Quatre-vingt-neuvième session

Compte rendu analytique de la 2440e séance

Tenue au Siège, à New York, le jeudi 22 mars 2007, à 10 heures

Président :M. Rivas Posada

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte et de la situation des pays (suite)

Troisième rapport périodique de la Barbade(suite)

La séance est ouverte à 10 h 5

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte et de la situation des pays (suite)

Troisième rapport périodique de la Barbade (suite) (CCPR/C/BRB/3; CCPR/C/BRB/Q/3)

À l’invitation du Président, les membres de la délégation de la Barbade reprennent leur place à la t a ble du Comité.

Le Président invite la délégation à traiter de tout point ayant trait aux questions 1 à 12 de la liste (CCPR/C/BRB/Q/3) examinées à la séance précédente.

Sir Louis Tull (Barbade), répondant à la question soulevée à propos des personnes handicapées, dit qu’un livre blanc du Gouvernement a été publié à ce sujet. Il prévoit un programme de sensibilisation du public, au moyen de l’organisation de débats réguliers à la télévision consacrés à la question et de la diffusion de l’information pertinente par des centres spécialement créés à cet effet. Les sociétés privées sont en outre encouragées à inclure dans leurs activités un volet concernant les personnes handicapées.

La question de la dépénalisation des relations sexuelles entre personnes de même sexe fait l’objet d’une attention sérieuse, de la part du Cabinet notamment, mais aucune décision n’a encore été prise à son sujet.

La Loi constitutionnelle (amendement) de 2002, ne s’applique qu’aux affaires postérieures à sa promulgation et n’a aucun effet sur celles qui sont antérieures. Comme aucun délai n’est fixé, les personnes qui se pourvoient en appel pourront épuiser tous les recours. Il espère pouvoir donner, vers la fin de la semaine, des renseignements plus détaillés sur les 46 affaires dont est actuellement saisie l’Administration chargée des plaintes visant la police.

La Commission de révision constitutionnelle a, après la tenue d’auditions publiques, commencé à rédiger une nouvelle législation en vue de donner suite à la recommandation tendant à y inclure la notion de discrimination fondée sur le sexe. La Commission a recommandé de donner un statut plus élevé au Bureau du Médiateur, qui s’occupait précédemment de l’administration plutôt que des atteintes aux droits de l’homme; ses pouvoirs sont désormais les mêmes que ceux d’un juge à la Haute Cour.

Aucune raison particulière n’a poussé le Gouvernement à créer un Comité pour la réconciliation nationale. Il s’agit d’un des nombreux organes, dont la Commission pour la justice sociale, qui ont été créés par anticipation, afin d’expliquer au peuple la position du Gouvernement au sujet d’un certain nombre de questions importantes. Le Gouvernement n’est pas hostile à la création d’une commission des droits de l’homme indépendante, idée qui a été lancée à une époque où il n’y avait pas de ressources; il étudie activement la question, en tenant compte de la nécessité d’éviter les doubles emplois.

Le Président invite le Comité à soulever tout autre sujet ou question qui le préoccupe.

M. Lallah demande à connaître l’expérience de l’État partie en ce qui concerne la nouvelle Cour de justice des Caraïbes, qui a remplacé le Conseil privé comme juridiction d’appel de dernier ressort de la Barbade.

M. O’Flaherty félicite l’État partie pour ses initiatives en faveur des personnes handicapées mais s’inquiète de la participation insuffisante du Conseil non gouvernemental de la Barbade aux décisions qui concernent les personnes dont il s’occupe. Il demande à savoir ce qu’il est advenu du Comité consultatif national sur les droits des personnes handicapées, à supposer qu’il soit jamais entré en service. Concernant la question de la dépénalisation des relations sexuelles entre personnes de même sexe, il exhorte la délégation à faire rapport à son gouvernement sur les discussions qu’il a eues avec le Comité et de bien lui faire saisir l’importance qu’il y a à protéger en permanence les minorités sexuelles, non seulement contre les préjugés mais également contre la violence physique.

Sir Nigel Rodley demande comment on peut considérer comme une infraction pénale la torture mentale par opposition à la torture physique, s’il n’existe pas de définition juridique de cette notion.

Sir Louis Tull (Barbade) estime qu’il est prématuré d’évaluer les activités de la Cour de justice des Caraïbes, qui n’a jusqu’ici été saisie que de moins d’une douzaine d’affaires et n’a compétence que sur deux pays seulement, à savoir la Barbade et le Guyana, mais il est à espérer que d’autres États des Caraïbes se joindront bientôt à eux. Répondant à la question sur le Comité consultatif national, il dit qu’en raison du chevauchement avec le Conseil de la Barbade pour les personnes handicapées et d’autres organismes, il n’a pas été très actif. Il examinera la question et portera les autres questions soulevées à l’attention de son gouvernement. La protection des minorités est partie intégrante des valeurs morales de la Barbade.

Il concède que la torture physique est prévue dans la législation nationale mais il n’y a aucune sanction pénale en cas de torture mentale et cette question mérite d’être étudiée. S’agissant des châtiments corporels, il souligne que la flagellation figure toujours dans les textes de loi, mais n’est plus appliquée. De même, personne n’a été exécuté à la Barbade depuis 24 ans, bien que la peine de mort ne soit pas officiellement abolie.

Le Président invite la délégation à traiter les questions 13 à 22 figurant sur la liste des points à traiter (CCPR/C/BRB/Q/3).

Sir Louis Tull (Barbade) souligne que les îles des Caraïbes sont très exposées au trafic d’êtres humains (question 13) ainsi qu’au trafic d’armes et de drogues, en raison de la très grande perméabilité de leurs frontières nationales. Il faut des ressources considérables pour organiser des patrouilles de police et surveiller l’accès à la Barbade où l’on peut entrer non seulement par l’aéroport ou le port mais par n’importe quelle partie de l’île si l’on dispose d’une embarcation rapide. Pour cette raison, la Barbade et d’autres pays membres de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) se sont efforcés de lancer des initiatives régionales pour combattre ce trafic, notamment dans le cadre d’une campagne et de programmes d’information pour la protection des victimes. En raison des différentes juridictions concernées, il est difficile toutefois d’adopter une approche uniforme en matière de poursuite des contrevenants. À sa douzième réunion en avril 2005, le Conseil de la CARICOM pour le développement humain et social a élaboré un plan régional pour examiner cette question et l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a fourni une assistance et des conseils. Il s’agit d’étouffer le phénomène dans l’œuf avant qu’il ne devienne vraiment préoccupant. Des efforts sont faits pour harmoniser les différentes politiques appliquées en matière de visa par les États des Caraïbes et maintenir les mesures de sécurité mises en place lors de la Coupe du monde de cricket, notamment en distribuant régulièrement une liste de personnes à surveiller aux autorités compétentes dans toutes les îles.

Concernant le traitement des détenus (questions 14 et 15), il fait remarquer que bien qu’il n’ait pas été possible, à la suite de l’incendie de la prison de Glendairy, de respecter intégralement l’Ensemble de règles minimales pour le traitement des détenus, des correctifs ont été rapidement apportés : en l’espace de six semaines, un niveau relatif de confort et de sécurité a été rétabli, dont l’amélioration des conditions de détention, la reprise des visites de membres de la famille et la fourniture de repas par le Service de distribution des repas scolaires, qui a pris la relève des cuisines de la prison détruites. La construction du nouveau pénitencier sera achevée d’ici à la fin du mois d’août 2007.

Répondant à la question 16, il indique que le Gouvernement étudie une politique globale des réfugiés et qu’au lieu d’expulser les réfugiés, il se met en rapport avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) afin qu’on puisse leur trouver une place dans un autre pays. Il n’a reçu qu’une seule demande d’asile, qu’il a transmise au HCR, et la Barbade est un pays de transit pour les demandeurs d’asile. Le refoulement n’est pas un problème qui se pose à la Barbade. Mais s’il le devient, il sera examiné dans le cadre de la CARICOM. Les étrangers qui séjournent au-delà de l’expiration de leur visa et ceux qui sont déchus de leur droit de résidence sont tenus de retourner dans leur pays.

Concernant la question de l’assistance judiciaire (question 17), il souligne que tous peuvent en bénéficier. En vertu de la loi sur les services juridiques aux communautés, les citoyens, les immigrants et les résidents permanents ont tous droit à l’assistance judiciaire; un certificat d’admission au bénéfice de l’assistance judiciaire peut en conséquence être délivré par le Directeur des services juridiques à la communauté dans le cas d’une infraction prévue par le code. Les juges peuvent cependant ordonner une telle assistance dans des cas qui n’entrent pas dans cette catégorie. Les demandeurs peuvent choisir entre plusieurs avocats désignés à cet effet.

Les statistiques sur la violence domestique et les infractions sexuelles (question 18) seront fournies ultérieurement, il assure toutefois le Comité que son Gouvernement n’épargne aucun effort pour protéger les femmes contre la violence et combattre les violences sexuelles et physiques contre les enfants (question 19). La loi de 1990 relative à la protection des enfants est complétée par un certain nombre de programmes. L’Office pour la protection de l’enfance, qui relève du Ministère de la transformation sociale, est légalement tenu d’enquêter sur toutes les plaintes pour maltraitance d’enfants, y compris les plaintes déposées initialement auprès de la police et de rendre compte des résultats de son enquête à la police pour inculpation s’il y a lieu. L’Office peut placer des enfants sous protection ou sous la tutelle de l’État. Il organise des programmes tels que le programme « safe touch » (les attouchements sans risques) sur le contact physique licite, dans les écoles, les églises, etc., a dispensé une formation sur les moyens d’être un bon parent et collaboré avec les médias pour sensibiliser davantage à la nécessité de prévenir la maltraitance des enfants. Au sein de la force de police, le programme de liaison avec les jeunes a dispensé à des policiers une formation dans le domaine du travail social de façon à ce qu’ils comprennent bien les questions concernant les enfants.

Répondant aux questions 20 et 21, il dit que les jeunes qui n’ont pas encore 15 ans sont envoyés dans des centres d’éducation surveillée tandis que ceux qui sont âgés de 16 à 18 ans sont envoyés soit dans un centre de redressement soit en prison selon la gravité de l’infraction; lorsqu’ils sont envoyés en prison, ils sont séparés des prisonniers adultes. Dans le nouveau pénitencier à Dodds, St. Philip, qui doit ouvrir ses portes en août 2007, les délinquants mineurs seront complètement séparés des détenus adultes. En février 2007, il y avait 10 délinquants mineurs en détention. La Barbade a toujours eu un tribunal pour mineurs constituant une juridiction séparée et les mineurs accusés d’avoir commis une infraction peuvent bénéficier d’une assistance judiciaire. Finalement, il informe le Comité que l’âge de la responsabilité pénale est actuellement fixé à 11 ans.

Concernant la diffusion de l’information relative au Pacte (question 22), on est très conscient à la Barbade qu’il est nécessaire de promouvoir et de protéger les droits de l’homme pour construire une société juste. Les services publics sont obligés de tenir compte, dans leurs activités et programmes, des préoccupations en matière de droits de l’homme et le Service de l’information du Gouvernement s’emploie à susciter les débats sur les droits de l’homme et à sensibiliser à cette question. Au cours des dernières années, afin d’informer la population, le Gouvernement a fréquemment organisé des rencontres publiques auxquelles ont assisté des représentants du Gouvernement et au cours desquelles on peut soulever n’importe quelle question, y compris sur les droits de l’homme. Qui plus est, chaque année, il y a de larges consultations sur des questions telles que l’économie, la politique sociale durant lesquelles des questions concernant les droits de l’homme sont inévitablement soulevées.

M. Glélé Ahanhanzo dit que le Comité tient de sources telles que le Département d’État de l’Administration des États-Unis et de l’OIM que des immigrants travaillant à la Barbade dans les secteurs de la construction, de l’industrie et comme employés domestiques sont souvent exploités en raison des bas salaires qui leur sont payés, des contrats de travail factices qu’ils ont et du travail forcé. Les femmes sont également les victimes de la traite à des fins de prostitution. Il demande si l’État partie a ouvert des enquêtes sur de telles pratiques et envisagé des mesures pour les combattre en adoptant notamment une législation interdisant le travail forcé et d’autres formes contemporaines d’esclavage. Il s’inquiète de la fréquence de la violence domestique contre les femmes et demande des renseignements sur les mesures destinées à aider les victimes, telles que l’établissement de refuges, et sur les efforts faits pour dispenser une formation aux autorités responsables de l’application des lois et aux prestataires de soins de santé et sur toute autre législation envisagée pour lutter contre ce phénomène.

Répondant à la question 14, M. Shearer demande si les détenus ont d’autres recours que l’appel devant la Haute Cour, telles que déposer une plainte auprès du Juge inspecteur des prisons pour mauvais traitements de la part des gardes pénitentiaires. La loi sur les établissements pénitentiaires autorise des gardes pénitentiaires à faire usage d’une force raisonnable en cas de nécessité et leur fait obligation de signaler à un supérieur tout emploi de la force et de faire examiner le détenu par un médecin aussitôt que possible, mais il se demande s’il y a d’autre mesure de suivi ou une enquête sur de tels incidents et si l’on s’est efforcé de définir le comportement abusif de la part des gardes pénitentiaires.

D’après l’information dont il dispose, quand les prisonniers ont été relogés après l’incendie qui a ravagé la prison de Glendairy, deux prisonniers ont été abattus par le personnel de sécurité, un a été abattu par des gardes pénitentiaires et deux autres sont décédés du fait des mauvaises conditions sanitaires. Il veut savoir s’il y a eu des enquêtes sur ces incidents et notamment si l’usage de la force se justifiait. Il se félicite de la volonté de l’État partie de coopérer avec le HCR mais l’invite à intégrer à la loi sur l’immigration le principe du non-refoulement, défini dans la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés.

M. O’Flaherty se dit troublé par le nombre élevé de cas de maltraitance sexuelle et physique sur les enfants (question 19) tel qu’il ressort des tableaux figurant dans le rapport (par. 407 et 409) et demande si des programmes sociaux existent ou sont prévus pour sensibiliser le public à ce sujet. Il se demande comment une société qui tolère les châtiments corporels tels que la flagellation pourra s’attaquer au problème de la maltraitance des enfants.

Il demande si l’État partie a pris des mesures pour appliquer la recommandation du Comité d’experts de l’Organisation internationale du travail (OIT) conformément à la Convention no182 concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, s’agissant notamment du fait d’ériger en crime la traite des enfants de moins de 18 ans, et pour ratifier le Protocole visant à prévenir, supprimer et réprimer la traite des personnes, notamment des femmes et des enfants, additionnel à la Convention des Nations Unies contre le crime transnational organisé. On l’a informé que des femmes qui ont été victimes de traite à des fins de prostitution ont été expulsées de l’État partie. Ces femmes sont des victimes et il demande à l’État partie de revoir ses politiques d’immigration et d’expulsion pour y inclure, par exemple, la permission de rester dans le pays pour des raisons humanitaires.

Abordant la question des enfants et du système judiciaire (questions 21 et 22), il demande à avoir plus de renseignements sur la nouvelle politique sur les délinquants mineurs mentionnée dans le rapport et savoir si elle a été appliquée. Il se félicite que l’âge de la responsabilité pénale ait été porté de 7 à 11 ans mais rappelle la recommandation du Comité des droits de l’enfant tendant à ce que chaque État partie envisage de relever davantage l’âge de la responsabilité pénale et prie l’État partie de faire preuve de circonspection quand il s’agit de déterminer la maturité physique et intellectuelle d’un enfant de 11 ans qui est accusé d’avoir commis un crime. Il demande si l’État partie envisage d’appliquer d’autres mesures non privatives de liberté et non judiciaires dans les cas d’enfants accusés d’avoir commis une infraction pénale.

S’agissant de la diffusion de l’information sur le Pacte (question 22), il se félicite de l’action menée par le Gouvernement pour sensibiliser aux questions des droits de l’homme mais estime que l’absence d’organisations non gouvernementales durant les consultations officieuses du Comité et à la séance en cours et le manque de renseignements les concernant laissent à penser que le public est très peu sensibilisé au Pacte et aux travaux du Comité. Pour corriger cette situation, l’État partie doit envisager d’afficher son rapport et les observations finales du Comité sur le site Web du Gouvernement, collaborer avec la presse notamment par la publication de communiqués de presse, faire en sorte que l’information sur le Pacte et les travaux du Comité soit diffusée aux bibliothèques publiques, et présenter le rapport et les observations finales au Parlement ou du moins faire en sorte qu’ils soient disponibles dans la bibliothèque du Parlement.

M me  Wedgewood demande si le récent incendie (à la prison Glendairy) a fait des victimes et s’inquiète des procédures d’évacuation dans les prisons de haute sécurité. Notant que la flagellation figure toujours dans les textes de loi de la Barbade, elle fait observer qu’en cautionnant cette forme publique de violence physique, le Gouvernement transmet à ses citoyens un message sur l’acceptabilité d’une telle violence.

Lors des procès conduits selon le régime de la co m mon law, le contre-interrogatoire constitue un moyen très efficace d’obtenir des informations. Le contre-interrogatoire est cependant un processus complexe, qui n’est pas bien compris par le public. Cela étant, l’assistance judiciaire est très importante dans la mesure où un accusé qui n’a pas de représentation légale, pourrait être à tort condamné sur la base d’un malentendu. Si l’État partie n’est pas en mesure de fournir une assistance judiciaire à tous, il doit pour le moins veiller à ce que les accusés puissent bénéficier des services d’un assistant juridique. Les bibliothèques des établissements pénitentiaires devraient également comporter des matériels de référence sur les procédures judiciaires.

Finalement, elle souligne la valeur du dialogue entre les États parties et le Comité en ce sens qu’il favorise des débats nationaux sur les droits de l’homme. À cet égard, elle souscrit aux observations faites par M. O’Flaherty sur les mesures de sensibilisation. La pratique d’autres États et les points de vue des divers membres du Comité pourront enrichir le débat public sur l’application du Pacte et influencer les interprétations futures de la législation nationale pertinente.

M. Bhagwati se dit très préoccupé par la situation des enfants à la Barbade. Il demande quelles sont les mesures prises pour déclarer illégale la traite des enfants, notamment à des fins d’exploitation sexuelle, et pour punir les responsables. Selon un rapport publié par l’Administration des États-Unis, la maltraitance des enfants constitue un sérieux problème dans l’État partie. Il demande donc si des mesures ont été prises pour prévenir la maltraitance et protéger les enfants.

Il tient à savoir à quel moment la Cour de justice des Caraïbes a été créée, et demande plus de détails sur sa composition. Comment les juges ont-ils été désignés et quelle est la durée de leur mandat? En quoi la compétence de la Cour est-elle comparable à celle du Conseil privé? Il demande également quelles sont les formes de recours examinées par la Cour et veut savoir si les individus souhaitant saisir la Cour peuvent bénéficier d’une assistance judiciaire.

La séance est suspendue à 11 h  45; elle reprend à 12 h 5.

Sir Louis Tull (Barbade) rappelle que la Constitution de la Barbade interdit en sa section 14 l’esclavage, la servitude et le travail forcé. Le Gouvernement coopère avec d’autres membres de la CARICOM en vue d’élaborer une politique globale contre la traite. La prostitution est illégale dans l’État partie et les individus qui se livrent à ces activités sont passibles de poursuites.

Les victimes de violence domestique peuvent chercher refuge dans un certain nombre de refuges publics et privés. Les tribunaux sont également habilités à délivrer des injonctions prohibitives à l’encontre des auteurs de violence. Le Gouvernement est déterminé à poursuivre l’examen en cours de sa législation concernant les droits des femmes et a également introduit divers programmes de conseils à l’intention des victimes et des auteurs d’actes de violence.

Répondant à la question de M. Shearer sur le comportement des agents pénitentiaires, il dit que tout détenu qui est blessé par un agent pénitentiaire est confié à un médecin. Un rapport d’incident est ensuite transmis au Directeur de l’administration pénitentiaire. S’il est établi qu’il a été fait usage d’une force excessive, le Directeur de la police et le Directeur des poursuites publiques sont notifiés et des poursuites peuvent être engagées. La loi sur les établissements pénitentiaires ne prévoit pas explicitement de telles enquêtes, les droits des détenus sont cependant protégés par la Constitution. Les détenus qui souhaitent déposer une plainte pour mauvais traitements peuvent le faire en prenant l’attache du juge inspecteur des établissements pénitentiaires.

En ce qui concerne les travailleurs migrants, les syndicats de travailleurs de la Barbade ont joué un rôle actif dans la défense de leurs droits, qui sont également protégés par la Constitution. S’agissant des demandeurs d’asile, le Gouvernement étudie actuellement la législation pertinente en vue d’y incorporer le principe du non-refoulement. Des discussions se déroulent également avec d’autres États de la région sur la possibilité d’harmoniser les politiques d’immigration et d’asile.

Abordant les questions posées par M. O’Flaherty, il dit que l’âge de la responsabilité pénale est fixé à 11 ans. Cependant, si le juge d’instruction doute de la capacité d’un individu dont l’âge se situe entre 11 et 14 ans de comprendre ses actes et d’en assumer la responsabilité, il peut ordonner une enquête.

Pendant qu’il rédigeait son troisième rapport périodique, le Gouvernement a tenu de larges consultations avec des ONG, et il entend poursuivre cette collaboration à l’avenir. L’absence d’ONG de la Barbade à la réunion en cours du Comité est due à un manque de ressources et ne devrait pas être interprétée comme indiquant que ces organisations ne s’intéressent pas aux travaux du Comité ou qu’elles méconnaissent le Pacte. Il ne sera pas possible au Parlement d’examiner le rapport et les observations finales du Comité mais des copies du rapport et des observations seront envoyées à la bibliothèque du Parlement ainsi qu’à toutes les bibliothèques publiques du pays.

Un détenu a été abattu durant l’incendie de la prison, mais l’incident fait toujours l’objet d’une enquête et il y aura une enquête judiciaire. La police décidera ensuite s’il y a suffisamment de preuves pour engager des poursuites. Concernant la flagellation, il a pris note des remarques de Mme Wedgwood. Il fait observer que conformément au Code de discipline scolaire publié par le Ministère de l’éducation, de la jeunesse et des sports, les châtiments corporels sont rarement utilisés et ne sont appliqués que dans des circonstances très particulières.

Il convient avec Mme Wedgwood que de nombreux individus accusés d’avoir commis une infraction pénale ne sont pas en mesure de se défendre correctement. Malheureusement, bien que l’assistance judiciaire soit largement disponible, le Gouvernement ne dispose pas de suffisamment de ressources pour que tout le monde en bénéficie. Cependant, un certain nombre de centres d’assistance judiciaire gratuite, tenus par des avocats et des universitaires, ont été créés pour donner des conseils au public. De plus, les juges sont tenus légalement d’assister les accusés et à ce titre, peuvent ordonner la fourniture d’une assistance judiciaire s’ils la jugent nécessaire.

Abordant les préoccupations exprimées par M. Bhagwati, il dit que la loi sur les infractions sexuelles protège tous les citoyens, y compris les enfants, des sévices sexuels. Il n’a pas lu le rapport de l’Administration des États-Unis sur la violence contre les enfants, mais assure le Comité que tout est fait pour promouvoir et protéger les droits des enfants. Ces droits seront également pris en compte durant la rédaction de la nouvelle législation globale contre la traite. L’enseignement étant obligatoire jusqu’à l’âge de 16 ans et les enfants de moins de 16 ans n’étant pas autorisés à travailler, le travail des enfants n’est pas un problème sérieux.

La Cour de justice des Caraïbes est composée d’un Président et de neuf juges. Les juges sont nommés sur la recommandation conjointe de deux organismes judiciaires régionaux, d’un organisme judiciaire sous-régional et de six ou sept organismes judiciaires locaux. La Barbade veille très scrupuleusement à ce que la politique soit absente des travaux de la Cour. Celle-ci a les mêmes attributions que celles du Conseil privé qui l’a précédée. De plus, elle est compétente en première instance pour connaître des différends commerciaux se posant en matière d’interprétation du Traité de Chaguaramas et constitue une juridiction d’appel de dernier ressort dans tous les territoires. Comme la Cour n’a commencé à fonctionner que depuis 18 mois, les données ne sont pas suffisantes pour établir des statistiques utiles. Finalement, tous ceux qui saisissent la Cour peuvent bénéficier d’une assistance judiciaire, ce qui n’était pas le cas avec le Conseil privé.

M. O’Flaherty dit s’intéresser à la situation du groupe de prostituées qui ont été amenées à la Barbade pour servir d’esclaves modernes, tel qu’indiqué par l’OIM. Bien qu’une politique ne soit pas mise en place, le ministère public peut décider de l’opportunité d’engager des poursuites contre les prostituées qui sont victimes de la traite, qui devraient à ce titre être considérées comme des esclaves et victimes et non comme des personnes ayant commis une infraction pénale. Il souhaite qu’on lui communique par écrit la position de la Barbade au sujet du Protocole traditionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à punir la traite des personnes ainsi qu’au sujet de la recommandation spécifique du Comité d’experts de l’OIT tendant à ce que la Barbade érige en crime la traite de personnes de moins de 18 ans. Il souhaite également recevoir une réponse à la question de savoir si des peines non privatives de liberté sont instituées à la Barbade pour des infractions commises par des mineurs. Il suggère que pour mieux sensibiliser à la question, la délégation se réunisse, dès son retour au pays, avec l’Association des organisations non gouvernementales de la Barbade pour examiner les observations finales du Comité.

S’agissant des chiffres concernant la maltraitance des enfants, il a, dans sa déclaration précédente, repris les chiffres figurant aux paragraphes 407 et 409 du rapport périodique de la Barbade et non ceux figurant dans un rapport de l’Administration des États-Unis.

Finalement, il dit qu’il souhaite avoir plus de détails sur le paragraphe 412 du rapport de l’État partie. En premier lieu, il se demande si la condamnation d’une personne pour une infraction pénale lui fait perdre ses droits pendant seulement la durée de son incarcération ou pour le restant de sa vie, auquel cas pourront se poser des problèmes en ce qui concerne la jouissance des droits énoncés à l’article 25. Deuxièmement, il veut savoir si les motifs qui déterminent la déchéance sont l’infraction pénale et l’instabilité mentale réunies ou si l’instabilité mentale est suffisante, auquel cas il souhaite qu’on lui donne une définition de cette dernière.

Revenant sur la question relative au Comité pour la réconciliation nationale, tel qu’indiqué aux paragraphes 115 et 116 du rapport de l’État partie, M. Shearer demande ce qui a poussé le Gouvernement à juger un tel comité nécessaire. Il demande à connaître la nature des conclusions de ce comité et la suite qu’elles ont eue.

M me  Wedgwood, précisant sa question précédente, dit qu’elle veut savoir le nombre de blessés et victimes qu’il y a eu à la suite de l’incendie de la prison à la Barbade. Parlant de l’assistance judiciaire, elle dit que les juges ne peuvent pas présenter une affaire aussi bien qu’un conseil et qu’en général, on n’obtient pas avec les centres d’assistance judiciaire et de conseils juridiques les mêmes résultats qu’avec un avocat professionnel. Elle encourage donc vivement l’État partie à étudier plus avant la possibilité de commettre un avocat pour toute personne accusée d’avoir commis une infraction grave, comme par exemple une infraction entraînant une peine dont la durée est de un an ou plus.

Sir Louis Tull (Barbade) dit que les prostituées qui entrent à la Barbade pour se livrer à la prostitution le font généralement de leur plein gré, ce qui les fait tomber alors sous le coup de la loi sur l’immigration et elles ne peuvent en conséquence être traitées comme des victimes. Sa délégation veillera cependant à fournir par écrit des informations complémentaires à ce sujet. La Barbade étudie actuellement la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée avant de prendre une décision officielle à cet égard.

Des peines de substitution à l’incarcération existent pour les mineurs délinquants. Dans leur majorité, ils ne sont pas incarcérés; beaucoup sont mis en probation et laissés à la garde de leurs parents, tandis que d’autres qui sont déclarés coupables d’un délit mineur sont priés de se présenter aux autorités du service communautaire pour suivre une formation ou travailler. D’autres toutefois ne sont pas condamnés mais reçoivent simplement un avertissement ou sont confiés aux services sociaux.

Les chiffres que cite M. O’Flaherty ne révèlent pas tout et ce sont les récidives qui expliquent le gonflement des statistiques. Il reconnaît cependant que c’est à sa délégation qu’il revient de clarifier ce point et qu’elle ne manquera pas de le faire à l’avenir.

Concernant la question de M. Shearer, ce n’est pas un facteur unique qui est à l’origine de la création du Comité pour la réconciliation nationale. Par le passé, le Gouvernement a lancé un certain nombre d’initiatives similaires dans l’intérêt des relations raciales à la Barbade pour répondre ou faire face à des questions telles que la répartition de la richesse et l’influence économique des différents groupes ethniques. Dans ce cas particulier, le Cabinet a anticipé et décidé de créer un comité chargé d’élaborer, de coordonner et de mettre en œuvre un programme visant à faire accomplir des progrès vers la réconciliation nationale et à renforcer l’unité nationale.

Répondant à Mme Wedgwood, il dit qu’une commission d’enquête examine actuellement les circonstances entourant l’incendie de Glendairy, y compris les victimes et les causes. S’il est établi qu’il y a eu une intention criminelle, l’affaire sera confiée au Directeur des poursuites. En outre, s’il convient que le principe de l’assistance judiciaire gratuite pour tous est louable, la Barbade ne dispose simplement pas de ressources suffisantes pour faire plus qu’actuellement et il espère que la situation s’améliorera à l’avenir.

Le Président félicite la délégation de la Barbade pour l’exhaustivité de son rapport mais souligne qu’il est important pour les États parties non seulement de respecter les dispositions du Pacte mais également de présenter leur rapport en temps voulu. Il subsiste un certain nombre de préoccupations, notamment le fait que l’État partie invoque l’opinion publique et les coutumes pour justifier le non-respect des traités internationaux dont le Pacte. À cet égard, le Comité ne trouve pas totalement satisfaisant que certaines lois qui sont incompatibles avec le Pacte soient toujours en vigueur à la Barbade et qu’aucune mesure n’a été prise pour remédier à la situation, tout simplement parce qu’elles n’ont pas été appliquées depuis longtemps; par exemple la peine de mort, bien qu’elle ne soit pas explicitement interdite par le Pacte, est vigoureusement découragée, mais est toujours prévue à la Barbade pour certains crimes. Une autre préoccupation est la pratique encore courante des châtiments corporels infligés aux enfants qui, bien qu’ils soient approuvés dans l’opinion publique, pourraient donner lieu à des excès qui sont totalement inacceptables au regard des obligations internationales contractées par l’État partie.

Il note que les membres du Comité ont suggéré un certain nombre de mesures à l’État partie, notamment la création d’une commission des droits de l’homme et des efforts accrus pour améliorer le traitement des détenus. En conclusion, il pense qu’il est important pour la délégation de porter les observations du Comité à la connaissance du Gouvernement de la Barbade pour que la situation des droits de l’homme dans le pays continue à s’améliorer.

Sir Louis Tull (Barbade) remercie le Comité pour le dialogue très fructueux et assure ses membres que sa délégation transmettra ses observations à son gouvernement. La Barbade s’efforcera de soumettre son prochain rapport périodique à temps et de prendre en considération les points de vue des membres du Comité sur les questions qui les préoccupent.

La séance est levée à 13 h 5.