Nations Unies

CCPR/C/SR.2660

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

7 décembre 2009

Original: français

Comité des droits de l’homme

Quatre-vingt- dix-septième session

Compte rendu analytique de la 2660 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mercredi 14 octobre 2009, à 10 heures

Président:M. Iwasawa

S ommaire

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte

Deuxième rapport périodique de la République de Moldova (suite)

La séance est ouverte à 10 h 10.

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte (point 6 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique de la République de Moldova (CCPR/C/MDA/2; CCPR/C/MDA/Q/2; CCPR/C/MDA/Q/2/Add.1; HRI/CORE/1/Add.4) (suite)

1 . Sur l’invitation du Président, la délégation moldove reprend place à la table du Comité .

2. M. Esanu (République de Moldova) explique que, pour cause de jour férié à Chisinau, il n’a pas pu obtenir toutes les données, notamment statistiques, demandées à la séance précédente; il les fera parvenir au Comité dans les meilleurs délais. Néanmoins, selon les informations dont il dispose, le nombre de femmes députées s’élèverait actuellement à 25 sur un total de 101 députés, les femmes représentant donc 25 % des parlementaires. Concernant l’affaire de la jeune femme poursuivie pour avortement, évoquée à la séance précédente, il faut savoir que l’avortement est légal en République de Moldova et que l’opinion publique n’y est pas opposée. En l’occurrence, il semblerait que la jeune femme ait été condamnée pour homicide parce que l’avortement avait été pratiqué à un stade très avancé de la grossesse.

3.Des mesures ont été prises pour améliorer le fonctionnement des institutions, des avocats parlementaires et du Centre des droits de l’homme. La délégation ne dispose pas de chiffres précis sur le nombre de plaintes et de pétitions qui ont été adressées à l’avocat parlementaire ni sur le nombre d’enquêtes qu’il a menées mais on peut dire que les plaintes portent en majorité sur le fond plutôt que sur la légalité des décisions prises par les organes judiciaires.

4.En ce qui concerne la formation des membres de la police et du système pénitentiaire, des médecins ou encore des écoliers en matière de santé ou de procréation, le Ministère de l’éducation étudie actuellement le programme enseigné, en coordination avec les organisations de la société civile; toutes les observations qui auront été formulées par le Comité seront prises en considération. Pour ce qui est de l’amélioration des compétences des magistrats et de la police, les programmes de formation vont être revus en fonction des observations formulées par le Comité afin de couvrir de manière exhaustive tous les aspects relatifs à la protection des droits de l’homme.

5.Le problème de la traite des êtres humains est très lié au problème du conflit avec la Transnistrie car la République de Moldova ne contrôle pas la République autoproclamée de la Transnistrie et les autorités judiciaires ne peuvent pas s’y rendre. À l’heure actuelle, grâce à la mission d’assistance à la frontière entre la République de Moldova et l’Ukraine, mise en place avec l’aide de l’Union européenne en 2005, un contrôle frontalier est assuré entre la Transnistrie et l’Ukraine, ce qui permet, dans une certaine mesure, d’empêcher que la traite des êtres humains ne passe par le territoire moldove. En principe, tous les projets humanitaires menés par la République de Moldova en partenariat avec des organismes internationaux visent les personnes se trouvant en Transnistrie (services médicaux, éducatifs, etc).

6.M. R usu (République de Moldova) explique que la forme la plus répandue d’exploitation est la traite à des fins de prostitution ou à caractère sexuel, l’exploitation à des fins économiques ou de travail ne représentant que 20 % des cas. Les victimes sont en majorité des femmes et les hommes et les enfants ne représentent que 10 à 15 %. Quant à l’élimination des 36 réseaux de traite des êtres humains dont il a été question, il faut savoir que les organisations criminelles qui constituent ces réseaux ne comportent pas seulement des ressortissants moldoves mais aussi des citoyens des pays de destination (Turquie, pays de l’ex-Yougoslavie comme le Kosovo ou la Macédoine, Fédération de Russie, Italie, Émirats arabes unis et, plutôt pour de l’exploitation économique, Espagne et Portugal). On estime que près de 50 % des victimes de ce fléau ont entre 18 et 25 ans et 30 % entre 26 et 40 ans.

7.À propos du calendrier d’adoption du projet de loi sur la lutte contre la discrimination, sans les dispositions relatives à la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle, le projet serait assurément adopté dans les plus brefs délais. Cependant, comme il n’est pas question de supprimer ces dispositions, l’adoption risque de tarder. La question de la discrimination ne se présente pas, en République de Moldova, de façon aiguë parce que le pays a hérité de l’ex-Union soviétique l’application du principe de l’égalité des deux sexes ou de l’égalité des minorités. De nombreux droits de l’homme étaient certes bafoués à l’époque soviétique mais l’égalité des hommes et des femmes, quelle que soit la nationalité, était respectée. Plusieurs générations ont donc grandi dans le respect du principe de la non-discrimination. Les Roms connaissent incontestablement des difficultés, qui toutefois ne tiennent pas toujours à une discrimination. Il importe de faire la distinction entre les faits de discrimination, qui doivent être réprimés, et les simples faits de violence, qui visent aussi bien les Moldoves que les membres des minorités. Il faut s’attacher à lutter contre le phénomène de la violence, ce qui nécessite non pas des ressources financières particulières mais le strict respect de la loi par tous.

8.M. Rusu (République de Moldova) dit qu’au cours des trois dernières années, trois plaintes pénales pour incitation à la haine ont été déposées mais que dans aucune de ces affaires l’élément de la discrimination n’a pu être établi: elles n’ont donc pas été portées devant les tribunaux. Des formations à la détection de la discrimination et l’incitation à la haine ont été organisées à l’intention des policiers et des fonctionnaires du parquet.

9.Le P résident remercie la délégation moldove et demande aux membres du Comité s’ils ont d’autres questions à poser.

10.Sir Nigel R odley demande dans quelle mesure la récente loi sur le terrorisme a été appliquée et souhaiterait des exemples concrets. Il a été heureux d’entendre que les procureurs visitent quotidiennement les lieux de privation de liberté mais, comme les allégations de mauvais traitements restent toujours aussi nombreuses, il se demande en quoi consistent exactement ces visites. Il demande également des éclaircissements sur le mécanisme national de prévention et les modalités de sélection de ses membres. Il voudrait savoir ainsi s’il est vrai que l’avocat parlementaire à la tête de ce mécanisme, qui est, selon les informations dont il dispose, un ancien procureur, dirige également le chef du Centre des droits de l’homme. Il demande aussi qui nomme le Conseil consultatif et quelle est son autorité par rapport aux quatre avocats parlementaires.

11.M me K eller dit qu’elle a bien noté qu’un complément d’information serait apporté par écrit sur la question de l’avortement et demande s’il existe des mesures de prévention concernant les cas où la femme est contrainte à avorter par l’environnement social.

12.M. S alvioli, souhaiterait des précisions sur le projet de loi relative à la lutte contre la discrimination, il demande si la République de Moldova a tenu compte des recommandations faites par l’antenne du Haut Commissariat en juillet 2009. Ce n’est pas seulement la société civile qui dénonce des problèmes de discrimination, ce sont aussi des organes intergouvernementaux comme la Commission européenne contre le racisme, le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination raciale ou encore le Programme des Nations Unies pour le développement.

13.M. Esanu (République de Moldova) explique qu’il n’y a pas eu une seule affaire pénale dans laquelle la loi sur le terrorisme a été invoquée. Les procureurs sont tenus de se rendre dans les lieux de détention provisoire. La question a souvent été débattue et doit être réexaminée. Des mesures ont déjà été prises pour éviter les conflits d’intérêt; ainsi les procureurs qui visitent les lieux de détention ne sont pas les mêmes que ceux qui suivent les enquêtes.

14.M. Rusu (République de Moldova) ajoute qu’en tant que procureur ayant exercé vingt-cinq ans, il peut affirmer que les visites des lieux de détention sont prises très au sérieux. Les procureurs sont tenus de visiter les locaux de détention de la police, de s’enquérir du sort des détenus, de leur parler et de vérifier les déclarations qui ont donné lieu à la garde à vue. Les cellules sont inspectées pour vérifier que des détenus ne s’y trouvent pas à l’insu du procureur. Celui-ci fait rapport à ses supérieurs et signale les éventuels cas de détention illicite.

15.M. Esanu (République de Moldova) dit qu’actuellement, il y a 170 personnes détenues dans des locaux de la police, dont 24 sont en attente de jugement. Ce chiffre a beaucoup diminué à la suite d’un accord passé avec le Ministère de l’intérieur en 2007, en vertu duquel les détenus en attente de jugement ont été transférés dans des établissements pénitentiaires. Le nombre de personnes en attente de jugement détenues en établissement pénitentiaire était de 2 456 en 2006 et 2 472 en 2007; suite aux mesures prises, le chiffre était passé à 1 374 en 2008 − soit une baisse de 50 % −, à 1 360 au début de 2009 et se situe aujourd’hui à 1 121. Une dynamique positive s’est donc mise en place.

16.Le directeur du mécanisme national de prévention est effectivement un avocat parlementaire, ancien procureur, qui a été nommé par le Parlement dans le respect de la loi. Un avocat parlementaire peut avoir auparavant défendu les droits de l’homme. Sa candidature avait fait l’objet de certaines objections de la part de l’opposition et de certaines organisations mais on a estimé qu’il n’avait pas participé à des enquêtes puisque, dans l’exercice de ses fonctions de procureur, il s’occupait de la défense des droits de l’homme. On ne dispose pas d’informations sur ses responsabilités au Centre des droits de l’homme. Le mécanisme national de prévention se compose d’avocats parlementaires et de fonctionnaires du Centre des droits de l’homme. Le Conseil consultatif est un organe composé de représentants du monde associatif, institué par le Parlement sur proposition de la Commission parlementaire des droits de l’homme. Autonomes, les membres du Conseil consultatif ne dépendent pas des avocats parlementaires; ils peuvent se rendre dans les établissements pénitentiaires, rédiger des rapports sur leurs visites et les présenter à qui de droit pour que des mesures soient prises s’il apparaît que les droits fondamentaux ne sont pas respectés.

17.Certaines recommandations formulées par le Haut Commissariat au sujet du projet de loi relative à la lutte contre la discrimination ont été incorporées dans le texte, d’autres non. Par exemple la recommandation visant à ce que soit créé un mécanisme spécialement chargé des questions de discrimination n’a pas été retenue car il a été jugé préférable de concentrer les efforts sur le renforcement des institutions existantes, c’est-à-dire le Centre des droits de l’homme et les avocats parlementaires, en les dotant des ressources humaines et financières nécessaires pour leur permettre de s’acquitter efficacement de leur mission de protection des droits de l’homme. Les représentants de la société civile qui ont participé aux consultations sur le projet de loi pourront confirmer que les autorités ont fait preuve d’ouverture tout au long du processus. Le débat public se poursuit sur des questions telles que la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et ce n’est qu’une fois que les points de vue de toutes les parties intéressées auront été exprimés et dûment examinés qu’une décision sera prise.

18.L’exercice de pressions dans le but de contraindre une femme à subir un avortement est illégal au regard de la loi. Des exemples de mesures concrètes mises en œuvre pour protéger les femmes contre de telles pressions pourront être fournis par écrit ultérieurement.

19.Le Président remercie la délégation de ses réponses aux questions complémentaires des membres du Comité et l’invite à répondre aux questions nos 13 à 24 de la liste de points à traiter.

20.M. Esanu (République de Moldova) dit que la loi garantit aux personnes en garde à vue le droit de prendre contact avec un avocat dès leur arrestation ou, si elles n’ont pas les moyens de s’assurer les services d’un avocat, de s’en voir commettre un d’office, sans frais. Il est vrai toutefois que, dans la pratique, la police ne permet pas toujours à la personne gardée à vue de communiquer avec un avocat dès l’arrestation et la qualité des prestations fournies par les avocats commis d’office est souvent insuffisante. Une nouvelle loi visant à renforcer le système de l’aide juridictionnelle a été adoptée en 2007 et un réexamen de l’ensemble des dispositions régissant le fonctionnement de l’aide juridictionnelle a été entrepris à l’initiative du Ministère de la justice en vue de déterminer les moyens d’améliorer la qualité des prestations, notamment par la définition de critères plus stricts pour la sélection des avocats commis d’office. Si le Comité le souhaite, les propositions finales du Ministère de la justice pourront lui être communiquées.

21.Une enquête a été menée dans les établissements pénitentiaires du pays à la demande du Parlement afin de faire le point de la situation des personnes en attente de jugement qui y sont détenues. Les résultats de l’enquête ont été analysés en vue de déterminer des moyens de réduire la durée de la détention avant jugement et des mesures, notamment législatives, ont été prises à cet effet. Le contrôle judiciaire de la légalité de la détention a également été renforcé puisque le bien-fondé des motifs du maintien en détention est désormais réexaminé par les tribunaux tous les trois mois et que toute prolongation de la détention au-delà des délais prévus par la loi doit désormais faire l’objet d’une demande préalable dûment motivée auprès du Procureur général et être autorisée par ce dernier. Des statistiques concernant la durée de la détention avant jugement seront communiquées par écrit au Comité ultérieurement.

22.Le Gouvernement moldove ne ménage pas ses efforts pour améliorer les conditions carcérales, comme le montrent les renseignements donnés par écrit en réponse à la question no 14. Dans son rapport sur la visite qu’il a effectuée en République de Moldova en juillet 2009, le Comité européen pour la prévention de la torture a reconnu que d’importants progrès avaient été réalisés. La prison no 7 de Rusca par exemple a été entièrement rénovée et satisfait désormais pleinement aux normes internationales. La prison no 1 de Taraclia a été partiellement rénovée mais en raison de la crise financière les travaux qui devaient être effectués cette année ont dû être suspendus. Les conditions dans la prison no 13, où sont détenues un grand nombre de personnes en attente de jugement, restent très difficiles, mais pour le moment le Gouvernement ne dispose pas des ressources nécessaires pour mener à bien le projet de construction d’un nouvel établissement où ces personnes pourraient être transférées. En ce qui concerne les locaux de la police, le Ministère des affaires intérieures a fait un état des lieux de toutes les cellules de garde à vue et a fait procéder aux travaux de rénovation nécessaires. Bien que le problème de la surpopulation carcérale persiste, les statistiques montrent que le nombre des détenus – aussi bien les condamnés que les prévenus – dans les établissements pénitentiaires a diminué de près d’un tiers entre 2006 et 2009, pour s’établir selon les chiffres les plus récents à 6 610 détenus. Dans le cadre des efforts déployés pour réduire la population carcérale, une loi portant modification du Code pénal qui réduit la durée des peines d’emprisonnement pour un grand nombre d’infractions a été adoptée, mais il est encore trop tôt pour en mesurer l’incidence sur la population carcérale. Les crédits budgétaires alloués au système pénitentiaire ont considérablement augmenté et s’élèvent pour 2009 à environ 236 millions de lei, contre 135 millions en 2006. Le montant initialement prévu était encore plus élevé mais la crise financière a contraint le Gouvernement à le réviser à la baisse. Entre 2006 et 2009, la réduction de la population carcérale conjuguée à l’augmentation des fonds alloués à l’administration pénitentiaire a permis dans l’ensemble une nette amélioration des conditions de détention. Le Gouvernement est conscient qu’il y a encore beaucoup à faire et qu’il aura besoin de davantage de ressources pour réussir à résoudre les problèmes qui subsistent, en premier lieu pour construire de nouveaux établissements pénitentiaires, mais il est résolu à faire tout le nécessaire pour y parvenir.

23.Le Gouvernement partage les préoccupations du Comité au sujet des difficultés qui entravent la bonne administration de la justice. Un vaste plan de réforme du système judiciaire a été entrepris, dont certains éléments ont déjà été évoqués, par exemple la suppression progressive des tribunaux économiques et militaires et le transfert de leurs compétences aux tribunaux ordinaires et la réforme du Conseil supérieur de la magistrature. D’autres points font encore l’objet de discussions, comme le mandat initial que les juges doivent effectuer avant leur nomination à vie: certains voudraient le ramener de cinq à trois ans quand d’autres en recommandent la suppression pure et simple. Il est également prévu de modifier la législation pour garantir l’exécution des décisions de justice.

24.M. Rusu (République de Moldova) dit que le Gouvernement, en partenariat avec l’UNICEF, travaille à la réforme de la justice pour mineurs. Depuis trois ans, l’accent est mis sur les mesures de substitution à la privation de liberté telles que le placement des mineurs délinquants dans des centres d’éducation spécialisés. Depuis 2007, les affaires pénales impliquant des mineurs relèvent de la compétence exclusive du parquet et des procureurs ont été spécialement formés pour connaître des infractions commises par des mineurs. La garde à vue d’un mineur est limitée à vingt-quatre heures et la détention provisoire à quatre mois. La détention d’un mineur n’est autorisée que dans le cas d’infractions graves avec violence et pour une même infraction, les peines privatives de liberté applicables à un mineur sont moitié moins longues que les peines applicables à un adulte. Les mineurs sont détenus dans des établissements ou dans des quartiers qui leur sont réservés. Entre 2005 et 2008, le nombre d’infractions commises par des mineurs a sensiblement diminué. Il s’agit dans 85 % des cas de délits de vol.

25.M. Esanu (République de Moldova) dit que le nombre de victimes de violence dans la famille excède de loin la capacité d’accueil des foyers et des centres d’hébergement existants mais l’ouverture de nouveaux centres nécessite des ressources importantes dont le Gouvernement ne dispose malheureusement pas; non qu’il se retranche derrière cet argument pour maintenir le statu quo, mais ce manque de moyens est une réalité avec laquelle il est forcé de composer. Le Comité trouvera les statistiques demandées sur les cas d’exploitation économique ou sexuelle d’enfants recensés en République de Moldova dans les réponses écrites (question no 18).

26.Depuis l’adoption en mai 2007 de la nouvelle loi sur les cultes, l’enregistrement des groupes religieux relève de la compétence du Ministère de la justice et non plus de celle du Service d’État chargé des cultes, qui a été dissous. Le Ministère de la justice entretient un dialogue continu avec les représentants des différents cultes sur toutes les questions qui les concernent. L’enregistrement d’un groupe religieux peut être refusé lorsque les formalités requises ne sont pas remplies, par exemple s’il manque des documents devant être présentés. L’enregistrement de groupes musulmans a récemment été refusé pour ce motif. La loi garantit l’indépendance des groupes religieux mais ne les exonère pas pour autant du respect de certains principes; or il arrive que des groupes religieux cherchent à imposer aux droits de leurs fidèles des restrictions qui sont contraires à la législation moldove. Pour cette raison le Ministère de la justice doit faire preuve de la plus grande vigilance lorsqu’il examine les demandes d’enregistrement. Pour renforcer encore la liberté de religion, il a élaboré un projet de loi en tenant compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme qui vise à supprimer les sanctions prévues par l’actuelle législation à l’encontre des personnes se livrant en public à la pratique d’un culte qui n’a pas été préalablement enregistré. Un premier examen du texte a révélé certaines lacunes auxquelles le Ministère de la justice va s’employer à remédier.

27.En ce qui concerne la liberté d’expression, la plupart des dispositions législatives sont appropriées, mais il subsiste néanmoins un problème concernant l’octroi des licences pour les chaînes de télévision. En effet, il existe des divergences entre les dispositions du Code de l’audiovisuel et celles du décret parlementaire qui régissent les compétences de l’organisme chargé de l’octroi des licences sur le point de savoir si les licences doivent être accordées automatiquement, ou sur la base d’un concours. La Cour constitutionnelle a été chargée de vérifier la constitutionnalité du décret, qui dispose que la prolongation automatique des licences ne peut avoir lieu que pour les chaînes de télévision qui ont obtenu leur licence après l’entrée en vigueur du Code de l’audiovisuel, mais elle n’est pas parvenue à se prononcer. La loi prévoit que dans ce cas le texte contesté est considéré comme constitutionnel et à l’heure actuelle les dispositions du décret sont donc applicables. La question n’est pas résolue pour autant: le Code de l’audiovisuel ne prévoit pas expressément la possibilité de faire jouer la concurrence, et il n’est donc pas exclu qu’en cas d’examen par un tribunal, celui-ci impose à l’organe concerné de prolonger les licences sans qu’il n’y ait appel à la concurrence.

28.La législation moldove protège les droits des personnes appartenant à des minorités, et des informations détaillées concernant leur représentation dans les organismes publics ont été communiquées dans les réponses écrites. S’il fallait un exemple supplémentaire, l’un des postes de vice-président du Parlement est occupé par une personne qui appartient à une minorité.

29.En ce qui concerne la diffusion d’une information sur le Pacte, le texte du Pacte figure dans le recueil des instruments internationaux ratifiés par la République de Moldova, qui a été distribué à toutes les autorités locales et aux bibliothèques. Il a également été publié sur le site Web officiel du Ministère de la justice où il peut être consulté par tout un chacun. En outre, toute la législation moldove est mise à la disposition du public sur Internet en moldove, qui est la langue officielle, et en russe, car la loi exige que les projets de loi doivent avoir été traduits en russe pour pouvoir être examinés.

30.Le Président remercie la délégation moldove de ses réponses et invite les membres du Comité à poser des questions sur les questions nos 13 à 24 de la liste de points à traiter.

31.Sir Nigel Rodley dit ne pas bien comprendre à partir de quel moment une personne a le droit de consulter un avocat lorsqu’elle est placée en détention, que ce soit pour une infraction administrative ou pénale. D’après les réponses écrites, dans ce dernier cas l’intéressé aurait le droit de s’entretenir avec un conseil «avant sa première audience en tant que suspect». Cela signifie-t-il qu’il est possible qu’une personne soit détenue sans nécessairement être soupçonnée d’une infraction et qu’elle n’ait donc pas accès à un avocat? Quelle est la procédure pour déterminer si une personne est suspecte? Il s’agit peut-être d’un malentendu, mais Sir Nigel Rodley voudrait avoir l’assurance qu’une personne a le droit de consulter un avocat dès le début de sa détention ou, à tout le moins, au moment de son premier interrogatoire par la police.

32.Selon des informations émanant d’ONG, il y a eu des cas où la police aurait refusé à certaines personnes l’accès à un conseil. On comprend difficilement comment il se peut que les policiers responsables d’un déni illégal du droit de consulter un avocat échappent à toute sanction. Il serait notamment intéressant de savoir ce qui se passe lorsqu’un procureur chargé de contrôler la légalité de la détention découvre qu’une personne a été privée d’accès à un conseil. Il est indéniable que les procureurs jouent un rôle extrêmement important et que leur tâche est avant tout de vérifier la légalité de la détention et de faire en sorte que les personnes qui ne sont pas détenues légalement soient libérées. Sir Nigel Rodley se demande toutefois s’il est possible que les procureurs, considérant qu’il s’agit là de leur principale tâche, attachent dès lors moins d’importance aux autres éléments de la détention. Il croit comprendre que la détention dans les locaux de la police ne doit pas se prolonger au-delà de soixante douze heures, mais que dans les faits il arrive que des personnes soupçonnées d’infractions administratives y soient maintenues plus longtemps. Il demande si cela est vrai et, dans l’affirmative, quelles sont les raisons. Il est évident que ces personnes courent de plus grands risques lorsqu’elles sont détenues dans les locaux de la police plutôt que dans d’autres lieux, c’est pourquoi il faudrait également savoir si les prévenus placés dans des centres de détention peuvent être renvoyés dans les locaux de la police pour des interrogatoires supplémentaires, et si cela se produit parfois.

33.Il convient de féliciter l’État partie d’être parvenu à réduire la population carcérale d’un tiers. La diminution constante du nombre de prisonniers montre que les autorités s’attachent à régler ce problème. Malgré cela, comme l’a dit la délégation elle-même, dans certains endroits les conditions de vie des prévenus sont pires que celles des condamnés. Il semblerait que la question de la surpopulation carcérale ait été résolue au niveau global, mais que des problèmes subsistent dans des établissements précis, en particulier, d’après des informations émanant d’ONG, dans la prison n° 13. Il serait intéressant de connaître la capacité de cet établissement et le nombre de personnes qui y sont incarcérées. La délégation voudra peut-être donner sa propre appréciation des conditions dans les établissements qui accueillent les détenus en attente de jugement et expliquer pour quelles raisons elles sont plus mauvaises que celles des établissements pour peine. D’après certaines sources, les personnes souffrant de tuberculose diagnostiquée avant leur placement en détention sont incarcérées dans des établissements pénitentiaires, pratique qui, si elle est confirmée, ne laisse pas d’être très préoccupante.

34.En ce qui concerne l’administration de la justice, la délégation elle-même a reconnu qu’il y avait de graves problèmes, et il serait intéressant de savoir quelle partie du système judiciaire est en cause. D’après des informations reçues par le Comité les juges subiraient de fortes pressions pour donner à certaines affaires l’issue souhaitée par les autorités. Il serait plus difficile d’influencer les magistrats si ceux-ci étaient désignés de façon indépendante par le Conseil supérieur de la magistrature. Des précisions concernant la procédure disciplinaire, le rôle des présidents des tribunaux et les modalités de leur nomination sont nécessaires. Selon des informations provenant de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, les audiences ne se tiendraient pas systématiquement dans un tribunal, mais auraient parfois lieu dans des bureaux des bâtiments judiciaires, ou même dans des couloirs. En outre, il ressort de témoignages que des mandats de détention ont été délivrés par des juges contre des personnes qui ne savaient même pas qu’elles avaient été interrogées par un magistrat. Il semble donc que l’ensemble du système judiciaire ne suive une ligne de conduite qui n’est pas entièrement compatible avec une administration impartiale de la justice. Il serait intéressant d’entendre la délégation à ce sujet.

35.M me Keller remercie la délégation des réponses utiles qu’elle a apportées à la question relative à la justice pour mineurs. Elle souhaiterait des détails sur les rapports d’évaluation psychosociale de la personnalité du mineur en conflit avec la loi; en particulier elle voudrait savoir si les personnes chargées de procéder à l’évaluation ont reçu une formation spéciale, quel type d’informations figure dans ces rapports et s’il existe des directives officielles pour guider cette pratique. Elle demande quelles mesures ont été prises pour mettre en place des dispositifs de prévention primaire et secondaire de la délinquance et de la récidive des mineurs.

36.M. Salvioli dit que dans son rapport de 2009 la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes donne un ensemble de recommandations spécifiques visant à améliorer la situation en République de Moldova en ce qui concerne la violence à l’égard des femmes. L’État partie a manifestement consenti des efforts importants de prévention et de répression, mais les informations reçues d’organisations internationales et d’ONG donnent à penser qu’il s’agit toujours d’un problème grave. Dans sa liste des points à traiter le Comité demande à l’État partie de communiquer des informations détaillées sur les mesures prises pour assurer que les juges, les procureurs, les agents de la force publique, les prestataires de soins de santé et les travailleurs sociaux connaissent le cadre législatif relatif à la violence contre les femmes, mais n’a pas eu de réponse. Des renseignements très précis concernant la violence contre les enfants, l’exploitation sexuelle des enfants et les pires formes de travail des enfants ont en revanche été donnés. Il en ressort que les efforts seront intensifiés pour lutter encore contre ce fléau, ce dont on ne peut que se féliciter. Concernant la liberté de religion, le Gouvernement n’a pas donné d’informations détaillées sur les mesures prises pour lutter contre l’intolérance religieuse et le harcèlement pratiqués par les autorités de l’État, notamment la police, à l’égard de personnes appartenant à des groupes religieux minoritaires, en particulier les musulmans. Pour ce qui est de l’enregistrement des cultes, il est certes difficile d’y procéder si l’association ne présente pas les documents requis. Il n’en demeure pas moins préoccupant que les demandes d’enregistrement d’une trentaine d’organisations religieuses musulmanes soient toujours en suspens, ce qui a des incidences pour l’exercice même du culte mais également pour d’autres pratiques, telles que les cérémonies d’enterrement. Il serait utile de savoir quelles mesures ont été prises pour garantir la réalisation de la liberté de religion et procéder à l’enregistrement des cultes qui ont présenté une demande.

37.M. Rivas Posada souhaite s’attacher à la question de la liberté d’expression. Selon les informations dont dispose le Comité, les journalistes pratiqueraient l’autocensure par crainte de subir des mesures de rétorsion. Il semble que la loi sur la diffamation dans les médias soit particulièrement stricte et qu’elle soit fréquemment invoquée, davantage par des acteurs privés que par le Gouvernement. Des informations à ce sujet étaient demandées dans la question no20 de la liste des points à traiter, les renseignements donnés dans les réponses écrites portent sur la liberté de réunion. Le Comité a été informé qu’une loi sur la télévision publique a été adoptée récemment, mais qu’en ce qui concerne la télévision privée, le risque de concentration des médias, voire de monopole, suscite des préoccupations. Il serait bon que le Gouvernement examine cette question.

38.Il ressort des réponses détaillées que l’État partie a données que les personnes appartenant à des minorités participent largement à tous les niveaux de l’État. Il semble néanmoins que certaines minorités, notamment les Roms, souffrent toujours de discrimination dans l’accès aux services publics. Si elle ne représente qu’une petite partie de la population du pays, la population rom est particulièrement vulnérable et mérite une attention prioritaire, notamment dans les domaines de l’éducation et de la santé. La délégation a indiqué que les groupes défavorisés de la population rencontrent des difficultés dans ces domaines, et qu’il ne fallait pas y voir une discrimination. Toutefois dans de nombreux pays les Roms sont très vulnérables, marginalisés socialement et en butte à une résistance culturelle marquée à leur égard. En ce qui concerne l’éducation, une étude du PNUD a fait apparaître que seuls 27 % des enseignants étaient disposés à travailler avec des collègues roms. L’existence d’un facteur culturel qui conduit à l’isolement de la population rom est donc indéniable et l’État doit éduquer la population pour y remédier. Il serait intéressant de savoir quelle est la représentation des minorités dans les organes judiciaires, outre les organes administratifs. La question des services obligatoires d’interprètes devant les juges lorsque l’une des parties parle la langue d’un groupe minoritaire se pose également.

39.La délégation a expliqué que des informations sur les travaux des organes conventionnels ainsi que les documents s’y rapportant étaient mis à la disposition du public sur Internet et que chacun pouvait les consulter librement. Toutefois, comme le Comité le rappelle souvent, les États parties ont l’obligation non seulement de faire en sorte que la population ait accès à de tels renseignements, mais également de jouer un rôle actif dans leur diffusion et de veiller à ce qu’ils soient connus du plus grand nombre possible de personnes, en particulier de professionnels tels que les magistrats. Ils sont tenus en outre de promouvoir les consultations en vue de l’établissement des rapports périodiques et de susciter dans la société un intérêt pour les travaux de ces organes.

40.M. Amor dit qu’il ne comprend pas bien quel est le statut de la loi sur les cultes et leurs éléments. En effet, il est dit au paragraphe 546 du rapport que le projet de loi a été adopté par le Parlement en 2007 et soumis au Président de la République de Moldova pour être promulgué mais, dans le paragraphe suivant, il continue à être fait référence au «projet de loi». Cela signifie-t-il que le projet de texte n’a pas été promulgué par le Président? Plusieurs autres points mériteraient d’être éclaircis: les droits de propriété des organisations religieuses qui semblaient restreints, le «droit de regard» que les communautés religieuses ont sur les activités de leurs adeptes et la nomination des dirigeants, dont on ne comprend pas si les organisations religieuses n’y procèdent pas ou si elles sont empêchées d’y procéder. En outre, il a été dit d’une part que le non-enregistrement d’un groupe religieux n’empêchait pas la pratique de la religion concernée et d’autre part qu’il existait un projet de loi tendant à abroger les sanctions pour non-enregistrement d’un groupe religieux, ce qui voudrait dire qu’en l’état actuel des choses un groupe non enregistré pourrait faire l’objet de sanctions. Il convient de distinguer l’enregistrement et la manifestation d’une religion. L’enregistrement a pour fonction de donner un statut légal à un groupe religieux. Le non-enregistrement d’un groupe ne devrait en aucun cas l’empêcher de pratiquer ou de manifester sa religion. Le Comité attend avec intérêt la délégation sur tous ces points.

41.M. Bouzid demande si les tribunaux moldoves ont eu à connaître d’affaires de trafic d’armes.

42.Le Président invite la délégation à répondre aux questions des membres du Comité.

43.M. Esanu (République de Moldova) dit que la délégation répondra tout d’abord aux questions relatives à l’administration de la justice. Tout suspect a le droit d’être assisté d’un avocat dès qu’il est placé en détention. Ce droit est garanti par la loi, qui prévoit aussi des sanctions en cas de non-respect. Il est vrai qu’il y a beaucoup de plaintes concernant l’accès des détenus à un avocat, et elles sont toutes examinées, mais il s’agit là d’un problème de fonctionnement. En tout état de cause, des aveux faits dans des conditions non conformes à la loi ne sont pas admissibles devant un tribunal.

44.M. Rusu (République de Moldova) ajoute que tout détenu est informé de ses droits et que la notification est consignée dans un registre. Le procureur peut donc vérifier si les droits du détenu ont été respectés tout au long de la procédure et faire annuler tout acte qui aurait été exécuté dans l’illégalité.

45.M. Esanu (République de Moldova) explique que, d’après la loi, toute personne soupçonnée d’une infraction passe de la responsabilité du Ministère de l’intérieur à celle du Ministère de la justice à l’issue des soixante-douze heures de garde à vue. Il arrive cependant que des détenus restent dans les locaux de la police parce que le Ministère de la justice n’a pas encore de centres de détention provisoire, hormis dans les cinq grandes villes du pays. À l’inverse, il peut arriver qu’une personne soit transférée d’un centre de détention provisoire vers un commissariat, aux fins de l’instruction. De telles situations ne se produiront plus une fois que tous les lieux de détention relèveront du Ministère de la justice.

46.Tout ce qui concerne le fonctionnement de la prison no 13, y compris le nombre de détenus qu’elle peut accueillir, est régi par un décret du Ministère de la justice. Il est vrai qu’il y a quelques années, faute de lits suffisants, les détenus de cet établissement devaient dormir à tour de rôle ce qui est inacceptable; à l’heure actuelle toutefois leur nombre n’est pas supérieur à celui fixé par le décret. Les tuberculeux sont également moins nombreux que naguère et ils sont séparés des autres détenus. Plusieurs établissements disposent d’un quartier qui leur est réservé et un hôpital pénitentiaire a été entièrement rénové en 2008 afin de les accueillir dans des conditions plus favorables à leur guérison.

47.Le non-respect de la loi par certains juges préoccupe vivement le Ministère de la justice, qui appelle régulièrement l’attention du Conseil supérieur de la magistrature sur la question. Les procédures disciplinaires sont traitées par un collège de juges dont le président est nommé sur avis de ce conseil. Dans la pratique, les juges ne sont pas poursuivis, ce que l’on ne peut que regretter; mais le Ministère de la justice ne peut pas intervenir ni imposer lui-même des sanctions car le pouvoir judiciaire est totalement indépendant du pouvoir exécutif. Afin de renforcer l’efficacité du collège de juges, il est prévu de modifier sa composition de façon qu’il soit formé par moitié de juges et par moitié de professeurs d’université. La pénurie de locaux reste un réel problème et il arrive en effet que les juges soient obligés de tenir des audiences dans leur bureau. Un budget de 15 millions de lei a été alloué à l’amélioration des locaux de la justice et plusieurs tribunaux ont déjà été rénovés grâce au soutien des États-Unis dans le cadre du programme «Millennium Challenge».

48.M. Rusu (République de Moldova) dit que des mesures autres que la privation de liberté sont toujours envisagées dans le cas des mineurs. La loi prévoit que les mineurs peuvent être placés dans des écoles spécialisées ou dans des établissements correctionnels, ce qui n’arrive quasiment jamais dans la pratique. Il est envisagé de créer des centres pour les jeunes délinquants, mais ce n’est encore qu’un projet pilote. Les maisons de correction qui existaient autrefois ne sont plus en service.

49.M. Esanu (République de Moldova), passant à la question de la liberté de religion, dit que seules deux demandes d’enregistrement de groupes religieux ont été rejetées. Le Ministère de la justice, qui est directement responsable de cette question, transmettra au Comité toutes les informations utiles à ce sujet, notamment les motifs de refus. Un système d’enregistrement existait déjà en vertu de la loi de 1992 sur les cultes, mais c’était un organe gouvernemental spécial qui en était chargé. Cette loi a été abrogée et remplacée par la loi de 2007 sur les cultes et leurs éléments. La Constitution reconnaît la liberté de religion et un culte peut donc être pratiqué même s’il n’est pas enregistré. Des sanctions ne sont applicables que si la pratique du culte porte atteinte aux droits d’autrui. Des experts ont été chargés d’étudier cette question plus attentivement, en vue de mettre la loi en totale conformité avec la Constitution et le Pacte. Pour ce qui est de la nomination des dirigeants de groupes religieux, la loi dispose clairement que l’État ne peut pas intervenir dans la décision. C’est en réalité au sein des communautés religieuses elles-mêmes que des problèmes se posent, de nombreux fidèles se plaignant que leur direction ne respecte pas leurs droits et nomme les dirigeants religieux sans les consulter. De même, la direction des groupes religieux prétend souvent administrer les biens de la communauté, alors que c’est à la communauté qu’il appartient de le faire. L’État n’impose quant à lui aucune restriction au droit de propriété.

50.La liberté d’expression est garantie aux journalistes conformément aux normes internationales. Une analyse des principales dispositions européennes dans ce domaine l’a confirmé. Les problèmes éventuels tiennent donc non pas à la loi en soi mais à l’application de celle-ci. Les conditions dans lesquelles un journaliste engage sa responsabilité sont clairement énoncées à l’article 16 du Code civil. Les associations de journalistes voudraient que la législation soit modifiée de façon à protéger la presse des poursuites, mais le Gouvernement n’est pas disposé à limiter la responsabilité des journalistes lorsque ceux-ci portent atteinte aux droits d’autrui en propageant des informations erronées. En ce qui concerne Teleradio Moldova, en revanche, il existe bel et bien un grave problème. La loi interdit aux pouvoirs publics d’exercer une influence sur la radio et la télévision publiques mais il en va autrement dans la pratique. Il faut espérer que ce problème ne se posera plus avec le nouveau gouvernement, qui n’a pas de lien avec la direction de Teleradio Moldova.

51.M. Rusu (République de Moldova) dit que la loi sur la prévention et la répression des violences dans la famille vient de faire l’objet d’une évaluation, un an après son entrée en vigueur. Ce texte a introduit beaucoup de nouveautés et il n’est pas douteux que son application, conjuguée aux mesures adoptées fin 2008 dans le cadre du Plan d’action pour la prévention et la répression des violences faites aux enfants, produira des résultats concrets. On constate d’ores et déjà que les tribunaux se servent de la loi et que les plaintes sont moins nombreuses. Trois formations sur la nouvelle loi ont été dispensées aux procureurs et aux travailleurs sociaux.

52.M. Esanu (République de Moldova) indique que des données sur la représentation des minorités nationales au sein de la justice seront communiquées ultérieurement au Comité. Pour ce qui est de l’utilisation des langues minoritaires, le Code pénal, le Code de procédure pénale et le Code civil disposent que les procès se déroulent dans la langue de la majorité des participants, autrement dit en moldove ou en russe. Cependant, tout accusé a le droit de répondre dans sa langue et d’avoir accès aux pièces de procédure dans cette langue. L’entrée en vigueur, en septembre 2009, de la loi sur l’homologation des interprètes judiciaires devrait faciliter la réalisation de ce droit.

53.Aucune affaire de trafic d’armes n’a été portée devant les tribunaux. Ce trafic concerne probablement la Transnistrie, mais le Gouvernement n’a pas d’informations à ce sujet car il n’exerce aucun contrôle sur cette région.

54.Enfin, en ce qui concerne la diffusion des travaux du Comité, le Gouvernement examinera les moyens de jouer un rôle plus actif à cet égard. Pour l’heure, l’élaboration des rapports périodiques soumis aux organes conventionnels fait l’objet d’un décret gouvernemental portant création d’une commission spéciale placée sous la responsabilité du Ministère des relations extérieures et de l’intégration européenne, à laquelle participent tous les ministères concernés.

55.La délégation remercie le Comité de son attention et reste à sa disposition pour toute information complémentaire. La République de Moldova doit faire très rapidement le chemin que d’autres démocraties ont mis plusieurs siècles à parcourir, mais elle est convaincue qu’avec l’aide des mécanismes internationaux elle pourra revoir sa législation de façon à la mettre en conformité avec les instruments internationaux et ainsi mieux protéger les droits de l’homme. Changer les lois n’est toutefois pas le plus difficile: ce qui prend plus de temps, c’est de les mettre en application, et pour cela, il faut changer aussi les mentalités.

56.Le Président dit que le Comité est conscient des difficultés que doit affronter la République de Moldova et espère que ce dialogue, ainsi que les observations finales qui seront publiées à la fin de la session, aideront l’État partie à améliorer la situation dans le pays. Il remercie vivement la délégation de la franchise et de l’ouverture d’esprit avec lesquelles elle a répondu aux nombreuses questions du Comité.

57.La délégation moldove se retire.

La séance est levée à 13 h 5.