’est pas possible d’extrader des personnes vers un pays dans lequel elle sont passibles de la peine de mort.
M. Vidal (Portugal) dit que le Haut-Commissaire contre la corruption et les actes administratifs illégaux, poste traditionnellement occupé par un juge d’une juridiction supérieure, est nommé par le Gouverneur du territoire après consultation de l’Assemblée législative. L’Assemblée, à laquelle le Haut-Commissariat rend des comptes annuellement, vote son budget. Dès lors, les fonctions du Haut-Commissaire s’apparentent à celles d’un médiateur. De fait, début 1998, le Haut-Commissariat accueillera une conférence des médiateurs de l’Asie de l’Est à Macao.
M. Oliveira (Portugal) dit que les organismes publics sont responsables en vertu de l’article 22 de la Constitution qui peut être invoqué directement devant les tribunaux de Macao, au même titre que la législation applicable de 1991. Des informations sur des affaires en particulier seront fournies au Comité ultérieurement.
Les traités en matière de droits de l’homme auxquels le Portugal est partie ne peuvent être étendus à Macao qu’après consultation de la Chine dans chaque cas car le Gouvernement postrévolutionnaire du Portugal a convenu que Macao était un territoire chinois sous administration portugaise (par. 4 du rapport). Néanmoins, le Portugal est déterminé à ce que tous les traités soient étendus à Macao avant la fin de la période transitoire et il ne prévoit aucun problème à cet égard; La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et la Convention relative aux droits de l’enfant y sont déjà appliquées.
La majorité des lois fondamentales telles que le Code pénal et le Code de procédure pénale sont en cours de révision par le Portugal en vue de les adapter à la situation locale. Il travaille également sur la longue liste de textes de Loi soumis au Comité. La Loi fondamentale de la Chine implique que toutes les lois demeurent applicables à Macao et que le Portugal se fonde sur cette interprétation. Il est vrai que la Chine n’a jamais dit que le principe de continuité s’appliquait aux lois, mais elle n’a jamais non plus nié son applicabilité. Le Portugal envisage de faire connaître clairement sa position.
Le Pacte n’est pas appliqué à Macao parce que la Loi organique de Macao prévoit expressément qu’avant l’entrée en vigueur de quelque traité que ce soit il doit être publié au Journal officiel. Il convient de rappeler que lorsque le Portugal a ratifié le Pacte, Macao n’était plus territoire portugais. Toutefois, avant que le Portugal n’étende l’application du Pacte à Macao, un mémorandum d’accord à caractère contraignant a été signé par le Portugal et la Chine, selon lequel le Portugal prend cette mesure et la Chine applique un principe de continuité copié sur la Déclaration conjointe de Hong Kong, précisant les modalités exactes de son extension. Le Portugal n’envisage pas d’appliquer à Macao les exceptions qu’il a formulées au Pacte.
Les mesures pratiques que son Gouvernement a pu prendre pour s’acquitter de ses obligations de présenter des rapports contractées aux termes du Pacte seront maintenues en fonction de l’ouverture positive de la Chine. Le Portugal se préoccupe de ces obligations au vu de l’exemple de Hong Kong. Il serait heureux de transmettre à la Chine toute recommandation du Comité à ce sujet.
M. Nataf (Portugal), rappelant les relations entretenues par Macao et Hong Kong après 1999, dit que bien que le système juridique restera globalement identique, personne n’est en mesure de dire comment la Loi s’appliquera dans la pratique. Toutefois les liens qui existent devraient se renforcer en raison des relations économiques très étroites déjà en place.
La question de la nationalité est très complexe. Macao n’est pas un État et il n’y a pas de nationalité liée à ce territoire; ainsi, tous les liens des résidents à Macao sont soit temporaires (sans droit de vote ou d’exercer une charge) soit permanents. La majorité d’entre eux ont la nationalité portugaise ou chinoise. Jusqu’en 1981, toute personne née à Macao acquérait automatiquement la nationalité portugaise; depuis lors, en vertu du droit portugais et chinois, toute personne née à Macao acquiert la nationalité chinoise. On compte maintenant 300.000 ressortissants chinois à Macao et 115 000 ressortissants portugais. Même les citoyens portugais d’origine chinoise résidant à Macao ne rencontrent aucun problème à l’égard de la Loi portugaise. En outre, les résidents et les non-résidents peuvent saisir les tribunaux de Macao et la Cour constitutionnelle du Portugal.
M. El-Shafei, Vice-Président, prend la présidence.
M. Oliveira (Portugal) dit qu’un nouvel établissement pénitentiaire de grande capacité a été construit à Macao en 1990 et qu’ainsi il n’y a pas de problème de surpopulation carcérale. S’agissant de l’armée, il souligne qu’il n’y a pas de forces armées en tant que telles à Macao mais que quelques ressortissants portugais de l’armée ont assumé des fonctions de sécurité, notamment à des postes élevés. Ils sont progressivement remplacés par des civils locaux diplômés de l’École supérieure des services de sécurité de Macao, et d’ici à 1999 tout le personnel des services de sécurité sera local. De plus, un effort est fait pour augmenter le pourcentage de locaux chargés de toutes les fonctions publiques de Macao et qu’ainsi tous les chefs de départements soient des locaux d’ici à la fin de l’année. La formation du personnel à Macao a démarré plus tard et plus lentement qu’à Hong Kong.
Les trois systèmes juridiques applicables à Macao devraient demeurer autonomes, avec leurs différents domaines de compétence, et ne devraient pas soulever de problème de hiérarchie.
Un vaste programme visant à faire connaître le système juridique à Macao - y compris les droits garantis par le Pacte - a été lancé après consultation de nombreuses organisations non gouvernementales. Les différentes communautés sont couvertes par le biais d’articles de journaux et de magazines, tandis que des brochures et des plaquettes avec le texte bilingue du Pacte sont distribuées dans les écoles.
Le rapport offre peu d’informations sur les organisations non gouvernementales qui interviennent à Macao parce qu’on en compte relativement peu, et encore moins des militantes. Plus de la moitié de la population de Macao est entrée sur le territoire au cours des quinze dernières années - en conséquence de regroupements familiaux et de lois sur l’immigration très libérales - et dès lors le sentiment d’appartenance n’est pas très présent. Ainsi, beaucoup ne se sont jamais fait inscrire sur les listes électorales. Mais cette question n’est pas aussi pertinente qu’à Hong Kong.
La Chine a mal réagi dans les trois cas, par rapport à précédemment, dans lesquels le Portugal a refusé les extraditions, bien que son Gouvernement n’ait rien fait d’autre que d’appliquer sa Constitution et les accords et textes de loi internationaux pertinents. Un accord-type est sur le point d’être conclu avec la Chine sur la remise de criminels. Toutefois, comme dans le cas de Hong Kong, les procédures ne valent qu’à l’égard des pays tiers. Son Gouvernement a l’intention d’entamer bientôt des consultations avec la Chine pour assurer que les lois régissant les extraditions restent en vigueur au-delà de 1999. Bien entendu, c’est le souhait du Portugal de voir les principes et restrictions actuellement appliqués continuer de l’être mais il n’aura aucun droit souverain en la matière.
S’agissant de la liberté d’expression, son Gouvernement espère vivement que les dispositions de la Constitution portugaise resteront le droit applicable sur le territoire après 1999 mais il croit que la Chine ne sera pas d’accord. Il est beaucoup plus probable que la Constitution portugaise sera remplacée, lorsque le Portugal rétrocédera le territoire, par la Loi fondamentale de la République populaire de Chine qui présente le caractère d’une Loi constitutionnelle.
M. Klein est soulagé d’entendre qu’il existe un mémorandum d’accord entre la Chine et le Portugal et dit qu’il aimerait en recevoir le texte.
M me Chanet reprend la présidence.
M. Lallah dit qu’il a quelques réserves concernant l’interprétation du Portugal de l’application du Pacte et du Protocole facultatif à Macao. Selon lui, Macao fait partie du territoire portugais; ainsi le Pacte aurait dû être contraignant sur le territoire à compter de la date de signature.
M. Oliveira (Portugal) dit que Macao est en fait un territoire chinois sous administration portugaise; le Pacte a été étendu à Macao en 1992.
M. Bhagwati dit qu’une copie de la Loi organique de Macao serait utile pour comprendre la situation.
M. Oliveira (Portugal) donne lecture de l’article 2 de la Loi : le territoire de Macao est une entité de droit public qui jouit d’une autonomie administrative, économique, financière, législative et judiciaire dans le cadre des principes et du respect des droits, libertés et garanties énoncés dans la Constitution portugaise et la présente Loi.
La Présidente demande si le sous-entendu est correct, selon lequel Macao, territoire chinois sous administration portugaise, ne serait pas responsable au regard du droit international et que cette obligation reviendrait toujours au Portugal.
M. Oliveira (Portugal) dit que la personnalité de Macao au regard du droit international est tout à fait limitée. Le Gouverneur de Macao, par délégation du Président du Portugal, a conclu quelques accords internationaux et assume certaines responsabilités pour le compte de Macao, mais uniquement par délégation.
Deuxième partie de la liste de questions
Question 9 : Place du Pacte (article 2 du Pacte)
La Présidente donne lecture du contenu de la neuvième question : place et mode d’application du Pacte à Macao dans le droit et dans la pratique; mécanismes mis en œuvre pour l’harmoniser avec le droit interne qui prévaudraient dans le cas d’un conflit; efficacité des dispositions institutionnelles dans le cadre de la coordination et du suivi de l’application du Pacte; affaires dans lesquelles le Pacte a été invoqué directement devant les tribunaux ou mentionné dans des décisions judiciaires.
M. Oliveira (Portugal) dit que si le Pacte l’emporte sur le droit interne, le droit interne doit également respecter la Constitution portugaise, sachant que dans certains cas la Constitution est plus restrictive que le Pacte. À ce jour aucune Loi interne n’a dû être modifiée pour être conforme au Pacte. Il ne sait pas si le Pacte a été invoqué directement; la majorité des avocats préférant plaider l’inconstitutionnalité de la législation concernée.
Question 10 : Diffusion d’informations sur le Pacte (article 2 du Pacte)
La Présidente donne lecture du contenu de la dixième question : mesures prises pour diffuser des informations dans les deux langues officielles sur les droits reconnus dans le Pacte; informations sur l’éducation et la formation offertes aux fonctionnaires du Gouvernement, aux enseignants, aux juges, aux avocats et aux policiers; mesures visant à sensibiliser les médias et les décideurs au Pacte; mode d’information du public sur l’examen du rapport de Macao par le Comité.
M. Oliveira (Portugal) dit que la formation des policiers, des juges et des avocats inclut une éducation aux droits légaux et aux droits de l’homme, ce qui couvre les dispositions du Pacte. Des séminaires de formation aux droits de l’homme sont également organisés pour les fonctionnaires du Gouvernement. Le bureau de traduction de la Loi a également diffusé les principes énoncés dans le Pacte, notamment dans les médias en langue chinoise. De plus l’examen par le Comité du rapport de Macao a fait la une de la presse locale et la délégation a reçu de nombreuses demandes d’interviews.
Question 11 : Non-discrimination et égalité entre les sexes (articles 2, 3 et 26 du Pacte)
La Présidente donne lecture du contenu de la onzième question : participation des femmes dans la société par rapport à leur nombre; statistiques concernant la participation des femmes à la vie politique et économique et degré d’égalité effectif; écarts de rémunération entre les hommes et les femmes et mesures envisagées pour les combler.
M me Silva (Portugal) dit qu’actuellement on compte quatre femmes au Parlement; Une femme en est la Présidente. La participation politique des femmes n’est pas vraiment proportionnelle à la part qu’elles représentent dans la population mais elle est importante. Entre 1992 et 1996, les femmes représentaient 44 % de la population active et leur taux de chômage a diminué. On les retrouve dans tous les secteurs : elles représentent 20 % des chefs d’entreprise, 47 % de la population salariée dans les domaines technique et artistique, 65 % des employés de l’administration et 59 % des salariés de l’industrie. Quelques différences de rémunération persistent - les femmes sont payées environ 10 à 20 % de moins que les hommes - mais ces écarts traduisent surtout les forces du marché et ne constituent pas une discrimination absolue.
Question 12 : trafic d’êtres humains (article 8 du Pacte)
La Présidente donne lecture du contenu de la douzième question : mesures prises pour protéger les femmes des pays étrangers amenées à Macao pour les prostituer; mesures préventives contre le trafic d’êtres humains et le travail forcé; sanctions prononcées contre ceux qui exploitent les femmes.
M. Oliveira (Portugal) dit que la prostitution n’est pas un délit à Macao, mais que l’exploitation des femmes aux fins de prostitution en est un. À ce jour, aucun cas de travail forcé n’a été mis à jour. On suspecte des liens entre la criminalité organisée et la prostitution, mais ces affaires sont difficiles à poursuivre et les condamnations sont rares. Les peines prononcées pour exploitation sont sévères mais à ce jour elles n’ont pas réellement eu d’effet dissuasif.
Question 13: droit à un procès équitable (article 14 du Pacte)
La Présidente donne lecture du contenu de la treizième question : règles et règlements garantissant l’indépendance et l’impartialité de l’appareil judiciaire; mode de nomination, titularisation, destitution et mesures disciplinaires à l’encontre des membres de la magistrature.
M. Vidal (Portugal) dit que l’indépendance de la magistrature existe à travers l’octroi aux juges de certains pouvoirs, privilèges et obligations. Ils ne sont pas aux ordres de l’exécutif et ne peuvent pas être mutés ou destitués sauf pour motif disciplinaire et conformément aux procédures disciplinaires admises. De même, les juges ne sont pas responsables de leurs décisions à moins d’avoir commis un délit.
Au cours de l’actuelle période transitoire, les juges du Portugal sont nommés pour une durée déterminée tandis que les juges locaux sont nommés pour une durée indéterminée. Aujourd’hui, trois juges locaux sont en fonction et neuf autres devraient terminer leur formation judiciaire dans un proche avenir. En définitive, tous les juges seront locaux. Les juges sont officiellement nommés par le Gouverneur de Macao sur recommandation du Bureau administratif de la magistrature.
Les juges des juridictions supérieures doivent pouvoir justifier d’une expérience juridique d’au moins 15 ans; ceux qui ont suivi une filière économique sont destinés à la Cour des comptes. Pendant qu’ils sont en fonction, les juges ne peuvent pas participer à la vie politique. Les juges du tribunal de première instance sont évalués tous les deux ans; des sanctions disciplinaires peuvent être prononcées à leur encontre par l’organe administratif de la magistrature selon des degrés de sanction pouvant aller jusqu’à la révocation.
En réponse à des questions précédentes, il explique que la Cour constitutionnelle siège à Lisbonne alors que le tribunal administratif siège à Macao. Très peu d’affaires ont été renvoyées devant la Cour suprême du Portugal; la majorité des recours sont formés à Macao. À sa connaissance, trois affaires ont été renvoyées devant la Cour constitutionnelle qui a déclaré des lois locales inconstitutionnelles. La répartition géographique de l’autorité judiciaire n’implique pas l’établissement de nouveaux tribunaux. Le système judiciaire est en cours de mise en conformité avec la Loi fondamentale et la Déclaration conjointe sino-portugaise. Au Barreau, environ un quart des avocats est bilingue; la majorité des cabinets d’avocats sont capables de travailler dans les deux langues.
Question 14: liberté de conscience et de religion (article 18 du Pacte)
La Présidente donne lecture du contenu de la quatorzième question : principales différences entre le statut de l’Église catholique et les autres confessions et droit de ces dernières à l’égalité de traitement.
M. Oliveira (Portugal) dit que le principe d’égalité de traitement de toutes les religions est inscrit dans la Constitution. L’Église catholique ne jouit plus d’un statut spécial et les règles de dérogation ont été étendues à toutes les religions.
Question 15: liberté d’expression (article 19 du Pacte)
La Présidente donne lecture du contenu de la quinzième question : pratique actuelle de la censure et contrôle des médias; nombre d’inculpations pour violation de la liberté de la presse ayant donné lieu à des poursuites; rôle, composition et activités du Conseil de Presse.
M. Oliveira (Portugal) dit qu’aucun cas de violation de la liberté de la presse n’a été signalé. Il y a eu une tentative de censure de la chaîne de télévision chinoise mais le responsable a été renvoyé. Compte tenu que la majorité des médias est privée, l’intervention du Gouvernement est limitée.
M me Silva (Portugal) dit qu’on a recensé 26 plaintes pour violation de la liberté de la presse contre des organisations de presse. Elles ont donné lieu à 16 poursuites judiciaires et seulement quatre condamnations. La majorité des inculpations ont été rejetées ou suivent le processus judiciaire. Bien que l’établissement du Conseil de presse ait été décidé aux termes d’une Loi adoptée en 1990, il n’a pas encore été créé. Le Gouvernement n’a pas été en mesure de conclure un accord avec les représentants de la presse sur la composition et le rôle du Conseil. En 1996, le Gouvernement a présenté un projet de Loi à ce sujet à l’Assemblée législative et cet accord devrait bientôt voir le jour.
M. Oliveira (Portugal) revient également sur les débats longs et intenses quant au rôle et à la composition du Conseil de Presse à Macao. Plusieurs organes de presse et des journalistes ont exprimé leurs doutes quant au fait qu’un organe de surveillance de cette nature puisse défendre la liberté de la presse. Depuis l’adoption de la Loi en 1990 par l’Assemblée législative, le Gouvernement a remis cette question entre les mains de l’Assemblée. Le Portugal informera le Comité du rôle et de la composition du Conseil lorsqu’ils auront été définis par l’Assemblée.
M. Vidal (Portugal) dit qu’à Macao, des associations civiques jouent le rôle de partis politiques. Il existe six associations de cette nature qui participent aux élections, contribuent à élaborer des programmes gouvernementaux et administratifs, participent aux travaux des organes gouvernementaux et municipaux, sont libres de critiquer les mesures prises par l’administration publique et encouragent la sensibilisation aux droits civils. À Macao on compte 24 organisations de salariés ou syndicats officiels.
M. Oliveira (Portugal) dit que le Parlement portugais a jugé nécessaire de formuler des restrictions à l’application de l’article 25 b) du Pacte à Macao et que le Portugal n’envisage pas de les retirer. La Loi garantit l’égalité d’accès à tous les niveaux du service public et n’est discriminatoire à l’égard d’aucune communauté de Macao. Seuls les ressortissants portugais et chinois peuvent entrer dans la fonction publique. C’est une décision politique qui demande aux fonctionnaires d’être bilingues ou d’avoir des connaissances en chinois afin de garantir la continuité d’une administration publique composée de personnel local. Il n’y a aucun problème de travail d’enfants à Macao. Conformément à la culture chinoise dominante, les jeunes enfants sont en principe inscrits à l’école. On a enregistré quelques cas de travail d’enfants concernant des adolescents de 14 à 16 ans qui avaient travaillé sans autorisation parentale; des amendes ont été prononcées dans ces cas-là. Il n’y a pas de cas de travail accompli par des mineurs de moins de 14 ans. La prostitution impliquant des mineurs n’existe pas à Macao.
Lord Colville demande comment le système d’établissement des rapports sur la mise en œuvre du Pacte sera maintenu après le transfert du territoire de Macao à la République démocratique populaire de Chine. L’État déclarant devrait également indiquer comment les garanties de liberté d’expression et de réunion pacifique seront défendues après la rétrocession. Ainsi, si une affaire impliquant la liberté d’expression ou de manifestation concerne la relation entre les autorités centrales et la région autonome de Macao, les tribunaux devront en référer au Comité permanent du Congrès populaire national pour qu’il interprète les dispositions de la Loi fondamentale. Les tribunaux locaux devront alors se conformer à l’interprétation donnée par le Comité permanent. La délégation chargée du rapport devrait indiquer les répercussions possibles d’une telle situation sur le plein exercice de ces droits reconnus dans le Pacte.
M. Kretzmer dit que le Comité dispose d’informations sur un trafic de grande envergure de femmes étrangères à Macao. Il demande s’il existe une politique générale du Gouvernement visant à protéger ces femmes si elles viennent demander de l’aide aux autorités.
M me Evatt dit que si des femmes étrangères sont apparemment amenées à Macao avec leur consentement, beaucoup ne peuvent pas négocier les contrats sur un pied d’égalité. Une fois qu’elles sont arrivées à Macao, elles sont rapidement privées de leur liberté de circulation, leurs papiers étant confisqués et leurs gains retenus par les entremetteurs. En effet, elles sont soumises au travail forcé, si ce n’est à l’esclavage. Sans papiers ni argent, elles n’ont aucun moyen de sortir seules de cette situation. Il conviendrait que le Gouvernement prenne des mesures positives pour protéger ces femmes en leur offrant des abris sûrs et en leur permettant de rester pour témoigner dans le cadre des poursuites judiciaires engagées contre les criminels. Il devrait également être possible de former des recours civils.
Il serait utile de fournir des renseignements sur la protection juridique offerte aux syndicats et sur leur liberté d’entamer des négociations collectives et de faire grève. Des préoccupations ont été formulées selon lesquelles la Chine aurait déjà un effet négatif sur les activités des syndicats et la liberté d’association pourrait être restreinte.
Elle déplore les restrictions faites par le Portugal à l’applicabilité de l’article 25 b) à Macao parce qu’une démocratie représentative jouerait un rôle majeur dans la protection de tous les droits reconnus dans le Pacte.
M. Scheinin dit qu’il soutient l’avis exprimé par M. Kretzmer and Mme Evatt s’agissant de la traite des femmes. Si le Gouvernement envisage de prendre des mesures contre cette pratique, la question des cartes d’identité pour les femmes impliquées pourrait constituer une première étape. Il croit comprendre que la Résolution no 41/92 adoptée par l’Assemblée de la République portugaise n’a pas de répercussions sur les obligations internationales du Portugal s’agissant de la protection des habitants de Macao en application du Pacte et de son Protocole facultatif. Le système d’établissement des rapports sur l’application du Pacte et du Protocole facultatif quant aux plaintes individuelles déposées à Macao doit être sauvegardé.
Quelques dispositions de la Déclaration conjointe renvoient à des règles particulières d’application des traités internationaux auxquels la Chine est partie. Elles peuvent influer sur la compétence de la région autonome de Macao et de la République populaire démocratique de Chine au regard des obligations contractées aux termes du Pacte et de son Protocole facultatif.
M me Moghaisel demande si le Portugal a signé la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Elle aimerait également des données de l’État partie sur le pourcentage de femmes aux postes à responsabilités et demande s’il y a des femmes juges à Macao. Enfin elle souhaiterait des informations sur le statut juridique des mariages religieux à Macao.
M. Oliveira (Portugal), revenant sur la Résolution no 41/92 de l’Assemblé portugaise, dit que le Portugal considérait déjà Macao comme un territoire chinois sous administration portugaise lorsqu’il a signé le Pacte. Le Portugal n’a fait aucune déclaration sur l’applicabilité du Pacte à Macao comme l’avait fait le Royaume-Uni sur l’applicabilité du Pacte à Hong Kong.
Le pourcentage global de femmes dans la fonction publique est de 36 %. Il n’y a pas de femme juge à Macao mais il y a une femme Procureur. Actuellement, 40 % des stagiaires du centre de formation des magistrats sont des femmes. La grande majorité des mariages à Macao est civile. Les mariages religieux n’ont de signification que religieuse et les couples doivent être mariés civilement pour que leur union ait un effet juridique. Il n’existe aucune restriction à la conclusion de mariages civils.
La Loi fondamentale stipule que les tribunaux locaux peuvent interpréter ses dispositions. Les juges peuvent saisir les autorités de la République populaire de Chine de fort peu de questions pour déterminer si une affaire dépasse les pouvoirs régionaux octroyés aux organes locaux. La Constitution portugaise et les lois locales garantissent la liberté d’expression et de réunion pacifique. Son Gouvernement espère que cette protection sera toujours offerte après le transfert de Macao à la République populaire de Chine. Aux termes de la Loi, les manifestations peuvent être organisées sans autorisation préalable des autorités. Il est simplement demandé aux organisateurs d’informer les autorités 72 heures à l’avance afin que les dispositions nécessaires puissent être prises. Le système est tout à fait libéral car les principes généraux de la Constitution portugaise ont dû être repris par les réglementations locales.
Les dispositions de la Constitution portugaise relatives à la liberté d’expression sont applicables à Macao. La liberté d’expression est considérée comme l’une des libertés civiles majeures et prévaut sur presque tous les autres droits.
Macao dispose d’un appareil judiciaire indépendant qui applique la Loi. Dans le cas particulier cité - à savoir une manifestation contre la République populaire de Chine - les tribunaux estimeront probablement qu’il y a eu infraction.
À sa connaissance, il n’y a pas de travail forcé à Macao sous forme de prostitution. Même le Consulat de Thaïlande, dont les ressortissants sont fortement impliqués dans la prostitution à Macao, n’ont déposé aucune plainte. Auparavant, les papiers des prostituées suspectes étaient confisqués mais ceci ne se produit plus. Le fait que la prostitution soit le résultat d’une dépendance économique et que la criminalité organisée en récolte les bénéfices ne signifie pas nécessairement qu’il s’agit d’un travail forcé.
Répondant aux préoccupations de Mme Evatt concernant la démocratie représentative (article 25 du Pacte), il dit que le système de Gouvernement de Macao est celui d’une démocratie partiellement représentative, qui, depuis 21 ans, a assuré la stabilité sociale, l’ordre et un pourcentage croissant de participation électorale. Toutefois, au vu de la position des organismes internationaux sur le suffrage indirect et la nomination plutôt que l’élection des membres de l’assemblée législative, du Conseil consultatif et des assemblées municipales, il estime que son pays devrait formuler une réserve à cet article.
M. Bhagwati exprime sa confiance en l’engagement de la Chine à maintenir à Macao les dispositions du Pacte, notamment les obligations de rapport en application de l’article 40, après la rétrocession du 20 décembre 1999, même si les droits et libertés reconnus dans le droit interne sont restreints. Cette confiance à est confortée par le mémorandum d’accord dont a parlé M. Oliveira, dans lequel la Chine accepte de garantir l’application du Pacte, et par la remarque de M. Scheinin selon laquelle, en vertu du droit international, le transfert du territoire n’implique pas la perte des droits dont jouissent les habitants de ce territoire.
Toutefois il est préoccupé par la question de la traite des femmes, notamment des femmes de Russie, de Chine, du Vietnam, de la Thaïlande et des deux Corée. Il se demande comment la délégation peut affirmer qu’il n’existe pas de travail forcé alors que les femmes y sont attirées par la feinte et qu’on les empêche de quitter le pays. De fait, le Comité d’experts de l’Organisation internationale du travail (OIT) a condamné cette pratique dans la Convention concernant le travail forcé ou obligatoire. Il exprime également des doutes quant à la complète liberté des activités syndicalistes et au droit de grève. Il espère que l’administration de Macao sera aux mains des habitants locaux dès que possible afin d’assurer une transition en douceur vers la souveraineté chinoise.
M. Ando, faisant observer qu’en vertu de la déclaration conjointe sino-portugaises Macao est un territoire chinois, dit qu’il espère que le Portugal continuera à faire tout son possible pour garantir l’application des dispositions du Pacte jusqu’à la transition de 1999. Il espère que le chinois sera une langue officielle non seulement devant les tribunaux mais également dans d’autres domaines de la vie publique avant la rétrocession. À l’instar de Mme Evatt et de Lord Colleville, il formule des réserves concernant les partis politiques. Une connaissance du système judiciaire et un programme actif d’éducation aux droits de l’homme aideraient les résidents de Macao à comprendre quels sont les droits et libertés qu’ils devront chercher à défendre sous souveraineté chinoise.
M. Yalden convient avec M. Ando que le chinois devrait également bénéficier du statut de langue officielle à Macao.
Les chiffres relatifs à la participation des femmes à la vie économique et publique sont impressionnants; toutefois, ainsi que Mme Moghaizel l’a indiqué, les femmes sont sous-représentées aux postes de haut niveau. Il est relativement sceptique au vu de la déclaration de la délégation selon laquelle la différence de rémunération entre les hommes et les femmes n’est pas importante, car dans la majorité des pays, cette différence est au moins de l’ordre de 30 %.
Les informations fournies au Comité concernant la traite des femmes sont lamentables, notamment pour ce qui concerne la situation subie par ces femmes du fait que, même si elles sont arrivées à Macao de leur plein gré, leurs passeports leur sont confisqués et elles sont empêchées de quitter le territoire. Il espère que les autorités de Macao trouveront rapidement une solution au problème.
M me Evatt réitère ses préoccupations concernant la poursuite de la mise en œuvre des dispositions du Pacte sous souveraineté chinoise, y compris l’obligation de rapport, et certains problèmes relatifs à l’extradition, aux syndicats et à la liberté d’association. Elle espère que les autorités de Macao considèreront la traite des femmes comme une question majeure. Elle encourage les organisations non gouvernementales qui ont fourni les renseignements pertinents au Comité de faire de même à l’égard des autorités de Macao.
M. Klein souligne également l’obligation faite au Portugal de garantir que les dispositions de fond et de forme du Pacte, y compris l’obligation de rapport, sera toujours respectée après le transfert de pouvoir en 1999. À cet égard, il se félicite de l’engagement que le Portugal a obtenu de la Chine de reconnaître certaines obligations contractées au titre du droit international. Il serait utile qu’il contrôle le respect de cet engagement s’il y a lieu.
Lord Colville espère également que le Gouvernement du Portugal fera bien comprendre au Gouvernement chinois l’importance de s’acquitter de l’obligation de rapport contractée au titre du Pacte. Le Comité recherchera des renseignements à jour sur ce point.
La Présidente dit qu’elle est satisfaite des mesures prises par le Gouvernement portugais pour assurer une transition en douceur en 1999. Elle approuve également l’abolition de la peine de mort à Macao et félicite le Portugal de son refus d’extrader les accusés vers des pays dans lesquels sont appliquées la peine capitale ou la détention à vie. Elle espère que cette protection sera toujours garantie par les autorités chinoises. La pratique de Macao concernant les restrictions des droits des détenus est pleinement conforme aux articles 7 et 10 du Pacte.
Elle convient avec d’autres membres du Comité qu’aux termes de la Déclaration conjointe initiale sino-portugaise, les réserves faites aux articles 13 et 25 ne sont valables qu’à l’échelon national, mais elle exprime sa satisfaction sur le fait que le mémorandum d’accord à venir et la Loi fondamentale elle-même garantissent la poursuite de l’application du Pacte sous souveraineté chinoise.
Elle espère que davantage de documents officiels, et notamment des décisions de justice, seront publiés en langue chinoise et que des mesures seront prises pour remédier à la discrimination à l’égard des non-catholiques s’agissant de l’obligation d’un mariage civil. Enfin, elle exprime sa préoccupation concernant le travail forcé des prostituées, sur lequel le Comité a reçu des renseignements détaillés, notamment des statistiques sur la nationalité des femmes concernées.
M. Oliveira (Portugal) dit que depuis 1990 l’administration de Macao a demandé instamment l’extension de l’application du Pacte au territoire, bien que l’approbation des autorités chinoises soit toujours attendue pour inclure le principe de continuité dans la Loi fondamentale. La concertation avec le Comité marque un « moment historique ». Au vu du statut du territoire de Macao, il est important de créer un précédent de rapport autonome devant le Comité. Sa délégation se félicite des recommandations du Comité au regard de ses points faibles, car elles aideront Macao à appliquer le Pacte ultérieurement. Sa présentation a été franche et il n’y a eu aucune tentative de dissimulation dans ce troisième rapport périodique. Sa délégation espère la poursuite d’un dialogue fructueux avec le Comité.